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Les secrets du bouturage Avant de commencer à bouturer, faisons le point sur ce qui permet à un fragment de plante de s’enraciner et comment la nature se débrouille pour faire apparaître des racines. Et voyons quel matériel est nécessaire pour le jardinier amateur.
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Le principe pour rÊussir La reprise d’une bouture est un phÊnomène un peu moins simple qu’il n’y paraÎt, malgrÊ la plasticitÊ des vÊgÊtaux. Autant bien connaÎtre la chronologie d’une bouture pour agir au mieux.
Un film en trois ĂŠtapes í˘ą MISE EN DORMANCE
Lorsqu’un fragment vÊgÊtal est sÊparÊ d’un pied-mère, il subit une transformation. Ne possÊdant pas de racines, il ne peut plus pousser et risque très vite la dÊshydratation. S’il est placÊ en terre et qu’il ne comporte pas trop
de feuilles (et donc que la surface d’Êvaporation est limitĂŠe), il se trouve Ă l’abri de ce danger. Il se met alors en dormance pour quelques temps. í˘˛ FORMATION D’UN CAL
Ă€ la base, les tissus de la tige vont subir une transformation très particulière : ils ne se transforment pas en racines mais forment une petite masse prolifĂŠrante, un peu comme une tumeur. C’est le cal, constituĂŠ de cellules non spĂŠcialisĂŠes, et qui peuvent Ă leur tour donner naissance Ă des bourgeons racinaires. í˘ł FORMATION DES RACINES
Si la bouture possède assez de rÊserves nutritives et qu’elle ne se dÊshydrate pas, elle aura le temps de former des racines, à partir desquelles sa nutrition puis sa croissance reprendra. Les protubÊrances blanches à la base de cette bouture sont des cals, à partir desquels naÎtront les futures racines.
Les clÊs de la rÊussite Tout l’enjeu du bien bouturer se trouve là : choisir des boutures assez fortes pour avoir assez de rÊserves le temps qu’un cal se forme, et surtout leur garantir une bonne humiditÊ. Le reste est affaire de patience, et il faut bien l’admettre, de chance aussi. Car une bouture ne reprend pas à tous les coups. Parce que la saison est inadaptÊe, que la technique doit convenir au type de vÊgÊtal en question, parce que la tempÊrature est excessive ou insuffisante, etc. Plus les tissus d’un vÊgÊtal sont durs et denses, et moins le cal se formera facilement. Il faudra à ces plantes plus de temps, alors que pour celles à tissus tendres (les misères en sont de très bons exemples), l’apparition de racines est si rapide qu’on ne voit pas de formation de cal.
Pour bouturer, il faut un peu de matÊriel de coupe, des pots‌ et du savoir-faire.
LES AVANTAGES DU BOUTURAGE Par rapport à d’autres mÊthodes de multiplication des plantes, le bouturage a l’avantage de ne pas coÝter cher (les boutures ne se vendent pas). De plus, on sait lorsque la plante reprend (alors qu’un semis peut rester longtemps en dormance, sans qu’il soit ratÊ pour autant et on ne peut savoir si les graines sont mortes ou pas). Par contre, le bouturage demande des soins rÊguliers, surtout en ÊtÊ. C’est une technique un peu longue parfois, qui ne produit qu’un petit nombre de plants‌ Cette feuille de sansevière a formÊ des racines à partir de cals qui ne sont pas visibles, car les tissus de la plante sont tendres, comparÊs au bois.
RĂŠussir une bouture
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Le matériel nécessaire Pour bien réussir, il faut choisir un matériel adapté pour prélever les boutures, limiter l’évaporation des feuilles et favoriser une température chaude. Le matériel doit garantir la bonne santé des boutures et leur conservation jusqu’à leur enracinement.
Pour couper Choisissez des outils bien tranchants. De solides ciseaux, un petit cutter et un bon sécateur serviront à la quasi-totalité des types de boutures. Il existe des couteaux à boutures, maintenant difficiles à trouver, et qui ressemblent à des cutters, mais en plus
pratique. Côté sécateur, prenez un modèle au tranchant net, facile à manipuler. Il sera sage de désinfecter les lames (avec un coton imbibé d’alcool à brûler) lorsque vous prélèverez des boutures d’une plante à l’autre. Cette précaution évite que des maladies ne se transmettent par ce biais.
