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Les Belges d’ailleurs

LE BONHEUR, ÇA SE PARTAGE

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C’est à l’aube de la cinquantaine que Valérie Lardinois, Bruxelloise native de Liège, a tout quitté, bureau, ville, pays, pour s’installer à Majorque, une île qui lui a donné envie de ralentir et de s’enraciner. Elle y a lancé son propre business, Rützu, une agence qui organise des retraites de cinq jours, axées sur le bien-être, le développement personnel, le sport et la philo, qu’elle organise exclusivement sur cette île dont elle est tombée en amour…

MOTS : SERVANE CALMANT

PHOTOS : DR

On connaît Valérie Lardinois depuis nos années Canal+Belgique, bien avant BeTV, ça fait belle lurette donc. Elle travaillait à l’époque au Journal du cinéma. On l’a recroisée ensuite à la RTBF puis à RTL, en tant que directrice du département des acquisitions et de la programmation. Il y a deux ans, Valérie a disparu sur une île espagnole des Baléares, réputée pour ses stations balnéaires. Mais pas uniquement. Pour preuve, elle nous reçoit en août dernier chez elle, à Galilea, un petit village pittoresque de 400 habitants, situé dans la Serra de Tramuntana, une chaine de montagnes qui longe la côte nord-ouest de l’île de Majorque sur presque 100 kilomètres et qui est classée au patrimoine mondial de l’UNESCO. Son petit nid, à seulement 30 km de la capitale Palma, c’est une Finca - une vieille ferme et sa bergerie - entourée de deux hectares de terrain, qui est posée sur les hauteurs du village et semble suspendue entre mer et montagnes. « C’est beau, hein ? », nous lance-t-elle. « Le paradis, oui ! ». Elle : « Tu comprends maintenant pourquoi j’ai tout quitté ! » …

Marre de cette vie à courir ! « Le vrai déclic », poursuit Valérie Lardinois, « ce n’est pas tant mon départ de RTL que l’impression de passer ma vie à courir tout le temps. Qui plus est, sans savoir après quoi je courais ni pourquoi j’étais toujours dans l’urgence et la performance. Il y a une dizaine d’années, des amis belges m’invitent à Majorque où ils ont acheté une résidence de vacances, et à mon grand étonnement, je découvre une île touristique certes, mais où de nombreux endroits sont encore préservés et où la nature est luxuriante. Sous le charme de l’île, j’y reviens, et j’y reviens encore, les weekends, les vacances. A chaque

fois, j’ai l’impression de m’y enraciner. A Majorque, la notion du temps est différente. J’y ai appris à être à nouveau patiente, à accepter d’attendre mon tour chez le boulanger, à avoir envie d’entamer une conversation dans la file (Valérie parle espagnol et catalan)… A Bruxelles, j’en étais arrivée à bouffer le nez de tout le monde. Je me souviens de ce jour où, à Schaerbeek, place Meiser, sous une pluie battante et un ciel bas de plafond, je me suis demandée : mais Valérie, ta place est-elle vraiment ici ? »

Il y a 5 ans, Valérie Lardinois et son mari font l’acquisition d’une finca, qu’ils vont restaurer au fil des nombreux weekends qu’ils passeront sur l’île. Mais voilà que sans crier gare, arrive la pandémie… « La covid a obligé tout le monde à rester chez soi. Moi je suis restée sur cette île, dans ma finca, et j’y ai pris goût. Il y a peu, j’ai revendu ma maison à Bruxelles et fait le grand saut. Désormais, chez moi, c’est à Majorque ». Ici qu’elle reçoit ses trois fils, son petit-fils aussi.

Mais Valérie Lardinois est trop jeune et dynamique pour rester les bras ballants. Et produire du formage de chèvre, ce n’est pas vraiment son truc. « En achetant des films pour la RTBF et pour RTL, la notion de partage était au cœur de mon travail. Je ne programmais pas ce que j’aimais, mais ce qui était censé plaire aux téléspectateurs. Le partage ! Oui, ce mot a été une révélation : c’est cet amour de Majorque et l’épanouissement que provoque sa beauté, sa lumière, l’odeur de ses pins, que je souhaitais communiquer. Parce que le bonheur n’a de sens que si on le partage ! » Ainsi sont nés les séjours-retraites Rützu sur l’île de Majorque.

