BIOMIMETISME EN MILIEU URBAIN - TRAVAIL DE FIN D'ETUDES - CHLOE TERRIE

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LE BIOMIMÉTISME EN MILIEU URBAIN Chloé TERRIÉ



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Université Catholique de Louvain Faculté d’architecture, d’ingénierie et d’urbanisme LOCI TOURNAI

BIOMIMÉTISME ET ARCHITECTURE : COMMENT LE BIOMIMÉTISME EN ARCHITECTURE PEUT-IL RÉPONDRE AUX PROBLÉMATIQUES DES MILIEUX URBAINS ? Projet d’étude: Un Écoduc urbain pour Paris et la Petite Ceinture

Travail de fin d’étude présenté par Chloé TERRIÉ En vue de l’obtention du diplôme d’architecte Référent Mme Pascaline Faux Atelier de recherche en et sur l’architecture M. Pierre Accarain M. Éric Van Overstraeten M. Wilbaux Quentin Expert Mme Estelle Cruz Année 2018 - 2019


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REMERCIEMENTS à Pascaline Faux pour m’avoir suivie, orientée et conseillée tout au long de ce travail, à Estelle Cruz qui a pris le temps de me transmettre ses connaissances biomimétiques, ainsi qu’aux chercheurs, naturalistes et étudiants en biologie qui ont eu la patience de répondre à mes questions, à Pierre Accarain, Eric Van Overstraeten et Quentin Wilbaux pour m’avoir guidée dans la réalisation du projet, à Marieke et Virginie qui m’ont apporté leur soutien et leurs précieux conseils, et enfin à ma mère et à mon frère, pour leurs encouragements et leur aide.


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SOMMAIRE : 10

Introduction

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BIOMIMÉTISME ET ARCHITECTURE

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Présentation du bio mimétisme Origine, étymologie, définition et évolution du terme Histoire de l’inspiration biomimétique

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Le bio mimétisme appliqué à la conception architecturale Les grands principes Gestion de l’énergie et des déchets Gestion du programme Conception et organisation Construction Comment concevoir avec le biomimétisme? Niveaux d’inspiration Méthodes de réflexion

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Étude de cas - Eden Project, Grimshaw Architects

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PROBLÉMATIQUES DES MILIEUX URBAINS ET BIOMIMÉTISME

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Problématiques générales Urbain et biomimétisme Introduction au site d’étude

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Étape 1 : Analyse du site d’étude - La Petite Ceinture, un espace de nature sauvage Histoire Etat des lieux

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Étape 2 : Un problème spécifique et une intention - La Petite Ceinture, un espace vert continu Intérêt des continuités vertes urbaines Construire la continuité


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Étape 3 : Recherche de solutions biologiques

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S’inspirer des processus naturels pour générer du territoire S’inspirer des structures naturelles pour concevoir

Étape 4 : Identification et abstraction des principes

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La toile en nappe

Étape 5 : Implémentation dans le projet - Création d’un écoduc urbain

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Univers sémantique Transposition architecturale

CONCLUSION - Concevoir avec le biomimétisme pour répondre aux enjeux urbains ?

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Le positionnement Les limites Pour aller plus loin

ANNEXES

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Étude de cas - Eastgate Center, Mick Pearce Photographies du site d’étude

BIBLIOGRAPHIE

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ICONOGRAPHIE

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INTRODUCTION « L’architecte du futur construira en imitant la nature, parce que c’est la plus rationnelle, durable et économique des méthodes ». Gaudi « Prenez vos leçons dans la nature, c’est là qu’est notre futur… » Léonard de Vinci

Notre société humaine est au cœur de questionnements majeurs, générés par le réchauffement climatique, l’augmentation et les mouvements démographiques ou encore la remise en cause énergétique. De plus en plus, ces sujets remettent en question nos façons de vivre, mais aussi de penser et de concevoir. Pour répondre aux mutations d’aujourd’hui et de demain, mais aussi à l’impératif de durabilité, ce TFE prendra appui sur le bio mimétisme, en tant que méthode et approche de la conception architecturale. S’inspirer du biomimétisme dans la conception architecturale présente un intérêt majeur : nous considérons par cette approche que ; « l’être humain étant un organisme dans l’écosystème planétaire »1 ; alors nos constructions, nos habitats, nos bâtiments publics, nos villes…font aussi partie de cet écosystème. Donc ils devront, comme chaque être vivant, faire preuve de résilience et d’adaptation face aux transformations. Le biomimétisme propose alors des solutions inspirées du Vivant pour s’insérer et s’adapter à cet écosystème à la fois changeant et imprévisible. En effet, la Nature est évolutive; sa pérennité est le témoin de son adaptation. Un système vivant fixe, non apte à évoluer, hyper adapté se verrait refoulé par les lois de l’évolution. Il en va peutêtre de même avec la durabilité de l’architecture. A partir d’ici, mon objectif est double et part de deux constatations : d’une part concernant le bio mimétisme qui propose peu de méthodologie propre à l’architecture, peu d’acteurs et peu d’écrits sur le processus de réflexion ; d’autre part mon choix 1

La définition de l’écosystème selon Luc ABBADIE, « ÉCOSYSTÈMES », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 03 janvier 2018. URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/ecosystemes/ « Le terme écosystème désigne un ensemble d’êtres vivants (animaux et végétaux) et de composantes physiques et chimiques qui agissent plus ou moins étroitement les uns sur les autres. »


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de répondre plus précisément à la problématique de densité dans les écosystèmes urbains. En effet, je m’attacherai à proposer une réponse à ces espaces qui n’ont pas été pensés pour les enjeux présents et à venir. Cela en appliquant la méthodologie et l’approche bio mimétique. Nous pouvons nous interroger sur la manière dont le biomimétisme en architecture peut répondre aux enjeux urbains à la micro échelle comme à l’échelle du territoire ? Quelles vont être les inspirations pertinentes dans un milieu urbain dense ? Quelles solutions présentent un intérêt durable et s’inscrivent dans une volonté d’adaptation? Mais aussi, la rencontre d’une architecture bio mimétique avec l’humain interroge la capacité de rencontre entre le naturel et le culturel. Comment serait vécue l’architecture d’inspiration naturelle? Pour répondre à ces questions, je m’appuierai sur les livres et textes ‘‘fondamentaux’’ du biomimétisme tel que «Biomimétisme : Quand la nature inspire des innovations durables » 2 de J.Benyus, naturaliste et scientifique américaine, ainsi que «Le vivant comme modèle: la voie du bio mimétisme» de Gauthier Chapelle, ingénieur agronome et docteur en biologie qui encourage un bio mimétisme «low-tech» et se passionne en particulier pour l’agriculture biomimétique3. Par ailleurs, je me réfèrerai aux travaux des architectes qui s’interrogent sur le biomimétisme tels que Jaques Rougerie, Vincent Callebaut, Luc Schuiten, Nicolas Vernoux Thelot, Olivier Bocquet, Pablo Lorenzino, Jean-Louis Pacitto entre autres. De plus, l’étude du fonctionnement de certains systèmes naturels sera un point clé de ma réflexion afin d’estimer leur potentiel et leur intérêt appliqués à l’architecture.

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BENYUS Janine, CHAPELLE Gauthier et LHOSTE Bruno, Biomimétisme: Quand la nature inspire des innovations durables, 2ème édition, Rue de l’échiquier, 2016, 407 pages, ISBN 9782374250038, . 3

CHAPELLE Gauthier, HULOT Nicolas, DECOUST Michèle, PELT Jean Marie et SCHUITEN Luc, Le vivant comme modèle : la voie du biomimétisme, Albin Michel, 2015, 348 pages, ISBN 9782226320186, . , ibid.


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A partir de ces réflexions, nous définirons, dans un premier temps, le biomimétisme appliqué à l’architecture dans le but d’extraire des méthodologies de conception. Cette réflexion sera illustrée par l’analyse de quelques solutions proposées par le biomimétisme pour répondre à l’enjeu des milieux urbains.

Dans un second temps, nous appliquerons ces recherches à une réflexion pratique sur le cas de la Petite Ceinture de Paris, qui représente le seul espace vert naturel et sauvage réel de la ville. Cette ancienne voie de chemin de fer, investie par la nature, traverse des quartiers très denses ce qui lui donne une importance capitale en tant que respiration verte dans un milieu urbain dense. Nous verrons comment le bio mimétisme peut accompagner la mise en valeur de ce patrimoine naturel en résolvant des problématiques telles que celle de la continuité verte.


