T.F.E-ENSNP, Mémoire de l'invisible,

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Mémoire de l’Invisible Redécouverte de la Vallée de la Besbre

Camille BOUCHARD Directeur de mémoire: Grégory Tissot Mémoire de fin d’études 2013-2014

École Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage



Président de Jury Bruno RICARD, Ingénieur et responsable de l’agence SINBIO (22), professeur en sciences et technique de l’eau à l’ENSNP

Directeur de mémoire Grégory Tissot, Ingénieur Paysagiste et professeur en sciences et techniques végé­tales à l’ENSNP

Enseignant encadrant Christophe DEGRUELLE, Président d’Agglopolys et professeur en politique territoriale à l’ENSNP


PREMIER REGARD L’EXPRESSION D’UNE RÉFLEXION

DE LA DÉCOUVERTE À L’USAGE : LES DÉBUTS DE LA PUISSANCE NUCLÉAIRE

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• La Seconde Guerre mondiale, naissance d’une arme sans égale

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• La place de la France dans la course à l’uranium

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• La création d’une institution française

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• Un nouveau genre de déchet

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• La radioactivité, mémoire de la terre

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LE SOCLE D’UNE ÉNERGIE

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• Le Pays d’Urfé

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• Le granite source d’uranium

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• Le Massif des Bois Noirs, naissance de deux vallées

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• Les Monts de la Madeleine: le château d’eau du Roannais

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• La mosaïque d’un paysage rural d’altitude

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• Valorisation du patrimoine naturel comme dynamique économique

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• Les pressions, entre composantes naturelles et anthropiques

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• Saint-Priest-la-Prugne: un promontoire sur le grand paysage

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LE TEMPS D’UNE PARENTHÈSE

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• La vie rurale, une richesse minière encore dormante

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• Les empreintes toujours visibles dans le paysage

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• À la recherche d’indices

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• L’organisation de la mine

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• La fermeture laisse place à l’effacement

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• Le paysage socle d’une empreinte industrielle

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• Découverte des empreintes

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• L’eau porteuse de la pollution

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• Le don de stérile, étalement d’une pollution

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• 1979 : La campagne se réveille

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• Promenade au coeur du théatre invisible

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CONJONCTION DE L’INVISIBLE ET DE LA MÉMOIRE : UN PROJET DE PAYSAGE

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• Le réaménagement de la mine, un enjeu d’actualité

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• Le projet de paysage selon Areva

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• Scénarii et perspectives d’avenir

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• Délocalisation des déchets pour un confinement spécifique

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• Stratégie pour la mise en mémoire

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• Mise en tension du noyau minier avec le grand territoire

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OUVERTURE Bibliographie Remerciements

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PREMIERS REGARDS

ENTRE LIMITE, BEAUTÉ ET INVISIBLE, GENÈSE D’UNE RENCONTRE


Un après-midi d’Août, la beauté d’un paysage de montagne. Une clôture au milieu de nulle part, m’inspire un sentiment étrange, presque un malaise. J’imaginais quelque chose de perceptible, d’imposant, un monticule de déchets et puis rien si ce n’est cette curieuse clôture. La confusion m’envahit, ce fut ma toute première confrontation à l’invisible.


L’expression d’une réflexion A l’origine du choix du site, vint d’abord l’élaboration d’une réflexion. Une réflexion centrée sur un sujet qui m’était alors quasi inconnu mais qui nourrissait en moi questionnement et intrigue. La prise de conscience de la catastrophe que fut Tchernobyl a été à l’origine d’une ébauche de questionnement, celui de la place du paysagiste dans l’aspect le plus sombre de l’énergie nucléaire. La découverte de la radioactivité anthropique, ce danger non maîtrisé, m’a entraînée à pousser les portes du nucléaire en France. Où peut-on trouver de tels lieux sur notre territoire? Il y a encore quelque mois, cela me semblait une tâche très compliquée mais la candeur du néophyte a eu raison de mes craintes et m’a aidée à restreindre le nombre des lieux potentiels d’étude.


Prospection, recherche et accumulation d’informations m’ont permis de saisir et la gestion et la provenance des déchets issus du nucléaire. S’offrait à moi les sites de stockage tels que ceux de la Hague dans le Cotentin, de Soulaines-Dhuys dans l’Aube, les centrales nucléaires, les sites militaires, les dépôts non référencés et enfin les mines d’uranium. Le jeu d‘entonnoir m’a conduite à porter mon choix sur les mines d’uranium. Je fus d’entrée confrontée à une nouvelle contrainte, celle de choisir parmi les 210 sites miniers répertoriés en France. L’influence du contexte, l’histoire et la beauté d’un monde rural encore bien existant à ce jour, m’a amenée à jeter mon dévolu sur la division minière des Bois Noirs Limouzat.

La division minière des Bois Noirs Limouzat C’est l’histoire d’une rencontre, celle d’un paysage et d’une interrogation. Saint-Priest-la-Prugne est une des communes qui a accueillie durant trente ans l’industrie minière et qui aujourd’hui fait face à la problématique de l’avenir du site, des déchets et de leur gestion. Un paysage aux courbes et au relief délicats. Le soleil caresse ses prairies, offrant un contraste avec les massifs forestiers d’un vert sombre et profond. Le rêverie m’emporte le long des petites routes qui serpentent au fil des vallées et monts. Derrière moi, la vallée de Clermont-Ferrand, doucement je prends de l’altitude.

C’est arrivée au col Beau-Louis que je parviens au passage qui me conduira au site, d’un coup je bascule vers la vallée de la Besbre. Mon œil perçoit d’entre l’épais feuillage d’été, des boisements, une tache d’eau, qui se dissipe tout aussi rapidement qu’elle s’est révélée. Au détour d’un virage, le site s’offre à moi dans son ensemble. Mon imaginaire s’éveille, se confrontant a la brutalité d’un portail imposant surgit de nulle part à la douceur d’un été en montagne. Voilà devant l’ancienne division des Bois Noirs Limouzat.


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DE LA DÉCOUVERTE À L’USAGE : LES DÉBUTS DE LA PUISSANCE NUCLÉAIRE Inscrit dans un moment clé de l’histoire, les sites d’extraction d’uranium ont été la première avancée d’une énergie naissante. Aborder l’histoire du nucléaire permet de comprendre l’origine des problématiques de l’ancienne division minière des Bois Noirs Limouzat.

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La Seconde Guerre mondiale, naissance d’une armée sans égale Ce n’est qu’en faisant le lien entre de nombreux événements essentiels qui se sont succéder au cours de ces trois derniers siècles de l’Histoire qu’il devient possible de comprendre l’origine des mines d’uranium. L'uranium est un élément chimique qui se trouve partout à l'état de traces, y compris dans l'eau de mer. L'isotope U ou uranium est le seul isotope fissile naturel. C'est un métal lourd dont la radioactivité est la principale source de chaleur qui tend à maintenir les hautes températures du manteau terrestre, en ralentissant de beaucoup son refroidissement. Cette énergie est plus d'un million de fois supérieure à celle des combustibles fossiles pour une masse équivalente. L'uranium est une ressource non renouvelable, comme tous les métaux, non recyclable. L’uranium ou U 92 est découvert en 1789 par le chimiste prussien Klaproth. Les usages autour de l’uranium vont apparaître une centaine d’années plus tard. Le XIXe siècle sera marqué par les débuts de l’ère de l’énergie atomique. C’est l’époque de la découverte de la radioactivité du minerai. Cela provoquera les premières campagnes de prospections géologiques. Les premières tenta-

tives d’utilisation du radium (descendant de l’uranium) auront été à des fins thérapeutiques par Henri Becquerel et Pierre Curie. L’année 1934 a été marquée par la découverte de la radioactivité artificielle par Irène et Frédéric Joliot-Curie. C’est dans un contexte historique riche en découvertes scientifiques que la course à l’armement et à l’énergie nucléaire se déclenche. L’exploitation des premières mines d’uranium va faire son apparition sur le continent américain. Une démarche mondiale se met en place afin de comprendre le phénomène de la radioactivité et ses applications possibles. C’est durant la Seconde Guerre mondiale que le projet Manhattan voit le jour, mené par les Etats Unis, le Canada et le Royaume Uni. A la suite de recherches concluantes, le président Roosevelt ordonnera de larguer la première bombe atomique sur Hiroshima le 6 Août 1945 suivie par celle de Nagasaki le 9 Août, dans le but d’obtenir la capitulation du Japon. Cette attaque sans précédent marquera la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cet évènement historique d’une violence incomparable marquera aussi le début de l’obtention de

l’arme nucléaire par plusieurs gouvernements. Les États-Unis seront vite suivis par l’Union Soviétique en 1949, le Royaumes Uni en 1952, la France en 1960 et enfin la Chine en 1964. La fin de Seconde Guerre mondiale sera suivie par la Guerre Froide qui débute à la fin des années 40. La Guerre Froide sera caractérisée en premier lieu par la course aux armements nucléaires et l’équilibre de la terreur. Du fait de l’engouement pour la frappe nucléaire et de la peur de voir une prolifération incontrôlable de l’arme nucléaire, l’ONU prend la décision de créer l‘Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA) qui sera garante du traité de non-prolifération nucléaire (TNP) signé par de nombreux pays en 1968. L’exploitation des mines d’uranium s’inscrit en amont de l’histoire du nucléaire. Ce ‘simple’ minerai impactera à jamais l’histoire et l’avenir de la stratégie en matière de politique énergétique de notre planète. Cette puissance a aujourd’hui montré ses atouts mais aussi ses dangers, qu’ hélas encore aujourd’hui nous ne mesurons toujours pas pleinement les conséquences.

.Radium : Le radium est un élément chimique de symbole Ra et de numéro atomique 88. Il est d’un aspect parfaitement blanc mais il noircit lors de son exposition à l’air libre. Le radium est un métal alcalino-terreux que l’on peut trouver en très faible quantité dans les minerais d’uranium. Il est extrêmement radioactif, la demi-vie de son isotope le plus stable (226Ra) étant de 1602 ans. Il fournit du radon comme produit de désintégration. .Projet Manhattan : création de la bombe atomique par les États-Unis 12


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Essaie nuclĂŠaire en Micronesie


Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la course au nucléaire aura généré sans qu’il y en ait une sérieuse conscience, de nouveaux paysages. Cette énergie va engendrer des modifications d’usages et de perceptions du territoire. C’est la création de nouveaux repères visuels. Le nucléaire est une industrie imposante qui va petit à petit modifier les paysages de notre territoire. Établi par l’assistance d’une politique volontaire sur le développement du nucléaire en France et dans le reste du monde, le nucléaire s’impose comme la promesse d’un avenir meilleur. Cependant cette nouvelle industrie va générer des époques sombres dans l’histoire et impacter notre environnement à jamais. Le nucléaire va être la cause de nombreuses catastrophes graves, impactant de manière plus ou moins forte la vie de l’homme. Des zones d’ombre se dessinent au fil des décennies. L’homme a créé une énergie tel­lement puissante et potentiellement dévastatrice qu’il en devient extrêmement dif­ficile et périlleux d’ en reprendre le contrôle quand celui-ci nous échappe. A cet égard, les catastrophes telles que celles de Three Miles Highlands, Tchernobyl, ou en­ core plus récemment celle de Fukushima illustrent bien notre

impuissance à maîtriser complètement l’énergie atomique . Toutefois les grandes catastrophes nucléaires ne sont pas les seules zones d’ombres au tableau. L’époque de l’exploitation des mines d’uranium entre 1945 et 2002 en France aura laissé sur l’ensemble du territoire une quantité de déchets soit-disant «non dangereux». Le manque de considération d’un risque potentiel provenant de ces déchets, offre aujourd’hui un héritage spécifique aux mines d’uranium. Le débat sur la gestion des déchets issus de l’exploitation d’uranium commence seulement à émerger. Aujourd’hui se pose le problème de connaître leurs impacts sur l’homme et son environnement. C’est une prise de consciente lente, qui s’inscrit dans un contexte historique et politique opaques. La prohibition d’un débat public provoqué par l’effet des non-dits dû au manque de transparence de la part des acteurs du nucléaire a développé une forme d’alerte et de peurs civiles au sein de la société civile. Mais quel est l’impact de cet héritage sur notre territoire? Quelles sont les conséquences sur l’environnement et les pay-

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sages ? Quel avenir ? Il est important de garder une certaine forme d’impartialité entre les raisons qui ont conduit à la création de cette industrie et les conséquences qui ont découlées de son exploitation. Cette nouvelle énergie a permis l’indépendance énergétique du pays et a entre-autre profondément amélioré le niveau de vie des Français. Pourtant, une ombre perdure. L’ensemble de la filière nucléaire a produit et continue de produire des déchets dits «radioactifs». On constate que la gestion des déchets a été réalisée exclusivement in situ. En faisant la relation entre la le nombre d’anciennes exploita­ tions (210 sites répertoriés) et la gestion des déchets de l’époque,le constat est alarmant. Ces friches industrielles minières sont les témoins privilégiés d’une période de l’histoire de notre pays à la fois passionnante et effrayante. C’est donc naturellement que j’en suis venu à m’intéresser à la radioac­ tivité, son histoire, ses dangers, ses risques, son impact, ses paysages mais aussi à me sentir interpellée par la problématique soulevée par l’entreposage de ces déchets pas comme les autres.


Emprise du nucléaire sur le territoire français

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Source : «Réseau sortir du nucléaire»


La place de la France dans la course à l’uranium un enjeu géopolitique mondial L’histoire des mines d’uranium commence au moment de la création du Commissariat de l’Énergie Atomique (CEA) en 1945. Une grande campagne de prospection du territoire afin de trouver des gisements en uranium est lancée par André Savornin, ingénieur du Corps des Mines. La prospection du territoire se fait sur deux échelles, en France et en Outre-Mer (Côte d’Ivoire, Afrique Equatoriale Française, Madagascar). En Décembre de la même année est créée, au sein du Muséum d’Histoire Naturelle, l’Ecole de Prospection du CEA. Un premier filon de pechblende est trouvé à la Crouzille fin 1948, à l’origine de la création de la première division minière. S’ensuit la division de Grury et de Lachaux en 1949. En 1953 un tournant est pris pour l’avenir de la filière en France, celui du traitement chimique. En 1955 la première usine sera construite à Gueugnon pour traiter les minerais de la Division de Grury. Suivie par la création d’une nouvelle division en Vendée en Janvier 1954. Un mois plus tard le CEA découvre une grande quantité de pechblende dans les Bois Noirs à Saint-Priest-la-Prugne. Apparait alors la division des Bois

Les sites d’exploitation de l’uranium

Gisement Bois Noirs Limouzat

Noirs Limouzat. Les recherches en Outre-Mer se poursuivent au Sahara, au Cameroun, avec une découverte importante de 5000 tonnes d’uranium au Gabon fin 1956. Le CEA continue la prospection en Afrique, Guyane, Afghanistan, Turquie ainsi qu’ en Iran. Parallèlement en France en 1957/ 1958 les usines de traitement de 16

l’Escarpière et Bessines commencent à produire. Les prospecteurs continuent de balayer à tout va le territoire français. Le marché s’ouvre, c’est le début des prospecteurs et exploitants privés. En 1954 le CEA s’engage sous conditions, à racheter leurs éventuelles productions.


L’année suivante un décret modifie la loi minière mettant fin au monopole du CEA. Le CEA continue à investir au Canada, aux Etats-Unis et en Australie. Une grande découverte de 50 à 100 000 tonnes d’uranium au Niger va marquer une époque prospère à partir de 1958. En 1973 c’est le premier choc pétrolier, l’Egypte et la Syrie attaquent Israël. Les états pétroliers augmentent de 70% le prix du pétrole et du gaz. Le gouvernement français répondra à la problématique énergétique du pétrole par le lancement du grand programme électronucléaire de la nation. C’est l’ouverture de tout un marché. Le CEA se prépare à l’accroissement des demandes en uranium suite à la mise en place du programme de construction de centrales nucléaires sur le continent. En 1976, suite à une restructuration de la direction des productions (CEA DP), le CEA crée une filiale, la Compagnie Générale des Matières Nucléaires (Cogema). Elle sera dirigée par George Bresse qui prend en main 10 000 agents du CEA DP pour créer cette nouvelle filiale et aura pour mission la prospection et l’exploitation

minière dont le CEA est toujours 100% actionnaire. La Cogema contrôlera plus tard 15% des réserves d’uranium mondiales. Au début des années 80 la France atteint son pic de production. Cependant pour des raisons de coût d’exploitation devenu trop élevé, la totalité des divisions ferment entre 1980 et 2002. Entre les années 50 et 70, l’uranium connaitra ses heures de gloire dans de tout autres domaines que celui de l’énergie : la cosmétique, le médical et l’industrie. L’uranium sera mis en avant pour ses vertus médicales supposées ou avérées, ses effets bienfaisants dans certains cancers, on le retrouve dans de « miraculeuses » eaux de beauté, des crèmes antirides au radium, des poudres fond de teint, des rouges à lèvre, de la laine « saine et douce chaleur » pour bébé.

Prélèvement d’air dans un trou de sonde pour la mesure du radon. Source: CEA Publicité pour la recherche en uranium.

.Traitement chimique du mineraie: ‘Une fois extrait d’une mine souterraine ou à ciel ouvert, le minerai d’uranium est transporté vers une usine de traitement. Cette étape permet d’obtenir un concentré d’uranium, le «Yellow cake» ‘. Source Areva .Pechblande: Minerais d’uranium et de radium composés surtout d’uranite et d’autres oxydes, formés de veines ou de masses compactes imprégnant des roches sableuses, gréseuses ou des restes végétaux fossilisés (d’apr. De Mich. 1972 et Fouc.-Raoult Géol. 1980) Publicité pour les vertus du Radium. Source google image


La création d’une institution française La course au nucléaire en France se fait sous la direction du Commissariat de l’Énergie Atomique. Ce n’est que deux mois après l’explosion de la bombe atomique d’Hiroshima que le Général de Gaule demande au directeur du CRNS de concevoir un organisme consacré à l’énergie atomique, c’est ainsi que le CEA voit le jour. C’est l’époque de la création de nombreux organismes et institutions, qui seront sous la tutelle au début du CEA et ou de l’Etat. Plus tard des organismes privés et indépendants verront le jour. Le CEA est un organisme public qui a pour mission la recherche scientifique sur l’énergie nucléaire dans les domaines de la science médicale, de l’énergie et de la dé-

fense nationale. Un premier centre d’étude sera ouvert sur le plateau de Saclay en 1952. Au cœur du CEA plusieurs départements existent comme l’Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire (IPSN) qui a pour mission de faire de la recherche et de l’expertise dans le but de maîtriser les risques nucléaires sur l’homme et son environnent. En 1998 l’IPSN sort du CEA pour faire une fusion avec l’Office de Protection contre les Rayonnements Ionisants (en 2002). Renommé l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (IRNS), cet organisme devient un département du Ministère de l’environnement.

En 1976 est créé la Compagnie Générale des Matières Nucléaires (COGEMA), cet organisme a pour but de réaliser les activités de production du CEA qui lui est un organisme de recherche scientifique. Il y a un transfert de compétences du CEA à la Cogema. La Cogema a la charge de le production d’uranium, elle se situe en amont (extraction de l’uranium) et en aval (retraitement des déchets des centrales) de la filière nucléaire. En septembre 2001 la Cogema fusionne avec le CEA Industrie et Framatome pour devenir un groupe indépendant Areva. établissement public de l’état

EPIC : établissement public à caractère industriel et commercial depuis 2006 SCSIN Service Central de Sûreté des Installations Nucléaires autorité administrative indépendante au nom de l’état 1968: 1er bombe H explose dans le Pacifique

EPIC

.Ministère chargé de l’industrie

1969: 1er centre de stockage de la Manche (CSM)

Compagnie Générale des Matières

COGEMA Nucléaires

CEA Commissariat de l’Énergie Atomique organisme public

ANDRA Agence Nationale pour la gestion des Déchets Radioactifs

. IPSN Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire

.Ministrère des finances

1945

1955

1969 18

1973

1976

1979


En 1973 un nouvel organisme nommé Service Central de Sûreté des Installations Nucléaires (SCSIN) destiné au service de l’État a pour mission le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour protéger les travailleurs, les patients, le public et l’environnement des risques liés à l’utilisation de l’énergie nucléaire. En 1991 se service change de statut pour devenir la Direction de la Sûreté des Installations Nucléaires et enfin en 2002 la Direction Géné1991 : Loi relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs

1994 : OPRI Office de

rale de la Sûreté Nucléaire et de la Radioprotection. Suite à la loi de 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, la DGSNR se modifie pour devenir l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN). Ces changements multiples de statuts donneront à l’ASN des compétences élargies. Enfin en 1979 un nouveau département est créé au sein du CEA celui de l’Agence Nationale pour la Gestion des Déchets Radioactifs.

2005-2006 : débat public sur la gestion des déchets radioactifs 2006 : loi relative à la gestion durable des matières et des déchets radioactifs

Protection contre les Rayonnements Ionisants 1994

Cet organisme commence à reprendre la gestion du centre de stockage de la Hague. En 1991 une loi relative aux déchets radioactifs fait de l’ANDRA un organisme indépendant du CEA. La multitude d’organismes et de changements de statuts permettent de se rendre compte de la complexité de l’évolution des acteurs du nucléaire.