Les miniserres et les cloches Tout ce qui pourra maintenir l’humidité sur les boutures pourra servir. L’idéal est constitué par une miniserre pourvue d’un câble chauffant au fond. Dans une telle enceinte, bien rares seront les boutures qui ne voudront pas reprendre. À défaut, vous pouvez recycler un ancien aquarium (les petits modèles sont très utiles). Les cloches en verre ou en plastique sont un peu moins efficaces que les mini-serres. Elles serviront au jardin à éviter qu’un lot de bouture ou un pot ne se dessèche. À défaut, des bouteilles plastiques coupées et renversées sur les boutures ou des bocaux de verre offriront les mêmes services.
La cloche traditionnelle en verre.
À SAVO I R
➜ Optimal
Le must restera une vraie serre ou un châssis. L’humidité y est assez constante, les températures toujours plus chaudes qu’à l’extérieur ou sous une cloche. La miniserre, peu coûteuse et efficace.
LES ÉTIQUETTES Ce n’est pas un détail : on a bien vite oublié le nom des plantes dont on a reçu des boutures ! Les meilleures étiquettes sont en plastique, à condition d’y écrire avec une mine grasse de crayon à papier (mine type "2B"). Préférez les modèles à ficher en terre dans le pot des boutures ou celles que l’on accroche à la tige, à l’aide d’un petit fil de fer. Les professionnels ne font pas autrement.
Un assortiment d’outils de coupe est indispensable pour prélever des boutures dans de bonnes conditions.
Matériel
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Les techniques En théorie, tout organe végétal séparé peut donner une nouvelle plante, par bouturage. Mais les techniques à employer varient en fonction du type de plante. Faisons le tour des différentes techniques de bouturage possibles.
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te c h n i q u e s
Les boutures de tiges Grand classique du bouturage, la portion de tige a l’avantage de la simplicitÊ. Cette technique s’applique à un grand nombre de vÊgÊtaux, à condition qu’ils soient un peu ligneux, c’est-à -dire qu’ils forment du bois à l’âge adulte dans leurs tiges.
Ni trop dure ni trop tendre Le bouturage de tige s’adresse aux axes qui ne sont pas trop durs (pas de vieux bois) ni trop tendres (les jeunes pousses printanières ne conviennent pas). En pratique, on peut la mettre en œuvre toute l’annÊe. Mais c’est surtout en milieu d’ÊtÊ, lorsque les tiges s’aoÝtent, qu’elle sera le plus utile. Ce bouturage a l’avantage d’être rapide.
Sectionnez une tige saine.
de tiges sans ramification, aux tissus pas trop coriaces ni cassants. í˘˛ DĂŠbitez-les en tronçons de 10 Ă 20 cm, en ĂŠliminant la partie basse si elle est plus ĂŠpaisse qu’un crayon.
De mĂŞme, ĂŠliminez la partie terminale, Ă trois feuilles, sous le bourgeon terminal. Chaque bouture doit comporter au moins 3 feuilles ou deux paires de feuilles (si elles sont regroupĂŠes par paire sur la tige). IdĂŠalement, la base d’une bouture doit ĂŞtre coupĂŠe juste au-dessus d’un nĹ“ud, Ă moins de 1 cm de celui-ci. Elle doit se terminer de la mĂŞme façon. í˘ł Éliminez toutes les feuilles sauf les deux ou trois se
DÊbitez en petits tronçons.
Gardez en pot humide.
Toutefois le taux de reprise varie fortement selon les plantes, car cette mÊthode polyvalente n’est pas adaptÊe à tous les vÊgÊtaux.
Comment procĂŠder ? í˘ą SĂŠlectionnez des portions
situant le plus haut sur la tige, en coupant le pĂŠtiole (l’attache de la feuille). í˘´ Coupez aux ciseaux les feuilles restantes de moitiĂŠ. í˘ľ Trempez la base dans de la poudre d’hormones, comme indiquĂŠ page 11. í˘ś Placez les boutures dans un pot empli de substrat, en prenant garde de ne pas faire tomber la poudre d’hormone au passage. Enterrez jusqu’à 2 ou 3 cm sous la feuille la plus basse (celles qui ont ĂŠtĂŠ conservĂŠes et recoupĂŠes). Plusieurs boutures peuvent ĂŞtre groupĂŠes dans le mĂŞme pot. Tassez bien le mĂŠlange contre la tige. í˘ˇ Arrosez gĂŠnĂŠreusement. Gardez au chaud et Ă l’humiditĂŠ.
