3 minute read
Portrait : Sérigne, un passeur de cultures à Matongé
SERIGNE
Un passeur de cultures à Matongé
Advertisement
Serigne est un manager culturel, passionné par les jeux traditionnels africains, les arts martiaux et le football, et avant tout un homme qui rêve et qui sait rassembler. Il apprécie particulièrement discuter jusqu’au bout de la nuit avec ses amis de son parcours de vie, de ses projets en cours et de ses réflexions.
En 2013, il fuit le Sénégal, son pays natal et vient en Belgique pour des raisons politiques après avoir réalisé des téléfilms sur l’homosexualité, bannie dans son pays. Lors de son arrivée en Belgique, il suit une formation de médiateur culturel, ce qui l’aide à lancer le collectif JOUWAii soutenu par CitizenDev et le Contrat de Quartier, qui cherche à valoriser les jeux traditionnels africains au sein de la commune d’Ixelles.
Parmi les personnes qui l’ont aidé, Serigne ne manque pas de citer Piet et Kinch, qui ont facilité sa participation à la table des connecteurs. A la suite de cela, il s’est joint au projet CitizenDev, qui « permet une participation massive des habitants et des populations à un projet proposé par les citoyens. Avec CitizenDev, c'est du bas vers le haut ». Son collectif JOUWAii a pour credo de défendre les jeux comme alternative à la solitude et au repli sur soi. Au centre du projet donc, mettre le lien au cœur du quartier, via une synergie des jeux africains comme l'awalé, le yoté, le yakabatiya, le woure, et bien d’autres jeux ancestraux de plateau, de figurines, d’ambiance, de force, de danse et de chanson.
Serigne tient d’ailleurs beaucoup au vivre-ensemble des communautés africaines et des citoyens bruxellois que permettent les interactions et dialogues joyeux suscités par le jeu. Sensibilisé à la gentrification et la ghettoïsation des communautés, il dit que « les jeux permettent aux
Le développement communautaire « du bas vers le haut » demande du temps et des travailleurs de terrain qui n’attendent pas dans leur bureaux mais vont à la rencontre. Sérigne présente son expérience pendant la journée de valorisation CitizenDev en février 2020.
Dessin: Dado Cornejo
gens de créer des liens entre eux, de créer le vivre-ensemble, de commencer à discuter, d’échanger, et ça permet aux gens de se retrouver. » Le collectif Jouwaii non seulement transmet l’apport pédagogique des jeux africains, qui « parlent de démocratie, de liberté de circulation, de solidarité, de partage…» mais il participe également à leur sauvegarde car même en Afrique ils sont menacés de disparition. Serigne ne manque pas alors de désigner le smartphone comme principal coupable.
Il les présente dans des écoles, notamment à Saint-Boniface, ou dans des maisons de la culture comme Kuumba. Mais aussi et surtout lors de l’African Traditional Games Festival, qui a eu lieu durant trois jours début mai 2019, autour d’un parcours de 17 stands - un par pays. C’était pour lui une grande réussite. Un véritable melting-pot de nationalités qui échangent: « des Bulgares, des Belges, des Français, des Congolais, des Sénégalais, des Rwandais. » Il a même reçu un écho favorable de la part des autorités sénégalaises, venues aux côtés de « députés, de maires, de bourgmestres et échevins » belges. Une belle revanche… « C’était fascinant » dit-il, en espérant poursuivre l’aventure en Afrique, au-delà de CitizenDev.
Portrait réalisé par Céline Mathijsen, Eléonore Offermans et Leeloo Saweryniuk, étudiantes de l’Université SaintLouis-Bruxelles.