Atelier de nicolas article

Page 1

Perso

gastronomie

IXELLES

L’ATELIER DE NICOLAS RÉINVENTE LE BISTROT DE QUARTIER Une terrasse sous un store noir en face d’un parc au charme londonien. Nous sommes dans le quartier du Châtelain, à la table de l’un des chefs les plus discrets et les plus inventifs de la capitale.

C

ertains commenceraient par là. Pas Nicolas Rivière. Et pourtant la brochette de restaurants étoilés dans lesquels ce Français a travaillé constituerait un bel amuse-bouche. Juste pour picorer, on citera le Louis XV à Monaco sous les ordres d’Alain Ducasse, le Carlton et le Martinez à Cannes, le Crystal à Marrakech... Et le Rouge Tomate à Bruxelles. C’est d’ailleurs dans notre pays que l’envie d’ouvrir son premier restaurant lui est née. Une place pour la créativité et une offre pas trop saturée: la capitale européenne lui paraît l’endroit rêvé pour se lancer. Un envol difficile «Le problème, c’est que je parlais et je raisonnais comme un cuisinier», reconnaît aujourd’hui Nicolas Rivière. Pro des fourneaux, il a peur de se brûler les ailes en montant son affaire. Sa rencontre avec Olivier Rizzo est déterminante. Séduit par l’enthousiasme et le talent de ce jeune chef, l’homme d’affaires belgo-italien lui remet les pieds sur terre et le met aux commandes de la cuisine du News, un club privé au sein du stade Roi Baudouin. Les trois années à soigner les papilles de ses membres souvent prestigieux ont formé le futur restaurateur à la gestion des produits et des clients. Un bon tremplin pour le plongeon qu’il effectue main dans la main avec Olivier Rizzo en octobre 2012. «Pas une période idéale pour commencer», admet Nicolas Rivière, mais l’emplacement que les deux associés ont trouvé ressemble à une bénédiction: un ancien 86 19 JUIN 2014 | WWW.TRENDS.BE

restaurant sur une place du quartier Châtelain. Nicolas a travaillé en face à la Maison Félix (aujourd’hui fermée), habité à trois pas et l’endroit possède une terrasse. A l’intérieur, tout est resté. Question de budget mais pas que. La luminosité des baies vitrées, la convivialité des banquettes en bois, la beauté nature du mur de pierres dorées... L’ambiance est chaleureuse, pourquoi changer? Sur le nom, pas d’hésitation non plus, c’est l’«Atelier de Nicolas». Un côté artisanal et «fait maison» qui tranche avec la sophistication des adresses impersonnelles. D’ailleurs, le rêve du jeune chef a toujours été d’ouvrir la cuisine sur la salle. «Pour plus tard», conclut-il sagement. Raisonnable, il a fallu l’être dès le début. Pas de dépenses inutiles et pas de communication. Une option qui a permis au chef d’aiguiser patiemment ses couteaux en attendant les premières vagues de clients. Surtout qu’à l’époque, Nicolas officie encore au Heysel. Pour assurer le suivi des deux établissements, il n’a pas d’autres choix que de rédiger une carte. Mais la formule figée refroidit un peu sa créativité. Ardoise magique Une fois l’aventure du club sportif terminée, le cuisinier est bien décidé à innover et teste différentes formules à l’Atelier. «Il fallait trouver la bonne offre.» Par exemple, simplifier les intitulés. «Un plat au nom trop pompeux est en décalage avec une assiette épurée», observe le jeune chef qui avoue avoir révisé sa copie aussi du côté des prix.

«Le plus dur à ce moment-là, c’était de tenir le rythme.» Il faut dire que le restaurant était alors ouvert sept jours sur sept (à présent, il est fermé dimanche et lundi) et que notre homme est seul en cuisine. Aujourd’hui rejoint par un second, Nicolas respire. Et même si le client doit parfois être un peu patient, il est servi efficacement. Après quelques tâtonnements, Nicolas propose aujourd’hui une ardoise de suggestions qu’il renouvelle au gré de ses visites au marché matinal du côté du canal, un lunch à 20 euros (entrée, plat, café) et le soir, un menu du marché à 35 euros (trois services). Si celuici se réécrit chaque semaine, sur l’ardoise en revanche une fricassée d’asperges à midi peut se transformer le soir en un risotto aux asperges et crevettes grises. Rien ne se perd, tout se gagne, surtout la fraîcheur qui demeure dans l’assiette. «Inventer, combiner et s’amuser.» A l’entendre, on enfilerait presque un tablier... Le moment fort de l’Atelier, c’est son menu dégustation chaque dernier mercredi du mois. Une formule à 60 euros avec quatre à six plats accompagnés de vins adaptés.


PHOTOS PG

DANS L’ASSIETTE, le chef s’en tient naturellement à l’essentiel. Pas d’échafaudage compliqué, ni de dessin stylisé, les plats ressemblent à ce qu’ils sont. NICOLAS RIVIÈRE propose une ardoise de suggestions qu’il renouvelle au gré de ses visites au marché matinal.

La soirée, souvent festive, commence dès 17h par un apéritif qui met sur le comptoir une sélection de bouteilles et de bouchées associées pour 10 euros. Depuis mai, la grande nouveauté, c’est le menu surprise, une carte blanche de six plats (pour 55 euros) que l’on commande sans poser de questions. Jusqu’ici pas de faux pas, «tout le monde a aimé l’exercice», assure le chef qui avoue son amour pour le principe du menu unique. Ses dernières innovations, il les doit aussi au soutien des habitués. Dès la première semaine, les clients de l’ancien établissement, souvent des habitants du quartier, sont venus recoloniser «leur» restaurant. Les plus fidèles avaient même une plaque en laiton à leur nom scellée dans le parquet. A côté de ce

noyau dur, l’Atelier a réussi à agréger de nouveaux clients grâce à un effort de référencement sur certains sites internet. Des canaux de réservations non négligeables quand sonne l’heure des vacances scolaires et que le quartier se fait désert. «Bistronomique» Sa vocation et son inspiration, Nicolas les a tirées d’un peu partout et notamment de son enfance nomade entre la Normandie et l’île de la Réunion où vit la famille de son père. Dans les filets de ses expériences, il a

gardé le goût pour les épices, les légumes et les poissons dont il maîtrise merveilleusement la cuisson. Une combinaison assez diététique qu’il a pu mettre en pratique chez Rouge Tomate en élaborant la charte nutritionnelle de l’établissement. C’est d’ailleurs là qu’il a mis au point ses risottos à base de pulpe de légumes. Parfumés et déclinables à l’infini, ils sont nettement plus légers que les habituelles versions crémées. Dans l’assiette, le chef s’en tient naturellement à l’essentiel. Pas d’échafaudage compliqué, ni de dessin stylisé, les plats ressemblent à ce qu’ils sont. Simplicité, qualité et petite quantité sont pour Nicolas les devoirs sacrés de la bistronomie inventée par le chef français Yves Camdeborde. Un concept aujourd’hui un peu «surfait», reconnaît-il. Oui peut-être, mais pas chez lui. z PALOMA DE BOISMOREL 151-153, rue Washington, 1050 Ixelles. Tél. 023466829. www.latelierdenicolas.be.


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.