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12 | La réaction hygrométrique des pommes de pin est une source d’inspiration pour des façades intelligentes Image (01)


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BIOMIMÉTISME ET ARCHITECTURE Présentation du bio mimétisme


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Présentation du biomimétisme | 15

Origine, étymologie, définition et évolution du terme. Citée comme la pionnière de la théorisation du terme, Janine M.Benyus, dans son ouvrage « Biomimicry» (1998), définit le biomimétisme par son étymologie : en grec ancien, «bios» pour la vie et «mimesis» pour l’imitation.4 Il existe de nombreux termes pour définir les multiples degrés d’inspiration et d’imitation du vivant et autant de points de vue qui diffèrent de manière sensible dans chaque source que j’ai pu parcourir. Pour clarifier le propos, différencions tout d’abord le biomimétisme du bio-morphisme, ce dernier appliquant des formes naturelles dans un intérêt purement esthétique et arbitraire. La bio inspiration, en revanche, se rapproche plus d’une volonté d’étudier la Nature pour concevoir. Il me paraît important de préciser ici qu’il ne s’agit pas d’une étude sur les «nouveaux artisans» et les «bio-hackers» qui s’intéresseraient à la bio ingénierie de pointe, où la Nature serait un «réservoir de matériaux», à exploiter par les besoins de l’Homme. Il ne sera donc pas question de coopération entre bactéries et ciment ou autre, chose que l’on peut voir dans des agences telles que XTU qui utilisent des algues et planctons associés à du vitrage pour créer des façades rafraîchissantes et dépolluantes par exemple. Le point de vue de Gauthier Chapelle dans «Le Vivant comme modèle» conduit à une définition assez globale : le biomimétisme est une manière de concevoir en «mimant », en observant, en comprenant et en reproduisant les éléments du vivant, de la Nature. Le vivant est constitué de nombreux systèmes qui se sont peaufinés pendant plusieurs milliards d’années d’évolution. La forme, les capacités de chaque élément naturel sont justifiées par des besoins et paramètres liés aux milieux dans lesquels ils évoluent. Les organismes naturels sont résilients, optimisés, adaptables. Il faut y voir alors de multiples solutions imaginées et créées par la nature qui peuvent s’appliquer à des domaines et échelles différentes.5 4

BENYUS Janine, CHAPELLE Gauthier et LHOSTE Bruno, Biomimétisme: Quand la nature inspire des innovations durables, 2ème édition, Rue de l’échiquier, 2016, 407 pages, ISBN 9782374250038, . 5

CHAPELLE Gauthier, HULOT Nicolas, DECOUST Michèle, PELT Jean Marie


16 | Biomimétisme et architecture

Structure d’une aile de libellule Image (02)

Dragonfly Invisible Wind Turbine de Renzo Piano, Image (03)

Appliqué à l’architecture, le biomimétisme se présente comme un rassemblement interdisciplinaire qui cherche des solutions durables dans le monde du vivant, en assimilant les règles qui le régissent. Le but ne serait donc plus uniquement de modeler et mesurer l’espace mais aussi de construire des relations à valeur positive, d’un point de vue énergétique et de biodiversité, entre nos constructions et leurs environnements. « L’architecture biomimétique pourrait être à l’origine d’une transformation du rôle de l’architecte évoluant du contrôle de la nature vers une participation durable avec la nature.»6 En revanche, on peut remettre en question certains points de vue, notamment celui de Janine M. Benyus (citée plus tôt), qui traite la Nature comme un objet fini, qui fonctionnerait parfaitement et aurait terminé son évolution : «Après 3,8 milliards d’années de recherche et de développement, ce qui a échoué est devenu fossile, et ce qui nous entoure est le secret de la survie»7. et SCHUITEN Luc, Le vivant comme modèle : la voie du biomimétisme, Albin Michel, 2015, 348 pages, ISBN 9782226320186, . 6

CHAYAAMOR HEIL Natasha, GUENA François et HANNACHI-BELKADI Nazila, Biomimétisme en architecture. État, méthodes et outils, Les Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère, mis en ligne le 30 janvier 2018, consulté en ligne le 27 avril 2018, URL : http://journals.openedition.org/craup/309, DOI : 10.4000/ craup.309. 7

BENYUS Janine, CHAPELLE Gauthier et LHOSTE Bruno, Biomimétisme: Quand la nature inspire des innovations durables, 2ème édition, Rue de l’échiquier, 2016, 407 pages, ISBN 9782374250038, .


Présentation du biomimétisme | 17

Relief sur la carapace d’un scarabée e la famille des Carabidae Image (04)

Récupération de l’eau par la carapace du scarabée de Namibie Image (05)

Il ne s’agit pas de considérer les solutions finies de la Nature comme des solutions parfaites à nos problèmes technologiques, mais de pouvoir identifier les principes et les réponses les plus pertinentes pour les faire fonctionner dans notre conception humaine. Le biomimétisme revient alors à s’inspirer par exemple de la capacité des ailes de la libellule à capter les brises les plus légères pour l’éolienne conçue par Renzo Piano «Dragonfly Invisible Wind Turbine» ou encore de s’inspirer du scarabée de Stenocara, «dont la carapace est munie de reliefs qui captent les gouttes microscopiques du brouillard matinal, seule source d’humidité dans la région. […] Ce relief particulier induit des propriétés physico-chimiques divergentes, dont la combinaison permet de piéger des minuscules gouttelettes d’eau en suspension dans l’air. […] Les surfaces artificielles qui imitent la carapace du scarabée du désert constituent une solution possible pour développer des captages d’eau dans les régions arides, sous la forme de bâches ou de tuiles, pour équiper les toits des habitations traditionnelles comme les sommets des immeubles.»8 C’est notamment le cas du revêtement de toit Aquamat en Namibie.

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DAUTREY Jehanne, Les nouveaux modèles de la Nature : une nouvelle individuation pour l’Homme? , éditions Loco, dans ANTONIOLI Manola, Biomimétisme : science, design, architecture, 2017, 144 pages, ISBN 2919507680, .


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Histoire de l’inspiration biomimétique L’Homme est depuis toujours inspiré par la Nature et ce qui l’entoure de manière intuitive ; et le fait de s’inspirer de la Nature dans des domaines artistiques s’exprime et continuera de s’exprimer sans doute par la recherche des proportions, de la géométrie, de la beauté, de l’harmonie des époques passées et actuelles. Les grecs anciens considéraient que l’être humain faisait partie de la Nature, et que la Nature était la représentation de l’ordre du monde. Le mythe d’Icare en est un bon exemple mythologique : «Ne pouvant emprunter ni la voie des mers, que Minos contrôlait, ni celle de la terre, Dédale eut l’idée, pour fuir la Crète, de fabriquer des ailes semblables à celles des oiseaux, confectionnées avec de la cire et des plumes. »9 La Renaissance vient avec l’idée de la «maîtrise de la Nature» d’une part et celle de l’imitation de la Nature en tant qu’art d’autre part.10 Léonard de Vinci peut être considéré comme un des pionniers de la conception biomimétique ; le cas le plus connu étant l’inspiration par les ailes de chauves-souris et d’oiseaux pour concevoir des machines volantes. L’un des premiers mouvements architecturaux qui base sa réflexion sur la Nature est l’Art Nouveau. Ce mouvement vitaliste se base sur un principe d’analogie entre formes d’un édifice et formes de la Nature. C’est un principe animiste qui vise à rendre vivants les éléments inertes de l’architecture et donne aux constructions les formes d’une vitalité organique, perçues comme l’expression du mouvement. En revanche, ce mouvement est davantage à l’origine du biomorphisme que du biomimétisme.

Encyclopédie de la Mythologie, M. Mughini (éditions De Vecchi), p. 182, Icare, consulté en ligne le 07/01/2018, URL: https://fr.wikipedia.org/wiki/Icare#cite_ref-1, .

9

VICARI Alessandro, Imiter la nature/faire avec la nature, éditions Loco, dans ANTONIOLI Manola, Biomimétisme : Science, design et architecture, 2017, ISBN 2919507680, .

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Présentation du biomimétisme | 19

Mythe d’Icare, Image (06)

Esquisse de De Vinci d’une aile d’un ornithoptère inspirée de celles des chauves souris, Image (07)

Sagrada Faimila de Gaudi, Barcelone, Image (08)

Maison Horta, Victor Horta, Bruxelles, Image (09)


20 | Biomimétisme et architecture

Le Crystal Palace inspiré de la structure des nénuphars Victoria Amazonica, capable de supporter le poids d’une personne. Image (10), (11) et (12)


Présentation du biomimétisme | 21

Le premier exemple de bio mimétisme appliqué à l’architecture peut être trouvé à l’époque moderne lorsque Joseph Paxton, botaniste et constructeur de serre d’origine, conçu le Crystal Palace de l’Exposition universelle à Londres en 1851. Il «avait conçu à cette occasion le projet d’un Palais vitré en prenant pour modèle la structure d’un nénuphar de grandes dimensions, la Victoria Amazonica, qui venait d’être importée d’Amérique du Sud. Cette référence naturelle inspira la conception d’un système constructif léger, composé d’une ossature métallique en fonte et clôturé par des plaques en verre. Ces deux technologies du feu, développées industriellement à la même époque, ont permis la réalisation du premier exemple d’architecture moderne adoptant les principes de la série, de la préfabrication et de l’auto construction».11 En effet, la face inférieure des feuilles de ce nénuphar, à l’instar de nombreux végétaux, présente une hiérarchie dans leur structure puisqu’elles se composent de nervures ‘primaires’ croisant des nervures ‘secondaires’ plus fines. Celles-ci ont été reproduites en tant que structure métallique du vitrage, et de cette manière le toit en verre et en fer est à la fois léger et solide.