Les bonnes adresses de Valérie Lardinois

1. Magasin JOY madebyhand

Petite boutique située à Deià, tenue par une résidente belgo-argentine qui vend exclusivement des produits d’artisanats majorquais.

2. La page Instagram @isla_et_nomad

Pour avoir une bonne idée de Majorque en mode slow life.

3. Mana Mallorca

Une vieille finca au milieu de la Serra de Tramuntana à louer ou pour s’y approvisionner chaque jour en légumes bio cultivés sur place. www.manamallorca.com

4. El Camino Palma

Situé dans le coeur de Palma, un restaurant qui invite à découvrir des plats locaux, et un bar sans fin avec vue sur les cuisines.

Des retraites haut de gamme

Rützu, c’est un business autour des retraites bien-être, sport, philo et coaching de vie. « L’adn commun, c’est de se faire du bien. Le principe même de la retraite est simple : s’isoler, se poser, se recaler sur son propre rythme. Prendre, enfin !, 5 jours pour soi. »

« Vamos a Deia ! », nous lance-t-elle. Deia, c’est ce joli village de la Serra de Tramuntana où Valérie a privatisé un monastère et où nous allons passer 5 jours à nous faire du bien ! Florence Jaupain, kinésithérapeute et instructrice Pilates belge, nous accompagne. C’est elle qui va corriger notre posture et tonifier nos muscles. Après une année à bosser sans souffler, on en a bien besoin ! Le monastère, entouré d’oliviers, affiche une déco sobre et authentique qui fait la part belle aux matériaux naturels. La piscine est réconfortante, la cuisine à base de produits locaux le plus souvent bio ultra généreuse et la table d’hôtes rieuse. Valérie est aux petits soins, bien décidée à offrir à chaque participant une parenthèse de bien-être, d’évasion, de ressourcement pour vivre l’essentiel. Elle a d’ailleurs pensé à tout, même à booster notre créativité. Elle a invité Stéphanie, une Française installée à Majorque, qu’elle a choisie pour son expertise en textile. C’est elle qui va nous initier à la peinture à la craie sur fibres naturelles. Ce n’est pas gagné, mais on a pu laisser libre cours à notre créativité !

La fin du séjour approche à regret. Valérie et Florence replient les tapis Pilates, pendant qu’on sirote notre dernier jus concombre-melon gorgé de soleil. Pour Valérie Lardinois, l’aventure Rützu se poursuit avec l’organisation de séjours sports (VTT, cycling, équitation …), philo & trekking, ainsi que des séjours personnalisés pour qui veut : « il suffit de me contacter avec une thématique précise et des dates et je m’occupe d’organiser les 5 jours de retraite sur Majorque ! ». Parole d’une vraie insulaire désormais !

www.rutzu.com

La chaleur du minimalisme selon

Nicolas Schuybroek

Depuis 10 ans, cet architecte bruxellois développe une démarche où l’émotion et le sentiment de quiétude occupent le centre de ses projets. Dans un esprit d’œuvre totale, ses réalisations révèlent une recherche de perfection dans le travail des matières et le sens du détail.

MOTS : AGNÈS ZAMBONI

Quelle est votre vision de l’architecture ? Il y a environ 20 ans, j’ai connu, dans mon parcours, un moment charnière, en découvrant Le Couvent de la Tourette, une œuvre en béton de style brutaliste, réalisée par Le Corbusier, qui y avait aussi introduit tout l’art des couleurs primaires. Grâce à ce bâtiment, j’ai changé de perspective et rencontré la dimension humaine qui manque souvent à l’architecture contemporaine, en vivant une véritable expérience sensorielle. Une émotion semblable m’a traversé en découvrant le travail de Hans van der Laan, architecte et moine bénédictin originaire des Pays-Bas. En visitant ses architectures, j’ai ressenti un sentiment de quiétude, lié à la vie religieuse, que j’ai alors souhaité retranscrire dans mes propres réalisations. Et j’ai compris que le traitement particulier des espaces, des volumes et de la lumière, rehaussé par une palette restreinte de matériaux, caractéristique dans ce type de construction, peut se décliner en tous lieux.

