Bcen 50 3

Page 1

C.E.N. BULLETIN « EUROPEAN CENTRE FOR NUMISMATIC STUDIES » « CENTRE EUROPÉEN D’ÉTUDES NUMISMATIQUES » VOLUME 50

N° 3

Jean-Claude Richard Ralite* avec la collab. de J.-L. Genevrier, S. Rizzo & G. Gentric – Une bourse de deniers de la République romaine en Livradois (Puy-de-Dôme)

N

ous avons eu connaissance de la découverte en Livradois (Puyde-Dôme) d’un petit ensemble de douze deniers de la République romaine, éparpillés sur une surface de quelques centimètres carrés, qui doivent correspondre à une bourse plutôt qu’à un véritable trésor [1]. La chronologie des émissions s’étend de 116/115 à 42 av. J.-C., ce qui correspond par ailleurs à l’avant dernière grande période d’occultation de trésors (44-27 av. J.-C.) établie par M.H. Crawford [2]. Celle-ci comprend les trésors suivants découverts en France : Lissac (Haute__________ * J.-C. Richard Ralite, directeur de recherche (hre) au cnrs, mmsh, Centre Camille Jullian, Université d’Aix-Marseille, 34jcr@orange.fr [1] Nous adressons nos vifs remerciements à M.H. Crawford, J.-M. Doyen, F. de Callataÿ et J. van Heesch. [2] M.H. Crawford, Roman Republican Coin Hoards, London, 1969, p. 117-131 (en abrégé : Cr.). D’autres trésors ont été découverts depuis mais, sous bénéfice d’inventaire, ils ont été enfouis dans des périodes plus récentes : cf. Trésors Monétaires, 2001-2002. Nous remercions M.H. Crawford de sa collaboration pour deux deniers difficiles à bien identifier.

BCEN vol. 50 no 3, 2013

SEPTEMBRE – DÉCEMBRE 2013 Loire, no 409), Francin (Savoie, no 413), Arbanats (Gironde, no 430) [3], Sauvessanges (Puy-de-Dôme, no 447) [4], Segonzac (Charente, no 453), Amiens (Somme, __________ [3] L. Lotringer, Le trésor de deniers républicains d’Arbanats (Gironde), Trésors monétaires, 20, 2001-2002, p. 5-17, pl. ii-x (960 monnaies de 138 à 39 av. J.-C.). On signalera deux trésors provenant du département de l’Aude publiés récemment : M.-L. Berdeaux-Le Brazidec & M. Feugère, Deux dépôts monétaires d’époque républicaine découverts dans l’Aude, Cahiers Numismatiques, 43 (2006), no 167, p. 25-43 (Lastours : 179/170 av. J.-C. et Villardelle : 104 av. J.-C). On signalera ici deux études sur les marques de contrôle, chiffres ou lettres : R. Witschonke, ﬈e use of die marks on Roman Republican Coinage, rbn, 158 (2012), p. 63-84 et B.E. Woytek, System and Product in Roman Mints from the late Republic to the high Principate : some current problems, rbn, 158 (2012), p. 85-122. Les coins monétaires, toujours rares, ont été recensés par W. Malkmus, Ancient and medieval coin dies : catalogue and notes, dans L. Travaini & A. Bolis (eds), Conii e scene di conazione, Roma, 2008, p. 75-240, auquel on ajoutera un coin de droit de L. Cassius Longinus (Crawford 386/1 : 78 av. J.-C. dans le catalogue Numismatic Fine Arts, Auction xxv, 29/11/1990, no 301) et un coin de revers de C. Naevius Balbus (Crawford 382/1b : 79 av. J.-C.) : A. Geiser & P.-A. Capt, Une trouvaille exceptionnelle : un coin monétaire de la République romaine recueilli dans un oppidum tardo-laténien vaudois, Bulletin de l’Association des Amis du Musée Monétaire Cantonal, Lausanne, 24 (2011), p. 4-14. [4] J.-L. Desnier, Le trésor de Sauvessanges, Trésors Monétaires, i, 1979, p. 11-16.

181


no 458), Beauvoisin (Drôme, no 459), Chantenay (Nièvre, no 461) et Mont-

Beuvray (commune de Moulins-Engilbert, Nièvre, no 471) (fig.1).

Fig. 1 – Carte de localisation des trésors enfouis entre 44 et 27 av. J.-C.

CATALOGUE [5] 1. CN.DOMI, Q.CVRTI, M.SILA, Rome : 116 ou 115 av. J.-C. Tête casquée de Rome à droite, devant : Q.CVR[T], derrière : X

Jupiter dans un quadrige à droite, te– nant un sceptre de la main gauche ; au-dessus un lituus ; au-dessous des chevaux : M. SI [ĭ] ; à l’exergue : ROMA. 3,67 g

Cr. 285/2 __________ [5] Toutes les pièces sont des deniers.

182

2. M. CIPI M. F, Rome : 115 ou 114 av. J.-C. Tête casquée de Rome à droite ; devant : M. CIPI. M. F ; derrière : X

Victoire dans un bige à droite, tenant une palme de la main gauche ; au-dessous des chevaux : un gouvernail ; à l’exergue : ROMA. 3,72 g

Cr. 289/1 3. L. SENTI C. F, Rome : 101 av. J.-C. Tête casquée de Rome à droite ; derrière : [AR G. PVB]

BCEN vol. 50 no 3, 2013


1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

BCEN vol. 50 no 3, 2013

183


Jupiter dans un quadrige à droite dont on aperçoit seulement le bas des pattes antérieures ; au-dessous : [L. SENTI. C.] F. Denier fractionné (¼) : 0,68 g Cr. 325/1 4-5. Q. TITI, Rome : 90 av. J.-C. Tête de Liber à droite portant une couronne de lierre. Pégase à droite ; au-dessous : Q. TITI. 3,70 et 3,66 g Cr. 341/2 6. L. IVLI BVRSIO, Rome : 85 av. J.-C. Tête masculine à droite, derrière une marque de contrôle. Victoire dans un quadrige à droite tenant les rênes de la main gauche ; sous l’équipage : C O ; à l’exergue : [L] IVLI. BVRSO. 3,48 g

Cr. 352/1 7. C. NAE. BALB, Rome : 79 av. J.-C. Tête de Vénus à droite portant un diadème ; derrière : S. C.

Victoire dans un trige à droite, tenant les rênes des deux mains ; à l’exergue : C. NAE. BA[LB] ; au-dessus, marque de contrôle : XXXXVIIII. 3,76 g

Cr. 382/1b 8. C.PISO L. F FRVGI, Rome : 67 av. J.-C. Tête laurée à droite, derrière une marque de contrôle : IXXT ; devant le nez en forme de S une marque en creux. Cavalier à droite portant une palme, C PISO LF FRVG ; à l’exergue, un différent. 3,64 g Cr. 408

9. L. CASSI LONGIN, Rome : 63 av. J.-C. Tête de Vesta à gauche portant un voile et un diadème ; à droite : une vaisselle, à gauche : L Personnage en toge debout à gauche votant avec une tablette portant : V au-dessus d’un ciste ; à droite : LONGIN. III. V. 3,61 g

Cr. 413 10. Q. SICINIVS III VIR, C. COPONIVS PR, atelier itinérant de Pompée : 49 av. J.-C. Tête d’Apollon à droite, la chevelure retenue par un bandeau, devant : Q. SICINIVS, derrière III.VIR. Massue avec la peau de lion et la tête du lion de face, de part et d’autre, à gauche flèches et à droite un arc ; à droite : C. COPONIVS, à gauche [PR. S. C.] 3,51 g

Cr. 444/1b 11. C. VIBIVS C. F C. N PANSA, Rome : 48 av. J.-C. Tête barbue de Pan à droite, dessous [PA] NSA. ; marque d’épreuve en deux cercles sur le sommet du crâne Jupiter assis à gauche, tenant une patère et un sceptre ; à droite : [C. VIBIVS.C. F. C. N], à gauche : IOVIS AXVR 3,67 g

Cr. 449/1a 12. P.CLODIVS M. F III VIR A. P. F., Rome : 42 av. J.-C. Tête laurée d’Apollon à droite, derrière une lyre. Diane debout de face, tenant deux torches allumées, avec un arc et un carquois à l’épaule ; devant : P. CLODIVS. 3,03 g

Cr. 494/23

184

BCEN vol. 50 no 3, 2013


La métrologie donne une masse moyenne de 3,59 g et un écart type de 0,20. On remarque que ces monnaies ont longtemps circulé durant le premier siècle av. J.-C. La date d’enfouissement ou de perte de cette bourse est comparable à celle du trésor de Francin (Savoie) dont le denier le plus récent est aussi de l’année 42 av. J.-C. et le plus ancien de 111-110 av. J.-C. [6] Si l’on regroupe sur une carte (fig. 1) les neuf trésors recensés par M.H. Crawford en France pour la période d’enfouissement 44/27 av. J.-C. (rrch 409-461), la dispersion n’est pas très éloquente : elle est concentrée sur la moitié Sud, de l’Est à l’Ouest, Amiens reste très excentré et on ne trouve pas de trésor de cette période au-delà, vers le Nord, en Belgique [7]. __________ [6] G. Vallier, Quelques mots sur les découvertes archéologiques et numismatiques de Francin, près Montmélian (Savoie), Mémoires de l’Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts de Savoie, 8 (1880), p. 1-16 ; X. Loriot & B. Remy, Corpus des Trésors monétaires antiques de la France, V, RhôneAlpes, 2, Savoie, Paris, 1988, p. 71, no 7. Ce trésor, mis au jour lors de travaux agricoles en 1867, est répertorié par M.H. Crawford, rrch, p. 120, no 413, et prend place dans l’avant-dernière période d’enfouissement de l’auteur soit 44-27 av. J.-C. G. Vallier a étudié 41 monnaies communiquées par le propriétaire du terrain et 4 autres conservées au Musée de Chambéry. Ces 45 monnaies ne représentent qu’une partie de ce trésor qui ﬔt dispersé dès sa découverte (l’auteur estime qu’il devait y avoir le double de monnaies) : elles ne constituent qu’un échantillon et la chronologie est donc adoptée sous réserve. [7] Le petit dépôt de Saint-Mard comportait six deniers de la première moitié du ier siècle av. J.-C. mais n’a été enfoui qu’après 29/27 (M. Thirion, Saint-Mard : trésor (?) de pièces romaines en argent de la République, Le Pays Gaumais, 24-25 (1963-1964),

BCEN vol. 50 no 3, 2013

Ces trésors, avec les aléas bien connus de rapides disparitions après une découverte, ne sauraient donner une image fidèle de la circulation de ces espèces en Gaule car de nombreuses monnaies isolées, d’argent ou de bronze, sont mises au jour régulièrement. On se rappellera la fameuse phrase de Cicéron dans le Pro Fonteio (v,11) : « pas une pièce d’argent ne se déplace en Gaule sans être portée sur les livres des citoyens romains ». Cette allusion peut concerner non seulement la monnaie romaine mais aussi les émissions d’argent qui étaient particulièrement abondantes et qui, souvent, sous le poids d’un victoriat léger ou d’un quinaire, trouvaient immédiatement un rapport fixe avec celles de la République. La bourse du Livradois apporte ainsi son concours à l’étude de la circulation monétaire dans le Massif Central [8] qui n’est entré totalement dans la mouvance romaine qu’à partir du milieu du ier siècle av. J.-C., mais la monnaie par ses liens commerciaux et fiscaux dépasse les frontières…

__________ p. 109-116). Sur la circulation des monnaies en Gaule septentrionale on se reportera à : J.-M. Doyen, Économie, monnaie et société à Reims sous l’Empire romain, Recherches sur la circulation monétaire en Gaule septentrionale intérieure, Reims, 2008, p. 30-43. Comme toute périodisation, celle établie par M.H. Crawford pose le problème du positionnement d’un trésor qui pour une seule monnaie finale peut entraîner toute la thésaurisation dans une phase postérieure à l’essentiel de sa constitution. Mais c’est la loi du genre ! [8] L’archéologie de l’Âge du fer en Auvergne, Lattes, 2007 ou K. Gruel & L. Popovitch, Les monnaies gauloises et romaines de l’oppidum de Bibracte, Bibracte, 2007, permettent de retrouver les études sur les sites et les monnaies du Centre de la Gaule.

