LE VITRAIL

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M AÎTRES TALENTS &

Josette TRUBLARD & Martine CALLIAS BEY

Le vitrail TECHNIQUES D’HIER ET D’AUJOURD’HUI

Ouvrage publié avec le concours du Centre national du livre

© Groupe Eyrolles, 2010 ISBN : 978-2-212-12536-8


Sommaire Avant-propos ................................................ 6 Introduction .................................................. 11

Partie II

La peinture sur verre au fil des siècles ..................................

Partie I

L’art du vitrail ................................. 12 Chapitre 1

Les matériaux et les outils

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Chapitre 1 ............... 14

L’atelier ........................................................... 15 Le mobilier et les installations ........................... 16 La vie dans l’atelier ............................................ 17 Organisation du travail au sein d’un grand atelier ................................ 17

Les émaux ........................................................ 39 Un peu d’histoire .................................................. 39 La composition ...................................................... 39 La palette ............................................................. 39 Préparation et application des émaux .................. 40

Chapitre 5

e

Le XII siècle : la fête de la lumière

.......

78

La cathédrale Saint-Julien du Mans ................... 83

Le four ............................................................ 41

Exposition du corps de saint Étienne aux animaux ............................................................... Préparation ................................................................ Peindre les drapés ..................................................... Peindre les bordures .................................................

18 18 19 19 19 Historique des verres de couleur ................................ 19 Typologie des verres d’aujourd’hui ............................ 21 Les outils de découpe ...................................... 24

Le réseau de plombs .............................. 42

Chapitre 2

Les couleurs .................................................. 26

La pose ............................................................ 45

26 26 27 28 29 29 29 29 29 30 31 33 33 33 34 35 37 37 37 38

Les outils de pose .............................................. 45

L’église de Rigny-le-Ferron ....................... 139 83 84 86 88

Le verre .......................................................... 18 La fabrication du verre ...................................... La composition ................................................ Le soufflage ...................................................... Le matériau et les outils ..................................... Les différents types de verre ............................

Les matériaux et outils ...................................... Les peintures et le jaune d’argent ................... Le matériel de préparation .............................. Le matériel de peinture ................................... Les outils d’enlevage ........................................ Les techniques de préparation .......................... Les grisailles ..................................................... Un peu d’histoire .................................................. Leur composition ................................................... La palette ............................................................. Préparation et application de la grisaille ................ Le jaune d’argent ............................................. L’histoire ...................................................... La composition ...................................................... La palette ............................................................. Préparation et application du jaune d’argent ........ Le jean cousin .................................................. Un peu d’histoire .................................................. La composition ...................................................... Préparation et application du jean cousin .............

La fabrication du plomb .................................... Un peu d’histoire ............................................ Les matériaux et les outils ................................. La diversité des plombs ................................... Les outils de mise en plomb ........................... Les outils de soudure ....................................... Les outils de masticage ....................................

42 42 42 42 43 44 44

Le XIIIe siècle : le goût du merveilleux .................................. La cathédrale Notre-Dame de Chartres ....... Le marchand de vin .................................................... Préparation ................................................................ Peindre les visages ..................................................... Peindre les végétaux ................................................. Peindre les animaux .................................................. Peindre les drapés .....................................................

Réalisation d’un vitrail

......................... La prise de mesures .................................... La création de la maquette ....................... Le carton ........................................................ La coloration ................................................. Le calque de tracé et le tracé ................... Le calque de dessin ..................................... Le calibrage .................................................... Les exercices de coupe .............................. La coupe du panneau .................................. La peinture sur verre .................................. La mise en plomb ......................................... La soudure ..................................................... Le masticage .................................................. La pose ............................................................

e

Le XIV siècle : la préciosité 46 48 50 51 53 54 56 57 58 62 63 65 71 73 74

Saint Christophe ............................................... 139 Préparation ...................................................... 140 Peindre les drapés ........................................... 142 Peindre la nature : l’herbe .............................. 145 Peindre la nature : l’eau .................................. 146

Chapitre 6 92 97 97 98 100 102 104 106

Chapitre 3 Chapitre 2

Le XVIe siècle : l’embrasement des couleurs ........... 134

........................ 108

Le XIXe siècle : le renouveau

............ 148

Le vitrail civil ................................................ 153 Le vitrail aux pivoines ....................................... 153 Préparation ...................................................... 154 Peindre les végétaux ....................................... 156

Chapitre 7

Le XXe siècle : le temps des recherches

................... 160

L’Art nouveau : le naturalisme ................. 161 Un siècle d’expériences ............................ 165

La cathédrale de Saint-Denis ............................. 113 Panneau de grisaille ornementale à décor de fleurs d’églantine et grotesque ................. 113 Préparation ................................................................ 114 Peindre les végétaux ................................................. 116

Chapitre 4

Le XVe siècle : le parti de la monumentalité

................... 120

La cathédrale de Bourges ................................... 125 Détail de l’archange Gabriel ....................................... Préparation ................................................................ Peindre les visages ..................................................... Peindre les damas ......................................................

