QUI FAIT LA DIFFÉRENCE ? BUSINESS MÉHAIGNERIE CINÉMA JEAN-BAPTISTE LITTÉRATURE MIANO
DÉCEMBRE - JANVIER
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ediTo « Les problèmes du monde ne peuvent être résolus par des sceptiques ou des cyniques dont les horizons se limitent aux réalités évidentes. Nous avons besoin d’hommes capables d’imaginer ce qui n’a jamais existé ». John Fitzgerald Kennedy (1917-1963)
VIVEMENT
L ANNEE PROCHAINE
Les années passent et se ressemblent. La nouveauté de cette fi n d’année 2008, est la déclaration d’état de crise du monde. L’indicateur est boursier. Quand les portefeuilles sont touchés, l’écho des interrogations est beaucoup plus retentissant. rêvons plutôt d’un autre monde sur lequel la crise n’aurait pas de prise sur les cœurs purs. Être pauvre n’est pas un signe de pureté et la richesse ne donne pas non plus cette caution. Je psalmodie le mot « beau » comme un mantra, c’est pour moi le début de la rédemption. Mettre la considération du « beau » avant toute chose est le commencement du bien-être. Belle année....
LONG LIVE NEXT YEAR Years go by and unfortunately they start to resemble one another. The novelty for the ending 2008 year is the declaration of the state of crisis the world is in. The indicator is financial. When it touches the pocketbook, the echoing of questionings resonates a lot more. Rather than dream of another world in which the crisis didn’t have a sheer effect on the heart. To be poor is not a sign of purity and wealth chanting
doesn’t the
provide
this guarantee either. I’m
word
“beautiful” like a mantra,
for me it’s the beginning
of
the
“beauty” before other things
consideration
is the beginning of
of
redemption.
Putting
well-being. Have a beautiful year....
tJAMAg Albert
soMMaiRe
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Pas Que Beau
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s’esBaudiRe
fioRenTina P - 08 annaPuRna Blues P - 10
disCo fRisCo
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TRiBauX
les BeauX desseins
fioRenTina P - 08 annaPuRna Blues P - 10
lauRenCe MÉHaigneRie
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sTanley TuRRenTine P - 24 HeRBie Mann P - 25 kool & THe gang P - 26
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BeauX RePèRes
le Beau MauX
enfin afRoPÉens ?
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PoinT de vue
MisTeR Zo
eXPo oBaMa P - 32 noËl sTRass-TRasH P - 34
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Beau-Cal
Bô
eRiC BoTTeRo : gosPel
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« la CRise C’esT PouR euX là Bas... »
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CineMa : agaTHe CleRy livRes : seleCTion P - 93 on M’a diT Que... P - 94
TuR-Beau gT by CiTRoËn
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PAS QUE BEAU : ANNAPURNA BLUES
PAR THOMAS CONSTANTHINO
Le soleil brille, la montagne est magnifique, le chemin est fiable, je suis heureux, la « peur de l’inconnu » que j’éprouvais à Paris me semble ici ridicule...
Comme je suis assez fainéant, je préférai compter sur ma chance. Malgré la « peur de l’inconnu » qui me tordait parfois le ventre, ma préparation se limita à l’achat du Lonely Planet Nepal et d’un billet d’avion. De plus, je ne concevais pas de me lancer dans cette expédition autrement que seul. Arrivé au Népal vers la mi-mars, j’ai commencé par me poser à Pokhara (800m). Ville lacustre entre jungle et montagnes, assez touristique mais très zen, un paradis pour les végétariens et les fans d’outdoor. Pour moi, ce fut repos et achat d’équipements. Pour la « préparation physique », je me contentais d’une traversée quotidienne du lac à la nage. Je profitais de ces nages pour me retrouver coté jungle, sous de magnifiques arbres, cernés de cris d’oiseaux. Fuyant l’ambiance hippie de mon hôtel qui commençait à me plaire dangereusement, je gagnais Besi-Sahar en cinq jours de route, dernier village avant la nature brute. Confortablement calé parmi les bagages sur le toit du vieux bus, profitant de la vue panoramique, du soleil et de mon ipod. A l’arrivée, le bus déposa quelques trekkeurs accompagnés de leur guide et leurs porteurs … Ils avaient l’air de s’y connaître. Je suivis le chemin qu’ils ouvraient puis je finis par les dépasser. Je passerai ma première nuit au bord d’une rivière, au fond de la vallée que suit le chemin. Par la suite, les refuges qui proposent de petites chambres à des prix dérisoires me seront bien utiles. Vu de la France, j’imaginais l’Himalaya comme une succession de très hautes montagnes. En fait, selon l’altitude, on trouve des paysages