2011 : directive européenne établissant un cadre communautaire pour la gestion responsable et sûre du combustible usé et des déchets radioactifs

2001 : Groupement de l’OPRI et de l’IPSN rattaché au Ministrère de la Santé pour devenir l’IRSN (Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire ) AFSSE: Agence Française de Sécurité Sanitaire Environnementale.

.Ministère chargé de la Santé et du Travail et Ministère de l’Environnement ANDRA ( sort du CEA : organisme indépendant du CEA en 1991) .Placé sous tutelle des Ministères en charge de l’Énergie, de l’Environnement et de la Recherche DSIN Direction de la sûreté des Installations Nucléaires

.Ministère chargé de l’Industrie et de l’Environnement

DGSNR

Direction Générale de la Sûreté Nucléaire et de la Radioprotection

ASN Autorité de Surté Nucléaire

Constitution nationale par les DSIN Constitution régional des Divisions des Installations Nucléaires (DIN) placé au sein des Directions Régionales de l’Industrie, de la Recherche et de l’Environnement (DRIRE).

.Ministères de l’Industrie,de l’Environnement et de la Santé

AREVA nc IPSN (sort du

Création AFNI l’Agence France

CEA)

1991

1998

Nucléaire International

2002

2006 19

2008

2011


Areva leader mondial de l’énergie nucléaire

En 2002, suite à l’arrêt de l’exploitation minière d’uranium en France, le Groupe Cogema fusionne avec le CEA Industrie pour devenir Areva. Ce nouveau gestionnaire récupère la totalité des exploitations minières de la Cogema et devient ainsi le leader mondial de l’énergie nucléaire. Le CEA puis la Cogema ayant déployés un rayon d’action mondial depuis les années 45, l’exploitation en uranium continu mais hors du continent français. Aujourd’hui Areva est particulièrement engagé au Niger et a diversifié ses sources en Namibie et au Kazakhstan. Parallèlement Areva exporte à l’étranger ses techniques, son «savoir-faire» ainsi que tous les problèmes de gestion des mines et des déchets générés. Nous retrouvons donc les mêmes problématiques de gestion des mines partout où Areva s’est implanté. A l’heure actuelle, nos centrales nucléaires fonctionnent grâce aux mines d’uranium de nombreux pays.

Localisation Areva «BG Mine» dans le monde Enjeux et perspectives ( source areva.com ) •Figurer parmi les leaders dans le domaine de la sécurité, de l’environnement et de la responsabilité sociétale. •Maintenir 20 années de production en réserve et ressources pondérées. •Rester un producteur à faibles coûts. •Maintenir une rentabilité en ligne avec celle du secteur minier.

AREVA est structuré en cinq «Business Groups» (BG) Mines : exploration et exploitation des mines ; Amont : conversion et enrichissement de l’uranium, conception et fabrication du combustible nucléaire ; Réacteurs et Services : conception et construction de réacteurs nucléaires, activités de services aux bases installées ; Aval : recyclage des combustibles 20

usés, services de transport, d’assainissement et de démantèlement Energies Renouvelables : énergies éolienne, solaire, hydrogène et bioénergies. Ce qui nous intéresse particulièrement est le secteur « BG mines». Cette section s’occupe de la recherche de nouveaux gisements, de l’extraction et du traitement du minerai d’uranium ainsi que du réaménagement des sites après leur exploitation.


ACTEURS INSTITUTIONNELS FRANÇAIS DU NUCLÉAIRE Services ministériels • Le Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. • Le Ministre chargé de l’Industrie, de l’Énergie et de l’Économie numérique. La Direction Générale de l’Industrie et du Climat (DGEC), ainsi que la Mission Sûreté Nucléaire et Radioprotection (MSNR) au sein de la Direction Générale de la Prévention des Risques (DGPR) • Le Ministère des Affaires Etrangères et Européennes. • Le Secrétariat Général aux Affaires Européennes, ainsi que le Comité Technique Euratom. • Le Ministère en charge de la Recherche. • Le Ministère de la Défense. • Le Ministère de la Santé • Le Ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie

Autorité Administrative Indépendante • ASN: Autorité de Sureté Nucléaire

Organes Nationaux • OPECST: l’Office Parlementaire d’Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques. • HCTISN: le Haut Comité pour la Transparence et l’Information sur la Sécurité Nucléaire. • CNE: la Commission Nationale d’Évaluation. • ANCCLI: l’Association Nationale des Commissions Locales d’Information est un groupement de CLI (Commissions Locales d’Information)

Agences, établissements publics •CEA: Commissariat de l’Energie Atomique • IRSN: l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire • ANDRA: l’Agence Nationale pour la Gestion des Déchets Radioactifs • AFNI: L’Agence France Nucléaire Internationale

Areva est sous contrôle direct ou indirect de l’État qui possède 86.52% du capital total d’Areva. Le CEA est le premier actionnaire avec 61.52% des parts (établissement public). source Areva.com 21

Acteurs industriels français • EDF: premier producteur mondial d’électricité, présent sur tous les métiers de l’électricité. • AREVA : leader mondial de l’énergie nucléaire • GDF SUEZ : groupe énergétique Franco-Belge né en 2008 d’une fusion entre Gaz de France et SUEZ

Les groupements associatifs • GIIN : Groupement Intersyndical des Industries Nucléaires • FAF : Forum Atomique Français • SFEN: la Société Française d’Energie Nucléaire • SFRP: la Société Française de Radioprotection

Acteurs institutionnels internationaux • EURATOM: La Commission Européenne • FORATOM: Regroupement des FORA Atomiques Nationaux Européens • AIEA: L’Agence Internationale de l’Energie Atomique • AEN: L’Agence pour l’Energie Nucléaire


Un nouveau genre de déchet De l’extration du minerai jusqu’à la production d’énergie, le nucléaire génére des déchets qui n’existaient pas auparavant. Sont considérés comme déchets des substances radioactives pour les­quelles aucune utilisation n’est prévue ou envisagée. Le secteur principal qui produit des déchets est l’électronucléaire. Les déchets proviennent des centrales nucléaires, des usines dédiées à la fabrication et au traitement du combustible nucléaire (extraction et traitement du minerai d’uranium, conversion chimique des concentrés d’uranium, enrichissement et fabrication du combustible, traitement du combustible usé et recyclage). Le déchet est défini selon deux composantes: son niveau d’activité et sa période de radioactivité. Selon la définition de l’Andra, le niveau de radioactivité s’exprime en Becquerels (Bq) par gramme ou par kilogramme. Également appelé activité, le niveau de radioactivité correspond à la quantité de rayonnements émis par les éléments radioactifs (radionucléides) contenus dans les déchets. On distingue 4 niveaux d’activités différentes : Haute Activité (HA), Moyenne Activité (MA), Faible Activité (FA) et Très Faible Activité (TFA).

Origine des déchets produit en France

source: ANDRA

Quant à la période radioactive, elle s’exprime en années, jours, minutes ou secondes, elle est également appelée de­mi-vie, elle quantifie le temps au bout duquel l’activité initiale d’un radionucléide est divisée par deux. On distingue les déchets dont les principaux radionucléides ont une période courte (inférieure ou égale à 31 ans) et ceux de période longue (supérieure à 31 ans). On considère généralement pour les premiers que la radioactivité est très fortement atténuée au bout de 10 périodes, soit près de 300 ans. Le choix du lieu de stockage est défini par la période et l’activité. Si les déchets ont une période d’activité très courte (inférieur à

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100 jours) ils seront gérés sur le site de production puis après cette période évacués dans les filières conventionnelles de gestion des déchets. Les déchets dit de vie courte ou vie longue seront alors stockés dans des lieux appropriés. Plusieurs centres de stockage existent en France. L’orientation du déchet dans un des centres de stockage/retraitement est dicté par leur activité. Par exemple les déchets de faible activité seront stockés au centre de Soulaine dans l’Aube. Le centre de stockage de surface de l'Aube accueille depuis 1992 des déchets radioactifs de faible et moyenne activités à vie courte (FMA-VC) produits en France, essentiellement dans l'industrie nucléaire. Source: Andra/Pascal Bourguignon


Cadre législatif: En 1991 la Loi Bataille est la première loi à faire référence à la prise en charge et à la gestion des déchets radioactifs. La Loi «TSN» de 2006 faisant référence à la gestion des déchets est une loi complémentaire de la Loi Bataille. Au niveau européen, la directive du 19 juillet 2011 réaffirme la responsabilité de chaque état dans la gestion de ses déchets radioactifs. Cette directive demande en

particulier aux états membres, la mise en place d’un programme national pour la gestion du combustible usé et des déchets radioactifs. Le Plan National de Gestion des Matières et des Déchets Radioactifs (PNGMDR) issu de l’ASN et l’inventaire national de l’Andra, vont dans la démarche d’établir un programme de gestion des déchets en France.

1967

Campagne d’immersion des déchets radioactifs.

1969

1er centre de stockage des déchets à la Hague.

1979

ANDRA Agence Nationale

1991

Loi Bataille: Le 30 Décembre,

1992

Centre de stockage de l’Aube

Généralement éloignés des centres urbains, ces SITES font l’objet de nombreuses discussions car même si la gestion a court ou moyen terme semble sure, la du­ rée de vie des déchets qui y sont enfouis pouvant atteindre parfois plusieures dizaines de milliers d’années, excède de très loin nos

Les grandes dates de la gestion des déchets

capacités a nous projeter dans le temps. Se pose alors la question de la sécurisation de ces sites sur de très longues périodes ainsi que la transmission des données nécessaires a leur gestion aux générations qui peupleront la terre dans plusieurs millers d’années. 23

pour la Gestion des Déchets Radioactifs au sein du CEA.

la 1ère loi dédiée à la prise en charge et à la gestion des déchets radioactifs est votée. Ouverture du centre de stockage de l’Aube.

1993

Interdiction d’immersion des déchets radioactifs.

1999

Construction d’un laboratoire souterrain à Bure dans le but de créer un site de stockage définitif.

2003

Centre de stockage pour les déchets à faible teneur en radioactivité (Aube). IRSN: Programme MIMAUSA (Mémoire et Impact des Mines d’urAniUm).

2005

Transmission des résultats des études de l’ANDRA et du CEA aux pouvoirs publics. ASN: PNGMDR Le Plan National de Gestion des Matières et des Déchets Radioactifs.

2006

Vote d’une loi de programme dédié à la gestion des déchets radioactifs.

2011

Directive Européenne établissant un cadre communautaire pour la gestion responsable et sûre du combustible usé et des déchets radioactifs.


Centre de stockage de la Manche (CMS), situé sur la commune de Digulleville, juxtaposé au centre de l’usine de retraitement de la Hague. C’est l’un des centres les plus importants d’Europe. Ce centre est depuis 1994 totalement comblé. En bas a gauche : Militants de GreenPeace au CMS. En bas à droite: entreposage des «colis» avant d’être recouvers (CMS). Source Google image

Les déchets dits de «gestion historique» Dans son rapport officiel en 2005, l’Andra ne tient pas compte des déchets produits avant l’apparition du premier centre de stockage, c’est-à-dire générés durant la période allant de 1940 à 1969. Les premiers déchets produits par l’activité électronucléaire ont été entreposés dans les eaux peu profondes de la Manche mais aussi dans l’Atlantique. Ce mode d’entreposage était issu de la campagne d’immersion des déchets radioactifs entre 1967 et 1993. Cette pratique a été réalisée par de nombreux pays dont la France. Les déchets avaient plusieurs formes. Ils ont été versés sous forme liquide mais aussi conditionnés dans des fûts métalliques. Le deuxième lieu d’entreposage «libre» des déchets radioactifs est celui des anciennes mines d’uranium. Ces déchets sont issus du traitement du minerai d’uranium et des stériles mi-

niers. Leur entreposage s’est fait sur site. Le nombre officiel de mines d’uranium aujourd’hui s’élève à 210 sites. Le recensement de ces déchets est très récent, il a été lancé par l’IRSN en 2003 sous le nom du programme Mémoire et Impact des Mines d’Uranium (MIMAUSA). La majorité de ces sites sont sous la responsabilité d’Areva. Le groupe n’a pourtant pas exploité le minerai en France mais a récupéré la totalité des sites de l’ancien groupe COGEMA. Aujourd’hui la problématique des déchets issus des mines d’uranium est complexe car ils ne sont pas confinés dans des stockages appropriés. L’ANDRA estime la quantité de ces déchets à 50 millions de tonnes. 50 millions de tonnes supplémentaires provenant d’autres types de déchets ont été épar­ pillés sur le territoire, générale­ ment à proximité d’installations nucléaires.

24

Ces lieux de stockage participent à la création de nouveaux paysages. Entre visible et invisible, l’envers de ces nouveaux décors pose la question de la durée de vie de ces déchets camouflés sous une couche de terre. Malgré leurs confinement dans des containers et des socles bétons, le risque n’en reste pas moins élevé. Que transmettons-nous aux générations futures ? Le cycle de production d’énergie nucléaire jusqu’à la production de déchets pose de nombreuses questions. Pourquoi y a t-il une forme de crainte autour de la filière ? Nos déchets sont des éléments radioactifs sortis de leur environnement naturel pour être modifiés permettant d’obtenir de l’énergie. Cependant le mot radioactivité éveille un sentiment de peur. C’est un sujet complexe car il touche au domaine de la science et de l’invisible. Mais alors, qu’est-ce que la radioactivité ?


25


La radioactivité, mémoire de la terre La radioactivité naturelle provient des radionucléides présents sur la terre depuis son origine, c’est à dire 4,5 milliards d’années. Au début de la formation de la terre les éléments radioactifs étaient très nombreux. Cependant leur durée de vie n’étant pas la même pour tous, la majorité des éléments radioactifs se sont désintégrés pour devenir des éléments stables. Les éléments restants (l’uranium, le thorium et l’isotope 40 du potassium) émettent des rayonnements et de la chaleur, c’est l’énergie interne à la terre (le rayonnement tellurique). La radioactivité naturelle se trouve partout. Elle compose notre environnement sans pour autant être une source d’inquiétude pour l’homme. Elle est présente dans les sols, les eaux, l’air, le corps humain, les aliments. Il est estimé qu’il existe environ 340 nucléides dont 70 radioactifs dans la nature. Ces éléments radioactifs sont appelés des radionucléides primordiaux car présents au moment de la formation de la terre. Il reste aujourd’hui une vingtaine de radionucléides primordiaux. Cela introduit la notion de durée de vie de ces éléments et le rapport au temps.

Le simple fait que cette radioactivité soit présente depuis l’origine de la terre nous renvoie à une forme de mémoire bien spécifique. Une mémoire physique et chimique qui nous permet de comprendre la composition et la formation de notre univers. Comme l’ont dit Maurice Tubiana et Robert Dautray «la radioactivité a introduit une horloge dans l’histoire du monde et modifiée nos conception sur la matière, le temps et l’espace. La période radioactive fournit donc une échelle de temps absolu ». L’introduction d’un rapport au temps et à la période de vie d’un élément radioactif nous fait comprendre que cela dépasse amplement la conception que l’homme a du temps. L’homme pense à l’échelle de sa période de vie, alors qu’on sait qu’un élément radioactif peut vivre plus de 4,5 milliard d’années. Ce rapport au temps est essentiel pour comprendre le devenir du site et la démarche de projet à adopter. Comment faire perdurer une mémoire sur du très long terme?

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Le rayonnement tellurique (la radioactivité du sol) provient des éléments radioactifs présents dans l’écorce terrestre (l’uranium et le thorium). La concentration et la présence des radionucléides primordiaux varient en fonction du sous-sol. Rien qu’en France, les massifs granitiques du Massif Central, de Bretagne et de Corse en renferment 5 à 20 fois plus que sur les terrains sédimentaires du Bassin Parisien. Certains massifs granitiques «uranifères» peuvent avoir une concentration 100 à 1000 fois plus élevée. Ces lieux ont été exploités bien plus tard par l’homme à partir de la deuxième moitié du XXe siècle. Le gise­ment de Saint-Priest-laPrugne est l’un d’entre eux et mon attention s’est portée sur ce territoire. Mais alors pourquoi la radioactivité éveille t’elle la crainte et la peur?


Dans la nature la plupart des noyaux atomiques sont stables. Mais il y a des noyaux instables qui présentent un excès de particules (protons, neutrons ou les deux). Ces noyaux instables se dégradent dans le but de devenir des noyaux stables (ou non). Ce phénomène de désintégration génère des rayonnements ionisants, on parle donc d’un phénomène naturel. L’énergie dégagée par les rayonnements émis lors de la dégradation se présente sous trois formes et donc se mesure de trois manières différentes : Les unités de meusures

Le Sievert Les effets biologiques des rayonnements sur un organisme exposé (selon sa nature et les organes exposés) se mesurent en Sievert et s’expriment également en “équivalent de dose”. L’unité la plus courante est le MilliSievert. Chez l’homme 1 Gray correspond à 1 Sievert

LeGray Cette unité permet de mesurer la quantité de rayonnements absorbés – ou dose absorbée – par un organisme ou un objet exposé aux rayonnements.

Le Becquerel Permet de mesurer l’intensité de la radioactivité et donne une idée de la dangerosité du produit. 1 Bq = 1 désintégration par seconde.

Les rayonnements ionisants

α Rayonnements alpha : pénétration faible, stoppés par une feuille de papier.

β

γ

Rayonnements bêta : pénétration moyenne.

Rayonnements gamma : c’est la pénétration la plus importante. Une forte épaisseur de béton ou de plomb permet de s’en protéger mais laisse quand même passer quelques rayons

Ces unités de mesure permettent de quantifier la radioactivité qui par nature est imperceptible et ainsi d’évaluer le risque sanitaire pour l’être humain. On appel le débit de dose, la dose absorbée par unité de temps (LeGray). Cela permet de définir le niveau de radioactivité d’un lieu et d’en définir l’impact sur l’homme en fonction de son temps de séjour. La norme en France est de 1 MlSievert/ An. Cette norme englobe la radioactivité naturelle et anthropique tolérées pour un civil. Cependant chaque être humain développe des résistances ou des faiblesses face à la radioactivité. Il est donc très compliqué d’établir des normes. 27


«Radioactive Control» par le collectif Luz Interruptus, image de Gustavo Sanabria

Travail artistique et prise de conscience de la radioactivité Depuis la découverte de la radioactivité, ce phénomène a développé dans la conscience humaine plusieurs phases d’expressions liées à notre histoire et à ses usages. Dans les années 1930 la radioactivité était connotée «positivement »: on faisait de la publicité pour le radium. On l’utilisait dans l’industrie cosmétique, l’alimentaire et dans la pratique médicale. A l’époque de la Seconde Guerre mondiale, la puissance de l’atome et de la radioactivité ont été utilisées à des fins meurtrières avec les bombes d’Hiroshima et de Nagasaki.

Cela a engendré un changement de perception sur la conscience humaine. Les notions de risque et de peur se sont développées. Quarante ans plus tard, le phénomène se verra amplifié avec la catastrophe de Tchernobyl en Ukraine (1986) et plus récemment Fukushima au Japon (2011). La peur engendrée par la menace d’une catas­ trophe nucléaire est devenu un des éléments objectifs dans nos sociétés par le risque que celle-ci fait peser non seulement sur l’hu­manité mais plus largement sur le « vivant » dans sa globalité. L’impact sur les êtres vivants et les écosystèmes est quasi incontrôlable. 28

Nous entrons maintenant dans l’ère de la prévention et la prise de conscience du risque nucléaire. L’art reste encore le meilleur moyen d’expression et de revendication questionnant le système nucléaire. En 1951 Enrico Baj fonde le mouvement nucléaire. Il explore les « infra-mondes» et les «épaves des radiations atomiques». La publicité, la photo, les slogans moyens de communication ont traversé les époques ( Andy Warhol, Clay Lipsky..).


Campagne publicitaire de l’association Agir pour l’Environnement

Clay Lipsky, série photographique «Atomic Overlook»

Andy Warhol, expression d’un champignon atomique

Enrico Baj fonde le mouvement Manifeste Nucléaire en 1951

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Publicité pour les valeurs «énergitiques» d’une boisson


Essai de la bombe atomique française, sur l’atoll Mururoa en 1970

Paysage de la centrale nucléaire de Pierrelatte ( Drôme )


Paysage de la catastrophe nuclĂŠaire de Tchernobyl, Pripyat Ukraine

Vue aĂŠrienne du site minier de Saint-Pierre (Cantal) en 1980


32


LE SOCLE D’UNE ÉNERGIE

Figure emblématique du XXe siècle, le nucléaire a fait naitre de nouveaux paysages provoquant de nombreux sentiments. Entre crainte et super puissance, il éveille et interroge les consciences. De la mine à la centrale nucléaire, l’imaginaire autour de ces lieux habite l’homme. C’est au cœur des entrailles de la terre que se trouve l’origine de cette énergie. Cet invisible dont est riche Saint-Priest-la-Prugne a été mis à jour au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

33


Le Pays d’Urfé

1

Saint-Priest-la-Prugne se situe dans le département de la Loire qui lui-même est en Région Rhône-Alpes. Cette commune appartient à l’arrondissement de Roanne dans la communauté de communes du pays d’Urfé (Carte 2), SaintPriest-la-Prugne se situe à la frontière administrative de l’Allier et du Puy-de-Dôme. L’arrondissement Roannais est divisé en plusieurs entités paysagères. Saint-Priest-la-Prugne fait partie de l’entité des Monts de la Madeleine située dans le Pays d’Urfé.