125 126 128 131

Glossaire ....................................................... 171 Bibliographie ................................................. 174 Remerciements ............................................ 176


L’art du vitrail

Les deux tables lumineuses occupent un coin de l’atelier tout près des étagères, sur lesquelles sont entreposés les matériaux de peinture (pots de grisaille, d’émaux, de jaune d’argent, solvants, gomme arabique, pinceaux divers et petites maquettes réalisées sur verre).

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Vue de la table de mise en plomb. La table du verrier est le meuble le plus important de l’atelier. Elle sert aux opérations « mécaniques » que sont la mise en plomb, la soudure et le masticage. Dans sa structure inférieure sont glissés des « plateaux » sur lesquels sont entreposés les travaux en cours. 1.Voir La mise en plomb, p. 65.

Le mobilier et les installations Certains meubles et installations se révèlent indispensables à la tâche de l’artiste. Ce mobilier ne se trouve pas dans le commerce ; on peut le fabriquer soi-même ou le récupérer dans un autre atelier : − des casiers pour stocker les feuilles de verre : les feuilles de verre sont rangées par couleur verticalement dans des casiers de bois (dimensions : 90 x 70 cm, largeur : 20 cm). Il faut prévoir des casiers plus petits pour les chutes. − des étagères : pour stocker les pots de grisailles et d’émaux et des placards pour le petit matériel. − des cartons à dessin : pour ranger les dessins et les maquettes. − une table de tracé et de coupe (dimensions minimales : 200 x 100 cm) : cette table sera utilisée pour la réalisation des tracés et la coupe du verre. Elle doit donc offrir une surface parfaitement plane. − une table de mise en plomb ou table de montage (dimensions minimales : 100 x 170 cm) : il s’agit idéalement d’une planche en bois contreplaqué, de préférence en peuplier, posée sur un meuble stable et solide qui pourra lui-même servir de rangement (par exemple pour les panneaux de vitrail). Il faut choisir une surface de bois dans laquelle les clous se bloquent aisément et fermement, et le peuplier répond très bien à ces contraintes. Il est ensuite nécessaire de la border de deux réglettes de bois biseautées 1. - une table lumineuse (dimensions minimales : 150 x 100 cm) : cette table est utilisée pour la peinture sur verre. C’est un plateau de verre dépoli éclairé par des néons blancs « lumière du jour ». Soyez attentif à la

couleur des néons car elle est susceptible de transformer la coloration du verre, ainsi que la couleur des échantillons de peinture sur verre (grisailles, émaux). Il est astucieux de placer cette table non loin du four. − un point d’eau ; − un four et sa ventilation 2 : il doit être placé près de la table lumineuse ; − des boîtes d’échantillons de verre de toutes couleurs et toutes qualités, vendues par les fournisseurs de verre ; − une bibliothèque de documentation : elle regroupe des ouvrages techniques de référence, des ouvrages sur l’histoire du vitrail, des modèles dessinés ou gravés, etc.

Une alliance avec les jeux du ciel

La vie dans l’atelier Certains ateliers français contemporains sont les dépositaires de dynasties d’artisans ayant accumulé au fil des siècles archives, documentation graphique importante ou panneaux d’essai, tels que l’atelier Jacques Simon à Reims, héritier de près de cinq siècles de peintres verriers attachés à la cathédrale, l’atelier Lorin à Chartres ou les ateliers Duchemin, Gruber, Loire, Bony et Gaudin à Paris.

La vie d’atelier au début du XXe siècle

Organisation du travail au sein d’un grand atelier L’esquisse du

« Il est l’homme au beau métier, le plus beau peut-être, parce qu’il est fait de feu, de flammes, de scintillements, d’éclats d’or, de pourpre et d’azur. Un métier qui vit de matières simples, le verre et le plomb. C’est un métier d’art, parce qu’il nous a permis de faire alliance avec les jeux du ciel. » Charles Counhaye, Le Peintre verrier, Bruxelles, 1942.

