Intersection Magazine 18

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le magazine du style en mouvement auto musique bateau design vélo architecture avion culture moto mode numéro 18

PILOtEs

iggy azalea étoile électrique

Jeremy scott

en mode ailé

Christophe

la mélodie du moteur

iggy azalea photographiée à paris par babette pauthier pour Intersection

PILOtées

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98 MONUMENT

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A one second perfect move that you will remenber.

WHEN WAS THE LAST TIME YOU DID SOMETHING FOR THE FIRST TIME ?



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ÉDITO NUMÉRO 18

Photographe Adrien Toubiana

Si l’automobile habite les rêves de beaucoup d’êtres humains, il est propre à chacun d’en donner l’interprétation qui lui convient. Dans la mémoire de Claude Parent, dans les dessins d’Hicham Lahlou ou de Patrick Le Quément, on peut suivre la trace d’une passion indéfectible et se l’approprier. On peut trouver chez les artistes un discours rendu mobile et public pour le faire voyager et toucher d’autres cordes sensibles. Le rayon d’action et les perspectives se sont considérablement élargis pour l’Homme, mais sa curiosité et sa créativité n’ont de cesse de se renouveler et prouvent à travers les pages d’Intersection que le mouvement sera toujours le compagnon de la création. S’il existe un statut à la fois transverse et capable de s’affranchir des codes de chaque communauté, c’est bien celui de l’artiste. Justement, Intersection se pose depuis dix ans en témoin de tous ces croisements, offre des clés au lecteur pour apprécier les évolutions de la mobilité, décrypter son présent et, quelque part, accepter son futur. Jeremy Scott donne des ailes à smart quand les Naive New Beaters alimentent de leur énergie le cinémascope de l’histoire automobile. La jeune diva hip-hop Iggy Azalea croise l’étoile centenaire de Mercedes, pendant que nous découvrons la nouvelle Jaguar F-Type en avant-première au cours d’une virée automnale en forêt. Sur la route, les nouveaux modèles essayés nous font prendre conscience des efforts déployés par l’industrie pour réduire les émissions, et par conséquent les dommages provoqués sur la nature, d’une automobile plus que jamais surveillée. Si la téléportation n’est pas encore complètement au point, les montres présentes dans nos pages vous permettront de guetter l’horaire du prochain décollage du vaisseau de Ross Lovegrove qui vous emportera vers 2013. Ouvrons grand les yeux. Quand le contexte économique de notre chère Europe dite vieillissante devient délicat, il faut s’en remettre aux artistes pour entrevoir de quoi l’avenir sera fait. Yann Larret-Ménezo


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Directeur de la publication Patrice Meignan pat@intersectionmagazine.fr

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Administrateur de la publication Jeremy Taltaud jey@intersectionmagazine.fr Éditeur associé Stéphane Quester stephane@lecurie.eu

Directeur de la rédaction Patrice Meignan

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Rédacteur en chef Yann Larret-Ménezo

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Fondateurs Dan Ross, Yorgo Tloupas

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TEXTES Tone Thomas Bernhard Lyon Blum Sébastien Carayol Jonathan Chauveau Yann Chénot Philippe Combres Yan-Alexandre Damasiewicz Guillaume Fédou Rod Glacial Laura-Kallisté Arrigui Hendrik Lakeberg Ryan Latren Raphael Malkin Patrice Meignan Laurence Perrillat Elsa Salmon Jeremy Taltaud Gilles Uzan

REMERCIEMENTS PHOTOS Mélanie Aubiès Bordas Anders Sune Berg Quentin de Briey Jérôme Bryon Nicolas Coulomb Fabien Dumas Alain Ernoult Samuel Guigues Charles Helleu Naj Jamai Florian Joye Nikolaus Jung Bastien Lattanzio Pierre Mahieu Max McClure Patrice Meignan Stephani Pappas Babette Pauthier Ludovic Parisot Rankin James Reeve Tom Salt Florence Tétier Tibo Tone Gilles Uzan Stan Wolff

Élodie Antoine Karol Beffa Catherine Bienvenu Alexandre Blanc Guillaume Cadot Quentin Charnolé Mélanie Chocat Rod Chong Julie Colas Simon Jules Darthos Sezin Durmus Géraldine Foissy Audrey Garousse Dominik Gruber Philippe Handjian Faye Hatton Martine Lanter Nadim Makhlouf Thomas Malaval Philippe Malbert Paul Mesguich Venceslas Monzini Hervé Poquet Martine Pradignac Isabelle Stibbe Studio KLRP Les Sauvageons

INTERSECTION ALLEMAGNE INTERSECTION FRANCE est édité par L’ÉCURIE PRODUCTION SARL au capital de 10 000 euros SIREN 524 891 686

Hendrik Läkeberg hendrik@intersection-magazin.de

INTERSECTION CHINE Alain Deroche alain_deroche@modernmedia.com.cn

Rédaction 44 rue Lucien Sampaix 75010 Paris +33 1 40 38 81 80 www.intersectionmagazine.fr Imprimé en Belgique par Imprimeries SNEL N° ISSN 2257-0926 Dépôt légal : à parution N° CPPAP en cours Période de parution Hiver 2013 Périodicité trimestrielle

DISTRIBUTION Conseil Distribution Diffusion France et International KD presse sur kdpresse.com 14 rue des Messageries 75010 Paris Office : +33 1 42 46 02 20 Fax : +33 1 42 46 10 08

AMG SLS Electric Drive Iggy Azalea photographiée Babette Pauthier Stylisme Josia.N


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P.40

STARTER P.25

Photographe Stephani Pappas

CULTURE, design et industrie P.24 En smart avec les Naive New Beaters

P.38 Jeremy Scott donne des ailes à smart

P.28 L’art à l’échelle de la ville selon Barbara Kruger

P.40 La Harley Davidson Sporty de RSD est un hommage aux platines mythiques de Technics

P.62 Le nouveau Cirrus SF50 prend son envol

P.30 Le rayon clair : Pedro Nuñez retend les formes

P.41 Le pape Benoît XVI et sa Renault Kangoo

P.63 The Rosebery, le restaurant mobile

P.31 L’œuvre à combustion d’Elisa Pône

P.42 Matières nobles et Ruby pour le nouveau scooter Onyx

P.64 Jardin mouvant : le transport de graines de Maria Thereza Alves et Gitta Gschwendtner

P.44 Salon de Paris : l’œil de Mai Ikuzawa

P.65 Le studio anglais Sanitov éclaire son mobile- home aquatique

P.60 Les idées s’enchaînent : les vélos modernes joignent l’utile à l’agréable

P.32 Carmageddon : Thomas Bayrle à la documenta 13 P.33 L’UFO de Ross Lovegrove se pose en gare de Lille

P.50 Le champion du monde Sebastian Vettel débride l’Infiniti FX

P.34 Edward Burtynsky photographie les stigmates du pétrole

P.56 L’histoire de l’air : Breitling prend le contrôle

P.36 Le robot qui filmait : ou comment la start-up Bot & Dolly a importé Detroit à Hollywood

P.58 Cathal Loughnane, chef du Peugeot Design Lab, présente ses créations à deux roues



P.86

Photographe Charles Helleu

GALERIE P.67 P.68 Bagagerie : Un homme pressé

P.94 Collection : Mode de transport

Photographe : Alexia Cayre

Photographe : Nicolas Coulomb

Stylisme : Josia.N

Stylisme : Pau Avia

P.72 Photographie numérique : Court circuit

P.100 Montres : Les lignes du temps

Photographe : Pierre Mahieu

Photographe : Jérôme Bryon

Sélection : Benoît Gaildraud

Sélection : Patrice Meignan

P.76 Casques : Plaisir intégral

Photographe : Bastien Lattanzio

P.110 Boomboxes : Si t’as le pedigree, ça se reconnaît aux dB

Photographe : Fabien Dumas

P.82 Cadeaux : Tombés du traîneau

Sélection : Benoît Gaildraud

Photographes : Florence Tétier et Florian Joye

Stylisme : Josia.N

Sélection : Josia.N

P.86 Montres : Heures blanches pour boîtes noires

Photographe : Charles Helleu

Sélection : Patrice Meignan



P.116

PILOTES P.115 P.116 Chevaux au vent La préparation magique du sorcier mécanicien Magnus Walker P121 Atlas routier Le designer Hicham Lhalou redessine les routes du Maroc P124 Passion oblique La collection hétéroclite de l’architecte Claude Parent P128 Trois étoiles au crash test Gérald Passédat, un chef étoilé sur la route P130 Nouvelle vague Patrick Le Quément, un designer sur les flots P135 Fou d’Enzo Christophe, les paradis des points perdus

P118 L.A. à pied La mobilité selon le créatif Marc Horowitz

Photographe Nikolaus Jung


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P.144

TENUE DE ROUTE P.143 P.130 Électrique Blue : Iggy Azalea en SLS Electric Drive

Photographe : Babette Pauthier

Stylisme : Josia.N

P.142 Les Oiseaux Rares : Jaguar F-Type

Photographe : Gilles Uzan

Stylisme : Josia.N

Photographe Babette Pauthier Stylisme Josia.N


3 octobre 2012, Paris

ClĂŠment Chabernaud photographiĂŠ par Karim Sadli Boutique en ligne : defursac.fr


P.168

Photographe Gilles Uzan

GARAGE P.161 REPORTAGES P.162 Les petits bleus de la gendarmerie

P.177 Toit mon toit Abarth 595 C Turismo

P.168 Rencontre dans le Montana avec AEV, préparateur pour Jeep d’expédition

P.178 De Rabat à Las Vegas Porsche Cayenne GTS et Panamera GTS

ESSAIS P.170 Slalom moderne Bentley Continental Flying Spur Speed

P.182 Insubmersible Range Rover Supercharged

SOIRÉE P.190 Nissan Ministry of Sound Pour ses 10 ans, Intersection invite le monstre sonore de Nissan sur le toit du Mondial

P.184 Le choix du roi AUDI RS4 Avant et BMW M6 Coupé

LE VÉHICULE OUBLIÉ P.191 Harley Davidson Topper

P.186 Mise au point Ford Focus ST

DANGER P.192 À ne pas tenter chez soi Le rouleau nettoyeur humain

P.172 Appareils de musculation McLaren MP4-12C Spider P.174 Les sentiers de la gloire Dacia Sandero Stepway Prestige P.176 7 tout neuf Golf 1.4 TSI Confortline

P.187 In the mud for love Honda CR-V 2.2 I-VTEC 4WD Exclusive

CARTOON P.188 Itinéraire bis Tone dessine autour du monde


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P.25

STARTER le futur de la mobilité CULTURE DESIGN INDUSTRIE


starter

concept car

battre le pavĂŠ

en smart avec les naive new beaters

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INDUSTRIE

Intersection


Intersection

Fantasques et inclassables, les Naive New Beaters sont venus apporter leur énergie au concept smart ForStars. Entre deux clichés, nous profitons d’un bref moment pour poser quelques questions au groupe parisien qui vient de sortir son dernier album, � La Onda � (Cinq 7 / Wagram). Intersection : D’où venez-vous ? Naive New Beaters : On vient de Californie, l'autre pays du sushi. Inter : Où allez-vous ? NNBS : On est dans un 9 places avec l’option clim et GPS, on va se diriger vers Marseille, au Cabaret Aléatoire, pour donner notre meilleur concert. On l'espère. Inter : Quelle est l’origine de votre nom ? NNBS : Ça vient du premier morceau qu'on a fait ensemble, une sorte de reggae psychédélique qui

INDUSTRIE

parlait de ranger sa chambre pour se sentir bien. On a essayé de qualifier le morceau, c’était assez naïf, y avait un brin de nouveauté mais ça tabassait quand même. Le Naive New Beat quoi ! Inter : Comment décririez-vous votre musique pour un profane ? NNBS : On lui dit que c’est notre musique préférée pour qu’il se sente en confiance. Ensuite, que c’est un mélange de plusieurs genres (rock, pop, électro, hip-hop...) parce qu’on n’arrivait pas à se mettre d’accord entre nous. Et enfin, on synthétise en lui disant qu’il s’agit tout simplement de « pop rapée chaloupée avec pas mal de sentiments exotiques ». Inter : Comment s’est passée la collaboration avec Megaforce (dans les pages d’Inter 17) ? NNBS : C’est des potes, on a tous commencé ensemble. Nos premiers clips (« Bang Bang » et « Live Good ») sont leurs deux premiers clips. On les

starter

a produits avec respectivement 327 et 620 euros de budget. Récemment, ils ont fait la pochette de notre dernier single, « Jersey ». Big up à eux. Inter : Parlez-nous de cette photo cocasse où vous êtes au guidon d’une Suzuki GSX R ? D’où vient l’idée ? NNBS : On voulait une grosse bécane, en rapport avec notre virilité. Les gars de Suzuki ont été super cools, ils nous ont prêté la moto et leur entrepôt pour faire le shooting. C’était la première fois qu’un petit chien pénétrait les lieux. Inter : Les déplacements nombreux sont associés au style de vie des musiciens. Quel impact ont-ils sur vos créations ? NNBS : Déjà dans nos vies, on n’a plus trop de potes car on est rarement présents. Forcément, on en parle un peu dans les chansons. Aussi, le fait de se balader dans plusieurs pays, de jouer avec des

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starter

INDUSTRIE

Intersection

il est temps de finaliser ce projet de téléportation, a fait trop longtemps qu'on en parle

groupes étrangers teinte nos morceaux, comme dans notre nouvel album, « La Onda », qui transpire pas mal l’éclectisme et l’exotisme. Inter : Quels sont les pays qui vous ont marqués ? NNBS : Le Mexique est l’un de nos meilleurs souvenirs. On a joué dans des entrepôts ou mangé des tacos à la langue de bœuf. La Russie aussi, c’est toujours marquant mais on met plusieurs jours à s’en remettre. Enfin, en Tunisie, on a joué dans une cathédrale, c’était assez classe. Inter : Avez-vous une anecdote cocasse à nous raconter à propos de vos transports ? NNBS : Eurobelix (homme machine du groupe) nous a fait dormir dans le camion pour mon anniversaire car il avait perdu les clés de l’hôtel. En se réveillant, on les a trouvées dans la boîte à gants, c’est un peu cocasse, ça. Inter : Si vous pouviez inventer un mode de locomotion qui vous aiderait dans vos créations, comment serait-il ? NNBS : Je pense qu’il est temps de finaliser ce projet de téléportation, ça fait trop longtemps qu’on en parle. Martin Luther BB King, le guitariste et scientifique des Naive New Beaters, bosse dessus d’arrache-pied. Inter : Quels sont les moyens de locomotion que vous utilisez le plus souvent ? NNBS : On bouge en van 9 places qu’on garnit vite 28

d’emballages de chips goût cheeseburger et de bouteilles d’eau vides. Inter : Et vos préférés ? NNBS : L’avion c’est cool, mais Martin se bat tout le temps avec les hôtesses pour ne pas mettre sa guitare en soute, il devient tout rouge et ça fout un sacré bordel. Donc, le train ou le van rempli de chips, c’est bien. Inter : Quel rapport avez-vous avec l’automobile ? NNBS : Une sorte de proximité telle qu’on marche maintenant en position assise. C’est bizarre à voir, mais pratique quand on remonte dans le van. Inter : Si vous deviez sortir du champ de la musique, quels sont les modes d’expression qui vous intéresseraient ? NNBS : La musique nous permet déjà de nous exprimer dans d’autres domaines. On s’implique beaucoup sur tous nos visuels, clips, photos, pochettes. On s’exprime aussi en danse lors de nos concerts aux chorégraphies millimétrées. Certains de nos steps auraient même inspiré la Zumba. Inter : Si vous deviez donner une définition de la mobilité, quelle serait-elle ? NNBS : La mobilité, c’est ne pas bouger tout en avançant quand même. www.naivenewbeaters.com

La playlist de leur roadtrip AC/DC Highway to Hell

Total Warr sexual

Naive New Beaters La Onda

America ventura highway

Neil Young alabama

Coolio fantastic voyage

Aphex Twin window licker

Garth Brookes On the Road Again

Two Door Cinema Club sun

The Doors the End


Intersection

le monde selon smart Dans un salon automobile de Paris plutôt morne et conventionnel, il y avait peu de surprise et de fantaisie. Alors que le phénomène smart prend une ampleur progressive, comme nous avons pu le voir dans notre dernier numéro durant le festival smartime d’Anvers, ce concept ForStars trônait, coquin et malin, aux côtés de l’armada Mercedes. Déjouant la vigilance de la sécurité, nous nous sommes directement rendus auprès du docteur Annette Winkler, patronne de smart. Il paraissait ensuite logique qu’Intersection se saisisse de ce concept et le mette en scène aux côtés des Naive New Beaters. La ForStars ne cacherait-elle pas les ambitions de smart, à savoir construire une nouvelle 4 places ? Si la ForFour sortie en 2004 avec son air de dauphin triste n’a pas trouvé son public, la Toyota IQ a

INDUSTRIE

prouvé qu’il y avait une vie pour les mini-autos plus accueillantes. Même s’il est présenté en version 2 places, le concept ForStars est plus large et plus long que les autres créations de la marque. Il s’intègre au sein d’une famille de plus en plus fournie où se côtoient scooters et vélos. Mais comme le dit si bien Annette Winkler, « le but de smart dans les prochaines années, ce n’est pas uniquement de proposer des automobiles, mais plutôt un univers global, un software capable de gérer tous les éléments de mobilité qui nous accompagnent. Nous voulons être le think tank de la mobilité urbaine. » Il est vrai que le paysage urbain change. Les vélos électriques, considérés comme ringards et réservés aux personnes âgées, ont évolué au point d’attirer des constructeurs tels que smart qui associent design et fonctionnalité. Concernant ForStars et son projecteur de film intégré à la calandre, le processus de conceptualisation a été repris des précédents concepts. C’est-à-dire en consultant de jeunes talents issus d’univers différents autour d’une problématique. « Il s’agissait de trouver d’autres utilisations pour l’électricité. Sortir du cadre de la conduite automobile, et de la satisfaction d’avoir un moteur agréable et

starter

silencieux. Nous avons adoré l’idée de l’automobileprojecteur de cinéma. Vous pouvez voir "Le Seigneur des Anneaux" six fois et il vous restera encore de la batterie. Et même si vous ne voulez pas voir le film six fois, vous pourrez peut-être brancher une machine à pop-corn ? (rires) » Il est sûr qu’avec une automobile essence, ce n’est pas possible. Tous les développements des prochains produits smart auront beaucoup d’options de personnalisation et d’utilisation par smartphone ; comme la climatisation à distance, le chauffage ou même la radio. Les batteries smart sont très performantes sur ce concept, développent 17,6 kW/h et sont capables d’emmener l’engin à 130 km/h. « Pour finir, je ne dirais pas que la ForStars n’annonce pas forcément un modèle de série, mais il y a des détails que vous devez observer. Les couleurs, qui viennent de l’héritage Swatch, l’intérieur, le côté fun et l’esprit compact. » Annette Winkler semble renouer avec les gènes insufflés par le regretté créateur de Swatch, Nicolas Hayek, et ce n’est pas pour nous déplaire.

Texte : Ryan Latren Photographe : Samuel Guigues

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starter

art contemporain

L'empathie peut changer le monde L'art à l'échelle de la ville SELON Barbara Kruger 30

CULTURE

Intersection

Artiste conceptuelle engagée, Barbara Kruger détourne

Défendant la cause des minorités raciales, sociales et

les codes de l’imagerie publicitaire à travers ses collages

sexuelles, ses créations s’imposent progressivement dans

aux slogans percutants. Née en 1945 à Newark dans le New

un univers artistique et culturel majoritairement masculin.

Jersey, elle se forme au métier de graphiste publicitaire à la

Lors de sa première exposition personnelle en 1987 à la

Parsons School of Design de Syracuse, puis travaille à New

galerie Mary Boone de New York, ses créations bénéficient

York à partir de 1966 comme maquettiste pour les publica-

d’autant plus d'écho que peu de femmes ont alors accès à

tions Conde Nast, en particulier le magazine Mademoiselle.

un tel niveau de visibilité, et encore plus rarement avec une

Elle y explore le langage visuel et sémantique de la com-

approche conceptuelle alliée à un discours politiquement

munication sur les territoires communs de la féminité, de

engagé. L’utilisation des pronoms « je », « tu » et « nous »,

la représentation stéréotypée et du discours convenu sur la

associée à des déclarations aussi autoritaires qu’irréfutables,

place de la femme dans la société. Au début des années 80,

véritables injonctions à l’attention du spectateur, interrogent

elle réalise ses premières œuvres et établit le vocabulaire

les valeurs économiques et les rapports sociaux sous l’angle

visuel singulier qu’elle conjugue aujourd’hui depuis plus de

des clivages et de l’altérité. À travers un graphisme épuré

trente ans : un slogan, en caractères Futura Bold, barre une

et atemporel, Barbara Kruger inscrit ses messages au-delà

image en noir et blanc choisie pour sa force visuelle.

du cercle fermé du monde de l’art. Et c’est sur le terrain de


Intersection

l’espace public qu’elle les projette avec le plus d’impact.

CULTURE

starter

« Tu le veux, tu l’achètes, tu l’oublies » ou « L’empathie peut changer le monde » entendent prôner des valeurs qui

En octobre 2012, le Los Angeles Fund for Public Education

encouragent l’inventivité et la créativité et provoquent une

a lancé une campagne intitulée « Art Matters » qui consiste

prise de conscience chez les spectateurs qui les croisent

à inviter des artistes de renommée internationale pendant

accidentellement dans leur quotidien. Un projet politique

plusieurs mois pour réaliser des expositions à l’échelle de

et mobile affichant des convictions collectives, et qui tend à

la ville, avec potentiellement 900 millions de regards posés

changer le monde.

sur des créations spécifiques. Barbara Kruger a inauguré le projet en recouvrant de slogans douze bus en circulation et une centaine de panneaux d’affichage. Ce projet cherche à promouvoir la formation et l’éducation artistiques. Sur le mode d’une campagne publicitaire massive, l’artiste dénonce l’abandon des arts graphiques et plastiques dans l’éducation au profit d’une course à la réussite sociale et économique. Des slogans tels que « Où allons-nous ? »,

Texte : Laurence Perrillat Photographe : DR

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starter

art contemporain

le rayon clair PEDRO NUNEZ retend les formes Dans « The Truth of The Trou », sa récente exposition au titre à interprétations multiples, l’artiste vénézuélien de 35 ans Jorge Pedro Nuñez a voulu mettre en avant les relations entre géométrie et

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CULTURE

sexualité. Son concept revenait en fait au principe du « visiteur fait l’œuvre ». Dans un catalogue de pages à découper, les voyeurs pouvaient assister à une accumulation de riens (carrés, points, trous) et se regarder dans des miroirs d’acier où leurs visages remplaçaient alors les œuvres absentes. Un pied de nez au néant souvent promu dans ces « cimetières de l’art ». Dans « Être tordue », expo présentée à la galerie Crève Cœur dans le cadre de la FIAC 2012 et rebaptisée « Bicycle Tour », Nuñez démontre une fois de plus la palette de ses influences, de Lautréamont (quand il fait se rencontrer un escabeau avec une chaise industrielle) à Marcel Duchamp et ses readymades... mais qui n’est pas influencé par Duchamp aujourd’hui ? Ces « êtres tordus » au féminin sont en réalité des roues de vélos voilées, soudées, sculptées, posées au sol

Intersection

et transformées en figures géométriques à part entière. Ces roues ont en fait été assemblées à partir de plusieurs modèles, tandis que leurs rayons, eux, suivent inexorablement la même trajectoire et symbolisent l’idée de mouvement en nous renvoyant à l’art cinétique. Ces formes complexes, flexibles, tordues, éprouvant toujours le désir de mouvement, nous rappellent finement la condition de l’homme moderne, cet objet utilitaire. Références à l’histoire de l’art, humour, relecture et associations d’idées, voilà la matrice du travail utopique de Jorge Pedro Nuñez, entre art abstrait et culture populaire.