2

Saint-Priest-la-Prugne est encadré à l’Ouest par le Massif des Bois Noirs et à l’Est des Monts de la Madeleine. Ces deux chaînes de montagnes créent des barrières visuelles et physiques entre la plaine de Clermont-Ferrand et la vallée Roannaise. Trois grandes agglomérations encadrent le territoire du Pays d’Urfé, Vichy (25000 hab.), ClermontFerrand (140000h bab.) et Roanne (36000 hab.). Elles réprésentent les principaux centres urbains qui alimentent la région.

3 34

N


Le Pays d’Urfé est desservi par l’autoroute A71 à l’Est reliant Clermont-Ferrand à Paris. L’A89 traverse d’Ouest en Est le Sud des Monts de la Madeleine pour relier Clermont-Ferrand à Saint-Etienne et Lyon. Quelques axes principaux relient le centre des Monts de la Madeleine aux pôles urbains. Le réseau routier est majoritairement de petites tailles et très sinueux, cela dû au relief. L’important couvert forestier et les hauts reliefs réduisent les points de vue sur le grand paysage.

Saint-Priest-la-Prugne est relié à Vichy par la départementale 995. Saint-Just-en-Chevalet est le petit centre urbain le plus proche de la commune. L’axe principal en est la D53 qui relie Saint-Just-en-Chevalet à la côte Roannaise. Les paysages des Monts de la Madeleines sont caractérisés par le relief et l’altitude, dominés par de grands massifs forestiers créant la spécificité du territoire. Le Pays d’Urfé est un territoire rural montagnard, cerné de part et d’autre par les massifs forestiers

des Bois Noirs et les Monts de la Madeleine. Le pays d’Urfé fait partie du schéma de cohérence territoriale de Roanne (SCOT). Ce secteur est un atout de par ses espaces naturels où de nombreuses espèces présentent un fort intérêt écologique. C’est aussi «le château d’eau du Roannais» c’est à dire que de nombreuses sources sont issues de ces massifs. La dynamique touristique présente un enjeu primordial sur le territoire, elle est l’une des ressources économiques importantes de la région.

Situation géographique de Saint-Priest la-Prugne Vichy

Arronnes

Le Mayet-deMontagne Ferrièresur-Sichon

Roanne

Alli e

r

Monts de la Madeleine Massif des Bois Noirs

ClermontFérrand

Saint-Priest la-Prugne

Saint-Just-en Chevalet

Lo

i re

Thiers

Lyon

Lezoux

PNR Livradois Forez

35 0 Km

5

10

N


La montagne Bourbonnaise Situé au coeur de plusieurs entités patrimoniales et géographiques, Saint-Priest-la-Prugne se trouve au croisement des Monts de la Madeleine et de la Montagne Bourbonnaise; les entités se confondent et ne forment qu’un seul et grand territoire. Le travail d’analyse ne se limite pas aux frontières administratives, le paysage continu bien au-delà, il est donc important d’élargir le regard. La Montagne Bourbonnaise occupe la partie Sud-Est de l’arrondissement de Vichy. Cette région a essentiellement une appellation locale désignant les Monts de la Madeleine et le Massif des Bois Noirs. C’est ainsi aussi que les entités géographiques s’entrecroisent. L’ensemble de ces entités sont localisées sur trois départements, ceux de l’Allier, du Puyde- Dôme et de la Loire. A l’intérieur s’élève un relief complexe de vallées et grands massifs forestiers. Ce sont des paysages ruraux, composés de landes et de montagnes boisées. Ce territoire est depuis longtemps habité. Au cœur de paysages de plateaux, de vallées et de coteaux, les villages, hameaux et fermes isolées viennent habiter ces grands espaces et les font vivre.

Limite administative du syndicat mixte des Monts de la Madeleine Saone et Loire Allier

La Montagne Bourbonnaise

Loire 3

Laprugne Lavoine

1

2

Le Pays D’Urfé

Saint-Priest-la-Prugne

Puy-de-Dôme N

C’est à l’intérieur de ce grand territoire majestueux et imposant que la commune de SaintPriest-la-Prugne s’est implantée.

Il représente 4 communautés de communes, 2 communes indépendantes, pour un total de 47 communes pour 120 000 hectares et 30 000 habitants.. Limite départementale Limite communale Communauté de communes

36


1 Vue depuis les Monts de la Madeleine, sur le Mont de la Ligue. Au pied coule la Besbre.

2 Vue depuis le col Beau Louis sur la plaine de Vichy.

3 Direction la Loge des Gardes, vue sur la vallĂŠe de la Besbre ( au niveau de Laprugne).

37


Bois Noirs Limouzat

Le granite source de l’uranium

Schéma strucutal de la région du Forez, soucre M. Cuney

L’essentiel des ressources françaises en uranium se trouve dans les massifs granitiques. Le pays d’Urfé est situé dans le socle granitique au Nord Est du Massif-Central. Ce massif nommé aussi la Montagne Bourbonnaise forme un Horst consitué de trois panneaux. Un Horst est un massif surélevé par des failles. Le Horst est bordé par deux fossés d’éffondrements, à l’Ouest la Limagne de Clermont-Ferrand et à l’Est la Limagne de Roanne composé par des roches sédimentaires. La morphologie du territoire est organisée autour de failles.

Comme on peut le voir sur l’évolution morphologique du territoire représenté par les blocs diagrammes, les trois panneaux sont aujourd’hui représentés par : - A l’Ouest, le panneau des Monts du Forez, une faille le separe du Massif des Bois Noirs de la Limagne de Clermont-Férrand. Cette faille crée une dépression empruntée par la vallée du Sichon. - Au centre, le panneau est formé en grande partie par les granites des Bois Noirs. Ce panneau est le plus élevé de l’ensemble. Les principales rivières de la région y prennent leurs sources.

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- A l’Est, le panneau des granites des Monts de la Madeleine. Celui-ci est séparé du Massif des Bois Noirs par une grande faille qui crée une dépression empruntée par la Besbre. Le gisement des Bois Noirs Limouzat est de type filonien. Il est localisé dans la zone du granite à biotite des Bois-Noirs ce type de granite est particulier pour ses filons de quartz-pechblende, source de l’uranium. Une autre exploitation minière a existé au niveau de Lachaux. Mais celle-ci fermera à la suite de la découverte du gisement des Bois Noirs. Les paysages résultent de ce sous-sol granitique, typique du Massif-Central.


Limagne de Roanne

Monts de la Madeleine

Saint-Priest-la-Prugne

Massif des Bois Noirs

Limagne de Clermont-Ferrand

N

39


Le Massif des Bois Noirs, naissance de deux vallées Comment prend-elle forme dans le paysage? La mine des Bois Noirs Limouzat s’est installée en amont de la vallée de la Besbre au pied des Bois Noirs. Le périmètre de la mine est représenté en rouge sur la carte. On remarque que la mine est cernée de part et d’autre par des massifs montagneux. Une tache d’eau plus importante se démarque. Que représente-elle ? En bleu plus prononcé, la vallée de la Besbre qui prend sa source au pied du Massif des Bois Noirs. Les failles déjà existantes ont permis aux différents cours d’eaux de pouvoir les emprunter. Les vallées de la Besbre et du Sichon sont des vallées très ancrées dans leur socle géologique. Ce qui offre à l’œil d’agréables panoramas où les différents massifs s’entremêlent, dissimulant les cours d’eaux en fond de vallées.

Clermont-Ferrand

Vall ée

du Sic h

on

Les paysages du pays d’Urfé sont marqués par un jeu de reliefs importants qui impactent l’organisation du territoire. On peut voir que trois grands massifs encadrent le petit village de Saint-Priest-la-Prugne. Il en résulte les trois panneaux géologiques vu précédemment. A l’Ouest le Massif des Bois Noirs sépare le plateau de la vallée de Clermont-Ferrand. Au Centre les Monts de la Ligue, créant à l’Ouest la vallée du Sichon et à l’Est la vallée de la Besbre. Enfin le troisième massif, les Monts de la Madeleine, séparent le pays d’Urfé de la vallée de Roanne. Le réseau hydrographique est conséquent, de nombreuses rivières y prennent leurs sources. La nature granitique des sols favorise le ruissellement des précipitations. La circulation des eaux souterraines est donc limitée. Entre paysages de vallées et paysages de plateaux, cette région présente des atouts environnementaux forts, une économie rurale encore bien présente, maintenue par l’agriculture et la sylviculture. Mais alors où est l’ancienne mine d’uranium ? Quel impact peut-elle bien avoir ?

Périmètre d’étude


Plaine de Roanne

Monts de la Madeleine

V a ll

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de

x l’Ai

Massif des Bois Noirs 41


Les Monts de la Madeleine : le château d’eau du Roannais C’est à travers un regard général sur la géomorphologie et le contexte géologique des Monts de la Madeleine que nous allons regarder plus précisément la vallée de la Besbre. La Besbre prend sa source au pied du Puy du Montoncel à 1287 m d’altitude et coule du Sud vers le Nord pour finir sa trajectoire dans la Loire. La Besbre traverse deux départements, celui de la Loire puis celui de l’Allier. Son bassin versant englobe 17 communes avec un cours d’eau linéaire de 106 Km. La Besbre a 48 affluents créant ainsi un bassin versant de 762 km2. Elle est constituée d’un chevelu bien développé, présentant un fort intérêt écologique pour ses tourbières et ses 1300 ha de zones humides inventoriées. Caractérisé par un relief marqué, la Besbre présente une grande variation d’altitudes, allant de 1287 m à 300 m. La vallée de la Besbre empreinte la dépression créée entre le Massif des Bois Noirs et les Monts de la Madeleine. La vallée est évasée dans sa partie amont pour s’encaisser progressivement entre des massifs pentus pour finir par s’ouvrir dans sa partie aval. La ressource importante en eaux s’explique par le climat montagnard et très humide ainsi

Le barrage hydroélectrique de St Clément avec en arrière plan, le montagne bourbonnaise, composé des Monts de la Madeleine et des Bois Noirs.

que par l’enneigement persistant des sommets du massif. Comme vu précédemment, les cours d’eau de la région sont la source d’eau potable de nombreuses communes. Cependant la Besbre n’est pas un cours d’eau comme les autres. Tout en amont du bassin versant s’est inscrit dans les années 50 une mine d’uranium qui est venue fermer la vallée et canaliser la Besbre. 42

Au niveau de Saint-Clément un barrage hydroélectrique a été construit dans les années 1930 créant une grande retenue d’eau de 26 ha classée grand lac d’intérieur de montagne. Ce lac fait office de base de loisirs et de lieu de pêche.


Localisation de la Besbre par rapport à la Loire

Barrage hydroélectrique St-Clément

Un contrat territorial du bassin versant de la Besbre amont a été réalisé entre 2011 et 2013.

Division minière Bois Noirs Limouzat

Répartition administrative de la vallée de la Besbre amont

N

43

Ce document a pour opération de reconquérir la qualité de l’eau et des milieux aquatiques. La création de ce contrat a pour ambition d’établir une politique adaptée aux spécificités des «têtes de bassins» et de réaliser des actions programmées et concertées. Ce projet est réalisé par la Communauté de Commune de la Montagne Bourbonnaise (CCMB), le bureau d’étude Césame. Ce contrat s’inscrit dans le cadre du Contrat de Projet Etat-Région (CPER) Auvergne. Il vient compléter l’ensemble des actions réalisées par l’Agence de l’Eau.


La mosaïque d’un paysage rural 1 Les couloires bocagers sont organisés par

le relief, la formation des vallées et des plateaux. Le parcellaire agricole est surtout utilisé pour la pâture des troupeaux. La production bovine et production laitière sont les usages usuels des parcelles agricoles.

2 Les hameaux sont nombreux sur l’ensemble du paysage. Ils

sont répartis de manière homogène sur le territoire et sont généralement d’anciens corps de fermes. Leurs présences permettent d’établir des repères architecturaux dans le paysage.

3 L’ancienne mine d’uranium se symbo-

lise dans le paysage par une grande masse d’eau qui vient fermer la vallée. On tourne constamment autour d’elle sans vraiment l’apercevoir, créant un sentiment d’amphithéâtre autour du bassin..

4 Les grands massifs forestiers

dominent les hauteurs du relief, créant de grandes masses noires profondes. Leurs présences sont dues à l’altitude et au climat océanique. Le jeu entre relief et boisement donne des paysages de grandes profondeurs.

5 Les villages

sont de petites tailles, organisés autour de la route. On y trouve quelques commerces, écoles, les services nécessaires qu’y vivent les populations qui peuplent le territoire.

Carte de la répartition des éléments qui composent le territoire 44

0m

200

500

N


Laprugne

Le Vernois

Saint-Priest-la-Prugne Calinon

45


Foyer de ski de fond du Puy du Montoncel, départ de nombreuses randonnées et parcours VTT.

Valorisation du patrimoine naturel comme dynamique économique Le pays d’Urfé est composé de 11 communes et regroupe un peu plus de 5000 habitants. Le tissu économique y est toujours bien vivant; dominé par l’agriculture, l’artisanat, les petites entreprises et les activités touristiques. Cette région rurale a su garder un dynamisme économique malgré l’exode rural du début du siècle dernier. Certaines activités économiques comme l’agriculture ou la sylviculture ont su persister. Les locaux ont su tirer profit de leur territoire et paysages avec entre autre les activités liées au tourisme et découverte du patrimoine naturel. • Activités de pleine nature Le Massif des Bois Noirs crée la limite Ouest du site d’étude. Ce massif doit son nom à l’importante quantité de résineux qui souligne l’horizon par des masses sombres. Le massif propose de nombreuses activités touristiques,

on y retrouve plus de 800km entretenus de pistes VTT et sentiers forestiers. Le foyer de ski de fond du Puy du Montoncel propose aussi des activités été comme hiver au coeur de la forêt des Bois Noirs. L’Arboretum des Grand Murcins à Renaison a été racheté par la communauté de communes de la côte Roannaise et de l’Ouest Roannais pour en faire un site naturel d’exception. La limite Est du pays d’Urfé est créée par les Monts de la Madeleine qui font face au Massif des Bois Noirs. La forêt domaniale de l’Assise recouvre les Monts de la Madeleine avec comme point haut la Pierre du Jour à 1165m d’altitude. On trouve en son sein la station de ski et de loisirs de pleine nature nommée la Loge des Gardes, (50000 visiteurs par an) située à 30km de Roanne. C’est au début des années 50 que la station voit le jour. La station connait ses heures de gloire entre 1960 et 1970. A partir de 46

1980 les activités se diversifient. Ces activités de nature sont largement soutenues par le syndicat mixte des Monts de la Madeleine. • Industrie du velours A Saint-Just-en-Chevalet, se trouve la manufacture de Velours et Peluche. Construite à la fin du XIXème siècle, il s’agit aujourd’hui de la dernière usine française entièrement consacrée à la fabrication du tissu velours pour l’habillement haut de gamme et les grands créateurs. Cette entreprise continue de vivre avec 17 salariés. Depuis peu a été lancé le projet d’excellence rurale « Velours d’Urfé» soutenu par les collectivités et la population rurale dans le but de rendre accessible la production de velours à un large public. Ce projet a été créé en 2005 dans le but de faire valoir les savoir-faire traditionnels et le patrimoine associé d’une zone rurale.


47


Les réglementations, preuve d’une richesse naturelle Le territoire de Saint-Priest-laPrugne est circonscrit par de nombreuses réglementations du patrimoine naturel. Situé au pied du PNR LivradoisForez, le site présente de nombreux attraits écologiques. La majorité du territoire est couvert par la Zone d’Intérêt Floristique et Faunistique de Type 1. Ce découpage laisse apparaitre plusieurs « poches» en négatif de la classification. La présence de la mine a ainsi de sensibles répercutions sur l’inventaire des espaces naturels. Pourtant en amont de celle-ci, la Besbre est classée en zone Natura-2000 pour sa présence d’écrevisses d’eau douce. Les zones Natura-2000 sur le territoire sont majoritairement dédiés aux zones humides et les tourbières. La présence de 19 tourbières sur le site comprend 5 tourbières actives, 7 sont des tourbières bombées et 7 sont en régression, ceci témoigne de l’importance du réseau hydrographique du massif. D’autres espèces complémentaires de ces milieux présentent un fort intérêt écologique, tel que la Drosera, plante carnivore qui est typique des milieux tourbeux. On retrouve 7 habitats d’intérêts européens, avec les tourbières (hautes activités, boisées, de transition), des eaux oligotrophes, des landes sèches européennes et des prairies humides.

Parc Naturel Régional Livradois Forez

Saint-Priest-la-Prugne

Drosera sp.

• Les zones humides La Loi sur l’Eau et les Milieux Aquatiques (LEMA) régit et répertorie plus de 5000 ha de zones humides dans les Monts de la Madeleine. Cet inventaire a été réalisé en 2008 par le Syndicat Mixte des Monts de la Madeleine. La majorité des zones répertoriées, est située en tête des bassins versants des rivières Aix, Sichon, Besbre et Barbenan. Se sont essentiellement des prairies humides et des zones inondables. La spécificité de ce territoire est aussi la présence de tourbières. Ces zones humides jouent un rôle important en tant qu’espace de stockage, de régulation des écoulements d’eaux de surface et souterraines. Elles assurent la filtration des cours d’eau et réalimentent les nappes phréatiques. Ces zones humides présentent 48

aussi un intérêt économique : alimentation en eau potable, usages agricoles (pâturages et cultures fourragères). Elles présentent un intérêt paysager autant que social et culturel. Les zones Natura- 2000 viennent affirmer la qualité du patrimoine naturel présent sur les Monts de la Madeleine. La communauté de communes du pays d’Urfé s’est engagée dans la préservation de la tourbière de la haute vallée de l’Etui. Les tourbières sont classées intérêt prioritaire par la directive habitat, elles représentent un patrimoine remarquable et fragile. Toutes ces réglementations témoignent de l’importance du patrimoine naturel et de la valeur écologique que reflètent ces grands espaces ruraux.


La Prugne

Saint-Priest-la-Prugne

Le Parc Naturel Régional du Livradois-Forez La création du parc en 1986 s’incrit dans une démarche de valorisation du territoire et réagit au déclin démographique et economique du territoire.

0 km

Zone d’intérêt floristique et faunistique de type 2 Zone-Natura 2000

Zone-Natura 2000: Dans la vallée de l’Etui, se trouve une tourbière bombée, elle a une physionomie en dôme qui vient encombrer le vallon, l’épaisseur de la tourbe monte jusqu’a 6 mètres. C’est une des tourbière les plus épaisses du Massif-Central. 49

500

1

N

Zone d’intérêt floristique et faunistique de type 1

Chiffres clés des zones-Natura 2000 •6 entités couvrant 232 ha de milieux à préserver. •5 communes concernées •7 habitats d’intérêt européen •12 espèces végétales et 10 espèces animales protégées au niveau national, régional ou départemental • Une dizaine d’actions élaborées pour la gestion des habitats et des espèces.


Le paysage, témoin des pratiques agricoles Sur le territoire du pays d’Urfé, traditionnellement on y pratiquait la polyculture. Aujourd’hui l’activité agricole se tourne vers l’élevage dénommé « montagnes à vaches » typique du Massif Central. On y trouve aussi quelques élevages de moutons et de chèvres. Autour des lieux habités subsiste une petite agriculture vivrière témoignant d’un rapport intime de la population locale au territoire. Dans ce paysage rural, se dégage une structure paysagère agricole dominée par les prairies et les prés de fauchés. Cela façonne une structure tournée vers l’élevage et des clairières habitées, offrant de réelles continuités agricoles. Cette composante paysagère

s’associe à un maillage bocager qui a tendance à se restaurer depuis peu de temps, permettant ainsi de restaurer les continuités écologiques depuis longtemps présentes. Cette organisation spatiale offre un patchwork de prairies, de boisements, de feuillus, de quelques champs et de petits étangs. C’est encore une campagne jardinée. Le parcellaire du maillage agricole reste majoritairement de petite taille. Sur le territoire de la communauté de communes du pays d’Urfé, s’y trouve encore 284 agriculteurs. Cela témoigne d’une activité encore bien florissante. D’autres activités locales agricoles existent telles que la production locale de chanvre. Cette

50

production s’adresse principalement aux artisans du bâtiment. Cette activité existait déjà au début du XIXème siècle avec la production de chanvre textile. Cette pratique était répandue dans les familles de la région pour des usages personnels ou économiques. La région était réputée pour son travail du chanvre et du coton dans la filière textile. Aujourd’hui une petite production locale expérimentale est maintenue. On peut voir sur la carte, un grand couloir bocager, sa situation est relative à la morphologie du territoire. Les parcelles agricoles s’entremêlent avec les massifs forestiers qui dominent de loin l’ensemble des paysages.