Par la suite, l’architecture organique popularisée par Franck Lloyd Wright se focalise sur l’analogie du fonctionnement des organismes vivants. Alors que l’Art Nouveau puise son inspiration dans la Nature dans un but purement formel, l’architecture organique se conçoit comme un ensemble d’organes (des pièces par exemple) qui ont chacun une forme propre à leur fonction (selon leur usages…) mais interagissent les uns avec les autres. De plus, ce mouvement architectural théorise des principes qui, nous le verrons, ressembleront fort à ceux énoncés pour le bio mimétisme par J.M. Benyus : l’implantation dans un site en fonction de l’orientation et du paysage, l’adaptation de la forme à la fonction… Puis le mouvement moderne, marqué par l’industrialisation et les changements des mentalités politiques, économiques, culturelles, sonne l’heure d’une nouvelle relation entre l’architecture, les Hommes et la Nature.

11

Ibid.


22 | Biomimétisme et architecture

La première révolution industrielle du XIXe siècle marque l’apparition de technologies mécaniques telles que les machines à vapeurs. Ensuite, le XXe siècle est marqué par le développement des technologies dynamiques telles que l’électricité, et l’utilisation des énergies pétrolières. L’évolution des paradigmes nous amène à considérer que le XXIe siècle tend alors vers « une époque biomorphique, c’est-à-dire une époque où la technologie est évolutive, liées aux systèmes biologiques et qui en emprunte le fonctionnement processuel et évolutif. Notre environnement immédiat est prêt à nous offrir une énorme quantité de structures et de processus qui n’ont été que peu explorés par les designers, les architectes et les ingénieurs » 12 et qui nous permettra, de ce fait, de trouver les solutions pour se séparer petit à petit des énergies fossiles.

ANTONIOLI Manola Antonioli, CHOMAZ Jean-Marc et KARST Laurent, Biomimétisme : Science, design et architecture, éditions Loco, 2017, 144 pages, ISBN 2919507680, .

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PrĂŠsentation du biomimĂŠtisme | 23


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BIOMIMÉTISME ET ARCHITECTURE Le bio mimétisme appliqué à la conception architecturale

[A gauche] Les ailes de papillons iridescentes inspirent la réalisation de nouveaux panneaux solaires Image (13)


26 | BiomimĂŠtisme et architecture


Le biomimétisme appliqué à la conception architecturale | 27

Dans ‘‘Pour un biomimétisme des milieux’’, Mathias Rollot (enseignant-chercheur à l’ENSA Marnela-Vallée menant des recherches sur le rapport entre écologie, philosophie et architecture) décrit le rapprochement entre approche architecturale et biomimétique : «Par l’expression «architecture biomimétique» nous voudrions donc désigner ce qui est en jeu dans la conception et non dans le résultat architectural, et proposons ici plus explicitement encore de parler de «méthode biomimétique» pour notre travail. Qu’il s’agisse d’imiter les processus, les dispositifs, les interactions, ou même les écosystèmes eux-mêmes par «éco mimétisme», un biomimétisme architectural voudra plutôt œuvrer à la réinterprétation d’agencements extra humains pour régénérer la pratique architecturale ellemême.»13 En effet, appliqué à l’architecture, le biomimétisme est un moyen, une approche, une méthode de conception. Cela devient une passerelle entre l’architecture et son environnement, où l’architecte interroge et réinterprète les moyens mis en œuvre par la nature pour répondre à des enjeux environnementaux, d’organisation ou d’adaptation. Car le point commun entre l’architecture et les êtres vivants se situe dans leurs réponses à l’environnement extérieur.

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ROLLOT Mathias, Pour un biomimétisme des milieux, éditions Loco, dans ANTONIOLI Manola, Biomimétisme : Science, design et architecture, 2017, pages 111121 ISBN 2919507680, .


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Les grands principes

Dans un premier temps, il semble que l’approche biomimétique (appliquée ou non à l’architecture) ne se détache pas de certains grands principes de conception naturelle. Les premières innovations biomimétiques, bien que s’inspirant de propriétés naturelles ne prenaient pas en compte ces «grand principes » qui pourraient faire de la méthode biomimétique d’aujourd’hui une démarche durable et pérenne. On peut citer, entre autres, l’exemple du textile inspiré des crochets du fruit de la bardane, le très connu Velcro. Son créateur a en effet initié une démarche biomimétique en reproduisant la forme des crochets pour créer un textile agrippant. Cependant, le Velcro est composé de nylon, qui est un plastique thermodurcissable, très difficile à recycler. C’est un exemple simple d’inspiration biomimétique qui ne s’inscrit pas dans les grands principes naturels et pose question quant à sa légitimité dans le biomimétisme.

Je vais donc tenter ici de dresser une liste non exhaustive de grands principes naturels, qui permettraient aux concepteurs de s’engager plus efficacement dans l’imitation des processus naturels lors de la conception. Ainsi nous pourrons en dégager une grille de principes qui permettra d’analyser le caractère biomimétique de plusieurs études de cas. En me basant sur les écrits de J.Benyus14, Gauthier Chapelle, ainsi que sur certains principes du Vivant évoqués par la théorie de Hoagland et Dodson15, j’ai choisi de regrouper les grands principes de conception dans 4 familles qui pourront faire écho à la conception architecturale:

BENYUS Janine, CHAPELLE Gauthier et LHOSTE Bruno, Biomimétisme: Quand la nature inspire des innovations durables, 2ème édition, Rue de l’échiquier, 2016, 407 pages, ISBN 9782374250038, .

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CHAPELLE Gauthier, HULOT Nicolas, DECOUST Michèle, PELT Jean Marie et SCHUITEN Luc, Le vivant comme modèle : la voie du biomimétisme, Albin Michel, 2015, 348 pages, ISBN 9782226320186, .p 85 à 94

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Le biomimétisme appliqué à la conception architecturale | 29

PRINCIPES DE LA CONCEPTION BIOMIMETIQUE

CONSTRUCTION - Avoir recours à des expertises locales - Construire selon la méthode «bottom-up» du plus petit au plus grand. - Optimiser plutôt que maximiser - Utiliser les matériaux avec parcimonie - Privilégier la qualité à la quantité - Travailler la limite entre intérieur et extérieur

GESTION DE L’ENERGIE & DES DÉCHETS - Utiliser l’énergie renouvelable - Réagir et agir positivement sur le site (filtrer, assainir...) - Limiter son utilisation d’énergie - Pratiquer le recyclage généralisé - Fonctionner en cycles durables

GESTION DU PROGRAMME CONCEPTION / ORGANISATION -Optimiser par la multifonctionnalité - Utiliser peu de thème pour générer de multiples variations - Adapter la forme à la fonction - Prévoir une résilience et un pouvoir d’adaptation - Travailler la limite entre intérieur et extérieur

- Fonctionner en cycles durables - Mettre en place des stratégies de coopération Optimiser par la multifonctionnalité

Principes de conception architecturale biomimétique. Image (14)


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GESTION DE L’ÉNERGIE ET DES DÉCHETS:

- Utiliser de l’énergie renouvelable, abondante et non fossilisée comme l’énergie solaire : Le vivant tire l’énergie primaire dont il a besoin de l’énergie solaire. Cette source d’énergie renouvelable et propre mérite d’être exploitée dans nos constructions actuelles et futures, pour limiter et remettre en cause notre dépendance à l’utilisation d’énergies fossiles et nocives. On peut citer Sou Fujimoto et OXO Architects qui ont récemment conçu une tour d’habitation directement inspirée du fonctionnement des arbres. Des balcons élancés se comportent comme un feuillage qui vient capter la lumière du soleil. Chaque «feuille» est placée en fonction des autres pour recevoir de l’énergie solaire tout en offrant de l’ombre quand cela est nécessaire. De plus, le bâtiment utilise sa caractéristique biomimétique pour interagir avec les éléments disponibles sur le site, l’eau et le vent. Bien que sa capacité à capter les énergies soit positive, nous pouvons nous poser la question de la quantité et des matériaux utilisés pour réaliser cet ouvrage. En effet, réalisé en béton armé, la quantité d’acier utilisée pour obtenir ces nombreux balcons en porte à faux a dû être importante et la valeur positive rendue entre la pollution émise par les matériaux produits, acheminés et mis en place et la dépollution produite par le captage d’énergie propre est à étudier.

- Limiter son utilisation d’énergie, ne pas épuiser les ressources : Si le vivant réussit à limiter son utilisation d’énergie c’est notamment grâce à des stratégies sans aucune production de nouvelles sources de pollution. Dans un écosystème, les organismes vont se servir notamment des déchets comme source de matériaux ou d’énergie. Aussi, il existe dans la nature des comportements qui amènent les organismes à ne pas «manger la main qui les nourrit ». Ainsi, les girafes qui se nourrissent d’acacia iront d’arbre en arbre pour permettre aux plantes de repousser derrière elles. De ce fait la méthode architecturale cherchera à utiliser des ressources renouvelables en respectant le temps qu’elles mettent pour se régénérer et ainsi ne pas épuiser les ressources disponibles.


