Pour une pastorale des jeunes dans le Diocèse de Limoges 1
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PLAN D’ENSEMBLE
Introduction Une pastorale des jeunes pour qui ? Constater Une pastorale des jeunes pour quoi ? « Être quelqu’un pour quelqu’un » « Refaire du christianisme une séduction pour vivre » Des points d’attention pour les instances existantes Éveiller les jeunes au goût de Jésus-Christ Proposer la carte du goût « la pastorale de l’autobus » convictions questions Pistes Conclusion
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Introduction Il ne s’agit dans ces notes que de dégager quelques idées fortes pour une pastorale des jeunes dans le diocèse en s’appuyant à la fois sur ce qui existe déjà et de placer ici où là quelques balises pour faire naître un espace adapté pour et par les jeunes. Quelques options fortes auxquelles je crois, viennent étayées le contenu du projet, en sachant pertinemment qu’il faudra « donner du temps au temps », écouter les différents partenaires qui accepteront de prendre place autour de ce défi pour notre diocèse : comment aider les jeunes à être à l’aise, chez eux dans cette église de Limoges afin qu’ils dépassent l’image institutionnelle pour découvrir une communauté qui vit, qui prie, qui chante, qui débat, qui construit. Je me suis appuyé sur le « Document Épiscopat » de mars 2001 : « Quels chemins nouveaux pour proposer la foi aux jeunes » de Yvette Chabert, théologienne lyonnaise, pour tenter une première évaluation sur ce qui touche les jeunes en 2001 dans le diocèse de Limoges.
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Une pastorale des jeunes pour qui ? Quand on parle de « pastorale de jeunes » pour un diocèse, il faut avant tout savoir à quels jeunes on s’adresse. Dans le diocèse de Limoges : on peut définir 4 groupes : des collégiens (11-14) des lycéens (enseignement général et technique) (15-17) des étudiants (18-25) des jeunes professionnels (18-25) divers lieux de vie : mouvements : Scoutisme, M.E.J., F.S.C.F., A.C.E., J.O.C., M.R.J.C., … services : A.E.P., Enseignement catholique, Mission étudiante, … paroisses groupes informels électrons libres Dans le diocèse on peut lister ainsi les lieux ecclésiaux où se retrouvent les jeunes : (Les chiffres sont approximatifs) Monde scolaire L’Aumônerie de l’Enseignement Public (enseignements généraux, techniques et professionnels) avec 38 aumôneries animées par 280 à 300 animateurs et qui regroupent 2000 jeunes environ dont 300 lycéens. Dans ces 2000 jeunes, il faut comptabiliser ceux qui ne font que passer, qui ouvrent la porte quelques fois dans l’année. L’enseignement catholique : 1700 collégiens (1560 en Haute 6
-Vienne et 140 en Creuse) dans les établissements du diocèse tous touchés plus ou moins par une formation pastorale. 1100 lycéens ( 40 en Creuse et 1060 en Haute-Vienne) dont 10% vivent volontairement un temps d’aumônerie. Centre chrétien universitaire La Mission étudiante qui reçoit régulièrement plus d’une quarantaine d’étudiants, sans parler des différents contacts établis sur les campus, et par différentes animations qui attirent plus tel ou tel soit 250 jeunes rejoints. Mouvements éducatifs F.S.C.F. (fédération sportive - patronages …) Les Scouts de France avec près de 150 jeunes (en comptabilisant la tranche 8-12 ans) et une trentaine d’animateurs. Les Guides de France : une cinquantaine de filles Le MRJC : chiffre non connu, les jeunes étant rejoints par de multiples chemins. Plus de l’ordre du ponctuel. Il existe 3 équipes en Creuse et 3 équipes en Corrèze (fonctionnement régional). Une trentaine de jeunes réguliers, 80 pour la fête des pommes annuelle à la Forêt Belleville. La JOC - JOCF : 50 environ. Le M.E.J. (mouvement eucharistique des jeunes) rassemble 80 jeunes de 9 à 19 ans. Mouvements en lien avec le secrétariat de l’épiscopat Les Scouts d’Europe avec 120 jeunes (en comptabilisant la tranche 8-12 ans) Les Scouts Unitaires de France qui rassemblent une cinquantaine de jeunes (en comptabilisant les 8-12 ans) Les Paroisses Il est plus difficile de se faire une idée exacte des jeunes touchés, mais il y a sans doute là une population jeune en attente de propositions vivantes et dynamiques. C’est certainement un des enjeux de la pastorale des jeunes dans le diocèse, sans rien enlever à tout ce qui se fait en amont par 7