Texte : Rod Glacial Photographe : DR


Intersection

ART CONTEMPORAIN

Fermer les yeux, sauver sa peau Les uvres à combustion d'Elisa Pône I’m looking for something to believe in (2007), vidéo, 8’, courtesy of Galerie Michel Rein

CULTURE

Soudain, la calme mélodie de la forêt est rompue. Un feu d’artifice éclate à l’intérieur d’une Nissan Sunny abandonnée. Des lumières multicolores jaillissent, les vitres se brisent, une fumée s’échappe et entache progressivement la nature, innocent témoin de ce déchaînement de violence. Une fête à laquelle personne n’a été convié, à bord d’une voiture qui n’ira pas plus loin mais qui semble faire seule un curieux voyage. Qu’il évoque les étincelants effets d’un amour clandestin dans l’habitacle, la rébellion incendiaire d’une jeunesse insurgée ou la célébration collective d’un rite païen, le spectacle de cette vidéo, intitulée « I’m looking for something to believe in », conjugue désirs et joies, fantasmes et peurs. Il révèle également le penchant pyromane et explosif du travail de l’artiste française Elisa Pône. Les œuvres d’Elisa Pône traitent de déplacement et de durée, mais sont teintées de désœuvrement et d’ennui, comme dans les photos saisies à l’arraché depuis une voiture ou bien la fugue en sorties de route de deux adolescents survoltés sur un scooter. Une temporalité suspendue, comme déréglée, hante le film « A cigarette with God » : une jeune femme en voiture parcourt une zone industrielle portuaire, fume une cigarette et joue avec les étincelles par la vitre entrouverte. Attisées par le souffle du dépla-

starter

cement, les braises tracent la trajectoire de leur passage et fixent les trop courts instants que dure leur combustion. Fasciné par ce que le beau a de dangereux et le figé d’inattendu, le travail d’Elisa Pône, aussi nerveux que mélancolique, n’est jamais réconfortant. L’artiste le décrit elle-même comme imprégné d’un goût de mercure. Ses œuvres, aussi sourdes de l’ennui du monde qu’assourdissantes de ses menaces, nous hurlent de prendre la fuite : « Fermez les yeux, sauvez votre peau ! » www.elisapone.blogspot.fr www.michelrein.com

Texte : Laurence Perrillat

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starter

CULTURE

art contemporain

CARMAGEDDON THOMAS BAYRLE À DOCUMENTA 13 L’événement a déjà eu lieu, mais INTERSECTION tient à revenir brièvement sur documenta, en particulier sur une grande première : la salle entièrement consacrée à Thomas Bayrle, artiste allemand vétéran de documenta. Entre les sculptures de moteurs (dont celui d’une Porsche 911 six cylindres ou d’une 2CV Citroën), la gigantesque photo d’avion et la fresque murale « Carmageddon », œuvre en relief de plusieurs mètres de haut représentant une route en carton, Bayrle a thématisé la froideur du monde des machines dans des tons gris, mais aussi son charisme sculptural, voire sacré. Cette impression est renforcée par la bande-son qui accompagne les œuvres exposées, un mélange entre bruits de moteurs et prières enregistrées dans les paroisses de la région de Cassel. Bayrle n’est pas un artiste politique. 34

Son travail ne s’intéresse pas à la critique, mais aux choses qui nous émeuvent, souvent sous un angle qui se veut humoristique. En interview, la directrice de documenta Carolyn Christov-Bakargiev évoque souvent l'âme des choses et la nécessité de reconsidérer notre image d’un monde centré sur l’homme. On pourrait en déduire que les voitures aussi ont une âme. Et y trouver une parenté spirituelle entre l’élite de l'art et la communauté du tuning.

d13.documenta.de

Texte : Hendrik Lakeberg Photographe : Anders Sune Berg

Intersection


Intersection

CULTURE

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installation

Prendre le train du futur L'UFO de Ross Lovegrove se pose en gare de Lille Le designer Ross Lovegrove est fasciné par le mélange des formes organiques et des technologies de pointe. Se qualifiant de « biologiste évolutionnaire », il tente de fusionner ses désirs d’une forme esthétique parfaite avec une économie de moyens toute contemporaine. Originaire de Cardiff, puis étudiant à l’école polytechnique de Manchester et au Royal College of Art de Londres, il a collaboré avec les plus grandes marques : Sony, Apple, Cappellini, Phillips, Olympia, Issey Miyake ou Knoll. Dans ses créations, dont certaines sont exposées au Design Museum de Londres et liées à la mobilité, aussi tenté que l’on soit d’exclure les lignes tout en mouvement de son dessin, on peut retenir le « Bamboo Bike », un vélo en bambou créé pour la marque danoise Biomega. Plus technique encore, son automobile « Kyoto Concept Car » possède une

structure inspirée d’un squelette organique, avec un châssis en matériaux composites dont le poids a été réduit au maximum afin de bénéficier d’une vision à 360°. L’énergie produite par des piles à hydrogène et un panneau photovoltaïque, associée aux pneus de bicyclette en caoutchouc naturel, symbolise la recherche environnementale des créations de Ross Lovegrove. Depuis septembre, il a fait atterrir une soucoupe en pleine gare ferroviaire pour Lille 3000. Le miracle de la téléportation, probablement influencé par ses locaux professionnels qu’il décrit comme un vaisseau spatial, est enfin accessible. Paris-Lille en 30 secondes. À propos de cet OVNI, il déclare : « Mon intérêt pour l’origine de la forme, son but et son évolution m’a amené à un endroit où l’art, le design, la science et la technologie convergent. »

Il veut s’affranchir de la conception influencée par des objectifs commerciaux et industriels afin de proposer une création tournée vers le public, de provoquer sa réflexion sur le monde qui l’entoure et sa situation d’être humain. Laisser libre l’esprit créatif et revenir aux bases de la conception martyrisées par une starification de l’instinct et de l’immédiateté. Il serait temps qu’une véritable rétrospective lui soit consacrée, et l’on prendra le temps de la parcourir tout en fluidité. www.rosslovegrove.com

Texte : Tone Photographe : DR

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CULTURE

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photographie

LA BEAUTÉ DE LA DESTRUCTION EDWARD BURTYNSKY PHOTOGRAPHIE LES STIGMATES DU PÉTROLE

CULTURE

Sans pétrole, le 20ème siècle n’aurait pas été le même. Il a permis des progrès technologiques fulgurants, favorisé la mobilité individuelle et les voyages, révolutionné l’industrie et littéralement façonné le paysage. Aujourd’hui, nombreux sont ceux à proclamer que le 20ème siècle aurait dû se passer du pétrole. La plus importante matière première du monde est aussi devenue son fléau. On ne peut pas faire sans, mais - à long terme - on ne peut faire avec non plus. La destruction de l’environnement provoquée et perpétuée par les hydrocarbures prend des proportions apocalyptiques. Les photos d’Edward Burtynsky illustrent ces rapports de cause à effet de manière saisissante. Inspirés des peintures de paysages du 19ème siècle, ses panoramas nous montrent les traces que le pétrole a laissées sur son passage. Accidents, puits, forages, montagnes de pneus, carrefours gigantesques et raffineries n’en sont que quelques exemples, comme la marée noire dans le Golfe du Mexique en 2010 dont les conséquences

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pollueront encore l’écosystème de l’Atlantique dans plusieurs siècles. Pourtant, le photographe canadien n’a rien d’un militant environnemental. Ses photos documentent plutôt l’ambivalence de cette matière première : tout comme le pétrole n’a pas amené que la destruction, mais aussi des progrès nécessaires, une immense beauté se dégage de ces images parfaitement composées. Burtynsky est un sociologue de l’esthétique. Il est en quête de structures et de motifs graphiques. On pourrait trouver ça cynique. En fait, son travail cache une fascination pour la violence avec laquelle l’homme s’est approprié la planète en un temps record. Voilà pourquoi ses photos suscitent en nous une peur mêlée d’un sentiment de respect pour la planète. www.edwardburtynsky.com

Texte : Hendrik Lakeberg Photographe : : Edward Burtynsky, courtesy of Galerie c/o Berlin

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innovation

le robot qui filmait Ou comment la start-up bot and dolly a importé Detroit à Hollywood 38

INDUSTRIE

Si l’industrie automobile traverse une période tumultueuse, elle réussit pourtant à en inspirer d’autres. Un robot industriel assemble, soude, peint, et peut maintenant réaliser un film. L’histoire de Bot & Dolly a débuté à San Francisco il y a quelques années quand Jeff Linnell, son fondateur, a eu l’idée de convertir un robot d’une ligne d’assemblage d’usine automobile en machine à filmer la plus perfectionnée possible. Dans un premier temps, son expérience de réalisateur et de technicien du cinéma lui a permis de créer un petit bras robotisé contrôlé par une télécommande. Son ambition l’a très vite rattrapé et il a commencé à faire des expériences sur des robots industriels récupérés dans les usines de Detroit. À partir de ce premier succès, le truculent Linnell n’a cessé de relier les champs de la robotique et du design. Aujourd’hui, c’est toute une équipe technique et créative qui se consacre à repousser les limites de la robotique.

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Alors que l’industrie du cinéma fait depuis longtemps appel à des technologies similaires, par exemple le motion control pour programmer le mouvement d’une caméra de manière extrêmement précise, Bot & Dolly a apporté une précision et une vitesse jamais atteintes en utilisant des robots issus de l’industrie automobile, capables de travailler des jours durant sans rencontrer la moindre faille. Les ingénieurs et designers de Bot & Dolly ont conçu une interface simplifiée appelée IRIS pour que n’importe quel artiste puisse interagir avec leurs robots : pas besoin d’avoir obtenu un doctorat en biomécanique au MIT pour travailler avec leurs automates. C’est un plug-in créé pour le logiciel de 3D Maya qui permet de contrôler leurs robots depuis un PC, une télécommande dédiée ou un simple iPad. Des plans très complexes peuvent être cadrés en avance grâce à la plateforme IRIS ; avec cette technologie, on peut aussi déclencher des effets


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INDUSTRIE

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7 1. L’animateur crée le mouvement de la caméra pour la séquence à tourner.

4. Le robot exécute avec précision les mouvements programmés.

2. Les données sont envoyées sur un serveur présent sur le plateau.

5. Le diaphragme et le focus de la caméra s’adaptent à son mouvement.

3. Les mouvements du robot sont contrôlés depuis un iPad.

6. Les lumières s’allument en se synchronisant avec le robot.

7. Des servomoteurs actionnnent des éléments du décor ou déclenchent des signaux pour guider les acteurs.

Page de gauche : Ian Sherman programme le robot Scout (le petit frère d'IRIS). Ci-dessus : Tarik, directeur créatif de Bot & Dolly, avec la commande de contrôle de l’IRIS À droite : Jeff Linnell assis devant le robot IRIS dans leur hangar de San Francisco

spéciaux, guider des acteurs, déplacer des éléments de décor ou des lumières, contrôler les mouvements de plusieurs caméras de manière simultanée avec une coordination d’une précision extrême. Les studios Warner ont expérimenté IRIS pour filmer des séquences de combat en créant un effet zero gravity : sans faire appel aux effets spéciaux, IRIS a été capable de filmer des chorégraphies de combat au plus près de l’action en utilisant des angles jusque là jamais vus dans le genre. En visitant leur hangar sur Mississippi Street, vous pourrez voir une équipe apprendre à un robot comment construire une structure géométrique en Jenga, une autre répéter le prochain spectacle du Blue Man Group à Las Vegas, une armée de programmateurs chorégraphier des spots publicitaires pour Google… Il flotte dans les bureaux de la jeune entreprise une énergie créative peu commune. www.botndolly.com

Texte et photographe : Gilles Uzan 39


collaboration

les ailes du désir Jeremy Scott donne des ailes à Smart

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Jeremy Scott, l’un des designers les plus populaires de sa génération, a pris à la lettre l’idée d’aider la smart ForTwo à prendre son envol sur le territoire américain. Ayant déjà appliqué le concept à un nombre impressionnant de produits, par exemple les fameuses sneakers Adidas, c’est sans retenue qu’il a joué le rôle de Dédale en confectionnant une jolie paire d’ailes pour cette petite voiture, comme si Icare devait échapper à la monotonie d’une industrie automobile alors peu joyeuse. Effet garanti ! La présentation a eu lieu à Los Angeles dans les studios Jim Hanson plutôt habitués aux comiques, mais lorsque la smart ForJeremy est arrivée sur scène pendant que M.I.A. interprétait le titre « Bad Girl », tout le monde a compris qu’une certaine

forme de rébellion venait de s’amorcer. « On roule dans une petite caisse, aux États-Unis, électrique en plus... Et alors ?!? Moi j’ai des ailes !!! » Et oui, car Jeremy est passé outre les contrainte que s’imposent habituellement les constructeurs. Il a juste créé avec passion et de la meilleure façon qui soit pour un habitant de la Cité des Anges. Des ailes, de la liberté. Une petite chose pour s’évader. Avant la soirée, il nous a confié en petit comité qu’il conduit depuis toujours. Il a grandi dans une ferme où il a commencé par conduire des tracteurs vers l’âge de huit ans, puis des motos, et enfin une voiture le jour même de son seizième anniversaire. Les véhicules ont toujours été intégrés à ses activités, à sa vie. D’ailleurs, beaucoup de ses designs textiles s’inspirent d’accessoires de sports motorisés.


Aujourd’hui, on lui donne l’opportunité de travailler lui-même sur un véhicule et il semble apprécier. Il nous explique que l’étape du dessin est semblable à celle d’un vêtement, mais que très vite, la technologie prend le dessus avec des modélisations 3D permettant de visualiser les volumes, suivies d’autres étapes de travail sur les volumes à la clay qui, soudain, affirment bien le caractère industriel du projet. Quelque peu déstabilisant, affirme-t-il, mais finalement excitant. Ensuite, même si la première vision semble celle d’une smart avec des ailes, il s’avère en réalité qu’il a dessiné un concept car dans son intégralité. Le profil général est radicalement modifié grâce aux ailes, mais il y a bien plus que ça : tous les détails ont été revus. Des phares jusqu’aux aérateurs sur

le tableau de bord, des finitions en cuir blanc aux chromes étincelants. Comme dans la création d’un vêtement, tout a son importance. La silhouette bien sûr, mais les matières, les coutures, les boutons comptent tout autant. À la genèse du projet, les idées de Jeremy tendaient vers la pureté et la liberté afin que l’automobile – aussi indispensable que contraignante, intégrée à la culture de son pays mais aujourd’hui mal vue par certains – puisse redevenir désirable. À voir le résultat, on constate que la créativité fait vraiment du bien à la technologie.

Texte : Jeremy Taltaud Photographe : Rankin et Stefan Armbruster (photo de droite) Robe Adidas Originals by Jeremy Scott Stylisme : Götz Offergeld

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deux-roues

33 Tours de piste La Harley Technics Sporty de RSD est un hommage aux platines mythiques de Technics Texte : Lyon Blum Photographe : Stephani Pappas

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INDUSTRIE

Depuis les années 70, aucun fabricant de platines n’a réussi à dépasser ni même égaler les Technics SL 1200 MK2. Heureusement pour tous ses concurrents, le CD est arrivé et ils ont pu se consacrer à d’autres activités et cacher l’abandon du domaine du vinyle à Panasonic (Technics en est une division). Noire, simple et robuste comme un camion pakistanais, cette platine est toujours présente dans les clubs. D’autant qu’aujourd’hui, des systèmes associés à des disques spécifiques permettent de synchroniser les playlists depuis un ordinateur. Quand Panasonic a contacté RSD, la marque cherchait un moyen décalé de promouvoir son nouveau casque DH1-1200. La société Roland Sands Design, basée à Los Alamitos en Californie, est une entreprise de custom fortement influencée par la course, et capable de concevoir et de construire des motos. Ils ont eu l’idée de créer un custom reprenant certains détails visuels propres aux platines, notam-

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ment le dessin des bords du plateau porte-disque. Nous avons contacté Roland Sand, le créateur de la marque : Intersection : Comment est né ce projet ? Roland Sand : Technics était à la recherche d’une idée pour promouvoir son nouveau casque. Mon ami Andy Bell a eu l’idée de départ en intégrant la production d’une chanson et d’un film qui devraient sortir prochainement. Le film montre l’évolution du projet et la musique est arrangée avec les sons enregistrés durant la construction. Inter : Quelles sont les principales modifications sur la moto ? RS : Ce sont surtout les roues et le cadre qui ont demandé le plus de travail. Nous avons changé la forme et la position de conduite de la moto, notamment avec un nouveau réservoir. La plupart des


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INDUSTRIE

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pièces proviennent de mon entreprise et sont disponibles pour ceux qui le souhaitent. Les roues ont été spécialement créées pour rendre hommage au dessin des platines MK2, sur lesquelles nous avons monté des pneus Firestone au look vintage. Inter : Quel était le modèle original ? RS : La base est une Harley Davidson 833 Iron qui possède à l’origine une excellente position de conduite, et un look sympa car déjà peinte en noir. Inter : Quels sont vos prochains projets ? RS : Il y a pas mal de motos en cours, dont une BMW 1000RR, et deux KTM 690 en version cafe racer. Mais surtout, nous allons prochainement lancer une ligne de vêtements.

rolandsands.com

papamobile

À L'ABRI DU BESOIN LE PAPE BENOIT XVI ET SA REazNAULT KANGOO MAXI Z.E. L’amour arrive souvent à l’improviste et rarement au premier regard. Très récemment au Vatican, nous avons pourtant assisté à un vrai coup de foudre : le Pape Benoît XVI a remisé sa vieille Papamobile au garage en échange de cette Renault Kangoo Maxi Z.E., où « Z.E. » signifie Zéro Émission. En roulant pour la première fois à l'électricité et non plus à l’essence, le Pape est entré dans le futur. Lorsqu’on lui a livré sa nouvelle voiture, il est resté près d’elle en riant bêtement comme quelqu’un qui vient de tomber amoureux. Le constructeur français a spécialement fabriqué un modèle adapté au chef suprême de l’Église, avec un énorme toit ouvrant pour saluer les foules et un système électrique pour monter à bord.

peut monter jusqu'à 130 km/h. La batterie doit être rechargée tous les 150 kilomètres, ce qui est largement suffisant : le Pape s’en sert surtout à domicile pour le simple plaisir de se promener dans le parc de Castel Gandolfo, sa résidence d’été. À l’extérieur de la propriété, il doit malheureusement renoncer à ce véhicule écologique qu’il considère comme un outil de travail pour protéger la Création. Un blindage aurait été trop lourd pour la propulsion électrique. De massives limousines Mercedes se chargent de ces transports placés sous haute sécurité. Finalement, c’est encore mieux : un peu de distance attise la passion, et les amoureux sont d’autant plus électrisés quand ils se retrouvent.

Texte : Ryan Latren Photographe : DR

D’un blanc virginal de la carrosserie jusqu’aux sièges, la Kangoo est immatriculée SC V1, c’està-dire « Stato della Città del Vaticano ». D’une puissance de 60 chevaux, la nouvelle Papamobile 43



DESIGN

Métaux précieux Matières nobles et Ruby pour le nouveau scooter Onyx Dans notre dernier numéro, nous avons shooté la supercar Onyx à la carrosserie noire et cuivrée. Pour parfaire cette famille du futur de la mobilité, un vélo et un scooter ont été développés. Propulsé par un moteur hybride, ce dernier propose un mode de sélection du type de conduite original dans la mesure où il est associé à la position du conducteur. En mode sport, les repose-pieds se reculent et permettent d’adopter une position plus couchée. Un mode plus confortable et urbain est obtenu dans la position classique. Alors que Peugeot lance Metropolis sur le marché, un scooter à trois roues plus conventionnel, on observe que cette architecture rencontre un véritable succès et commence à s’imposer dans l’univers des cycles motorisés accessibles avec un permis auto. La motorisation est musclée pour ce concept, avec l’association d’un moteur thermique de 400 cm3 et d’un moteur électrique de 45 kW qui pourrait vous emporter jusqu’à 150 km/h, au-delà du respect des réglementations routières. L’autonomie peut monter jusqu’à 500 km en combinant les deux énergies, de quoi faire Paris-Lyon pour montrer son casque Ruby à sa belle-famille. On aime ce côté trapu, mélange entre les motos d’Akira, le manga culte de Katsuhiro Otomo, et un probable outil de Terminator, car il redore un peu l’image pataude des traditionnels scooter à trois roues.

Texte : Tone Photographe : Pierre Mahieu


salon

SALON DE PARIS

Mon sport favori : l'Haltéro-Civic

L'IL DE MAI IKUZAWA

Mon cousin Ramdane, créateur du parfum Peugeot Onyx : un mélange de bois, charbon, papier et cuivre

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Peugeot 3008 en petite tenue


La coque Spaceframe de l’Audi Crosslane : alu-cinant

Le taxi new-yorkais selon Nissan : j’attends toujours le chauffeur

Simon Sproule, vice-Président du marketing de Nissan et Infiniti Europe, découvrant son double croqué par Tone

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INDUSTRIE

Je négocie avec Giovanni Perosino une Continental GT3 pour l’an prochain

Jean-Pierre Ploué avec Sandeep Bhanbra, le designer du projet Onyx de Peugeot, et moi avec mon sac Petrol Head

Infiniti LE avec son chargeur à induction, comme un Nokia géant

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INDUSTRIE

Un hommage à Charles Stewart Rolls

Abus de champagne sur le stand Rolls Royce, j’ai trouvé l’endroit idéal pour une petite sieste

Le nouveau fessier de la Panamera Sport Turismo

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INDUSTRIE

Détail des freins jaune fluo de la Panamera Sport Turismo

BMW C-Evolution, scooter jaune fluo

Peugeot 2008, jaune fluo... C’est à la mode

L’important, ce n’est pas de gagner sur le plan du moteur, mais sur celui de la couleur : Opel Adam 50


Tout est affaire de taille pour la Fiat 500

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Depuis le temps, il n'a toujours pas maigri

Volvo PLEIN de coussins

Une moto Honda qui n’est pas aux dimensions japonaises : je pourrais déménager ma maison avec ! 51


Elle : combinaison Lacoste lunettes Persol bottes Lacoste Lui : veste Christophe Lemaire t-shirt Dior Homme pantalon Paul Smith lunettes Thierry Lasry bottes Dior Homme

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L'EFFET VETTEL 52


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Sur cette page Elle : robe Lacoste collants Wolford bijoux Delfina Delettrez bottes Pierre Hardy Lui : blouson Pyrenex pantalon Dior Homme lunettes Thierry Lasry

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Page de droite combinaison Lacoste


Le champion du monde Sebastian Vettel débride l'Infiniti FX Elles ne sont pas nombreuses les créations automobiles associées au nom d’un pilote de F1. Il y a bien eu la série limitée de Mercedes avec les modèles Classe A aux couleurs de Mika Häkkinen et David Coulthard et leur flaming fluo sur les flancs, ou encore la plus malheureuse Fiat Stylo diesel signée Michael Schumacher. Aujourd’hui, l’offensive Red Bull sur la F1 accouche d’un missile bien plus proche de la passion automobile. Conçu à l’origine comme le véhicule personnel de Sebastian Vettel, le FX qui porte son nom et arrive sur les routes domestiques est à 99 % identique au concept car présenté au salon de Francfort en 2011. Plus qu’un véhicule, c’est un club fermé que le futur acquéreur va pénétrer. En plus de pouvoir suivre la production de sa voiture sur un iPad offert par Infiniti, il entrera dans la fratrie des propriétaires à qui seront proposées diverses animations et activités sur circuit et soirées.