Au temps de Théophile 3 Le dessinateur employait une table blanchie à la craie sur laquelle il traçait les motifs à la mine de plomb puis avec de la peinture rouge et noire, marquant d’une lettre la couleur de chaque pièce 4. À la fin du e XIV siècle, apparaît le « pourctrait » (dessin) réalisé sur des feuilles de papier collées les unes aux autres, la mise « à grandeur » de ce projet revenant au peintre verrier.

« Le feu jouant un grand rôle dans cette partie du travail, c’était du bois et du charbon en abondance qui d’abord s’offraient au regard de l’étranger. Il y avait là des fours grands et petits pour la cuisson des verres peints, des fourneaux et des creusets pour la préparation des grisailles, des marmites et des chaudrons pour la fonte du plomb et de la soudure. Ringards, pelles, pinces et soufflets, cuillers en fer, moules de bois et de fer pour couler les plombs, tels étaient les ustensiles qu’on trouvait rangés à côté des tas de chaux et de plâtre qui servaient à enfourner le verre. Si le peintre verrier fabriquait son verre lui-même, il avait besoin d’un atelier spécial avec four, contenant les creusets dans lesquels devait s’opérer la fusion des matières nécessaires à la confection des différents tons. Il lui fallait en outre un four de refroidissement et d’étendage. Dans un autre endroit se préparaient les grisailles, là on pilait les matières premières dans un mortier et l’on broyait sur de grandes dalles de pierre la couleur à l’aide de molettes de fer. Ici, on coupait le verre, aussi, non loin, trouvait-on un approvisionnement considérable de grandes plaques rondes de verre rangées couleur par couleur dans des casiers. » Louis Ottin, L’Art de faire un vitrail, H. Laurens, Paris, 1926.

vitrail à venir est confiée à un peintre-cartonnier, extérieur ou attaché à l’atelier ; ce peut être aussi le peintre verrier lui-même qui s’en charge. Le peintre verrier agrandit le dessin aux mesures de la fenêtre à vitrer, puis se charge du choix de la qualité et de la coloration des verres, d’après des échantillons référencés et numérotés selon les casiers, dans lesquels sont entreposées les feuilles de verre correspondantes. Il est ainsi responsable de la qualité artistique du vitrail. Mais il n’est pas toujours seul dans son atelier. Plusieurs compagnons spécialisés l’assistent éventuellement dans les tâches de coupeur-monteur, de peintre, de poseur, etc., sans oublier le ou les apprentis. Actuellement, les grands ateliers de peinture sur verre en France emploient en moyenne deux ou trois compagnons et un ou deux apprentis. Certains peintres cartonniers ont peint euxmêmes sur le verre, comme Chagall à l’atelier de Charles Marq, ou plus récemment Pierre Caron à l’atelier Gaudin.

2.Voir Le four, p. 41. 3. Auteur du Traité des divers arts au début du XIIe siècle. Voir Introduction historique, p. 79. 4. Voir la Table du peintre verrier conservée au musée de Gérone (Espagne).

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La soudure Matériel nécessaire Cinq baguettes de soudure, une cale de bois dur (1 x 1 cm), un marteau, un morceau de stéarine, un rabattoir en bois ou PVC, un chiffon, un fer à souder thermostaté.

u

w Couper les excédents de plomb dans l’alignement des pièces de verre sur la largeur et la longueur du panneau. Emboîter la baguette dans le plomb A, puis, sur toute la largeur du panneau, ôter progressivement les clous et les cales. Emboîter le plomb sur toute la largeur (voir photo w). Caler par une réglette tenue par des clous (voir photo x).

v

L’art du vitrail

b 2 Application de la stéarine Prendre un morceau de stéarine et frotter chaque futur emplacement de soudure, afin de déposer quelques copeaux de matière (voir photo c).

a 1 Rabattage des ailes Rabattre les ailes des plombs à l’aide du rabattoir (voir photo a) contre les pièces de verre. Pour cette opération, le rabattoir ne prend pas appui sur le verre mais sur le cœur du plomb. Veiller à ne pas exercer de pression sur le verre car il pourrait casser. Prendre la cale de bois et la poser à l’intersection de deux plombs. Donner un léger coup de marteau afin d’aplanir le futur emplacement de la soudure, celle-ci n’en sera que mieux réussie (voir photo b). Répéter cette opération à toutes les intersections de plomb.

plomb jusqu’à l’âme avec un couteau de montage (voir photo u). Puis refaire une entaille sur l’autre côté. Ensuite articuler le plomb en s’aidant du couteau de montage pour superposer les ailes de l’angle fermé (voir photo v).