185


Jean-Marc Doyen* – Un as inédit de Tibère pour l’atelier de Rome (28-29 apr. J.-C.)

S

ous le règne de tibère (14-37), la production monétaire est clairement séparée dans l’espace. Tandis que Lyon produit en abondance de l’or et de l’argent destinés à circuler dans l’ensemble de l’Empire [1], Rome se cantonne dans la frappe de l’orichalque (sestertii et dupondii) et dans celle du cuivre (asses). 9

La production du bronze dans la capitale s’organise en trois phases chronologiques, qui se chevauchent partiellement.

Fig. 1 – As de Tibère daté TRIBVN POTEST XXIIII – American Numismatic Society [2] 10

De 15/16 (TR POT XVII) à 22/23 (TR POT XXIIII, fig. 1), nous rencontrons des frappes au nom de Tibère ou de Drusus. Après une douzaine d’années d’interruption, ce monnayage reprend en 34/35 (TR POT XXXVI), pour s’achever en 36/37 (TR POT XXXIIX), mais cette fois sans Drusus, mort le 14 septembre 23 [3]. L’hypothèse d’une continuation de la frappe des monnaies portant TR POT XXIIII au-delà de l’année 22/23, autrefois évoquée, a été depuis longtemps écartée par H. Sutherland, sur des bases quantitatives [4]. 11

12

Entre ces deux phases, mais débordant partiellement sur l’une comme sur l’autre, se place un groupe numériquement important, constitué par les émissions au nom du DIVVS AVGVSTVS PATER. Comme l’ont montré les analyses récentes de la composition de leur alliage, leur frappe débute dès 15/16 (ric 70-73). Elle s’interrompt ensuite pendant six années, reprend de 22/23 à 30 (ric 74-81), puis, après un nouvel arrêt, se prolonge entre 34 et 37 (ric 82-83). Certaines de ces séries ﬔrent numériquement considérables : nous pensons par exemple aux asses du type PROVIDENT (ric 81). Même si une partie de ces monnaies semble avoir fait l’objet de frappes décentralisées [5], les quantités récoltées en Italie même montrent le dynamisme de l’atelier de Rome au cours des années 22/23-30. 13

__________ * Je remercie pour leur aide V. Geneviève et Chr. Lauwers. [1] Deniers et aurei auxquels s’ajoutent de rarissimes asses et d’assez fréquents quadrantes : C.H.V. Sutherland, ﬈e Roman Imperial Coinage. Volume I. Revised edition. From 31 bc to ad 69, London, 1984, nos 31-32 ; J.-B. Giard, Le monnayage de l’atelier de Lyon. Des origines au règne de Caligula (43 av. J.-C. - 41 apr. J.-C.), Wetteren, 1983 (Numismatique Romaine xiv), p. 129, no 155 pour les quadrantes et M. Amandry, S. Estiot & G. Gautier, Le monnayage de l’atelier de Lyon (43 av. J.-C. - 41 apr. J.-C.). Supplément II, Wetteren, 2003 (Numismatique Romaine xxi), p. 19-20, nos 154α et β. [2] Inv. 1944.100.3986 : 11,22 g.

186

Nous avons été intrigués par la monnaie suivante : __________ [3] D. Kienast, Römische Kaisertabelle. Grundzüge einer römischen Kaiserchronologie, Darmstadt, 2004³, p. 82. [4] ric i², p. 88, note 6. [5] J.-N. Barrandon, A. Suspène & A. Gaffiero, Les émissions d’as au type Divvs Avgvstvs Pater frappées sous Tibère : l’apport des analyses à leur datation et à leur interprétation, rn, 2010, p. 149-173.

BCEN vol. 50 no 3, 2013


Fig. 2

Fig. 3

TIBÈRE, Rome, 28-29.

Fig. 4

Saint-Léonard [11] – ; American Numismatic Society [12] –. 19

20

TICAESARDIVIAVGFAVGVSTIMPVIII

Tête laurée à g. PONTIFMAXIMTRINVNPOTESPXXX

(sic !) SC

As (cuivre rouge) : 10,39 g – . – 29,0 mm. Patine verte brillante, fortement corrodée et éclatée au centre des deux faces (fig. 2). Cohen [6] – ; ric i1 – ; ric i2 – ; bmc [7] – ; Kraay [8] – ; hcc [9] – ; bncmer [10] – ; 14

16

15

17

18

__________ [6] H. Cohen, Description historique des monnaies frappées sous l’Empire romain communément appelées médailles impériales. Tome premier, Paris, 1880. [7] H. Mattingly, Coins of the Roman Empire in the British Museum. Volume i. Augustus to Vitellius, London, 1923. [8] C.M. Kraay, Die Münzﬔnde von Vindonissa (bis Trajan), Basel, 1962 (Veröff. der Gesellscha﬇ Pro Vindonissa, Band v). [9] A.S. Robertson, Roman Imperial coins in the Hunter coin cabinet. University of Glasgow. i. Augustus to Nerva, Oxford, 1962. [10] J.-B. Giard, Catalogue des monnaies de l’empire romain. ii. De Tibère à Néron, Paris, 1988.

BCEN vol. 50 no 3, 2013

L’authenticité de cette monnaie ne fait aucun doute. De même, son caractère officiel ne paraît pas poser de problème, malgré la présence d’erreurs de poinçonnage de la légende de revers : le style du portrait est d’excellente facture (fig. 3) et la masse se place dans la norme établie par C.H.V. Sutherland [13]. La taille réduite des lettres SC figurant au revers mérite d’être relevée. Sous Caligula, cette proportion semble caractéristique des ateliers impériaux décentralisés implantés en Gaule [14]. Toutefois, on constate dans la capitale d’assez grandes variations dans la taille de ces lettres, et cela dès les émissions des IIIviri monetales [15]. 21

22

23

__________ P.-A. Besombes, Le dépôt monétaire de 22.438 monnaies du gué de Saint-Léonard (commune de Mayenne), Trésors Monétaires xxi, 2003/2004. [12] Catalogue en ligne. [13] ric i2, p. 4, qui donne l’intervalle 9,5-12,0 g. [14] Besombes (op. cit. n. 11), p. 25. [15] C.H.V. Sutherland & C.M. Kraay, Catalogue of the coins of the Roman Empire in [11]

187


Sur le plan purement physique, aucune trace de regravure n’est perceptible même si, apparemment, le ductus des lettres du revers, un peu trop rigide, laisse supposer que la légende a été quelque peu accentuée. L’hypothèse d’une véritable reprise de l’inscription peut du reste être écartée, car la place disponible avant et après le numéral ne permet aucune suppression de signes. De plus, l’espace entre les deux X extérieurs n’autorise entre eux qu’un seul chiffre, à savoir un I, un V ou un X. La forme XVX est impossible, la mention XIX n’est connue ni à Rome, ni à Lyon. Reste donc le XXX, du reste clairement lisible sur cet exemplaire (fig. 4). On peut rapprocher cette version précédemment inconnue de celle figurant au revers d’un as de Rome (?) du type suivant : CAESARAVGVSTVSDIVIFPATER PATRIAE

Tête laurée à dr. PONTIFMAXIMTRIBVNPOTESTXXX autour de SC

Cette pièce anormale figure dans le catalogue de H. Cohen [16], qui cite comme seule référence l’ouvrage édité en 1752 par A. Morellius [17]. Elle est considérée comme « purely apocryphal » par 24

25

__________ the Ashmolean Museum. Part i. Augustus (c. 31 bc – ad 14), Oxford, 1975, pl. 14, no 550 par exemple (sesterce de P. LICINIVS STOLO, type ric 345). Mais il est vrai que nous nous situons là vers 17 av. J.-C. En revanche la même taille réduite figure au revers des dupondii de Caligula du type ric 49 (par ex. ric pl. 14, no 49) qui ne semblent pas, eux, avoir connu une production décentralisée. [16] Cohen2, i, p. 93, no 225. [17] ﬈esauri Morelliani continens XII. Priorum imperatorum Romanornum, a C. J. Caesare ad Domitianus..., Amsterdam, 1752. Le même ouvrage citerait deux autres exemplaires, portant eux aussi des dates « impossibles », à savoir TRIBVN POTEST xxix et XXXI.

188

H. Mattingly [17] et formellement rejetée par C.H.V. Sutherland dans le Roman Imperial Coinage [18]. Il est cependant remarquable que ce revers soit précisément – fautes non comprises – celui de notre exemplaire. Il est tout aussi curieux que cette « falsification » portant un droit d’Auguste, datée des années 7-8 (TR POT XXX), se place elle aussi au cours d’une longue interruption de la frappe du bronze dans la capitale. En effet, à part deux importantes émissions de quadrantes datées de 5 et 4 av. J.-C., les asses, et d’une manière générale les monnaies de bronze, ne sont plus émis dans la capitale entre 6 av. J.-C. (ric 437-442) et 10-12 apr. J.-C. (ric 469471). 26

27

La nouvelle pièce de Tibère s’intègre parfaitement dans le canevas des émissions romaines des années 22/3 à 34. En effet, jusqu’à l’apparition de la mention TR POT XXIIII, correspondant aux années 22/ 23, les asses de Tibère portent une tête nue de l’empereur. Lors de la reprise de la frappe en 34/35 (TR POT XXXVI), les effigies sont laurées. On notera l’erreur de gravure au revers : TRINVN au lieu de TRIBVN et, apparemment, POTESP au lieu de POTEST (fig. 4). De telles fautes apparaissent très régulièrement sur les bronzes officiels de ce règne. Le Roman Imperial Coinage [19] relève par exemple ITR pour ITER. La Bibliothèque nationale de France conserve de son côté un exemplaire portant ITERO, toujours pour ITER (bncmer 83). Un as d’Auguste frappé à Rome en 10-12 et conservé au Cabinet des Médailles de Bruxelles porte TRIBN pour 28

__________ bmc i, p. 50, note 275. [19] ric i2, p. 78, note 271. [20] ric i², p. 97, note 45. [18]

BCEN vol. 50 no 3, 2013


TRIBVN [21] (fig. 5).