Répartition et typologie des usages agricoles

Praires permanentes

Céréales

N

51

0 km

Maïs à grains

1

Praires temporaires

2


La forêt, un dynamisme inépuisable

Les paysages du pays d’Urfé sont dominés par la forêt. On distingue une organisation spatiale en fonction des espèces. De manière générale les fonds de vallées sont composés de feuillus et les sommets et les versant exposés Nord-Est sont caractérisés par les résineux créant des masses sombres. Cependant l’homogénéité des boisements créent une harmonie dans la perception des paysages lointains. Depuis très longtemps la sylviculture existe sur les Monts de la Madeleine. Avant la mécanisation du siècle dernier, la sylviculture créait de nombreux métier issus de cette industrie. Sabotiers, bûcherons, scieur de long. De nombreuses scieries permettent de constater que l’activité persiste encore aujourd’hui et crée une économie locale autour du bois. Aujourd’hui la fillière Bois représente une main d’oeuvre de 200

personnes sur le territoire. Vers le XVIIe siècle de nombreux verriers sont venu s’installer dans la région en raison de l’important patrimoine forestier. Les chênes, hêtres et sapins vont permettre de faire perdurer leurs activités en alimentant les fours. La fougère était recherchée car sa leur cendre était utilisée pour la réalisation du verre. Le Plateau de la Verrerie a été ainsi nommé en raison de leur présence. L’activité de la verrerie fut florissante jusqu’a la Révolution. Aujourd’hui subsistent quelques verreries dans les montagnes du Bourbonnais. La forêt continue d’offrir une économie locale, tant pour la production de bois que pour les activités de pleine nature. Selon l’inventaire Forestier National, le secteur des Bois Noirs et des Monts de la Madeleine pourraient fournir de 50 000 à 100 000 m3 par an même si la 52

diversité des essences ne facilite pas leur exploitation. La forêt des Bois Noirs grande de 10000ha est un site d’importance communautaire (avec 120ha répertoriés) pour sa forêt acidophiles et ses tourbières. Des objectifs de gestion sont répertoriés dans le docOb ( document d’objectif du SCOT du Roannais) principalement dédiés à la préservation des écosystèmes tourbeux, des prairies humides et des mégaphorbiaies. Cela en évitant la modification du réseau hydrographique. Avoir une gestion des fréquentations touristiques, gestion des nouvelles espèces, proscrivant les coupes à blanc, pérennisent la diversité biologique et paysagère. A Saint-Priest-la-Prugne, trois scieries continuent à travailler le bois. On peut constater que la forêt gagne petit à petit du territoire, cela dû à la perdition de l’activité. Cette pression se fait ressentir sur le bocage qui a tendance à s’étoffer


Mélange de feuillus

Mélange de feuillus et de conifères

La hêtraie Elle se trouve dans les parties sommitales ou dans les parties montagnardes, à 800 mètres d’altitude.

Les sapinières Le sapin trouve des conditions climatiques de développement plus que favorables dans le Massif des Bois Noirs dès 800 à 1200 m d’altitude. Ce peuplement est constitué principalement par le Sapin Pectiné mais on y trouve également de l’Epicéa ainsi que des Douglas qui sont les deux principales essences de reboisement. Ce peuplement possède un intérêt naturaliste et productif très attractif par sa diversité.

Lande ligneuse

Scierie

Les peuplements de Douglas Le Douglas est de plus en plus représenté au sein des peuplements forestiers, du fait de sa croissance rapide et de la qualité de son bois.

Formation herbacée

Typologie des boisements

Chiffres clés

Sur les Monts de la Madeleine seul 13% de la forêt privée sont soumis à un Plan Simple de Gestion (P.S.G.). 53

N

0 km

1

2


Le thermalisme, un atout régional Les Monts de la Madeleine sont appelés le «château d’eau du Roannais» car ces eaux de montagnes de bonne qualité approvisionnent de nombreuses communes en eau potable. Certaines d’entre elles ont été exploitées ou le sont encore pour le thermalisme et l’eau en bouteille. L’activité autour des sources aura été un atout économique d’intérêt permettant un fort développement local à certains endroits. Située sur la commune de Laprugne, une source d’eau minérale a été découverte à Charrier en 1925 puis exploitée à partir de 1933 sous la tutelle des Mines Charrier. Elle sera active jusqu’en 1998. En 1958 le groupe Perrier lance la production industrielle d’eau plate pour bébés. L’embouteillage se faisait sur place, 13 millions de bouteilles étaient produites par an et ceci employait une cinquantaine de personnes. A Saint-Alban-les-Eaux existe une station thermale réputée dès l’époque gallo-romaine. Elle accueillait chaque été 1500 curistes à ses heures de gloire au cours du XIXème siècle. Ces sources thermales et/ou minérales engendreront de nombreuses infrastructures (hôtels, casinos, restaurants). La création en 1900 de la ligne

de chemin de fer reliant Vichy à Boën fut une opportunité pour le village car le «tacot» permettait à de nombreux promeneurs de rejoindre la station. Cette eau a été reconnue naturellement gazeuse en 1878, créant en 1890 la société des Eaux Minérales de St Alban. En 2007 la société Refresco a repris l’entreprise. Aujourd’hui elle emploie entre 150 et 240 salariés. En 2003, est venue s’implanter une société spécialisée dans la fabrication de bouchons et de bouteilles. Cette richesse en eaux, est source d’emplois depuis maintenant plus d’un siècle. Le développement de Saint-Alban a engendré la découverte d’autres sources favorisant le développement de toute une région; telle que Sail-les-Bains renommée pour ses eaux thermales captées dès l’époque Gallo-Romaine. La région a connu un fort attrait autour des bienfaits de l’eau de Vichy qui représente bien l’image de la région, elle était par excellence l’une des cités thermales, ceci dès l’époque Gallo-Romaine. Le thermalisme connaît ses heures de gloire vers le XVIIème siècle puis au XIXème siècle. L’arrivée du chemin de fer en favorisera l’essor. La ville de Vi54

Publicité des eaux Charrier

chy connait une évolution rapide avec l’apparition d’infrastructures associées à l’activité. Depuis les années 70, Vichy adopte un nouveau visage offrant un thermalisme de traitement, de détente et de prévention. L’abondance en eaux des Monts de la Madeleine fut aussi utilisée comme force motrice jusqu’a la fin du XIXème siècle avec plus de 380 installations hydrauliques ayant produit 10% de la production du département. Mais par le socle granitique du territoire, toutes ces eaux de source font état d’une radioactivité assez importante qui avant représentait une qualité. Avec l’arrivée de l’exploitation minière d’uranium, aujourd’hui les eaux de la Besbre témoignent d’une radioactivité anormale relative à la gestion du site.


Bloc diagramme avec la mise en valeur des cours d’eau

Vue axonomĂŠtrique du pays Roannais

55


Les pressions, entre composantes naturelles et anthropiques Les entités vues précédemment permettent de conclure à l’égard d’un territoire qui est régi en rapport avec ses composantes morphologiques et économiques. Le territoire a offert à l’homme de nombreuses richesses, déjà la prolifération de l’eau connue depuis longtemps mais aussi la forêt. C’est à travers la vallée de la Besbre et sa composante mystérieuse, celle de la mine des Bois Noirs Limouzat que mon attention va plus précisément être attirée. On observe qu’un grand couloir bocager traverse le site d’étude où la forêt agit comme un élément de pression sur cette activité qui résiste. La forêt reprend son territoire que l’homme a longtemps jardiné à son profit. La mine est venue se poser sur le territoire, comme elle le fit n’importe où ailleurs en France, avec pour unique objectif et exigence la présence d’uranium. La mine agit comme un élément de pression sur la composante agricole, créant ainsi un effet de rupture du couloir bocager. La mine est venue remplacer la coutume de l’usage du parcellaire agricole.

Pression de la forêt Couloir bocager Pression de la mine N

56 0 km

1

2


57


Révélation du perimètre d’étude par les éléments qui composent le territoire Les différentes grandes entités naturelles et anthropiques qui composent ce territoire rural permettent de définir un territoire d’études plus restreint. Situé entre les deux basculement de la vallée du Sichon et de l’Aix, s’ouvre «la butte de Saint-Priest -la-Prugne». Situé au pied du Parc Naturel Régional du Livradois-Forez, le territoire a comme atout principal son patrimoine naturel, des paysages montagnards où s’enlacent relief et végétation qui offrent aux locaux et touristes les plaisir de la montagne.

La M i

ne

L’inscription de la mine d’uranium dans la vallée de la Besbre à partir des années cinquante va perturber et bouleverser le paysage et ses usages. C’est l’apparition d’un point de rupture entre le paysage et ses usages. C’est le début d’une mutation anthropique des paysages. La division Minière des Bois Noirs Limouzat s’est installée face au village de Saint-Priestla-Prugne créant ainsi une nouvelle entité dans le territoire. Ces deux entités ne dialoguent pas ensemble. Cela s’explique par l’arrivé brutale de la mine. A l’époque les persceptions du paysage et ses usages n’étaient pas une préoccuption. Un travail de valorisation de ces entités entre la vallée de la Besbre, Saint-Priest-la-Prugne et la mine est nécessaire pour établir un dialogue d’ensemble.

Zone d’Intérêt Floristique et Faunistique de type 1

N

0 km

58

1

2


de tte u b La

Saint-Priest

59


Rapport entre la mine et Saint-Priest-la-Prugne, un impact visuel brutal

La fermeture de la vallée de la Besbre tout en amont, vient imposer au village le passé minier sous son aspect le plus péjoratif. Le barrage permet de maintenir les déchets entreposés durant l’exploitation. Il est notable que le barrage fait front au village. Cet aspect, physique dans le paysage est un rappel quotidien de l’ancienne activité industrielle. Cela entretien une forme de conscience du risque liée à l’éffondrement. La fermeture brutale de la vallée provoque une intrigue au coeur du territoire. Vue du barrage depuis Saint-Priest-la-Prugne, en arrière plan, le viaduc des Peux, ouvrage réalisé à la fin du XIXe siècle. Les Bois Noirs Le Vernois

C

C’

864 Les Peux

Le grand bassin et la digue

A

689 m / 0 Km

60


C’ B’

Le Vernois

A Les Peux

B

A’ Saint-Priest-la-Prugne

C Les Bois Noirs

La mine ancrée dans la vallée 0m

200

500

N

Les Bois Noirs Le Vernois

B’

B

745 m Saint-Priest-la-Prugne

Le Moulin 61

A’ 3.83 Km


Saint-Priest-la-Prugne, un promontoire sur le grand paysage 2

3

Les points de vues sur le grand paysage sont nombreux. Dès qu’on prend de l’altitude le paysage s’ouvre sur la vallée de la Besbre. Saint-Priest-la-Prugne apparait comme une petite butte enlacée par les massifs dominants; comparable à un plateau, permettant de voir l’ensemble du territoire. Paradoxalement la forme urbaine du village est retournée sur elle même, comme pour établir une forme de protection contre la rudesse de la vie rurale.

Massif des Bois Noirs

1

Saint-Priest-la-Prugne

62

Fermeture de la vallée par la digue du bassin


VallĂŠe d e la Besbre

3

1

Panoramas sur le grand paysage 0m

200

500

2

N

La Prugne , CitĂŠ Cordat Monts de la Ligue

Monts de la Madel

63

eine


64


LE TEMPS D’UNE PARENTHÈSE Les problématiques actuelles résultent d’un court moment de l’histoire. La mine s’installe et s’en est allée comme une parenthèse dans une longue phrase. Le temps s’arrête durant trente ans, l’histoire de la mine laisse place aujourd’hui à une histoire qui ne cesse d’être contée et racontée. 65


La vie rurale, une richesse minière encore dormante Avant l’arrivée de la mine, la vie locale est principalement tournée vers la polyculture et l’élevage. Les fermes sont de petites tailles, quelques hectares autour des bâtisses. Elles étaient assez nombreuses et faisaient vivre le territoire avec les moyens de l’époque. C’est le début de la mécanisation, il y avait donc encore besoin de beaucoup de main d’œuvre. L’artisanat avait une place importante dans le commerce local. On trouvait de nombreux cafésrestaurants, des menuisiers, charpentiers, forgerons, ferronniers, tailleurs. Chaque petit village avait son école. Selon un témoignage «ce n’était pas la vie ‘idéale’, mais beaucoup regrette l’époque de leur jeunesse». La vie y était dure certes mais la vie sociale y était importante, la rigueur de la vie quotidienne créera une réelle solidarité villageoise. De nombreuse activités telles que les veillées, le théâtre, le cinéma ambulant, associatif, les fêtes locales, le sport et vie religieuse encore fervente à cette époque étaient le quotidien de la vie à la campagne.

L’arrivé du «tacot», (petite voie ferrée) en 1908 sera une aubaine pour les ruraux. Le réseau construit permettra de relier les villes de Vichy et Roanne et de désenclaver les habitants de la montagne Bourbonnaise. Cela a lentement mais surement et profondément bousculé les habitudes en facilitant la circulation des biens et des êtres, de permettre ainsi aux locaux les plus isolés de pouvoir aller travailler à la «ville». L’arrivée du « tacot » s’inscrit parfaitement dans le contexte du thermalisme et du début du tourisme. On pouvait maintenant se permettre un weekend à la campagne ou un voyage à la « ville ». La voie ferrée entrait sur le site par le col Beau Louis et passait par le hameau des Peux. Le via-

duc des Peux est le fruit du passage du « tacot », il permet d’enjamber la vallée de la Besbre. On peut constater qu’en 1946, les boisements étaient bien moins significatifs que de nos jours. Les paysages témoignent de l’importance de l’industrie du bois. Elle était une source prépondérante d’une économie locale. Le couloir bocager vu précédemment est bien plus conséquent. La mine ne s’est pas encore installée, la vallée est grande ouverte et cultivée. Les premiers indices d’uranium seront trouvés au pied de l’ancienne voie métrique. La vie locale et les paysages vont être boulversés par l’arrivée des premiers prospecteurs au début des années cinquante.

Le « tacot », désenclavement de la montagne Bourbonnaise

Trajet du «Tacot» Saint-Priest la Prugne

Aujourd’hui cette vie sociale a été profondément modifiée, conséquence de l’exode rural. 66


Vue aĂŠrienne de 1946

Laprugne Point du Jour

Col Beau louis

Saint-priest-la-Prugne

Les Peux

Viaduc des Peux

Gare de St-Priest 67

N


Les empreintes toujours visibles dans le paysage Apparition d’une nouvelle vie locale. L’arrivée de l’activité industrielle minière s’est propagée sur deux échelles. Celle du site d’extraction à proprement dit ainsi qu’à l’échelle de plusieurs autres communes, permettant de faire vivre les employés de la mine. C’est le début d’une toute nouvelle vie locale. La nécessité de moyens humains pour faire fonctionner la mine a généré un important accroissement de la population, divisant le monde rural en deux. Ce nouvel arrivage a «masqué» l’exode rural déjà en cours au XIXe siècle, créant de nombreux emplois. Ce mouvement de travail à la demande à la mine masquera la dévalorisation du monde agricole. Des témoignages le relatent, une division sociale apparaît entre les ouvriers mineurs et les «autres», composés majoritairement de paysans. Il y avait les ouvriers mineurs qui suivaient les exploitations après la fermeture massive du bassin houiller durant les années 50/60. Ces nouveaux arrivants étaient en retrait de la vie locale, créant un écart social entre la population locale et ces «itinérants» venus d’ailleurs. Seulement quelques paysans locaux auront vraiment travaillés à la mine.

Cette division sera renforcée par l’employeur qui offrait certains privilèges aux familles des ouvriers tels que des sorties à la piscine ou à la station de ski de la Loge des Gardes. La nécessité de faire vivre une nouvelle population a induit de nouvelles infrastructures dédiées à la vie de la mine. Une nouvelle forme d’organisation et d’architecture, propre aux mines vient s’installer sur le territoire. L’architecture minière est représentatrice de la structure sociale de l’entreprise. Il est facile de constater dans le paysage les différentes formes de bâti; la barre d’immeuble destinée à la classe ouvrière et les chalets plus sofistiqués pour les cadres. Cette empreinte architecturale est notable dans un rayon de 20 km autour de la mine. On en trouve encore des empreintes à Saint-Priest-la-Prugne, Laprugne ainsi qu’à Saint-Just-enChevalet. Cette nouvelle population associée à un nouveau mode de vie plus confortable, va créer un clivage entre les populations. C’est un véritable bouleversement dans la vie locale des communes concernées. La mine sera comparable à une ville qui ne dort jamais. Elle fonctionnera nuit et jour, 24h/7 jours durant trente ans. 68

C’est l’époque du développement des infrastructures comme la construction d’écoles, la mise à disposition de réseaux d’autocars pour les ouvriers, le développement des artisans et commerçants. Tout cela a insoufflé un dynamisme local important qui s’est «éteint» à la fermeture de la mine. A Saint-Priest-la-Prugne, l’apparition d’une nouvelle urbanisation s’observera dans le « paysage » de la commune. On peut constater à l’aide du parcellaire que le centre bourg « ancien », s’est construit autour d’un axe Nord/Sud appelé Cardo. Les habitations se sont installées autour de cet axe en drapeau. Un axe perpendiculaire orienté Est/Ouest vient couper l’axe Nord/Sud appelé Decumanus. Il est notable que les citées apparues fin des années cinquante se sont installées autour de ces axes sans pour autant se raccrocher au centre bourg. Cela a engendré une discontinuité en favorisant un étalement urbain. Saint-Priest-la-Prugne est un village «rue» concentré autour de son axe principal. Les cités sont toujours présentes et continuent d’être habitées. La forme conventionnelle des cités Brunet et Tardy a été conservée. Seule la cité administrative a été réaménagée, bien que quelques bâtiments subsistent.


La Cité administrative du CEA

La Cité administrative du CEA ou la «cité des célibataire» pouvait accueillir une trentaine de personnes. Cette cité était composée de plusieurs bâtiments: .d’une conciergerie à l’entrée, .d’un bâtiment abritant les bureaux du Directeur et de ses collaborateurs cadres et du secrétariat, .un bâtiment laboratoire, .une salle des fêtes, .une cantine, . plusieurs garages pour les véhicules de service. . un bâtiment avec une dizaine de chambres d’hôtes pour les personnalités extérieures en visite.

La Cité Tardy était destinée pour les mineurs, elle est composée d’une cinquantaine de maisons modestes. Elles se composent de deux ou trois chambres, sans chauffage central, mais avec un poêle à mazout dans la pièce principale. On y trouvait le confort du début de la vie moderne avec une salle d’eau (eau chaude au robinet et WC) enfin les parties communes étaient aménagées.

Cité Brunet La cité Brunet était réservée aux cadres moyens. Les maisons ont été construites sur le même principe que la Cité Tardy. Cependant, il y en a que six et elles sont plus grandes. Elles étaient équipées d’un chauffage central et construites sur un véritable sous-sol.

Cité Tardy

L’arrivée des citées à Saint-Priest: discontinuité du bâti 69

N

1/1000e


Vue en premier plan sur le village de Saint-Priest-la-Prugne, avec en deuxième plan la cité Cordat, sur la commune de Laprugne. En arrièreplan les Monts de la Madeleine.

La Cité Cordat

C’est entre les années 1955 et 1960 que les citées «ouvrières» se sont construites. La plus remarquable est celle construite sur la commune de Laprugne, correspondant au type de logements HLM. La Cité Cordat se compose de trois barres HLM sur quatre niveaux, ce qui donnait pour les deux plus grandes barres, 118 logements de type

Cité Cordat La Prugne

Saint-Priest-la-Prugne

F2 à F5. Dans la troisième, il y eu une vingtaine de logements destinés aux employés. Cette infrastructure de première «nécessité», industrielle, marque à jamais les esprits mais aussi le paysage. L’empreinte physique laissée dénature le territoire et interroge beaucoup sur sa présence. A l’époque, cette distinction so-

70

ciale liée à l’architecture créa des tensions, des difficultés d’intégration pour les populations qui les habitaient. On peut observer sur la photo ci-dessous, les trois barres sur fond des Monts de la Madeleine. Aujourd’hui ces bâtiments sont en instance judiciaire et appartiennent au domaine privé.