reliés entre eux par des ponts suspendus à la Indiana Jones et des chemins à flan de ravins où l’on doit se battre avec d’interminables caravanes d’ânes pour ne pas se retrouver au bord du vide. On commence par traverser des rizières en terrasse et des vallées verdoyantes, ça monte doucement et le chemin passe par de nombreux villages. Les chemins sont d’une importance vitale dans ces régions. Pas de routes donc pas de voitures, tout est transporté à dos d’âne ou d’homme. À mesure que le chemin monte et s’enfonce plus profond dans le massif, les rizières laissent place à des jungles tropicales ou l’on croise parfois des singes, puis à des fôrets. Quel sentiment de liberté indescriptible que de se retrouver perdu au crépuscule dans une forêt de pins millénaires aux pieds de montagnes colossales ! Je n’ai jamais été inquiet car le chemin balisé de chortens et de drapeau de prièresmulticolores n’est jamais loin. L’Himalaya c’est bien sûr de la haute montagne. A partir de 4500m, le froid devient un vrai danger la nuit, alors plus question de bivouaquer. Le mal de montagne m’a surpris, c’était ma première fois et je suis monté trop vite. Les symptômes sont : mal de tête quasi permanent, déshydratation, perte d’appétit et de sommeil, essoufflement au moindre effort… dans ces conditions, suivre une piste dans la neige et le soleil peut se transformer en calvaire. C’est bien dommage, il paraît qu’à plus de 5.000m les paysages sont grandioses. J’ai vécu la descente vers Muktinath, comme une libération. Les derniers jours, je me retrouvais dans un paysage de steppes rappelant l’Asie Centrale, puis de nouveau, des fôrets de pins puis la jungle avant de me retrouver un peu hébété dans une station de bus pour retourner à Pokhara. Après 10 jours de nature à peu prés préservée, la vision d’animaux en cage et de camions de chantier est profondément déprimante.
olyMPiC RunneRs « Paco-Paco-Wa-Wa »
tHE SuN WAS SHININg, tHE MOuNtAIN WAS MAgNIFICENt, I COuLD EASILY FIND MY WAY, AND I WAS HAPPY. ALL OF SuDDEN, MY FEAr FOr tHE uNKNOWN HAD DISAPPEArED AND I WAS ASHAMED OF MYSELF FOr tHINKINg tHAt WAY.
were interconnected to each with suspension bridges like an Indiana Jones movie, where trekkers had to balance out their donkey backs in order not to end up in the ravines. We began by crossing rice terrace fields and green valleys. We slowly went uphill and walked through several villages. Since there were no roads, cars could not drive. So we had no choice but to carry our belongings on our backs. As we rose and sank deeper in the Massif, rice fields turned into tropical jungles where one could see forests filled with monkeys. What an indescribable feeling of freedom to be lost lost in the twilight in a forest of ancient pines, at the bottom of colossal mountains! As we climbed up, I was never worried because there were always signs of shortens on how to get back down. Himalaya was really the upper-Mountain. At approximately 14,563ft up, the cold became vicious and there was no way to bivouac. I was suffering from headache, dehydration, loss of appetite and sleep, and extreme breathlessness. That’s when I realized that climbing too fast had made me mountain sick. In those conditions, even walking in the snow or the sun became painful. Unfortunately, I didn’t climb pass 16,500 ft, but I was told that the view only got better. Our descent towards Muktinath was a relief for me. I spent the last days in a landscape of steppes, reminding me Central Asia, forests of pines, as well as the jungle before finding myself a little dulled at the bus station on my way back to Pokhara. After 10 days in that neglected nature, the vision of those animals in cage and construction trucks was profoundly depressing.