Quelles sont les particularités de votre démarche ? Dans une idée d’œuvre totale, j’intègre le bâtiment dans un contexte, un paysage, un jardin. Je dirige mon attention du plus grand au plus petit, travaillant à différentes échelles, dans une démarche linéaire. Aux matériaux dominants de l’architecture, j’associe généralement une sélection limitée de matériaux intérieurs (pierre, bois, enduits, métal) dont la richesse des textures et patines compense le nombre restreint. Avec ses matières, qui sont autant des matériaux de construction que

OV House © Claessens & Deschamps NWJ House © Thomas De Bruyne - Cafeine

d’architecture intérieure, je dessine un fil rouge, qui dès que l’on pousse la porte, installe un sentiment de calme et de sérénité. Les proportions sont essentielles dans cette démarche. La notion de proportion est très difficile à expliquer car elle ne se voit pas nécessairement mais participe à l’équilibre de l’ensemble d’un édifice. Chacun de mes projets est le fruit d’une architecture sur-mesure, façonnée comme une robe haute couture, prenant en considération le lieu et le site qui forment le canvas de base. A la façon de Victor Horta, Adolf Loos ou Josef Hoffmann, et sur le modèle du Palais Stoclet, je reviens toujours à cette notion d’œuvre totale. Il ne s’agit pas de développer une approche totalitaire mais d’aboutir à un travail extrêmement personnalisé et très étudié jusque dans les moindres détails. Quelles sont vos influences et inspirations ? Il n’y a pas que les architectes et l’architecture, mais aussi d’autres disciplines et mouvements artistiques comme le Constructivisme russe et notamment le peintre Malevitch, les artistes du Land Art avec Hansjorg Vöth ou Michael Heizer, dans les années 1960, les artistes minimalistes tels Donald Judd. La danse contemporaine m’inspire aussi car elle offre souvent une puissance visuelle avec peu de moyens. Je pense notamment au chorégraphe Alexander Vantournhout qui développe la mécanique et la mathématique du corps, au travail de Peter Suter… Il y a également toutes les influences inconscientes qui agissent en vous et que l’on ne perçoit pas toujours.

Quelles matières aimez-vous travailler ? La pierre, bien sûr, qui permet de créer un lien entre l’enveloppe du bâtiment, pour aller de l’extérieur à l’intérieur. Je recherche toujours des matières qui ont une profondeur, une âme, une patine, une qualité particulière pour capturer la lumière et qui font référence à l’architecture.

Entre design et architecture, quelle différence ? Je ne fais justement pas de différence entre les projets. Pour moi, la démarche est identique, seule l’échelle change. Tout objet de design ou pièce de mobilier est une microarchitecture. La matière choisie induit la fonctionnalité.

Dans votre travail, quelles sont les étapes plus complexes ? Aujourd’hui et depuis un an et demi, ce sont la gestion et la logistique des projets à l’étranger qui sont les plus difficiles à gérer. Les plans ne suffisent pas pour exprimer toute la délicatesse et la précision des détails, l’alignement des joints… Toute la philosophie de mon travail, que je dois transmettre au maître d’œuvre et aux entrepreneurs, réclame un dialogue que l’éloignement ne permet pas. Il n’est pas aisé de faire passer le degré élevé de la perfection, qui est proche de l’obsession, et que je souhaite atteindre dans mes projets.

Hullebusch Biennale © Claessens & Deschamps

OV House © Koen Van Damme NWJ House © Giorgio Possenti

La réalisation la plus importante de votre carrière ? C’est toujours la dernière ou la prochaine… A l’agence, nous avons 16 voire 17 projets en route, dont un peu plus de la moitié sont localisés en Belgique. Immeuble atypique de logements à Anvers, maison linéaire de 60 m de long en Flandre, rénovation d’une maison des années 1950 à l’orée de la forêt de Soignes, maison musée pour abriter une collection d’art privé d’exception, nouvelle série d’objets pour la marque when objects work, un nouveau modèle cuisine pour la firme Obumex, des bureaux, une réalisation d’envergure dans un domaine de chasse, une maison privée dans les environs de Courtrai, une autre à Anvers. A l’étranger, la liste s’allonge ! L’ouvrage monographique, qui paraît fin octobre, représente aussi une étape importante. Avec un regard large, il montre mon approche globale où l’architecture, les intérieurs et l’ameublement sont conçus comme un tout, à travers une diversité de lieux, maisons, bureaux, hôtels, objets…

www.ns-architects.com

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