Cité Tardy

A une dizaine de kilomètres au Sud de Saint-Priest-la-Prugne, le village de Saint-Just en Chevalet aura vu apparaître à la même époque, une grande cité pour les cadres et cadres supérieurs de la mine. Les logements étaient collectifs et divisés en deux blocs de 20 et 10 habitations. Ils étaient construits de manière tradition-

nelle (maçonnerie, plâtrerie et charpente) et étaient plus ou moins grands. Leurs aspects s’intégraient mieux dans le paysage. Il y avait le logement du Directeur qui était situé sur le coteau qui dominait la cité. C’était une demeure luxueuse pour l’époque. Ce projet urbain a participé à

l’agrandissement important de Saint-Just en Chevalet dans les années 60. Aujourd’hui il devrait être remplacé par un projet de résidence pour personnes âgées. La vie des mineurs était rythmée par un fonctionnement continu de la mine. La mine fonctionnait au rythme de trois fois 8h, c’était un ballet d’autocars toutes les 8 heures sur les routes de montagne. Organisation spatiale de la cité à Saint-Just en Chevalet en 1970

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A la recherche d’indices Parallèlement aux modifications sociales, la prospection du territoire commence. • Méthodes de prospection La recherche d’un gisement d’uranium se fait en 3 phases: la prospection à large maille en terrain «neuf», la prospection détaillée sur les zones intéressantes et la prospection systématique sur des indices susceptibles de conduire à des gisements exploitables. La prospection à l’époque était réalisée soit à pied, c’est à dire une prospection directe sur le terrain, soit depuis un véhicule ou enfin aéroportée. Cette dernière est la technique la plus pratiquée aujourd’hui. C’est grâce aux rayons gamma que les gisements sont facilement repérables à l’aide d’un détecteur à ionisation (compteur Geiger Müller).

Chevalement du puits P1, 1953. Source CEA

Suite à la découverte du gisement de Lachaux, les prospecteurs du CEA décident de partir à la découverte du Massif des Bois Noirs. Ils réalisent alors une prospection géologique, ils en mesurent ainsi la radioactivité munis d’un gamma-phone. C’est en 1950 que des indices se présenteront sous forme d’éboulis minéralisés en phosphates uranifères sur des chemins d’exploitation forestière et dans des ruisseaux. Les premiers indices seront à Laprugne (futur BN1) et à SaintPriest-la-Prugne (futur BN2). L’année suivante les indices s’accumulent sur le territoire de Saint-Priest-la-Prugne. Un classement est réalisé avec la notification BN pour les Bois Noirs (Bois Noirs 1, 2,3...).

72

C’est le début d’une prospection détaillée entre 1952 et 1954. Onze indices permettent de valider l’implantation d’équipes qui réaliseront des zones de fouilles pour découvrir l’intérêt des gisements (voir carte). Des sondages sont réalisés ainsi que des petits travaux miniers sur les puits les plus remarquables. C’est l’indice BN5 qui présentera le plus d’intérêt. En 1954, les travaux de fonçage du puits de recherche sont entrepris jusqu’à 75 m de profondeur. Un permis d’exploitation est accordé sur 65 km2. La division minière du Forez est créée en 1955. Elle prend la succession de la division minière de Lachaux qui ferme ses portes la même année.

Sondage rotatif. Source CEA


Le gisement des Bois Noirs Limouzat est situé à 3 km au Nord-Ouest de Saint-Priest-laPrugne, le long de la rivière de la Besbre. Trois filons importants sont reconnus avec des zones stériles d’une largeur de 250m. Le fonçage de puits d’exploitation (P1/P2) à grande section permettra une exploration jusqu’à 200 m de profondeur. Le P2 ira jusqu’à 240 m de profondeur, les galeries se construisent vers les formations minéralisées. En 1956, commence l’exploitation du site BN5, le puits P3 sera créé avec 23m2 pour section. Il ira jusqu’à 440 m de profondeur; Une première phase d’exploitation commence en 1957 sous forme de carrière pour extraire la partie supérieure du filon central.

BN 1 le Fraty

BN 3 Viaduc des Peux BN 5 BN 4 scierie de campagne

BN 6 Chemin du Jaf

BN 2 SaintPriest

BN 7 Calinon BN 8 Les Lauvents BN 9 Bout

N

Indice d’uranium Site d’extraction principal

Carte des indices d’uranium

La 2 CV, outil passe-partout de la prospection radiométrique autoportée. Source CEA

73

BN 10 La Gadaillère

Le puits de recherche P1 sur le BN5. Source CEA


Fermeture de la vallée L’extraction se poursuivra l’année suivante pour sortir 600 000 m3 de matériaux «stériles» nécessaires à la construction de la digue du bassin de stockage des résidus de traitement du minerai. Cette étape est importante dans l’histoire de la mine car la décision de la création d’un bassin de stockage des déchets va avoir un impact sur les paysages de la vallée. La création d’un bassin d’une retenue de 4 500 000 m3 s’est présentée à l’époque comme être « la » solution de gestion des résidus miniers. Le bassin aura un double usage. Au même moment est construite l’usine de la Société Industrielle

La verse du Jot

Vue d’ensemble du siège d’exploitation et de l’usine SIMO des Bois-Noirs en 1966. Source CEA

des Minerais de l’Ouest (SIMO) qui permet de traiter le minerai chimiquement après broyage. Cette usine a besoin d’une retenue d’eau pour que décantent les eaux polluées rejetées par celle-ci. Cela permettra à la division des Bois Noirs Limouzat de produire son propre uranium ( intrate d’uranyle ). Avant la présence de la SIMO, le minerai était envoyé à l’usine de traitement de Gueugnon. En 1960, les installations de surface sont terminées, la mine des Bois Noirs Limouzat entre en phase d’exploitation. L’usine SIMO se met en service en Février 1960 et produit

Atelier de Préparation

son premier nitrate d’uranyle au mois d’Août de la même année. En 1967, le puits BN6 est reconnu comme exploitable. Son exploitation commence en 1970 à 360 m de profondeur. Les travaux de reconnaissance d’indices sont arrêtés entre 1971 et 1975. La quête pour trouver de nouvelles réserves sur la division des Bois Noirs Limouzat est abandonnée. L’épuisement du gisement est prévu pour 1978 / 80. L’activité de la SIMO est maintenue jusqu’au mois de Juillet 1980. En Décembre 1980 le gisement produit sa dernière tonne de minerai.

Usine SIMO

74

Digue


L’usine SIMO et le viaduc des Peux Source COGEMA

La digue et le bassin de décantation vus depuis le haut de la carrière 1966 Source CEA

L’usine SIMO, 1966 Source CEA

La carrière en 1966. Source CEA 75


L’organisation de la mine Le site couvre une superficie de 88 ha dont 18 ha de bassin en eau et 3 ha d’emprise des anciennes installations de traitement. Les Travaux Miniers Souterrains (TMS) s’étendaient autour du puits d’extraction P3 à partir duquel le gisement fut reconnu par galeries parallèles. La Mine a Ciel Ouvert (MCO) a été creusée à partir de 1957 en gradins successifs de 8 m de hauteur et a produit 950 000 m3 de roches stériles qui ont été utilisées soit pour construire la digue du grand bassin (642 000m3) et les plates formes des infrastructures minières de surface (environ 100 000 m3) soit mis en verse (verse dite du Jot)

MCO

La digue a une hauteur de 42 m sur une longueur en crête de 508m et une largeur en pied de 170m, ceci pour maitriser les écoulements au travers de cet ouvrage qui est conçu pour être filtrant.

Verse du Jot

Le Grand Bassin a permis de stocker les résidus de traitement du minerai issus de la filière d’extraction, réalisée dans l’usine SIMO. Il y a environ 1 300 000 tonnes sous forme de pulpe dissimulées sous une lame d’eau.

N

76


SIMO

P2

P3

APM

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Extraction et traitement, une gestion sur site Organisation spatiale de traitement du minerai

SIMO

Transfert du minerai dans l’usine de traitement

APM

N

Le traitement du minerai des Bois Noirs Limouzat comportait deux étapes successives: Une préparation mécanique (broyage) réalisée dans l’Atelier de Préparation des Minerais (APM) à proximité des puits d’extraction, il sera mis en service en Septembre 1958. Puis la pulpe obtenue dans l’APM est acheminée dans l’usine SIMO située à 600 mètres en amont de la mine pour subir un traitement chimique.

Le traitement chimique comportait dans un premier temps une attaque à l’acide sulfurique et une pré-concentration de l’uranium sous forme d’uranate de chaux. Dans un second temps une remise en solution et une extraction par solvant organique (tributylphosphate) pour aboutir à un concentré liquide de nitrate d’uranyle avec un rendement final proche de 95%.

78

L’usine a traité au total environ 2 600 000 tonnes de minerai dont 6400 tonnes d’uranium ont été extraites. Le bassin maintenu par la digue a permis de contenir les résidus fins de traitement chimique (1 300 000 tonnes), alors que les résidus grossiers (soit environ 1 300 000 tonnes) ont été utilisés en remblais hydrauliques des travaux souterrains.


APM: L’atelier de préparation du minerai ETAPE 1 1

2

Réception d’un minerai d’une granulométrie inférieure à 300 mm provenant de la mine.

Passage dans un cylindre compteur, cela permet de mesurer la quantité de rayonnements gamma.

4

3

Stockage du minerai dans 5 silos intermédiaires de 200 tonnes chacun.

Concassage du minerai.

Production de stériles miniers issus d’une première selection du minerai

ETAPE 2 1

2 Concassage primaire et délourdage : le minerai est réduit à 120 mm

concassage secondaire et broyage : tri granulométrique électronique du minerai pour ne conserver les minéraux compris entre 40 mmm et 120 mm

3

4

Réduction du minerai en pulpe à moins de 450 microns

Épaississement et pompage: la pulpe est décantée puis échantillonnée avant que d’être pompée vers l’usine chimique

Production de résidus miniers par le retrait des minéraux dont la teneur en uranium est trop faible

L’usine de traitement chimique SIMO 2

1 Réception de la puple qui va être attaquée à l’acide sulfurique en cuve.

3 Lavage et filtration des résidus stériles, après attaque à l’acide, par des filtres à tambour.

Les jus acides obtenus après filtration sont précipités par la chaux deux en temps :

• Élimination par filtration des impurtés ( telle que le fer ) • L’addition de chaux précipite l’uranium sous forme de concentré d’uranate de chaux contenant environ 20% d’uranium métal

4

Traitement de l’uranate de chaux: pesage, séchage puis repulpé ( avec de l’eau et du nitrate de chaux)

Production de résidus de traitement

6

Filtration avec lavage par l’eau permettant de réextraire l’uranium sous forme d’un jus riche contenant environ 50g/ litre d’uranium métal

7

8 Purification du jus par un solvant organique ( tributyl-phosphate) ce qui permet de concentrer l’uranium

Réextraction: l’uranium est réextrait du solvant par l’eau pour obtenir une solution de nitrate d’uranyle qui est concentrée par évaporation jusqu’à 400g/litre d’uranium métal .

79

9

Expédition: le produit final est liquide. Il est versé dans des containers puis dirigé en camion jusqu’a la gare de Roanne pour après être acheminé en train à l’usine de raffinage de Malvézi


La production de stérile, un entreposage «in situ» Nous avons pu voir lors des processus d’extraction puis de traitement qu’il y avait plusieurs étapes de production de déchets. Dans la première phase, celle réalisée dans l’APM, nous avons dès le début un premier tri, évacuation des «stériles miniers». Les «stériles miniers» correspondent à la matière (sols, roches) excavée pour accéder au gisement d’uranium que l’on veut exploiter. Ils n’ont pas subi de traitement mécanique ou chimique spécial. Ce sont l’ensemble des minerais ne possédant pas suffisamment de rayonnement gamma. Du fait de leur nomination sous le terme « stérile», ça laisse sugérer que la roche ne possède pas de radioactivité. Il est vrai que ces « stériles» n’en possède pas suffisamment pour être utilisables mais présentent

Vue sur le site durant l’exploitation, laissant apparaître l’imposante verse à stérile. Source A. Maussan

peu ou prou de la radioactivité. Ces stériles correspondent à la première phase de production de déchets minier. Vient ensuite, les déchets définis comme résidus miniers. Ils sont produits toujours dans l’APM mais en fin de chaine d’extraction. Les «résidus miniers» sont des déchets générés lors des opérations de concassage du minerai. La roche est très fine, comparable à du sable, mais son taux de radioactivité est encore trop faible pour être exploitée. Nous avons donc deux types de déchets émis par l’atelier de préparation du minerai (APM): les « stériles » et les résidus. Ce qui résulte de cette première étape de tri/ lavage/ concassage est envoyé à l’usine de traitement du minerai (SIMO). Dans cette usine, le minerai va être traité chimiquement pour en fin de chaîne obtenir un concen80

tré liquide de nitrate d’uranyle. Lors des différentes phases de traitement, il va y avoir alors la production des déchets dit « résidu de traitement». Ces résidus de traitements sont des déchets dits de très faible activité ou faible activité générée lors des opérations de traitement du minerai. Ces déchets sont évacués et stockés dans le grand bassin sous une lame d’eau. Cependant les résidus de traitement de minerai contiennent près de 75% de la radioactivité initiale du minerai. Ils constituent des «produits à gérer». Tous les déchets générés lors des différentes étapes de production vont être stockés «in situ».


Vue sur le site trente ans plus tard, l’épais boisement de feuillus éfface toutes traces d’activité.

C’est à cette étape cruciale que toute l’ampleur de la problématique se révèle. Selon la loi, les sites de stockages relèvent de la réglementation des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE), sous la responsabilité du gestionnaire (Areva). Cette réglementation doit être appliquée par les DREAL ou les Directions Départementales de Protection des Populations sous l’autorité du préfet du département. Ce type de classement oblige le gestionnaire à avoir de la rigueur, concernant la surveillance, l’information du public, après la gestion suivant fermeture du site. Au vu de la règlementation et avec un regard sur l’histoire mais surtout sur la présence de ces déchets, nous allons essayer de comprendre les problèmes de gestions qui existent

depuis maintenant plus de cinquante ans. En comparant les deux photographies ci-dessus, nous pouvons voir que les installations ont disparu, que la végétation a repris son territoire. Mais hélas nous allons voir aussi que les déchets demeurent, toujours bien présents. Ces déchets s’assimilent aujourd’hui totalement dans le décor et sont difficilement repérables. Les déchets issus des mines d’uranium posent plusieurs problèmes, celui tout d’abord de leur durée de vie qui dépasse largement le rapport au temps qu’a l’homme; leurs impacts dans l’environnement, ainsi que sur l’homme, la faune et la flore. Enfin ces déchets posent le problème crucial de connaitre les différentes possibilités de gestions.

81

Situés dans un milieu rural isolé de faible densité de population, ces déchets semblent ne déranger personne si ce n’est les membres de certaines associations locales.


La fermeture laisse place à l’éffacement

Vue sur l’APM en 1966. Source CEA

1969

Acte de concession accordée par décret en 1969 puis 1977

1980

30 juin 1980 :Déclaration d’arrêt d’exploitation.

1980

20 octobre : définition des travaux de mine en sécurité dans le cadre de l’arrêt des activités. Travaux réalisés par la Cogema, dans le cadre de l’obtention du 1er acte donné.

1987

Arrêté du 3 Décembre défini les préscriptions complémentaires, à celles décrites dans l’arrêté du 20 octobre 1980, telles que les travaux de ramblaiement des puits, du TBO, la surveillance de la zone de résurgence, le suivi de la qualité des eaux du TBO et des drains, la visite du canal de la Brebre et de la passe à poissons. Arrêté du 25 mai apportant une modification sur les campagnes de suivi de la qualité des eaux.

1990 2004 2004

Contexte réglementaire multiple

Arrêté du 23 août, demande d’un délai suplémentaire pour l’autorisation de stockage de déchets. Arrêté du 12 octobre définissant les modalités de démolition de l’usine de traitement et de contrôles radiologiques avant pendant et après les travaux d’une part, ainsi que les modalités de stockage des produits issus de la démolition dans la MCO et les contrôles associés 82

Une composante minière : la procédure d’arrêt des travaux n’est pas totalement finalisée, le 2nd arrêt qui doit donner acte doit être pris et par la suite la procédure de renonciation à la concession pourra éventuellement être engagée. Une composante ICPE (Installation Classée pour la Protection de l’Environnement) avec le stockage de produits issus de la démolition de l’usine de traitement dans la mine à ciel ouvert, ainsi qu’un stockage de résidus de traitement sous une lame d’eau (dépend actuellement et légalement du code minier. Considéré comme une activité connexe au titre de la Police des Mines. ) Une composante Loi sur l’Eau caractérisée par la dérivation de la Besbre, les rejets des eaux traitées dans ce même cours d’eau, la présence d’une digue de grande longueur. Une composante code de la santé comptetenu du contexte radiologique du site.


L’éffacement Les tentatives de restitution du site aux anciens propriétaires et à la commune témoignent de la volonté d’abandon du site de la part d’Areva.

Vue sur le site après réaménagement en 1990. Source CEA

Du point de vue technique suite à la fermeture du site, c’est le début du démantèlement des installations de l’usine de traitements chimiques à partir de Septembre 1980 jusqu’en Mars 1981. Les opérations de démantèlement sur l’APM comprenaient la destruction des sols en béton, ainsi que la destruction des bacs de décantation extérieurs. Les terres de décaissement et les bétons ont été stockés dans la MCO. L’ensemble du site a fait l’objet d’une re-végétalisation par ensemencement. La conformité des travaux de remise en état du site fut reconnue par la DRIRE en Septembre 1982.

Il fut choisi concernant le grand bassin de maintenir les résidus sous une lame d’eau car cela présenterait «une fiabilité» apparemment suffisante à moyen terme. Des travaux d’assainissements radiométriques complémentaires ont étés réalisés entre 1987 et 1988, ce qui a permis le déclassement de l’usine SIMO, avec possibilité de cession de l’ensemble des bâtiments et terrains mitoyens pour une réutilisation industrielle. Areva donnera pour le franc symbolique le terrain et les bâtiments à la commune de Saint-Priest-la-Prugne.

83

Du point de vue social, la fermeture du site était programmée mais a causé un réel traumatisme chez les locaux. Selon des témoignages, «la fermeture n’a pas été accompagnée par la Cogema-SIMO. Dans d’autres secteurs Areva a financé des ré-industrialisations après-mine». La mine est partie s’installer ailleurs et a emmené un grand nombre de ses employés avec elle. La campagne se vide, toutes les infrastructures nécessaires à la vie minière se retrouvent sans usage, de nombreuses écoles ferment. Une quantité de logements mettra du temps à trouver des acheteurs.


Le paysage, socle d’une empreinte industrielle

Saint-Priest. Saint-Priest.

1958 La mine s’est progressivement installée sur le territoire. A la suite des étapes de prospections et de confirmation de l’exploitation possible du gisement, l’activité industrielle prend forme. La roche mère commence à être dévoilée. L’empreinte, la cicatrice s’installent créant ainsi un tout nouveau paysage. L’activité industrielle en réveillant la campagne permet le développement d’une nouvelle activité économique. Cela a engendré un remarquable accroissement de population sur les communes avoisinantes du lieu de l’industrie, créant de ce fait de nouvelles infrastructures jusque-là inconnues au pays. Le territoire s’est révélé sous un

1964 nouvel aspect, celui des richesses de son sous-sol. Cet atout majeur présent dans les massifs granitiques français a rendu possible à la nation française son émancipation, tout autant économique qu’énergétique et militaire. Les enjeux sont énormes. Redonnant un aspect valorisant au pays à l’époque où le monde rural connaissait un désintérêt général par les populations. Suite à la découverte du gisement, la Mine à Ciel Ouvert (MCO) racle le sol et le sous-sol. La richesse invisible de la roche mère est mise à jour. Un contraste se crée entre la noirceur des massifs forestiers et la blancheur de la roche affleurant. 84

De nouveaux dispositifs pour l’amélioration du minerai s’installent. Cette nouvelle composante va générer des déchets. Le paysage fait face au dilemme de l’homme. Quels sont les solutions pour stocker ces déchets ? Une réponse brutale est trouvée : la vallée est fermée, alors le paysage, son relief sont mis à disposition de l’homme. Le stockage s’installe et prend de l’ampleur au fil des années. L’homme cherche à cacher ses déchets, à les oublier, en les dissimulant dans le paysage. Aujourd’hui, ces déchets « cachés» durant le passé, sont mis à jour et posent problème.


Source: Géoportail.fr

Saint-Priest. Saint-Priest.

Saint-Priest.

1977 La fin de l’exploitation marquera une nouvelle étape de transformation qu’est le processus lent de la végétation spontanée. Mais l’homme sera là pour faciliter cette tâche, par le réaménagement du site. Le démantèlement de l’installation a eu lieu entre 1980 et 1981. C’est la destruction totale des installations, générant bien des déchets. Ceux-ci vont être stockés «in situ» dans la MCO, puis dissimulés sous une couche de terre végétale. Pour compléter le décor, la revégétalisation du site viendra agir comme une strate d’oubli, de dissimulation. Un théâtre se dissimule dans le paysage. Le théâtre cache bien des choses que l’homme ne sait

1992 ni gérer, ni assumer. L’enquête commence, confrontée à l’histoire et à ce qu’il en reste. Les traces de cette ancienne activité industrielle vont marquer à jamais le territoire. Mais différents types de marquages sont à définir. C’est la confrontation entre des éléments visibles et invisibles.