Briac Michaux – Relations entre les monnayages d’Iconium et d’Antioche de Pisidie émis pour Gordien III et Tranquilline

29

L Fig. 5 – As d’Auguste (Rome, 10-12) à la légende fautive – Cabinet des Médailles de Bruxelles [22] 30

Bien plus, un coin de Lyon, apparemment officiel et connu par six exemplaires, porte l’invraisemblable titulature AVGVGVSTVS (sic !). Les fautes sont donc particulièrement fréquentes au sein des productions légales du début du premier siècle après J.-C. La nouvelle monnaie, acquise dans un lot chez un marchand de Turin, comprenait d’assez nombreux asses du type ric 81, à la légende PROVIDENT AVG. Une provenance italienne est donc vraisemblable mais non assurée. Cet as apparemment inédit – pour autant qu’il ne s’agisse pas d’une accumulation d’erreurs de gravure – semble montrer qu’entre 22/23 et 34/35, l’atelier de Rome a émis quelques bronzes à l’effigie de l’empereur régnant, à côté des innombrables pièces célébrant Auguste divus [22]. 31

__________ La pièce est citée par le ric sous le n° 471 note. [22] Inv. vc 165 : 10,57 g – % – 27 mm. Je remercie Mme P. Ramakers pour la photographie. [23] Sur la circulation monétaire sous Tibère, voir C. Rodewald, Money in the Age of Tiberius, Manchester, 1976. [21]

BCEN vol. 50 no 3, 2013

e monnayage d’iconium en Lycaonie émis durant le règne de Gordien III, après avoir été étudié par H. von Aulock et publié en 1976 [1] a longtemps été sous-estimé. Si l’ouvrage du grand numismate allemand est encore la meilleure référence, il est grand temps, au vu des monnaies apparues dans le commerce ces dix dernières années, de faire connaître cette évolution et les conclusions qu’il est possible d’en tirer. 32

H. von Aulock ne suggère pas d’année d’émission pour le monnayage d’Iconium. Cependant, le peu de monnaies connues et l’existence d’exemplaires au nom de Tranquilline démontrent que la frappe ﬔt de courte durée et qu’elle se déroula après 241, année du mariage de Gordien et Tranquilline. Les revers symbolisant le départ en guerre contre les Perses sassanides confirment cette théorie. La titulature de droit IMP CAES M ANT GORDIANVS AVG, spécifique des années 238-239, suggère néanmoins que l’émission de monnaies pour ces deux villes devrait être antérieure au mariage… Comment peut-on expliquer cette contradiction ? En comparant les émissions, nous relevons que si la période de production d’Iconium est très courte (tout au plus une cinquantaine de monnaies sont répertoriées), l’émission d’Antioche est très importante, avec près d’un millier __________ [1] H. von Aulock, Münzen und Städte Lykaoniens, Tübingen, 1976 (Istambuler Mitteilungen, Beihe﬇ 16).

189


de monnaies recensées. On peut également comparer le rapport de fréquence entre les monnaies de Gordien et Tranquilline pour les deux villes : près de 5% à Iconium et moins de 0,2% à Antioche. Il est également important de remarquer, comme H. von Aulock le signale dans son ouvrage, qu’un coin d’avers utilisé à Iconium provient d’Antioche de Pisidie comme le prouve le début de fracture du coin sur la monnaie illustrant Aphrodite ci-après (cat. no 5). De plus, le poinçon de buste utilisé pour ce coin « de liaison » entre les villes a également été utilisé pour un second coin d’avers à Antioche. Et finalement la proximité dans la gravure du portrait des monnaies de Tranquilline pour ces deux villes est également surprenante : si ce n’était le diadème qui les sépare, on pourrait penser que le poinçon de portrait a été réutilisé à Iconium. Ces données mises ensemble, on peut supposer que l’émission d’Antioche de Pisidie a probablement commencé en 239-240 quand Gordien quitte Antioche de Syrie après sa revue des troupes qui entraîne la première émission d’antoniniens à Antioche de Syrie. C’est au moment du départ en guerre, en 242, que Gordien repasserait par Antioche de Pisidie réquisitionnant alors un graveur (et un coin d’avers) qu’il entraîne vers Iconium. Sur base de cette hypothèse, on peut alors justifier la liaison de coin entre les deux villes, les variations de volume des émissions et la différence de rareté relative des monnaies de Tranquilline entre les deux cités. Le passage de Gordien par ces deux villes justifie également la présence des lettres S R (SENATVS ROMANVS) sur les revers des monnaies. Et finalement, le fait que le graveur ne soit pas originaire d’Iconium explique aussi que la

190

harpé de Persée, un sabre recourbé qui symbolise la ville, ne soit pas présente sur tous les revers spécifiques à cette cité. CATALOGUE A. Grands bronzes (30-33 mm) 1. IMPCãEMãNTGORDIãNVSãVG Buste lauré, cuirassé et drapé à dr., vu de dos. COLãELHãDICONIENS ; à l’exergue : SR

Prêtre voilé avançant à dr. derrière deux bœufs à bosse. À l’arrière-plan, deux enseignes. À l’exergue une harpé. D₁|R ₁ 2. IMPCãEMãNTGORDIãNVSãVG Même coin de droit que ci-dessus. COLãEL/ã/DRICONIEN ; à l’exergue : SR

Même type que ci-dessus. D₁|R ₂ 3. IMPCAESMANTGORDIANVS Buste lauré, cuirassé et drapé à dr., vu de dos. COLãEL/ã/DRICONIEN ; à l’exergue : SR

Même coin de revers que ci-dessus. D₂|R ₂ 4. IMPCAESMAtGORDIANVSAVG (sic !) Buste lauré, drapé et cuirassé à droite vu de dos. [2] COLãELICONIEN ; à l’exergue : S R Même type que ci-dessus. D₃|R ₃ 33

5. IMPCAESMAtGORDIANVSAVG (sic !) Même coin de droit que ci-dessus. [3] COLãELIãDRIICONIESI ; dans le champ inférieur : S R 34

__________ [2] Coin d’avers lié à un revers d’Antioche de Pisidie. [3] Idem.

BCEN vol. 50 no 3, 2013


Aphrodite nue sortant du bain, assise de dos, les bras levés, les vêtements accrochés sur un arbre. Derrière elle, un loup. D₃|R ₄

D₄|R ₈

10. IMPCAESMAĬGORDIANOS (sic !) Même coin de droit que ci-dessus. COLãELHãDãVGICONIENS ; à l’exergue : S R 6. IMPCAESMAtGORDIANVSAVG (sic !) Même type que ci-dessus. Même coin de droit que ci-dessus. [4] D₄|R ₉ COLEL/HãD/ICONIHS ; à l’exergue : 11. IMPCMANTONIGORDIANVS SR Buste lauré, drapé et cuirassé à droite Athéna assise à gauche sur un boucvu de dos. lier, tenant une Victoire dans la main droite devant elle et un sceptre vertiICONIESIãDRIãCOL ; à l’exergue : S cal de la main droite. À l’exergue une R harpé. Même type que ci-dessus. D₃|R ₅ D₅|R ₈ 35

7. IMPCAESMAĬGORDIANVS (sic !) Buste lauré, cuirassé et drapé à dr., vu de face. ICONIES/IãDRIãCOL ; à l’exergue : S R

Tyché assise à g., une corne d’abondance dans la main gauche et un gouvernail et une harpé dans la main droite. Sous la chaise, une roue. D₄|R ₆ 8. IMPCMANTONIGORDIANVS Buste lauré, cuirassé et drapé à dr., vu de dos. COLãELHã/DãVGICON ; à l’exergue : S R Même type que ci-dessus. D₅|R ₇ 9. IMPCAESMAĬGORDIANOS (sic !) Buste lauré, cuirassé et drapé à dr., vu de face. ICONIESIãDRIãCOL ; à l’exergue : SR

Louve debout à droite allaitant Romulus et Remus se faisant face assis sous elle. Derrière la louve, un arbre. __________ [4] Idem.

BCEN vol. 50 no 3, 2013

12. IMPCAESMAtGORDIANVSAVG (sic !) Buste lauré, cuirassé et drapé à dr., vu de dos. [5] COLAELHã/DRICONIEsI ; dans le champ : S/R Palmier, à gauche, figure féminine assise à gauche sur un bouclier, à droite un captif debout, les mains liées dans le dos appuyé contre le palmier. À l’exergue, une harpé. [6] D₃|R ₁₀ 36

37

13. IMPCAESMAtGORDIANVSAVG (sic !) Même coin de droit que ci-dessus. [7] COLãELH/ãDRICONIE ; à l’exergue : SR 38

__________ [5] Coin d’avers utilisé à Antioche. [6] L’auteur du catalogue de Numismatica Ars Classica, la première maison de vente à avoir vendu cette pièce unique, suggère que ce revers rappelant la série Judea Capta émise 150 ans plus tôt, fait allusion à la légion V dont les vétérans auraient siégés à Iconium mais aussi participé à la guerre contre les Perses qui débute en 242. Pour de plus amples détails, on se reportera aux commentaires des ventes NAC : http:// www/acsearch.info/record.html?id=469644 et Triton XV : http://www.cngcoins.com/ Coin.aspx?CoinID=200026 [7] Coin d’avers utilisé à Antioche.

191


Cybèle assise à droite entre deux lions, la main droite levée. À l’exergue, une harpé. D₃|R ₁₁

COLEL/ICONIE ; dans le champ : S/R

Hercule nu debout à droite, le bras droit dans le dos appuyé sur la hanche et appuyé sur sa massue placée sur un rocher. D₇|R ₁₄

14. IMPCAESMAtGORDIANVSAVG (sic !) Même coin de droit que ci-dessus. [8] COLã/ELHãDICONIHS ; à l’exergue : 18. IMPCAESMANTGORDIANVS SR Buste lauré, cuirassé et drapé à dr., vu de dos. Gordien à cheval galopant à droite, menaçant de sa lance un ennemi COLEL/ICONIE ; dans le champ : S/R suppliant. À l’exergue, une harpé. [9] Même type que ci-dessus. D₃|R ₁₂ D₈|R ₁₄ 39

40

15. IMPCãEMãNTGORDIãNVSãVG Monnaies de Tranquilline Buste lauré, cuirassé et drapé à dr., 19a SãBINIã/TRãNCVLIN (sic !) vu de dos. Buste diadémé et drapé à dr., vu de COLã/ELHãDICONIHS : à l’exergue : face. SR COLãELHã/DRãVGICONIES ; dans le Même type que ci-dessus. champ : S R D₁|R ₁₂ Dikaiosyné debout à g., une corne d’abondance dans la main gauche et B. Moyens bronzes (27 mm) une balance dans la main droite. Une 16. IMPCAEMANTGORDIANVSAVG harpé dans le champ de droite. Buste lauré, cuirassé et drapé à dr., D₉|R ₁₅ vu de dos. 19b SãBINIã/TRãNCVLIN (sic !) ICONI/ENSICOLO ; à l’exergue : S R Buste diadémé et drapé à dr., vu de Tyché assise à gauche, une corne d’aface. bondance dans la main gauche et un gouvernail dans la main droite. Sous COLãELHã/DRãVGICONIES ; dans le la chaise, une roue. champ : S R D₆|R ₁₃ Même coin de revers que ci-dessus. D₁₀|R ₁₅ C. Petits bronzes (20 mm) Monnaies d’Antioche de Pisidie 17. IMPCMA/GORDIANVS (sic !) frappées à l’aide du coin d’avers Buste lauré, cuirassé et drapé à dr., utilisé à Iconium vu de dos. 20. IMPCAESMAtGORDIANVSAVG __________ Buste lauré, cuirassé et drapé à dr., [8] Coin d’avers utilisé à Antioche vu de dos. [9] Cette monnaie semble, tout comme celle CAESANTIOCHCOL ; à l’exergue : S R imitant le type Judea Capta, symboliser le Louve debout à droite, allaitant Rodébut de la guerre contre les Perses en 242 mulus et Remus se faisant face assis comme indiqué par Roma Numismatics sous elle. Limited : http://www.acsearch.info/record. html?id=563641 D₃|R ?

