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Keita Mori

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Thomas Houseago

Thomas Houseago

Bug report (Corpus)

présenté au Musée des Beaux-Arts de Rouen

au travers du regard de Julie Ackermann

Ma pratique est née d’un accident. Alors que j’étais encore étudiant en école d’art, je voulais construire une maison en 3D avec des fils mais la structure s’est écroulée.

Les formes déployées par cet effondrement m’ont intrigué et je les ai stabilisées en les collant à même le sol.

J’ai ensuite développé cette méthode née de l’inattendu afin d’élargir les capacités du dessin en le plaçant au croisement de l’architecture et de la sculpture.

Aujourd’hui, je suis un principe d’accumulation, collant des fils sur un papier ou sur un mur à l’aide d’un pistolet à colle. Certains de mes dessins sont capables de rester dans leur état original pendant près de dix ans.

D’autres évoluent avec le temps, prennent la poussière, se décollent ou sont tout simplement arrachés après une exposition… Les images rhizomatiques que je conçois évoluent donc plus ou moins et cela rejoint ma volonté de représenter des réalités provisoires.

Je ne réalise en fait aucun dessin préparatoire détaillé.

J’imagine mes compositions en temps réel, dans une concomitance intime entre les déplacements de mes yeux et ceux de ma main.

Mon processus de création a des qualités performatives.

Je tisse ma toile comme une araignée, un réseau Internet ou le raisonnement d’une intelligence artificielle.

Mon dessin n’est en réalité que répétition de formes géométriques précaires. Chaque fois que j’ajoute une ligne avec une pointe de colle, je rapporte une fissure ou un bug et les accumule. C’est pour cela que mes œuvres sont toutes nommées Bug report. Les lignes créées par mes fils sont la métaphore des composantes d’une « société » ou d’un « système » plus ou moins fonctionnel.

S’ils représentent des flux mondiaux, des hyper-espaces, des non-lieux ou encore l’architecture du néolibéralisme financiarisé? Tout est possible. Les invisibilités produites par mes dessins en sont les représentations.

Il est en tout cas certain que le fait d’habiter à Paris et d’avoir étudié au Japon m’influence. Le voisinage, le contact, la tension, la déformation, l’entrecroisement et la disposition qu’offre une grande ville sont des processus que je digère, organise et réintègre dans les matrices de mes dessins.

Œuvre réalisée avec le soutien de la Pola Art Foundation.

Ce texte a été publié pour la première fois dans l’ouvrage suivant: Paula Aisemberg et Gaël Cahrbau (éd.), 5 ans du Prix Révélations Emerige, Paris, Les Éditions Particules, 2019, p. 216– 221. Portrait de Keita Mori

Photographie de Takashi Sugiura

Keita Mori Projet d’implantation pour Bug report (Corpus) 2021 -

Keita Mori Strings 2017

Vidéo en boucle, 12 minutes Production DrawingLab Paris Courtesy Galerie Catherine Putman, Paris © Keita Mori, ADAGP, Paris, 2021

Keita Mori Bug report (Ritournelle) 2018

Fil de coton et fil de soie, fil métallique sur mur Vue de l’exposition « (MO)TION », Aomori Contemporary Art Center (Japon) Photographie de Masanori Matsuda Courtesy Aomori Contemporary Art Centre

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