Les jantes, la calandre, l’extracteur et l’aileron arrière ainsi que la planche de bord et les couvrerétroviseurs sont en carbone, et spécifiques aux 50 modèles prévus pour l’Europe (150 pour le monde). Lors du salon de Genève en 2012, un acheteur impulsif s’est vu offrir, en échange du chèque pour son futur FX Vettel, un volant appartenant à la Formule 1 championne du monde - probablement une réplique - par Christian Horner en personne, directeur de l’écurie de F1 Red Bull Racing. Plus tard durant l’année, nous avons pu entendre et découvrir sur un parking le V8 de 5 litres porté à 420 chevaux caché dans un modèle de série classique. C’est avec plaisir que nous prenons les commandes de celui-ci alors qu’Infiniti nous confie la réalisation d’une série de photos. Le détail qui tue : le feu de stop sur l’extracteur arrière. Emprunté à la Formule 1, il a été développé par Shiro Nakamura, le directeur du design.

Texte : Tone Photographe : Quentin de Briey Stylisme : Tiffany Buathier

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Sur cette page : Manteau Carven Page de droite : Robe Kenzo Collants Wolford Bijoux Delfina Delettrez Bottes Lacoste

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l'histoire de l'air LES LÉGENDES PRENNENT le contrôle 58

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Les sept avions de chasse L-39 Albatros du Breitling Jet Team - la seule patrouille civile au monde à utiliser des avions à réaction - viennent encore de zébrer le ciel du panache de leurs fumées dans un numéro parfaitement orchestré à plus de 700 km/h. Au même moment, Yves Rossy, alias Jetman, s’envole encore une fois avec pour seul aéronef une aile en carbone munie de quatre réacteurs fixée à son dos, alors que les cascadeurs du Breitling Wingwalkers font leur show, exécutant toutes sortes d’acrobaties en se promenant sur l’aile supérieure de leurs antiques biplans Boeing Stearman des années 40. Ce ne sont que quelques exemples parmi les plus spectaculaires de l’engagement de Breitling dans l’aviation, la compagnie horlogère soutenant également les courses aériennes de Reno, Nevada. Elle fait aussi voler l’un des trois derniers Lockheed Super Constellation, le mythique avion de ligne à hélice des années 50 ; et a été partenaire du premier tour du monde en ballon, effectué en 1999 par Bertrand Picard et Brian Jones à bord du Breitling Orbiter 3. L’amour de Breitling pour tout ce qui vole n’est pas un hasard. L’histoire commence en 1884 lorsque Léon Breitling fonde son entreprise spécialisée dans

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la fabrication de chronographes et de compteurs de précision dans le Jura suisse. Le premier chronographe bracelet de la marque est lancé en 1915. Il innove par son bouton-poussoir indépendant, une révolution qui sera encore améliorée en 1934 avec la présence de deux poussoirs séparés, un pour lancer le mécanisme et l’arrêter, l’autre pour le remettre à zéro : c’est le premier chronographe moderne. Pour séduire le monde de l’aviation, Breitling se spécialise également dans la fabrication de chronographes de bord destinés à être intégrés aux cockpits d’avions. L’excellence de la précision de ces instruments fera de la marque le fournisseur officiel de la Royal Air Force dès 1936, puis de l’US Air Force en 1942, qui en équipera ses chasseurs pendant la Seconde Guerre mondiale. La même année, la marque lance la légendaire Chronomat, premier chronographe bracelet équipé d’une règle à calcul circulaire. En 1952 apparaît la Navitimer, qui permet d’effectuer tous les calculs nécessaires à la navigation aérienne et deviendra la montre officielle de la plus grande association mondiale de pilotes, l’AOPA. Un modèle culte que l’astronaute Scott Carpenter portera au poignet de sa combinaison à bord de la capsule spatiale Aurora 7 en 1962.

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Fournisseur attitré des compagnies aériennes du monde entier et de leurs pilotes, Breitling continue d’innover en 1995 avec l’Emergency, une montre bracelet équipée d'un transmetteur capable d’émettre un signal sur la fréquence de détresse utilisée par l’aviation, et d’être détectée à 167 km. En 2003, cette montre a sauvé la vie de deux pilotes d’hélicoptères britanniques qui s’étaient écrasés en Antarctique. Depuis 2009, Breitling fabrique ses propres mouvements de chronographes mécaniques dans l’unité Breitling Chronométrie spécialement créée à cet effet à La Chaux-de-Fonds. Cela en fait la seule grande marque horlogère du monde à pouvoir soumettre l’intégralité de ses mouvements aux tests impitoyables du Contrôle Officiel Suisse des Chronomètres. De quoi garantir une précision irréprochable, que vous soyez aux commandes d’un Airbus A380, ou plus simplement installé quelques rangées plus loin à contempler sereinement les nuages qui défilent derrière le hublot, une coupe de champagne à la main et un chronographe Breitling au poignet.

Texte : Yan-Alexandre Damasiewicz Photographe : Alain Ernoult

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design

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vélos

LA TABLE DES MATIÈRES CATHAL LOUGHNANE, CHEF DU PEUGEOT DESIGN LAB, PRÉSENTE SES CRÉATIONS À DEUX ROUES

Page de gauche : Cathal Loughnane et le Concept Bike électrique EDL122 Page de droite : le Superbike Onyx inspiré du concept car éponyme

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Le rêve est le moteur de l’Homme. Sur le stand Peugeot, on pouvait voir toutes les têtes se tourner, les yeux s’ouvrir grand et les bouches béer en signe d’admiration devant le concept Onyx (présenté dans les pages de notre précédent numéro). Mais il fallait avoir l’œil, et suivre depuis plusieurs mois le travail du Peugeot Design Lab pour donner à cette supercar une famille adéquate. En effet, un vélo et un scooter à trois roues, particulièrement réussi et trapu, entouraient tels des frères d’armes cette fabuleuse machine. Nous avons croisé Cathal Loughnane, responsable des projets du Peugeot Design Lab. Ce studio répond aux appels de clients d’horizons variés en excluant l’automobile de ses domaines d’intervention, et s’intéresse de très près à la mobilité sous toutes ses formes. Intersection : Bonjour Cathal, décrivez-nous votre parcours en quelques mots ? Cathal Loughnane : Je suis Irlandais et j’ai un diplôme d’ingénieur mécanique, mais je n’ai jamais fait d’école de design. Pendant mes deux dernières années d’études, Citroën Irlande a créé un cours expérimental avec des étudiants d’architecture, d’ingénierie et de design produit. L’idée, c’était de faire faire des dessins d’automobiles à des gens qui travaillent plutôt autour des designers automobiles. J’ai gagné la compétition la première année. À la fin de mes études, Citroën m’a proposé un stage à

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Vélizy et deux semaines avant la fin du stage, ils m’ont demandé si j’avais envie de rester avec eux. J’ai ensuite passé dix ans dans l’équipe des designers Intérieur Citroën, où j’ai travaillé sur les détails (sièges, radio) du C5 2ème génération et dessiné l’intérieur du concept car C-Cactus. Inter : Quelle est l’origine du projet Onyx ? CL : À l’origine, l’idée était de créer une supercar pour la marque Peugeot. On voulait créer la voiture ultime avec la Supercar, le scooter ultime avec le Supertrike et le vélo ultime avec le Superbike. Inter : Le projet de départ incluait-il la famille entière ? Quel est le produit qui a donné l’impulsion ? CL : Le temps de développement d’un concept car est beaucoup plus long que celui des vélos ou des scooters. On a commencé la voiture six mois avant les deux autres concepts. Inter : Quelles ont été les influences ? CL : Les influences étaient très variées, mais pour ce projet, il y avait un fort désir de travailler avec les matières d’une manière plus surprenante (cuivre, feutre, papier recyclé, bois, carbone linéaire, etc.). Inter : Quel est l’avenir industriel de ces objets ? CL : La voiture reste un concept, mais si c’est aussi

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le cas du scooter, il est assez proche de celui à trois roues qu’on commercialise, le Metropolis. Le vélo sera commercialisé d’ici 18 mois. Inter : À votre avis, quelles sont les grandes évolutions du cyclisme pour l’avenir ? CL : Le monde du vélo connaît actuellement une grande renaissance. Les vélos sportifs de route sont de plus en plus utilisés pour faire du sport, mais c’est dans le secteur Urban & Électrique que l’on voit le plus d’innovations. On a développé deux concepts, eDL122 et eDL132, pour voir comment cet univers pourrait se développer. Avec plus d’innovation et de fonctionnalité dans le cas de l’eDL122, et plus de dynamisme, de sportivité et de technologie dans le cas de l’eDL132. Inter : Pouvez-vous nous donner quelques directions sur vos prochains projets ? CL : Hélas non, notre « clients’ list » reste strictement confidentielle. On a plusieurs projets en cours dans le monde de l’aéronautique, du nautisme et du sport.

Texte : Ryan Latren Photographe : Pierre Mahieu

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vélos

Les idées s'enchainent Les vÉlos modernes joignent l'utile à l'agréable

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Donky Bike PAR Ben Wilson Le Donky Bike est le fruit d’une discussion entre Ben Wilson et Jonathan Pooley. Il est conçu pour tout urbain désireux de transporter des charges lourdes sans polluer. Ainsi les emplacement réservés au « fret » sont directement liés au cadre, ce qui permet d’accroître la stabilité du vélo même lorsqu’il est très chargé. Ses roues de type BMX à larges pneus assurent une tenue de route sécurisante, tant

sur pavés que sur bitume. La roue arrière intègre un dérailleur 3 vitesses qui ne nécessite aucun entretien. Enfin, les supports pour chargement sont amovibles. Donkybike.com

La réflexion autour des problèmes environnementaux aura permis à l’industrie, et plus encore aux designers, de proposer de nouvelles interprétations autour d’un format qui semblait presque figé à jamais. Porteurs, pliants ou toutterrain, les vélos profitent aussi bien d’un apport énergétique que de l’imagination sans limite de leurs créateurs. Voici quelques réalisations étonnantes et indispensables. Texte : Yann Chénot Photographes : DR

Bomber par Stealth Electric Bikes Vélo idéal pour l’entraînement tout-terrain ou pour la descente grâce à ses suspensions à grand débattements. Structure composée d’alliages au chrome molybdène, avec un moteur d’une puissance de 4,5 kW. Vitesse maxi : 80 km/h. Autonomie : 80 km. www.stealthelectricbikes.fr

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design

starter

Folder par Mikulas Novotny Composé d’une structure tubulaire en alliage de chrome molybdène, ce vélo se plie et se déplie avec une grande facilité. Contrairement à d’autres concepts, il présente l’avantage d’être parfaitement roulant, même une fois replié, ce qui permet de le déplacer en le tenant par la selle. Avec ses larges pneus montés sur des jantes de 26’’, il est à l’aise avec les trottoirs ou sur les marches d’un escalier. Enfin, via un antivol, sa méthode de pliage permet de sécuriser les deux roues ainsi que le cadre pour éviter les mauvaises surprises. www.mikulasnovotny.tumblr.com

bicymple par josh bechtel Le vélo simplifié, avec structure tubulaire en chrome molybdène. Pédalier intégré au moyeu de la roue arrière. www.bicymple.com

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Traverser les nuages le nouveau Cirrus SF50 prend son envol

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Il s’agit du premier « personal jet » pensé pour être piloté par son propriétaire et c’est pourquoi son cockpit reprend le design novateur et la disposition de ses cousins monomoteur. Comme à l’accoutumée, Cirrus a misé sur la sécurité puisque la cabine est équipée du fameux parachute (le Cirrus Airframe Parachute System) qui avait fait la renommée de la firme sur ses modèles SR20 et SR22. Enfin, les sept sièges sont dotés de ceintures 3 points. La structure du SF50 est entièrement réalisée en fibre de carbone et l’équipement intérieur révèle toute l’attention portée au pilote ainsi qu’aux passagers : air conditionné, sièges inclinables et modulables comme dans un luxueux monospace aux vitres teintées. Par sa compacité et sa courte distance de décollage, le SF50 est parfaitement adapté aux petits aérodromes, ce qui en fait un avion idéal pour prendre le petit-déjeuner au Plaza Athénée et faire quelques tours de roues au Castellet avant d’aller dîner au Petit Nice. Dans les airs, le temps est aussi à la sobriété en

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matière de consommation de kérosène, ce qui explique pourquoi Cirrus souhaite faire du SF50 le jet le plus économe de sa catégorie. Son altitude de croisière est de 28 000 pieds, soit 8 500 mètres environ pour une vitesse de 300 nœuds (480 km/h). Bien entendu, le service de personnalisation Xi de Cirrus vous permettra de choisir les matériaux et la finition, mais aussi l’aménagement de la cabine de votre jet afin de concevoir l’avion de vos rêves. Envergure : 11,73 m Longueur : 9,02 m Prix : 1,96 million de dollars US

Texte : YC Photographe : Cirrus Aircraft


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restauration

Prendre de l'attitude THE Rosebery, le restaurant mobile

Texte : Yann Chénot Photographe : DR

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Quel est le point commun entre un bus à impériale londonien et un bar à cocktail ? Aucun, me direz-vous, si ce n’est une certaine « English touch ». The Rosebery, c’est la rencontre improbable entre un bus Routemaster né en 1966, un bar à cocktail et un restaurant résolument contemporain. Le Routemaster, fameux bus londonien à impériale construit de 1956 à 1968 par l’Associate Equipment Company dans les ateliers de Southall à Londres, n’a été retiré du service qu’en 2005. Fruit de l’imagination de son créateur Simon Davis, dont le but était de réaliser un « private club » sur roues, The Rosebery doit son nom à la dernière ligne sur laquelle le bus a circulé : the Rosebery Avenue à Londres. Dans sa partie basse, The Rosebery dispose d’un bar où les convives se délecteront de cocktails tels le fameux Pimm’s préparés avec soin par le barman Joseph Railton. L’étage est des plus étonnants puisqu’il a été repensé pour accueillir 18 personnes autour d’un repas dans le calme avec vue imprenable sur l’extérieur : l’idéal pour assister à un tournoi de polo à Covent Garden ou admirer les sublimes carrosseries du festival de Goodwood. Les intérieurs se parent d’éléments nobles, comme

les boiseries suggérant l’élégance des yachts Riva ou les cuirs fidèles à la plus pure tradition anglaise puisqu’ils proviennent du même atelier que ceux équipant les intérieurs de Bentley et Morgan. The Rosebery se déplace en Grande-Bretagne et dans l’ensemble de l’Europe au gré des événements. Simon Davis a également co-fondé le festival annuel du restaurant à Londres. www.therosebery.com

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architecture

JARDIN MOUVANT Le transport de graines de Maria Thereza Alves et Gitta Gschwendtner Maria Thereza Alves est une artiste brésilienne née en 1961 qui réside maintenant à Berlin. Son œuvre à la fois écologique, politique et humoristique emprunte aussi à l'archéologie, comme en témoigne le projet « Seeds of change » qu’elle développe maintenant depuis plusieurs années. Son but ? Mettre en évidence l’influence, l’histoire et la géographie secrète des plantes. L’artiste mène ses

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design

recherches dans les villes portuaires où, au fil des siècles, des navires venus des quatre coins du globe ont déposé graines et semences de toutes sortes. Celles-ci ont donné vie à un spectre étendu de plantations qui ont germé au milieu du ballast, cet ensemble de terre, de pierre et de sable utilisé jadis dans les cales pour maintenir les embarcations à flot une fois les marchandises livrées, puis délesté un peu n’importe où. En résultent une nouvelle cartographie de la mondialisation et une possible réinterprétation de l’histoire des migrations à travers la vie des plantes. Avec l’aide du Jardin botanique de l’université de Bristol, Maria Thereza Alves a récemment créé « Floating Harbour », une plateforme de ballast mouvant accumulé dans la rivière de Bristol entre 1680 et 1900 pour redonner vie aux plantes qui jonchaient le lit du cours d’eau. Cette variété inédite de graines étrangères représente le passé maritime et l’histoire commerciale de l’île, et a plus généralement forgé le paysage européen d’aujourd'hui. Ce jardin mouvant a été conçu par la designer allemande Gitta Gschwendtner avec l’appui du centre artistique Arnolifini, d’ailleurs chargé de partager

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le projet avec les écoles et la communauté, chacun s’occupant de faire vivre le jardin. Cette énorme jardinière en pin traité forme un toit au-dessus de l’ancienne barge de 140 tonnes d’acier renforcé. La cale maintenue au sec est pourvue d’un système d’irrigation qui pompe l’eau directement dans la rivière, tandis que l’éclairage est évidemment assuré par des panneaux solaires. La structure est munie d’un coin salon et d’une zone centrale surélevée qui offre une vue d’ensemble sur le jardin. La prochaine ville-étape n’est pas encore connue. Texte : Rod Glacial Photographe : Max McClure


Intersection

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architecture

Le futur du fleuve le studio anglais Sanitov éclaire son mobile-home aquatique À l’instar du Japon et de ses villes flottantes, le studio londonien Sanitov mêle environnement et esprit urbain pour s’interroger sur la possibilité de régler les problèmes de surpopulation à l’aide de maisons flottantes. Son objectif est clair : arrêter d’interpréter la ville et la changer. C’est d’ailleurs pour ça qu’il a intitulé son projet « Future Cities », dont la pièce « Inachus » (dieu du fleuve dans la

mythologie grecque) fait partie. Cette demeure moderne et luxueuse au design forcément scandinave (Alexander Host, Fritz Hansen) fait figure d’application géante entièrement télécommandée par smartphone ou tablette. La maison de deux étages présentée le mois dernier au London Design Festival possède de nombreuses pièces et tout le confort imaginable, mais paradoxalement, elle ne consomme que très peu d’énergie grâce à un système de triple vitrage, de stores régulant la lumière du jour et de ventilation

croisée. En faisant rimer écologie, biologie et technologie, l’ambition de Sanitov consiste à créer à plus grande échelle des communautés de maisons individualisées, ou villages flottants. Avec un prix de base de 750 000 £, on peut douter que leurs villages futuristes poussent comme des champignons.

Texte : Tone Photographe : DR

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atelier-zuppinger.ch

Ancre Amarrage ou pièce de haute horlogerie ? découvrez l’univers de l’horlogerie d’exception, sur www.hautehorlogerie.org Ancre | Organe, en acier ou en laiton, composant l’échappement d’une montre ou d’une pendule. L’ancre, dont la forme rappelle celle d’une ancre de marine, a un double rôle : d’une part transmettre la force du ressort par l’intermédiaire du rouage au balancier afin de faire perdurer les oscillations et, d’autre part, empêcher le déroulement incontrôlé du rouage remonté. PARTENAIRES DE LA FONDATION | A. LAnge & Söhne | AuDEmARS PIguET | BAume & mercier | BOvET | cArtier | ChANEL | chopArd ChRISTOPhE CLARET | corum | DE BEThuNE | greuBeL ForSey | hARRy WINSTON | hermèS | huBLOT | iWc | JAEgER-LECOuLTRE | montBLAnc PANERAI | pArmigiAni | PERRELET | piAget | RIChARD mILLE | roger duBuiS | TAg hEuER | VAcheron conStAntin | vAN CLEEF & ARPELS | Zenith


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galerie purs produits de la mobilitĂŠÂ :

cadeaux tenues bagages photo montres boombox


Sur cette page : costume De Fursac mallette Tumi chaussettes Archiduchesse chaussures Nike sculpture Philolaos Page de droite : veste et chemise Tommy Hilfiger mallette Ralph Lauren gants Lavabre Cadet


UN HOMME PRESSÉ photographe : ALEXIA CAYRE STYLISME : JOSIA.N


Sur cette page : veste et chemise Balibaris gants Mahiout mallette Lanvin Page de droite : costume Scabal gants Georges Morand mallette Louis Vuitton chaussures Nike



court circuit Une équipe d'apn sur la ligne de départ de 2013. Légèreté et gain de place, pour figer l'image parfaite de la mobilité.

photographe : pierre mahieu sélection : benoit gaildraud

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1. Panasonic DMC LX7, rien à voir avec la Delorean Motor Company, mais particulièrement lumineux grâce à l’optique Leica. 10 mégapixels. 499 euros 2. Leica X2 Paul Smith, série limitée à 150 exemplaires, 16,2 mégapixels de style. 2 400 euros 3. Sony DSC RX100, 20 mégapixels avec objectif Carl Zeiss, étui cuir en option. 650 euros

4. Fujifilm XF1, pour shooter les bolides au GP de Suzuka. 12 mégapixels. 499 euros 5. Pentax Optio LS465, ce n’est pas la dernière berline Lexus, en revanche vous pouvez personnaliser la face avant du boîtier. 16 mégapixels. 109 euros


1. Nikon Coolpix S01, 100 g avec une interface tactile à piloter du bout des doigts. 10 mégapixels. 149 euros

3. Panasonic SZ5, zoom puissant, WiFi et optique Leica. 14 mégapixels. 200 euros

2. Samsung MV900F, connectivité Wi-Fi intégrée et tweet en un clin d’œil. 16 mégapixels. 299 euros

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1. Cabas Pierre Louis Mascia 2. Sac de voyage Gucci 3. Porte-document spĂŠcial iPad Lanvin

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plaisir intégral photographe : bastien lattanzio

l'aventure à succès des casques ruby se poursuit avec la sortie d'un intégral : le castel


José Mendes Profession : chargé de projet Concept Car Renault Design Moto : Honda 750 Seven Fifty Casque : Castel Alpine et visière Ruby Eclipse carbone


Stéphane Lascols Profession : brocanteur Moto : Triumph TR6R Casque : Castel Gabriel et visière Ruby Eclipse rouge course


Flavie Demurat Profession : comédienne Moto : Triumph Thruxton 900 Casque : Castel St-Germain et bandeau-écran Ruby Loup


Alexandre Billard Profession : fondateur des magasins Triathlon et Bicycle Store Moto : Heritage Paris sur base de Yamaha 650XS de 1978 Casque : Castel St-Roc avec visière Ruby Visa


Grégory Miellou Profession : organisateur du Tour Auto Optic 2ooo Moto : Norton Commando 961 Sport Casque : Castel Louis Lumière et blouson en veau Ruby Pilote


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Couteau Leatherman Lunettes de ski Oakley

Jeu de cartes Hermès

tombés du traineau photographes : florence tétier et florian joye sélection : josia.N


Montres Hublot Classic Fusion Extra Plate


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Bracelets Le Gramme

Stylo Mont Blanc Gaius Maecenas

Chaussures Kenzo

Bougie Byredo Pochette Junn J Livres ĂŠtudes books : Matador par Nicolas Hosteing et Car Crash Studies par Nicolai Howalt


Pochette Givenchy

Montre Nixon The Kensington - Peppermint Fixation de snowboard Burton


heures blanches pour boites noires on les cherche dans les Profondeurs ou sur les sommets. véritables mémoires de l'avion, les boites noires se sont figées en un instant. Portant les stigmates d'un choc ou d'une extraction comPliquée, elles servent de Présentoirs aux merveilles de Précision, dont les battements leur redonneront un Peu de ce temPs qui s'est écoulé. photographe : charles helleu sélection : patrice meignan


Bell & Ross BR01 Turn Coordinator. Mouvement automatique et bracelet caoutchouc.



Page de gauche : Omega Speedmaster Spacemaster Z633 chronographe en acier sur bracelet caoutchouc. Page de droite : Panerai Luminor Submersible Amagnetic Titanio, réserve de marche 3 jours, boitiers titane



Page de gauche en haut LONGINES Avigation Watch Type A-7 en bas Jaquet Droz Grande Seconde Email Ivoire, cadran en émail Grand Feu ivoire, boîtier en or rouge 18 carats Page de droite IWC Big Pilot Calendrier Perpétuel Top Gun



Patek Philippe 5960R - 010 Rose Gold chronographe à quantième annuel


mode de transport photographe : nicolas coulomb stylisme : PAU AVIA

6 moyens de se mouvoir, 6 créateurs de mode. notre guide printemps/été 2013

01 bateau/ ZEGNA Notre suggestion de bateau : Wally Better Place


02 ski/ thierry mugler Notre suggestion de skis : Black Crows Corvus 193


03 automobile/ lanvin Notre suggestion de voiture : McLaren MP4-12C Spider


06 plongĂŠe/ louis vuitton Notre suggestion de bateau : Garcia GTR54


05 vĂŠlo/ prada Chaussures : Nike Free Run 4.0 Notre suggestion de vĂŠlo : Pluma


04 moto/ balmain Notre suggestion de moto : Avinton Collector GT

Direction artistique : Florence Tétier@ monsieurlagent Assistante styliste : Olga G. Ventura Coiffure : Gilles Degivry @artlist Maquillage : Lucie Mannequin : Barnaby Dunn @newmadison Remerciements à Philippe Accarias


les lignes du temps photographe : jérôme bryon sélection : patrice meignan


Page de droite : Louis Vuitton Tambour Voyagez II Avec son cadran gris directement inspiré des tableaux de bord des voitures sportives des années 70, la Tambour Voyage Steel évoque l’univers de la compétition automobile.

