references

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Références


Basé sur la remise en question et le refus des idées figées, il n’y a pas UNE définition absolue et intangible du libre examen. Vous retrouverez ici quelques points de vue à son sujet. Pour aller plus loin, consultez la rubrique téléchargement. Vous y découvrirez d’autres propos de libres penseurs notoires, des analyses libres-exaministes de sujets de société et une chronologie des combats et acquis des libres penseurs. Bonnes lectures, bons questionnements.

Henri

L

Pointcaré

a pensée ne doit jamais se soumettre, ni à un dogme, ni à un parti, ni à une passion, ni à un intérêt, ni à une idée préconçue, ni à quoi que ce soit, si ce n'est aux faits eux-mêmes, parce que, pour elle, se soumettre, ce serait cesser d'être.

Jean-Louis

L

Servais

e libre examen, c'est la souplesse de l'esprit, pas celle de l'échine. Le véritable libre exaministe n'est pas celui qui joue gratuitement avec les idées, c'est celui qui va au bout de sa raison et de son honneur.


Marcel

U

Le souci de la preuve

Voisin

ne forme plus strictement intellectuelle de la justice est cette honnêteté inhérente à la méthode scientifique qui ne veut rien affirmer sans preuve. Cela ne nous paraît plus extraordinaire aujourd'hui que la science a droit de cité et que la pratique de l'expérimentation nous fournit en preuves objectives et vendables. Nous oublions que cette évidence résulte d'une longue lutte acharnée contre le dogmatisme et l'exploitation de la crédulité publique que permettait l'ignorance. Et prenons garde de tomber dans un optimisme béat. Aujourd'hui même, à l'échelle mondiale, une telle conception de la vérité n'est réellement partagée que par une minorité éduquée en ce sens. En fait il s'agit d'un des caractères les plus spécifiques de la pensée laïque. Il contredit des habitudes majoritaires, traditionnellement ancrées et répandues dans tous les domaines de la vie, qui flattent notre paresse naturelle, exploitent notre ignorance et permettent des prises de pouvoir. On sait que nos précurseurs ont dû vigoureusement se battre, souvent au péril de leur vie, contre l'argument d'autorité. Mais on n'analyse pas assez les modalités plus ou moins insidieuses qu'il peut encore prendre aujourd'hui. D'ordinaire, quand on affirme une opinion, on l'appuie bien plus qu'on ne la prouve. Ces points d'appui peuvent être très variés. Citons sans vouloir être exhaustifs : • le ton : plus ou moins convaincu, plus ou moins péremptoire. Dans l'écrit, il peut s'agir d'artifices de style, de subtils jeux sur les mots ou la syntaxe. • la réputation du locuteur, l'autorité qu'on lui attribue, la confiance dont il jouit, sa place dans la hiérarchie sociale, son “air” compétent. • la loi de la majorité qui pousse à faire confiance à l'opinion répandue, à rallier le grand nombre comme si l'histoire n'était pas féconde en erreurs communes et en vérités très particulières. • le sophisme c'est-à-dire une argumentation volontairement trompeuse (le paralogisme est une erreur involontaire) qui, par exemple, tire indûment des