les différents mouvements et services. Comment et que proposer à ces jeunes sans lien avec des structures d’animations connues. Quel accompagnement pour eux ? N’appartiendra-t-il pas à la coordination diocésaine jeunes de proposer des temps de rassemblements territoriaux, diocésains pour donner une reconnaissance à ces jeunes, ainsi que d’aider les conseils pastoraux de paroisse à avoir une plus grande attention aux jeunes. Les groupes informels de jeunes Voilà qu’arrive un troisième type de groupe : les groupes informels, ceux qui prennent le train en marche, descendent même si le train n’est pas tout à fait à l’arrêt, passent par dessus les barrières, ne compostent pas leur billet forcément car ils n’en comprennent pas le sens. Ils finissent par constituer par ailleurs leurs propres réseaux, reviennent, repartent… « A l’époque de la cohabitation juvénile, nous voilà à l’époque de la cohabitation ecclésiale : on essaye une fidélité, on la négocie avec soi-même, avec les autres du groupe et avec l’Autre. » Les électrons libres Ils peuvent sans doute s’apparenter aux groupes informels, mais ce qui les distinguent, c’est le fait qu’il s’agit plus de jeunes isolés qui se raccrochent à l’une ou l’autre proposition mais qui n’arrivent pas forcément à s’insérer dans un groupe ou une structure. Souvent envoyés par un prêtre qui ne sait pas comment répondre à leur demande sur place.
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Constater 1er constat : Nous sommes dans un diocèse à forte ruralité avec des jeunes marqués par cette ruralité propre au Limousin : méfiance, repli sur soi, « instinct grégaire », peu enclin à s’ouvrir à de nouvelles propositions ou à d’autres partenaires… (ne voir dans cette description qu’un état de fait, et non une critique). Il leur faut du temps et un temps d’apprivoisement. Mais sans doute pourrait-on le dire pour d’autres lieux avec d’autres jeunes, mais suite à des expériences de rassemblements ou de temps forts diocésains, j’ai remarqué souvent une nette différence entre des jeunes de la Haute-Vienne rurale et de la Creuse avec des jeunes de Limoges plus marqués par la ville et ses propositions sociales, donc plus faciles, semble-t-il à mettre en route. Guéret, petite ville s’il en est, contient un peu ce type de jeunes. Par ailleurs, les jeunes urbains sont plus difficiles sur les propositions qui leur sont faites, ayant un panel plus diversifié d’activités. Il est important aussi de tenir compte de l’éclatement, dû aussi à la ruralité, où existent ici ou là des noyaux de jeunes quand ce n’est pas des jeunes seuls, répartis sur un espace difficile à quadriller. Comment les rejoindre, quand les paroisses elles-mêmes ont de grandes difficultés à rassembler ces quelques jeunes, ou du moins à les motiver dans une pastorale dynamique. Sans doute est-ce là une question à approfondir, et qui demande des réponses urgentes : créer des « alliances » paroissiales au niveau d’un doyenné par exemple avec des temps de rassemblement significatif pour déjà apprendre à se reconnaître faisant partie de la même Église. 2ème constat : Si on souhaite que les jeunes soient apôtres parmi les jeunes, nous rencontrerons une difficulté au moins au niveau de la tranche 18-25 ans souvent absente du rural. Les études et la vie professionnelle les attirent ailleurs, au mieux à Limoges, sinon dans les grandes agglomérations 9
universitaires et industrielles françaises. Les jeunes animateurs sont rares et ne peuvent souvent s’engager que ponctuellement. 3ème constat : Des propositions usées, une Église non repérée. Des propositions usées, car on ne fait que répéter des vieilles recettes, recopier des modèles, alors que la société jeune change, bouge, a besoin elle-même d’innover. On s’aperçoit bien que des propositions comme les week-end lycéens en AEP avec marche, réflexion, veillée, ne fonctionnent plus, ou n’attirent plus autant. Les jeunes, semble-t-il recherchent une densité, une émotion, un dépassement qu’ils ne retrouvent pas ou peu dans ce type d’activités. On a beaucoup de mal nous-mêmes à les rendre acteurs ; peur sans doute de se laisser déposséder ; on les concentre dans un rôle de consommateurs. « Venez et voyez » soit, mais