85

2004


Découverte des empreintes Portails Périmètre administratif d’Areva Entrée du site La digue Grand Bassin Bassin annexe et surverse Station de traitement Rejet des eaux provenant de la station de traitement dans la Besbre Canalisation de la Besbre Parcours originel de la Besbre Lit naturel de la Besbre Bief Poste EDF Lignes électriques Chemins internes Chemins communaux Zones humides Prairies fauchées Roselières Terrain de la mairie ( ancien SIMO ), projet d’un parc photovoltaïque N

0m 86

100

500


87


L’invisible des stériles La présence des stériles ne se cantonne pas uniquement à la carte ici présente. Cependant se sont les stériles référencés dans la base de donnée MIMAUSA et ANDRA. Par exemple, la verse présente au pied du puits BN3 n’est pas référencée et ne fait pas partie du périmètre d’Areva. La digue a été construite avec les stériles provenant de la MCO (650 000 m3). Sous la lame d’eau du grand bassin, se sont 1 300 000 tonnes de résidus de traitement qui sont «stockés». Entre 2006 / 2007: Le terrain restitué à la mairie est nettoyé, les bâtiments de l’usine SIMO sont démolis, les produits de démolition ont été stockés dans la MCO Entre 1980 et 1982 la MCO a été partiellement comblée par ses propres stériles des remblais issus de la verse du Jot, des terres provenant du décapage des aires de l’usine ainsi que par des gravats issus du démantèlement des installations de l’APM. Les puits ont été remblayés avec des stériles plus ou moins gros. Pour traiter les eaux provenant des drains de la digue et du débordement de la mine, une station de traitement a été installée. Elle a été opérationnelle dès l’émergence des eaux de noyage en 1981. Sa capacité nominale est de 300 m3/h. http://www.mesure-radioactivite.fr meusures réalisées par Areva en 2009/2010

Radium 226 : 0.02 Bq/L Uranium : 0.001 mg/L Uranium 238 : 0.0005 mg/L

r

re Areva t è im

Grand Bassin

SIMO BN3

MCO

Bassin de décantation 0m

10088

N

500


Radium 226 : 0.02 Bq/L Uranium : 0.11 mg/L Uranium 238 : 0.0005 mg/L

Radium 226 : 0.03 Bq/L Uranium : 0.07 mg/L Uranium 238 : 0.011 mg/L

Verse du Jot P3

APM P2

89


L’eau porteuse de la pollution Suite à la géolocalisation des déchets présents sur le site, il est maintenant important de comprendre la gestion hydraulique de l’ensemble du site, savoir s’il y a un impact majeur entre l’environnement naturel et la présence des déchets. L’ensemble du site a un système très complexe de gestion des eaux, entre autre à cause des galeries souterraines. C’est à l’aide de l’étude hydrogéologique et géochimique réalisée par l’Ecole des Mines de Paris en 2006, ainsi que plusieurs rapports élaborés par la CRIIRAD, que sont présentées les informations suivantes. Le contexte de localisation du site minier en amont du bassin versant de la Besbre est un point important pour comprendre la gestion des eaux du site. L’eau qui arrive à l’entrée du site est tout d’abord retenue et canalisée par un bief, situé au pied du viaduc des Peux. Cela permet le contournement du site en rive droite du grand bassin (cf. croquis) pour que l’eau soit rejetée en aval de la digue.

Le bief permet aussi en période de sècheresse de contrôler le niveau de l’eau dans le grand bassin. Dans l’intérêt majeur d’assurer une couche d’eau suffisante pour l’isolation des déchets. La qualité des eaux entrantes est mesurée à l’entrée du site au niveau du bief. Les archives de la Cogema montrent une concentration naturelle en Uranium et en Radium 226. Cela est lié à l’environnement granitique du site. L’étude de l’évolution du niveau d’eau du grand bassin sous l’influence climatique (montée des eaux entre Mars / Avril et niveau des basses eaux entre Septembre et Octobre) ne correspond pas à des données positives. Selon l’étude, le niveau d’eau s’abaisse à une vitesse supérieure que devrait produire le seul effet de l’évaporation. Ce tout premier constat permet de dire que le grand bassin présente des fuites. Le rapport nous indique un débit de fuite compris entre 40 à 60m3/h du grand bassin.

L’impact des résidus dans l’eau Les éléments chimiques qui singularisent néanmoins les eaux du bassin sont le calcium, le sulfate, l’uranium et le radium 226 qui constituent aujourd’hui le seul marquage clair par les résidus de traitement. Selon l’étude réalisée par la CRIIRAD en 2006, qu’il est conclu que: «le dispositif de traitement ne permet pas à Areva de respecter les normes de rejet fixées par l’arrêté préfectoral». La norme établie au niveau des rejets tolérés est de 0.37 Bq/L. Le relevé des données réalisées entre 2001 et 2006 par Areva montre des rejets en radium 226 systématiquement supérieur à la limite tolérée. Ce constat nous oblige à comprendre l’ensemble du principe de récolte des eaux ainsi que le dispositif de traitement..

Vue sur le grand bassin depuis le viaduc des Peux,

Vue du bief depuis le viaduc des Peux, la canalisation de la Besbre.

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Canal de dérivation de la Besbre

Source de la Besbre au pied du Puy du Montoncel

Viaduc des Peux : Bief de dérivation et de canalisation de la Besbre

BOIS NOIRS

Le grand bassin a une superficie de 18 Ha et occupe la place centrale dans le site. C’est l’un des élements «repère» de l’ancienne mine.

Evacuateur de crue qui passe sous la digue

«Saut a ski» longeant la digue pour rejoindre le cours naturel de la Besbre.

Bassin de décantation puis rejet dans le cours d’eau natuLa digue rel de la Besbre

Le cicuit eau

Schéma des arrivés et sorties d’eau Précipitation : 1508 mm/ an

Evaporation: 632 mm/ an

Ruissellement : 1556 mm/ an

FUITE 2432 mm/ an soit 50 m3/h

91

Chiffre clé Superficie du bassin versant au niveau du site minier : 9.5Km2 Débit moyen écoulé à la station ( siuté au viaduc des Peux: 568 l/s Débit spécifique : 59.8 l/s/ km2 lame d’eau écoulée: 1885 mm/ an précipitation moyenne mesurée : 1508 mm/ an


LA MINE A CIEL OUVERT La mine à ciel ouvert couvre une superficie de 6 ha. Elle a été remplie de stériles et gravats provenant de la démolition des infrastructures. Durant la période de réhabilitation, un système complexe de récupération des eaux a été installé. Nous pouvons voir dans la coupe schématique le dispositif de collecte des eaux. Il existe 4 typologies de récupération des eaux : .Un drain a été disposé à l’intérieur des déchets pour drainer les eaux d’infiltration de la MCO. . Un sondage permettant la récupération des eaux d’infiltration de la MCO.

Coupe schématique de la MCO

. Un sondage permettant de récupérer les eaux de surverse des travaux miniers souterrains. . Un sondage qui récupère les eaux de ruissellement de la MCO. L’ensemble de ce dispositif a été aménagé à l’intérieur de l’ancien puits P3. Ce système de récupération des eaux se retrouve sous forme de canalisations pour être dirigé au pied de la digue (727.6m d’altitude). Cela permet de mettre à jour les eaux de ruissellement qui s’infiltrent dans la MCO. Selon le rapport de l’Ecole des Mines de Paris, le sondage qui récupère les eaux de surverse,

des travaux miniers souterrains, est le principal contributeur avec 94% du débit total émis. A contrario, le sondage pluvial de la MCO récupère de manière épisodique les écoulements lors de fortes précipitations. Le dispositif de drainage ainsi que celui d’infiltration ne récupère que la moitié des ruissellements. Le reste se rejoint au point bas situé au niveau des travaux miniers souterrains et ainsi rejoint le dispositif de surverse. L’ensemble du réseau se retrouve dans le bassin d’aérations situé au pied de la digue.

Stéril

es Infiltration Ruissellement Réseau des drains Niveau statique Drain Pluvial Sondage ruissellemet Surverse mine

Socle granitique

92


LA DIGUE

La digue construite entre 1958 et 1962 avec des stériles de la mine à ciel ouvert, barre la vallée de la Besbre. La digue est un ouvrage filtrant d’une quarantaine de mètres de hauteur et de 450 m de long. Elle a permis le stockage d’environ 1 300 000 tonnes de résidus de traitement. Cela correspondant à la fraction rejetée après le traitement du minerai initial auquel s’ajoutent essentiellement des minéraux sulfatés et des hydroxydes métalliques liés aux différentes étapes de l’extraction de l’uranium. La digue est composée de six drains qui permettent son drainage.

Trois d’entre eux produisent l’essentiel du débit. On observe aussi sur le parement de la digue, la création de zones humides qui correspondent à des suintements. L’étude de l’Ecole des Mines de Paris fait un parallèle entre le débit de fuite du grand bassin et le débit moyen s’écoulant de la digue. Il y a confirmation d’une relation hydraulique entre ces deux composantes. Le drainage dirige les eaux vers le bassin de décantation. Les eaux issues de la digue sont associées aux eaux de surverse du grand bassin. Nommé drain

40, il passe sous la digue pour être lui aussi dirigé dans le bassin de décantation. Ces deux origines d’eaux polluées vont tout d’abord être dirigées dans le bassin dit de «prétraitement »

Digue

MCO

Localisation

Réseau piézométrique de la digue Zone saturée

P0

P1

P2

Grand bassin

Résidus de traitements

Zone humide

P3

Stériles MCO

93

P4


Le basssin de décantation Nous avons pu voir l’organisation du réseau hydraulique du site. L’ensemble des réseaux se rejoignent à la station de décantation pour subir un traitement chimique puis une étape de décantation avant d’être rejetés dans la Besbre. L’étude réalisée par l’Ecole des Mines de Paris, aboutie à l’hypothèse que les rejets importants de radium 226 dans la Besbre seraient dûs en partie au relargage progressif du radium initialement précipité dans les boues des bassins. Suite aux analyses de la CRIIRAD, celle-ci a détecté la présence du radon 222 dissous (95.2 Bq/l), du radium 226 insoluble (0.08 Bq/L), du radium 226 soluble (0.33Bq/l) et de l’uranium 238-thorium 234 (1.11 Bq/ L).

La CRIIRAD confirme « la présence de rejets significatifs en métaux lourds radioactifs émetteurs alpha à vie longue». Ce constat permet de comprendre que le traitement réalisé à la station de traitement n’est pas suffisant. La CRIIRAD a poursuivi ses relevés en aval du site ainsi qu’une dizaine de kilomètres plus bas au niveau du barrage hydroélectrique du barrage Saint- Vincent. A plusieurs centaine de mètres en aval du rejet des eaux « des terres de berges» montrent une contamination plus importante en uranium 238 (2400 Bq/kg) et radium 226 (4 500 Bq/Kg). Les relevés près du rejet enregistré par la CRIIRAD furent pour l’uranium 238 de 4 700 Bq/Kg et pour le radium 226 1 630 Bq Kg. L’analyse de plantes aquatiques montre une contamination en

Vue sur la station de traitement

uranium et en radium 226. Ces analyses nous permettent de comprendre que les radioéléments sont mobiles, que l’eau permet une diffusion à grande échelle de cette pollution «sensée» être cantonnée dans le périmètre de la mine. La CRIIRAD conclut : «ces données montrent que plus de 20 ans après la fermeture de la mine des Bois Noirs les questions de la collecte et du traitement des eaux minières ne sont toujours pas résolues». L’ensemble de ces informations pose la réelle question de l’impact sur l’environnement et les êtres humains. Car cela signifie contamination de l’ensemble de la vallée de la Besbre et contamination de la chaine alimentaire.

Vue sur la station de traitement depuis le haut de la digue. En arrière plan, le village de Saint-Priest-la-Prugne. Source A. Maussan

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Schéma du principe de récupération, de traitement et de rejet des eaux Surverse du grand bassin ( Drain 40 ) La digue et son réseau de drains

La digue Regroupement des eaux issues du drainage de la digue et surverse du grand bassin. Débit : 600 à 800L/mn

«Saut à ski » permettant à la Besbre de descendre le long du canal et de retrouver son cours naturel

Bassin de prétraitement

Injonction de Sulfate d’alumine + Chlorure de Baryum Eaux collectées depuis la MCO débit : 1000L/ mn

Injonction de soude

Bassin de décantation

Bassin d’aération

Rejet de l’eau dans le cours naturel de la Besbre

Le principe de traitement des eaux se fait en fonction de l’origine des eaux : + Les eaux du système de drainage de la digue et de la surverse du grand bassin : les eaux sont dirigées dans un premier bassin permettant la précipitation des hydroxydes de fer susceptibles de piéger le radium dissous. En cas de surverse du plan d’eau, un traitement complémentaire par injection de sulfate d’alumine et de chlorure de baryum est

réalisée; elles subissent par la suite une décantation. +Les eaux issues de la MCO: le pH de ces eaux est neutralisé par ajout de soude puis elles sont envoyées dans le bassin d’aération. Le bassin de décantation assure leur traitement final avant le rejet des eaux dans la Besbre.

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Le dons de stérile, étalement d’une pollution

Assainissement du parking du foyer de ski de fond

Assainissement d’une scierie

Analyses de la CRIIRAD; Source A. Maussan

Au problème de contamination de l’environnement liée à la mine, s’ajoute une autre composante au paysage. Durant l’époque de réaménagement du site, le gestionnaire a fait de «nombreux dons» de stériles aux habitants. Un témoin parle de son souvenir de ce geste quand il pense à la mine: «L’image que j’ai de ce lieu ce sont les dons de stériles pour bien se faire voir de la population» C’est ainsi que les particuliers se sont retrouvés avec des déchets radioactifs dans leurs allées, leurs parkings. Des chemins publics ont été aussi remblayés avec des stériles. Ce passage de l’histoire nous conduit à une autre dimension, à une autre échelle de l’’impact de la pollution. La pollution prend une autre ampleur, celle d’un problème qui n’est plus seulement qu’environnemental mais aussi sanitaire. Cette découverte a été faite lors d’une double étude réalisée entre 2001 et 2004, engagée l’une par Areva (et l’Ecole des Mines de Paris) la seconde menée par la CRIIRAD. Le constat est critique. La CRIIRAD révèle la possibilité d’une pollution des lieux publics. Chemins, routes, habitations... S’ensuit une longue étape de récolte d’informations chez les particuliers. 96

Cette démarche sera impulsée par le collectif Bois Noirs qui réalisera un inventaire des sites ayant reçus des stériles, ceci à l’aide de témoignages de particuliers. Cette découverte renforcera la peur, la crainte, le questionnement chez les locaux. Le regard sur le gestionnaire va changer à jamais. L’incompréhension d’un tel geste résonne comme une rumeur à travers la campagne. Suite à de nombreux relevés, études d’impact et à un reportage intitulé «la France contaminée» diffusé en 2009 sur France 3, la balance s’inverse. Le gouvernement prend conscience que le documentaire diffusé à la télévision suscite la peur des citoyens. Une circulaire est alors mise en œuvre, imposant à Areva de nouvelles directives quant à la gestion des sites, ordonnant des relevés héliportés pour en avoir les précises localisations des déchets. Areva a décidé par la suite de décontaminer certains terrains. Les déchets, issus de cette décontamination, ont été déposés dans la MCO. La carte ci-présente, est le résultat du relevé héliporté. Les traits en bleu indiquent la présence des déchets sur le territoire.


Carte de relevés héliportés d’Areva

Source : Collectif Bois Noirs N

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1979 : La campagne se réveille La fermeture de la mine correspond au moment de la création de l’ANDRA, quand cet organisme sort du CEA et devient indépendant, sous tutelle directe de l’État. La création de cet organisme va avoir un impact sur le site. L’ANDRA à l’époque possédait uniquement le site d’enfouissement de la Manche ( CMS ). L’ANDRA veut lancer le projet de créer un centre de stockage des déchets nucléaires dans l’ancienne mine qui à l’époque n’était pas encore arrêtée. Cette démarche a été présentée comme une reconversion du site (1979). La perspective de ce projet réveille la détermination de la population locale. Une forte opposition se déclenche. A l’époque chaque département possède son collectif, un pour l’Allier, un pour le Puy de Dôme et un pour la Loire, et la forme du Collectif des Bois Noirs. Plus tard, il n’y aura qu’un collectif regroupant tous les opposants. Il y a eu aussi une association qui regroupait les élus locaux. Toutes ces personnes témoignaient d’une forte mobilisation locale. Photos de manifestations contre la création d’un centre de stockage des déchets. Affiche et photographies, source Collectif Bois Noirs 98


C’est le début d’une prise de conscience, à plusieurs niveaux. D’abord l’impact des déchets sur le territoire et la vallée, mais aussi la problématique quant au stockage des déchets au sein de la Terre. Le regard sur la pollution qu’aura engendré une telle décision est un choc. Les collectifs et associations vont alors s’organiser s’informer et informer, manifester et générer des évènements. Ce dispositif local sera entendu, ce qui va alors permettre l’abandon du projet de l’ANDRA. Le collectif va alors ralentir son travail jusqu’au premier projet de réaménagement du site d’Areva. Se sera par la suite, le début de la collaboration étroite avec la CRIIRAD, Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité, qui possède son propre laboratoire d’analyse. 99


Promenade au coeur du théatre de l’invisible

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2 3 4

C’est maintenant à travers les perceptions physiques et sensibles que nous allons découvrir le site. Comment dialoguent les differentes entités qui composent le paysage.

Le l

ac

Panorama Promenade, axe structurant Entités

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5


Les barres

La butte de Saint-Priest 6 La citĂŠ

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1.

COL BEAU LOUIS PORTE DE LA MINE C’est en arrivant au col Beau Louis par la D945, que le paysage s’ouvre sur la vallée de la Besbre. Au point haut du col, on ne devine qu’une lointaine tache bleue. Les massifs forestiers l’encerclent. Les fenêtres le long de la route ne sont pas nombreuses. La végétation agit comme un masque. Un moyen de camouflage. Rien ne laisse paraître l’histoire de la mine. On devine à peine St Priest.

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2.

FACE AU LAC La route sinueuse nous conduit jusqu’à l’ouverture principale sur la mine, créant un effet de surprise. La beauté de cette pièce d’eau ne nous laisse pas entrevoir la possibilité d’un ancien site minier. Aucun panneaux n’expliquent pourquoi ce lac est inaccessible. Le grillage et le portail central en sont que plus intrigants. Un sentiment d’abandon en partie dû à sa végétation spontanée qui s’enlace dans le grillage. Pourtant certains jours, on peut voir un camion faire des allées retours. Le relief du massif des Bois Noirs crée un écrin autour du lac. La vallée porte le lac et ses déchets. Mais le visible n’est qu’eau paisible et végétation. Pourtant l’invisible qu’est la radioactivité est partout. Naturelle et artificielle, elle habite le territoire.

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«Ce qui est étrange, c'est que quelqu'un qui ne connait pas, trouve ce lac très beau. Il attend les voiliers et les baigneurs» Témoignage

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3.

Mise en scène

Depuis le viaduc des Peux, situé en plein centre de la vallée, on domine le paysage du lac. Les plans s’enchainent pour offrir un tableau remarquable. La végétation enlace, épouse le lac. La digue crée l’horizon et souligne le village de Saint-Priest-la-Prugne. On a le sentiment que le lac porte le village entier. De ce point de vue un sentiment de pureté et de paix se dégage du lieu. Pourtant toute l’ironie de l’invisible mortel nous échappe.

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4.

Le labyrinthe des Bois Noirs , le théatre Vert

Après avoir passé le viaduc des Peux, on a vraiment l’impression d’enfin pénétrer à l’intérieur du site. Pourtant le sentiment intérieur/extérieur s’exprime vraiment à l’accès principal. C’est un labyrinthe de chemins et anciennes routes goudronnées qui guident nos pas à travers l’abondante végétation de feuillus. La limite administrative du site est un vieux grillage qui a subi les aléas du temps, de la faune sauvage et de la végétation. Cette limite, facilement franchissable ne laisse rien paraitre, encore moins le risque que représente les déchets. On a le sentiment que toute l’organisation spatiale s’accroche autour du lac. On n’a aucune de vue d’ensemble du site, la perte de repères est facile, la forêt omniprésente nous offre des sensations différentes selon les saisons. Un grand carrefour de chemins forestiers relie le site à l’ensemble du Massif des Bois Noirs, créant des couloirs de communication. Une large esplanade s’ouvre à nous, c’est l’ancien terrain de la SIMO, raclé à blanc en 2006. La végétation pionnière, la roche affleurant nous entraîne à un sentiment lunaire.

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5.

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AU PIED DU MUR Au pied de la digue, au coeur de la forêt de charmes, la verse du Jot nous domine. Pourtant en découvrant le site, rien ne transparaît de l’implacable réalité. Ce n’est qu’en traversant les bois, qu’on peut accéder à la station de traitement.

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6.

UN MUR FACE À SAINT-PRIEST-LA-PRUGNE Face à Saint-Priest-la-Prugne, la digue ferme la vallée. Cet élément fort dans le paysage perturbe, intrigue, inquiète. La digue se présente à une altitude comparable à celle du village, donnant l’impression que mur et village sont au même niveau. Cette brutale fermeture, aujourd’hui disparait sous la végétation qui encercle l’ancienne mine.