Le biomimétisme appliqué à la conception architecturale | 31

L’ARBRE BLANC, Sou Fujimoto & OXO Architects, Montpellier

Des balcons comme des feuilles d’un arbre: récoltent des eaux de pluies, captent l’énergie solaire, tout en ombrageant, réduisent le bruit, captent les vents Schémas, Image (17)

Une plus-value architecturale : Les balcons vont chercher la lumière naturelle tout en fournissant des espaces de vie extérieurs à part entière. Élévation et coupe perspective, Images (15) et (16)

Coupe détaillée, Image (18)


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GESTION DU PROGRAMME:

- Fonctionner en cycles durables, utiliser les déchets comme ressources : «La vie fonctionne par cycles» : le monde naturel regorge d’exemples illustrant l’intérêt durable des cycles (de migration, de vie, de production et consommation) sur lesquels l’architecture peut prendre exemple pour durer. En effet, comme le décrit Manola Antonioli : «alors que notre économie industrielle fonctionne en effectuant des transformations linéaires (où de l’énergie et de la matière sont transformées en produits et ensuite en déchets, pour la plupart non recyclables), les écosystèmes opèrent des transformations cycliques où tout est recyclé et fonctionne à l’énergie solaire.»16

- Optimiser par la multifonctionnalité, se diversifier et coopérer:

Dans le Vivant, les organes remplissent souvent différentes fonctions. Chez les végétaux par exemple, les carpelles servent à la fois de lieu de protection des ovules contre les insectes mais aussi d’outil de dissémination des graines. «La vie tend à optimiser plutôt qu’à maximiser et l’optimisation est souvent liée à la multifonctionnalité17» : on peut relier ce principe à la polyvalence d’un espace architectural, à son adaptabilité mais aussi à la multifonctionnalité d’éléments d’architecture ainsi qu’à la diversité du programme. Dans le cas de la diversité du programme, la multifonctionnalité va permettre des échanges qui vont pouvoir s’opérer et minimiser la perte de ressources. Une fonction va produire des déchets, qui constitueront les ressources d’une autre fonction.

ANTONIOLI Manola Antonioli, CHOMAZ Jean-Marc et KARST Laurent, Biomimétisme : Science, design et architecture, éditions Loco, 2017, 144 pages, ISBN 2919507680, .

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CHAPELLE Gauthier, HULOT Nicolas, DECOUST Michèle, PELT Jean Marie et SCHUITEN Luc, Le vivant comme modèle : la voie du biomimétisme, Albin Michel, 2015, 348 pages, ISBN 9782226320186, .

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MOEBIUS, Michael Pawlyn, Exploration Architecture Principes écosystémique du projet Moebius de Michael Pawlyn. Image (19)

C’est le cas par exemple du projet Moebius de Exploration Architecture illustre bien la stratégie de coopération entre une diversité de fonctions. En effet la stratégie de coopération entre espèces et la symbiose naturelle se trouvent ici transposées. Il y a trois cycles principaux: la production alimentaire, la production d’énergie et le traitement de l’eau. L’aspect innovant réside dans le fait qu’ils intègrent ces processus dans des cycles synergiques. Le bâtiment peut traiter une grande partie des déchets biodégradables d’une zone urbaine locale en utilisant le compostage et la digestion en anaérobie. Le méthane dérivé de ce processus peut être utilisé pour générer de l’électricité et de la chaleur pour la serre tandis que certains gaz de combustion peuvent être captés par carbonatation accélérée et transformés en matériaux de construction. Le restaurant, en plus d’être alimenté avec des fruits, des légumes et du poisson de la serre qui réduit les kilomètres alimentaires, peut fonctionner à peu près sans gaspillage puisque les restes de nourriture peuvent être donnés aux poissons ou compostés. Les solides provenant des eaux usées peuvent être détournés vers les digesteurs anaérobies tandis que l’eau restante peut être traitée pour être utilisée comme eau potable locale ou eau grise pour les chasses d’eau des toilettes. Les engrais provenant des diverses formes de traitement des déchets peuvent être utilisés dans la serre. Cette méthode reprend l’idée que la Nature est un écosystème. Les déchets produits par un être vivant deviendront des nutriments pour un autre. L’idéal serait d’appliquer ce concept à de nombreuses zones urbaines existantes et de nouveaux plans directeurs durables. Alors qu’au XXe siècle, nous nous sommes habitués à séparer les activités d’infrastructure en opérations mono fonctionnelles à grande échelle, ce processus rassemble les fonctions de manière à ce que les entrées et sorties puissent être connectées pour former un modèle en boucle fermée.


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CONCEPTION ET ORGANISATION:

- Utiliser peu de thèmes pour générer de multiples variations: «La vie utilise peu de thèmes pour générer de multiples variations : cercle concentriques (tronc d’arbres), spirales (pommes de pins), ramifications (vaisseaux sanguins) […] A partir d’un nombre de schémas et de règles restreint, toutes les formes du vivant sont générées»18 Ces mêmes schémas représentent l’optimisation énergétique, structurelle, hygrométrique, et autres ; ils sont ainsi déclinés et adaptés dans des séries de variations appliqués aux organismes. En architecture, cela pourra être appliqué par l’utilisation de « schémas types » qui varieront et s’adapteront en fonction de la nature, de l’échelle et des caractéristiques de la réflexion.

- Prévoir une résilience et un pouvoir d’adaptation : La notion de résilience est évoquée notamment par Gauthier Chapelle dans ‘‘Le vivant comme modèle’’ qui la définit comme «une notion capitale qui représente la réponse du vivant au fait que la Terre soit dans un état de non-équilibre dynamique, où les changements du système sont à la fois permanents et imprévisibles.»19 La conception architecturale résiliente aura donc un pouvoir d’adaptation au même titre que les organismes vivants. Pour s’adapter aux changements de conditions, il devra y avoir des variations possibles, des duplications, une décentralisation, etc. En adéquation avec ces principes, nous pouvons citer le projet Orquideorama de Plan B Arquitectura à Medellin, qui a pour vocation de présenter des jardins et des orchidées mais aussi d’accueillir des manifestations diverses. Le projet devait aboutir à un programme et une forme souple en relation avec le végétal. C’est ainsi que le dessin s’inspirant du biologique et de la Nature, se traduit par une structure d’hexagones évoquant le tissu cellulaire et le monde végétal. Au-delà de l’aspect formel, le projet se comporte 18

Ibid.

19

Ibid.


Le biomimétisme appliqué à la conception architecturale | 35

comme un organisme cellulaire vivant qui peut grandir petit à petit par adjonction de modules. La capacité de ces modules à s’auto organiser s’inspire des structures hexagonales en nids d’abeilles mais se comporte plutôt comme un principe cellulaire. La répétition de ces modules permet de faire varier le plan, de pouvoir faire évoluer l’ensemble et d’obtenir un grand pouvoir d’adaptabilité.

ORQUIDEORAMA, Plan B Arquitectura, Medellin, Colombie Principes d’organisation du projet Orquideorama de Plan B Arquitectura. Images (20), (21), (22), (23)


36 | Biomimétisme et architecture

CONSTRUCTION : - Avoir recours à des expertises locales : La nature est opportuniste et se sert de ressources, de matière et d’énergie disponibles localement.

- Construire par juxtaposition : La vie se développe par ajouts d’éléments indépendants. Par exemple, un corps se construit par la juxtaposition d’éléments cellulaires. Le nid de l’oiseau se construit filaments par filaments. Il ne s’agit pas de partir d’un bloc de matière que l’on vient façonner pour un résultat souhaité, mais de construire du plus petit au plus grand, par assemblage d’unités. En combinant par exemple des éléments modulaires et emboîtés qui vont s’autoorganiser. Auto organisation et structure hiérarchique d’un conifère comme modèle pour la construction architecturale, Image (24)

- Optimiser plutôt que maximiser : C’est ce que l’on appelle la conception intelligente en biologie. En effet, en biologie comme en architecture, la structure et la forme vont être des paramètres importants pour l’optimisation des ressources. Les constructions et organismes du Vivant mêlent des qualités structurelles, formelles ou comportementales qui leur permettent de faire plus avec moins. Ainsi les architectures du Vivant utilisent les matériaux avec parcimonie. En effet, elles ne sont pas surdimensionnées, la forme est adaptée à la fonction avec le minimum de matériau nécessaire. Les structures sont faites pour remplir plusieurs fonctions. C’est le cas notamment des fleurs de Venus (euclepta aspergillum) qui ont inspiré la structure de la Gherkin Tower de N.Foster à Londres. D’après Joanna Aizenberg, biochimiste à l’Université de Harvard, si on construisait une structure ultra résistante, optimale avec un minimum de matériau on obtiendrait un résultat comme l’Euclepta aspergillum. Cette seule structure rassemble 7 principes de constructions différents, l’élément constituant de


Le biomimétisme appliqué à la conception architecturale | 37

l’ossature sont les spicules croisées qui forment une couronne mis bout à bout. En superposant plusieurs couronnes on obtient un treillis d’horizontales et de verticales. Ce treillis est parcouru de pièces obliques, des contrefiches, qui consolident la structure mais seulement à certains endroits, certains «carrés» n’ont pas de contrefiches car elles seraient inutiles. A cela s’ajoute des arêtes en spirales qui entourent le système. 20 Aucun architecte n’est allé imiter cet organisme dans sa totalité, mais on peut voir des similarités dans la tour de Foster. En effet, il reprend le système en treillis horizontal et vertical pour le cœur de sa structure, les diagonales sont mises en enveloppe. On peut aussi retrouver les spirales évoquées plus tôt mais en négatif dans le projet, car il laisse un vide spiralique communicant sur la hauteur et permettant une ventilation générale.