quand les apôtres ont vu, ils partent à leur tour annoncer le Royaume. La pastorale du « venez et voyez » concernerait plus les tranches d’âge plus jeunes comme au collège qui ont besoin d’un éveil à la foi, donc d’un « venez et voyez ». Une Église non repérée, car inconnue pour la plupart, ou réduite uniquement à son rôle cultuel. Les préparations à la confirmation sont un bon révélateur de cette incompréhension à une appartenance chrétienne. On appartient à un groupe connu : aumônerie, scout, mej… mais l’Église est une dimension qui leur échappe encore. Sans doute, est-ce dû à une crainte des chrétiens adultes, animateurs de jeunes, de trop vouloir « embrigader », de nommer les signes ecclésiaux, de témoigner réellement de leur propre foi peut-être elle-même pas très au clair avec des images institutionnelles. Apprendre à leur faire découvrir l’Église autrement , leur apprendre à « goûter l’Église », grâce à « une pastorale des seuils ». L’Église reste pour les jeunes « un lieu apprécié où l’on se met ensemble par addition de « je » et de « tu » ; ou l’on peut parler de tout à échelle mondiale ; où l’on peut s’interroger sur le « pourquoi du pourquoi ? Même si les 10
jeunes n’ont pas de contentieux particulier avec l’Église, même s’ils n’en apprécient pas toujours les prises de position », il n’en reste pas moins qu’ils la connaissent mal, ou qu’ils en ont une image souvent faussée par les médias qui véhiculent une suite « d’interdits », alors qu’elle reste un lieu de dialogue. Sans doute faut-il apprendre aux jeunes et à leurs intervenants à dialoguer. De nombreux jeunes ont beaucoup de difficultés à exprimer leur questions, à rencontrer des interlocuteurs qui les mettent en confiance. Ils résolvent bien souvent leurs problèmes en en parlant à un jeune de leur âge qui n’a pas plus d’expérience qu’eux. C’est un appel pour nous à proposer des lieux d’accompagnement personnalisé et cela dès le collège. A force de souligner que nous sommes dans une société de débats, on finit par constater que seules les fortes têtes s’expriment au nom des autres et que la majorité reste muette sur ses propres attentes. 4ème constat : Il apparaît difficile encore pour les mouvements et services jeunes du diocèse de se retrouver pour une action commune. Chacun tirant toujours un peu la couverture à soi. C’est vrai qu’il n’est pas aisé de mettre toutes ses richesses en commun, ses sensibilités et ses parcours différents, d’accepter de travailler ensemble. Quelques expériences de temps forts communs ont été plus ou moins laborieuses. D’autres réussies, il est vrai, quand il n’y avait pas de coordination préparatoire mais une équipe de tête qui décidait pour tous. Il nous faudra apprendre la souplesse, la patience, et à lever le pied de la pédale du frein dès qu’une proposition sera lancée par la coordination. Mais là encore c’est un défi pour nous et un rappel que les jeunes ne nous appartiennent pas. Relisons à ce propos le début du chapitre 12 de la lettre de Paul aux Romains: « Au nom de la grâce qui m'a été donnée, je le dis à tous et à chacun : ne vous surestimez pas plus qu'il ne faut vous estimer, mais gardez de vous une sage estime, chacun selon le degré de foi que Dieu lui a départi. Car, de même que notre corps en son unité pos11
sède plus d'un membre et que ces membres n'ont pas tous la même fonction, ainsi nous, à plusieurs, nous ne formons qu'un seul corps dans le Christ, étant, chacun pour sa part, membres les uns des autres. Mais, pourvus de dons différents selon la grâce qui nous a été donnée, si c'est le don de prophétie, exerçons-le en proportion de notre foi ; si c'est le service, en servant ; l'enseignement, en enseignant ; l'exhortation, en exhortant. Que celui qui donne le fasse sans calcul ; celui qui préside, avec diligence ; celui qui exerce la miséricorde, en rayonnant de joie. Que votre charité soit sans feinte, détestant le mal, solidement attachés au bien ; que l'amour fraternel vous lie d'affection entre vous, chacun regardant les autres comme plus méritants, d'un zèle sans nonchalance, dans la ferveur de l'esprit, au service du Seigneur, avec la joie de l'espérance, constants dans la tribulation, assidus à la prière, prenant part aux besoins des saints, avides de donner l'hospitalité ».