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Recommencer la même opération pour la longueur du panneau. La mise en plomb est ainsi bien calée. Vérifier les dimensions du panneau : elles doivent très précisément correspondre aux mesures de fond de feuillure avec jeu.Apporter éventuellement une correction d’environ 1 mm en tapotant les réglettes à l’aide du marteau pour tasser l’ensemble.

12 Installation du plomb d’entourage Une fois l’assemblage du panneau terminé, couper une baguette de plomb (7,5 mm) d’une longueur un peu supérieure à la largeur du panneau. Aplatir avec le marteau l’extrémité de la baguette qui va s’emboîter dans le plomb A.

x

3 Préparation de la soudure Brancher, puis allumer le fer à souder. Un fer à souder électrique « thermostaté » sera opérationnel au bout de quelques minutes. Sur un fer à souder électrique marteau, tourner le régulateur sur 5 ou 6. La température sera atteinte au bout de quelques minutes aussi.

Conseil Avant de commencer à souder, faites toujours un test sur un fragment de plomb pour vérifier la température de votre fer. En effet, si la température est trop élevée, votre plomb fondra. Dans ce cas, suivant le type de fer, éteignez-le pendant quelques minutes, ou baissez la régulation et attendez aussi quelques minutes.

c

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Les applications de la terre-papier

L a t e r r e - p a p i e r, e n t r é e e n m a t i è r e

Le tournage

Aspect d’une pièce tournée en porcelainepapier à taux moyen de fibres de papiers courants (mélange de fibres longues et courtes).

Aspect d’une pièce tournée avec une argile à fibres courtes du commerce.

Pour en modifier ou en affiner la ligne, vous pouvez procéder au tournassage d’une pièce tournée quand elle est à consistance du cuir, comme pour une réalisation en argile traditionnelle. Si vous avez laissé la pièce durcir par mégarde, humidifiez la surface à reprendre avec une éponge gorgée d’eau : la terre-papier aspire l’eau et se ramollit rapidement en surface. Tournassez la pièce avec une mirette coupante.

Le tournage classique

1 Pétrir la terre-papier.

2 Placer une boule sur un rondin fixé sur la girelle et l’entourer des mains mouillées pour la centrer.

Le tournage de grandes pièces Si vous avez l’habitude de tourner avec une estèque, fermez l’angle de contact avec la paroi pour éviter d’arracher les fibres.

Tournassage d’une pièce sèche à l’éponge et à la mirette.

Un tourneur est limité par la force à mettre en œuvre au moment du centrage de grandes quantités d’argile. La terre-papier, plus réactive à cette étape, demande moins d’effort et permet donc d’augmenter le volume à tourner. Pour réduire l’apport en eau, mouillez vos mains le moins possible et épongez régulièrement la surface et l’in- Raffermir les parois avec un sèche-cheveux, tér ieur de la puis poursuivre le tournage. pièce. En cas de ramollissement des parois, lavez et séchez vos mains, puis intervenez rapidement avec un sèchecheveux ou un décapeur thermique. Jarre de Pierre Ohniguian. Hauteur 135 cm, diamètre 92 cm. Pièce en partie estampée, tournée et associée à du métal. L’utilisation de la terre-papier réduit le poids de cette jarre. Cuisson raku et enfumage.

3 Percer et ouvrir la terre-papier centrée.

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5 Exercer une pression de l’intérieur pour donner un galbe.

Le tournassage

Une terre-papier contenant 1 ou 2 % de fibres est adaptée à la mise en forme d’une boule sur un tour en rotation. À des taux plus élevés, les parois sont difficiles à affiner. Mais la longueur des fibres a alors une grande importance : plus elles sont longues, plus le tournage est difficile. Une terre-papier à taux moyen de fibres courtes conserve des caractéristiques proches d’une argile traditionnelle. Si l’hydrophilie de la terre-papier constitue un avantage lorsqu’il s’agit de centrer, de tournasser ou de faire des assemblages, elle devient un inconvénient si l’on veut monter et affiner les pièces au cours du tournage : la terrepapier n’est pas adaptée à l’apprentissage du tournage.