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Page de gauche : Lamborghini Diablo 6.0 SE Rolex Oyster Perpetual DayDate II Dernière du modèle DayDate, la Oyster Perpetual Day-Date 2 est dotée d’un mouvement mécanique à remontage automatique certifié suisse.

Page de droite : McLaren MP4-12C Tag Heuer MP412C De par sa couleur, ses matériaux et ses formes, la MP4-12C rappelle clairement le bolide éponyme de chez McLaren. Version limitée à 1 000 exemplaires. 105


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Page de gauche : Mercedes SLS AMG Jaeger Lecoultre Reverso à Triptyque La Reverso à Triptyque est la montre présentant le plus de complications, 18 au total. Grâce à son légendaire boîtier réversible, elle est la première à présenter 3 faces exprimant 3 dimensions du temps, à savoir le temps civil, le temps sidéral et le temps perpétuel. Limitée à 75 exemplaires. 106

Page de droite : BMW M6 Cartier Rotonde Or Gris Complication Astrotourbillon, boîte en or gris 18 carats, couronne perlée ornée d'un saphir cabochon et glace saphir.


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De gauche à droite : Lamborghini Diablo 5.7 Evolution Corum Ti-Bridge Power Reserve Titanium La TI-BRIDGE POWER RESERVE représente l’interprétation contemporaine de l’esprit Golden Bridge avec son mouvement baguette horizontal maintenu par 4 brides recouvertes de ruthénium. Série limitée à 700 exemplaires. 108

Breitling Avenger Seawolf Le nom Avenger Seawolf Blacksteel Code Yellow en dit long sur ce modèle robuste, puissant, étanche jusqu’à 3000 m et doté d’un boîtier en acier noir traité à base de carbone. Édition limitée à 1 000 exemplaires.

Urwerk UR-110 Avec son heure satellite sur rouages planétaires qui s’affiche sur la droite du cadran grâce à une construction à trois niveaux de complexité, la UR-110 est un véritable concentré de mécanique de précision et de complications.

Hublot Classic Fusion Squelette Tourbillon Avec son design graphique, racé et moderne, ce mouvement inspiré du squelette doit l’intensité de sa couleur or au subtil alliage développé par Hublot. Version limitée à 99 exemplaires.


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Hublot King Power Unico GMT

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Page de gauche : Romain Jerome Steampuank Metal Chrono

Merci à Elite Rent Genève www.eliterent.com

À l’approche du centième anniversaire du Titanic, Romain Jerome lance la Steampunk Metal Chrono qui ne présente pas de cadran. La lunette se compose d’une fusion extraordinaire entre le métal de l’épave du Titanic et celui fourni par Harland & Wolff, le chantier naval de Belfast où fut construit le paquebot. Édition limitée à 2 012 pièces.

Page de droite : Piaget Emperador Coussin Quantième Perpétuel D’une grande rareté, la Emperador Coussin Quantième Perpétuel est issue de la rencontre de deux univers, la haute horlogerie et la haute joaillerie. Entièrement sertie de diamants, elle est éditée à un nombre d’exemplaires très limité et confidentiel.

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si t'as le pedigree, î‚‚a se reconnait aux db photographe : fabien dumas stylisme : josia.n sĂŠlection : benoit Gaildraud


100.2 db manu le malin ghost train Boombox Party Machine Philips FWP3200 avec table de mixage intégrée 329 euros

Survêtement Puma Black Label by Hussein Chalayan


99.7 db LIZA N’ELIAZ astropolis 1995 Dock Boombox Sony G-Tank 230W 300 euros

89.3 db laurent ho RIOT Enceinte portable Eton Rukus Solar 190 euros

Survêtement et polo Lacoste

Blouson, pantalon et chaussures Adidas by Jeremy Scott


95.1 db frankie jones mayday 94 Boombox Bluetooth TDK Boombox avec batterie lithium intégrée 350 euros

Survêtement Reebok

95.9 db lenny dee forgotten moments Boombox étanche PIONEER STEEZ TYPE Z 399 euros

Parka, polo et pantalon Nike NSW Chaussures Nike Free Run


1962 Ferrari 250 GT PininFarina CabrioleT Série 2 avec hardtop • Est. : 600 000 – 800 000 e

1929 DueSenberG J ConVerTible Par murPhy Est : 850 000 – 1 100 000 e

1956 maSeraTi a6 2000 allemano Est. : 425 000 – 500 000 e

1932 buGaTTi 57 CabrioleT Par VanVooren Est : 650 000 – 850 000 e

1953 FiaT 8V ViGnale Est : 750 000 – 850 000 e

1970 lamborGhini miura S Est : 380 000 – 480 000 e – SanS PriX De rÉSerVe

1936 TalboT laGo T150C # 82930 Ex usine Ex Le Mans – Ex Mille Miglia Est. : 1 200 000 – 1 600 000 e

artcurial motorcars À rÉtromobile vendredi 8 fÉvrier 2013 Vente officielle du salon • paris

exposition publique: 6 – 8 février 2013

Vente aux enchères : 8 février 2013

MOTORCARS

Catalogue: Sur demande et en ligne sur www.artcurial.com/motorcars

Contact : +33 (0)1 42 99 20 56 motorcars@artcurial.com www.artcurial.com/motorcars

7, Rond-Point des Champs-Élysées 75008 PARIS Tél. : +33 (0)1 42 99 20 56 | Fax : +33 (0)1 42 99 16 39 motorcars@artcurial.com | www.artcurial.com/motorcars

Agrément CVV du 25/10/2001


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PILOTES magnus walker sur la icham lhalou parent route avec : claude gérald passédat

patrice le quément christophe marc horowitz

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Texte : sébastien carayol Photographe : nikolaus jung

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chevaux au vent

la prÉparation magique du sorcier mÉcanicien magnus walker Magnus Walker, c’est une version Hell’s Angels du Père Noël, sauf que sa hotte est remplie de Porsche 911 classiques. Héros du documentaire « Urban Outlaw », le gourou barbu du Flat-6 profite de sa sortie pour parler de ses caisses favorites, de son approche de sommelier ferdinandophile et de la sensation de se retrouver du mauvais côté d’un flingue policier… Ne jamais juger un livre sur sa couverture, prévient le proverbe rasta. Exemple type : Magnus Walker, 45 ans. Sous ses faux airs de druide perché qui aurait abusé de la salsepareille, barbe au vent et dreadlocks arachnéennes jusqu’au postérieur, se cache en fait l’une des figures les plus respectées du milieu volontiers cul serré de la Porsche 911, un lutin/biker anglais qui, depuis son atelier de Los Angeles, réinvente une philosophie autour de la mythique version sport de la Coccinelle. Qui l’eût cru à première vue ? Magnus est un homme de goût, un vrai, aux choix stylistiques toujours justes : pour preuve, il a du mal avec les 911 sortant de l’âge d’or (1964-73), sans être devenu pour autant un ayatollah de la restauration à l’identique. Dans son immense loft de downtown acheté en 2000 pour une bouchée de pain avant la gentrification du coin, il s’autorise à appliquer l’expérience de ses vies passées à la 911, la traitant avec un style très per-

sonnel sans jamais la défigurer – insufflant dans ces cercles volontiers conservateurs un esprit très cafe racer, finalement à mi-chemin entre la rétro et la personnalisation par petites touches élégantes. Techniques venues du hot rod (sacrilège !), selleries parfois tartan : Magnus travaille façon patchwork sur une voiture. Atavisme normal. Arrivé d’Angleterre sans le sou au début des années 90, il a bâti une petite fortune dans la sape tout au long des Nineties. Au début, il customisait des fringues vintage, et ça a marché. Alors il a fabriqué des chapeaux réversibles type « Billy Ze Kick ». Ça a couru. D’abord vendus sur le boardwalk de Venice, Madonna et les Smashing Pumpkins ont fini par se les arracher. Sans ces années de vache enragée, Magnus n’aurait sûrement jamais développé cet œil si sûr pour ce qui a du style et ce qui n’en a pas : quand on transporte à pied des sacs entiers de fringues à revendre à Buffalo Exchange, mieux vaut savoir trier… Alors qu’il poursuit son histoire, la suspicion devient évidence : un mec aussi incroyablement cool, au parcours aussi atypique méritait une visite d’Intersection. Qu’est-ce qui se cache derrière le foisonnant rideau de kératine ? Magnus Walker, « urban outlaw » autoproclamé dont chaque nouvelle création est attendue comme un oracle ! Interview à 120 mph…

Intersection : Ton premier souvenir de 911 ? Magnus Walker : La première que j’ai vue en vrai, une 930 Martini Turbo de 1977 au London Motor Show de la même année, où j’étais allé avec mon père. Dans la foulée, j’ai écrit une lettre à Porsche pour devenir designer chez eux, mais ils m’ont dit de les recontacter plus tard. J’avais dix ans… Inter : Comment un gamin de Sheffield a-t-il pu trouver un emploi de dieu vivant de la 911 à Los Angeles ? MW : Je suis arrivé aux US à 19 ans pour travailler dans une colonie de vacances vers Detroit. Je me disais juste que n’importe où serait toujours mieux que Sheffield. Mon obsession pour les 911 a commencé quand j’ai pu me payer ma première, à 25 ans. C’était ma troisième bagnole. Inter : Tu l’as toujours ? MW : Oui. C’est une 930 Turbo de 1976. Mes autres préférées du moment sont ma 911 de 1964, et surtout ma 71T préparée course, numéro 277. C’est comme une vieille paire de pompes qui ne serait pas parfaite mais qui t’irait comme un gant ! Inter : Pourquoi se limiter à la période 196473 ? MW : Parce que c’est le début de la 911 : ligne 119


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pure, classique, avant les pare-chocs trop présents. J’ai des lubies. En ce moment, je collectionne donc les 930 3L Turbo période 1975-77. Inter : Tu es connu aussi pour certains détails qui font ta signature – lesquels ? MW : Ils sont souvent inspirés par la 911-R de 1968, genre les louvers sur le capot moteur, quelques touches venues du hot rod aussi. Inter : Au fait, ce look, pas très porschiste, si ? MW : Disons que personne ne me l’a jamais reproché en face. Inter : Conduire une 911 préparée course à L.A., qu’est-ce que ça dit niveau flics ? MW : J’ai eu à peu près tous les PV possibles, de conduite dangereuse à excès de vitesse en passant par « défaut de clignotants » ! La fois la plus tendue reste celle où les flics m’ont pointé un gun dessus, au milieu des années 90, à l’époque où downtown était super sketchy. Ils trouvaient que rouler pied au plancher dans les rues désertes n’était pas une super idée. La chance que j’ai eue, c’est qu’ils m’ont arrêté pile dans ma rue et ont pu tout vérifier sur place – mon adresse, etc. Autrement, je ne sais pas si je serais là pour en parler !

J'ai eu à peu près tous les PV possibles, de conduite dangereuse à excès de vitesse en passant par "défaut de clignotants" ! 120

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Texte : tone Photographe : bastien lattanzio

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atlas routier

Le designer Hicham lahlou redessine les routes du maroc Jeune designer marocain et créateur multiplateformes, Hicham Lahlou fait partie des relations privilégiées du magazine Intersection. Récemment nommé « Designer industriel de l’année 2012 » par l’influent site canadien EGODESIGN dans le cadre de « l’Année Internationale du Design Écologique », il projette son travail vers un avenir que nous souhaitons prolifique tout en tenant compte de l’héritage culturel qui est le sien et des problématiques liées au futur de la mobilité. À l’heure où il appose sa patte sur le paysage urbain du Maroc, nous le croisons dans les rues de Marrakech pour évoquer ses activités et ses projets. Inter : D’où venez-vous ? Hicham Lhalou : Je suis né à Rabat, puis parti à Paris à 16 ans. J’ai vadrouillé aux ÉtatsUnis à 23 ans, suis revenu au Maroc à 25 ans, et depuis, je reste un perpétuel globe-trotteur grâce aux voyages professionnels, salons, expos, conférences… Inter : Où vivez-vous ? HL : À Casablanca, la capitale économique du Maroc. Inter : Où aimeriez-vous aller ? HL : En Asie, un territoire de la planète que j’ai découvert récemment avec une grande émo-

tion. J’ai adoré Hong Kong et je rêve de visiter le royaume du Bhoutan. Inter : Pourriez-vous nous décrire votre activité ? HL : De la création qui s’exprime à travers l’architecture d’intérieur, le branding, le design d’objets, de mobilier urbain, les grands projets urbains en lien avec la mobilité, par exemple le futur plus grand auvent de péage d’autoroute du Maroc qui fera 132 mètres de long, 15 mètres de large, et 7,5 mètres de haut, et sera réalisé en Ductal ou équivalent (béton ultra haute performance), un véritable ouvrage d’art, ainsi que plusieurs projets d’hôtels. Je développe également des œuvres d’art en série limitée exclusive pour GVCC Gallery à Casablanca, de nouvelles collections pour des marques éditeurs dans le design en Italie et en France, notamment pour l’emblématique Ecart International. Je viens de prendre la direction artistique d’une nouvelle marque internationale aux racines marocaines dotée d’un riche savoir-faire dans l’artisanat de luxe et l’industrie. Je vais miser sur mes 20 ans d’expérience dans le domaine de l’artisanat et de l’industrie, et tenter de venir insuffler ma vision dans l’artisanat, qui représente un patrimoine séculaire au Maroc et pour lequel j’ai une vision très complémentaire de ce qui se fait actuellement. Une conférence de

presse sera donnée en ma présence à Dubaï en décembre 2012. Sinon, je gère mon agence 1852 & Co, je manage une équipe composée à 100 % de compétences locales, ainsi que des collaborateurs externes. Je me déplace dans le pays mais aussi beaucoup à l’étranger, et je mets un point d’honneur à toujours m’investir personnellement dans mes projets. Inter : Comment avez-vous su quelle serait votre profession ? HL : Par hasard. Comme j’étais un peu réfractaire aux directives des adultes et que l’on m’avait orienté vers des études d’électrotechnique, je suis parti dans une tout autre voie, celle de l’art en général, et plus particulièrement de l’architecture d’intérieur et du design, un domaine qui m’ouvrait un sacré horizon en termes de créativité et de possibilités. Depuis mon plus jeune âge, j’ai toujours été attiré par l’histoire, les civilisations, la culture, l’architecture, et c’est ce qui m’a naturellement porté vers l’art. Inter : Est-ce le dessin ou le produit qui vous a poussé vers le design ? HL : C’est le dessin, et ce bien avant mes études. Inter : Quelles sont vos influences, les personnages qui vous ont marqué ? 123


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HL : Il y en a beaucoup. Léonard de Vinci et son génie inventif, le designer Roger Talon, l’architecte Robert Mallet Stevens, le mouvement du Bauhaus, le style nordique européen dans le design, le design japonais, les arts décoratifs du Maroc et de France. Inter : Quels sont vos axes de réflexion lorsque vous démarrez un projet ? HL : Envisager la logique d’ensemble, voir ce qui se fait de plus classique en ce sens et partir aux antipodes en déconstruisant le principe puis en le remontant à ma façon. Un peu comme un mécanicien qui démonterait une voiture. La remise en question de tout peut parfois déboucher sur d’excellentes surprises. Inter : Y a-t-il un domaine de recherche que vous n’avez pas encore exploré et qui vous attire ? HL : Il y en a énormément. Quand on est un touche-à-tout, la curiosité est sans borne. J’ai récemment été juré pour la saison 2 d’une émission internationale au Qatar qui s’appelle « Stars of Science ». Diffusée aux quatre coins du globe, elle promeut la science et l’innovation dans le monde arabe. J’y ai été convié pour apporter mon regard de designer sur certaines inventions scientifiques et j’ai découvert des concepts vraiment révolutionnaires du point de vue de la recherche et du développement. C’est véritablement un domaine qui me fascine. Inter : Dites-nous quelques mots à propos de la FEMADE. HL : C’est la première fédération marocaine de design et de design industriel. Je l’ai fondée en 2009 dans le but de sensibiliser les PME et les PMI à la notion de design et de créer un pont entre ces entreprises et les agences de design. Elle est domiciliée à la CGEM, le syndicat du patronat marocain. Initiée à Genève par le Wipo, une grande exposition a été organisée à Casablanca le 26 avril 2011 avec l’OMPIC sous l’égide du Ministère du Commerce et de l’Industrie autour du thème « Design, Concevoir le futur ». Cet événement nous a permis de faire reconnaître les compétences et le design marocains. Inter : Aujourd’hui, vous travaillez sur le réseau autoroutier marocain. Quelles sont les notions spécifiques à cette région, et en quoi la mobilité y est-elle résolument différente, par exemple de l’Europe ? HL : En m’attaquant à ce projet de design de signalétique et de mobilier pour le réseau autoroutier, inconsciemment j’avais toujours en tête l’idée de cohésion et d’unité du territoire, une notion très forte au Maroc. Où que l’on se trouve dans le royaume, tout devrait selon moi refléter une identité commune, une certaine forme d’harmonie visuelle. Ainsi, l’objec124

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tif d’uniformiser un système de signalétique et de mobilier urbain offrant des repères visuels à la fois utiles, sécurisants et informatifs en termes de prévention et de patrimoine revêt un caractère profondément important et porteur de sens. Les autoroutes font partie des projets structurants pour l’avenir de la mobilité et des flux de toutes sortes. Inter : Comment voyez-vous le futur de la mobilité sur le continent africain ? HL : Des réseaux plus denses, des régions désenclavées, des ports et des aéroports qui se développent, des concepts spécifiques proches des attentes et drainant une forte valeur ajoutée avec une identité et des compétences locales mises en avant. J’espère en même temps que cela se fera avec une utilisation optimisée des ressources au niveau local et dans le respect de l’environnement. Inter : Quelle place l’aspect environnemental occupe-t-il dans vos projets ? HL : Mon travail s’intègre dans le paysage. J’essaye à tout prix d’éviter le choc visuel en imaginant des concepts esthétiques qui répondent à une logique de situation où architecture, histoire, comportements sociologiques, contraintes locales et part de rêve s’entremêlent. La plupart des matériaux sont durables, exploités et produits localement quand c’est possible. Les traitements de surfaces sont les moins nocifs possible, surtout dans les intérieurs. Inter : Vous intéressez-vous à l’automobile ? HL : C’est une vraie passion. Une relation basée sur les sensations, sur l’histoire que la voiture raconte, sur l’origine de la marque, sa cohérence, c’est une vraie culture. Pour moi, le nec plus ultra reste la Porsche 911, discrète et belle. J’admire les belles Américaines comme la Mustang 1962 et la Corvette, mais aussi les Ferrari pour leur côté bolide, et les Bentley pour le classicisme britannique. Voilà pour la part de rêve. Sinon, je trouve que la marque Dacia est une vraie réussite populaire qui a trouvé son marché auprès de la classe moyenne. On a mis le design au service du peuple, un peu comme Volkswagen en son temps avec la Coccinelle et la première Golf. J’aime bien que le design soit accessible et démocratique. Inter : Quelle est votre voiture et comment l’avez-vous choisie ? HL : Un SUV Volvo XC60, confortable, sécurisant, sportif, vraiment polyvalent et surtout doté d’un design redoutable qui surfe sur les codes du luxe avec élégance et en a inspiré beaucoup. Il représente un tournant chez la marque suédoise, c’est vraiment un modèle iconique avec un design qui a su exploiter

l’ADN Volvo en proposant un vrai renouveau. Il a aussi fait bouger les autres marques. Elles ont créé des modèles concurrents qui n’existaient pas, comme l’Evoque de Range Roger par exemple. Inter : Quelle est celle qui vous aimeriez le plus posséder ? HL : La Porsche 911. La nouvelle est tout simplement magnifique. Inter : Aimeriez-vous participer à la création d’un objet roulant, volant ou flottant ? HL : Dans mes rêves, un objet de téléportation. En étant plus terre à terre, un objet roulant. La roue, c’est quand même une super invention. D’ailleurs, en latin Volvo veut dire « je roule ». Tellement logiques et cohérents ces Scandinaves ! Inter : Si vous pouviez inventer de manière totalement libre un mode de transport inconnu jusqu’ici, comment serait-il ? HL : Une sorte de Gulf Stream aérien créé je ne sais pas comment, mais dans lequel on pourrait décider de sauter librement et de manière totalement sécurisée, avec qui on veut et en emportant ce que l’on veut, un peu comme les tortues dans « Le Monde de Nemo ». Ça fait rêver pour voyager, non ? Peut-être qu’un jour, l’homme sera capable de le faire. Il a bien inventé la fibre optique et réussi à faire voyager des milliards d’infos à la seconde. Inter : Quelle serait votre définition de la mobilité ? HL : C’est l’utilisation de l’espace-temps et la façon de s’y mouvoir soi-même ou d’y transporter les objets, de créer des connexions de toutes sortes. La mobilité permet des tas de choses, mais selon moi, c’est probablement l’accès à la connaissance qui a été largement rendu possible grâce à elle. Je trouve aussi que la notion de temps est implicite mais très importante. Nous sommes dans une course perpétuelle et le gain de temps est devenu une fin en soi, la mobilité étant un moyen.