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Une pastorale des jeunes pour quoi ? C’est là que je vais amplement utiliser les notes du « Document Épiscopat » : « Quel chemins pour proposer la foi aux jeunes ? » de Yvette Chabert. Une pastorale des jeunes est chargée de développer, de manière intelligente (dans le sens d’une compréhension pointue des jeunes) et créative, cette option préférentielle pour les jeunes, comme le rappelle Jean-Paul II dans Redemptoris Missio n°37. « Il importe que chaque jeune ait du prix pour chaque membre du corps du Christ. » « Être quelqu’un pour quelqu’un » Voilà me semble-t-il une clé pour une double entrée pour une pastorale des jeunes. Être quelqu’un, être reconnu, être aimé, compris, écouté : ce sont là des attributs qui doivent dès à présent nous aider à formuler des propositions pour tous types de jeunes, car quelque soit l’âge, le jeune a besoin de cette reconnaissance de l’autre. « Être quelqu’un pour quelqu’un » : ce quelqu’un, ce peut-être un animateur, un aumônier, un autre jeune, mais surtout leur faire découvrir qu’il y en a un autre plus grand qu’eux, plus grand que nous devant lequel on doit s’effacer, qu’ils doivent découvrir à travers nous : Jésus-Christ. « Refaire du christianisme une séduction pour vivre » Je cite l’exemple de Sylvie 31 ans rapporté par Yvette Chabert : « Pourquoi rajoutes-tu Christ à Dieu ou à Jésus ? que Jésus soit Fils de Dieu ou fils d’un ponceur de bois d’il y a deux mille ans ou d’hier, qu’est-ce que cela peut bien changer ? Quelle différence pour toi ? Tu fais du vocabulaire ! L’important, c’est : « A quoi ça te sert ? » « Jésus est-il apte de manière irremplaçable à donner goût de vivre, et pas seulement aux jours de grands rassemblements ? ou 13
reste-t-il le Jésus du catéchisme de nos parents : moralisateur, doloriste, dépassé. Jésus n’a cessé de travailler au goût de vivre de ses contemporains et de leur proposer une « vie en abondance ». Il a pris au sérieux les plus existentiels de l’humain : son besoin d’être bien dans son corps, dans sa tête, dans son affectivité, bien dans son être social, et surtout son besoin d’être réconcilié avec son être profond, divisé en lui-même et divisé avec les autres, sans mérite, par simple regard de tendresse ; et même son besoin de fête ! » C’est le nécessaire retour à la sève comme le souligne Mgr Rouet : « Au lieu de frémir dans les branchages ou de s’abriter sur la souche, si nous parlions de la sève. » « Le christianisme a cru qu’évangéliser, c’était conduire à des croyances, faire entrer des croyants dans un système. Or évangéliser, c’est d’abord apaiser le corps, en lui disant : « Va en paix ! » J. Sullivan - Parole du passeur
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Le Christ peut encore guérir On entend souvent à tort que les jeunes n’ont plus de repères. Au contraire, ils « sont noyés dans un surplus de repères, né du pluralisme de notre société… Ils s’accrochent à une recherche de sciences pour vivre : « Comment vivre ? Comment s’en sortir ? Comment moins mal mourir ? au détriment d’une sagesse pour vivre… » Les questions fondamentales « Pour quoi vivre ? Pour qui vivre ? » se sont éloignées. Dans ce surplus de sens, il leur manque une colonne vertébrale. Le christianisme a quelque chose de précieux à proposer, pour donner goût et sens à nos vies. J’aime beaucoup l’image utilisée par Yvette Chabert de la bouteille à moitié vide ou à moitié pleine selon le parti pris de tel ou tel. Elle nous propose pour retrouver la sève et redonner du goût à nos propositions, de « regarder la bouteille, non pas à moitié vide ou à moitié pleine, mais en son point central, là où la ligne frontière de liquide frémit au mouvement. Avec les mêmes matériaux, ni cassés, ni évidés, ni sublimés ni conservés en l’état, mais seulement déplacés, il est possible de créer de nouvelles figures. » Rien ne sert de se lamenter. Retrouvons nos racines. Déblayons les gravats accumulés sur les fondations des origines toutes inspirées de l’Évangile, et construisons du neuf. « Au lieu de nous focaliser sur le « comment faire » si nous retrouvions la « ligne centrale » de chacune de « nos bouteilles » ? » « Revenir aux intuitions évangéliques de chacun, convoquerait plutôt à déplacer les « faire » plus, vers « être » plus : être plus scout, plus JOC, plus Mission étudiante, plus groupe paroissial, etc., et « être » autrement… » « Aujourd’hui, des jeunes attendent quelques déplacement pour être rejoints. » A nous de faire ces déplacements et de ne pas toujours attendre que les jeunes se glissent dans nos propositions toutes faites. « L’évangile nous demande, non pas, forcément, de les comprendre, mais de les aimer. » 15