GHERKIN TOWER, Norman Foster, Londres Principes constructif d la Gherkin Tower. Images (25), (26), (27) Croquis d’une Euclepta Aspergillum, Image (28) 20

ARTE, 04 mars 2011, Construire efficacement, Biomimétisme - Naturellement génial, URL: https://www.dailymotion.com/video/xiyepq, consulté en ligne le 15/05/2018, Dailymotion.com, consulté en ligne le 15/05/2018.


38 | Biomimétisme et architecture

Comment concevoir avec le bio mimétisme? Dimensions et composantes d’inspirations La méthode biomimétique s’articule autour de différentes dimensions et composantes d’inspiration. Quelques ouvrages théoriques tentent d’expliciter cela, comme notamment M.Pedersen Zari dans «Regenerative Urban Design and Ecosystem Biomimicry » qui introduit la notion de dimensions, que l’on peut considérer comme des échelles d’inspiration.21 D’autre part, Gauthier Chapelle distingue des « niveaux » d’inspirations dans la conception biomimétique22, sa réflexion sera complétée par F.Guéna dans « Biomimétisme en architecture. État, méthodes et outils »23. Personnellement, j’ai choisi de redéfinir la notion de « niveaux » d’inspiration en « composantes » d’inspiration que je trouve plus adéquate. Nous considérons alors qu’il existe des dimensions d’inspirations formées de différentes composantes. Dans un premier temps, on distingue 3 dimensions : celle de l’organisme (on imite un organisme spécifique) ; celle du comportement (on imite le comportement et les interactions d’un organisme) et celle de l’écosystème (on imite l’entièreté d’un écosystème). Ces différentes dimensions sont constituées de différentes composantes qui sont : la forme (à quoi cela ressemble ?) ; les matériaux (en quoi cela est fait ?), les processus (comment cela fonctionne ?), la fonction (qu’est-ce que cela fait ?) et enfin la construction (comment cela est-il fait ?). 21

PEDERSEN-ZARI Maibritt, Regenerative urban design and ecosystem biomimicry, Routledge research in sustainable urbanism, Oxon, 2018, ISBN 978-1-138-079489, .

CHAPELLE Gauthier, HULOT Nicolas, DECOUST Michèle, PELT Jean Marie et SCHUITEN Luc, Le vivant comme modèle : la voie du biomimétisme, Albin Michel, 2015, 348 pages, ISBN 9782226320186, . 22

23

CHAYAAMOR HEIL Natasha, GUENA François et HANNACHI-BELKADI Nazila, Biomimétisme en architecture. État, méthodes et outils, Les Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère, mis en ligne le 30 janvier 2018, consulté en ligne le 27 avril 2018, URL : http://journals.openedition.org/craup/309, DOI : 10.4000/craup.309.


Le biomimétisme appliqué à la conception architecturale | 39

Concernant la dimension éco systémique, elle présente un grand intérêt car ‘‘le bâtiment n’est plus envisagé à partir des catégories traditionnelles de façade, de mur, de lieu, mais comme un système spatial écologique’’24 . L’ensemble de l’architecture se constitue alors de plusieurs solutions inspirées de la nature se répondant entre elles, cela constituant un écosystème architectural.

ORGANISME

FORME MATÉRIAUX COMPORTEMENT

PROCESSUS FONCTION CONSTRUCTION

ÉCOSYSTÈME

24

PITROU Perig, DALSUET Anne et HURAND Bérengère, Modélisation, construction et imitation des processus vitaux. Approche pluridisciplinaire du biomimétisme, Natures Sciences Sociétés, Volume 23, p 380-388, 2015, ISSN 1240-1307, DOI 10.1051/nss/2015063, URL: https://www.cairn.info/revue-natures-sciences-societes2015-4-page-380.htm, consulté en ligne le 20/04/2018, depuis Cairn.info, .

Schéma des niveaux d’inspiration. Image (29)


40 | Biomimétisme et architecture

Méthodes de réflexion Les experts en bio mimétisme distinguent deux approches possibles : La première naît d’un problème de conception, les concepteurs vont alors identifier les paramètres et les buts de la conception, puis ils vont rechercher et analyser les solutions proposées par les animaux ou les végétaux pour ensuite en tirer des grands principes et les traduire dans leur projet. C’est l’approche «orientée problème», on part du problème.

La seconde naît de l’identification d’une particularité d’un organisme ou d’un écosystème qui pourra répondre à un problème de conception à trouver, ici ce seront d’avantage les biologistes et spécialistes du Vivant qui chercheront un problème à résoudre. C’est l’approche «orientée solution », on part de la solution.

Dans les deux cas, ces approches nécessitent une collaboration entre architectes (qui apporteront des problèmes de conception) et biologistes (qui apporteront des solutions de conception).

Cette collaboration entre biologistes et architectes a été théorisée pour la première fois par Werner Natchtigall (biologiste) et Goran Pohl (architecte) avec leur méthode nommée «Bau-Bionik » (2003). Ici, Natchtigall pose la question de comment la biologie peut être utilisée en architecture ? A cela il répond que « les inspirations naturelles à appliquer à l’architecture doivent être abstraites, c’est-à-dire que nous devons considérer les qualités indépendamment de leur objet tel qu’on le voit ou qu’on l’imagine ».25 De ce fait, voici une synthèse personnelle des étapes de réflexion pour la conception biomimétique en architecture, que je tenterai d’appliquer en deuxième partie : 25

CHAYAAMOR HEIL Natasha, GUENA François et HANNACHI-BELKADI Nazila, Biomimétisme en architecture. État, méthodes et outils, Les Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère, mis en ligne le 30 janvier 2018, consulté en ligne le 27 avril 2018, URL : http://journals.openedition.org/craup/309, DOI : 10.4000/craup.309.


Le biomimétisme appliqué à la conception architecturale | 41

ANALYSE D’UN SITE - Analyse spatiale, historique, culturelle, économique... - Analyse des contraintes et des enjeux

FORMULATION D’UN PROBLÈME SPÉCIFIQUE ET D’UNE INTENTION - Identifier les enjeux de conception - Identifier la fonction principale de la conception - Émettre une hypothèse architecturale de résolution

RECHERCHE DE SOLUTIONS BIOLOGIQUES - Rechercher un système biologique qui répond aux enjeux de conception ou à la fonction

IDENTIFICATION ET ABSTRACTION DES PRINCIPES - Décomposer et schématiser le système - Identifier les dimensions et les composantes d’inspiration - Identifier les atouts et les contraintes du système

IMPLÉMENTATION DANS LE PROJET - Architecturer les principes identifiés - Identifier l’univers sémantique et les techniques existantes permettant la matérialisation architecturale - Insérer l’abstraction au sein du site

Schéma personnel des étapes de réflexion type ‘‘problem-based’’. Image (30)


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Eden Project, Grimshaw Architects | 45

ETUDE DE CAS Eden Project Cornouailles, Royaume-Uni Grimshaw, Pawlyn

Client - Eden Project Limited

Architecture – Nicolas Grimshaw Michael Pawlyn Ingénierie environnementale - Arup

Ingénierie structurelle - SKM Anthony Hun Constructions des biomes – MERO Gestion de projet – Davis Langdon Paysagistes - Land Use Consultants Dôme d’une serre de l’Eden Project Image (31)


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Etat de la carrière avant construction Image (32)


Eden Project, Grimshaw Architects | 47

Ici nous verrons comment la méthode de conception biomimétique, expliquée plus tôt, s’applique à la conception de l’Eden Project. Ce complexe environnemental commandé par Tim Smith, anthropologue et archéologue britannique, a été dessiné et conçu par l’agence d’architecture britannique Nicolas Grimshaw et en particulier Michael Pawlyn. Ce dernier, souvent cité parmi les architectes référents du bio mimétisme, s’attache à intégrer dès le début de la réflexion architecturale, le bio mimétisme et la biophilie pour concevoir de manière durable. De plus, cette réalisation architecturale montre le potentiel du bio mimétisme pour l’élaboration de structures légères et résistantes dans un contexte unique aux besoins spécifiques.

ETAPE 1 : ANALYSE DU SITE L’Eden Project a été construit dans une ancienne carrière située à 2 km de St-Blasey, dans les Cornouailles, au Royaume-Uni. Les Cornouailles se situent à l’extrémité sud-ouest de l’Angleterre et bénéficient d’un climat doux où les vents maritimes amènent fréquemment de l’humidité. La température va de 5° en hiver à 25° en été. Les gisements importants de kaolin dans les Cornouailles ont conduit l’ancienne carrière de St-Blasey à être exploitée pendant plus de 160 ans pour son argile blanche qui servait en majeure partie à la production de porcelaine, mais aussi de papier, de caoutchouc. Son déclin économique et son abandon laisse au territoire un grand cratère difforme et difficilement exploitable dans le paysage. Depuis quelques années, la politique des Cornouailles face à l’abandon progressif de nombreuses mines fut donc de restaurer le paysage au profit de l’environnement. L’Eden Project s’inscrit ainsi dans cette démarche en proposant de construire un parc végétal, destiné à montrer la capacité régénérative que possède la Nature face à des espaces appauvris par l’activité humaine.