conséquences de certaines prémisses ou relie artificieusenient des éléments étrangers. • la tradition : “on a toujours fait, ainsi”, comme si l'erreur ne pouvait s'invétérer et que les habitudes culturelles n'étaient pas des bouillons de culture de l'erreur ! • l'analogie, même dans des écrits “sérieux”, il n'est pas rare d'oublier que "comparaison n'est pas raison". Plus elle esi séduisante et donc persuasive, plus l'analogie doit éveiller notre sens critique. Elle constitue un piège très courant dans l'argumentation car elle semble s'inscrire sur une “pente naturelle” de notre esprit. Elle joue d'ailleurs un rôle important dans le “mensonge poétique”, mais on ne demande pas à la poésie d'être véridique. • la révélation : elle sacralise l'énoncé et le rend intouchable sous peine de sacrilège. C'est une variante particulièrement mystificatrice de l'argument d'autorité. Le truc est simple : situons l'autorité dans l'absolu ou le surnaturel et nous aurons une “vérité” définitive, impressionnante et tout à fait contraignante (du moins pour ceux qui y croient !). • la répétition : on connaît l'adage : “mentez, mentez, il en restera bien quelque chose”. Toute propagande, toute publicité l'utilisent abondamment, des antiques prêches aux modernes réclames. La conviction naît du matraquage en provoquant une pseudo-évidence. Et si l'on n'entend qu'un “son de cloche”, le procédé est parfait ! • l'omission : en isolant l'énoncé de son contexte, le fait de ses circonstances, la "preuve" de ses contre-preuves, le jugement des avis divergents, etc., on renforce indûment la non-pertinence et l'on trompe le chaland. • la généralisation abusive : elle est souvent le fait du préjugé qui saisit la moindre occasion de se confirmer. Ainsi le xénophobe connaissant un étranger parasite se confortera dans l'idée que tous les étrangers vivent aux crochets de la sécurité sociale. Un esprit favorable au paranormal retient les coïncidences, la prédiction réussie, l'intuition éclairante oubliant les milliers de cas négatifs. Ainsi toutes les formes d'exagération tendent à devenir autant de preuves. • la présupposition : elle fait partie de l'implicite du discours et est très difficile à déceler (voir rhétorique et argumentation). Inculquer le souci de la preuve, c'est œuvrer dans le sens d'une honnêteté rigoureuse mais aussi d'une vigilance efficace contre tous les attrape-nigauds. Cela suppose une étude et une pratique des critères de validité, variables selon les domaines et les situations.


Philippe

A

Grollet

dhérer au principe du libre examen, c'est non seulement revendiquer un droit inaliénable, celui de l'absolue liberté de conscience, mais c'est surtout assumer une responsabilité : celle de développer sa réflexion critique personnelle et de garantir aux autres le droit et la possibilité d'en user de même. Le principe du libre examen implique par conséquent de mettre en œuvre, autant que possible, les conditions matérielles nécessaires à l'exercice effectif de la liberté de pensée et de son expression. Le principe du libre examen débouche par conséquent sur une discipline de vie et d'action tendant à l'émancipation individuelle et collective de l'homme à l'égard de toute forme d'assujettissement, de discrimination, de cléricalisme (celui-ci défini comme l'appropriation exclusive et organisée d'une partie du savoir ou du pouvoir de la collectivité au profit d'une minorité de clercs seulement). C'est dire que le principe du libre examen conduit à des prises de position concrètes : on ne peut en effet, du moment qu'on réclame le droit à la liberté de conscience, rester insensible à la répression dont elle est quotidiennement l'objet et dont on ne tarderait pas à devenir complice à force de vouloir sauvegarder une prétendue neutralité. Neutralité impossible face aux velléités cléricales d'ingérence des autorités religieuses dans la conduite de l'État et d'instauration d'une morale obligatoire et non tolérante. Neutralité impossible face à la dictature et au fascisme qui préconisent l'ordre pour l'ordre, qui sacralisent la hiérarchie, nient le droit de critique et de non-conformisme. Neutralité impossible face à l'apartheid, qui érige le racisme et la discrimination en système. Neutralité impossible face aux “interdits professionnels”, aux internements psychiatriques pour raison d'État. Neutralité impossible face aux sujétions économiques, à l'élargissementcroissant du fossé entre pays riches et pays pauvres, dont résulte la dépendance politique et culturelle des moins-nantis. Neutralité el indifférentisme impossibles face aux problèmes d'éducation, de culture, de société.


C'est ainsi que le principe du libre examen débouche sur le politique (dans le sens relatif à la chose publique) sans que jamais il n'autorise la soumission à un parti ou l'enrôlement obligatoire à l'une ou l'autre chapelle. Il incombe à chacun de donner à son engagement les implications pragmatiques que lui dictent sa conscience et son analyse personnelle et critique.

André

P

Breton

arce que c'est le monde entier qui doit être non seulement retourné mais de toutes parts aiguillonné dans ses conventions Qu’il n’est pas une manette à quoi se fier une fois pour toutes Comme pas un lieu commun dogmatique qui ne chancelle devant le doute et l’exigence ingénus.