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CONJONCTION DE L’INVISIBLE ET DE LA MÉMOIRE : UN PROJET DE PAYSAGE C’est à travers un regard croisé entre l’histoire du site et les problématiques actuelles que le projet de paysage va devoir se construire. La disparition brutale de l’exploitation, l’effacement physique des bâtiments, ont crée un traumatisme associé au risque invisible que font courir les déchets abandonnés sur le site, faisant planer l’ombre d’une menace sur la mémoire collective. La conscience de ce risque est une donnée de mémoire qui agit comme une douleur sur les populations et les paysages. Douleur qui semble ne recevoir ni de réponse ni de dénouement. Les populations et le paysage doivent rentrer dans une phase de mutation pour offrir une nouvelle mémoire en adéquation avec le paysage, l’environnement et les personnes qui l’habitent. Le paysage doit entrer dans une phase de transformation afin d’offrir aux populations une nouvelle mémoire en adéquation avec le passé des lieux. 115


Le réaménagement de la mine, un enjeu d’actualité Le site fait face à une situation politique partagée. D’un côté, le gestionnaire souhaite à tout prix mettre fin aux problèmes de gestion et arrêter d’avoir à intervenir sur le site. D’un autre côté, le gestionnaire du site souhaite clore le dossier et arrêter d’avoir à inter­venir sur le site alors que les acteurs du ter­ ritoire, le collectif des Bois Noirs souhaitent avoir la sé­curité d’une gestion du site sur le long terme pour assurer aux générations futures un avenir plus sûr. Cela pose la question de la pérennité des ouvrages, confrontée à la durée de vie des déchets présents. La situation se trouve en constante évolution. Areva a déposé en Décembre 2012 un nouveau dossier de réaménagement du site (DDAE) qui fut refusé une première fois par la DREAL. Après amélioration, un nouveau dépôt de dossier a été engagé en Décembre 2013, il est actuellement en instance de validation auprès de la DREAL. Entre temps, le Conseil National de Protection de la Nature (CNPN) a demandé à Areva une étude d’impact, concernant le projet de réaménagement du site. Le CNPN est une commis­ sion administrative en charge de la protection, de la res­tauration

de la diversité de la faune, de la flore sauvage ainsi que des habitats naturels. Elle a un rôle de conseil auprès de son ministre de tutelle. Parallèlement au dossier spécifique au CNPN, Areva a fait l’objet de relevés sur site par la DREAL et l’ASN en Août 2013. La DREAL a découvert un dys­ fonctionnement dû traitement chimique des eaux avant rejet, du à une panne perdurant depuis Juin 2012. Areva n’a pas informé la DREAL de ce défaut de fonctionnement du système de gestion des eaux. Lors de la Commission de Suivi de Site du 21 Janvier 2014, la DREAL a annoncé la nonconformité d’Areva quant à la Loi sur la non- transmission d’un incident survenu en Juin 2012. La DREAL a en conséquence procédé à une mise en demeure d’Areva le 14 Octobre 2013. Cet incident parmi d’autres, illustre le manque de transparence entre le gestionnaire et les auto­ rités publiques en charge du controle, entretenant un déficit de crédibilité sur la gestion du site par Areva vis a vis de la population locale. Il est donc nécessaire de comprendre le projet de réaménagement du site par Areva. Lors de la Commission de Sui116

vi de Site (CSS) du 21 Janvier 2014, Areva a présenté son nouveau projet de réaménagement. Areva a constitué un dossier de demande d’autorisation d’exploitation (DDAE) pour le réaménagement du site. Ce type de démarche est obligatoire pour les installations présentant des risques pour l’environnement et se trouve être soumis à une autorisation préfectorale. Le DDAE est un document public qui permet d’informer les riverains et les autorités. Le DDAE doit comporter entre autre une étude d’impact (comprenant une étude des risques sanitaires), une étude des dangers ainsi qu’une notice d’hygiène et de sécurité. Aujourd’hui le collectif Bois Noirs soutenu par la CRIIRAD et l’ASN pointe le manque de sérieux du dossier ainsi que les failles du projet d’Areva.


Rappel chronologique administratif du dépôt du DDAE 21/12/12

Dépôt officiel du DDAE et du dossier de défrichement.

01/13

Lancement de l’appel d’offre pour les études approfondies, avec un focus travaux.

22/04/13

Avis de non recevabilité.

04/13

Choix du bureau d’étude (groupement Meyzie/Génivar) et lacement des études approfondies.

09/13

Inspection de la DREAL et de l’ASN (contrôle de surveillance du site).

14/11/13

Mise en demeure d’Areva par Madame la Préfet de la Loire (induite par l’inspection réalisée par la DREAL et l’ASN).

11/ 13

Transfert du courrier du collectif Bois Noirs et de la FRAPNA.

17/12/13

Nouveau DDAE

01/14

Dépôt du dossier CNPN programmé

21/01/14

dépôt

du

Commission de Suivie de Sites

Article d’information sur la situation du projet de réhabilitation du site par Areva. La mobilisation locale contiue. Réalisé par le Collectif Bois Noirs, 117


Le projet de paysage selon Areva Areva présente le projet de réaménagement du site comme «un projet pérenne à long terme permettant de limiter notamment les contraintes liées à la surveillance de la digue et à l’entretien des ouvrages annexes» L’intention principale du projet est d’enlever la couverture liquide permettant l’isolation des déchets situés dans le grand bassin. Cela dans le but de créer une couverture solide et «pérenne». La construction de cette cou-

verture solide prendrait la forme d’un dôme ayant une pente allant de 2 à 5% permettant «le confinement» des déchets. Cependant le besoin en matériaux pour la création d’un tel dôme a été es­timé à 300.000m3. Dans la présentation du nouveau dossier (20/12/2013), Areva récupère les matériaux nécessaires au dôme par la création d’un nouveau tracé de la Besbre (situé en rive gauche) ainsi que par l’arasement d’une partie de la digue.

Plan masse du nouveau lit de la Besbre / du dôme

L’aménagement du nouveau lit de la Besbre est présentée comme un élément permettant une continuité écologique. Une étude hydro-morphologique ain­si qu’une modélisation hydrau­lique présentées dans le dossier concluent que la solution proposée d’une réduction des pentes du futur lit de la Besbre (10% de pentes proposées dans le précédant dossier) permettraient de les faire concorder avec les pentes naturelles.

Documents extraits du DDAE présentés lors de la CSS du 21 Janvier 2014, réalisée par Areva

Station de traitement des eaux de chantier Dérivation de la Besbre Dôme Arasement d’une partie de la digue

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La mise en oeuvre d’un tel projet nécessiterait d’aménager un linéaire de deux kilometres. La création du nouveau lit de la Besbre va permettre de dé­gager 1 million de m3 de déblais couvrant ainsi les besoins pour la création du dôme. La gestion des eaux de chantier sera réalisée grâce à l’aménagement dans le bassin annexe d’une nouvelle station de traitement. Il sera nécessaire de créer un premier bassin de décantation des eaux provenant

Plan masse du projet finalisé

du grand bassin avant l’ar­rivée dans la station de traitement proprement dite. L’ensemble des eaux issues de la MCO seront pompées pour être remontées dans cette nouvelle station. Le nouveau tracé de la Besbre nécessitera d’acquérir de nou­ velles parcelles au Nord du bas­ sin annexe et à l’Est de la digue. Préconisées par le CNPN, une étude d’impact sur l’environnement a été effectuée. Aujourd’hui le dossier a intégré les mesures du CNPN.

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Areva propose un phasage du chantier en 5 grandes étapes : - Mise en place du chantier / défrichement -Terrassement de la Besbre amont à la digue et mise en place de la couverture immergée - Assèchement de la lame d’eau par pompage -Terrassement de la Besbre amont et aval de la digue et mise en place de la couverture émergée - Aménagement final. La durée du projet est estimée à 7 ½ ans.


Entre volonté et réalité, tensions entre les acteurs Le projet d’Areva présente de nombreuses négligences. Certes une étude d’impact demandée par le CNPN a été réalisée, permettant d’assurer une continuité écologique quant à la dérivation du lit de la Besbre. Mais qu’en est-il de l’impact paysagé ? Social ? Sanitaire ? La disparition de la couche liquide remplacée par une couche solide sous forme de dôme végétalisé a un impact majeur dans la perception du paysage. C’est la perte d’un repère visuel qui existe depuis maintenant une cinquantaine d’années pour la population locale. Cette pièce d’eau est l’unique moyen de représentation qui reste de l’ancien site minier. La création de ce dôme marque entre autre une volonté d’effacement, d’oubli de la part du gestionnaire. La couche liquide a été présentée comme la solution la plus efficace depuis l’existence des déchets déposés «in situ». Est-ce que la couche solide présente la même isolation face aux émanations du radon (gaz) que génèrent les déchets ? La création d’une alvéole de stockage des boues de traitement sur le dôme présente un danger pour sa stabilité, cela ne peut être une solution sans risque sur le long terme. De plus, l’arasement de la digue présente un risque supplémen-

taire en cas de catastrophe naturelle. La modification du lit de la Besbre représente un ouvrage conséquent, cela entraîne la modification du paysage et des milieux. Le nouveau passage de la Besbre modifiera les possibilités de circulation autour du site sans parler des perturba­tions inhérentes au chantier lui-même. La question de gestion des eaux du site reste problématique. La station de traitement des eaux fait l’objet d’un dysfonctionnement sur le long et court terme, la qualité des rejets en aval du site a été signalée par la CRIIRAD. Malgré les aménagements proposés, la question de la gestion des eaux du site reste problématique. Les alertes lancées par la CRIIRAD auxquelles s’ajoutent le récent rapport de la DREAL font état de profonds dysfonctionnements de la station de traitement des eaux ainsi que de problèmes relatifs à la qualité des rejets en aval du site. Dans un rapport de Février 2013 ayant pour but de faire le point sur le dossier de réa­ ménagement de l’ancien site minier des Bois Noirs Limouzat de Saint-Priest-la-Prugne, l’ASN déclare : «…que l’objectif de la démarche est d’assurer la gestion des situations d’incompatibilités entre les usages des sites et la pré120

sence de stériles afin de ne plus avoir à y revenir ultérieurement. La doctrine de l’ASN consiste à faire assainir les sites de manière aussi poussée que possible. Pour le cas des stériles, elle ne fixera donc pas de seuils à partir desquels les stériles devront être retirés. Une réponse à Areva va être envoyée par l’ASN sur ce sujet. Une copie de ce courrier de l’ASN à Areva sera transmise à la CRIIRAD.» Cette prise de position franche de l’ASN face aux risques que représentent les stériles et résidus de traite­ment issus de l’exploitation tranche nettement avec le DDAE qui lui ne fait, par exemple même pas mention d’un périmètre de sécu­rité. Pourtant la dangerosité du périmètre actuel a été éclairement établi principalement dû à la facilité d’accès à l’intérieur du site qu’il permet. Le rapport fait l’impasse sur une stratégie claire de signalétique et d’information du grand public. En effet rien n’est prévu pour indiquer la présence de déchets dangereux ainsi que pour participer à la sé­curité de l’homme et de l’environnement. C’est à la suite de ce constat accablant que j’ai porté toute mon atten­tion sur ce site, comment faire perdurer la mémoire de l’invisible ? Aujourd’hui Areva présente une démarche totalement


réfractaire à la mémoire du site et à la mémoire du danger que représentent les déchets. Areva adopte un comportement qui va à l’encontre de l’autorité publique, à l’encontre du respect de l’environnement et des populations locales. Nous avons pu constater la difficulté de communication entre les différents acteurs. Bien des moyens humains et finan­ciers importants ont été mis à disposition du site, en revanche Areva cherche à occulter tout forme de débat. Il est claire que le débat est fermé de la part d’Areva. Il est absolument nécessaire de mettre en lumière le danger que représente l’entreposage de déchets radioactifs en amont de la vallée de la Besbre. Il est incontestable que la vallée et les éléments qui la composent sont impactés par la pollution radioactive. Par ailleurs, la région étant rurale et agricole, la question sur la contamination de la chaine alimentaire en découle sans ambiguïté. Les nombreuses ana­lyses qui ont été réalisées, ont démontré la réalité de cette pollu­tion et la nécessité d’une action rapide pour y faire face. Il ne s’agit plus seulement d’une crainte d’un corps social local mais d’une menace objective.

QUE REPRÉSENTE LA RADIOACTIVITÉ CHEZ LA POPULATION LOCALE ?

«La présence sournoise de la radioactivité engendre toujours un malaise..» «La radioactivité NE SE VOIT PAS, elle NE SE SENT PAS mais nous savons que même les faibles doses ont des effets. Il n'y a pas longtemps, j'entendais la veuve d'un mineur (son mari est mort d'un cancer du poumon) qui disait que LES MALADIES PROFESSIONNELLES DUES AU RADON NE SONT PAS RECONNUES. Dans le combat du collectif, nous utilisons aussi des appareils de mesure qui donnent des mesures exactes. Dans les années 1980 nous passions pour des « rigolos », aujourd'hui, nous sommes un peu plus reconnus, vous avez pu vous en rendre compte, quand la CRIIRAD ou Arlette donnent des mesures, il arrive que l'Administration les prennent en compte et AREVA ne peut pas toujours contredire ces mesures.»

« COMMENT NE PAS EN AVOIR UNE REPRÉSENTATION PLUTÔT TERRIFIANTE, car je connais l'effet des rayonnements, l’effet de l'ingestion de particules radioactives, j’en ai vu des photos. Mais je peux aussi comprendre ceux qui voudraient laisser le site en l'état, la radioactivité ne se voit pas, ne se sent pas, les 30 m de pulpe sont si bien cachés sous leurs couches d’oubli...»

«Le cancer.»

«la radioactivité représente pour moi : - la dégradation du corps humain, les dégénérescences sur plusieurs générations - l'abandon total autour des sites tel que Tchernobyl ou Fukushima - et surtout cela représente pour moi les hommes en train de faire les apprentis sorciers en exploitant une source d'énergie dont on connait les dangers depuis sa découverte...» Sources : Témoignages de la population locale 121


Scénarii et perspectives d’avenir Face à la nécessité de réaménager le site trois grands scénarii se dessinent.

AVANTAGES

INCONVÉNIENTS

Projet Areva

- la couverture solide réduirait les problèmes d’impact hydraulique - suppression de la canalisation de la Besbre, création d’un nouveau lit en accord avec le CNPN

- aucune gestion des déchets dans leur globalité - obligation de conserver les déchets in situ - aucune certitude d’une meilleure gestion hydraulique - aucune approche sur la mémoire et la sécurité du public - objectif d’oubli du site dans les consciences et la mémoire - aucune garantie d’un site propre

Conserver le site

- offre plus de temps pour trouver une solution définitive. - conservation d’un repère visuel - isolation du radon par la couche liquide

- diffusion de la pollution sur l’ensemble de la vallée - aucune gestion des déchets dans leur globalité - gestion hydraulique quasi inexistante - aucune notion de sécurité du public

Assainir le site

- gestion des déchets dans leur globalité dans un site spécialisé au stockage de déchets radioactifs - redécouverte de la vallée de la Besbre - restitution d’un milieu avec de meilleures qualités environnementales - garantie d’une gestion à long terme et une sécurité sanitaire.

- trouver un site pour le stockage des déchets - coût conséquent - nouvelle cicatrice dans le paysage / impact visuel majeur - mise en place d’une gestion de chantier complexe

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IMPACTS PAYSAGERS Le projet proposé par Areva est conséquent, la modification du lit de la Besbre, la création d’un dôme, l’arasement de la digue, la création d’une nouvelle station de traitement des eaux, ainsi que toute la mise en place d’un chantier respectant des normes sanitaires sur 7 ans. L’ensemble du projet va apporter un changement de perception depuis le village de Saint-Priest-la-Prugne et ses alentours. Un monticule artificiel va se poser sur le barrage. Le site sera entièrement artificiel. Pourtant la prise de partie est l’intégration totale de l’ensemble du projet dans son contexte. Le théâtre de l’invisible sera d’autant plus véritable. L’impact paysager et environnemental est ignoré, la mémoire du site est inexistante. Cette approche est en net contraste avec la politique actuelle de la région visant à favoriser le tourisme vert et la valorisation des espaces naturels. Bien que situé au pied du PNR Livradois-Forez qui valorise la qualité et la beauté des paysages de la région, le projet de réaménagement du site ne porte pas un regard sensible sur les valeurs que présentent ce territoire et sa population. La prise de partie de conserver le site en l’état serait faire preuve d’ignorance et d’une tolérance irresponsable en regard de l’impact de la pollution déjà existante. L’impact paysager est aujourd’hui réduit par la présence d’une abondante végétation créant le théâtre de l’invisible, la pièce d’eau rappelle la présence de la mine et des déchets. La mémoire d’un risque quotidien pour les riverains. Il serait pourtant possible de créer un projet de paysage donnant à voir l’ensemble du site depuis un périmètre de sécurité. Cependant le présent diagnostic montre la gestion problématique du site et le rejet d’une pollution difficilement contrôlable. Le regard des autorités publiques telles que l’ASN, l’IRSN ainsi que le Ministère de l’Environnement, la réglementation ICPE, des laboratoires indépendants permettent de conclure à l’impossibilité de conserver le site en l’état. Laisser le site en état serait faire preuve de non-respect de la Loi sans parler d’immoralité. Ce scénario ne présente pas de valorisation du contexte actuel et ne répond pas aux enjeux du site.

Le dernier scénario présente la possibilité d’une gestion au long terme du site. L’impact paysager serait conséquent, cela signifie qu’il y aurait restitution de la vallée, nettoyée des déchets qu’elle accueille depuis maintenant 60 ans. Cette perspective permettrait de répondre aux problèmes de pollution à la sortie du site. Les possibilités de projet de restitution d’une vallée à son territoire, tout en faisant perdurer la mémoire de l’époque industrielle serait un atout majeur de valorisation locale mais aussi une vitrine pour le gestionnaire du site. Cela serait faire preuve de responsabilité et d’une véritable prise de conscience sur l’impact sanitaire et environnemental que présentent ces déchets. Ce scénario répondrait aux attentes des autorités publiques, aux attentes des populations locales, cela présenterait un geste fort en faveur de l’environnement 123


Délocalisation des déchets pour un confinement spécifique Les trois options proposées doivent conduire à un choix, à une prise de partie pour l’avenir du site. Le scénario sélectionné est celui d’un site qui doit être décontaminé. Ce choix résulte de l’analyse de l’histoire du site, des problématiques liées à la radioactivité mais aussi du regard que portent les politiques publiques sur le sujet. C’est en croisant l’ensemble des données collectées durant ces derniers mois que mon regard sur l’avenir du territoire me semble aujourd’hui positif et évident. Le paysagiste doit prendre des décisions tel un médiateur en faveur du paysage, avec un regard global sur l’ensemble des composantes de ce territoire. Cette option nécessite une considération sur les possibilités de dépollution d’un site contaminé. Il est important dans un premier temps d’expliquer qu’il s’agit de déplacer les déchets dans un site de stockage adapté à la typicité du polluant. Il n’y pas de solution miracle aux problèmes générés par la radioactivité. Le processus que je me propose à présenter, s’appuie sur les

données publiques présentées par l’ASN. L’ASN explique qu’incontestablement le responsable de cette pollution est avant tout l’exploitant de l’activité qui a généré ces déchets. S’applique dès lors la politique du «pollueur-payeur» (définie dans le code de l’environnement). L’ASN prescrit à l’exploitant : « d’assurer le financement des opérations d’assainissement et de réaménagement du site pollué, jusqu’à l’élimination des déchets et la mise en œuvre des dispositions éventuellement prescrites par l’autorité administrative». C’est seulement à partir de là que peut s’engager un diagnostic permettant d’évaluer de manière précise la pollution, les objectifs d’assainissement, l’évaluation du coût des différentes solutions, l’appréciation sur la robustesse et la pérennité de ces solutions. Au Bois Noirs Limouzat, le nombre de diagnostics se multiplient. Les faits présentés ont été exposés et les solutions proposées par le gestionnaire montrent des faiblesses au regard du long terme que constituent les déchets de longue vie. S’ensuit alors une phase 124

d’admissibilité au regard des autorités. Ce travail s’effectue en accord avec l’exploitant par l’ASN, l’IRSN ci-mentionné par l’ASN et la préfecture. Présentation de la démarche de référence de l’ASN pour un assainissement complet : A la suite du diagnostic, plusieurs options de gestion future du site sont définies. Il y a donc des scénarios d’usages plus pénalisants que d’autres, qui donneraient lieu à des résultats d’exposition radiologique plus ou moins importants, aussi à prendre en compte dans les contraintes d’assainissement. Selon la typologie du site à assainir, différentes méthodes sont mises en place. Si les déchets sont enfouis sous une couche de terre propre, il est donc nécessaire dans une première étape de les excaver. Cela peut s’appliquer dans le cas de la Mine à Ciel Ouvert, ou celui de la verse du Jot ainsi que dans tous les sites privés répertoriés. La particularité du grand bassin est la présence d’une couche liquide qui recouvre les déchets. Il est donc nécessaire d’adapter


l’assainissement en fonction de l’élément présent. La couche liquide d’isolation est aussi contaminée et nécessite donc une gestion d’assainissement spécifique. Durant l’opération de décapage, un contrôle radiologique systématique est réalisé tous les 50 cm de terre excavée. Cette opération est réalisée à l’aide d’un contrôleur radiologique tout terrain. Arrivé au niveau d’excavation désiré, s’ensuit la phase d’investigation par des forages permettant d’identifier de manière très précise, la nature des polluants, leurs intensités ainsi que leurs répartitions spatiales (en surface et profondeur). C’est ce qui s’appelle la caractérisation des boues, de façon à connaitre les radionucléides présents par un système de diagraphie. Une sonde descend dans les forages permettant ainsi de réaliser les mesures afin de définir la typologie des boues par la réalisation d’analyses radiologiques et chimiques. Cette technique permet d’optimiser les filières de gestion d’assainissement et de stockage des déchets. En fonction des résultats d’analyses obtenues l’ASN exprime

ses conclusions de gestion d’assainissement. A la suite de la réponse, si l’ASN valide l’assainissement du site, le processus de chantier peut commencer. L’excavation des boues va se faire avec une entreprise spécialisée à de la gestion d’assainissement de sites radioactifs. Les déchets récupérés vont être stockés dans des containers adaptés. Cette étape se réalise en partenariat avec l’ANDRA qui, elle, va s’occuper du contrôle de chacun des containers. Puis les déchets vont être transportés jusqu’à un centre de stockage dédié au confinement de déchets radioactifs de l’ANDRA. L’assainissement une fois fini, l’ASN réalise un contrôle permettant de valider la décontamination complète du site. Ceci est la démarche de référence souhaitée par l’ASN, cependant elle a un coût. Elle présente l’avantage de ne plus avoir en principe besoin d’intervention dans le futur. Cette technique permet d’avoir réalisé une gestion dite à long terme des déchets.