48 | Biomimétisme et architecture

ETAPE 2 : UN PROBLEME SPECIFIQUE ET UNE INTENTION L’objectif principal était donc de venir construire des serres dans cette ancienne carrière où le sol était irrégulier et d’une capacité de charge limitée. Il s’agissait alors de concevoir une structure légère adaptée au terrain (compte tenu de la faible capacité portante du sol) mais aussi de proposer une construction solide tout en minimisant l’utilisation de matériaux. Le tout proposant une situation adaptée en serre pour y installer deux biomes26 : un biome Méditerranéen et un biome humide tropical. Ces derniers sont des biomes qui demandent des conditions climatiques très différentes de celles des Cornouailles. En effet dans le biome humide tropical peuvent pousser des arbres de grandes hauteurs à des températures entre 18 et 35°C.

ETAPE 3 : RECHERCHE DE SOLUTIONS BIOLOGIQUES Face à ce paysage difficile à aménager, Grimshaw et Pawlyn eurent l’idée de s’inspirer de bulles de savon. En effet, les bulles de savon sont des structures qui s’adaptent à toutes les formes de surfaces sur lesquelles elles s’installent. Les bulles sont finalement uniquement de l’air qui est enveloppé dans un film très fin d’eau transparent. Lorsque deux bulles se rejoignent, elles partagent un même « mur ». La génération de la forme des serres a donc été définie par ce procédé. La structure du « film » de ces bulles s’inspire de certaines structures biologiques comme les grains de pollen ou les radiolaires (organismes microscopiques marins) qui se doivent d’être assez légers mais résistants dans leur milieu naturel. On retrouve dans ces organismes une structure naturellement fréquente dans le vivant, faite de formes hexagonales répétées, qui permettent d’assurer une solidité maximale à l’organisme tout en utilisant un minimum de matériau. 26

Un biome est une unité écologique, également appelée aire biotique. Elle fait référence à une vaste zone géographique qui partage un climat, une faune et une flore similaires : un ensemble d’écosystèmes aux conditions écologiques identiques. LA RÉDACTION GEO, Ecosystème : Qu’est-ce qu’un biome ? , 2018, www.geo.fr, URL: https://www.geo.fr/environnement/ecosysteme-quest-ce-quun-biome-193899, Consulté en ligne le 29/04/2019, .


Eden Project, Grimshaw Architects | 49

Bulles de savon Image (33)

Radiolaires Image (34)


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ETAPE 4 et 5 : IDENTIFICATION DES PRINCIPES, ABSTRACTION ET IMPLEMENTATION DANS LE PROJET

Forme : Le projet s’inscrit alors comme une série de bulles dans la topographie du site. Le diamètre des bulles varie pour permettre différentes hauteurs de croissance pour les plantations. Ce type de construction a ainsi pour effet de minimiser l’aménagement au sol et de permettre une orientation solaire optimisée. Pour la réalisation, les architectes de Grimshaw prennent comme référence le système géodésique rendu célèbre par Buckminster Fuller et la biosphère sphérique aux faces hexagonales construite à Montréal au Canada.

[En haut à gauche] Simulation du modèle biologique dans le site Image (35) [Au milieu à gauche] Axonométrie Image (36) [En bas à gauche] Coupe transversale de l’Eden Project Image (37) [A droite] Domes géodésiques de B.Fuller Image (38)


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Structure : Par ce système, les charges transmises au sol ne sont pas ponctuelles mais sous forme linéaire sur tout le périmètre de la structure, ce qui permet de réduire la profondeur des fondations. D’autre part, ce type de structure est finalement plus susceptible de se soulever par la force des vents que de s’écrouler. Elles sont donc liées aux fondations par des ancrages, similaires à des piquets pour fixer une tente. Le sol a tout de même dû être retravaillé en y ajoutant des résidus d’argiles couplé à des déchets organiques pour créer un compost.

Réalisation technique : Pour la réalisation technique, la structure de cette série de dômes géodésiques a été résolue en une série d’unités plus petites, de petits composants qui sont juxtaposés sur le site pour construire la forme générale. Cela passe par la préfabrication de ces éléments. En effet, la construction des dômes est divisée en deux couches. La couche interne est une grille triangulaire et hexagonale qui vient sous tendre l’ensemble. L’entièreté de la forme est mise en compression et ce qui permet de rigidifier et maintenir la structure. La couche externe est constituée de panneaux hexagonaux, recouverts par 3 couches d’ETFE (éthylène tetrafluoroéthylène). C’est un polymère de plastique hautement résistant, non dérivé du pétrole. En effet, son poids ne représente que 1% de celui d’un revêtement similaire en verre tout en transmettant plus de lumière et coutant moins cher à installer. Cette différence de poids a notamment permis d’utiliser une quantité d’acier moindre et ainsi de diminuer les coûts tout en permettant à davantage de soleil d’entrer dans les serres. Au niveau des « murs » d’intersection entre les dômes, des fermes en acier sont placées afin d’assurer la liaison entre les différentes « bulles ». Au final, le poids total de la construction est inférieur à celui de l’air qu’elle renferme.


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Détail de fondation en coupe Image (39)


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Double structure Image (40)

Mise en place de la double structure Image (41)

Mise en place de panneaux EFTE Image (42)


TABLEAU D’ANALYSE

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DIMENSIONS & NIVEAUX D’INSPIRATION Forme Matériaux Processus Fonction Construction

Organisme Comportement Écosystème

La structure reproduit la forme des bulles de savon pour la forme générale et la forme des radiolaires pour la structure.

GRANDS PRINCIPES Énergie et déchets La topographie creusée de la carrière aide à Utiliser de l’énergie propre, abondante et non mettre en place un microclimat abrité, où le gain fossilisée comme l’énergie solaire, le vent, l’eau solaire se fait sur les pentes orientées Sud.

Limiter son utilisation d’énergie Ne pas épuiser les ressources

Un système de récolte d’eau de pluie est mis en place aux pieds des serres afin de venir irriguer les plantations.

Gestion du programme Fonctionner en cycles durables Utiliser les déchets comme ressources

21% des déchets recyclés contribuent à créer des ressources, comme par exemple les déchets organiques des restaurants pour les visiteurs sont réutilisé comme compost pour les plantations.

Optimiser par la multifonctionnalité Se diversifier et coopérer

Ce principe n’a pas été pris en compte


56 | Biomimétisme et architecture

Conception et organisation Utiliser peu de thèmes pour générer de multiples variations

A partie du modèle biologique de la bulle de savon les architectes ont pu créer des serres dont la hauteur, la taille et l’apparence présentent des variations.

Prévoir une résilience et un pouvoir d’adaptation

Ce principe n’a pas été pris en compte

Construction Avoir recours à des expertises locales

Ce principe n’a pas été pris en compte

Construire «bottom up»

La juxtaposition de panneaux EFTE sur un structure métallique pour former un tout permet à la structure de se construire bottom up.

L’utilisation intelligente de matériaux légers a permis d’optimiser la structure en réduisant les sections porteuses pour ainsi faire une économie de matériau.

Optimiser plutôt que maximiser :

Impact Avoir un impact positif ou neutre sur le milieu

Le projet cherche a impacter positivement le milieu en dynamisant sa biodiversité.

Pour conclure Ce projet est une utopie réalisée ponctuellement qui propose la création artificielle d’écosystèmes pour la sensibilisation et l’éducation. Il n’apporte pas de solutions pour un enjeu général tel que l’Eastgate Center de Mick Pearce (analysé en annexes) mais propose une solution adaptée à un programme et surtout contextualisée dans un environnement difficilement constructible.


Eden Project, Grimshaw Architects | 57


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Paris sous la pollution Image (43)


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PROBLÉMATIQUES DES MILIEUX URBAINS ET BIOMIMÉTISME Problématiques générales


62 | Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

Après avoir identifié les caractéristiques de la méthode bio mimétique en architecture, nous verrons comment cette dernière s’applique aux milieux urbains denses, notamment à travers l’élaboration d’un projet.

Urbain et biomimétisme La ville du 21ème siècle ainsi que ses infrastructures représentent l’évolution technologique, le développement économique ainsi que l’innovation culturelle. Cependant, elle cristallise aussi des défis de développement durable importants qui obligent à repenser notre mode de réflexion concernant l’aménagement urbain, la création de quartiers et d’infrastructures publiques et privées.

En effet, la ville est devenue, en moins d’un siècle, le lieu de vie dominant. Selon J.Jouzel, nous sommes actuellement 53% de la population à habiter les villes dans le monde ; en 2050 nous serons plus de deux tiers.27 Les écosystèmes urbains ne représentent pourtant que 2% de la planète mais émettent actuellement 60% des gaz à effets de serre de la planète. 28 L’augmentation démographique des milieux urbains engendre une surexploitation des ressources naturelles, des surconsommations d’énergies, une quantité importante de déchets et de pollution. La ville et sa société humaine se déconnectent et deviennent de plus en plus incompatibles avec la biosphère. Toutefois, ces mêmes milieux urbains constituent un laboratoire d’expérimentation et, par leur rayonnement, ont un rôle de médiatisation des nouvelles formes de développement durable.

JOUZEL Jean, 2018, Quelle ville pour demain ?, Biomim Expo, Paris, 10/09/2018, . 27

28

HUSSON Laurent ibidLe biomimétisme pour les villes résilientes et régénératives au service du climat, .


