Héroïnes de contes Les héroïnes de contes n’ont pas toujours bonne presse. Leurs rôles sont souvent ressentis comme passifs et stéréotypés, alors que, comme nous le dit l’ethnolinguiste et autrice de contes Praline Gay-Para, « Contrairement à ce qui est souvent avancé par le grand public, qui connaît généralement quelques héroïnes de contes merveilleux classiques, les jeunes filles dans les contes n’attendent pas qu’un prince vienne les sauver en les épousant, elles prennent leur destin en main pour devenir femmes. »1 Le schéma suivi par des contes comme Cendrillon ou Peau d’Ane présente un motif bien connu des contes de fée, que le philosophe et anthropologue François Flahault a résumé dans la phrase « C’est bien lui, c’est bien elle »2. Ces héroïnes « […] ne sont pas passivement élues par un prince charmant comme le voudrait un stéréotype familier. Car, si le prince teste leur identité, elles, de leur côté, l’ont d’abord placé en position de leur donner la preuve de son discernement. »2 Autrement dit par Praline Gay-Para : « C’est quand-même elle [l’héroïne] qui est allée le chercher [le prince], qui l’a tourné en bourrique et qui a donné tous les indices pour qu’il puisse la retrouver non ? »1 L’héroïne ou le héros du conte est reconnu.e, au propre comme au figuré, au sens où sa valeur propre est rendue visible, au-delà des apparences et des préjugés. La thématique de la reconnaissance individuelle touche, au-delà des clivages de genre, universellement tous les êtres humains au plus profond d’eux-mêmes. On peut penser que, au-delà de la personnification dans une figure féminine, ces personnages représentent plutôt des « archétypes » ou des profils ou des modèles psychologiques universels. François Flahault identifie d’ailleurs plusieurs autres contes suivant ce même schéma mais où le personnage principal est un homme3.
1
GAY-PARA, Praline. « Vives et vaillantes : sept héroïnes de contes », Didier jeunesse, 2018 FLAHAULT, François. « La pensée des contes », Anthropos, 2001 3 François Flahault cite « Le petit jardinier aux cheveux d’or ou le teigneux », « L’homme à la peau d’ours » des frères Grimm. « Le loup-lévrier » et d’autres encore. Le conte « Un amour bon comme le sel » suit aussi le même schéma narratif. 2