Bouture de tige de fusain, de rosier et de cornouiller. Pour les arbustes Ă feuilles caduques (comme le rosier et le cornouiller Ă droite), il est prĂŠfĂŠrable (mais pas obligatoire) de retirer toutes les feuilles.
VĂŠgĂŠtaux concernĂŠs - Tous les arbustes caducs - Tous les arbustes persistants, en automne - Tous les rosiers - Plantes succulentes, les arbustives
Ă€ SAVOIR
➜ Reproduction interdite
La multiplication des variÊtÊs protÊgÊes, en particulier des rosiers, est très rÊglementÊe. En effet, tout don ou vente d’une bouture d’une telle plante est considÊrÊe comme une contrefaçon en l’absence d’autorisation de l’ayant-droit. Ceci est valable pour les jardiniers amateurs ! Par contre, vous avez le droit d’en faire des boutures pour votre seul usage personnel. Mais pas de les donner et encore moins de les vendre ! Le fait qu’une variÊtÊ est protÊgÊe est clairement indiquÊ sur l’Êtiquette, lorsque vous l’achetez.
Une bouture de chrysanthème : il ne reste plus qu’à couper les trois feuilles de moitiÊ avant de la repiquer.
Boutures de tiges
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Le bouturage plante par plante À chaque type de plante (liane, vivace, arbuste, persistant ou caduc, etc.) correspond une ou plusieurs méthodes idéales pour la multiplier. Choisissez celle qui est le mieux adapté à votre cas.
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b o u t u ra ge p l a n te p a r p l a n te
Les plantes vivaces
Précautions particulières
Les variétés à tige un peu coriace peuvent se multiplier par bouture de plusieurs façons. On pense rarement à multiplier les vivaces par cette voie, mais il s’agit pourtant de la façon la plus rapide et la plus productive.
u Il est impératif de retirer tous les boutons à fleur car ils épuisent inutilement les réserves de la bouture. Recouper les feuilles limitera l’évaporation si elles sont larges. u Si les boutures se mettent à pousser, il sera utile de les pincer pour leur donner un coup d’arrêt. Si les boutures sont vouées à ne pas reprendre, vous observerez rapidement un flétrissement. Mais si les éclats gardent leur forme, c’est bon signe. u L’enracinement est en général assez rapide, entre deux semaines et un mois. Quelques-unes sont plus rapides et d’autres plus lentes. L’emploi d’hormones de bouturage est inutile, les tissus étant assez tendres pour s’en passer. De même, ces plantes n’apprécient pas trop la chaleur de fond, sauf lorsqu’il s’agit de vivaces d’origine exotique (celles qui proviennent des déserts américains tels les penstémons par exemple). u Veillez par contre à ce que les boutures n’aient pas soif car la dessiccation mettra fin
Les meilleures méthodes u Les plantes vivaces s’apparentant le plus à un arbuste, comme les perovskias, les sauges, les penstémons, les hélichrysums et les armoises se bouturent bien de tige (voir p. 18). Les grandes vivaces aux tiges épaisses, comme les delphiniums, les bistortes (renouées), les mimulus, etc. se satisfont aussi de cette
méthode, quoiqu’avec un moindre degré de réussite. u Les vivaces ayant une faculté à s’enraciner facilement se boutureront de tête (voir page 20), avec seulement 5 cm de tige conservée sous la rosette de feuilles terminales. Les euphorbes de jardin peuvent aussi se multiplier de cette façon mais le taux de réussite est très faible. u De nombreuses variétés aux racines charnues accep-
Un assortiment de boutures de plantes vivaces.
teront de se propager par boutures de racines (voir page 28). u Enfin, les vivaces les plus tendres (phlox, rose trémière, népéta, lupin en fin de saison…) ne s’enracinant pas de façon optimale avec les méthodes précédentes, vous aurez tout intérêt à essayer les boutures à talon (voir page 24). Dans ce cas, le talon sera constitué d’une partie de la souche de la plante vivace.
Un chrysanthème cascade. à tout début de formation de racine. Bassinez-les régulièrement. Vous pouvez emballer les pots dans un film plastique transparent pour leur garder la moiteur. Veillez alors à ce que l’ensemble ne reçoive pas les rayons du soleil.
