QUOTIDIEN DU 16e CONGRÈS DE L’UGICT-CGT Numéro 1 30 MARS 2011
RAPPORT INTRODUCTIF
La démocratie au cœur des défis CLAUDE CANDILLE / OPTIONS
UN MONDE EN MUTATIONS
MARIE-JOSÉ KOTLICKI SECRÉTAIRE GÉNÉRALE SORTANTE DE L’UGICT-CGT
L’année 2011 est celle de tous les dangers, mais aussi de tous les espoirs. Personne ne peut être indifférent à la catastrophe que connaît le Japon (séisme de niveau 9, tsunami, accident nucléaire), avec ses milliers de morts, pas plus qu’à l’irruption révolutionnaire des jeunes et des peuples au Proche-Orient et au Maghreb. Le monde bouge de plus en plus vite et l’Histoire s’accélère. Ce qui se passe au Japon interpelle l’humanité entière. D’une part, sur l’aspect des catastrophes naturelles et des nécessités de prévention et de solidarité ; d’autre part, sur la capacité humaine à maîtriser la nature. Les deux problèmes planétaires majeurs sont le risque de pénurie en eau et en énergie. Ces risques accentuent les conflits et sont sources de guerres. Pour y faire face, la solidarité entre tous les peuples est donc vitale. Quand on sait que le nucléaire couvre 75 % des besoins en France et 20 % à l’échelle de la planète, cantonner le problème à un débat franco-français sur le nucléaire apparaît dérisoire comme toute vision qui résumerait la question aux seuls pays développés. Aux plans scientifique, économique, écologique et politique, le nucléaire fait aujourd’hui partie de la diversité énergétique. La question essentielle est d’agir pour parvenir à la maîtrise sociale sur ce sujet. Dans cette industrie, la priorité doit être donnée à la sécurité sur le profit, au personnel formé avec des qualifications reconnues sur la fuite en avant dans la sous-traitance, aux transferts des connaissances, y compris entre pays, ainsi qu’aux retours sur expérience. La logique financière à bas coût doit être bannie. La maîtrise publique et démocratique doit être la règle, la notion de compétitivité qui conduit au « pas cher, pas sûr » disqualifiée. Des moyens doivent être injectés en permanence pour multiplier les efforts de recherche et d’innovation. La transparence dans l’information doit régner. Il y va de la survie de l’humanité de franchir une étape décisive dans la démocratie. C’est d’un nouveau rapport science/société que nous avons besoin pour dépasser le scientisme comme l’obscurantisme ou l’électoralisme et pousser à un autre type d’entreprise avec un
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autre mode de gouvernance et de management où la démocratie et la citoyenneté ne soient pas laissées à la porte. C’est un autre tsunami ou séisme, politique celui-là, mais également de niveau 9 sur l’échelle de Richter de la démocratie, qui a secoué et secoue les pays arabes. Au Proche-Orient et au Maghreb, la jeunesse a réveillé des peuples entiers, leur faisant retrouver le chemin de la lutte et de la dignité, et la jeunesse diplômée s’est trouvée en première ligne. Ils portent les exigences de liberté et de démocratie, de reconnaissance et de justice sociale. Même s’ils s’opposent à des dictatures fortement armées, le caractère massif et déterminé des mouvements en cours ouvre un chemin nouveau vers l’exigence d’un autre système d’organisation de la société. La montée de pays émergents dans la vie économique mondiale, la progression gé nérale de l’instruction et des aspirations démocratiques, la diffusion et le partage des connaissances sur la planète créent une donne nouvelle. A l’heure où tout s’accélère, le passage de la mondialisation financière à la mondialisation des luttes et de la démocratie devient le combat d’où naîtra l’avenir. Tandis que les contradictions de la logique de financiarisation capitaliste sont chaque jour plus fortes, monte un refus universel de payer la crise. Les Etats ont été mis à contribution pour sauver le système financier mondial, et notamment les banques privées, pendant que le Fmi ne trouve rien de mieux que de sanctionner les peuples en sacrifiant, comme en Grèce, les services publics que l’on était bien content de trouver comme amortisseur social quelques jours plus tôt. De son côté, l’Union européenne, avec son pacte pour l’euro, pratique la fuite en avant dans la compétitivité financière. Ses injonctions conduisent à la destruction des systèmes de protection sociale, à la baisse du prix du travail, à la réduction drastique des investissements publics, à un démantèlement des services publics. Et les agences de notation internationales jouent les vautours. Partout en Europe, la montée des inégalités et la dégradation économique et sociale sont à la source de luttes. 1