© dR
The lazy guy I was decided to heavily rely on luck. Despite my fear for the unknown, which often made my stomach twinge, my only preparation for the trip consisted of purchasing a plane ticket as well as the Lonely Planet Nepal, a local travel guide. I still hadn’t processed the idea of travelling by myself. Sure enough, I arrived in Nepal around mid-March and I began my journey in Pokhara. It was a lakeside city, located in between jungles and mountains. Amazingly, Pokhara was rather touristic and Zen, but it was also a paradise for vegetarians and fans of outdoor activities. For me, it was all rest and purchase of equipment. Every day, I swam through the lake to prepare myself physically. I used the daily swim to enjoy the wilderness which was filled with magnificent trees and soothing bird sounds. In the effort to stay away from the Hippy atmosphere around my hotel, I went on a 5 day- drive to Besi-Sahar, a small town before raw nature. As I was comfortably propped up among suitcases on the rooftop of the old bus, I took advantage of the panoramic view to watch the sunrise and listen to my iPod. Once we arrived at Besi-Sahar, some trekkers accompanied with their guides first exited the bus. As they seemed to know where they were going, I decided to follow them. I followed them for a while and I eventually passed them. I spent my first night on the edge of a river situated at the bottom of a valley. The following nights, I used those refuges which offered small rooms at a bargain. Seen from France, I had as a chain of mountains. Depending on one’s altitude, the rich landscaping appeared as if mountains
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LES BEAUX DESSEINS : MÉHAIGNERIE : INTENSE & DENSE
Franco-américaine, fille de politique,
PAR ALBERT TJAMAG / PHOTO STEPH MICHAUX
Laurence
MÉHAIGNERIE crée un fonds d’investissement avec une approche sociétale...
B.M. : Qui êtes vous Miss Méhaignerie ? L.M. : Une parisienne ayant grandi en Bretagne de mère américaine et de père français. B.M. : Le côté américain apporte un bonus ? L.M. : Le fait d’être mixte, quelque soit l’autre moitié, est un plus. Mon côté américain m’amène à poser des questions sur la société française que de nombreux Français qui n’ont pas spécialement intérêt à ce que le système bouge, ne posent pas ou ne ressentent peut-être pas. Je suis aussi ravie de vivre dans une société aussi cosmopolite que la France. J’ai donc envie de me battre pour que la société française en soit fière et valorise cette richesse au lieu de lui tourner le dos. Enfin, je place l’objectif de résultat devant les débats sur les principes et la méthode. Je ne crois pas à cette conception figée et intangible d’une République égalitaire et universelle, une fois pour toutes. L’égalité n’est pas une donnée, c’est une tâche à accomplir. Si nous lisions les textes de nos pères fondateurs avec les lunettes du 21è siècle, et non avec celles du 19ème nous, nous y trouverions matière à faire de notre pays l’une des sociétés les plus avancées en matière d’équité et de diversité ! Au lieu de cela, nous avons encore une vision défensive d’une République qui serait le gardien du temple de l’égalité, face à une Amérique communautarisée, inégale, et ghettoisée.
Les faits, la victoire d’Obama en est une criante illustration, démontrent une vision caricaturale et souvent erronée des Etats-Unis. Cela n’aide pas à réconcilier mes deux moitiés ! B.M. : La différence la plus criante entre les Etats-Unis et la France ? L.M. : C’est en travaillant sur les questions de diversité que j’ai finalement pris conscience de mes deux moitiés. Les Etats-Unis sont dans une culture du résultat ; les français sont dans une culture du débat… qui peut ne jamais atterrir. Par exemple, on aime ici opposer notre modèle qui se refuse à mesurer la réalité (de la diversité) à un modèle de quotas. C’est un exemple de débat théologique dont on raffole. Les grands principes l’emportent sur l’objectif de résultat. Ensuite, la France est censée être un modèle intégrateur. Toute mesure –et reconnaissance- de la diversité (n’oublions pas que nous n’avons toujours pas pris la peine de définir ce terme), violerait notre modèle et nous conduirait vers le communautarisme. Mais c’est tout le contraire ! Le modèle intégrateur républicain classique fonctionne mal, et laissera place au communautarisme si nous ne faisons rien.