192

BCEN vol. 50 no 3, 2013


21. IMPCAESMAtGORDIANVSAVG (sic !) CAESANTIOCHCOL ; à l’exergue : S R Même coin de droit que ci-dessus. Louve debout à droite, allaitant Romulus et Remus se faisant face assis CAESANTIOCH COL ; à l’exergue: SR sous elle. Derrière la louve, un arbre. Gordien chevauchant à droite, une D₁₁|R ₂₁ lance pointée vers un lion tourné à g. D₃|R ₁₆ 27. IMPCAESMANTGORDIANVSAVG Même coin de droit que ci-dessus. Second coin d’Antioche utilisant le CAESANTI/OCHCOL ; dans le champ : même poinçon de portrait S/R 22. IMPCAESMANTGORDIANVSAVG Gordien en habit militaire avançant à Buste lauré, cuirassé et drapé à dr., dr., une lance dans la main droite et vu de dos. un bouclier dans la main gauche. COLONIACAESARIAANTIOCHIA D₁₁|R ₂₂ Dans le champ : ANTIOC/SR/COLO- 28. IMPCAESMANTGORDIANVSAVG NIA

Même coin de droit que ci-dessus. CAESANTIO/CHCOL ; dans le champ : S/R Même type que ci-dessus. D₁₁|R ₂₃

D₁₁|R ₁₇ 23. IMPCAESMANTGORDIANVSAVG Même coin de droit que ci-dessus. ANTIOCHIA COLONIA CAESARIA

Dans le champ : ANTIOCH/SR/CO-

29. IMPCAESMANTGORDIANVSAVG Même coin de droit que ci-dessus. D₁₁|R ₁₈ CA/ESAN/TIOCHCOL ; à l’exergue : S R 24. IMPCAESMANTGORDIANVSAVG Gordien chevauchant à droite, une Même coin de droit que ci-dessus. lance pointée vers un lion tourné à g., percé d’une flèche. CAESAN/TIOCHCOL ; dans le champ : S/R D₁₁|R ₁₆ Gordien debout à gauche, tenant une Monnaie de Tranquilline enseigne militaire de la main gauche et sacrifiant au moyen d’une patère 30. SABITRANQVILLINAEAV tenue de la main droite, au-dessus Buste drapé à droite vu de face. d’un autel allumé. COLONI[ANTIO]CH ; dans le champ : D₁₁|R ₁₉ SR LONIA

25. IMPCAESMANTGORDIANVSAVG Même coin de droit que ci-dessus. ANTIOCHI/A ; à l’exergue : S R Gordien en toge debout à g., tenant un scipio et couronné par une victoire, dans un quadrige à g. précédé de trois soldats. D₁₁|R ₂₀ 26. IMPCAESMANTGORDIANVSAVG Même coin de droit que ci-dessus. BCEN vol. 50 no 3, 2013

Deux cornes d’abondance entourant un caducée. [10] D₁₂|R ₂₄ 41

__________ Seule monnaie d’Antioche de Pisidie connue émise au nom de Tranquilline, le coin de revers est également attesté pour Gordien III mais absent de l’ouvrage de Krzyzanowska.

[10]

193


Fig. 1 – Auktion Gorny & Mosch 156, 5/iii/2007, n° 1792 : 22,91 g – , – 35 mm

Fig. 2 – Vente eBay Lanz 370433256-795 : 25,2 g – ! – 34/35 mm

Fig. 3 – D’après von Aulock 1976, Taf. 8, no 327 : 24,32 g – ! – 34,1 mm

Fig. 4 – Collection de l’auteur : 18,01 g – . – 32,9 mm

Fig. 5 – D’après von Aulock 1976, Taf. 8, no 330 : 22,14 g – ! – 32,3 mm

Fig. 6 – Collection de l’auteur : 24,22 g – . – 33,9 mm

194

BCEN vol. 50 no 3, 2013


Fig. 7 – D’après von Aulock 1976, Taf. 9, no 333 : 27,52 g – %– 33,5 mm

Fig. 10 – Collection Charley Rhodes : 21,58 g – . – 37 mm

BCEN vol. 50 no 3, 2013

Fig. 9 – eBay live auction Fig. 8 – Vente eBay TriVilmarcollectibles pondius 320085581133 : 110071125664 : 28,07 g – . poids inconnu – ! – 34 mm – 34 mm

Fig. 11 – ArtCoins Roma 5, 14/v/2012, no 681 : 28,82 g – . – 34 mm

Fig. 12 – Triton xv, 3-4/i/ 2012, no 1416 : 17,72 g – . – 33 mm

195


196

Fig. 13 – Schulten, 11-12/ iv/1988, no 937 : 22,60 g – %– 32 mm

Fig. 14 – Busso Peus Nachf. Fig. 15 – Roma Numismatics 410, 30/x/2013, no 717 : Limited 3, 31/iii/ 2012, no 30,68 g– 32 mm 521 : 29,18 g – . – 35 mm

Fig. 16 – Collection Charley Rhodes : poids inconnu – . – 26/27 mm

Fig. 17 – D’après von Aulock 1976, Taf. 9, no 346 : 4,71 g – . – 22,5 mm

Fig. 18 – Auktion Schulten, 11-12/iv/1988, no 938 : 4,83 g – #– 20,4 mm

BCEN vol. 50 no 3, 2013


Fig. 19a – cng eauction 227, 10/ii/ 2010, no 350 : 6,07 g – #– 22 mm

Fig. 19b – D’après von Aulock, 1976, Taf. 9, no 347 : 7,10 g – . – 23 mm

Fig. 22 – eBay ancientauctionhouse.com 110382504094 : poids inconnu – ! – 33 mm

BCEN vol. 50 no 3, 2013

Fig. 20 – A. Krzyzanowska, Monnaies coloniales d’Antioche de Pisidie, Varsovie, 1970 (Travaux du Centre d’Archéologie Méditerranéenne de l’Académie Polonaise, 7). Revers non illustré – 33 mm

Fig. 23 – A. Krzyzanowska, op. cit. [Fig. 20] – 34 mm

Fig. 21 – Collection de l’auteur : 21,14 g – #– 34 mm

Fig. 24 – cng 257, 8/i/2011, no 261 : 23,58 g – 0– 34 mm

197


198

Fig. 25 – eBay ancientauctionhouse.com 110380831099 : poids inconnu – #– 34 mm

Fig. 26 – Coll. de l’auteur : 23,88 g – . – 34 mm

Fig. 27 – Coll. de l’auteur : 24,47 g – 0– 34 mm

Fig. 28 – eBay Ancientauctionhouse.com 120421697964 : 23,6 g – . – 34 mm

Fig. 29 – Vente ma-shops Münzen Sänn : 26,4 g – 34 mm

Fig. 30 – Collection de l’auteur : 4,04 g – . – 22 mm

BCEN vol. 50 no 3, 2013


COLãELHãDICONIENS COLãEL/ã/DRICONIEN

D₁₂ SABINIATRANQUILLINAEAV

D₁₁ IMPCAESMANTGORDIANVSAVG

D₁₀ SãBINIã/TRãNCVLIN

D₉ SãBINIã/TRãNCVLIN

D₈ IMPCAESMANTGORDIANVS

D₇ IMPCMA/GORDIANV

D₆ IMPCAESMANTGORDIANVSAVG

D₅ IMPCãNTONIGORDIãNVS

3

D₄ IMPCAESMAĬGORDIANOS

1 2

D₃ IMPCAESMAtGORDIANVSAVG

D₂ IMPCãEMãNTGORDIãNVSãVG

R₁ R₂ R₃ R₄ R₅ R₆ R₇ R₈ R₉ R ₁₀ R ₁₁ R ₁₂

D₁ IMPCãEMãNTGORDIãNVSãVG

grands bronzes

4 5 6

COLãELICONIEN CO/Lã/ELIãDRIICONIESI COLEL/HãD/ICONIHS ICONIES/IãDRIãCOL

7

COLãELHã/DãVGICON

8 9 11 10

ICONIESIãDRIãCOL COLãELHãDRãVGICONIENS COLãELHã/DRICONIEsI COLãELH/ãDRICONIE COLã/ELHãDICONIHS

15

12 13 14

moyens bronzes

R ₁₃ ICONI/ENSICOLO

16 petits bronzes

R ₁₄ COLEL/ICONIE

17 18 tranquilline

R ₁₅ COLãELHã/DRãVGICONIES

19a 19b antioche de pisidie

R? R ₁₆ R ₁₇ R ₁₈ R ₁₉ R ₂₀ R ₂₁ R ₂₂ R ₂₃ R ₂₄

CAESANTIOCHCOL CAESAN/TIOCHCOL COLONIACAESARIAANTIOCHIA ANTIOCHIACOLONIACAESARIA CAESAN/TIOCHCOL ANTIOCHI/A C/AESANTIOCHCOL CAESANTI/OCHCOL CAESANTIO/C/HCOL COLONI/ANTIOCH

BCEN vol. 50 no 3, 2013

20 21

29 22 23 24 25 26 27 28 30

199


Nicolas Tasset – Un sceau de plomb datant de la période d’accession au pouvoir de l’empereur Philippe I (244 apr. J.-C.)

L

e sceau que nous publions dans cet article date apparemment de la période d’accession au pouvoir de Philippe Ier, soit de l’année 244 apr. J.-C. Si notre identification est correcte, il est d’une importance historique certaine car il met en avant le problème de légitimité dont souffrait Philippe à la mort de Gordien III, et son besoin de reconnaissance par le Sénat romain.

échelle 3 : 2

Description Bustes radiés affrontés de Gordien III, tourné à droite, peut-être cuirassé [1], et de Philippe Ier, cuirassé, tourné à gauche. Entre les portraits, verticalement, les lettres SPQR placées les unes au-dessus des autres. Au revers, trace de passage d’une lanière de cuir ou de corde. 42

Sceau en plomb, de facture probablement orientale : 6,8 g – 21 mm. Références M.C.W. Still, Roman Lead Sealings, University College London, Institute of Archaeology, London, 1995, manque. Die antiken Tesseren im Kestner-Museum Hannover. Jetons, Spiel- und Verteilungsmarken im alten Rom, Kestner-Museum, Hannover, 1991 (Kestner-Museum Hannover, Sammlungskataloge 10), manque. __________ [1] Gordien III porte peut-être ici la lorica squamata.

200

On observe que la marque SPQR (Senatus PopulusQue Romanus) est située dans le champ central afin de souligner un trait d’union entre les deux personnages. Cette formule officialise en quelque sorte la passation de pouvoir entre Gordien III, décédé au combat sans héritier direct, et Philippe Ier, son préfet du prétoire. Par cette marque de reconnaissance, Philippe affirmait que la continuité du pouvoir s’était établie de manière parfaitement légitime et légale. Car de fait, ce sceau renferme un symbolisme qui a pu très tôt, peut-être même avant sa reconnaissance effective par le Sénat, être instrumentalisé par le successeur du jeune Gordien dans le but d’asseoir de facto son autorité sur l’armée et l’État. Par ailleurs, Philippe Ier y apparaît en cuirasse, vu de trois-quarts avant, dans une attitude de soldat ; il se montre donc aux côtés du déﬔnt empereur qui reçut à Rome les honneurs de l’apothéose, comme un véritable chef de guerre apte à reprendre les rênes du pouvoir et à protéger l’Empire de ses ennemis. Le contexte historique Gordien III régna de 238 à 244. Jeune empereur âgé de treize ans à peine lorsqu’il monta sur le trône [2], il doit son 43

__________ [2] X. Loriot, Les premières années de la grande crise du iiième siècle. De l’avènement de Maximin le ﬈race (235) à la mort de Gordien III (244), in H. Temporini (ed.), Aufstieg und Niedergang der römischen Welt. Geschichte und Kultur Roms im Spiegel der neueren Forschung. ii, 2: Principat, [Politische Geschichte (Kaisergeschichte)], Berlin, 1975, p. 657-787, p. 725, note 525 : « Son dies natalis nous est indiqué par les Fasti Philocali (cil, i, 1, p. 255-256 = I. Ital., xiii, 2, p. 239) et les Fasti Polemii Silvi (cil, i, 1, p. 257 = I. Ital., xiii, 2, p. 264). Étant donné qu’il avait environ treize ans lors de son élévation à l’Empire (Hérodien, viii, 8, 8), l’année de sa naissance ne peut être que 225 (s’il était âgé de treize ans révolus) ou 226 (s’il était dans sa treizième année) ».