La bonne époque Les vivaces ne s’enracinent bien qu’en dehors des périodes de floraison, c’est-àdire tôt au printemps ou en fin d’été.
RINCEZ LES PLANTES À LATEX Les vivaces, dans un certain nombre de cas, possèdent une sève laiteuse, appelée latex. C’est aussi le cas des figuiers et de quelques plantes succulentes. Pour tous ces végétaux, il faudra prendre soin de bien rincer la bouture sous l’eau afin d’éliminer l’excès de sève. Son accumulation sous forme de pâte collante à la base de la bouture l’empêche de s’enraciner. Attention : le latex est souvent toxique et cause des taches indélébiles sur les vêtements.
Vivaces
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QUESTIONS & RÉPONSES REPRISE/SOUCIS/MALADIES í˘ą Quand sait-on qu'une bouture est reprise? Lorsqu'elle se remet Ă pousser, la bouture est souvent en bonne voie. Mais seul l'examen direct, en dĂŠrangeant la bouture, permet de constater l'apparition de racines et donc la reprise. Certaines plantes peuvent vivre longtemps sur leurs rĂŠserves, fleurir et pousser un peu, sans former de racines !
í˘˛ Combien de temps faut-il attendre
avant la reprise ? Le dÊlai varie beaucoup selon les espèces et la technique employÊe. Peu s'enracinent avant deux semaines, sauf des plantes très prolifiques. La plupart demande entre deux et six semaines. Les plus rÊcalcitrantes demanderont jusqu'à un ou deux ans, mais il s'agit essentiellement des rhododendrons, camÊlias et conifères.
í˘ł Pourquoi certaines boutures dĂŠmarrent
mais ne font pas de racines ? Chez les arbustes surtout, l'apparition de racine succède à la repousse mais ne la prÊcède que rarement. En fait, les boutures d'arbustes peuvent se nourrir un peu via le cal, lorsqu'il est important. La plante bÊnÊficiant de ressources, elle peut à nouveau croÎtre. Mais c'est pour la bonne cause : reconstituer un stock de racines. Cette Êtape est cruciale : ne dÊrangez surtout pas les plantes à ce moment-là !
í˘ľ Mes boutures se dessèchent, que faire ? Elles ont subi de mauvaises conditions de conservation et lorsqu'on s'en rend compte, il est souvent trop tard. Les persistants et les conifères commençant Ă se dessĂŠcher indiquent que la reprise est compromise. Seule solution : se dĂŠbarrasser des plantes et refaire les boutures.
í˘ś Des champignons apparaissent
dans le substrat, est-ce normal ? Les champignons se nourrissent des matières du substrat et ne nuisent normalement pas aux boutures. Mais les filaments du champignon, opportunistes, peuvent pÊnÊtrer dans les tiges et Êtouffer les boutures d'arbustes. Dès que les premiers chapeaux apparaissent, ou si une odeur de champignon se dÊgage des pots, aÊrez la culture. Au besoin, pulvÊrisez de la bouillie bordelaise sur les boutures.
í˘¸ Des algues vertes se forment Ă la surface
de la terre, que faire ? Il s'agit non pas d'algues mais d'hÊpatiques, des plantes plutôt apparentÊes aux mousses. Elles ne font pas de mal aux boutures mais elles forment parfois un tel tapis qu'elles asphyxient la terre. Grattez la terre en surface dès qu'elles apparaissent. L'arrivÊe des hÊpatiques peut traduire une trop forte humiditÊ du milieu de culture, ce qui est dÊfavorable à certaines boutures !
í˘¸ Les boutures se ramollissent,
que faire ? í˘´ Peut-on donner de l'engrais aux boutures? Les boutures correspondent Ă des plantes qui ne peuvent se nourrir, puisque privĂŠes de racines. L'apport d'engrais avec l'eau d'arrosage ou l'incorporation de billes d'engrais au substrat est donc inutile.
Elles sont sÝrement la proie d'un champignon nommÊ  fonte des semis , s'attaquant aussi aux boutures. Éliminez les boutures atteintes et aÊrez la culture. Épandez de la poudre de charbon de bois frais sur le sol, ou bien pulvÊrisez du soufre en poudre.
Questions & rĂŠponses