Alors que pour d’autres techniques le pétrissage n’est pas de première importance, il le demeure pour le tournage de la terre-papier : le manque d’homogénéité ou la présence de bulles d’air empêcheraient une progression régulière du travail. Utilisez une terre-papier à consistance de modelage. Tournez avec le moins d’eau possible ou enduisez vos mains de barbotine. La terre-papier n’oppose que peu de résistance au centrage et à l’ouverture. Monter et mettre en forme une paroi demande par contre de la précision et de la dextérité : ces étapes doivent être effectuées rapidement, car l’eau apportée par les mains se diffuse immédiatement à travers la paroi qui se ramollit et plie.

4 Monter la paroi en la pressant des deux côtés.

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Les applications de la terre-papier

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Le coulage

Les tournages modifiés La cohésion et la résistance à la contraction apportées par les fibres permettent de modifier la forme d’une paroi. Vous pouvez intervenir sur une pièce juste tournée comme sur une pièce déjà raffermie. Si les parois sont sèches, vaporisez de l’eau avant toute intervention.

Préférez des papiers formant une barbotine cellulosique lisse à faible concentration comme le papier journal.

Couler une barbotine d’argile dans un moule en plâtre (qui absorbe l’eau) permet de reproduire rapidement et à l’identique des formes simples ou complexes. Dès que la paroi est formée au contact du plâtre, récupérez l’excédent de barbotine : il peut servir pour un autre coulage. Les fournisseurs en produits céramiques proposent des barbotines de coulage prêtes à l’emploi et des moules en plâtre. En y ajoutant des fibres vous augmenterez la résistance des pièces à la manipulation, ce qui vous permettra d’intervenir sur la forme finale. La surface en contact avec le plâtre restera bien lisse alors que celle au contact de l’air aura un aspect irrégulier. N’ajoutez pas plus de 2 % de papier dans la barbotine : audelà, les parois du coulage deviennent irrégulières et grumeleuses.

La barbotine cellulosique de coulage

1 Déformer la paroi d’un pot après qu’il ait été tourné.

Fournitures : Pour la barbotine 2 l de barbotine de coulage du commerce prête à l’emploi ou 2,5 kg de porcelaine en poudre 1 l d’eau 6 g de Dolaflux Pour la pâte à papier 50 g de papier journal 5 l d’eau

2 Strier la surface à l’aide d’un racloir métallique.

Tournez plusieurs pièces à la suite et attendez qu’elles soient fermes, puis coupez-les en plusieurs parties. Vous pouvez ensuite procéder à des assemblages quel que soit leur degré d’humidité, pour poser par exemple des cloisons intérieures dans un pot.

Pot de Marcel Ball. Porcelaine-papier à 1 % de papier, tournée et émaillée.

1 Récupérer la paroi d’un tournage avec un fil à couper.

Les barbotines de coulage prêtes à l’emploi contiennent du défloculant qui fluidifie l’argile (voir p. 16). Il est cependant souvent nécessaire d’y ajouter de l’eau pour qu’elles nappent le moule de façon régulière. Le temps de prise est de 10 à 15 min pour une paroi d’environ 4 mm d’épaisseur. Si vous préparez une barbotine de coulage à partir de minéraux en poudre, ajoutez un produit défloculant pour réduire le volume d’eau nécessaire. Ne dépassez pas les quantités indiquées par le fabricant, car le défloculant fige la barbotine au repos et le moule serait difficile à vider. Le pas à pas proposé ici permet de fabriquer une barbotine à 2 % de papier. 1 Préparer la barbotine de coulage et la tamiser. 2 Préparer la pâte à papier et l’égoutter pour obtenir environ 0,5 l de pulpe. 3 Mélanger les deux préparations pour obtenir la barbotine cellulosique à couler. 4 Laisser reposer pour éliminer l’air introduit dans la masse lors de la préparation.

Le coulage de la barbotine cellulosique Mélangez soigneusement la barbotine cellulosique de coulage pour qu’elle soit fluide et homogène. Versez ensuite la barbotine cellulosique dans le moule, comme pour un coulage d’argile traditionnelle. La présence de fibres augmente le temps d’attente avant l’ouverture du moule. En effet, le coulage s’effectue avec davantage d’eau et les fibres ralentissent la rétractation de la pièce. Évitez les coulages successifs : laissez plutôt sécher le moule entre deux utilisations.