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Les autoroutes font partie des projets structurants pour l'avenir de la mobilitĂŠ

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Texte : jonathan chauveau Photographe : GILLES UZAN

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passion oblique

la collection hétéroclite de l'architecte claude parent Tête brûlée de l’architecture avant-gardiste des années 60 et 70, inventeur de la fameuse « fonction oblique », si Claude Parent a imaginé toute sa vie des villes en forme de carrosseries de voitures futuristes, cela n’est pas dû au hasard, mais à sa passion immense, immodérée et un peu folle pour la vitesse et les voitures de sport. Entretien avec un trompe-la-mort. Intersection : On dit que vous avez eu deux passions, l’architecture et les voitures de sport. Est-ce vrai ? Claude Parent : Non, c’est faux, j’en ai eu trois : ma femme d’abord, qui m’accompagne depuis 53 ans, puis les voitures, et ensuite seulement l’architecture. Inter : Les voitures avant l’architecture ! Vraiment ? CP : Mais oui, l’architecture est trop surestimée. Déjà, le plaisir de la conduite est incomparable avec celui que l’on peut ressentir devant un immeuble. Et puis, à la différence des voitures, on ne peut pas collectionner les maisons… C’est bien la preuve qu’il y a un problème, non ? Inter : Vous avez collectionné beaucoup de voitures ? CP : Non, hélas, je n’ai jamais été assez riche

pour ça. Je devais toujours revendre celle que j’avais – si je n’avais pas eu d’accident avec bien sûr – quand je voulais en acquérir une nouvelle. Inter : Quel type de voiture aimiez-vous conduire ? CP : Les sportives, évidemment ! Du moins jusqu’à mon infarctus dans les années 70. Là, on m’a dit : « Claude, les sportives, c’est terminé pour toi… » et j’ai dû commencer à rouler en Rolls Royce, en Bentley, en Morgan… C’était, comment dire…. vraiment différent ! Inter : Quelle est votre plus ancienne voiture de sport ? CP : Une Triumph 2, c’est ma première femme qui se l’était achetée… mais avec mon chéquier ! Quand on s’est séparés, elle a eu la classe de me la rendre et c’est à son volant que j’ai conduit ma seconde épouse à notre cérémonie de mariage. Inter : Et ensuite ? CP : J’étais accro aux Triumph, alors j’ai suivi : la Triumph 3, puis 4. Je suis quelqu’un de fidèle. Ensuite, je me suis diversifié. JC : Qu’est-ce qui vous plaisait dans la Triumph ? CP : Ce n’était pas pour son moteur que je l’ai-

mais, cela c’est certain, un 2 litres pour camion ! Pas pour sa tenue de route non plus, et encore moins pour sa puissance… Inter : Alors qu’est-ce que c’était ? CP : Son allure, pardi ! C’était chic de rouler en Triumph, surtout qu’ils ne faisaient que des coupés. J’ai toujours eu en horreur la vision de l’arrière de ma voiture dans mon rétroviseur. Je n’ai jamais, mais jamais aimé ça. Bon, évidemment, j’ai dû finalement m’y faire lorsque j’ai acheté ma première Rolls, une Phantom. Inter : La voiture qui vous a le plus marqué ? Celle avec laquelle vous avez eu vos meil127


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leurs souvenirs ? CP : Ah ! C’est sans aucun doute ma Maserati. Quand elle est arrivée sur le marché, le constructeur annonçait qu’elle pouvait monter à 280 km à l’heure. Je l’ai donc achetée pour vérifier qu’il ne mentait pas ! À l’époque, Porsche venait de sortir un nouveau modèle. Un jour sur l’autoroute – qui était vide à l’époque, je précise – j’ai vu ce même modèle de Porsche loin devant moi et je me suis offert un petit plaisir : je l’ai d’abord littéralement laissée sur place puis, après avoir pris une certaine avance, j’ai ralenti afin de laisser cette Allemande revenir à la hauteur de mon Italienne, histoire de bien lui faire comprendre qui avait la voiture la plus rapide ! Inter : Pourquoi aimiez-vous autant la vitesse ? Pour la performance ? CP : Non. Par exemple, je n’ai jamais cherché à calculer mes temps de trajet. Cela ne m’intéressait pas. En fait, pour comprendre ma passion, il faut s’imaginer qui j’étais à l’époque, c’est-à-dire un architecte avantgardiste aux idées iconoclastes. Totalement absorbé par son travail, mais ne voulant pas pour autant lui sacrifier sa vie de famille. J’étais présent sur tous les fronts. Résultat : une pression permanente, omniprésente, énorme. D’autant plus énorme d’ailleurs que, par-dessus le marché, j’ai toujours été un mec « droit », comme on dit. Dans mon travail, je n’ai jamais cherché à arnaquer qui que ce soit, ni les entreprises ni les clients : une fierté personnelle dont peu d’architectes de ma génération peuvent se prévaloir, c’est moi qui vous le dis ! Bref, au milieu de tout ça, j’avais tout simplement besoin, comme n’importe quelle personne normale qui fait un métier extraordinaire, d’une soupape de décompression. Et pour moi, cette soupape c’était les voitures de sport, sans lesquelles je suis à peu près certain que je n’aurais jamais pu tenir le coup. Franchement, à mon avis, sans elles, j’aurais contracté une terrible maladie ou quelque chose d’approchant, c’est certain.

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Photos 1 et 2 : Triumph TR3 Photos 3 et 4 : Rolls Royce Silver Shadow Photo 5 : Jeep Wrangler YJ Photo 6 : Morgan Plus 4 Photo 7 : Maserati Ghibli

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Inter : L’adrénaline de la vitesse était donc devenue une chose vitale pour ton équilibre mental. Était-ce comme une drogue ? CP : Pour moi, la vitesse était moins une drogue qu’une manière de me faire peur en mettant délibérément ma vie en danger : seul dans mon habitacle, c’est tromper la mort qui me faisait vraiment décompresser, le fait de la frôler, de la caresser, de passer tout près d’elle… ce qui m’arrivait chaque fois que je décidais de rouler à plus de 200 km/h tout en sachant pertinemment que si le garagiste n’avait pas bien fait son boulot, une roue pouvait se détacher à tout moment… ce qui était mortel ! Mortel au sens littéral du terme bien évidemment.

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Texte : TONE Photographe : James Reeve

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trois étoiles au crash test gérald passédat, un chef étoilé sur la route Ah, le vieux port de Marseille. Il faudrait être un irréductible acariâtre ou un supporter fanatique du PSG pour ne pas y trouver un charme fou ni vibrer face à l’histoire de cette porte qui s’ouvre sur la Méditerranée. Gérald Passédat, chef du restaurant Le Petit Nice à Marseille, affiche un parcours lié de près à la mobilité et certains de ses symboles. Il s’apprête à inaugurer un immense centre tourné vers la culture culinaire locale, le môle Passédat. L’emblématique Fort Saint Jean sert de protection à ce projet, et l’ensemble prend place au sein du futur Mucem (Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée). Si les Porsche l’ont accompagné dans maintes histoires, et surtout vers les trois étoiles Michelin qui honorent son parcours, il est aujourd’hui ambassadeur de la marque française de moto Aviton, née sur les cendres de Wakan, liquidée en 2011. Intersection : D’où venez-vous ? Où allezvous ? Gérald Passédat : Je suis né à Marseille. Après avoir pas mal voyagé à travers le monde, comme beaucoup de gens autour de moi, j’ai décidé de me consacrer davantage à ma région. J’y trouve une quintessence géographique extraordinaire. J’en parlais hier soir avec Richiotti (l’architecte qui construit le môle et le Mucem) qui, comme moi, disait ne plus vouloir voyager. Ne plus faire partie de la globalisation de la mondialisation. De plus, entre Le Petit Nice (son restaurant) et le Mucem, la traversée de la ville occupe une bonne partie de mon temps. On installe le môle Passédat avec les trois restaurants, le potager et l’école, le tout relié au quartier du Panier par une passerelle. Toutes les histoires de la ville se côtoieront à cet endroit. Inter : Comment avez-vous démarré dans la cuisine ? Était-ce la poursuite d’un rêve ? GP : Tout à fait, ça me vient de mes 12 ans, lorsqu’après avoir dîné chez Alain Chapel, je me suis dit : « Moi aussi, un jour j’aurais trois 130

étoiles au Michelin. » J’aime l’effervescence artistique qui accompagne ce travail. Avoir toujours les yeux écarquillés devant les découvertes que l’on peut faire. Chaque année, je cherche à faire trois ou quatre plats vraiment nouveaux et importants pour moi. Mais dès qu’on trouve une vraie proposition culinaire, innovante et qui laisse transpercer l’âme du chef, c’est une forme d’art. Inter : Quel souvenir marquant avez-vous retenu de vos déplacements ? GP : Oh, c’est très simple. À Singapour, je me souviens d’un king crab cuit au gros sel. Très simple. Le bon endroit au bon moment. Inter : Parlez-nous de votre relation avec Avinton. GP : J’ai rencontré la femme du propriétaire, à qui j’ai parlé de mon intérêt pour la moto. Ils m’ont proposé d’en essayer une, et de fil en aiguille, ils me l’ont laissée. Depuis, je bourlingue avec dans la région. J’avoue que cette moto est surprenante, c’est assez masculin dirons-nous (sourire). Mais j’aimerais bien développer un modèle particulier. En l’état actuel des choses, elle muscle bien les bras. Surtout que j’ai dû faire trois mois en 50 cm 3 après avoir perdu mon permis. Inter : Aimeriez-vous collaborer avec une marque automobile ? GP : Oui, complètement, en partant d’une feuille blanche, à la recherche d’idées. Des odeurs, des textures, ou bien même des choses pratiques. Par exemple, j’adore les frigos dans les autos (sourires). C’est une excellente idée, anglaise peut-être ? Inter : Vous souvenez-vous de votre première voiture ? GP : Ah ! La toute première, une Peugeot 204 coupé. Hélas, je ne l’ai gardée que dix jours avant mon premier retrait de permis. À l’époque, on roulait différemment, c’est-à-dire vite tout le temps. On achetait les voitures à plusieurs car on n’avait pas encore les moyens.

La première, c’était une 914, suivie d’une 2L7 blanche superbe. On participait au « Volant des Chefs », avec Sonauto. On faisait du circuit toute la journée. C’était assez dingue car tout était permis, et ce n’était pas très grave si on cassait. Puis, on a eu une 928, superbe, une 944 Turbo que j’avais achetée avec mon père. D’ailleurs, elle est revenue récemment avec son nouveau propriétaire. J’ai eu une Morgan. Je l’ai vendue à un cuisinier après l’avoir gardée douze ans. Il paraît qu’elle est revenue à Marseille aussi. Mais quel kart ! J’aime beaucoup ma nouvelle 991S, pour l’instant je n’en ai pas d’autre. Inter : Croisez-vous parfois des gens du monde automobile ? GP : Je suis assez proche de Pescarolo. C’est un peu sur ses conseils que l’on tournait. Il y a pire comme professeur ! Sinon, il m’est arrivé une histoire rigolote, un jour où je suivais le Dakar à Agadez : Ari Vatanen a débarqué au petit-déjeuner en demandant qui voulait faire l’étape de liaison. Je suis parti avec lui dans la 205 aux ailerons surdimensionnés. Aujourd’hui encore, j’en ai le souffle coupé ! Inter : Vous collectionnez les autos ? GP : Non, je les remplace. Je suis plus consommateur que collectionneur. Mon parrain possède une belle collection, j’aime tellement les anciennes, les Alpine par exemple. Enfant, j’ai tourné dans une Bugatti. L’odeur, la ligne, tout est fantastique et vous transporte dans un autre monde. Juste ces odeurs de vrai cuir, de vrai bois, d’ancienneté, c’est vraiment autre chose. Inter : Quelle est votre définition de la mobilité ? GP : C’est une dimension aussi intellectuelle que physique, donc efficace et pleine de vitesse. La vitesse est un peu mise à mal aujourd’hui, alors qu’il y a quand même une notion de plaisir. Et la mobilité cérébrale, que l’on se procure et que l’on s’imagine, c’est un rêve.


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à 12 ans, je me suis dit : "moi aussi, un jour j'aurai 3 étoiles au Michelin"

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Texte : TONE Photographe : pierre mahieu

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nouvelle vague patrick le quément un designer sur les flots La Twingo est une belle histoire de l’automobile. Un produit qui s’est transformé en icône et qui a traversé les générations pour devenir une success story à part entière. Façonné par Patrick Le Quément, c’est un enfant de plus dans la famille Renault, au même titre que d’autres concepts aujourd’hui validés par le public comme Scénic ou Espace. C’est même la notion de concept car que le designer a insufflée dans la marque au losange, faisant du style un élément majeur dans la réflexion autour d’un projet automobile. Vel Satis, Altica, Racoon et l’extraordinaire Initiale sont autant d’études qui ont mené la marque en dehors des sentiers battus. Célèbre pour la maxime « Je préfère un design instinctif plutôt qu’un marketing extinctif », nous le croisons dans les locaux de Marc Van Peteghem-Lauriot Prévost, grands architectes nautiques à qui l’on doit de nombreux plans victorieux sur l’eau, comme Banque Populaire 5 ou BMW-Oracle. Renouant avec le dessin et le plaisir qui l’accompagne, il crée aujourd’hui des bateaux aux lignes épurées, propres à emporter la mobilité avec style sur les étendues maritimes de notre chère planète, et pose aux côtés de son projet Initiale, celui qui n’avait pas été retenu face à Vel Satis, et qui aurait peut-être changé le futur du haut de gamme français…

Intersection : Quel regard portez-vous sur Renault aujourd’hui ? Patrick Le Quément : Quand je suis arrivé chez Renault, une des conditions que j’avais posée était que la direction du design ne soit pas rattachée à l’ingénierie. Ensuite, Louis Schweitzer m’a proposé de devenir directeur de la qualité et directeur du design. Le design est donc devenu dépendant de la direction, ce qui m’a poussé à insister pour que Laurens (son successeur) fasse partie du comité de direction. Au départ, ils le trouvaient un peu jeune, mais je leur ai fait remarquer que j’avais le même âge à mon arrivée chez Renault. Aujourd’hui, il est bien installé et j’ai de très bons rapports avec lui. Je pense que j’aurais peut-être dû partir un peu avant, à la fin du mandat de Louis Schweitzer, mais Carlos Ghosn m’a demandé de rester car il arrivait du Japon sans repère ni contact dans le design. Je pensais que ça allait prendre très peu de temps, mais ça a duré quatre ans. C’était une période très pénible, où les décisions étaient compliquées et longues à prendre. Il fallait quelqu’un de nouveau. Depuis mon départ, ce qui a vraiment changé d’un point de vue personnel, c’est que je me suis remis à dessiner, alors que j’avais arrêté en arrivant chez Renault. En 2009, Playboy m’a demandé un dessin et j’ai adoré

m’y remettre. J’ai donc repris mes crayons et mes carnets. Inter : Que faites-vous en ce moment ? PLQ : Je fais des bateaux comme le Trawler, le Garcia GT54. C’est un chalutier de plaisance. Ça plaît beaucoup en ce moment et ça permet de recycler les vieux bateaux, car à l’origine, ce mouvement vient de particuliers qui reconditionnaient d’anciens chalutiers. De plus, comme on se promène à allure modérée, les consommations sont contenues, c’est intéressant d’un point de vue environnemental et ça confère une grande autonomie à ces bateaux. C’est l’entreprise française Grand Large qui possède Garcia, ainsi que deux autres chantiers : Allure pour les monocoques, et Outremer - qui m’a approché - pour les catamarans. Mon premier bateau était le 5X, le bateau amiral d’Outremer, un catamaran très performant que nous avons réalisé avec VPLP. Inter : Comment vous êtes-vous rencontrés avec Marc Van Peteghem ? PLQ : C’était en 2000, quand on a travaillé ensemble sur un concept cat’ (un catamaran concept) pour le salon nautique. Il y avait une immense maquette sous l’immense verrière des anciens locaux de Marc (ils abritaient au133


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trefois les archives du grand-père de Marc, un généalogiste successoral qui y a stocké 44 millions de fiches remplies à la main depuis des décennies). Puis, fin 2009, j’ai été contacté par Xavier Desmaret, le patron d’Outremer, qui voulait échanger sur la qualité perçue des bateaux. En même temps, il montait une équipe pour fabriquer le 5X, et naturellement j’ai proposé de travailler avec VPLP. Grâce à notre connivence, nous avons pu en quelque sorte appliquer une démarche qui vient de l’automobile. On a travaillé sur les motivations des clients, les mots clés du dessin. Le client a ainsi la possibilité de participer à la prise de décision. On a fait ça sur des petites séries de 5 ou 6 bateaux pour le 5X, ou quelques dizaines sur les Lagoon. Inter : Vous ne travaillez que sur des bateaux ? PLQ : Pas seulement. On a travaillé sur un projet de véhicule pour l’Antarctique. (Se tournant vers Marc) Je ne sais pas si je peu en parler ? On n’a pas trop communiqué dessus. Mais en gros, c’est un projet de véhicule tracté par un cerf-volant, car si les conventions de protection de l’environnement sont strictes, on ne peut pas dire qu’elles soient adoptées partout. Notamment quand on voit ces colonnes de Caterpillar qui tracent leur route sur la neige. Notre projet n’est pas complètement abouti, mais c’est en cours. Le véhicule ressemble un peu à un bateau, avec une cabine pour diriger et un véritable équipage. Avec les vents catabatiques qui se trouvent à quelque 200 mètres d’altitude, on pourra déplacer les 30 tonnes du vaisseau. Inter : Vous faites des voyages ? Vous vous déplacez ? PLQ : Je suis consulté pour faire des audits sur le design et donner des recommandations. Au Japon, en Argentine, et j’ai aussi séjourné pas mal de temps en Inde. Je m’intéresse beaucoup au « design thinking ». C’est une démarche créative qui tourne autour du design, enseigné dans les D-Schools comme celle de Stanford, et qui vise à mettre en relation des gens d’univers complètement différents - ethnologues, sociologues ou ingénieurs - pour les faire réfléchir ensemble. On travaille autour de problèmes irréductibles, en anglais « wicked problems », qui sont abordés presque exclusivement par des experts. Au bout d’un moment, perturbés par leurs habitudes et leur expertise, ils bloquent et souhaitent donc un regard nouveau. J’ai travaillé dans l’industrie spatiale il y a peu de temps. C’est la partie intellectuelle de mon travail, mais ce que j’aime le plus, c’est le dessin, et la partie avec VPLP. Inter : Comment vous déplacez-vous ? PLQ : Ça a beaucoup changé. Je suis brusque134

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ment passé d’une vie parallèle avec chauffeur et secrétaire au métro et aux transports en commun. Je ne savais même pas comment marchaient les machines. Autrement, je roule dans ma Twingo RS, ma Laguna Coupé ou ma Jeep Wrangler. Mais j’aime beaucoup le train, c’est quand même plus agréable que l’autoroute. J’ai eu une Ferrari 328 GTB que j’adorais, mais c’est délicat de conduire ce genre de véhicule aujourd’hui. Inter : Quand vous voyez passer une Twingo dans la rue, vous n’avez pas un petit pincement au cœur ? PLQ : Si, toujours, mais on n’en trouve plus beaucoup en bon état. Ça a été une voiture tellement extraordinaire pour moi, une vraie aventure. Il y a une histoire autour de cette auto, car les tests de marché sur la voiture étaient très compliqués : 25 % des gens ai- maient la voiture, 25 % de suiveurs étaient prêts à l’acheter si d’autres le faisaient, et les 50 % restants ne l’aimaient pas du tout ! J’ai dit qu’il fallait surtout ne toucher à rien. De retour de week-end, j’ai envoyé une note à Lévy (le patron de Renault de l’époque) en disant qu’il fallait savoir prendre des risques, et que je préférerais toujours un design instinctif à un marketing extinctif. Inter : Vous avez une anecdote sur l’automobile à nous raconter ? PLQ : Vous savez, j’ai toujours considéré que j’avais été très chanceux de faire cette carrière. Un jour sur une estrade, un homme m’a convié pour me remettre un prix en m’appelant « Patrick Luckyman ». Mon père était un grand fan d’automobile et n’a pas eu beaucoup de chance. Nous avions une amie qui avait gagné une 4CV dans une loterie, et mon père l’a encouragée à passer son permis, lui vantant les plaisirs de la liberté et de la mobilité. Au bout de six fois, elle l’a enfin obtenu, et ils ont eu un accident dans lequel j’ai perdu mon père, le jour de la promenade inaugurale de cette 4CV.

Je suis brusquement passé d'une vie parallèle avec chauffeur et secrétaire au métro et aux transports en commun. Je ne savais même pas comment marchaient les machines.


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les 9 inspirations de patrick le quément

Mégane 1988

laguna 1990

racoon 1993

Premier concept car de Renault, un véhicule luxueux dédié au confort. Des portes à ouverture par translation, et l’incroyable bulle arrière qui s’avance ou se recule suivant la configuration de l’habitacle. Motorisation : V6 3.0

Véritable voiture passion, Laguna incarne le rêve de Renault, « le retour de l’extraordinaire ». Elle a remporté le Car Design Award en 1991.

Racoon est un véhicule tout-terrain : aussi agile sur route que dans le sable ou la boue, et propulsé par un V6 turbo. Il peut également naviguer par temps calme sur un lac propulsé par 2 hydrojets.

initiale 1995

Vel Satis 1998

avantime 1999

Le haut de gamme selon Renault. La face avant est un hommage à la 40CV des années 1920, avec ce long capot sous lequel trône un V10 emprunté à la F1. Louis Vuitton s’est associé au projet en créant une ligne de bagages. Initiale a remporté le Car Design Award en 1996.

Un coupé 4 places pour les 100 ans de Renault, un pare-brise panoramique d’un seul tenant et un badge mains-libres pour accéder à l’intérieur. Motorisation : V6 3.0

Un nouveau genre de coupé haut de gamme : le CoupéSpace. Une voiture haute avec un intérieur baigné de lumière grâce au toit panoramique et aux vitres latérales sans pieds milieux.

koleos 2000

talisman 2001

zoé 2005

Un 4x4 résolument tourné vers l’avenir puisque hybride : moteur essence 2.0l turbo en traction et moteur électrique en propulsion.

Voiture passion, Talisman est un coupé sportif 4 places absolument inédit. Deux portes papillon de 2,45 m permettent d’accéder à son bord, le tout via un badge mains-libres. Motorisé par un V8.

Avant d’être une voiture électrique, la première Zoé de Renault fut cette pétillante voiture rouge. Patrick Le Quément l’a décrite comme « sensuelle et très humaine avec son regard hypnotique ». 135


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Texte : guillaume fédou et TONE Photographe : adrien toubiana

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FOU d'ENZO

chRISTOPHE, LES PARADIS DES POINTS PERDUS Christophe est une route. Parfois à contresens, souvent à quatre files, avec escales chimiques sur la bande d’arrêt d’urgence où il continue de foncer dans l’obscurité, bardé de cicatrices qu’il porte en triomphe comme autant de zébras phosphorescents. Dernier des Mohicans – avec son copain Jacques Dutronc – issu de la vague yé-yé des années 60 (en mettant de côté Johnny, Eddy et Dick qui sont hors classement), passé par toutes les mythologies certifiées d’époque, le premier et dernier des Bevilacqua ne sera jamais une petite départementale bien tranquille. Classé n°1 du hit-parade en 1965 avec « Aline », il a parcouru les Trente Glorieuses sans ceinture ni casque dans des bolides de collection ou en Vespa millésimé (« Je me prenais pour Ben-Hur, en conduisant d’une main », comme il le chante dans « La Dolce Vita »). L’audace, la vitesse, le risque sont alors les valeurs en vogue. On se rêve en James Dean ou en Brando, parfois en Martin Sheen à qui Christophe ressemblait au temps des cœurs verts comme les feux de circulation. Elvis était camionneur et Kerouac, prince des auto-stoppeurs. Quand le cinéaste Georges Lautner demande à Christophe d’écrire la musique de « Sur La Route de Salina » en 1970, occasion de laisser éclater le génie bevilacquien au grand soleil, il faut évidemment avoir à l’esprit que Salina en

Espagne rappelle Salinas en Californie, autre route sur laquelle un certain Jimmy Dean s’est crashé en Porsche 550 Spyder le 30 septembre 1955. Fort de ses succès qu’il enchaîne plus vite que des bornes kilométriques, Christophe collectionne les bolides rutilants et sillonne les routes du Sud à toute berzingue ; Antibes, Ramatuelle, Monaco… c’était bien avant de « sauter du scooter » avec son parolier Bob Decout dans sa période Beau Bizarre. Le deuxième Christophe, celui des années 70, est moins solaire, plus urbain, torturé. Les héros sont déchirés et les filles pas – forcément – touchées. Comme si le choc pétrolier avait poussé le chanteur à la nostalgie des Paradis Perdus (et bientôt retrouvés, en 2013) et d’une Dolce Vita à jamais écrasée par les poids lourds du réel. Un peu comme nous aurions aujourd’hui déployé un airbag, il a toutefois l’idée dans cette même période de créer le label Motors avec son ami Francis Dreyfus (décédé l’an passé) – également éditeur de Jean-Michel Jarre, qui co-écrira l’album « Les Paradis Perdus », mais aussi « Les Mots Bleus ». Motors ? « Une appellation insolite et pourtant adéquate pour un label, indépendant forcément, qui évolue dès le départ entre l’écurie et le gang, un mélange assez précis de sciences exactes et de connexions occultes, un son sexy qui donne envie quand il passe dans la rue et qui gagne toutes ses pre-

mières courses en quelques 45 tours », selon Jean-Michel Jarre, autant amoureux des mots que des sons, qui co-signera également « Macadam » (« Je passe toutes les chicanes, et j’entends même plus les sirènes ») avec Christophe. C’est pour prolonger cette aventure Motors que paraît début 2013 une succession de perles rares, d’accidents sonores restés dans le coffre du label. Artiste en cavale, monte-en-l’air mélodique et tourne-cœur qui refait le plein au stand 14, Christophe est codé pour échapper aux codes. Les voies de bus, les ronds-points, le marquage au sol, le permis à points… Très peu pour lui. Rangé des bécanes depuis 2000 suite à son retrait définitif de permis, il n’avait pas osé remonter dans une Ferrari alors qu’il voue une véritable passion à la marque, comme en témoigne sa mélopée « Enzo ». Cela fait bien longtemps qu’Intersection cherche à le convaincre de renouer avec ses démons rouge vif. Il a fini par accepter, et c’est non sans une certaine émotion que l’Oiseau au Plumage de Cristal (premier film de Dario Argento) nous livre ses passions mécaniques à la fois surgies du passé et de la fureur des temps présents. Intersection : En route. Christophe : On va quand même ouvrir la fenêtre pour entendre le moteur. Elle est belle 137


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cette California, c’est ma préférée. Inter : J’aime bien la boîte. C : C’est génial cette boîte. À l’époque où je courais, c’était plus rudimentaire. Inter : Vous avez fait de la course automobile ? C : Mais oui. À l’époque, ça parlait trop. Christophe ci, Christophe ça. Alors j’ai pris ma caisse de tous les jours. Ma Porsche. Et je suis allé à Magny-Cours. Meilleur temps aux qualifs. Direct ! Voilà, ils ont compris. Ils m’ont filé des pneus pour la course. Gratuitement. Ils ont mis des stickers sur ma voiture. Et ils ont vu. J’attaquais et j’ai gagné. Le critérium Jean Behra en 1968, à Magny-Cours. Après le mec de Porsche de l’époque, j’ai oublié son nom. Bref, il voulait que je vienne courir dans son équipe. Mais moi, je voulais juste leur montrer que je pouvais gagner. J’avais d’autres centres d’intérêt dans la vie. Inter : Vous aviez quand même de bons rapports avec certains pilotes. C : Oui, avec Beltoise par exemple. Un jour, on est partis ensemble pour une course, je l’ai laissé conduire. Je regardais, car c’était un bon, lui ! Il envoyait. Puis il m’a dit de prendre le volant. J’ai roulé comme d’habitude avec ma Ferrari GTB 4. Il n’en revenait pas. Les freins à l’époque n’étaient pas très puissants. On s’entendait bien. Un jour, il a pulvérisé l’une de mes Miura (Lamborghini), mais il me l’a remboursée. C’était vraiment une voiture incroyable, mais dure à conduire. J’en ai eu plusieurs. (Nous retournons à l’hôtel Trocadéro, rejoindre Guillaume qui casse sa cinquième coupe de champagne par mégarde. Quelques olives vertes servent de dîner.) Inter : Vous aviez écrit une chanson intitulée « Enzo » sur l’album « Bevilacqua » (1996). C : C’est un hommage. J’ai écrit cette chanson en 1992. À l’époque, un mec de chez Ferrari à Maranello m’a appelé. Ce n’est pas trop mon habitude de jouer les brigands, mais je lui ai demandé s’il pensait sérieusement que j’allais laisser tomber cette chanson. J’avais Marin (alors directeur France de Ferrari) et tous les mécanos avec moi. Il avait fait écouter la chanson dans les ateliers, les mecs avaient applaudi. Le mec qui m’appelait depuis Maranello, je lui ai dit : « J’ai des Ferrari, de la famille en Italie, alors laisse-moi faire ma chanson et reste tranquille. » Inter : Quelles Ferrari avez-vous eues ? C : Une 275 GTB 2 et une Daytona que je viens de vendre.