Problématiques générales | 63

Aujourd’hui, l’attente de solutions est de plus en plus prégnante. En réaction, les méthodes d’innovation deviennent de plus en plus en rupture avec les solutions ‘‘traditionnelles’’. Le biomimétisme se positionne alors comme un ‘‘accélérateur de solutions’’ et propose de nouveaux liens entre nos constructions urbaines et les défis environnementaux. L’architecture biomimétique fait donc le pari de puiser de nouvelles stratégies dans la Nature, modèle en apparence opposé à celui des milieux urbains. Mais les organismes naturels ne sont-ils pas - à l’image des citadins - des habitants ? Des habitants de milieux naturels, d’écosystèmes au sein desquels il n’y a pas de place pour la notion de déchet ou de pollution, dans lesquels l’optimisation et la coopération, entre autres, sont des moteurs de développement.

Actuellement, cette nouvelle solution propose aux milieux urbains de s’interroger sur l’idée d’une « ville biomimétique ». Cette idée récente attend encore de voir des cas concrets l’illustrer car pour l’instant elle reste de l’ordre de la prospective théorique. Cette dernière est représentée par des ouvrages théoriques tels que Regenerative urban design and ecosystem biomimicry29 de Maibritt Pedersen Zari qui s’interroge sur le potentiel de la ville à devenir un ensemble écosystémique autonome grâce au biomimétisme. C’est-à-dire un ensemble urbain, une ville qui produirait, comme un écosystème naturel, ses propres énergies, eau et nourriture et serait conçue pour réguler et s’adapter au climat local, tout en recyclant les nutriments, en purifiant l’eau, l’air et le sol. 30

29

PEDERSEN-ZARI Maibritt, Regenerative urban design and ecosystem biomimicry, Routledge research in sustainable urbanism, Oxon, 2018, ISBN 978-1138-07948-9, . 30

Nous pourrions citer Kalundborg pour la symbiose présente entre les différentes industries du parc, mais ceci s’éloignant du contexte urbain ce cas ne sera pas traité.


64 | Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

Projet de la ville de Lavasa Image (44)

En terme de réalisations concrètes, il semble important de faire une distinction entre les opérations effectuées pour construire la ville et les opérations faites pour compléter, améliorer et modifier la ville. Dans le cas de la construction « ex nihilo » de la ville biomimétique, on retrouve la ville indienne controversée de Lavasa qui est pensée théoriquement comme un écosystème adapté au climat tropical local. Les forêts locales servent ici de modèle biologique pour générer la conception de cette ville, dans laquelle, à l’instar des arbres, les toits de la ville ont été pensés pour retenir l’eau de pluie lors des moussons et la rejeter sous forme de vapeur durant les périodes de sécheresses. De plus, les trottoirs et routes sont pensés pour résister à l’eau tout en laissant passer les pluies torrentielles. Cependant, la réalisation de cet ensemble urbain s’est finalement avérée particulièrement destructrice en terme d’environnement puisque la ville s’est installée sur les collines d’un paysage essentiellement naturel et verdoyant. En outre, le projet Lavasa a fait débat pour la qualité de la réponse qu’elle propose en termes d’augmentation démographique et de problématiques urbaines.

Dans le cas de la ville complétée, modifiée par des interventions locales on peut retrouver des projets comme l’Eastgate Center de Mick Pearce, analysé en annexes, qui s’inspire des termitières pour ventiler naturellement un édifice. Il s’agit donc de s’attacher


Problématiques générales | 65

à la résolution d’une problématique principale qui est ici la gestion de l’énergie. On retrouve aussi dans cette catégorie la tour de la Bank of America qui a la capacité de purifier l’air pollué entrant et de rendre à l’environnement un air dépollué par le moyen de filtres à air, fonctionnant ainsi comme la bio épuration pratiquée par les végétaux. Ces deux cas d’architecture biomimétique ponctuelle ont des exemples parmi beaucoup d’autres, (notamment ceux développés en première partie). Ceci à la différence des cas de conception entière de ville biomimétique qui sont à ce jour beaucoup plus rares.

Ces deux façons de concevoir la ville par le bio mimétisme s’opposent par leur positionnement. L’une s’attache à remplacer complètement un écosystème naturel existant pour venir créer un milieu urbain qui serait performant. Néanmoins, cela revient à construire, à partir de rien, un environnement bâti qui prendrait la place de la Nature, tout en favorisant l’étalement urbain et les impacts allant avec. Tandis que l’autre vient se positionner à une échelle plus locale, par ponctions architecturales, prenant en compte l’existant, les individus présents sur un site et leur culture. Qui plus est, c’est un processus naturel que de réutiliser et de se servir de ressources à proximité et existantes. C’est pourquoi cette deuxième partie s’attachera à la deuxième philosophie de conception pour la ville biomimétique.

Coupe conceptuelle de l’intention pour la régulation thermique de l’Eastgate Center Image (45)


66 | Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

Introduction au site d’étude Pour cette étude, nous nous intéresserons au cas de l’agglomération parisienne. La métaphore de la pieuvre et de la méduse, développée dans « Paris Métropole : de la pieuvre à la méduse? » par J.Lorthois, décrit, par une analogie au vivant, l’état général de la région Ile de France. 31 En effet, certains urbanistes comparaient, il y a quelques années, la surface urbanisée de l’agglomération parisienne à une pieuvre, où la tête serait Paris et sa petite couronne ; et les tentacules s’étendaient alors par des « coulées » urbaines jusqu’aux villes nouvelles périphériques. Préservant ainsi, entre chaque «tentacules », des zones vertes et des étendues agricoles. Mais aujourd’hui la pieuvre est atteinte de diverses pathologies qui la menacent elle et son milieu : son étalement met en péril la relation symbiotique ville/ campagne mais aussi accentue la disparition des espace verts, augmentant le réchauffement climatique et transformant ces espaces en «fours urbains». 32 La pieuvre prend alors la forme de méduse géante. La métropole parisienne fait en effet partie de ces milieux urbains denses. Denses en termes de population « La population de la région devrait augmenter de 750.000 personnes entre 2007 et 2025, puis de 450.000 entre 2025 et 2040.»33, mais aussi en termes de surfaces construites et d’activités. Cela engendre donc des besoins de logements, mais aussi la création de nouvelles infrastructures publiques et privées. Actuellement, certains semblent vouloir résoudre ce problème en ajoutant des immeubles collectifs aux zones pavillonnaires de banlieue, diminuant ainsi de 31

LORTHIOIS Jacqueline, Paris Métropole : de la pieuvre à la méduse ?, Métropolisation : les nouveaux enjeux. Le cas de l’Île-de-France, publié le 1er février 2013, URL: http://j-lorthiois.fr/?p=259, consulté le 08/05/2018, .

32

CANTAT Olivier, L’îlot de chaleur urbain parisien selon les types de temps, Norois environnement & aménagement, 2004, URL: https://journals.openedition.org/ norois/1373, consulté en ligne le 14/05/2018, .

33

LEON Olivier, La populations des région en 2040, publié le 07/12/2010, Insee premiere n°1326, .


Problématiques générales | 67

nombreux espaces verts urbains pour sauvegarder la campagne périphérique. Cela a et aura pour conséquence une diminution de l’absorption et de la dispersion de la pollution, des eaux de pluie (causant alors une augmentation des crues et des inondations), ainsi qu’une diminution des espaces verts accessibles aux habitants et aérant l’urbain.34

La Pieuvre et la Méduse Image (46)

34

LIPIETZ Alain, Les pièges de la densification en Ile de France, CONSTRUCTIF, URL: http://www.constructif.fr/bibliotheque/2013-6/paris-un-cas-d-ecole.html?item_ id=3336, consulté en ligne le 08/05/2018, .


68 | Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

Emprise végétale (bois, parcs et forêts) de la petite couronne et de Paris intra muros Image (47)


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Température de l’air à 2m du sol le 10 aout 2003 à 6h du matin. Image (48)


70 | Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

La région parisienne présente un climat océanique tempéré grâce à sa proximité avec l’océan. Cependant, l’urbanisation de la région est la cause de l’apparition d’îlots de chaleur urbains qui rendent le climat parisien plus doux que sa périphérie. Il fait en moyenne 2°C de plus à Paris que dans sa périphérie rurale, mais parfois l’écart de température s’avère plus important. Un îlot de chaleur urbain (ICU) est, selon l’agence parisienne d’urbanisme APUR, « un terme pour décrire la spécificité climatique des villes par rapport aux zones rurales »35. En effet, ce phénomène est lié aux villes qui représentent des lieux de surchauffe importante. L’ICU est un phénomène qui n’apparaît que par cycle et que l’on retrouvera particulièrement durant la saison estivale. La présence de végétation est la principale raison pour laquelle les espaces ruraux s’en sortent mieux que les espaces urbains. Si on regarde l’étude réalisée par APUR, on peut voir que les zones les plus fraîches sont celles où la végétation est généralement plus importante. En effet, les végétaux pratiquent l’évapotranspiration et agissent comme des climatiseurs passifs : ils transforment l’eau liquide captée dans le sol en vapeur d’eau qui permet de refroidir l’air ambiant. De plus, certains arbres créent des zones d’ombres qui permettent aux sols de ne pas absorber trop de chaleur à ces endroits. Ainsi la présence de végétation préserve les territoires des phénomènes d’îlots de chaleur. Si on regarde l’évolution de la nature à Paris, on peut constater que, de 1730 à aujourd’hui, nous sommes passés d’une nature essentiellement agricole à une nature de loisirs36. Cette nature est contrôlée, domestiquée et dessinée dans des espaces verts bien délimités et fortement entretenus. Cela laisse peu de place à une nature sauvage, autonome et spontanée, capable de s’étendre pour nous offrir ses bienfaits. Cela a aussi pour impact la réduction de la biodiversité. Sur 20 ans la région parisienne a perdu un grand nombre d’espèces comme nous pouvons le voir sur ce graphique réalisé avec les chiffres de l’Agence régionale de biodiversité d’Ile-de-France.