Libre examen et dogme

H

Définitions relatives

istoriquement, la libre pensée et le libre examen se sont constitués et définis en étroite relation avec le dogmatisme. A l’origine, était considéré comme “libre penseur” celui qui n’adhérait pas voire contestait les vérités admises par la société ou communauté dans laquelle il vivait. Jugé péjorativement et stigmatisé, le libre penseur était amalgamé à d’autres qualificatifs révélateurs de l’orthodoxie du moment : impie, dépravateur, libertin, hérétique, sorcière. Parmi les pionniers de la libre pensée, on recense Socrate et la plupart des premiers philosophes qui cherchaient à expliquer le monde selon d’autres principes que la référence aux dieux Chtoniens, les premiers chrétiens persécutés par le polythéisme païen, les adeptes de la gnose, les Cathares et toutes les formes d’hérésie mises au bûcher par l’Inquisition catholique, Giordano Bruno ou Galilée face à la “science” de leur temps, Spinoza exclu de la communauté juive, Luther dissident du Saint Empire, Sade emprisonné par les révolutionnaires de 1789, enfin les penseurs matérialistes (d’Epicure à Marx en passant par Diderot et le curé Meslier) et les théoriciens de l’athéisme (Feuerbach, Stirner, Bakounine, Nietzsche, …) minoritaires au sein de l’idéalisme dominant la philosophie jusqu’il y a peu, … C’est donc l’orthodoxie, le dogme qui a d’abord défini la libre pensée. A notre tour, libres penseurs, de proposer une définition du dogme. Le mot est apparu dans la langue française au XVIe siècle et fut revendiqué par l’Eglise catholique pour nommer les vérités révélées (dont l’infaillibilité pontificale…) qu’elle imposait à la foi de ses fidèles. Alors qu’en grec, dogma


signifiait “opinion ou décision” et en latin “thèse ou précepte”, il finit par équivaloir en latin de messe à “croyance orthodoxe, catholique”. Comme l’illustrent les quelques exemples cités, le dogmatisme et l’obscurantisme demeurèrent longtemps l’apanage des religions contre lesquelles résistait la libre pensée. L’enjeu de celle-ci résidait cependant moins dans la non croyance que dans la possibilité de croire autrement. Jusqu’au XVIIIe siècle, les libres penseurs ne se disaient pas athées mais déistes. Quant au libre examen, c’est à Luther que nous devons sa première formulation claire et conséquente. Préconisant une libre interprétation individuelle des Ecritures et l’adéquation entre les principes et les actes, il favorisa, bien avant les laïques, l’instruction obligatoire, à Genève, pour donner à tous les moyens de lire les textes. Ces évocations historiques soulignent en outre comment une croyance peut être jugée par le dogme majoritaire comme une hérésie, donc une libre pensée, alors qu’elle repose elle-même sur une série de dogmes et fonctionne comme une secte. Et lorsque ce dogme minoritaire devient majoritaire, il reproduit sur d’autres les pratiques inquisitoriales dont il fut victime… Il nous semble donc judicieux de dissocier la définition du dogme de toute référence religieuse pour la focaliser sur le processus qui peut se répéter à toute époque et dans toute communauté humaine. Nous le définissons aujourd’hui comme tout discours ou doctrine qui se prétend fondamental, vrai et incontestable ; toute vérité qui impose sa légitimité voire son évidence par l’autorité morale, la contrainte ou le conditionnement de sorte à ne plus supporter la moindre remise en question et à réduire au silence tout ce qui la dément ou à disqualifier tout ce qui la contredit. La libre pensée et le libre examen se définissent toujours négativement – désormais de leur propre initiative – en tant que refus de toute forme de dogmatisme. Nous pourrions chercher à les définir plus positivement mais un tel exercice serait un paradoxe puisqu’il capturerait le mouvement de la pensée dans un cadre contraignant, enfermerait la liberté, limiterait ses possibilités et pourrait figer sous un précepte dogmatique le refus de tout dogme. Bruxelles Laïque Echos


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