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Inter : Il vous reste des voitures ? C : Une Buick 1950. Il me restait une Boxer, une BB. C’est Véronique qui est partie avec. La voiture n’a plus d’intérêt maintenant. Inter : À son maximum, votre collection comportait combien de voitures ? C : J’ai dû en avoir cinquante en tout, mais pas plus de dix en même temps. Inter : Et votre première voiture ? C : Une Austin Mini Cooper S. de 1965, l’an-

née d’« Aline ». Ça faisait déjà longtemps que je conduisais. Dans ma famille, on apprenait à conduire dès l’âge de 12 ans. Tout le monde conduisait bien dans la famille. Ma mère faisait déjà des concours d’élégance avec des autos. Ma mère avait des voitures. Tu vois celle d’« À Bout de Souffle » ? Ma mère avait la même en plus belle. Elle était couturière et elle s’achetait des baraques et des voitures. Mon père aussi aimait les voitures, c’était un attaquant. Aujourd’hui, quand je vois rouler les gens, j’ai mal pour tout le monde, c’est n’im-


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porte quoi. Avant, mon père avait des 4L. Le soir du jour où j’ai décroché mon permis, j’ai foncé avec la 4L et j’ai écrasé un chat. Noir en plus. J’étais parti avec une petite visiter la forêt de Sénart. C’est pourtant intelligent, les chats. Inter : Votre nom, ça a un rapport avec Saint Christophe, le protecteur des automobilistes ? C : Tout à fait. Ma grand-mère avait une médaille. Comme j’étais effectivement un attaquant, elle me l’avait donnée. Puis ce nom a une belle sonorité. À l’époque, il n’y en avait pas du tout, à part Christophe Colomb. Daniel Bevilacqua, c’était un peu compliqué, difficile à gérer. Pourtant, j’aurais pu encore changer de nom. Inter : Pourquoi la route était-elle si importante ? Pour les tournées ? C : L’envie de rouler, tout simplement. Les tournées, j’en ai fait peu, j’en ai fait en Jaguar type E, en Ford Mustang. Tu mets un sac de-

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dans. Une guitare dans le coffre. Des boules. Et tu pars. Une DS Pallas que mon frère m’avait prêtée. J’adorais. Inter : C’était quoi, en fait ? Aller chercher le frisson sur la route ? Tester les limites ? C : Non. Ça démarre avant même d’aller chercher la voiture. Avant de descendre dans le garage. Ça commence sans la bagnole. Dans l’inconscient. C’est fétichiste. Après, tu prends la route que tu veux. Des voies sans issue. Des autoroutes. Inter : Mais la voiture a disparu de votre vie. Comment vous déplacez-vous ? C : Chauffeur. Sinon, j’ai mon vélo. C’est bien. Sauf quand il pleut. Inter : Dans votre prochain album, il y a une chanson qui s’appellera « Silence, On Meurt ». C : Attention. D’abord, le terme album ne convient pas du tout ici. Ce n’est pas un nouvel

album, hein ! C’est... comment dire…un OVNI. Un objet musical. Voilà. Un objet musical. Sinon, il y a effectivement une chanson qui s’appelle « Silence, On Meurt », qui vient de « Voix Sans Issue ». C’est un peu à l’image des autres. Utiliser et donner les bribes de ce qui n’avait jamais été montré. Aucun texte français. Que de l’impro. (Sur la route qui nous emmène dans les nuits de Christophe vers Saint-Germain, nous tentons de joindre une de ses amies pour boire quelques verres et faire des tours de Ferrari by night.)

Merci à l’Hôtel Eiffel Trocadéro www.hoteleiffeltrocadero.com

Le soir du jour oU j'ai décroche mon permis, j'ai foncé avec une 4L et j'ai écrasé un chat. Noir en plus.

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Texte : philippe combres Photographie : naj Jamai

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L.A. A PIED la mobilité selon le créatitf Marc Horowitz Il est compliqué de décrire les talents de Marc Horowitz, surtout pour un public français habitué à ce qu’on lui mette des personnes dans des cases d’activités bien précises. Musicien, sculpteur, comptable ou pompiste. Mais quelques éléments vous manquent pour comprendre le personnage : à 8 ans, il crée sa première entreprise de chasse aux fantômes et de nettoyage. L’année suivante, il fait la une d’un

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magazine local en l’honneur de son concours de smurf organisé pour les personnes âgées. Décrivant lui-même son travail comme un mix d’art et de divertissement, il n’est pas rare de retrouver ses projets liés à la mobilité, comme en 2007 lorsqu’il participe à une campagne avec Nissan en passant 7 jours dans une Sentra. Nous le croisons à Los Angeles, la ville où la voiture est reine.

Intersection : Bonjour Marc Horowitz, comment allez-vous ? Marc Horowitz : Très bien, merci. Inter : Pourriez-vous expliquer en quoi consiste votre travail à ceux qui ne vous connaissent pas ici en France ? MH : Je suis pluriel. Explorateur tout-terrain virtuel, passionné de performance artistique,


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tondeur de moutons, expérimentateur social, ex-voleur à l’étalage et l’un des cinquante célibataires les plus convoités au monde selon le magazine People. Mes projets interrogent un large éventail de sujets, comme le divertissement, la publicité, l’environnement architectural, le commerce et la recherche quotidienne de sens. Je passe mon temps à faire des listes d’inventions potentielles, de néologismes, de dispositifs lucratifs, de blagues, de dessins, de sites Internet, de personnages et de vidéos improvisées. Je souhaite que mon travail évoque « l’instant », qu’il reflète et critique l’idéalisme américain, l’expansionnisme et le capitalisme. Je souhaite qu’il parvienne à parodier la culture pop de manière à se faire ré-adopter par cette même culture. Inter : Que signifie Intersection pour vous ? MH : En latin, « inter » signifie « entre » ou « au milieu de ». Je ne sais pas comment « section » se décompose en latin, mais à mon sens, cela désigne la partie d’un tout. Si vous combinez les deux mots, vous obtenez « au milieu d’une partie d’un tout ». Cette définition semble un peu vague, mais je la préfère à « un croisement entre deux routes». Dans ma vie, je suis toujours à un croisement – mise en scène d’un accident sur Mulholland Drive, élaboration d’une nouvelle série de dessins, déguisement en mouton de poussière géant, achat d’un billet d’avion pour ma mère... Rien n’est jamais vraiment terminé. Les choses prennent leur temps. Et tout se rencontre. En réalité, la vie pourrait être définie comme une intersection. Je sais, c’est un peu ridicule, mais attendez : faites une pause et, plus tard, repensez à la vie comme une intersection. Je vous vois d’ici sourire et me remercier pour cette belle tranche de philosophie. Inter : Quelle est votre conception de la mobilité ? MH : Les voitures volantes, les jetpacks, la téléportation. Je suis vraiment impatient d’uti-

si après avoir visionné une de mes vidéos, on peut se réjouir d'un simple brin d'herbe, a me comble.

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liser la téléportation. Finis, les files d’attente qui sentent la transpiration dans les aéroports, les sièges d’avion inconfortables et les lavabos minuscules... Cela dit, je suis sûr qu’il y aura plein de nouveaux problèmes liés à la téléportation. Par exemple les erreurs de destination dans 35 % des cas, un mauvais réassemblage des pièces à l’arrivée, la prise de poids à chaque téléportation, le bébé qui meurt… Je ne sais pas… En fait, je crois que finalement, je suis satisfait de pouvoir conduire, pédaler, prendre le bus, faire un footing (je peux le dire ?) et d’avoir deux pieds. Inter : Pourquoi avez-vous choisi cette voiture-là et pas une autre ? MH : Avant, je conduisais une voiture ordinaire. Et puis j’ai rencontré cette fille. J’ai voulu l’impressionner. J’ai essayé une VW turbocompressée. Je suis tombé amoureux. J’ai acheté la caisse. Elle m’a quitté. Mais ma voiture m’aimait toujours, elle. Inter : Vous vous déplacez beaucoup en voiture ? Pourriez-vous imaginer une vie sans voiture ? MH : À Los Angeles, conduire est presque aussi vital que boire. Cependant, je suis concerné par les questions d'environnement, donc je marche, je prends mon vélo ou les transports publics dès que je le peux. Certaines personnes à L.A. prennent leur voiture pour descendre deux pâtés de maisons et acheter un soda ! C’est débile. Elles devraient avoir honte. Inter : Mais qu’est-ce que vous fabriquez, dans cet accoutrement sur le toit de votre voiture ? MH : J’ai tourné une vidéo pour Persol en m’inspirant des stations de lavage automobile. C’est l’un des déguisements du film. Inter : Aimeriez-vous être un autre homme ? MO : Si cela pouvait faire couler l’argent à flot et m’économiser des efforts pour attirer les femmes, alors oui. Mais sinon, je suis assez satisfait de ma tranche salariale et de mes conquêtes niaises. Inter : Quel message cherchez-vous à faire passer à travers vos œuvres ? MH : Je crois que mon objectif est d’aider les gens à regarder leur monde différemment. Oui, je sais, une fois de plus c’est un peu ridicule. Mais franchement, si après avoir visionné une de mes vidéos, on peut se réjouir d’un simple brin d’herbe, ça me comble. Inter : Vous avez publié le magazine « It's Good Magazine » par le passé. Pouvez-vous nous en dire plus ? MH : J’ai eu la chance d’exposer à la Galerie Nuke à Paris. On a décidé de créer un magazine pour l’exposition intitulée « The Center

for Improved Living ». Le magazine présentait quelques-uns de mes produits d’amélioration de la vie : l’armure protège-tibias destinée aux personnes qui n’ont pas les moyens de se payer une sécurité sociale, les sculptures de motivation, dont l’objectif est d’améliorer la productivité, les nouveaux moyens d’attirer l’attention d’une célébrité, le tapis peau d’ours télécommande, etc. Inter : Qu’allez-vous faire ensuite ? MH : J’aimerais jouer ma pièce de deux minutes « These Things Happen » un peu partout dans le monde. J’aimerais également exposer mes films sans titre (« Untitled Films »). Je vais bientôt exposer mes dessins et je travaille sur un court-métrage concernant les transferts de compétences dans le futur. Inter : Où allez-vous après ce sympathique entretien, et quelle nouvelle action préparezvous ? MH : Je vais aller me coucher. Je sais, ce n’est pas drôle ! J’avais l’intention de vous servir un bon mensonge qui m’aurait fait passer pour un gars cool, mais je n’ai pas d’idée. Demain, je rencontre un producteur pour parler de mon projet d’animer un jeu télévisé japonais. Ça devrait me faire gagner au moins quatre points de coolitude, moins les deux perdus en disant que j’allais me coucher, ça m’en laisse deux au final. Trop bien. Inter : Merci beaucoup. MH : Je vous en prie. Bonne nuit. 143


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TENUES DE ROUTE LE STYLE EN MOUVEMENT MERCEDES AMG SLS ELECTRIC DRIVE JAGUAR F-TYPE


Page prĂŠcĂŠdente robe : Manish Arora Manchette Hirschell Bague K.M.O Sur cette page veste Jean Charles de Castelbajac t.shirt Shaun Samson lunettes Thierry Lasry collier K.M.O


photographe babette pauthier stylisme JOSIA.N



Page de gauche

Maquillage

veste Bernhard

Marie Lanne

Willhelm

Coiffure

robe Kenzo

Bénédicte Cazau

collier Bijoux

Ongles

de Famille

Sophie A. @

manchette et

L’Ongle Singulier

bague Hirschell

Coordination talent Jeremy Taltaud Nadim Makhlouf Propos recueillis par Tone

À peine descendue de son avion, la jeune rappeuse et mannequin Iggy Azalea nous a rejoints en studio pour découvrir la nouvelle SLS AMG Electric Drive. Née en Australie en 1990, elle débarque de son propre chef à Miami à l’âge de 16 ans pour parfaire ses productions et donner un nouveau virage à sa carrière. Dans ses titres, elle joue la carte de la provocation, et impose sa blondeur et sa peau diaphane sur les dancefloors. Elle tire son nom de son fidèle compagnon à quatre pattes Iggy, et de la rue de son enfance, Azalea Street. Influencée par Tupac, qu’elle cite régulièrement, elle dit : « La société moderne est vulgaire, je m’adapte à son langage. » Égérie de la marque Levi’s pour la campagne Go Forth, elle prépare actuellement son prochain album, « The New Classic », précédé d’une mixtape produite par Diplo, le phénomène de Philadelphie et partenaire de M.I.A. Si la promotion de son album s’avère aussi efficace que son explosion sur Internet avec « Pu$$y » et « My World », les deux titres qui l’ont propulsée, gageons qu’on la retrouvera bientôt sur toutes les covers de la planète. Intersection : Quel est votre mode de transport préféré ? Iggy Azalea : Être à l’arrière d’une berline conduite par un chauffeur. Au calme et confortable. Je ne veux pas conduire. Inter : Quelle est votre artiste féminine préférée ? IA : Missy Elliot, sans hésiter. Elle a transformé la

place de la femme dans le hip-hop et s’est imposée par sa personnalité fantasque et ses idées originales. Inter : Vous aimez les voyages ? IA : J’adore voyager, même si c’est un vrai sacrifice en termes de temps. J’aime découvrir la mode de chaque pays. Observer les différences. Mais j’aime me retrouver à Miami. C’est ma ville. La cuisine cubaine, les soirées, l’ambiance urbaine avec la mer à proximité. En revanche, c’est très compliqué de se

mettre au travail avec toutes ces tentations. Inter : Si tu pouvais inventer un mode de locomotion inconnu, comment serait-il ? IA: J’aimerais posséder un animal magique sur lequel je pourrais voyager. Au chaud, sur sa fourrure, en prenant le temps qu’il faut. Sinon, la téléportation semble le moyen le plus efficace.


Page de droite robe Thôt collier Viveka Bergström bague K.M.O

AMG SLS Electric Drive Si elle partage avec la Nissan Leaf la couleur bleue ainsi que la motorisation électrique, c’est bien ici leurs seuls points communs. Cette SLS sera la supercar «zéro émission» la plus puissante au monde. Conçue et produite par AMG elle dispose de 4 moteurs électriques implantés en position centrale pour un total de 552kW de puissance et lui permettent d’atteindre les 100km/h en moins de 4 secondes. Propulsée au tarif électrisant de 416 500 Euros elle sera disponible à compter de juin 2013.



Robe Lacoste gilet en cuir Tania Zekkout montre Nixon chaussettes American Apparel chaussures Kenzo



photographe GILLES UZAN stylisme JOSIA.N


Manteau Dior Homme montre Roger Dubuis MonĂŠgasque Automatique Acier jumelles Leica



Page de gauche : Veste, chemise, pantalon et chaussures Giorgio Armani jumelles Leica Page de droite : Veste Dior Homme


Page de gauche : Veste, chemise et pantalon Ungaro Homme jumelles Leica bottes Aigle Page de droite : Veste, chemise, nœud papillon et pantalon Smalto montre Roger Dubuis Automatique Or Rose bottes montantes Aigle



Veste, chemise, ceinture et pantalon Ralph Lauren bottes Aigle

Ian Callum, directeur du design Jaguar, déclare que c’est la voiture qu’ils ont toujours voulu réaliser. Il la considère donc comme la digne héritière de la prestigieuse Type E. Une filiation palpable puisque la F-Type réinterprète les lignes de son aïeule pour sa partie avant, son design intérieur et sa planche de bord équipée de boutons rappelant le monde de l’aéronautique. Comme sa devancière, la F-Type dispose d’un 6 cylindres disposé en V de 3.0l développant 340ch, de sa version Supercharged (40ch de plus) ou d’un V8 Supercharged de 495ch. Intersection a décidé de la mettre en scène dans un environnement forestier, bien loin des lieux désertiques où elle partagera la vedette avec Damian Lewis pour le film « Desire » produit par Ridley Scott Associates. La bande-originale est signée Lana Del Rey, dont le titre « Burning Desire » a été spécialement composé pour la F-Type.



starter

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CULTURE

Intersection


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REPORTAGEs les petits bleus de la moto AEV itinéraire bis nissan ministry of sound harley davidson topper à ne pas tenter chez soi

REPORTAGEs ET ESSAIS

ESSAIS bentley flying spur speed mp4 12C Spider dacia sandero stepway vw golf abarth 595c porsche panamera gts porsche cayenne gts range rover audi rs4 avant bmw m6 coupé ford focus st honda cr-v

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Garage

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les petits bleus de la moto Une semaine avec les anges bleus des compagnies Motocyclistes de Paris Il paraît qu’on les appelle les « anges de la route ». C’est en tout cas ce qu’indique la notule qui leur est consacrée sur le site de la Préfecture de Paris. Le label est un chouilla lyrique mais oui, il doit y avoir de ça : bien calés à dos de bécanes, les membres des Compagnies Motocyclistes de la Police sillonnent les voies de passage pour protéger le chauffeur et chasser le chauffard. Ainsi, le cahier des charges des flics motards comprend précisément la lutte contre la délinquance routière (de l’excès de vitesse au non-respect du feu rouge), le contrôle des réglementations en matière de transport de voyageurs et de marchandises, ainsi que l’escorte des convois prioritaires, du détenu à la personnalité officielle. À Paris, les Compagnies Moto et leurs quelque 250 membres sont installés rue Chanoinesse, sur l’Île de la Cité, depuis 1945. Coincée dans un petit pâté de maisons, un immense garage déroule sur plusieurs étages un parterre infini de motos portant beau l’écusson de la bleusaille. Il y a là des vieilles BMW 1150 et des Yamaha 1300 flambant neuves. Des deux modèles, c’est le premier qui reste le favori des motards ; on dit que la position de conduite est plus adaptée, que c’est un modèle qui permet d’avoir une position altière, tandis que la Yamaha est une moto plus sportive, avec un centre de gravité peu évident pour la conduite en ville. Cela dit, ces motos offrent toutes les deux des conditions de sécurité optimales, loin des vieilles Indian et Harley Davidson que conduisaient les premiers motards des Compagnies lors de leur création en 1920, ou encore des Triumph adoptées après-guerre. À cette époque, les flics consacraient une bonne partie de leur service à escorter les politiques. Aujourd’hui, ça verbalise, ça interpelle et ça roule beaucoup plus. Les motos parisiennes parcourent près d’un million et demi de kilomètres par an en moyenne. Un long voyage qui n’est pas sans déplaire à ces flics à guidon : tous sont d'ultimes fanas du deux-roues.