2 Monter la paroi sur un tournage raffermi avec la barbotine cellulosique formée pendant le tournage.

Pour des ajouts de parties modelées (comme des anses), il n’est pas nécessaire que les deux parties à assembler soient de consistances strictement analogues (voir p. 96). On peut dire, d’une manière générale, que les fibres réduisent la plupart des contraintes techniques des interventions après tournage.

1 Dépoussiérer soigneusement le moule et la zone de jointure avec un pinceau ou une éponge.

Pot émaillé à paroi intérieure de Marcel Ball.

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2 Fermer le moule et le maintenir en place avec un élastique.

3 En procédant lentement et régulièrement, verser la barbotine cellulosique bien au centre de l’entonnoir de coulée du moule (il surmonte la forme du vase). Remplir à ras.


Les applications de la terre-papier

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assemblages et ajouts sont possibles à divers degrés d’humidité en utilisant la barbotine cellulosique de coulage. Voici quelques variations possibles autour d’un moule avec décor d’engobe noir sous émail transparent.

Vase drapé

4 Attendre environ 10 min que la barbotine cellulosique soit descendue au niveau du vase. Vider le moule.

5 Laisser le moule en position inclinée pendant 5 min.

6 Nettoyer l’ouverture lorsque l’argile a terni. Enlever la terre-papier déposée sur l’entonnoir de coulée avec une bande de carte plastifiée coupée, en veillant à ne pas abîmer le moule.

1 Appuyer avec les mains sur les parois du vase peu après son démoulage pour le déformer dans le sens de la hauteur.

2 Former un à un les creux par pression des doigts.

3 On obtient un vase drapé.

2 Entourer le ventre des deux mains pour former progressivement une forme ovale.

3 On obtient un pot ovale.

Pot ovale

7 Attendre environ 1 h : la paroi du vase doit se séparer du plâtre. Laisser l’air s’introduire dans cet espace avant d’ouvrir le moule.

8 Séparer les deux parties du moule en maintenant la base avec deux doigts. Dégager la partie supérieure en la soulevant bien verticalement, sans forcer l’ouverture ; en cas de résistance, attendre jusqu’au lendemain.

9 Attendre un moment avant de démouler complètement le vase pour ne pas le déformer.

Le vase par coulage.

1 Couper le col du vase un peu raffermi avec un petit couteau.

Pot cubique

10 Poser le vase sur une surface absorbante.

11 À la consistance du cuir ou à sec, racler les traces de jointure avec un petit couteau.

Les modifications De nombreuses variantes sont possibles à partir d’un même moule. La terre-papier coulée résiste aux pressions et à la coupe : intervenez après démoulage, quand elle est à la consistance du cuir, ou après séchage. Les

1 Frapper le vase raffermi sur le plan de travail pour former la base et les quatre faces.

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2 Couper une ouverture au couteau dentelé et l’agrandir progressivement.

3 On obtient un pot cubique.


2 Le trait : les palmettes Prendre le pinceau filet n° 6 pour peindre la forme générale des végétaux représentés entre les filets perlés (voir photo d). Réaliser les nervures avec le pinceau filet n° 4 et la grisaille au trait plus diluée en se reportant au modèle de la page 82 (voir photo e). Poser le pinceau en appuyant à l’amorce de la nervure. Puis relâcher la pression sur le pinceau pour affiner le trait des virgules qui vont ombrer la base de la feuille.

f

h

d 3 Cuisson Mettre les pièces à cuire entre 600 et 650 °C pour un four électrique. La durée de la cuisson dépend du type de four.

g

La peinture sur verre au fil des siècles - XIIe siècle

4 Préparation de la palette pour la patine Enlever les pièces du calque et les poser directement sur la table lumineuse. Remouiller la palette de grisaille au modelé (brun XVIe) avec de l’eau et la rebroyer avec le couteau à palette.

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5 Appliquer la patine Appliquer la grisaille en un jus très clair sur chacune des pièces avec un mouilleur n° 6 (voir photo f p. 91) et, simultanément, la peinture n’étant pas encore sèche, balayer avec un blaireau pour napper toutes les pièces (voir photo g p. 91). Le geste doit être léger et rapide.

e

6 Enlevages Laisser sécher la patine quelques minutes. Analyser la provenance de la lumière sur le modèle : elle vient de la gauche. Prendre une brosse douce piedde-biche et procéder à des enlevés. Ôter la peinture afin de créer des zones de transparence et de profondeur. Puis adoucir l’enlevage avec la brosse queue-de-morue (voir photo i). La patine donne à l’ensemble du panneau un caractère plus ancien et fait « vibrer » le verre (voir photo h).

