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Philippe Favier

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Thomas Houseago

Thomas Houseago

Il y a ceux qui écrivent et ceux qui dessinent……Toi tu dessines

présenté au Musée des Beaux-Arts de Rouen

propos de l’artiste

> Philippe Favier Discographies 2019 -

Mine de plomb et encre noire sur papier © Philippe Favier, ADAGP, Paris 2021

> Sans titre Série «HOOLOOMOOLOO» 2000 -

Gravure, 25 x 33 cm Atelier René Tazé Collection particulière © Philippe Favier, ADAGP, Paris 2021

>> Philippe Favier Capitaine [...] 1985 -

Gravure, 28 x 38 cm Atelier René Tazé Collection particulière © Philippe Favier, ADAGP, Paris 2021

Je suis un écrivain contrarié, je n’irais pas jusqu’à dire que je dessine par dépit, non, il m’arrive parfois d’éprouver quelques satisfactions avec les crayons, mais en définitive, bien maigrichonnes au regard de celle que doit procurer la délicate orfèvrerie de l’écriture. Je suis gaucher voyez-vous… et ça pardonne pas! L’encre, que j’aime tant et qui me le rend peu, nous fut très tôt déconseillée mais obligatoire! Quoi que nous tentions, le temps de séchage était toujours incompatible avec notre vitesse d’écriture. Ne nous méprenons pas, le gaucher n’est pas plus maladroit qu’un autre, ni plus lent; seulement, le gaucher macule, étire et parfois efface ce qu’il vient d’écrire. Là ou le droitier potentiel écrivain risque de laisser une trace, le gaucher, à coup sûr, laissera lui, des traces. Ce si mal à droite, ne sait jamais ce qu’il vient d’écrire, il cache ce qu’il n’a pas eu le temps de voir, il glisse sur sa ligne tel un escargot barbouillé sur sa doucette.

Alors, soit le gaucher, l’air de ne pas y toucher, enquiquine le monde pendant des siècles, écrivant à l’envers et dépeçant cadavres sur cadavres, soit il dessine. Certains rétorqueront qu’on en vit qui firent les deux! En l’occurrence je rappellerais que c’est mon texte et que j’écris ce que je veux… Je ne vous ai pas interrompu! Quand je dessine, je « vois » enfin, j’ajuste, compense, épaissis ou aiguillonne à vue, je compose! Malheureusement, cela restera comme les majuscules hypertrophiées, enluminées en vain, d’un texte qui ne viendra jamais.

Quand je dessine, je vois tout ce que je n’écrirai pas. Si je m’accroche parfois dans un enthousiasme saussurien suspect à l’idée de « signes », mes glyphes ont le moral à hiéro. Finalement, la nature, dit-on, fait bien les choses. En me relisant, je me dis que ce n’est pas plus mal si je n’écris pas, la littérature s’en remettra. Quand à la poésie, promettons-nous tous autant que nous sommes de ne pas y toucher. Laissons les mots s’encanailler sans nous. Dessinons que diable, c’est pas sorcier!

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