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Brigadier-chef Michel Gébal , 63 ans Mais que diable cet homme fait-il dans le garage des Compagnies Moto ? Plus qu’un motard vigoureux, on dirait quelqu’un en âge de prendre sa retraite. C’est d’ailleurs le cas : Michel Gébal est un retraité des Compagnies. Toujours vif, l’ancien brigadier-chef revient fréquemment voir ses pairs en tant que réserviste chargé de la formation des jeunes pousses de la rue Chanoinesse, auxquelles il présente les grandes lignes du métier : les escortes, l’activité contraventionnelle, mais aussi et surtout la topographie. Une occasion de réenfourcher la moto : « On apprend aux nouveaux à se repérer dans Paris. On leur fait voir les hôpitaux, les ministères, les bâtiments administratifs et les monuments. » Le brigadier-chef Gébal est aussi parfois appelé pour faire du soutien opérationnel – « On m’appelle et je viens ». En tout et pour tout, le retraité reprend du service près de 80 jours par an. Doyen des Compagnies Moto, il est également le gardien de leur mémoire. Débarqué en 1975 – « C’était un vrai rêve de gamin » - il est aujourd’hui le seul à avoir appris le métier sur une Triumph et à avoir connu les premières BMW R62 « avec leurs clignotants au bout des guidons. Question sécurité, c’était assez limite. Il n’y avait pas de carénage (la tête de fourche installée à l’avant de la moto qui sert à protéger le pilote – Ndlr) ni de poignées chauffantes, et on avait un tout petit casque qu’on appelait "le bol". » Une moto à risques démarrée aux côtés des « anciens », des motards au cœur fidèle, bourrus et casse-cou « qui n’ont jamais connu autre chose que les Compagnies et la route. » Au cours de la quarantaine d'années qu'il a passée à sillonner les rues parisiennes, le brigadier-chef Gébal a compilé les souvenirs comme d’autres empilent les contraventions. Aussi, quand on lui demande de sortir une seule histoire de son casque, le policier se triture l’esprit pendant quelques secondes pour faire le tri dans sa tête. Avant de finir par dégainer un nom : Jean-Paul II. « J’étais sur l’escorte du Pape en 1997 à Paris. Nous étions allés le chercher à la Nonciature, où il résidait. On était sur nos motos à l’attendre quand je me suis soudain rendu compte que le Pape était à côté de moi. Il est venu vers moi et m’a salué. » Frissonnements et larme au coin de l’œil. Oui, le policier est un homme sensible comme les autres. 166


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Major Éric Junon, 46 ans. Il possède les traits carrés et durs de ceux qui ont bourlingué sur le terrain. Avant d’entrer aux Compagnies Moto, le major Junon a fait ses classes dans la Marine Nationale et dans les quartiers nord de Paris - « Là où c’était chaud, où il y avait du flingage » - en tant que gardien de la paix. Voilà un type qui aime endosser le bleu de chauffe pour se confronter à l’action. Et autant dire qu’il fut plutôt déçu quand il s’est retrouvé à faire de l’escorte après son arrivée rue Chanoinesse. « J’ai même pensé à quitter les Compagnies », confie-t-il. « Moi, je voulais faire du routier : les infractions, l’anticrime sur la moto. Je voulais rouler et interpeller ! Et quand les mecs ont vu l’activité que j’avais en matière de répression, il m’ont tout de suite intégré dans une brigade dédiée. » Pourtant, celui qui a démarré la moto avec une 600 XEJ de Yamaha a vécu l’un des moments les plus intenses de carrière

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lors d’une escorte : « J’étais sur une vieille BMW K75 que je ne maîtrisais pas vraiment… J’accompagnais la voiture du Premier ministre Édouard Balladur quand j’ai perdu de vue le collègue qui était avec moi. Je ne savais plus où aller, je roulais à l’aveugle, je sentais le palpitant monter et je ne pouvais pas m’arrêter pour regarder une carte ! Et puis je suis arrivé à un carrefour où un policier faisait la circulation : c’était mon collègue. À partir de ce moment, je ne l’ai plus lâchée. » Pourtant, le major Junon a fini par lâcher la moto. Il passe désormais une bonne partie de son temps dans un bureau où il est en charge du suivi judiciaire des affaires traitées par ses collègues motards. Ses journées sont faites de convocations et d’auditions ; il s’occupe également des gardes à vue, et éventuellement du déferrement d’un prévenu au parquet. « On fait du clé en main », a-t-il pris l’habitude de dire. Récemment, il a géré une affaire dans laquelle un conducteur avait commis près de 500 excès de vitesse en Île-de-France. Et puis il y a aussi eu cette enquête sur la compagnie d’autocars étrangère soupçonnée de travail dissimulé. « Pour ce cas-là, on a fait de la surveillance téléphonique et mis en place des filatures à motos et en voitures banalisées pour identifier le chef du réseau. . La bonne occase pour prendre la route.

Brigadier-chef Dominique Joubier, 44 ans C’est un enfant de la balle, comme on dit, un fou de deux-roues qui a grandi dans le ronronnement des cylindres. Dès qu’il a été en âge de conduire, il s’est offert une moto. Évident. C’était une Honda, achetée juste après l'obtention de son permis. « J’ai eu une moto avant même de savoir conduire une voiture », dit-il fièrement avant de digresser sur les joies de la conduite : « Quand on est seul sur sa moto, on se sent libre, on n’est pas restreint. » De fait, l’arrivée du brigadier-chef Joubier dans le giron des Compagnies Moto apparaît comme une suite logique des choses. Peut-être même comme une finalité. Il ne s’en cache pas : « Quand je suis entré dans la police, c’était pour intégrer les Compagnies à terme. C’était prévu depuis le début. Il fallait juste que j’attende d’avoir l’ancienneté suffisante pour pouvoir postuler. » Motard chevronné avant même de devenir motard professionnel, le brigadier-chef se souvient de sa première sortie en uniforme comme d’un « exercice assez facile ». « J’étais à l’aise avec la machine, la prise en main s’est faite toute seule. Surtout, j’étais très fier d’être sur une moto de la police. » En tant que brigadier-chef, Joubier s’occupe aujourd’hui d’encadrer les motards sur le terrain, entre contrôle et escorte. Pour la première activité, lui qui aime 167


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« chasser le bandit » trouve son compte à Paris, une ville « où les infractions tombent toutes seules, où l’on n’a pas besoin de les chercher. » Cela dit, le fonctionnaire préfère sans nul doute l'activité d’escorte. En cortège, le voilà qui peut rouler sans s’arrêter ; là, le trafic disparaît aux sons de la sirène et du sifflet, et la route s’ouvre jusqu’au point d’arrivée. Une conduite droite, rapide et libre comme il l'aime, loin de la vie de bureau qu’il dit à la fois craindre et détester. Une fois, un dimanche après-midi, il s’est retrouvé à escorter sept fois un véhicule du SAMU : « C’était éreintant, ça filait, mais j’avais vraiment l’impression d’aider. » On veut bien le croire.

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Sur la route Dans les rues de Paris, ses avenues, ses boulevards et parfois même ses impasses, la règle veut qu’ils roulent toujours à deux. En duo sur leurs motos, ils forment une sorte de quinconce : un devant et l'autre plus en retrait. « De cette manière, celui qui est à l’avant peut toujours voir dans son rétroviseur où se trouve son partenaire », explique le brigadier-chef Joubier à un feu rouge, avant d’embrayer. S’il jette toujours un œil à son collègue, qu’il soit derrière ou devant, le policier à moto

passe aussi son temps à balayer du regard tout ce qui l’entoure. De loin, il semble stoïque avec son regard fixé droit devant lui derrière ses lunettes de soleil. Il n’en est rien. À droite, à gauche, en biais et en diagonale, le policier motard dissèque tout son environnement à la recherche de l’infraction. Véritable œil de lynx, il est par exemple capable, comme le brigadier-chef Joubier, de repérer un conducteur en train de téléphoner au volant même derrière des vitres un brin teintées. Là, le gradé dépasse la voiture, et d’un petit signe de la main, l’enjoint à se garer sur le côté tandis que son second suit à l’arrière. Et la procédure suit son cours : calé sur le fauteuil de sa moto, voilà Joubier en train de remplir un procès verbal sur une petite machine qu’il a sortie de sa sacoche avant de l’envoyer directement sur un serveur où il sera traité par les fonctionnaires restés à la Compagnie. Au grand jeu de l’activité contraventionnelle, les policiers motocyclistes ont aussi leurs petites marottes. Certains sont spécialisés dans le recel et le maquillage de fausses plaques d’immatriculations, d’autres ont l’œil pour repérer les faux documents ou dénicher la faille dans le transport de personnes. Sur ce dernier créneau, le brigadier-chef Joubier est un as. En pleine montée des Champs-Élysées, le policier cible à une dizaine de mètres un scooter avec une personne à l’arrière. Un véhicule qui, de prime abord, ne paye vraiment pas de mine. Une fois arrêté, ce dernier s’avère être un moto-taxi – « La passagère était équipée d’un tapis de sécurité, et puis elle avait une posture de passagère cliente. C’était du transport, pas un particulier, ça se voyait », indique Joubier avant d’aller vérifier les papiers du conducteur. Ces temps-ci, le fonctionnaire remarque une recrudescence des motos-taxis sans licence ni assurance. Et pour le coup, ça ne loupe pas : le conducteur en question a oublié de renouveler son assurance. Tant pis pour la passagère visiblement pressée : elle attendra que les policiers remplissent le PV. Une tâche effectuée avec minutie, sans sourciller, tandis que la radio d’une des motos crache un appel du central : on recherche deux hommes qui viennent de braquer un distributeur. « C’est dans le Val d’Oise, nos collègues du coin vont s’en charger », m'éclaire le collègue du brigadier-chef. Sitôt le PV rempli et l’affaire bouclée, les deux motards repartent. Leur tournée doit encore durer une petite heure avant le retour prévu aux Compagnies sur l’Île de la Cité. Une petite heure pendant laquelle le duo gérera son temps en fonction des priorités : « On ne peut pas verbaliser tout le temps, sinon on ne s’en sortirait pas », indique Joubier. « Mais bon, à force de laisser passer certaines infractions, il y a de plus en plus de permissivité. » Et donc de plus en plus de boulot.

texte : raphaEL MAlkin photographe : Bastien LAttanzio


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Garage

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terrains élevés rencontre dans le montana avec AEV, préparateur pour jeep d'expédition

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Durant un bref séjour à Detroit l’été dernier, un ami m’a présenté Michael Chetcuti, une figure locale de l’industrie automobile, chanteur du groupe de surfabilly The Chet Offensive, militant anticontrefaçon aux côtés de la sénatrice démocrate Debbie Stabenow, et restaurateur. Chet, comme ses amis l’appellent, n’est pas un personnage qu’on oublie facilement. C’est en sa compagnie que j’ai découvert ses deux entreprises principales : QMC (Quality Metalcraft Inc.), qui produit des pièces de pré-production pour les géants de l’automobile américaine, et AEV (American Expedition Vehicle), qui conçoit et fabrique des pièces optionnelles pour Jeep Wrangler depuis près de quinze ans. Dans un esprit minimal, fonctionnel et ultra résistant, l’entreprise vend des kits de carrosserie, de suspension, de pare-chocs, mais aussi des jantes et divers éléments de protection pour châssis. Chet m’a également fait découvrir l’un de ses prochains projets : un Jeep JK à empattement rallongé, mélange entre une version 4 portes pour l’avant et un arrière de 2 portes. Une sorte de limousine familiale sur grosses roues, créée à l’origine pour être son bureau mobile. AEV conçoit également ses propres modèles

de Jeep, dont la célèbre Brute : le premier pick-up Jeep depuis le Willys Truck de 1946. Ce dernier a remporté de nombreux prix de design à travers les États-Unis et acquis une certaine notoriété à l’international. En évoquant un prochain voyage dans le Montana, Chet m’a convié à visiter les locaux d’AEV et à rencontrer son fondateur, Dave Harrington. Missoula est une petite ville perchée dans les montagnes de l’ouest américain. On y vient pour étudier (la ville accueille l’université d’État du Montana), et on y reste pour ses paysages époustouflants. Dave nous accueille dans le hangar de l’entreprise qu’il a créée en 1999. « Pour mon diplôme de dernière année d’école de commerce, je devais présenter un business plan dans un concours d’entrepreneurs locaux. À l'époque, je travaillais sur une Jeep de 1991 dont je voulais allonger l’empattement pour créer un véhicule plus long. Ce n’était qu’un hobby mais les gens s’y sont vite intéressés. J’ai donc construit mon business plan autour de cette voiture dans l’idée de produire des Wrangler à empattement long, et j’ai gagné la compétition. »


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à Dave et investit dans son entreprise. Les premières années sont difficiles. Seul aux commandes, Dave doit faire face à toutes les tâches administratives que requiert une entreprise, et ne peut consacrer du temps à la conception des pièces que pendant la nuit. Aujourd’hui, l’entreprise emploie une dizaine de personnes uniquement dédiées à la création des nouveaux produits. Pour la production, les pièces et les véhicules sont fabriqués et montés à Wixom dans le Michigan, tout près de QMC, dans une usine employant presque une centaine de personnes.

leurs montures. Le dernier voyage a eu lieu en Islande. Un film réalisé pour l’occasion montre l’extrême beauté des paysages traversés (vimeo. com/45462828). En 2013, les heureux propriétaires de véhicules AEV pourront découvrir les paysages russes avec Dave et Chet, une occasion pour la marque de trouver d’autres sources d’inspiration. « La Russie est unique. Le pays a été isolé du reste du monde pendant très longtemps et la mécanique en général y a pris une direction très différente. Il y aura pas mal d’idées à prendre là-bas. »

www.aev-conversions.com 1

Très vite, Dave se lance dans l’aventure et crée AEV avec ses propres moyens. Il présente son projet au SEMA Show et rencontre Chet, qui se propose de produire ses pièces de carrosserie dans le Michigan via QMC. Comme les finances de QMC dépendent d’une industrie automobile qui subit beaucoup de turbulences dans les années 2000, miser sur AEV lui permet de rentabiliser ses machines et ses équipes en créant la demande : c’est en 2006 qu’il s’associe

Rien n'est laissé au hasard dans la conception des pièces AEV. Par exemple, le vide créé entre le parechoc et la carrosserie permet d’inclure une réserve d’eau supplémentaire. S’il n’y a pas de démarche esthétique dans le design de ces éléments, la simplicité des voitures équipées AEV rappelle les créations d’ICON 4x4, la nostalgie en moins. La marque propose de transformer votre Jeep au moyen de kits complets, et vend aussi des véhicules prêts-à-rouler, montés dans son usine de Wixom. Chaque année, AEV organise un voyage pour ses clients durant lequel ils peuvent éprouver

texte et photographe : gilles uzan

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2

Page de gauche : le dernier Jeep Brute Double Cab 1 : le réservoir d’eau supplémentaire intégré au pare-choc 2 et 3 : un Jeep JK dont la carrosserie et le châssis ont été démontés afin d’être rallongés 4 : Dave posant devant un Jeep J8 de l’armée égyptienne

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Garage

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performances 6 l rée d lin

610 Puiss ch an ce

m 0N 75 ouple C

1 Nb cyl 2 ind re s

Cy

3 Vi 22 K tes m /h se M ax

0 50 1 7 4 rix P

39

6g CO / k m 2

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s 4 , 8 00 0-1

FICHE TECHNIQUE

NE PAS OUBLIER

Bentley Continental Flying Spur Speed

Que si les Bentley se conduisent, vous n’aurez aucun mal à trouver un chauffeur parmi vos amis

Longueur 5 290 mm Hauteur 1 388 mm Largeur 2 194 mm Empattement 3 065 mm


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slalom moderne Bentley et la marque de ski Zai dévalent les pistes Je voue depuis toujours une véritable passion au co-branding, à ces marques qui s’associent pour donner naissance à un produit. Parfois, le résultat vire au ridicule s’il est purement marketing et ne sert qu’à sauver les deux, mais il peut aussi s’avérer inattendu et pertinent quand les marques s’unissent autour d’une même passion, d’une envie noble de se surpasser ensemble. Aujourd’hui, l’équipe Bentley me propose de découvrir les coulisses de leur nouveau partenariat avec ZAI, une marque de ski fascinante à plusieurs égards.

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D’abord, il s’agit d’une marque indépendante. Il y a quinze ans, seuls Salomon, Dynastar et Rossignol comptaient dans le paysage alpin. Puis a émergé tout un tas de petites marques comme ZAG, Black Crows ou ZAI. Cette dernière fabrique des skis comme on crée des voitures de luxe. Ultra techniques, avant-gardistes, élitistes et en séries très limitées. ZAI enfin est composée d’une équipe de dirigeants très élégants qui fabriquent leurs produits en Suisse (à Disenti). Chez eux, tout est soigné, pensé, intelligent, des matières aux couleurs, des typos aux logos (récente collaboration avec l’ÉCAL)... Je décolle (en compagnie de Laura, mon modèle) pour Zurich, puis direction Disenti à la frontière autrichienne. On voyage à bord d’une gigantesque Bentley Flying Spurs Speed équipée de l’impressionnant W12. Quand je demande quelle est la différence entre une Rolls et une Bentley, on me répond que les Bentley, ça se conduit. Sous-entendu, dans les Rolls on se fait conduire. Je demande donc à conduire moi-même sur les 180 kilomètres qui séparent l’aéroport de Zurich de l’usine ZAI. Moi qui utilise souvent mes deux mains pour envoyer des SMS, trouver du son sur l’iPod ou feuilleter un magazine sur le siège passager, je suis servi : la fonction pilote automatique de la Bentley fonc-

tionne à merveille. Le moteur W12 est ahurissant pour une telle limousine. J’en redemande et abaisse les vitres dans les tunnels pour écouter sa bruyante mélodie. Arrivée chez ZAI. Ambiance zen, minimal design, technique, geek à souhait. Une micro-usine remplie par une presse gigantesque, des dessins 2D aux murs, quatre ou cinq ingénieurs, skieurs, designers. Nous sommes vraiment dans un environnement artisanal et chic. Patrick Markus Aisher, le principal investisseur, nous explique qu’il positionne ZAI au niveau des meilleures marques de luxe et qu’il n’initie que des partenariats ultra haut de gamme : Hublot, Loro Piana et Bentley, né de sa rencontre avec le PDG du constructeur. De son côté, Simon Jacomet, le grand patron et directeur du design, nous présente enfin les nouveaux skis Zai for Bentley. Un bijou d’acier et de carbone. Rendez-vous dans la montagne à 3 000 mètres d’altitude pour immortaliser l’ensemble.

texte : PATRICE MEIGNAN photographe : TOM SALT

Combinaison Zai Cassaca produite par Loro Piana Masque Oakley Airwave Casque Cébé Skis Zai for Bentley

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Garage Garage

Appareil de musculation La McLaren MP4 12C spider est exigeante pour l'organisme En ce soir de 24 décembre 2012, la planète entière (presque) se prépare à fêter Noël. Demain cet incroyable numéro d'Intersection partira en print. Je me suis réservé le privilège du dernier papier, celui qui vient clôturer ce bouclage. Harcelé quasi physiquement par mon rédacteur en chef, menacé d'expulsion de ma propre équipe par mon directeur artistique, j'ai attendu patiemment que l’inspiration arrive afin de pouvoir décrire avec justesse la délicieuse souffrance physique et le bonheur psychologique que m'a procuré l'essai de la McLaren MP412 C Spider. La photo ci contre est assez explicite et ne nécessiterait que peu d'explications. Elle décrit une scène douloureuse et montre un journaliste à la base, physiquement apte, qui aurait subi un électro-choc d'une violence rare, une détonation, un séisme routier dans son propre organisme. Le personnage de cette photo est comme pris en étau entre 2 mâchoires jaunes à 7 vitesses, desquelles il ne peut s’échapper. Il parait usé, tordu, plié, mâché, rompu, éreinté. Comme une pelote de laine ballottée par les pattes d'un énorme matou. On l'imagine essayer de fuir cet enfer mécanique, discrètement, par en dessous, sans que la machine, ou sa propre addiction ne le reprenne. Mais il parait trop faible pour y arriver, il se laisse dominer, posé sur le sol au pied de ses montures. A ce moment précis, le photographe juché sur un point en hauteur saisi le triste instant sur sa pellicule numérique. Cette nature morte a été réalisée à l’aide de deux McLaren MP412C Spider de 616 chevaux, après une séance de conduite sur le circuit d'Ascari à Malaga.

texte :Patrice Meignan photographe : Stan Wolff

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Garage Garage

performances

McLaren MP4-12C Spider

625 Puiss ch an ce m 0N 60 ouple C

Nb cy 8 lin dr es

l 3,8 drée lin Cy

FICHE TECHNIQUE

3 Vi 29 K tes m /h se M ax

00 2 3 2 8rix P

27

9g CO / k m 2

s 3 , 1 00 0-1

Longueur 4 509 mm Hauteur 1 203 mm Largeur 1 960 mm Empattement 2 670 mm

NE PAS OUBLIER Que c’est dans « Harry dans tous ses états » de Woody Allen que Dad is out of focus.

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les sentiers de la gloire la dacia sandero continue son ascenSion Petit à petit, Dacia en impose et lutte contre le snobisme automobile. La Sandero Stepway peut franchir les collines de la production automobile, déjouer les obstacles du juste prix et gravir les trottoirs de la renommée. Présentée au Mondial de l’Automobile, la voiture s’est échappée dans les contreforts forestiers de Fontainebleau pour escalader avec volonté les rochers de la crise. Restylée, elle espère poursuivre sa route avec les mêmes résultats que le Duster qui a rencontré son public.

texte : TONE Photographe : Mélanie Aubiès Bordas Stylisme : josia.N

NE PAS OUBLIER - Que Sendera est une série TV américaine que vous pouvez parfaitement oublier, pour profiter de la fraicheur hivernale et faire des batailles de boules de neige

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Garage

performances 1 l rée d lin

90 Puiss ch an ce

90 1 1 9 rix P

1 Vi 68 K tes m /h se M ax

m 6N 13 ouple C

Nb cyl 3 ind re s

Cy

FICHE TECHNIQUE

12

4g CO / k m 2

s 1 1,100 0-1

DACIA Sandero Stepway Prestige Longueur 4 079 mm Hauteur 1 618 mm Largeur 1 758 mm Empattement 2 588 mm

Luı col roulé Fusalp veste Frenchurch pantalon US Polo Assn chaussures The North Face Elle bonnet Barts gılet Gaastra écharpe Mark & Spencer veste sans manche Napapıjrı jeans Bonobo chaussures The North Face

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Garage

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NE PAS OUBLIER - Que l’on peut être jeune à quarante ans - Que la boîte de vitesses porte aussi le chiffre 7

7 tout neuf La nouvelle Golf dans la lumière

performances

2 Vi 61 K tes m /h se M ax

€ 30 2 6 2 rix P

texte : thomas bernHARD photographe : Ludovic parisot

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Volkswagen Golf 1.4 TSI Confortline

140 Puiss ch an ce

Nb cy 4 lin dr es

l 1,4 drée lin Cy

FICHE TECHNIQUE

m 0N 25 uple Co

Serait-ce l’ultime objet de mobilité du monde moderne ? Puisé dans une reconnaissance sociale et populaire sans faille, son indéfectible succès l’a conduite à traverser les décennies depuis sa première sortie en 1974. La Golf neuve de la middle class aisée ou de la bourgeoisie discrète fera le bonheur des moins fortunés en occasion, l’addiction au modèle se transmettant entre les générations. Durant l’interview de Patrick Le Quément pour ce numéro, il a nous confié à quel point il était impressionné par la manière dont le dessin de la Golf prenait la lumière, la qualité de l’ajustement des pièces de la carrosserie, cette manière de se renouveler sans perturber, et de prendre conscience que le volume et la masse de voitures en circulation appelle un design qui ne lasse pas. La vérité est dans la rue. C’est le lieu de vie de la voiture.

11

0g CO / k m 2

s 5 , 7 00 0-1

Longueur 4 255 mm Hauteur 1 452 mm Largeur 2 027 mm Empattement 2 637 mm


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Garage

performances

toit mon toit Nb cyl 4 ind re s

2 Vi 05 K tes m /h se M ax

m 6N 20 ouple C

15

5g CO / k m 2

Parking de l’aéroport de Nice, 26 octobre 2012, dix automobiles alignées. Une à choisir. Mes confrères journalistes (je n'aurais jamais imaginé dire ça un jour) me laissent la primauté du choix de ma monture. Ni une ni deux, par un savant calcul de parisienne futile, blafarde et en manque de vitamine D, je me précipite sur la Cabrio, car oui, à Nice au mois d’octobre il fait 24°C et le soleil est au zénith. Je pourrais au moins prendre des couleurs entre l’aéroport et notre première étape au col de Turini.