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7 Cuisson Procéder à la même cuisson qu’à l’étape 3.

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La cathédrale Notre-Dame de Chartres La cathédrale de Chartres s’impose comme l’un des monuments phares du vitrail français des XIIe et XIIIe siècles. Après l’incendie de 1193, la pose de nouvelles verrières se poursuivit jusque vers 1210. Une trentaine de corps de métiers donateurs se firent représenter dans l’exercice de leur fonction, parmi lesquels les vignerons, qui figurent dans la verrière consacrée à saint Lubin (mort vers 557). La Beauce était au Moyen Âge une région de blé et de vigne, exploitée très tôt par les moines et les seigneurs. La prospérité vint aux vignerons au cours du XIIe siècle. Saint Lubin fut proclamé patron des cabaretiers et des vignerons de Chartres ; ceux-ci lui offrirent un vitrail en souvenir de son emploi de cellérier 4 au sein de son monastère, et en hommage à sa fonction épiscopale exemplaire à la tête du diocèse de Chartres depuis 544. Un pèlerinage avait lieu à la cathédrale pour honorer ses reliques et un autel lui était dédié. La verrière de Saint-Lubin, posée vers 1205, est située à bonne portée du regard dans le collatéral nord de la nef, à côté de la verrière de Noé. De plus de 8 m de haut, elle est composée de grands quadrilobes à cinq panneaux qui narrent la vie du saint, en 41 scènes, à une ou plusieurs figures, et de 24 scènes annexes, concernant les métiers de cabaretiers et de vignerons. La polychromie éclatante de cette verrière est due à un rouge puissant qui fait vibrer l’ensemble, rouge des fonds de scènes et des fonds mosaïqués, rappelant la couleur du vin. L’auteur de cette verrière que l’on a surnommé « Maître de Saint-Lubin », à défaut d’une identité plus précise, se caractérise par un style très expressif proche de l’art de l’Ouest de la France. Il excelle dans l’admirable effet décoratif, dans le sens du détail, la bonne distribution des motifs sur les fonds, l’accord du rouge et du bleu, traditionnel à l’époque gothique, l’énergie des gestes et l’agitation des plis.

Le marchand de vin Le panneau du transport du vin nous montre le travail d’un peintre verrier très observateur : on y voit le vigneron coiffé de la cale (coiffe ajustée à la tête et maintenue par une bride sous le menton), fouettant son cheval, lui-même arc-bouté avec effort pour tirer la charrette chargée d’un tonneau bleu solidement arrimé au moyen d’épaisses cordes, pour aller livrer son vin à la ville. Aucun détail ne manque, ni au harnachement du cheval, ni à la charrette. Les lignes géométriques de la charrette et du tonneau contrastent avec la souplesse des arbrisseaux et du chemin figuré sous les jambes du cheval. La stylisation du végétal accompagne agréablement le regard au-delà du sujet principal. L’effet décoratif de cette scène s’impose, non seulement en raison des couleurs contrastées si bien réparties dans le panneau, mais aussi du fait d’une mise en plomb infiniment contournée et précise.

Chartres (Eure-et-Loir), cathédrale Notre-Dame, verrière de Saint-Lubin, Panneau du marchand de vin, vers 1205 (copie de Josette Trublard).

4. Le cellérier s’occupe du cellier, lieu aménagé pour conserver le vin.

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Préparation 18

1

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2 16

3 15

13 4

10

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Astuce

La peinture sur verre au fil des siècles - XIIIe siècle

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Matériel nécessaire pour peindre ce panneau 1 Grisaille brun XIIIe, 2 grisaille brun XVIe, 3 gomme arabique, 4 trois carrés de verre à vitre de 7 cm de côté, 5 deux palettes en verre float ; 6 un porte-mine, 7 un couteau à palette, 8 et 9 des pinceaux filet en martre n° 6 et n° 8, 10 un mouilleur n° 4, 11 une brosse douce pied-debiche n° 6, 12 un putois, 13 un blaireau, 14 un pilon, 15 un petit banc, 16 un petit récipient d’eau distillée, 17 du produit nettoyant pour les vitres, 18 un chiffon ; et une feuille de papier-calque épais (90 g/m2).