BCEN vol. 50 no 3, 2013


accession à la renommée de sa famille [3]. En effet, les Gordien de la Gens Antonia jouissaient déjà d’une forte influence à Rome et dans les provinces, particulièrement en Afrique [4]. Les deux premiers Gordien, maîtres de l’Afrique Proconsulaire, ﬔrent élus empereurs à la suite d’une révolte aristocratique contre les mesures fiscales et des dons en nature imposés par le souverain en titre, Maximin Ier dit le ﬈race, militaire talentueux, sorti du rang et élu empereur trois années auparavant par les soldats. Celui-ci avait été acclamé par la troupe après l’assassinat d’Alexandre Sévère et de sa mère Julia Mamaea au Vicus Britannicus, près de Mayence. Alexandre Sévère avait été accusé de laxisme dans la conduite de la guerre contre les Alamans et en avait subi le prix [5]. Maximin était en fait haï par une part importante des sénateurs tant pour ses origines étrangères et modestes que pour ses prises de décisions quant à la gestion des ressources de l’Empire [6]. Les im44

45

46

47

__________ [3] Loriot, op. cit., p. 726 ; Vita Gord., xxii, 6 : « Amabatur autem merito avi et avunculi sive patris, qui ambo pro senatu et pro p. R. contra Maximinum arma sumpserunt et militari vel morte vel necessitate perierunt ». [4] Concernant Gordien Ier : à en croire Hérodien, vii, 5, 2, et Zonaras, xii, 17, il était âgé de presque 80 ans. Ce qui le ferait naître vers 159 sous le règne d’Antonin le Pieux. Concernant Gordien II : personnage dont nous n’avons que peu de renseignements. Il est le fils et lieutenant de Gordien Ier. À noter que sa titulature est identique à celle de son père, exceptions faites des titres de Pontifex Maximus et de Pater Patriae qui échurent naturellement à Gordien Ier. D’après l’Histoire Auguste, il était âgé de 46 ans en 238 (Vita Gord., xv, 2) et serait donc né vers 192, à la fin du principat de Commode. [5] Ce qui était un des plus grands reproches des soldats : un empereur qui se situe loin de leurs problèmes et de leurs espoirs : Cf. Hérodien, vi, 7, 10 et 8, 4. [6] Pour reprendre les propres mots de Loriot, op. cit., p. 687 : « Il oscilla sans cesse entre une rigueur extrême, vite dénoncée

BCEN vol. 50 no 3, 2013

pôts très lourds qu’il fit peser sur celuici lui garantissaient le paiement et l’entretien de son armée basée sur le limes danubien [7]. 48

Les deux premiers Gordien, après avoir été reconnus par le Sénat en opposition à Maximin, connurent une fin tragique après leur défaite à Carthage contre la iiième légion Augusta commandée par le gouverneur de Numidie Capelianus, resté fidèle à l’empereur-soldat [8]. Après l’échec de cette première tentative de reprise en main du pouvoir par les milieux sénatoriaux, deux sénateurs, Pupien et Balbin, ﬔrent désignés pour maintenir l’ordre à Rome et se préparer à rencontrer Maximin sur le champ de bataille en Italie du Nord [9]. Cette bataille n’eut jamais lieu. En effet, Maximin et son fils Maxime ﬔrent victimes d’un complot de l’armée et assassinés, un certain nombre de militaires reﬔsant de mettre à sac les grandes cités d’Italie [10]. Pupien et Balbin, élus co-empereurs, ﬔrent obligés sous la pression d’une partie de la classe dirigeante et du peuple romain, d’octroyer au jeune Gordien, petit-fils de Gordien Ier et resté à Rome lors du conflit, le titre de César, c’est-à-dire d’héritier légitime [11]. La popularité de cette famille était de fait à son zénith 49

50

51

52

__________ comme une « tyrannie » par ceux qui en ﬔrent les victimes, et une tolérance méprisante qui trahit son impuissance à maîtriser l’opposition larvée, mais irréductible de ses adversaires ». [7] Hérodien, vii, 3, 3 à 5. [8] Ibid., vii, 9, 4 et Ammien Marcelin, xxvi, 6, 20. [9] Hérodien, vii, 10, 3. [10] Ibid. [11] Selon Loriot, op. cit., p. 710, le peuple de Rome se massa dans ce but devant la curie mais c’est sans compter sur le témoignage d’Hérodien, vii, 10, 5, selon lequel ces événements se produisirent plus en avant du Forum, sur le Capitole et sur ses chemins d’accès.

201


avec la mort héroïque de ses parents en Afrique et la volonté d’une faction importante de Romains de revenir à une idée plus dynastique du pouvoir. Pupien et Balbin finirent également par être tous deux assassinés par des prétoriens dont les pouvoirs avaient été restreints et qui avaient tout intérêt à placer sur le trône un enfant plus manipulable afin de continuer à affirmer leur emprise sur Rome [12]. Il est également vrai que le conflit d’ordre politique opposant les deux empereurs du Sénat n’avait pas arrangé les choses, chacun voulant exercer sa prédominance sur l’autre en finissant par alimenter les suspicions de complot [13]. Gordien III devint ainsi le seul empereur en titre et bien vite, il fallut instituer, au vu de son jeune âge, un conseil de régence. Celuici ﬔt constitué de sa mère et de sénateurs [14]. L’année 241 vit entrer dans l’entourage immédiat de l’empereur un nouveau préfet du prétoire, Timésithée, homme d’expérience aussi bien militaire 53

54

55

__________ Hérodien, viii, 8, 1-8 ; Vita Max. et Balb., xiv, 2 (reprend le témoignage d’Hérodien) : « Qua re occasio militibus data est intelligentibus facile discordes imperatores posse interfici. » ; Aur. Victor, De Caes., xxvii, 6 : « tumultu militarium Clodio Caelioque Romae intra palatium caesis, Gordianus solus regnum obtinuit » ; Eutrope, Bréviaire, ix, 2 (qui précise uniquement qu’ils ﬔrent tués dans le palais et qui tente de minimiser l’importance de Pupien et Balbin au profit du seul Gordien) ; Epit. de Caes., xxvi, 2 (qui précise seulement qu’ils ﬔrent mis à mort). [13] Hérodien, viii, 8, 1. Cette hypothèse concernant les dissensions entre les deux empereurs est reprise par les plus grands auteurs (dont Loriot, op. cit., p. 719 et Christol, op. cit., p. 90). Toutefois, D. Roques, Hérodien, p. 283, note 51 souligne le fait qu’Hérodien jusqu’à ce passage n’a jamais fait allusion à cette mésentente. Pour cet auteur, cette explication aurait pu être ajoutée par Hérodien qui aurait à cette occasion davantage cherché à démontrer ses idées qu’à évoquer les faits. [14] Christol, op. cit., p. 90. [12]

202

que politique et qui accepta de prendre le jeune homme sous son aile à la condition qu’il se maria avec sa fille Tranquillina [15]. Timésithée s’adjoint deux lieutenants dans sa tâche : M. Iulius Philippus [16] (le ﬔtur empereur Philippe Ier) et le frère de celui-ci, M. Iulius Priscus [17]. Cette arrivée dans le conseil impérial restreint d’un stratège de talent coïncide avec la période où l’Empire se voit à nouveau menacé par les peuples du Nord et de l’Est. En effet, les Germains au Nord et les Perses sassanides en Orient tentent maintenant de reprendre l’ascendant sur Rome en menant des actions aux frontières [18]. Timésithée, après s’être montré bon administrateur de l’Empire, se doit de défendre ses intérêts aux confins des territoires sous domination romaine. Au printemps 242, les Carpes entraînèrent avec eux les Sarmates Roxolans et peut-être aussi une faction de Goths dans l’Illyricum [19]. Timésithée arriva à rétablir la situation dans cette région avant de mener une expédition contre les Perses sassanides qui, sous l’égide de leur souverain Ardashir, avaient envahi la Mésopotamie et occupé les villes de Carrhes et Nisibe [20]. L’essentiel des troupes romaines 56

57

58

59

60

61

__________ Vita Gord., xxiii, 6 ; Eutrope, ix, 2, 2 ; Zosime, i, 17, 2. (Seul Eutrope nous indique son nom pour les sources littéraires.). Ce nom est attesté à la fois par l’épigraphie et par la numismatique. Par ailleurs, on estime généralement que Tranquillina devait être âgée d’une trentaine d’années lors de cette cérémonie. [16] Le ﬔtur empereur Philippe est probablement né vers 204 sous le règne de Septime Sévère (Chron. Pasch., éd. Bonn, p. 243). [17] Loriot, op. cit., p. 741. [18] Ibid., p. 742. [19] Ibid., p. 557. [20] D’après les deux compilateurs byzantins Georges le Syncelle, éd. Bonn, p. 681 et Zonaras, xii, 18. Cependant, les Perses sassanides ne semblent pas s’être emparés d’Édesse ni d’Hatra car une présence militaire [15]

BCEN vol. 50 no 3, 2013


fait alors marche vers l’Orient. Après une première offensive qui donna des espoirs aux Romains survint la mort de Timésithée, emporté par la maladie sans doute peu après la victoire de Rhesaena, vers mai-juin 243 [21]. 62

Philippe le remplaça à son poste aux côtés de Gordien III [22]. Après avoir franchi l’Euphrate à hauteur de Circesium, Gordien et son état-major atteignirent la cité-forteresse de Doura-Europos [23], dernier bastion romain avant d’entrer en terre sassanide. 63

64

Utilisant cette ville comme base arrière, l’armée romaine s’avança en territoire ennemi, longeant la vallée de l’Euphrate « et réoccupant quelques points fortifiés qui avaient jadis été bâtis sous Septime Sévère mais qui par la suite avaient été __________ romaine y est attestée grâce à l’épigraphie jusque 240-241 date retenue encore aujourd’hui pour la prise de la cité d’Hatra par les Perses : une garnison romaine y était déjà stationnée au plus tard en 235 (cf. Ann. Epigr., 1958, 238) et elle semble encore être présente au début du règne de Gordien III (cf. Ann. Epigr., 1958, 239 et 240). [21] Zosime, i, 18. Il est en tout cas certain que le beau-père et mentor de Gordien III mourut durant l’année 243 (Cf. Vita Gord., xxix, 1). Toutefois ni le lieu ni la date exacte de sa mort ne sauraient être précisés. [22] L’hypothèse de Loriot, op. cit., p. 741, notes 633-635 nous semble correspondre le plus à la logique des faits exprimés par les témoignages écrits qu’ils soient littéraires ou épigraphiques. Cf. Loriot, op. cit., p. 770, note 830. Cependant, bien des auteurs envisagent encore les choses autrement : Cf. M. Sartre, D’Alexandre à Zénobie. Histoire du Levant antique ive siècle av. J.-C. – iiie siècle apr. J.-C., Paris, 2003², p. 965 : « […] l’armée romaine s’apprête à marcher sur Ctésiphon sous le commandement du nouveau préfet du prétoire M. Iulius Philippus, dont le frère C. Iulius Priscus occupe lui aussi déjà les mêmes fonctions ». [23] Cette arrivée à hauteur de Doura s’est vraisemblablement faite entre l’automne et l’hiver 243. Cf. Loriot, op. cit., p. 770.