Abarth 595 C Turismo

135 Puiss ch an ce

00 1 9 2 rix P

L'ABARTH 595 c enlève le haut

l 1,4 drée lin Cy

FICHE TECHNIQUE

s 7 , 9 00 0-1

Longueur 3 660 mm Hauteur 1 490 mm Largeur 1 630 mm Empattement 2 300 mm

NE PAS OUBLIER - Que l’on peut être jeune à quarante ans - Que la boîte de vitesses porte aussi le chiffre 7

S’ensuit une petite balade de 50 kilomètres, dont 40 de virages en épingle. Je n’aurais peut être pas dû choisir la C qui me fait jouer dans la catégorie « bitch French manucurée en stiletto qui roule toute blondeur au vent ». J’ai l’intime conviction que mon copilote de Kilomètres Entreprise ne me prend pas très au sérieux. Il a quarante ans de carrière de voyages de presse au compteur ; moi, c’est mon premier. J’en ai la confirmation quand il rentre la tête dans l’habitacle pour m’expliquer comment fonctionne le GPS et sur quel « bouton » appuyer pour démarrer. On atteint des sommets à la remise du road book, quand Bob me refait le tracé de notre périple avec le doigt en parlant et articulant à haute et intelligible voix, comme si ma couleur peroxydée était une déficience, ou pire encore, responsable de lésions irréversibles sur mon lobe pariétal. À bord, l’ambiance sportive est réussie. En enfilant mes Sparco, loin de moi l’idée de faire des talons-pointes mais il est juste compliqué de conduire en 14 cm. Je sens que je regagne légèrement en crédibilité dans le milieu. Ma blondeur et mes stilettos sont définitivement oubliés quand j’arrive deuxième à notre première étape prévue à 13h00 et qu’il est 12h47. J’apprends par Bob que ces messieurs (qui ne sont toujours pas lù) ont parié sur le fait qu’ils auraient le temps de déjeuner avant que je ne sois arrivée… Le scorpion a donc réussi à transformer le pot de yaourt en petite bombe de 160cv, et une frêle blondinette en pilote émérite...

texte : laura-KalListé arrigui photographe : mélanie aubiès-Bordas

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de rabat à las vegas la gamme GTS de POrsche sur deux continents On nous dit toujours que les marques allemandes sont ultra fiables. Le meilleur moyen de s’en rendre compte consiste à pousser le test d’auto à l’extrême et à conduire une bagnole dans toutes les conditions possibles. C’est ce que nous avons fait avec deux nouveaux modèles Porsche, la Panamera GTS et la Cayenne GTS. Du grand tourisme sportif à travers trois continents : l’Europe du Sud, l’Afrique du Nord et le Grand Ouest américain. START Étape 1 : épreuve de vitesse de pointe Notre « endless test » se déroule sur trois continents, là où notre permis est valide, l’idée étant de le conserver. Le voyage démarre à Lisbonne, où je croise deux pilotes de renom chauffés à bloc : Nicolas Reynaud et Benjamin Eymère du magazine L’Officiel. Ils finissent leur press day juste avant moi. Je les vois essayer de contenir leur émotion. Ils me prennent à part. « Tu vas voir, c’est dingue. » « Ok, ok les gars ! On se revoit à Paris. » Garées sous l’aéroport, dix autos sont alignées et préparées. Je choisis une sublimissime Panamera GTS noire à jantes noires. Son moteur est encore chaud, le pot émet quelques cliquetis. Elle est chauffée pour moi. J’enfile mes mitaines, je tourne la clef (toujours sur la gauche chez Porsche) et le V8 s’ébroue dans un bruit démoniaque amplifié par le confinement du box du parking. J’en redemande ! J’éteins, je recommence. Rahoooohhhh. Dominik, le responsable du trip, nous prévient de ne pas trop allumer, il n’a pas pu faire bloquer les autoroutes.

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Mais aucune trace de la police, c’est plutôt open road. Les dix GTS s’envoient littéralement en l’air, en formation serrée. Ça roule vraiment vite mais il faut être politiquement correct, on ne dira pas à quelle allure nous avons rallié le premier stop sur la presqu’île de Troia en face de Lisbonne. Le dossier de presse annonce 288 km/h de vitesse max. En coupant le contact, j’ai un sentiment de déjà-vu lié à la découverte d’une nouvelle fast car. On se dit « Woh ! Là, ça commence à être très sérieux, je n’ai jamais conduit une auto si cool », et puis une fois la prochaine GT essayée, rebelote. La Panamera GTS, c’est du sérieux. Aucun point perdu sur cette étape. Je gagne mon ticket pour le next stage. Étape 2 : épreuve de style Départ pour Casablanca à l’invitation de l’agence Pro et Anti qui gère les relations médias de Porsche au Maroc. C’est sur l’aéroport « militaire » de Ben Slimane que nous retrouvons l’équipe d’Intersection Maroc, Mehdi Hadj Khalifa, le photographe Bastien Lattenzio et son modèle. Sous le soleil de Casablan- ca et sur la piste, la Panamera GTS est surréaliste. L’intérieur est dantesque. Tout est soigné, chic, élégant, racé, jusqu’au volant recouvert d’alcantara gris. Nous passons une journée à shooter cette grande sportive. Les deux beautés jouent ensemble. L’équipe du magazine anime une fois de plus cette journée de lancement marocain. Étape 3 : thématique de l’épreuve dure à définir, probablement « Conduite Physique » À l’occasion du salon de l’auto de Los Angeles, Dominik


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Manteau Trendy Workshop

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Garage

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Gruber, qui tient à s’assurer que j’ai bien compris ce qu’était une GTS, me convie au reveal de la nouvelle Cayman. Il me propose également un ride débridé après le salon. Why not. Présentée en jaune et en gris, la Cayman est la seule et unique attraction cool de ce salon. Aucune surprise du côté américain, le marché est fadasse. Heureusement, Porsche prépare le show ! Super attendue par une nuée de journalistes, cette Porsche abordable fiche une claque à l’audience présente. La voiture est applaudie et mitraillée de photos. Je gagne le parking du parc des expositions de Los Angeles où m’attend unae équipe hétérogène de pilotes-journalistes : Dominique d’Edgar Magazine, Laurent de Demeures & Châteaux, et Pascal de L’Automobile Magazine. Trois pointures aguerries aux pires road trips. Nous partons sur-le-champ pour un périple de 2 000 kilomètres entre la Californie et le Nevada. 400 bornes et quelques Red Bull avalés pour joindre la première étape : Palm Springs. Pit stop au mythique Parker Hotel. Le lendemain, wake-up call à l’allemande à 5h15. On croit à une

Nb cyl 8 ind re s

2 Vi 61 K tes m /h se M ax

Empattement 2 895 mm

m 0N 52 uple Co

s 5 , 7 00 0-1

Largeur 1 951 mm

Longueur 4 970 mm

430 Puiss ch an ce

1g CO / k m 2

Hauteur 1 688 mm

l 4,8 drée lin Cy

75 1 1 9 5rix P

m 5N 51 uple Co

€ 94 9 2 2 rix P

25

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Longueur 4 846 mm

420 Puiss ch an ce

Nb cy 8 lin dr es

l 4,8 drée lin Cy

panamera GTS

2 Vi 88 K tes m /h se M ax

cayenne GTS

joke mais c’est bien réel. Dominik est plus que motivé par son irrépressible envie de voir le soleil se lever sur les dunes du Joshua Tree National Park. J’ouvre les yeux, dérobe un coussin dans l’hôtel et me pose à l’avant de la Cayenne GTS. On me propose de conduire, je ferme les yeux et esquisse un sourire. Émergeant du sommeil, je suis réveillé par la voix d’un chanteur de country. Je me relève, le bras ten- du vers le bouton du volume de l’autoradio, mais le son ne se baisse pas. C’est bien Dom qui chante à tue-tête. La scène est surréaliste. Je suis dans un cocon de carbone et d’alcantara au beau milieu d’un désert aride au soleil brûlant. Dom est heureux, il swingue. Dehors, Tibo le photographe a déjà posé un pied et shoote la scène. Le road trip vient vraiment de commencer. Je comprends qu’il s’est passé quelque chose à bord de ces deux Allemandes. Les quatre journalistes et le crew Porsche viennent de constituer une entité, un corps. Loin de Paris et des bouclages de leurs magazines, les gars sont chez eux sur le bitume du Nevada. Certains chantent, d’autres courent en

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1g CO / k m 2

s 5 , 7 00 0-1

Hauteur 1 408 mm Largeur 1 931 mm Empattement 2 920 mm

évitant les boules de paille portées par le vent. Moi, j’essaie en vain de choper du réseau. On passe la frontière de l’État un peu stone, shootés par cette première séquence. Direction un absurde Seven Eleven posé sur une nationale pour un mug de café, un litre de café même. Dominik toujours, nous lance : « Bon, les gars, faut des tentes ! » « Des tentes ? Mais Dom, on est des journalistes VIP ! » Rien à faire, il est surmotivé et dévalise le rayon camping du Super Trek Shop situé à côté. Tentes, grilles à barbecue, lampes torche Maglite, bâtons de dynamite, sac de couchage, Jack Daniel’s. Il est 8h20. On a beau avoir ravagé nos looks de pilote dandy en mode campeurs du dimanche, on est heureux quand même. La dernière fois qu’on avait dû faire ça, c’était en 1988, on avait 12 ans. On verra bien. Si le désert ne me plaît pas, je pourrais toujours filer au Bunnies Ranch de Vegas en pleine nuit. START AGAIN Je tapote « Route 66 » sur le GPS. Mythique,


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« Route 66 Historical Road » s’affiche à l’écran. S’il y a dix routes à voir dans le monde, celle qui est devant moi en cet instant précis en fait résolument partie. 30 kilomètres de route droite filant au milieu d’une large vallée totalement vide. Visibilité 100 %. C’est le moment d’y aller. L’année dernière, à la même date et au même endroit, je roulais en Audi R8V10 Spider avec Jean-Pierre Ploué pour copilote. Ça me fait des éléments de comparaison. J’écrase la pédale de droite, je serre le volant entre mes gants, les bras détendus, je stabilise à 170 Mph. On revit la scène d’intro de « L’Équipée du Cannonball », mais sans Farrah Fawcett. La route est semée de hoops de 4 mètres (un hoop : littéralement, un sévère dos d’âne géant au milieu de la route). La Panamera glisse, file comme sur des rails, encaissant les bosses sans broncher. Je ne conduis pas, je fais du snowboard.

texte : patrice meignan photographes : bastien lattanzio (porsche panamera) et tibo (porsche cayenne)

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INSUBMERSIBLE LE Nouveau RANGE ROVER ne craint pas l'eau Dans les locaux d’Intersection, je reçois des invitations aux voyages de presse. Au titre de mes rares avantages en tant que directeur de la publication, je les distribue. Quand le départ s’effectue du Bourget, je ne regarde ni la voiture ni la destination. Ma passion du jet étant totalement incontrôlable, je pourrais aller essayer la future Trabant à Kiev pour quelques heures de vol à mon compteur. Cette fois-ci, il s’agit de découvrir « The All New Range Rover » dans toutes ses finitions, entre Agadir et Marrakech. Parfait, je n’ai jamais fait Le BourgetAgadir. Décollage. J'instagram le take-off, la piste, La Défense, puis Versailles avec un virage à 3 000 pieds et 45 degrés. J’ai bien choisi mon siège. Puis perte de réseau... Agadir. Reprise des posts sur le réseau Meditel. Sur le tarmac, j’ai le choix entre le Range Autobiography (édition ultra exclusive limitée à 500 exemplaires), en finition Sport Supercharged et autres modèles Signature. Après une heure sur le sol marocain, ma photo du gigantesque haut-parleur avant du nouveau Range a déjà récolté 270 like. Ce nouveau trip commence très bien. Je roule sur un territoire que je commence à bien connaître. C’est mon 29ème voyage depuis que nous avons lancé le magazine dans sa version marocaine. Le regard clair des Berbères, les routes fracassées aux décors hallucinants, les montagnes mystérieuses aux méandres cinématogra-

performances

m 5N 62 ouple C

2 Vi 50 K tes m /h se M ax

00 1 2 8 1rix P

32

2g CO / k m 2

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Range Rover Autobiography

510 Puiss ch an ce

Nb cyl 8 ind re s

l 5,0 drée lin Cy

FICHE TECHNIQUE

s 5 , 4 00 0-1

Longueur 4 999 mm Hauteur 1 835 mm Largeur 2 220 mm Empattement 2 922 mm

phiques : voilà les trois éléments que je m’apprête à secouer dans mon shaker anglais nommé « Range Supercharged ». Dunes, autoroutes, ravines, gués, neige, sable, béton, terre, ce véhicule est juste surréaliste. Ça fonce, ça franchit, ça passe, ça coule, ça glisse... Une caisse de sport, un salon, un 4x4, un passe-partout, le dico du journaliste auto est trop limité pour décrire correctement ce véhicule. Ça fait trente ans que ce Range semble sans outsider, et à chaque nouveau modèle la pression se fait plus forte sur la concurrence. Il me faut à tout prix trouver matière à critiquer ce véhicule. Alors je cherche, je tente des cascades aidé par le road book extraterrestre concocté par l’équipe technique de la marque. Mais je suis incapable de prendre cette voiture en défaut. Puis vient l’étape de la rivière. On nous demande de rouler vite. La profondeur est de 90 centimètres et l’eau atteint la lisière du carreau. Je roule pourtant à 30 km/h, ce qui paraît ultra rapide dans de telles conditions, mais sans doute beaucoup trop lent pour nos confrères de 4X4 Magazine qui nous doublent par la droite.

texte : patrice meignan photographe : bastien lattanzio


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Garage

NE PAS OUBLIER - Une playlist de rap new-yorkais des années 90 tant les bass du Range sont lourdes - De ne pas dépasser le 90 dans les rivières

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Garage

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audi RS4 AVANT l 4,2 drée lin

Longueur 4 719 mm

450 Puiss ch an ce

€ 00 8 6 8 rix P

2 Vi 50 K tes m /h se M ax

m 0N 43 ouple C

Nb cy 8 lin dr es

Cy

24

9g CO / k m 2

Hauteur 1 416 mm Largeur 1 850 mm Empattement 2 813 mm

s 4 , 7 00 0-1

bmw M6 COUPÉ l 4,4 drée lin

m 0N 68 ouple C

2 Vi 50 K tes m /h se M ax

00 1 3 3 1rix P

23

2g CO / k m 2

186

Longueur 4 898 mm

560 Puiss ch an ce

Nb cyl 8 ind re s

Cy

s 4 , 2 00 0-1

Hauteur 1 374 mm Largeur 2 106 mm Empattement 2 851 mm


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Garage

Le choix du roi V8 Audi contre V8 BMW Il est fort probable que l’ambition légitime des ingénieurs pour protéger la planète et procurer du plaisir aux conducteurs d’automobiles équipées d’un moteur à explosion se solde par l’abandon des grosses cylindrées. Les V8 deviendront sans doute les plus gros moteurs disponibles sur des voitures de série. Et encore, quand elles ne sont pas françaises, par exemple. Car à part les Facel Vega et leur V8 américain, et d’antiques Citroën des années 30, les marques françaises n’ont jamais proposé un V8 de série et ne sont pas près de le faire. Ce qui nous intéresse ici, c’est surtout le système de vases communicants entre deux marques allemandes qui se disputent les lauriers de la gloire sur les diverses aires de jeu du sport automobile. Alors que BMW abandonne le V8 de sa M3 pour un 6 cylindres bi-turbo, Audi enfonce le clou avec son V8 atmosphérique disponible sur la RS4. Associé au système Quattro, on obtient le meilleur ratio performance/discrétion du marché. La discrétion n’est pas tellement du ressort de la M6 qui, fidèle à la propulsion chère à la marque, bondit de courbes en courbes telle une furie pour peu que la route soit sèche. Les deux V8 sont proches en cylindrée, mais celui de la BMW propose 110 ch de plus obtenus grâce à sa suralimentation, et un couple fort agréable pour rouler dans un discret coupé, se transformant en tornade par une extension du pied droit. Coupé ou break, deux visions du transport semblent s’opposer. Finalement, l’indécision c’est humain, non ?

texte et photographe : thomas bernhard

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Garage

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performances

mise au point

Ford Focus ST

2 Vi 48 K tes m /h se M ax

m 0N 36 ouple C

Nb cy 4 lin dr es

250 Puiss ch an ce

€ 50 3 0 7 rix P

mine de rien la focus ST est une vraie sportive

l 2,0 drée lin

Cy

FICHE TECHNIQUE

16

9g CO / k m 2

s 6 , 5 00 0-1

Longueur 4 362 mm Hauteur 1 484 mm Largeur 1 823 mm Empattement 2 650 mm

C’est la fin du rallye. Plus encore qu’une discipline mécanique qui sent bon les années 80, c’est presque la pertinence du sport automobile qui vacille. Le public ne s’intéresse plus aux courses ? La F1 est une sorte de porte ouverte pour les pays émergents alors qu’elle lasse la majeure partie du public occidental, mais quel avenir pour le WRC ? Peut-être devrait-on lancer des courses avec des autos plus proches de la série, sur le thème de la vie telle qu’elle est ? Le parcours le plus rapide depuis le centre-ville jusqu’au supermarché, avec une halte à la boulangerie pour tamponner la carte de fidélité obligatoire, une vidange expéditive au centre technique, le changement instantané du siège bébé ou l’installation du chien dans la malle arrière, un slalom entre de faux bus, pour finir par un saut sur une rampe d’accès qui mène au concept store le plus proche. Entre Ken Block et « Desperate Housewives ». Nul doute que la Focus aurait une place de choix dans ce parcours tant l’impression qu’elle laisse sur circuit est positive, alors que l’exercice peut être si cruel pour nombre de ses congénères. Surtout dans sa version break qui, avec 250ch, est unique sur le segment des compactes. On attend le même moteur dans un monospace Ford pour gagner quelques secondes dans la future épreuve de chargement de magazines Intersection, en moins de 17 secondes pour 500 numéros.

texte : tone photographe : tone

NE PAS OUBLIER Que c’est dans « Harry dans tous ses états » de Woody Allen que Dad is out of focus.

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Garage

NE PAS OUBLIER Que l’on peut toujours se perdre avec ème siècle. délice au 21

In the Mud for love le honda CR-V capturé par le désert

Honda CR-V 2.2 I-VTEC 4WD Exclusive

155 Puiss ch an ce

Nb cyl 4 ind re s

2 l rée d lin Cy

FICHE TECHNIQUE

1 Vi 90 K tes m /h se M ax

m 0N 36 ouple C

texte : guillaume fédou photographe : mélanie aubiès bordas

performances

€ 50 3 6 8 rix P

Tous les lundis, j’amène mon fils à l’école, rentre checker mes mails, vais déjeuner Chez Jeanette, passe au studio pour faire avancer ma maquette, vais boire un café, retourne à l’école, fais prendre le bain, dîne et finis avachi devant « Mots Croisés ». Mais ce lundi-là, j’ai tout de suite senti que la journée allait être différente. J’atterris à Biarritz, retrouve la sémillante photographe Mélanie Bordas et file au volant d’un CR-V flambant neuf dans le désert des Bardenas. On déjeune d’une tortilla géante dans un saloon de film-spaghetti et nous voilà dans la vallée de la mort européenne, immense désert panoramique sous un éclatant soleil d’automne. Pas de bol, il a plu la veille et nous nous embourbons dans un champ de boue. Impossible de s’en sortir : pas âme qui vive à l’horizon, pas de réseau téléphonique, et le soleil tombe derrière la falaise comme un rideau de théâtre. Que faire ? J’entends un troupeau de moutons bêler au loin et m’élance dans la boue à l’assaut d’un hypothétique berger. Oui, il y a un homme au bout du tunnel qui est venu nous sortir de là. Sauf que rien ne se passe comme prévu et le pastore nous ramène sur la route goudronnée avec Mélanie, où nous attendons la rescue team Honda déjà partie à notre recherche dans les méandres obscurs des Bardenas. Au terme d’un vaudeville motorisé qui durera au moins aussi longtemps que le film « Délivrance », on retrouve le CR-V (après avoir été pris en stop dans le 4x4 d’un jeune Espagnol fou furieux). En rentrant à l’hôtel, épuisé et affamé, j’ai une pensée émue pour Yves Calvi.

16

8g CO / k m 2

10s00 0-1

Longueur 4 570 mm Hauteur 1 685 mm Largeur 1 820 mm Empattement 2 630 mm

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Garage

itinĂŠraire bis LE TONE dessine autour du monde

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Garage

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Garage

nissan ministry of sound POUR SES 10 ANS INTERSECTION INVITE LE MONSTRE SONORE DE NISSAN SUR LE TOIT DU MONDIAL 13 octobre, 1 000 invités, deux occasions à célébrer. Quand Intersection et Nissan organisent une soirée, c’est là qu’il faut être. Tous les ingrédients étaient réunis : vue panoramique sur Paris, bass rugissantes et renaissance de Kerri Chandler derrière les platines. Une soirée incontournable. Il n’en fallait pas moins pour faire transpirer les vitres, couler le champagne à flot et ravir les noceurs invétérés venus souffler les dix bougies du magazine.

texte : elsa salmon photographie : SayWho

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Garage

le véhicule oublié

harley davidson TOPPER 1960 En 1960, Harley Davidson joue la carte finesse en lançant le Topper, le seul scooter jamais produit par la marque. Cinq ans plus tard, cette perle du design Sixties disparaît sous la déferlante italo-japonaise. Et n’en finit plus depuis de devenir culte pour une micro-frange d’esthètes énamourés… C’est l’histoire d’un vilain petit canard. Du moins aux yeux de Harley Davidson, qui n’assumera jamais vraiment avoir enfanté le Topper, freluquet Forest Gump nerd perdu au milieu d’une famille de V-Twins grande gueule. Pour sa défense de parent indigne, il est effectivement légitime de se demander ce qui poussa un beau jour de 1960 un fabricant aussi velu du torse à sortir un scooter 164 cm3 à boîte automatique et démarrage à la ficelle comme une tondeuse… Avec sa jolie mâchoire carrée et ses gros pneus débonnaires, le Topper n’existe en fait aujourd’hui que grâce à ses quelques clubs d’initiés recensés dans le monde. Il aurait toutefois très bien pu se faire une place au soleil en son temps : chose peu connue, le scooter made in USA a bien vécu un âge d’or, dès les années 30, avec une pléthore de marques américaines comme Cushman, Salsbury, Rock-Ola (fabricant de juke-boxes !), Bremer, le « julesvernien » Lower Lightnin', le Papoose pliable de chez Indian destiné aux parachutistes de l’armée pour progresser au sol... En 1961, on comptait même 150 000 scooters en circulation aux États-Unis. Honorable. En tout cas, de quoi donner envie à Harley de croquer sa part du gâteau… En avant donc pour le Topper, tranche

pétaradante d’American dream à 265 dollars. À sa sortie, le scooter ne fait pas un four total. Il s’attire même des sympathies : grâce au bon comportement sur sable que lui confèrent ses pneus larges, il devient la coqueluche de tous les navets plagistes de la mouvance « Beach Party » (Beach Party Boogie, Bikini Beach, etc.), et l’acteur James Garner, celui de « La Grande Évasion », est souvent vu faisant le cake dans Hollywood à son guidon. Cap sur le succès ! Sauf que le début de Dolce Vita sera étouffé dans l’œuf. En 1964, Harley jette l’éponge face à la concurrence des Italiens et surtout des Japonais, en partie pour n’y avoir jamais vraiment cru. « Ils n'ont pas écouté ce que voulaient vraiment les clients », résume Craig LaBee, spécialiste mondial du Topper qui en refabrique aujourd’hui les pièces détachées. « Les seules options se limitaient à un vague kit chrome, un pare-brise ou un side-car, alors que les scoots italiens étaient customisables à la demande, allaient plus vite et démarraient au kick. » Le millésime 65 sera assemblé avec le reste des pièces de 1964, pour pas gâcher, avant une brutale fin de production sans faire-part de décès. So long… Depuis, le seul scooter jamais sorti des chaînes de la Motor Company du Midwest - cette trahison métrosexuelle que le barbu obtus juché sur sa Panhead fera toujours semblant de ne jamais avoir vue - n’en finit plus de sombrer dans un oubli aussi total qu’injuste. texte : sebastien carayol photographie : courtesy of Craig LaBee

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Garage

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à NE PAS TENTER CHEZ SOI

AVERTISSEMENT Les cascades présentées dans cette rubrique sont réalisées par des professionnels expérimentés dans des conditions de sécurité optimales. N’essayez pas de les reproduire chez vous. Ou alors, envoyeznous les photos.

le rouleau nettoyeur humain

1. Trouver un point d’eau efficace.

6. Atterrir avec élégance.

2. S’habiller en rouleau de nettoyage (couleur au choix).

7. Prendre son élan pour le retour.

3. Commencer par les ailes arrière et sauter.

8. Repasser dans l’autre sens en tournant plus vite pour que ça brille.

4. Tourner et rejoindre l’avant d'un seul bond.

9. Finir par le toit dans la position du lotus.

5. Insister sur la jante avant, toujours plus sale que les autres.

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Cascadeur Marc Horowitz Photos Naj Jamai


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