1 Nettoyage des pièces de verre Dégraisser les pièces de verre, après les avoir préalablement découpées (voir p. 58), avec un chiffon et du produit nettoyant pour les vitres. Le verre utilisé pour réaliser ce projet est du verre antique soufflé. 2 Palettes de grisailles au trait et au modelé Suivre les conseils énoncés page 31 (Préparation et application de la grisaille) pour la préparation des palettes de grisaille au trait et au modelé. Remouiller la grisaille au trait (brun XIIIe) avec de l’eau distillée afin de retrouver une peinture fluide sans ajouter de gomme arabique. Faire de même pour la grisaille au modelé (brun XVIe).

3 Calque avant la peinture des pièces Agrandir la photo du panneau à la taille réelle (ici un carré de 55,2 cm de côté). Réaliser le calque de dessin à partir du calque de tracé (voir p. 56) sur le papier-calque. Décalquer avec soin sur ce calque de dessin le graphisme en noir et blanc (voir photo b). Ici le travail est en cours : seule une partie du graphisme est représentée. Cette étape est importante car elle va déterminer la qualité de la peinture. Reporter sur le calque au crayon les numéros déjà notés sur le calque de tracé. Positionner le calque sur la table lumineuse et y placer toutes les pièces de verre en se référant aux numéros indiqués.

Au moment de reporter les graphismes sur le calque, restez attentif à l’encombrement du plomb qui va cerner la pièce de verre. Ne dessinez pas près des axes du plomb.

4 Échantillons Réaliser des échantillons avec les grisailles préparées sur les palettes afin de s’assurer de leur tonalité (voir photo c). Si le résultat n’est

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pas satisfaisant, le mélange pourra ainsi être corrigé. Se munir des trois petits carrés de verre. Tracer des traits à l’aide du pinceau n° 6 et de la grisaille brun XIIIe sur le premier carré. À l’aide du blaireau, effectuer un dégradé avec la même grisaille sur un autre carré de verre. Puis dégrader à l’identique la grisaille brun XVIe sur le dernier carré. Inscrire le nom de la grisaille sur chaque verre au pinceau et avec

la grisaille correspondante, ou par enlevage. Mettre les échantillons à cuire. Ici la température est de 600 à 650 °C pour un four électrique. La durée de cuisson dépend du type de four.

Astuce Dans le four, il est souhaitable de poser les échantillons, le côté peint au-dessus.

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Peindre les visages

Un visage d’une grande sensibilité. Le modelé est peint avec habileté et simplicité ; de fines hachures réalisées au pinceau le rehaussent avec précision.

1 Trait Reproduire le graphisme du calque en noir et blanc sur la pièce de verre, par transparence sur la table lumineuse. Pour cela, prendre la palette de grisaille au trait (brun XIIIe), le petit banc et le pinceau filet n° 4. Diluer la grisaille avec de l’eau. Respecter la finesse du trait, sa tension et sa valeur claire. Veiller à ce que les traits de la lèvre supérieure et de la narine restent fins, presque transparents, afin de laisser circuler la lumière. Travailler très légèrement, sans exercer de pression sur le pinceau (voir photo a). 2 Cuisson Mettre la pièce à cuire entre 600 et 650 °C pour un four électrique. La durée de cuisson dépend du type de four.

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La peinture sur verre au fil des siècles - XVe siècle

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3 Le modelé Se munir de la palette de grisaille au modelé brun XVIe, du blaireau, du mouilleur n° 6 et du putois. Analyser la provenance de la lumière sur le modèle (voir p. 124) afin de préciser le modelé du visage : elle vient de l’angle supérieur gauche. Charger le mouilleur n° 6 d’une grisaille présentant une valeur moyenne et une texture très fluide (voir photo b). Puis poser ce jus.

Blaireauter immédiatement la surface en orientant le jus de peinture de manière à distribuer les zones claires et les zones d’ombre du visage (voir photo c p. 128). Procéder par gestes légers et souples. Cette étape est très importante car une bonne répartition des valeurs représente la base du futur travail d’enlevage. Veiller à opérer très rapidement avec le blaireau. En effet, le fait de blaireauter trop longtemps entraîne des rayures dans la grisaille. Il est préférable de recommencer plusieurs fois et de faire preuve d’exigence pour obtenir un bon résultat. Enfin prendre le putois et le tenir bien droit, perpendiculaire à la pièce. Tapoter l’ensemble de la pièce alors que la grisaille est encore humide (voir photo d). Le passage du putois donnera un grain extrêmement fin au modelé.

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