« Évangéliser n’est pas séduire, ni chercher à déplaire le moins possible. » N’oublions pas que dans le mot « pastorale », il y a le mot « pasteur ». Comment être soi-même un pasteur, un guide, un animateur qui fasse reconnaître le vrai pasteur Jésus-Christ. Redonner aux jeunes cet appétit de connaître Jésus-Christ et son Église. Chaque mouvement et service a des intuitions, des fondations ancrées dans l’Évangile. Comment retrouver, si elles se sont effacées, ou recouvertes d’un voile pudique, les fondements des origines ? Quelles propositions, quels objectifs, quelle « ligne centrale » qui nous permettent de dire : nous annonçons Jésus-Christ. Pour ce faire, sans doute faudrait-il relire la manière dont Jésus luimême évangélisait : commencer par aimer. Pour cela aucun outil n’est nécessaire, excepté l’Évangile. Une pastorale des jeunes est avant tout une proposition de la foi qui se résume en quelques mots simples : donner envie de vivre avec Jésus-Christ. Permettre aux jeunes de faire une expérience vivante de rencontre du Christ. D’où l’importance de l’accompagnement et de la formation des jeunes : à retrouver ou à inventer. Ne pas hésiter à travailler avec d’autres instances diocésaines dont c’est le rôle : catéchuménat, formation permanente, escale St Pierre, etc…
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Des points d’attention pour les instances existantes : « L’interdit de l’instinct de propriété. » « Les jeunes ne sont à personne, ils ne sont qu’à eux-mêmes et à Dieu. L’espace laissé vacant invite à des propositions séduisantes, non enfermantes, non séductrices. » « On est d’abord de l’Église du Christ, pas de sa chapelle. » « Il faut les considérer comme nos frères, comme nos interlocuteurs, nos partenaires à égalité, et non comme des brebis, des disciples, des élèves, nos « poussins ». Ils ne sont pas non plus les destinataires de notre mission. » « Autour de la proposition de la foi. Comment donner envie du Dieu de Jésus-Christ ? « Autour de l’appartenance. Comment donner envie du goût de l’Église ? Pour le premier point, il faut passer par une pastorale de l’initiation ou de l’éveil à la foi Pour le second, à une pastorale des seuils, des étapes. Proposer la foi, c’est proposer une expérience de relation à Dieu Père, Fils, Esprit et une expérience de relation aux frères. Redécouvrir la foi comme parcours initiatique, d’où l’importance d’une formation offerte, d’un accompagnement des jeunes. Un exemple de parcours initiatique à inventer : celui du sacrement de confirmation. Au lieu de s’enferrer dans une profession de foi devenue une belle fête de famille pour la plus grande majorité et un terme à un parcours de foi, pourquoi ne pas créer des étapes au sacrement de confirmation, comme le suggéraient des permanents laïcs en proposant une première étape à la place de la Profession de Foi en reprenant tel ou tel signe fort de Confirmation. Redécouvrir avec les jeunes les expériences spirituelles qu’ils font parfois inconsciemment ou qu’ils ne savent pas retraduire. C’est ce qu’Yvette Chabert appelle « le cri du creux », c’est-à-dire 17
ces lieux ou moments ponctuels d’une vie qui font décoller de soi, à son insu, qui font susurrer en soi, le temps d’un éclair cette question : « mais d’où ça vient que… ? » Quelques cris du creux : l’expérience de la liberté : d’où vient le choix entre un bien et un mal ? l’expérience éthique : le pardon. l’expérience de l’amour humain : l’altérité radicale vécue de plus en plus tôt. l’expérience de la souffrance l’expérience de la mort l’expérience de la beauté
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C’est à travers tous ces « cris du creux » que l’on peut aider les jeunes à laisser émerger une expérience spirituelle, une rencontre avec Jésus-Christ, à les aider à reconnaître qu’à travers ces expériences parfois très brèves, à travers ce sentiment d’une plénitude ou d’une présence intérieure, il y a Quelqu’un qui agit en eux, pour qu’ils arrivent peu à peu à le nommer. C’est pour les accompagnateurs de jeunes tout un travail d’éveil lent et délicat.