BCEN vol. 50 no 3, 2013

perdus [24] ». Elle effectua ainsi plus de 200 kilomètres avant de rencontrer l’armée perse à Mésichè, peut-être à la suite d’un piège tendu par la cavalerie sassanide [25]. Une grande bataille s’ensuivit qui tourna finalement à l’avantage des troupes de Shapur Ier, qui avait entre-temps succédé à son père. Gordien III mourut (peu de temps après ?) des suites de ses blessures, vers la fin février – tout début mars 244 [26]. Il était alors âgé d’à peine dix-huit ou dix-neuf ans [27] et avait régné durant six années sur l’Empire romain. Devant le fait accompli, le préfet du prétoire Philippe ﬔt acclamé par les troupes. Les sources livrent plusieurs versions différentes des circonstances de la mort de Gordien III et de l’avènement de Philippe Ier [28]. On peut toutefois en dégager deux grandes veines historiographiques : 65

66

67

68

69

La première tendance est celle de la tradition occidentale qui veut que Philippe assassinât Gordien III pour lui succéder à la tête de l’Empire (que ce soit avant ou après la campagne militaire). Les sources faisant partie de ce groupe sont : __________ Christol, op. cit., p. 99. [25] Le lieu de la bataille a été identifié par Maricq, op. cit., p. 112-118 à l’endroit qu’Ammien Marcellin, xxiv, 2, 9 (cf. Zosime, iii, a3, 3) nommait « Pirisabora », aujourd’hui al-Anbâr, à une quarantaine de kilomètres à l’ouest de Bagdad. [26] Le dernier rescrit de Gordien III est daté du 13 janvier 244 (Cod. Just., vi, 10, 1) et le premier de Philippe est, quant à lui, daté du 14 mars (Cod. Just., iii, 42, 6). Par ailleurs, les dernières inscriptions où est mentionné le nom de Gordien III sont deux graffiti d’Égypte respectivement datés du 3 et du 25 février 244 (Sammelbuch griechischer Urkunden aus Ägypten, nos 3493 et 8487). [27] Il était né le 20 janvier 225 ou 226 apr. J.-C. : voir supra note 2. [28] Cf. Loriot, op. cit., p. 770-772 en ce qui concerne les diverses variantes de cet épisode. [24]

203


Aurelius Victor [29], l’Epitome de Caesaribus [30], la Vita Gordianorum [31], Ammien Marcellin [32], Eutrope [33], Festus [34], Zosime [35], Saint Jérôme [36], Orose [37], Georges le Syncelle [38], Zonaras [39] et Jean d’Antioche [40]. 70

71

72

73

75

74

76

77

78

79

80

81

La deuxième tendance figure dans l’œuvre de Zonaras. Plusieurs autres épitomateurs byzantins tels que Georges Hamartole [41] ou Cedrenus [42] tiendront les mêmes propos. Cette tradition tend à innocenter Philippe en faisant périr Gordien III lors d’un combat ou des suites d’un combat livré contre les Perses [43]. 82

83

84

__________ Aur. Victor, Liber de Caesaribus, xxvii, 8 : « Ibi gesto insigniter bello, Marci Philippi praefecti praetorio insidiis periit sexennio imperii ». [30] Epit. de Caes., xxvii, 2 : « Apud Ctesiphontem a Philippo praefecto praetorio, accensis in seditionem militibus, occiditur anno vitae undevicesimo ». [31] Vita Gord., xxix-xxx. [32] Ammien Marcellin, Res Gestae, xxiii, 5, 17 : le témoignage de cet auteur fait partie d’un discours fictif attribué à l’empereur Julien II qu’il aurait prononcé au printemps 363 lors de son expédition contre les Perses. Ammien Marcellin et Eutrope faisaient en outre partie du voyage. [33] Eutrope, Bréviaire, ix, 2 : « fraude Philippi » après la campagne militaire. [34] Festus, Bréviaire, xxi, qui reprend les propos d’Eutrope. [35] Zosime, Histoire Nouvelle, i, 18-19. [36] Saint Jérôme, Chronique, éd. Schöne, p. 181. [37] Orose, Histoires, vii, 19, 5. [38] Georges le Syncelle, Chronique, éd. Bonn, p. 681. [39] Zonaras, Epitomé historion, xii, 18. [40] Jean d’Antioche, éd. Müller, fragment no 147. [41] Cf. G. Hamartole, Chronicon breve, Leipzig, éd. Teubner, 1871, p. 461. [42] Cf. G. Cedrenus, Chronique, in Compendium Historiarum, éd. I. Bekker, vol. i, Bonn, 1838, p. 451. [43] S. Mazzarino, La tradizione sulle guerre tra Shapuhr I e l’Impero romano, Act. Ant. [29]

204

Selon Zonaras, xii, 17 [44], Gordien III se serait fracturé la cuisse en tombant de cheval et aurait succombé à ses blessures peu de temps après avoir regagné le territoire romain. Cette version des faits est celle qui coïncide le mieux avec les Res Gestae Divi Saporis figurant sur le bas-relief de Naqsh-i Rustam [45] : « Et aux confins de l’Asôrestân, à Mésichè, il y eut une grande bataille rangée. Et le César Gordien périt, et nous anéantîmes l’armée romaine. Et les Romains proclamèrent Philippe César. Et le César Philippe vint à composition et, pour rançon de leur vie, il nous donna 500.000 deniers (= dinars, monnaie d’or équivalent à l’aureus romain) et il devint notre tributaire. Et nous, pour cette raison, nous avons rebaptisé Mésichè Péroz-Sapor [46]. » 85

86

87

Il est évident que ce dernier témoignage, qui fait périr le jeune Gordien des coups portés par l’armée perse, disculpe totalement Philippe de cet assassinat. Cependant, il existe une dernière version : celle du xiiième livre des Oracula Sibyllina, éd. Geffcken, vers 19-20 [47] : « en 88

__________ Acad. Sc. Hung., xix, 1971, p. 72-73 et 79, fait remonter cette tradition à l’anonymus post Dionem. Christol, op. cit., p. 99 confirme ses propos. Loriot, op. cit., p. 772, note 839 suggère quant à lui que « la tradition suivie par Zonaras remonterait, en dernière analyse, à un historien du iiième siècle qu’il identifie à Nicostrate de Trapézonte (cf. F. Jacoby, F.G.H., iia, no 98) ou Eusèbe (idem, no 101) ». [44] Cette version est très différente de celle qu’il exprime en xii, 18. Zonaras ne s’est en fait pas aperçu qu’il s’agissait des mêmes événements (le passage xii, 17 relate selon lui la fin de Gordien II). Il existe une variante de ce récit dans le Chronicon Paschale, éd. Bonn, p.503 (où l’empereur est identifié à tort à l’un des deux Philippe). [45] Cf. A. Maricq, « Res Gestae Divi Saporis », i, Le texte grec, in Syria, xxxv (1958), p.307. [46] Pour l’identification du lieu de la bataille, voir supra note 24. [47] A. Maricq avec la coll. de E. Honigmann, Recherches sur les « Res Gestae Divi Sapo-

BCEN vol. 50 no 3, 2013


effet, victime d’un compagnon d’armes, il [Gordien III] périt au combat [48] d’un fer étincelant ». 89

Cette ultime version tente en fait de concilier les deux traditions : si Gordien III meurt effectivement sur le champ de bataille, c’est du fait de la trahison de Philippe [49]. Néanmoins, grâce aux brillants travaux de A. Maricq [50] et M. Sprengling [51], il est désormais établi que l’armée de Gordien III s’avança jusqu’aux portes de Ctésiphon et qu’elle engagea un combat contre les forces sassanides qui dut être d’une extrême violence. Ce ﬔt la première fois dans toute l’histoire de l’Empire qu’un au90

91

92

__________ ris », Bruxelles, 1953 (Mémoires de l’Académie Royale de Belgique, Cl. Lettres, 47, 4), p. 119, note 1 : voir également le commentaire de D.S. Potter, Prophecy and History in the Crisis of the Roman Empire. A Historical Commentary on the ﬈irteenth Sibylline Oracle, Oxford, 1990. [48] Cf. Maricq, op. cit., p. 118-119 « en tadzei » signifie « dans le rang ; au combat ». Ce terme est d’ailleurs repris pour qualifier les circonstances de la mort de Trajan Dèce contre les Goths (cf. Oracula Sibyllina, vers 100-101). [49] À noter que P. Petit dans son Histoire générale de l’Empire romain, tome 2 : La crise de l’Empire. Des derniers Antonins à Dioclétien, Paris, 1974, p. 170 évoquait lui-même cette théorie. Comme le suggère Loriot, op. cit., p. 773 : la « fraus Philippi » de la tradition occidentale aurait pu naître et se développer au départ d’une grave erreur tactique du nouveau préfet du prétoire ou de l’état-major car ajoute-t-il : « il est naturel que l’orgueil national romain ait cherché à rejeter la responsabilité de la défaite sur celui qui en ﬔt le principal bénéficiaire. » Selon S. Mazzarino, op. cit., p. 76-78, l’armée romaine aurait pu tomber dans un piège tendu par la « redoutable cavalerie sassanide ». Christol, op. cit., p. 99 se range à cet avis en décidant de ne pas tenir compte des propos de l’Oracula Sibyllina. [50] Maricq, op. cit. [51] M. Sprengling, ﬈ird Century Iran: Sapor and Kartir, Chicago, 1953, p. 81.

BCEN vol. 50 no 3, 2013

guste perdait la vie au combat en terre étrangère, face à un peuple qualifié de barbare par les Romains. Certains auteurs ont pourtant maintenu le fait que Philippe n’était pas totalement étranger à cette mort. Ceux-ci prennent en compte le fait que nulle part dans l’inscription des Res Gestae Divi Saporis, il n’est question pour Shapur de revendiquer personnellement la mort de Gordien III [52] alors qu’il y prétend avoir capturé lui-même « de ses propres mains » l’empereur Valérien I [53]. Toutefois, le fait que les bas-reliefs de Bîchâpour et de Naqsh-i Rustam représentent Gordien III étendu, la main recouvrant sa tête, aux pieds du cheval du souverain sassanide prouverait au contraire qu’il revendiqua les causes de cette mort [54]. 93

94

95

Fig. 1 – Bas-relief de Naqsh-i Rustam représentant le roi Shapur Ier à cheval, Gordien III étalé sur le sol aux pieds de son cheval. Shapur Ier reçoit les suppliques de Philippe Ier, représenté dans une attitude de soumission devant lui (ce registre évoque la victoire perse de Mésichè). Le souverain sassanide tient de sa main l’empereur Valérien Ier, capturé en 260. __________ S.I. Oost, ﬈e death of the emperor Gordian III, in Class. Phil., liii (1958), p. 106-107 ainsi que B.H. Stolte, ﬈e death of the emperor Gordian III and the Reliability of the Res Gestae Divi Saporis, Acta of the vth Int. Congr. of Greek and Latin Epigraphy, Cambridge, 1967 (1971), p. 385-386. [53] Maricq, op. cit., p. 313. [54] Cf. B. C. Macdermot, Roman Emperors in the Sassanian Reliefs, jrs xxxxiv (1954), p. 76-80. [52]

205


La date précise de cette bataille nous est encore inconnue. Cependant, on pourrait avancer comme fourchette chronologique la période comprise entre fin février et tout début mars 244 en liaison avec la mort de Gordien III [55]. 96

Épilogue : l’avènement de Philippe I par les troupes et sa reconnaissance à Rome X. Loriot a pu établir le dies imperii du nouvel empereur Philippe Ier entre le 13 janvier et le 14 mars 244 [56]. C’était maintenant pour Philippe une nécessité de traiter avec les Perses ; il était en effet impératif de rapatrier l’essentiel des troupes afin d’assurer la protection de la Syrie au retour [57]. Par ailleurs, l’armée sassanide a elle aussi beaucoup souffert lors de cette bataille. Ces conditions ont en fait permis la négociation.

pagande de cette victoire en faisant graver dans le rocher que Philippe (donc Rome) était devenu son tributaire [61]. L’empereur put dès lors reconduire ses troupes jusqu’à Antioche dans des conditions qui ﬔrent pénibles [62]. On éleva un cénotaphe en territoire romain à Zaitha non loin de Circesium (auj. Buseire en Syrie) [63] à la mémoire du jeune empereur décédé. Ses cendres ont pu soit y être déposées soit ont été transférées à Rome [64]. 102

