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Barbara Abel

Sublime Les T N Bres

Il est des livres qui nous transportent, vers des ailleurs lointains ou aux confins de nous-mêmes. Tout comme il est des auteurs qui captent les peurs primales et les dérives humaines, avec une justesse à part. C’est le cas de Barbara Abel, qui au fil de ses romans comme sous sa nouvelle casquette de scénariste télévisuelle, raconte avec magnétisme, les êtres au bord de l’abîme.

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L’on vous surnomme « la Reine du Polar belge », un titre acquis au fil de l’écriture de 14 thrillers aussi palpitants que percutants. Qu’est-ce qui vous attire irrémédiablement vers ces intrigues psychologiques ? Le thriller domestique est un rappel de ce plaisir enfantin de se faire peur. Comme lorsque petit, on se poussait jusqu’à l’excitation du frisson. J’écris aussi les histoires que j’aimerais qu’on me raconte. Celles de personnes ordinaires, avec lesquelles d’emblée peut se créer une forme d’identification, plutôt que de super flics ou de héros surpuissants. Et dont une part du contexte fait écho à ce que je vis alors. Mon premier livre “L’instinct Maternel”, avait pour héroïne une femme enceinte, tandis que je l’étais moi-même. Les années passant, les enfants des familles que j’évoque ont grandi, jusqu’à devenir des adolescents.

Vos personnages sont souvent abîmés, torturés, parfois vénéneux, comme dans “Les Fêlures”, votre dernier roman. Fréquemment étouffés par un environnement familial toxique. Pourquoi ces thèmes trouvent-ils résonnance en vous ? La famille est un microcosme dans lequel chaque émotion est exacerbée, devient explosive. Ce qui touche aux liens du sang est d’emblée viscéral. Et ces situations se passent d’explications car tout le monde les comprend. Quant à mes personnages, mon but est d’amener le lecteur à s’imaginer pouvoir basculer comme eux vers l’obscurité, pour peu d’être mis face à la même réalité.

Deux de vos ouvrages ont été adaptés à l’écran. “Un bel âge pour mourir”, via un téléfilm baptisé “Miroir, mon beau miroir”. Et “Derrière la haine”, pour le cinéma cette fois, avec “Duelles”. Est-ce un défi que de voir quelqu’un d’autre s’approprier ses personnages ? Lorsque j’achève un livre, je le lâche étrangement avec assez de facilité et ne ressens pas d’inquiétude à le voir adapté. Mon roman est déjà là, tangible, personne ne peut le modifier, le magnifier ou l’abimer. Et le fait d’avoir adoré aussi bien le téléfilm de Serge Meynard que le long-métrage d’Olivier Masset-Depasse, m’amène au contraire à ressentir une grande fierté.

Une adaptation américaine de “Derrière la Haine” baptisée “Mother’s Instinct”, arrivera également cet été sur nos écrans. Avez-vous pu vous rendre sur le tournage ? Oui, pour les trois adaptations. Se retrouver entourée de tous ces techniciens, acteurs, figurants, dans ces décors immenses, et me dire qu’ils sont là parce qu’un jour j’ai imaginé une histoire, toute seule chez moi, c’est fort. Mais quand en plus il s’agit de Jessica Chastain et Anne Hathaway, c’est surréaliste !

Vous avez également co-écrit la série “Attraction”, “Prix de la meilleure fiction francophone étrangère au festival de la fiction à La Rochelle” qui sera diffusée ce printemps avec la scénariste française Sophia Perié. Cette écriture à quatre mains était-elle complexe ? Je ne devais au départ qu’écrire un concept de projet, mais il a été accepté par la RTBF et Catherine Burniaux de De Mensen m’a proposé de m’occuper du scénario. Mais ce n’est pas mon métier, je n’en connais pas les impératifs et codes. Elle m’a donc adjoint Sophia Perié qui elle est scénariste et incroyablement douée pour la structure et la narration. Je ne me verrais travailler avec personne d’autre. Il ne s’agissait pas que de développer un script. Nous avons aussi passé des heures à parler de nous, de nos influences, de ce qui nous touche. Il faut une vraie osmose et Sophia et moi formons un parfait tandem. Cela a été une aventure extraordinaire et l’est toujours puisque nous travaillons actuellement sur la saison deux !

L’écriture scénaristique vous porte-t-elle autant que celle d’un roman ? Ce sont deux processus totalement différents, aussi bien dans la rédaction que dans l’émotion qu’ils procurent. L’écriture scénaristique en duo est plus légère, ludique. Sophia dirige parfois les personnages vers lieux que je n’aurais pas imaginés et vice versa. C’est un échange d’arguments, un débat. Je me permettrais des audaces dans un livre qui ne sont pas forcément envisageables pour ce type de format. Et puis dans un scénario, il ne s’agit pas de nuances de style, mais de raconter les faits, de manière brute. Lorsque je conçois un roman, je n’ai pas non plus la contrainte d’une équipe de production à consulter. Mais ce luxe d’être seul maitre à bord, signifie aussi affronter les blocages en solitaire. Je pratique au final les deux exercices simultanément. La rédaction de la saison 1 nous a pris trois ans, et il était inconcevable de ne pas écrire de roman durant un aussi long laps de temps. Nous avons entamé la saison 2 il y a un an, et je suis en parallèle en pleine création d’un nouveau roman.

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