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Éveiller les jeunes au goût de Jésus-Christ : comment ? « par un éveil au désir : comme Jésus à Emmaüs, c’est en marchant avec les jeunes dans une vie de proximité, en écoutant leurs « cris du creux », en silence, ce qui est dit ou n’est pas dit, en suscitant un « je » par un regard, un silence ou une parole que peut s’ouvrir un désir. « par un éveil de la parole : des temps et lieux de narrativité des évènements de sa vie. des témoins interprètes prêts à susciter l’expression, à faire lever l’étonnement et le point d’interrogation ; à révéler par une parole « forte », mais douce, ce qui se passe dans le cœur du jeune. un dialogue avec les autres : l’écoute de témoignages « forts » ou ordinaires venus de chrétiens. « par un éveil de l’agir : le goût de Jésus-Christ passe par un goût à faire… la prière avec les autres les projets solidaires La liturgie : lieu d’éveil à Jésus Christ De belles célébrations liturgiques au service du « goûtez et voyez » afin que la messe devienne un lieu d’éveil à Jésus Christ. Le beau et le festif sont toujours appelants.
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Proposer La carte du goût : à chacun son menu. Les jeunes sont plus des clients de cafétéria où l’on choisit sans rien demander à personne, ou même des fanas de fast-food. Chacun son menu et surtout rapidement pris. Intéressant au niveau de l’instantanéité, de l’immédiateté dans leur façon de vivre. On parle beaucoup de zapping des jeunes. Mais est-ce que le monde des adultes n’est pas l’inventeur de la télécommande. A nous de leur proposer une carte du goût. Il est intéressant de noter qu’à l’école primaire, on invite les enfants à vivre une journée du goût, à découvrir les parfums, à apprendre à développer leurs papilles gustatives. Opter pour une pastorale du goût (du bon goût) « Une pastorale du goût n’est pas une pastorale du « séduire » ou du « plaire », mais une pastorale d’éveil au goût de … » En effet, attention au gourou, d’où l’importance d’équipes d’animateurs qui permettent aux jeunes de rencontrer plutôt tel ou tel, et de découvrir plusieurs saveurs. « Une pastorale du goût place le jeune en situation de désir, désir de répondre à cet appel que Dieu fait sonner au secret de tout homme. » « Une pastorale du goût engage toute une Église et pas seulement les mouvements de jeunes, services et coordinations diocésaines ! Elle appelle les communautés paroissiales, les laïcs des mouvements aînés, l’Église institutionnelle à être des lieux de bon goût, des lieux qui fassent signe (avant de vouloir faire nombre ou faire poids)… »
Inventer des « pédagogies d’éveil au goût, flexibles, adaptables, personnalisées, actives » avec un menu à la carte : 20
« - goût de l’apéritif gratuit pour le plus grand nombre, à entrée et sortie libre - goût de mets divers, proposés à la carte, à picorer selon soimême, sans ordre forcément cohérent (les sucreries chez les jeunes devancent parfois les mets salés). - goût du plat du jour, plat du mois, du trimestre, fidèlement consommés. - goût du menu complet, pour un petit nombre. Enthousiasme grâce aux temps forts, leur avant et leur après, qui offrent l’apéritif au plus grand nombre et le menu pour les autres. » Cette pastorale du goût réclame une très grande souplesse, une grand part d’inventivité et un grand choix de propositions variées à renouveler chaque année. A force de servir le même menu, on finit par s’en lasser. Faire des menus adaptés aux jeunes qui sont là. Ne pas fabriquer des menus trop conséquents ou trop gras, quand les jeunes sont encore en situation de régime. Allez doucement. C’est le conseil de Paul aux Corinthiens : « C'est du lait que je vous ai donné à boire, non une nourriture solide ; vous ne pouviez encore la supporter. » 1 CO. 3,2.