103

104

105

97

98

Les Romains purent conserver les terres reprises par Timésithée en 243 (provinces d’Osrhoène et de Mésopotamie) [58]. Ils durent néanmoins abandonner leur protectorat sur l’Arménie en faveur des Perses [59] et payer une rançon de 500.000 aurei [60]. Shapur assura la pro99

100

101

__________ Voir supra, note 26. [56] X. Loriot, Observations sur la chronologie du règne de Philippe, bsfn, xxvii (1972), pp. 245 et 250 et Chronologie du règne de Philippe l’Arabe (244-249 apr. J.-C.), anrw, ii, 2, 1975, p. 789 et 796. [57] Christol, op. cit., p. 100. [58] Le monnayage des cités d’Édesse, Nisibe et Rhesaena se poursuit sous les règnes de Philippe Ier et de Trajan Dèce (soit pour la période 244-251 ap. J.-C.) = bmc Arab. et Mesop., pp. 117-118, 122-124 et 127-133. [59] Évagre le Pontique, éd. Bidez-Parmentier, in ﬈eodor and Evagrus. History of the Church Bohn’s Ecclesiastical Library, London, 1894, p. 203. Ce qui signifiait la chute du roi arsacide Chosoès au profit de Shapur. [60] Maricq, op. cit., p. 307 (exprimé en deniers (d’or) dans le texte = dinars d’or sassanide, équivalent des aurei romains). 500.000 aurei équivalent dans le système monétaire revu [55]

206

__________ sous Caracalla à 25.000.000 deniers d’argent. Voir également D.S. Potter, op. cit., p. 221225 ainsi que M.H. Dodgeon & S.N.C. Lieu, ﬈e Roman Eastern Frontier und the Persian Wars ad 226-363. A documentary history, London y New-York, 1991, pp. 45-46 et 358. [61] Ibidem. [62] Cf. Porphyre de Tyre, Vie de Plotin, 3, cité par S. Mazzarino, op. cit., p. 74, note 78. [63] Circesium se trouvait au confluent du Chaboras et de l’Euphrate (cf. Ammien Marcellin, Res Gestae, xxiii, 5, 7-8 situe ce tombeau à Circesium ; Eutrope, ix, 2, 3 à vingt milles de Circesium, idem pour Festus, xxii (cf. Zosime, iii, 14, 2), la Vita Gord., xxxiv, 2 « apud Circesium » et l’Epitome de Caesaribus, xxvii, 3 : « Corpus eius, prope fines Romani Persique imperii positum, nomen loco dedit Sepulcrum Gordiani. »). Les bases de ce monument n’ont toujours pas été mises au jour. Cf. M.J. Johnson, ﬈e sepulcrum Gordiani at Zaitha and its significance, in Latomus, liv (1), 1995, p. 143, note 10. [64] Cf. Eutrope, ix, 2, 3 : « exsequias Romam revexit ». Selon Johnson, op. cit., p. 141-144, le monument construit à Zaitha qui a été décrit par Ammien Marcellin, xxiii, 5 aurait pu abriter les restes de Gordien III. L’auteur prend à témoin le témoignage d’Ammien qui déclara que Julien II y effectua un sacrifice en l’honneur du Divin Gordien « ubi sepultus est » (Ammien Marcellin, xxiii, 5, 8 et xxiii, 5, 17). Cette thèse est acceptée par J. Matthews, ﬈e Roman Empire of Ammianus, London, 1989, p. 130-132. À noter que M.J. Johnson reprend également dans son travail la thèse du complot de Philippe.

BCEN vol. 50 no 3, 2013


Dès qu’il ﬔt arrivé à Antioche, Philippe ordonna immédiatement la frappe d’antoniniens au revers PAX FVNDATA CVM PERSIS (fig. 2) [65] et où il portait à l’avers le titre de Pontifex Maximus plus probablement que de Persicus Maximus [66]. Toutefois, il est à noter que le nouvel empereur porte effectivement les titres de Parthicus et de Persicus Maximus sur un nombre limité d’inscriptions [67]. Ces titres de victoire n’apparaissent pas dans la titulature de Philippe Ier sur les papyri. 106

107

108

__________ [65] Le signe de cette rapidité d’exécution transparaît dans le fait que les coins qui ont servi aux premières frappes n’avaient pas encore eu le temps d’être fabriqués et donc reproduisaient le portrait du jeune Gordien, parfois cependant avec un rajout de barbe et les traits retouchés. Il fallut en effet un petit temps d’adaptation avant d’obtenir un portrait ressemblant du nouvel empereur Philippe Ier. [66] ric iv, 3, nos 69 et 72 : le P.M. en fin de légende doit certainement être lu dans le sens traditionnel et non comme marqueur de l’épithète Persicus Maximus. En cela nous nous rallions à l’idée de Loriot, op. cit., p. 775, note 861 selon laquelle ces épithètes n’ont certainement jamais eu de valeur officielle. C’est également l’idée défendue par D. Kienast, Römische Kaisertabelle. Grundzüge einer römischen Kaiserchronologie, Darmstadt, 1996², p. 197 : ces titres ne sont pas officiels. K. Pink, Antioch or Viminacium? A contribution to the History of Gordian III and Philip I, nc5 xv (1935), p. 101, note 24, y voyait en fait le titre de Parthicus Maximus, tandis que Mattingly et Sydenham dans leur introduction au monnayage de Philippe Ier, ric iv, part 3, 1936, p. 64 suggéraient l’abréviation du titre Persicus Maximus. Les lettres P.M. apparaissent également sur la première émission des bronzes à Viminacium pour Philippe Ier. Il aura certainement revêtu le grand pontificat dès son avènement et c’est sans doute en cette qualité qu’il aura présidé la cérémonie de deuil accordée à Gordien III à Zaitha. [67] Parthicus Maximus : cil, iii, 4634 ; 10634 = ils, 597 ; 143546 ; Persicus Maximus : cil, vi, 1097= ils, 506 ; Ann. Epigr., 1935, 27.

BCEN vol. 50 no 3, 2013

Quoi qu’il en soit, il était primordial de diffuser le plus rapidement possible l’idée que le calme était revenu sur cette frontière car sur le limes danubien, la situation restait tendue... Pour reprendre les mots de M. Christol, « il ne fallait pas laisser croire que deux dangers existaient en même temps, la situation générale imposant de revenir sur le Danube et de se consacrer dans cette région au rétablissement de la sécurité [68] ». 109

Après avoir confié à son frère Priscus la défense des provinces d’Orient [69], Philippe Ier revint à Rome où il associa son fils Philippe II (Caius Iulius Philippus) au pouvoir en tant que césar, renouant ainsi avec les principes dynastiques [70]. 110

111

__________ Christol, op. cit., p. 100. Les Alamans avaient profité du retrait d’une partie des troupes pour franchir le Rhin et envahir l’Alsace (cf. J.J. Hatt, Histoire de la Gaule romaine, Paris, 1966²) et l’année suivante, les Quades combattirent les troupes romaines stationnées en Pannonie (cf. J. Fitz, Les Syriens à Intercisa, Latomus, cxxii (1972), p. 114-116. Le peuple que Philippe Ier allait devoir combattre en 246-247 était les Carpes qui attaquèrent la Dacie et menacèrent la Mésie Inférieure. Les trésors monétaires enfouis dans cette région durant cette période en témoignent pour la plupart : cf. X. Loriot, Trésors de monnaies de Gordien III découverts sur le territoire de l’ancienne Dacie, bsfn xxxi (1976), p. 110-115. [69] igr, iii, 1201 et 1202 (en tant que préfet de Mésopotamie) ; cil, iii, 14149 (en tant que rector Orientis). [70] Contrairement aux témoignages d’Eutrope, ix, 3 et d’Aurélius Victor, xxviii, 1, Philippe II n’a pas été désigné césar dès le retour de l’armée en Syrie. X. Loriot, Chronologie du règne de Philippe, p. 791 l’a bien démontré. Le premier texte officiel mentionnant son nom n’est pas antérieur au 15 août 244 (Cod. Just., iv, 29, 10) et une inscription d’Albanum (cil, xiv, 2258 = ils, 505) gravée le 23 juillet ne faisait encore référence qu’à Philippe Ier et à son épouse Otacilia Severa. [68]

207


Gordien III reçut quant à lui les honneurs dus à son rang, sous la forme de l’apothéose [71]. 112

Pour en revenir à l’objet même de notre étude, il convient de rappeler qu’il n’est a priori guère aisé de caractériser de manière certaine le style de la gravure d’un sceau romain, de surcroît antérieur à la Tétrarchie. Toutefois, on peut constater qu’ici les portraits de Gordien III et Philippe Ier présentent certaines similitudes de style avec les émissions monétaires d’Antioche datant de l’époque de ces événements (cf. fig. 2 et 3). Dans cette hypothèse, la réalisation d’un tel sceau serait logique. Elle se situerait après la défaite de Mésichè et le retour de Philippe en Syrie. Cette production s’expliquerait à la fois par le besoin de légitimation du nouvel empereur et par sa volonté d’établir une continuité successorale à l’Empire. Philippe avait en priorité besoin à la fois d’imprimer rapidement sa marque dans le monnayage mais également d’apparaître comme l’héritier légitime de Gordien III dont le portrait avait été très largement diffusé dans les provinces, aussi bien grâce aux monnaies issues du pouvoir central qu’au travers des émissions coloniales et municipales. __________ Eutrope, ix, 2, 3 ; Ammien Marcellin, xxiii, 5, 8 ; Vita Gord., xxxi, 3. Ann. Epigr., 1964, 231. Le fait que Gordien III ait reçu l’apothéose par après, lors du retour du nouvel empereur à Rome, ne pose aucun problème : Cf. J. Scheid, Remarques sur le culte des Divi et sur la Consecratio, dans B. Boissavit-Camus, Fr. Chausson & H. Inglebert (dir.), La mort du souverain entre Antiquité et haut Moyen Âge, Paris, 2006, p. 87-88. Cependant, aucune monnaie de consécration ne ﬔt frappée tant à Rome que dans les provinces. L’émission de consécration de Trajan Dèce ne reprend cependant pas Gordien III dans la liste des Divi, sans doute du fait de son jeune âge mais aussi et surtout en raison de sa défaite contre les Perses sassanides.

Par ailleurs, nous pensons que ce sceau devrait vraisemblablement dater d’avant la désignation de Philippe II en tant que césar, soit d’avant août-septembre 244, si l’on se fie aux sources actuellement disponibles [72]. En effet, on peut considérer que cet événement établit l’assise dynastique de Philippe Ier, et ce, après la validation de son principat par le Sénat, même si l’on sait que ce dernier ﬔt en définitive très tôt contraint d’accepter cet état de fait. 113

Fig. 2 Gordien III, atelier d’Antioche, 242-244 IMPGORDIANVSPIVSFELAVG

Buste radié, cuirassé (lorica squamata) à dr., vu de trois-quarts arrière. ORIE/N/SAVG Sol radié debout de face, la tête à g., levant la main dr. et tenant un globe de la g. Antoninien : 4,86 g (coll. privée). Références : ric iv, no 213 ; C. 167.

[71]

208

Fig. 3 Philippe I, atelier d’Antioche, 244 IMPCMIVLPHILIPPVSPFAVGPM

Buste radié, cuirassé et drapé à droite, vu de trois-quarts arrière. PAX FVNDATACVMPERSIS

Pax debout à gauche, tenant un rameau de la main dr. et un sceptre oblique de la g. Antoninien : 4,06 g – ! (coll. privée). Références : ric iv, no 69 ; C. 113. __________ Voir supra, note 70.