nanko « lucky you »
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BEAU-CAL
Gos pel PAR ERIC BOTTERO
Un gospel s’élève du fin fond d’une église perdue, les gorges chauffées à blanc PSALMODIENT un chant venu du fond des âges. Alleluia
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Bô : kossi aguessy eXTRaTeRResTRial designeR PaR TJaMag alBeRT / PHoTo Masaki okuMuRa
LE MONDE
EST CE QUE L ON EN FAIT
J’AI été FASCINé trÈS JEuNE PAr LA CAPACIté DE L’HOMME À CONStruIrE DES EMPrEINtES QuI trAVErSAIENt LE tEMPS. CONStruIrE DES réFérENtS QuI guIDENt NOS CIVILISAtIONS. tA : Pouvez-vous vous présenter en deux mots ? KA : Je suis né au togo, d’un père togolais et d’une mère Brésilienne. Designer, archi, peintre et sculpteur à mes heures perdues. Avant tout humain et métisse de valeurs intellectuelles, culturelles et géographiques. tA : Quand vous est venue cette conscience du métissage ? KA : Je ne me suis jamais posé la question. Pour moi, aller chercher quelque chose chez l’autre et l’additionner à ce que j’ai, n’a jamais été un problème. C’est peut-être dû à mon histoire personnelle. J’ai grandi sans télévision, j’étais très axé science, géométrie et littérature. Je mélangeais Dostoïevski et « tintin au Congo », les Marvel comics, des recherches sur la vallée de l’Euphrate, la dynastie Ming. J’ingurgitais ce mélange et je recréais mon monde. J’étais un peu autiste et j’ai dû faire un énorme travail pour aller vers les autres. L’écrit a longtemps représenté des fenêtres pour moi, la diversité de ces livres a construit un monde sans frontières à mes yeux. J’aimais déconstruire le gondwana, ce supercontinent primaire unique, comme un puzzle et rebâtir un monde le monde que j’imaginais. tA : Avez-vous toujours eu la certitude d’avoir un côté artistique ? KA : Le mot certitude est très important. Dès 6/7 ans, j’ai commencé à faire des répliques de ces constructions. Ça allait des pyramides Incas aux mosquées de tombouctou. Je ne me suis jamais dit que j’allais être designer car je n’avais pas les mots. Mais je savais que c’était là. Ça dérangeait et énervait beaucoup ma mère car je n’entrais pas dans les canons de l’enfant africain guidé vers les métiers traditionnels. Je me suis rendu compte au fi l des années que j’approchais davantage des originaux et donc à un moment, j’ai arrêté de copier et je me suis fi é à mon imaginaire. J’ai toujours fait en réduit ce que je voulais faire plus tard. tA : C’était facile de sortir tout ce monde de votre tête ? KA : j’étais en avance et ça m’a pas mal pénalisé. Pour certaines personnes, il n’était pas normal qu’à 11 ans, j’aie déjà lu « guerre et Paix » que je le comprenne et que je puisse en discuter avec des adultes.
CoMMon « The People »
I WAS FASCINATED VERY YOUNG BY THE CAPACITY OF THE MAN TO BUILD IMPRINTS WHICH CROSSED THE TIME. BUILD REFERENTS WHO DRIVE OUR CIVILIZATIONS.
© Masaki okuMuRa
TA : In two words who are you ? KA : I was born in Togo, to a Togolese father and a Brazilian mother. Designer, architect, painter and sculptor in my free time. Above all I am human, I am multicultural in my intellectual, cultural and geographic values. TA : When did you become aware of this miscegenation ? KA : I never gave it much thought. For me, to go looking for a quality that another person might posses and making it my own has never been a problem for me. Maybe it’s because of my own history. I grew up without a television. I was very focused on science, geometry and literature. I combined Dostoyevsky and “Tintin in Congo”, Marvel comics, research on the Euphrates valley, the Ming dynasty. I overindulged in this fusion and I recreated my own world. I was a bit autistic and it took a lot for me to approach others. Writing has represented an outlet for me for quite some time. In my eyes, having a wide rang of books has created a world without boundaries. I loved to deconstruct the Gondwana, the first immense continent, like a puzzle and rebuild a world that I had imagined. TA : Were you always certain to have a artistic side that was different ? KA : The word certainty is very important. As a young child, I was very fascinated with man’s ability to build things that could be carried across time, build referents that guided civilizations. As early as 6 or 7 years of age, I started making duplicates of these constructions, from the Incan pyramids to the Timbuktu mosques. I never said to myself that I would be a designer because I didn’t even posses these words. But I knew that it was there. It really bothered and upset my mother because I didn’t fit into the African child canon which directs you towards traditional professions. Over the years I realized that I was getting closer to the originals and at one point, I ceased to copy them and began to trust my imagination. I always ended up, on a lesser scale, doing what I wanted. TA : Was it easy getting all of that out of your head ? KA : I was advanced and that got me into trouble. For certain people, it wasn’t normal that at 11 years old I had already read “War and Peace”, that I understood it and could discuss it with adults. 43