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La pastorale de « l’autobus » « Église, c’est comme autobus » Je reprends ici ce qu’en dit Yvette Chabert, car je trouve l’image de l’autobus très éclairante pour le monde des jeunes. « On ne prend pas l’autobus pour aller en autobus. Mais pour aller d’un endroit à un autre. L’Église, c’est l’autobus pour aller au Royaume de Dieu ». Bruno Chenu « L’Église, c’est un moyen provisoire de transport en commun. Provisoire au sens où dans l’éternité, il n’y aura plus besoin de mouvements, de paroisses, de communautés nouvelles, de congrégations, d’aumôneries. Sa raison d’être n’est pas la beauté de son autobus, sa propreté intérieure, les places respectives de ses occupants, machiniste, contrôleur, passagers assis, passagers debout ; ni même la densité du peuple qui peut s’y regrouper à certains moments forts, ponctuels. Sa raison d’être, c’est : - le transport de la Bonne Nouvelle ; - la direction à prendre, le royaume de Dieu, c’est-à-dire le peuple de Dieu total, réconcilié. La raison d’être de tout groupe d’Église est par et pour cette mission : faire circuler ces divers autobus un peu partout, de manière visible, non arrogante, et donner goût d’y monter, par temps de pluie comme de grosse chaleur. On ne propose pas l’autobus pour se promener en autobus (on ne propose pas nos groupes pour grossir nos groupes ou y être bien !). Mais pour aller sur les routes, là où les hommes, là où les jeunes souffrent et jubilent, en priorité là où les autobus de la société n’osent pas ou n’osent plus s’aventurer… » L’autobus a un avantage également, c’est sa mobilité permanente : place à la mobilité (penser aux lieux de proximité pour toute proposition, variés, aux lieux phares géographiques dans un diocèse 22
pour les rassemblements…) A ce propos, pourquoi ne pas tenter, comme au temps des roulottes pour la mission en Creuse, un véritable autobus de la coordination des jeunes qui passerait de lieu en lieu pour animer, accueillir, accompagner…
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Convictions (d’après les assises de la Coordination jeunes du Morbihan)
- Être missionnaire et joyeux : « aller vers », avoir le souci de tous les jeunes, aider les groupes constitués à rester accueillant aux autres, le souci des jeunes est à porter par tous les chrétiens, appeler des adultes relais au niveau local, être joyeux en montrant que le Christ nous fait vivre ! - Accompagner : Les jeunes sont tous différents, ils n'ont pas la même histoire, le même parcours… Il s'agit de marcher avec eux en les respectant, d'être à leur écoute, d'être attentif à chaque personne. Être vrais, crédibles, authentiques et témoins. - Inventer : Avec les jeunes il faut inventer, employer des techniques et des outils toujours renouvelés… D'où aussi la nécessité de partager nos expériences entre animateurs de différents mouvements, services, paroisses… - Responsabiliser : dans l'accompagnement veiller à responsabiliser les jeunes, à les rendre acteurs. - Projet et Formation : bien connaître le projet ou en élaborer un avec d'autres animateurs et avec les jeunes, l'évaluer ensuite. Des temps de formation, de relecture et de ressourcement sont nécessaires non seulement pour les jeunes mais également pour les animateurs. - Diversité : garder une diversité de propositions, de portes d'entrée, de mouvements et services pour que chacun puisse cheminer. Garder toujours en tête le « Vivre, Croire et Célébrer ». - Convivialité et moments forts : Y veiller pour que les jeunes se sentent à l'aise et puissent avoir du goût à continuer à cheminer (repas, fêtes, temps forts, JMJ, pèlerinages...)
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Ce que ne devra pas être une coordination jeunes - Une immense aumônerie avec un super-intendant. Elle ne doit pas être non plus, comme le souligne Yvette Chabert « un chapeau pointu sur les autres structures, un lieu de communion caoutchouteux qui gommerait les différences. » Ce que devra être une coordination jeunes - un lieu de coordination dans la communion, promoteur d’inventivité avec les différentes composantes de la pastorale des jeunes; - un lieu de décision avec les jeunes représentatifs de leurs groupes, dans le respect des diversités. - un lieu de soutien et de coordination de tout ce qui existe dans ce qui est proposé aux jeunes du diocèse: mouvements, services, groupes divers. - Donner des orientations pour une pastorale des jeunes tournée vers l’avenir. - Chercher à répondre aux attentes et aux besoins des jeunes et des accompagnateurs de jeunes. - Harmoniser ce qui se vit et se fait sur le diocèse pour maintenir une dynamique jeunes. Dans ce souci d’harmonisation, elle sera attentive à l’équilibre entre les propositions diocésaines et les propositions des mouvements, des services et paroisses. - Elle aura le souci d’articuler la pastorale des jeunes avec l’ensemble de la pastorale du diocèse, d’où l’importance de délégués au conseil pastoral diocésain.