125

La démarche ainsi proposée permettrait à l’exploitant la fermeture définitive du site et de ne plus avoir à y intervenir sur le long terme. Le site propre pourrait alors être rétrocédé à la commune. La proposition de l’assainissement de la vallée, s’inscrit dans une démarche de valorisation globale de tout un bassin versant. Cette option n’est pas à négligée. Les nombreux investissements financiers d’Areva depuis la fermeture du site et le futur budget de réaménagement témoignent d’un investissement financier conséquent. L’usage de l’argent investi à la complète solution d’assainissement du site serait un élément de valorisation de l’image du gestionnaire. Cela présente un enjeu de marque pour Areva, qui cite sur le site internet du groupe, vouloir: «Figurer parmi les leaders dans le domaine de la sécurité, de l’environnement et la responsabilité sociétale». Ces enjeux, présentés au grand public ne corrèlent pas avec la maintenance présentée pour le cas du site des Bois Noirs Limouzat.


Stratégie pour la mise en mémoire La valorisation du site, c’est comprendre son histoire et c’est permettre de lui offrir une nouvelle vie dans la mémoire collective. Ma stratégie de remise en mémoire va s’effectuer durant l’accompagnement de l’assainissement du site. Cela va amener à l’apparition d’un nouveau socle, celui de la roche mère. Une cicatrice, une plaie qu’il va falloir panser pour dans un second temps l restituer. La mémoire du site acquise par les personnes qui habitent ce territoire est associée à plusieurs étapes de l’histoire. La première est celle du début de l’exploitation, le développement économique, d’une nouvelle vie insufflée par la puissance de l’uranium, la puissance de la terre. Dans une seconde phase, la fermeture brutale du site d’exploitation. Une énergie se consume jusqu’à s’éteindre. Le territoire entre dans une forme de dormance. Puis commence les différentes phases de lutte entre le territoire, sa population et le gestionnaire de l’exploitation. Cette mémoire collective est associée à la mémoire physique du territoire, des paysages et des modifications qu’il a subit et l’empreinte laissée par l’in-

dustrie minière du temps de son activité. Mon travail se positionne à une étape de création d’un nouveau souvenir, d’une nouvelle mémoire. Accompagner la modification et la restitution du territoire. Il est important que le travail de conception du projet prenne conscience de ces différentes phases de mémoire construites durant presque six décennies, qu’ainsi le paysage soit l’élément porteur d’une nouvelle mémoire.

L’expression qui va permettre d’associer l’ensemble de ces éléments va être le projet de paysage. Un phasage devient obligatoire pour accompagner l’évolution du site. Dans un premier temps, il s’agit de nettoyer le site. Cette étape cruciale dans le processus de projet doit se faire en accord et avec les compétences techniques de l’ASN, l’IRSN, l’ANDRA et d’Areva.

Délocalisation des déchets pour une gestion appropriée

Paris

Saint-Priest la Prugne

Les déchets de type TFA sont dirigés vers le centre de stockage de Morvilliers. 0m

200

N

126

Morvilliers

Lyon


Localisation des sites à nettoyer dans l’objectif de recomposer la vallée Stockage principale : ancien site d’exploitation Diffusion de la pollution dans la Vallée de la Besbre Déchets répertoriés sur l’enseble du territoire

La Prugne

Symbole représentant les sites ayant des déchets radioactifs

Lavoine

Saint-Priest-la-Prugne

N

Centre de stockage de Morvilliers, source Andra 127

0 km

1

L’ensemble du territoire doit faire l’objet d’un nettoyage complet des déchets entreposés, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du site d’exploitation. Ces déchets doivent être confinés dans un lieu de stockage approprié. Ils ne doivent pas être en contact avec l’environnement et les populations car cela présente un grave risque de contamination, malheureusement déjà existant.

2


Lavoine Le Vernois

Callinon

128 N


Mise en tension du noyau minier avec le grand territoire La Prugne

1/ La vallée de la Besbre, fil conducteur de la revalorisation d’un territoire pollué Cet enjeu englobe trois échelles: La vallée, le site minier et l’ensemble des remblais dispersés sur le territoire. C’est à partir d’un territoire décontaminé que le projet de paysage peut s’installer.

2/ La mine, support d’un processus de mutation du territoire Pour permettre la formation d’une nouvelle mémoire collective, il va falloir accompagner la modification du paysage dans le processus lent d’assainissement de l’ancien site minier. Faire rayonner la mine dans son territoire par des outils de valorisation et de communication.

3/ Reconsidération des articulations entre mine, village et territoire Les relations de Saint-Priest-la-Prugne avec la mine doivent se faire de manière franche et identitaire pour faciliter une lecture d’ensemble. Repenser les relations grâce au projet de paysage permettrait de faire perdurer la mémoire et de la guider en vue d’une nouvelle lecture du territoire. Ouvrir les entités qui composent le territoire entre elles pour créer une logique de co-visibilité, d’intégration de la mine dans son contexte.

Saint-Priest-la-Prugne

4/ Saint-Priest-la-Prugne : ancienne cité minière Intégrer le patrimoine minier dans la réflexion globale à l’échelle du territoire. Faire de la contrainte une force de représentation et d’intégration.

0m

100

129 500

N


1/ La vallée de la Besbre, fil conducteur de la revalorisation d’un territoire pollué Evacuer les risques sanitaires et environnementaux T +1 Assainissement

Périmètre d’intervention

T+ 2

T +3

Assainir le site va être un processus lent qui nécessite un phasage. Le projet de paysage va permettre d’accompagner la mutation de la vallée tout au long du processus d’assainissement. Définir des périmètres de sécuAssainissement rité selon l’avancement de l’assainissement. Plus l’intervention de projet se resserre sur le périmètre de Périmètre d’intervention l’ancienne exploitation, plus le site est dépollué. L’explication de la démarche pourra se faire sur des supports de communication le long de parcours temporaires établis en fonction du phasage. Cette démarche permet de garantir un niveau de sécurité tout Assainissement en accompagnant l’évolution de décontamination à travers le paysage. Périmètre d’intervention Elaborer aussi un accompagnement de la population locale à la redécouverte de la vallée de la Besbre. 130


2/ La mine support d’un processus de mutation du territoire Révéler l’empreinte de la mine : établir de nouveaux repères physiques et mentaux dans le paysage T +1 Assainissement

Perception de l’empreinte

T+ 2 Assainissement

Perception de l’empreinte

T +3 Assainissement Perception de l’empreinte

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Face à la politique de l’effacement établie par Areva, la prise de partie de révéler l’empreinte de la mine s’applique dans le processus de mutation de la vallée et de créer une nouvelle mémoire du site. L’assainissement va générer la disparition de repères visuels forts tels que le barrage et le grand bassin. Une opération qui produirait du vide, une cicatrice. Les empreintes générées par la mine pourraient être supports de mutation de la vallée. Les éléments forts de l’ancienne activité minière pourraient devenir des fils conducteur d’un réaménagement en accord avec l’environnement existant. Une fois assainie, signifier l’emprise de la mine, le barrage, le bassin dans l’aménagement de la vallée.


3/ Reconsidération des articulations entre mine, village et territoire Restructuration de la vallée autour de l’ancien noyau minier

La Prugne

Lavoine Le Vernois

Calinon

Saint-Priest-la-Prugne

Bois Noirs Limouzat l’empreinte de la mine, noyau fédérateur des entités

Points d’accroches à travailler

Couloir majeur d’intervention Villages, hameaux à faire interagire avec la mine 0 Km

1

Relier la mine, la vallée et Saint-Priest à travers un axe principal

N

132

GR à connecter avec le nouveau réseau de parcours Tisser autour de l’axe routier Mise en valeur d’un tracé de découverte du territoire Panorama à aménager


La mine va être un levier de restructuration à l’échelle de la vallée. Pour redonner vie au site, il va falloir tisser avec les éléments qui composent le territoire pour lui donner une unité générale. Relier les composantes existantes telles que les GR qui contournent le site, les chemins forestiers, les hameaux et villages. Créer un parcours de redécouverte de la vallée en l’intégrant au tissu existant.

4/ Saint-Priest-la-Prugne: ancienne cité minière Valoriser le passer minier à l’échelle du village Saint-Priest-la-Prugne possède encore le patrimoine minier qui servait durant l’époque d’exploitation. Aujourd’hui c’est bien le seul témoin physique de cette activité. Valoriser ce patrimoine en l’intégrant dans la réflexion globale à l’échelle de la vallée. La situation géographique fait de Saint-Priest-la-Prugne un promontoire sur l’ensemble de la vallée.

Il est donc important de bâtir des belvédères, de restructurer le village en une unité tournée vers sa vallée. Relier la partie Nord à la partie Sud permettrait d’intégrer la cité Tardy dans l’ensemble urbain. Aussi un travail sur la frange urbaine favoriserait la connexion du bourg au nouveaux parcours de découvertes de la vallée.

Cité Brunet

Axe porteur de la restructuration du village Tourner le village sur sa vallée et aux nouveaux tissus d’échanges

Cité Tardy

Unifier la partie Nord à la partie Sud : intégrer la cité Tardy au village Belvédère sur la vallée et les massifs qui l’encerclent Travailler la franche urbaine comme un belvédère sur la vallée

Saint-Priest-la-Prugne

Intégrer les cités dans le paysage urbain Connection entre le Belvédère et la cité

133

0m

500

N


OUVERTURE L’avenir de la vallée de la Besbre est à un tournant crucial de son histoire. Sujet d’actualité fort, l’intention de requalification de la vallée de la Besbre s’inscrit dans une démarche globale de valorisa­tion du patrimoine naturel, source de vie pour les hommes. La future mutation du site devrait être l’opportunité de proposer une gestion durable, établie en rapport avec la pollution qui habite la val­ lée, l’histoire et le paysage. La proposition d’une gestion adaptée au site des Bois Noirs Limouzat pourrait marquer le début d’un nouveau regard sur la filière d’extrac­ tion d’uranium et de la gestion des sites après fermeture. C’est avec un regard sur l’avenir qu’il faut envisager et accompagner la mutation du site. Ce projet ne pourra se faire sans l’intime conviction d’une évolution possible de la part de l’ensemble des acteurs qui interviennent sur le site. Le projet de paysage devrait se présenter comme un outil fédéra­ teur d’une volonté commune, celle d’un territoire salubre. Il semble temps de tourner la page de l’histoire du site, pour laisser place à l’écriture d’un nouveau paysage, celui d’une vallée cicatrisée de son passé. Le travail de mémoire se dénoue, laissant place à l’écriture d’un projet qui devra réinventer la vallée, l’eau qui en ruisselle, le regarder portée sur elle, enfin la découvrir à nouveau.

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«Ne pouvons nous pas alors supposer, à notre tour, qu’un jardin in situ puisse être à la fois l’incarnation et le support d’un exercice de la mémoire ?» NYS Philippe

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BIBLIOGRAPHIE INVISIBLE Film TARKOVSKI Andrei, Stalker, 1979, Russie Reportage AMARA Emmanuel et ICARD Romain « Mines d’uranium: le scandale de la France contaminée », 2009 BIAMONTI Frédéric, «Nucléaire, l’éxception française», 2013

Mine / Uranium Livres GUIOLLARD Pierre-Christian, L’Uranium du Morvan et du Forez, 2002, Auteur-Editeur Pierre-Christian Guillard GUIOLLARD Pierre-Christian, Conservation et Valorisation du patrimoine minier contemporain, 2005, Auteur-Editeur Pierre-Christian Guillard GUIOLLARD Pierre-Christian et MILVILLE, L’Uranium de deux ‘Privés’, 2003, Auteur-Editeur Pierre-Christian Guillard

Acteurs du nucléaire www.cea.fr / www.areva.com / www.asn.fr / www.irsn.fr / www.andra.fr

Territoire Dossiers AREVA concultablent à la mairie de Saint-Priest la Prugne, Livre BOUILLIER Robert, le Pays roannais 1900-1920, Mémoire d’hier, 2007, Edition De Borée PIÉCHAUD Hélène, Texte d’archives, Promenades en Montagne Bourbonnaise, Dans les pas d’un ancien de chez Pion, 200e, Edition Foyer du Montoncel Lavoine Journal local Syndicat Mixte des Monts de la Madeleine, Les Monts de la Madeleine, 2011/2013, Edition Syndicat Mixte des Monts de la Madeleine, numéro 4,6,8 Rapports ( PDF ) T. LEPROUST, V. BRUNET VINCK et B. MEASSON Mission d’assistance pour l’élaboration d’une charte paysagère « Roannais Pays de Rhône Alpes» 2007, Phase A. et B. SYEPAR et ALGOE, PADD et SCOT Roannais, 2012 136


Article COHAS Jérôme, «Un projet à l’étude pour réhabiliter le site de la mine d’uranium», Le Progrès, nov 2013 Archives du Collectif Bois Noirs. Site internet www.montagne-bourbonnaise-auvergne.com

Expertises/ Analyses/ Edudes Rapports GUILLAUMONT Robert, Rapport GEP, mission complémentaire du groupe d’expertise pluraliste sur les sites miniers d’uranium, Nov 2013 COMBES Pierre et SCHMITT Jean-Michel, Société AREVA NC, Etude hydrogéologique et géochimique du site minier des Bois Noirs, Juillet 2006, Edit Ecole des mines de Paris Rapports ( PDF ) AREVA Projet de réaménagement du site- Bois Noirs du Limouzat, janv 2014 AREVA recencemment des stériles miniers en France, bilan et perspective, nov 2013, CSS Forez CRIIRAD, Bilan radiologique du site BNL, 2003

Radioactivité Livre TUBIABIANA Maurice et DAUTRAY Robert, Que sais-je ? La Radioactivité et ses Applications,1996, Presse Universitaire de France, RADVANYI Pierre, Ques sais-je ? Les rayonnements nucléaires, sept 1995, Presse universitaires de France Société Française de Radioprotection SFRP, La radioactivité naturelle en 10 épisodes ,CLAIRE-SOLEIL NEW imprimerie Site internet www.connaissancedesenergies.org/ http://www.mesure-radioactivite.fr

Témoignages et entretiens Entretien avec Madame le maire Hugette Burelier. Entretien avec le Collectif Bois Noirs et Arlette Maussan, Témoignage : Michel Renard, Gérard Batisse, François Savatier, Georges Duray, Charles-Henri Vigouroux Jacques et Odette Troncy, Bernard Blethon, Gérard Savatier, Herver Cloux

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Sociologie du risque

Livre CHATEAURAYNAUD Francis et TORNY Didier, Les sombres précurseurs : une sociologie pragmatique de l’alerte et du risque, 1999, Editions de l’EHESS,

Déchets radioactifs Rapports ( PDF ) Ministère de l’écologie, du Développement durable et de l’énergie et l’ASN, Plan national de gestion des déchets radioactifs 2013-2015 Ministère de l’écologie, du Développement durable et de l’énergie, IRSN et l’ASN Gestion des sites potentiellement pollués par des substances radioactives, 2011

Sites pollués Internet www.irsn.fr, Base de donnée MIMAUSA www.developpement-durable.gouv.fr http://carmen.application.developpement-durable.gouv.fr http://basol.developpement-durable.gouv.fr

Nucléaire Emissions radios Terre à terre « exploitation des mines d’uranium de Falela au Mali», «Tours de france des installations nucléaire»

Réseau hydrographique :

Rapport contrat territorial du bassin versant de la Besbre amont, Oct 2013 Internet http://sivom.vallee.besbre.free.fr/

Mémoire

Livres sous la direction de MOSSER Monique et NYS Philippe, Le jardin art et lieu de mémoire, 1996, Edition de l’imprimeur NORAT Pierre, Les lieux de mémoire, tome 3, 1997, Edition Quarto Gallimard SCHAMA Simon, Le paysage et la mémoire, 1999, Edition SEUIL Internet www.novethic.fr/novethic/planete/environnement/dechets/memoire-dechets-nucleaires/117533.jsp

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REMERCIEMENTS Je remercie mes professeurs encadrants, Mr Grégory Tissot et Mr Christophe Degruelle pour m’avoir accompagnée durant cette dernière année. Je remercie Mr Dominique Boutin de m’avoir soutenu dans le travail complexe de l’invisible des déchets radioactifs. Merci à Arlette, à sa générositée, merci à l’ensemble du Collectif Bois Noirs et aux habitants qui ont pris le temps de témoigner leurs histoires et leurs perceptions. Merci à mes «pacholes» Cécé et Caca, à Tutur, Brubru, Roro et à tous les copains. Enfin un grand merci à Pierre, à ma Maman Moustache, et à mon frère Cylou pour leurs soutien.

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C'est à la limite Ouest du département de la Loire, de l'Allier et du Puy de Dôme, que se trouve la commune de SaintPriest-la-Prugne . Situé dans la région Roannaise, Saint- Priest-la-Prugne est dominé par le massif des Bois Noirs à l'Ouest et la forêt domaniale d'Assise à l'Est. Nous sommes au sein du pays D’Urfé. C'est en surplomb de la vallée de la Besbre, au milieu d’un tissu bocager que le village s’est construit. La Besbre prend sa source au cœur du massif des Bois Noirs, en amont du village, pour finir sa trajectoire dans la Loire. Remarquable paysage de haute montagne, Saint-Priestla-Prugne au premier coup d’œil ne laisse percevoir que son apparent calme et sa beauté manifeste. L'histoire de Saint-Priestla Prugne se trouve étroitement liée à 210 autres sites en France. Qu'ont-ils tous en commun ? La présence de gisements d'uranium dans leurs sols. Ce «simple» minerai a joué

Tel: +33 (0)2 54 78 37 00 Fax: +33(0)2 54 78 40 79

un rôle primordial dans la stratégie énergétique prise à partir de la seconde moitié du XXe siècle. C'est dans un contexte montagnard que cette petite commune s’est cependant rapidement développée au début des années 1950, par la mise en exploitation de son gisement d'uranium. La présence de la mine a ainsi favorisé l'accroissement de la population grâce à la création de centaines d'emplois. Ainsi pendant 20 ans de nouvelles infrastructures publiques ont été créés. Aujourd'hui l'activité a disparu, il ne reste plus que ces aménagements collectifs, témoins d'une époque révolue. Mais la mine n'a pas eu pour seule conséquence de voir le village s'agrandir, elle a aussi largement modelé le paysage. L'exploitation minière a modifié le lit de la Besbre par la création d'un barrage artificiel. Lors de la réhabilitation du site, l'exploitant COGEMA a dû faire disparaître la mine à ciel ouvert. Dans les années 1980 la mine

a été comblée, entre autre avec des résidus de traitements issus de l'extraction de l'uranium. Malheureusement l'influence de l'exploitant ne se limite pas à l'emprise de la mine. C'est tout un territoire qui se retrouve contaminé, à cause de nombreux dons de remblais pollués à la commune. Dès lors une pollution invisible a peu à peu envahi le pays. Les clôtures de la COGEMA ne pouvant suffire à empêcher la contamination de l'environnement «extérieur», incognito l’invisible risque s’infiltre dans le paysage en se jouant bien des limites administratives. Le démarrage puis la fin de l'exploitation des gisements d’uranium ont généré de nombreux changements sur l'ensemble des paysages de la commune. Comment peut-on faire perdurer la mémoire de la mine, la pollution invisible engendrée, tout en l'inscrivant dans une réflexion à l'échelle du territoire de St Priest la Prugne ?

École Nationale Supérieur de la Nature et du Paysage, 9 rue de la Chocolatrie cs 2902- 41000 Blois / ensnp@ensnp.fr


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