[72]

BCEN vol. 50 no 3, 2013


Fig. 1

David Berthod – Un nummus inédit de Constance II césar pour l’atelier d’Arles

L

Commentaires Le type existe pour les ateliers de Trèves (–/–/PTR et –/–/STR) [5], Siscia (ᛎ |"SIS) [6], ﬈essalonique (–/–/SMTSA) [7], Cyzique (SMK") [8] et Antioche (ᛎ | SMANTA, ᛎ | SMANTΔ ou ᛎ | SMANS et ᛎ | SMANTA |, Δ, S et H) [9]. G. Depeyrot [10] date cette série, pour Trèves du moins, de la fin 324 à la mi325 ; il l’indique comme étant très rare et émise à l’occasion d’une fête. Le pendant arlésien de cette série était précédemment inconnu. 118

a fin de l’empire romain est une mine inépuisable d’inédits malgré les innombrables trésors étudiés. Nombreuses sont les variétés de légende et de buste ou les frappes non répertoriées pour une officine. Beaucoup plus rares sont les types totalement nouveaux pour un atelier, tel celui que nous présentons ici [1] (fig. 1 ; échelle 2 : 1). 114

Description Anépigraphe. Buste lauré, cuirassé et drapé à gauche, vu de trois-quarts avant. ᛎ | CONSTAN | TIVS | CAESAR | QAR$

119

120

Quelques éléments méritent d’être relevés. Nous noterons ainsi la présence d’un globule nettement visible au centre du revers, entre le I et le V de CONSTANTIVS. Il s’agit de toute évidence __________ [3]

Nummus : 1,90 g – . – 18 mm. ric [2] – ; Depeyrot [3] – ; Ferrando [4] –. 115

116

117

__________ [1] Cette monnaie est issue de la collection M. Moulin, que je remercie. Elle a fait l’objet d’une note préliminaire : www.academia. edu/4936814/Nouveau_type_monetaire_ pour_Constance_II_en_Arles.

[2]

Je remercie J.-M. Doyen, V. Geneviève et A.-M. Schmitt-Cadet pour leurs relectures et leurs précieux conseils. P.M. Bruun, ﬈e Roman Imperial Coinage. Volume vii. Constantine and Licinius ad 313-337, London, 1966.

BCEN vol. 50 no 3, 2013

[4]

[5] [6] [7] [8] [9] [10]

G. Depeyrot, Les émissions monétaires d’Arles (quatrième-cinquième siècles), Wetteren, 1996 (Collection Moneta, 6). Ph. Ferrando, L’atelier monétaire d’Arles de Constantin le Grand à Romulus Augustule 313-476, s.l., 2010. ric 490. ric 192. ric 144. ric 33. ric 55 et 60. G. Depeyrot, Le numéraire gaulois du ive siècle. Aspects quantitatifs. i. Les frappes – ii. Les trouvailles, Wetteren, 20012 (Collection Moneta, 24-25).

209


de la marque du compas ayant servi à tracer le cercle préparatoire au poinçonnage du grènetis. À peu près tous les exemplaires de cette époque, portant au revers une inscription, montrent cet élément qui est souvent omis dans les descriptions puisqu’il s’agit d’un simple stigmate technique. Dès lors, cet élément ne figure pas dans la description proposée ci-dessus. Quelques « anomalies » doivent être mentionnées. D’une parte, le buste montre un travail peu soigné alors que les monnaies arlésiennes de Constance II ont des reliefs nets et un dessin abouti. D’autre part, la marque d’exergue QAR$ est anormale. En Arles, effectivement, le croissant n’est pas connu en tant que dernier élément d’une marque : il est toujours suivi d’une lettre comme nous l’a rappelé A.-M. Schmit-Cadet. Elle peut pourtant être rapprochée de la marque définissant l’émission arlésienne de 325/326, à savoir QA$RL, connue avec les légendes PROVIDENTIAE CAESS et VIRTVS CAESS, chaque fois associées à la porte de camp [11]. 121

Cette monnaie nouvelle, pour autant qu’elle soit bien officielle, semble avoir été frappée en 325. L’élévation au césarat de Constance II ayant eu lieu en novembre 324 (le jeune césar a alors 6 ans), on pourrait penser qu’elle la commémore.

Cédric Wolkow – Deux variantes inédites de l’atelier de Constantinople pour Maurice Tibère (582-602)

N

ous avons récemment pris connaissance de deux monnaies émises à Constantinople sous Maurice Tibère (582-602) qui nous semblent inédites, n’étant répertoriées __________ Ferrando 1044 et 1053-1054.

[11]

210

ni par W. Hahn & M. Metlich [1], ni par A.R. Bellinger [2]. 122

123

La première est un pentanummion [3], la plus petite dénomination frappée à Constantinople sous Maurice Tibère : 124

Fig. 1 (éch. 2 : 1) [4] 125

a ðNm[AV] – [TI]PPAVc Buste diadémé, drapé et cuirassé de Maurice Tibère à droite, vu de trois quarts en avant. r Dans un cercle de grènetis, large ñ ; à droite lettre d’officine å. Ae : 1,74 g – 0 – 17 mm. Pour cette pièce, que nous pouvons classer aisément sous la référence mib 74, lég. c [5], nous observons que la légende de revers n’est répertoriée que pour les officines A,  et à. 126

Alors que toutes les officines frappent des decanummia [6] jusqu’en 586 [7], la 127

128

__________ [1] W. Hahn & M. Metlich, Money in the Incipient Byzantine Empire Ctd (Justin II – Revolt of the Heraclius, 565-610), Wien, 2009. [2] A.R. Bellinger, Catalogue of the Byzantine Coins in the Dumbarton Oaks Collection and in the Whittemore Collection. Volume one. Anastasius I to Maurice 491-602, Washington, 1966. [3] Dans les sources contemporaines, le πεντανούμμιον : pièce de 5 nummi taillée au 1/192ème de livre. [4] Collection de l’auteur. [5] Hahn & Metlich, op. cit. [n. 1], p. 152. [6] 10 nummi, 1/96ème de livre. [7] Des decanummia sont répertoriés pour les officines A, , à, å et ñ jusqu’en 585/586 d’après les travaux de Hahn & Metlich.

BCEN vol. 50 no 3, 2013


frappe des pentanummia est censée avoir diminué progressivement jusqu’à cette même année [8]. Notons que cette monnaie, en 583/584, est tout de même répertoriée pour les officines A, , à et ñ, et qu’il manquait donc cette quatrième officine dans les ouvrages consultés. À ce sujet, nous pensons que certaines erreurs d’attribution ont pu être commises dans le passé du fait des similitudes entre les lettres A et å sur ces monnaies de faible diamètre. 129

Jusqu’à la publication d’éventuelles nouvelles variantes, il apparaît, grâce à ce nouvel exemplaire, que toutes les officines frappaient cette fraction jusqu’en 583/584, que l’émission a été interrompue en 585, et que seules les deux premières officines ont repris la frappe en 585/586. La deuxième variante inédite concerne la fraction immédiatement supérieure valant 10 nummi, le decanummion : a ðNTIbE – RmAPPA Buste de Maurice Tibère couronné et diadémé, cuirassé et drapé, vu de face.

r Large I surmonté d’une croix (ม) ; à dr. une étoile à six rais (ᛏ), à g. la lettre d’officine B ; à l’exergue CON. Ae : 2,45 g – ! – 20 mm. Comme nous le précisons ci-dessus, les decanummia ont été frappés par les cinq officines que compte l’atelier de Constantinople jusqu’en 585/586. Cependant ils ne sont répertoriés que pour trois légendes de droit différentes [9] : 130

▪ Légende A : ðNTIBñ RPPAVC ▪ Légende C : DNmAVR ICIPPAVI ▪ Légende D : DNmAV TIBñPPA(VC) __________ [8] Seules les officines A et  frappaient cette fraction en 586. [9] Hahn & Metlich, op. cit. [note 1], p. 151.

BCEN vol. 50 no 3, 2013

Fig. 2 (éch. 2,5 : 1) [10] 131

Le nouvel exemplaire fait donc apparaître la légende B [11] qui manquait pour ce type. Il sera donc possible d’attribuer la référence mib 73b à cette variante dans un éventuel addendum à cet ouvrage. 132

NÉCROLOGIE

Luc Smolderen (1924-2013) Le dernier titulaire de notre Prix Quinquennal de Numismatique, M. Luc Smolderen, nous a quittés le 3 juillet 2013, à __________ [10] Collection de l’auteur. [11] Légende B : ðNTIbñ RmAV(RI)PPAVI.

211


l’âge de quatre-vingt neuf ans. On trouvera dans les pages de notre bulletin, à l’occasion de la remise de ce prix, une brève biographie due à notre collègue Simone Scheers [1]. 133

Anversois d’origine, M. L. Smolderen fit des études d’Histoire moderne à l’Université catholique de Louvain (1947) ; trois ans plus tard, en 1950, il obtient le titre de docteur en droit. Il débute immédiatement une carrière d’avocat puis de diplomate. Le premier poste qu’il occupa, de 1972 à 1976, ﬔt celui d’ambassadeur de Belgique en Syrie. C’est à cette occasion qu’il nous ﬔt donné de le rencontrer pour la première fois lors d’une visite qu’il effectua en 1976 sur le chantier de la Mission archéologique belge en Mésopotamie, au Tell Abou Danné. Conscient de la précarité alimentaire des archéologues, M. Smolderen s’était muni d’un somptueux panier-repas de victuailles parfaitement introuvables dans le pays. Tout autant que l’aspect officiel de sa visite, c’est l’aspect festif de cette première rencontre qui restera dans la mémoire de notre équipe. On le retrouve ensuite à Vienne puis au Maroc. Après avoir exercé brièvement le secrétariat général adjoint au ministère des Affaires étrangères, M. Luc Smolderen achève sa carrière par le poste diplomatique le plus important du royaume, celui d’ambassadeur de Belgique à Paris (de 1986 à 1989). Venu très tôt à la numismatique – il est membre correspondant de la Société royale de Numismatique de Belgique dès 1956, puis membre titulaire, secrétaire, vice-président et finalement président (de 1990 à 1996) – c’est seulement __________ [1] S. Scheers, Hommage à M. Luc Smolderen, lauréat du 9ème Prix Quinquennal de Numismatique, bcen 46/2, 2009, p. 133-134.

212

après sa mise à la retraite qu’il trouve enfin de temps de se consacrer à finaliser une thèse de doctorat menée depuis une trentaine d’années et soutenue le 1er octobre 1993 à Louvain-la-Neuve. Ce travail imposant, intitulé Jacques Jonghelinck, sculpteur, médailleur et graveur de sceaux (1530-1606), ﬔt publié en 1996. Spécialiste unanimement reconnu des médailles de la Renaissance, L. Smolderen est l’auteur de quatre monographies, de plus de cinquante articles et d’une centaine de notes, recensions ou notices de catalogues [2]. Outre ses activités de numismate, L. Smolderen fréquentait l’Académie royale d’Archéologie de Belgique, dont il occupa le fauteuil de président de 2002 à 2005. 134

Nous garderons le souvenir d’un homme affable, nanti d’une immense culture et doté d’une mémoire sans faille, toujours prêt à partager ses connaissances dans des domaines parfois surprenants. Diplomate jusqu’au bout des doigts, d’une élégance que l’on peut qualifier de « vieille France » lorsqu’il pratiquait le baisemain lors des cérémonies de remises de prix, je dois avouer avoir pris parfois plaisir à le taquiner en lui donnant son titre officiel – c’est luimême qui me l’avait un jour spécifié avec beaucoup d’humour – celui de Son Excellence Monsieur le Ministre plénipotentiaire de S.M. le Roi des Belges. Jean-Marc Doyen

 __________ [2] On trouvera une biographie détaillée de M. L. Smolderen, ainsi que sa bibliographie complète, sous la plume de Gh. Moucharte, dans la Revue belge de Numismatique clix (2013), p. i-x.

BCEN vol. 50 no 3, 2013


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.