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Questions Des pistes pour le diocèse de Limoges - -Un premier temps travail et de concertation avec la coorComment amenerdeles jeunes à parler de la foi, à célébrer dinationsans Jeunes existante. qu'ils prennent de la distance ? - -Former une les équipe la Pastorale Jeunes, sorte Comment faire pour cheminer vers l'Eucharistie ? de bureau de la coordination qui regroupera, elle, tous les intervenants du monde -des jeunesplace ainsietque le lien avecpour les paroisses. Quelle quel accueil les jeunes dans les célébrations paroissiales où ils sont minoritaires ? - Un lieu provisoire d’accueil, de soutien, de secrétariat, d’aide à l’accompagnement, à la formation pour les jeunes, en lien avec les - Comment célébrer avec des jeunes quand ils n'ont pas de services des vocations, de la formation permanente, du catéchuméculture religieuse, n'ont pas eu de lien avec l'Église ? nat, de la catéchèse… développer leshabité liens,etl'articulation, l'information, - -AComment l’avenir, un lieu phare ouvert en permanence en la communion entre les acteurs pastoraux en paroisse, dans plein centre de la vie des jeunes. les établissements d'enseignement catholique, les Aumônel'Enseignement Public, mouvements servicesdes ? - ries Un de lieu en gestion libre pourlesaccueillir des et journées, week-ends, des camps au centre du diocèse et gérer par la pastorale - Comment s'y prendre quand il n'y a pas eu de propositions des jeunes pour les jeunes. pour les jeunes pendant longtemps dans un lieu ? - Des relais jeunes dans chaque paroisse animés par des jeunes formés,- afin Les de jeunes mobiliser, ont aujourd'hui d’inviter, 36 de «communiquer, choses », comment d’inventer, reavec non seulement d’autres mais»aussi avec les joindre les jeunes pourjeunes la « chose chrétienne ? communautés chrétiennes existantes. ... - Mise en place d’un calendrier diocésain de la pastorale des jeunes avec les propositions diocésaines où chaque mouvement et services de jeunes y inscrira ses propres dates. - Un annuaire simple et pratique, style agenda de lycéens pour le monde des jeunes. - Un site Internet actualisé quotidiennement avec des entrées pour chaque mouvement et service jeunes. - Un logo et un slogan, signe de reconnaissance jeunes.
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A envisager comme projets pour les années à venir : En dehors des grands rassemblements nationaux, type J.M.J. à Toronto en juillet 2002 - Un temps fort autour de l’épiphanie : manifestation de la jeunesse de l’Église. - Une démarche de pèlerinage : circuit à pied, à vélo, pendant les vacances de printemps pour découvrir les paroisses et aller à la rencontre d’autres jeunes sur place, de vivre une veillée ou un temps de célébration sur place et de les amener à la suite des autres afin d’arriver au bout du parcours avec le maximum de jeunes. - Autre projet de pèlerinage à réfléchir avec les partenaires de la Pastorale des jeunes. - Un projet solidaire avec une redécouverte du carême chrétien en se bougeant pour des jeunes en difficulté ou en mal de vivre dans notre diocèse. - Pour redonner force aux grandes fêtes liturgiques, proposer des veillées eucharistiques le soir du mercredi saint ou si possible du jeudi saint. Donner la possibilité dans certains lieux du Diocèse, un par zone par exemple, à des jeunes de préparer et de célébrer Pâques en paroisse en les accompagnant, mais aussi en leur laissant le champ libre. - Profiter de l’année ostentionnaire pour rassembler les jeunes autour des saints limousins: veillée, spectacle, marche... - Ouvrir l’été aux jeunes avec diverses propositions de tous styles : camp, pélé, services…
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En guise de conclusion Rien dans toutes ces pages n’est affirmatif. Au contraire, le contenu ne peut faire que l’objet de débats constructifs et d’affinage au fur et à mesure des échanges avec les différents partenaires. Que personne ne se sente tout d’un coup dépossédé, même s’il est vrai qu’une pastorale des jeunes diocésaine demande une certaine désappropriation. « Les jeunes ne nous appartiennent pas ». Les propositions finales ne sont qu’un catalogue de projets possibles. Ils sont discutables. Rien ne sera jamais figé dans cet ordre là. Tout est ouvert, d’autant plus que ce ne sont que les propositions d’un seul. Aux autres instances d’y ajouter leur grain de sel, leurs doléances et plus si nécessaire. Le tout est de vivre dans la charité et le respect de chacun, et surtout de vouloir se bouger pour construire ensemble un monde meilleur pour tous les jeunes du diocèse, présent de notre Église sans oublier que les « Apôtres des jeunes d’aujourd’hui ne peuvent être que des jeunes ».
François Renard, Guéret, le 14 juin 2001
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