36 35

APUR, Les îlots de chaleur urbains à Paris, Cahier n°1, Decembre 2012, .

APUR, Evolution de la nature à Paris de 1730 à nos jours n°122, note, Fevrier 2018, .


Problématiques générales | 71

OISEAUX NICHEURS sur 178 espèces

84%

CHAUVES SOURIS sur 22 espèces

54%

FLORE VASCULAIRE sur 85 espèces

40%

PAPILLONS DE JOUR sur 135 espèces

37%

LIBELLULES sur 135 espèces

35%

ABEILLES sur 865 espèces

12%

Évolution de la nature de 1730 à nos jours, APUR. Image (49)

Espèces disparues, en voie de disparition, menacées ou vulnérables Image (50)


72 |


| 73

PROBLÉMATIQUE DES MILIEUX URBAINS ET BIOMIMÉTISME Étape 1 : Analyse d’un site d’étude - La Petite Ceinture, un espace de nature sauvage

Photo personnelle de la Petite Ceinture du 15e, Paris Image (51)


74 | ProblĂŠmatiques des milieux urbains et biomimĂŠtisme

Plan de Paris en 1898 avec la Petite Ceinture en violet. Image (52)


Étape 1 : Analyse d’un site d’étude | 75

La Petite Ceinture de Paris est aujourd’hui un des rares espaces de nature sauvage verdoyante qui est apparu spontanément sur une ancienne voie de chemin de fer. Cette infrastructure illustre le changement de paradigme à venir de nos milieux urbains, où les espaces naturels reprennent leur place et proposent d’eux-mêmes des alternatives aux infrastructures que l’on abandonne. Ainsi on pourra s’intéresser aux processus naturels pour reprendre les espaces urbanisés et construire, ou laisser se construire des espaces sauvages similaires.

Histoire Pour comprendre l’importance de cette structure il faut remonter à l’époque du Second Empire, lorsque cinq compagnies privées de réseaux ferrés se partageaient le réseau ferroviaire autour de la capitale et faisaient parvenir les marchandises dans Paris par les cinq gares terminus de la ville. Mais ces réseaux n’étaient pas liés entre eux et ne facilitaient donc pas le transfert de marchandises à travers la ville. Seules les charrettes tirées par des chevaux, ou bien des détours par la province, pouvaient contribuer à l’échange des marchandises. Cela ralentissait les transferts et augmentait le cout des frets. De ce fait, en 1852, il fut décidé de connecter ces réseaux par une ligne ferroviaire circulaire de 32 km de long, longeant l’enceinte de Thiers (transformée par la suite en boulevards des Maréchaux). La création de plusieurs gares contribua à la dynamique de cette Petite Ceinture : neuf gares de marchandises permettaient de proposer à la ville du charbon, de transporter des produits alimentaires provenant notamment des marchés aux bestiaux et abattoirs de La Villette.

Trente-quatre gares de voyageurs furent aussi ouvertes, notamment lors des expositions universelles de la seconde moitié du 19e siècle qui suscitèrent un grand nombre de déplacements le long de la Petite Ceinture. De plus, la présence de gares rattachées à la ligne ferroviaire permettait la dynamisation et l’urbanisation


76 | Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

des quartiers traversés. Avec l’arrivée du métro en 1900, la Petite Ceinture a vu sa fréquentation chuter. En 1934 on remplace le transport ferré des voyageurs par un transport routier, la ligne de bus PC. Certaines sections furent totalement abandonnées, d’autres furent utilisées pour le transport de marchandises jusqu’en 1993. Aujourd’hui la Petite Ceinture, qui représente un véritable réservoir de faune et de flore, ne fait plus le tour de Paris. Certains parlent d’un continuum écologique alors que la voie circulaire s’est vu retirer un tronçon entre les quais d’Issy-les-Moulineaux dans le 15e arrondissement et la gare d’Auteuil dans le 16e arrondissement. En effet, auparavant, ce tronçon permettait à la ligne


Étape 1 : Analyse d’un site d’étude | 77

ferrée de circuler grâce au viaduc d’Auteuil, construit en pierre en 1863. Ce viaduc construit en 2 étages d’arcades permettait de séparer la circulation ferroviaire de la circulation routière et piétonne. Les arcades supportant la circulation ferroviaire continuaient ensuite le long du boulevard Exelmans jusqu’à la gare d’Auteuil. L’ensemble fut détruit en 1959 et remplacé par des infrastructures uniquement routières, permettant de récupérer une partie du trafic des boulevards des Maréchaux. Le pont du Garigliano remplaça le viaduc en 1963. D’une longueur de 209 mètres pour une largeur de 25 mètres, il a été réalisé en béton armé et en acier. Pouvant laisser passer plus facilement que son prédécesseur les péniches en cas de crues, il fut aussi construit dans l’idée de mettre en avant la circulation automobile.

Le pont du Garigliano a remplacé le viaduc d’Auteuil, Photomontage Image (53)


78 |


| 79 Plan du territoire et de l’existant montrant le tronçon manquant Image (54)


80 | Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

Etat des lieux

[A gauche] Gare de Pont de Flandre, réhabilitée en bar restaurant, photo de Pierre Folk Image (55) [A droite] Portions de la Petite ceinture abandonnées, photos de Pierre Folk Image (56) et (57)

La ligne présente une variété de configurations et de relations avec la ville alentour. Son profil varie en fonction de la diversité des tronçons traversés, parfois en remblai, en tunnel ou sur talus ; sa particularité est qu’elle n’est jamais traversée. Cela est permis par les nombreux ponts rails ou ponts rue qui font d’elle une structure continue, cachée au regard des passants. La relation qu’elle entretient avec ses abords est très variée puisque certains quartiers, qui ont été fortement urbanisés, disposent d’une vue sur la ligne et encadrent de manière intime l’infrastructure ; tandis que lorsqu’elle traverse des parcs elle s’enfonce dans des tranchées végétalisées où l’urbain n’est plus visible. Les anciennes gares, qui faisaient le lien entre les riverains et la Petite Ceinture, sont aujourd’hui squattées ou dans certains cas réhabilitées.


| 81


82 | ProblĂŠmatiques des milieux urbains et biomimĂŠtisme


Étape 1 : Analyse d’un site d’étude | 83

Portion de la Petite Ceinture du 15e réaménagée, photo personnelle Image (58)


84 | ProblĂŠmatiques des milieux urbains et biomimĂŠtisme


Étape 1 : Analyse d’un site d’étude | 85

Portion de la Petite Ceinture du 15e réaménagée, photo personnelle Image (59)


86 | ProblĂŠmatiques des milieux urbains et biomimĂŠtisme


Étape 1 : Analyse d’un site d’étude | 87

Portion de la Petite Ceinture du 15e réaménagée, photo personnelle Image (60)


88 | ProblĂŠmatiques des milieux urbains et biomimĂŠtisme


Étape 1 : Analyse d’un site d’étude | 89

Pont du Garigliano, photo personnelle Image (61)


90 | ProblĂŠmatiques des milieux urbains et biomimĂŠtisme


Étape 1 : Analyse d’un site d’étude | 91

Pont du Garigliano, photo personnelle Image (62)


92 |

Plan schĂŠmatique personnel de la Petite Ceinture Image (63)


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PROBLÉMATIQUE DES MILIEUX URBAINS ET BIOMIMÉTISME Étape 2 : Un problème spécifique et une intention - La Petite Ceinture, un espace vert continu


94 | Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

Aujourd’hui, la Petite Ceinture est le lieu de divers projets de mise en valeur. Trois tronçons exclusivement réservés à la promenade ont été aménagés et plusieurs gares ont été réhabilitées. Dont un tronçon dans le 15e arrondissement réalisé en 2013 où une voie sur deux a été aménagée en promenade. Cependant, la majorité de la ligne reste fermée au public et ne permet pas d’être parcourue dans son entièreté. Or cette infrastructure présente un atout considérable à pouvoir être réhabilitée en ligne verte continue.

Intérêt des continuités vertes urbaines En effet, les continuités vertes en ville sont d’une grande importance. Au cœur des villes, elles permettent aux espèces de se déplacer sans être menacées par des espaces bâtis hostiles. De plus, les continuités vertes relient les espaces verts plus importants, tels que des grands parcs, des bois, des lacs ou des forêts. Par les connexions vertes, la ville peut bénéficier d’une biodiversité ‘‘ordinaire’’. Cette biodiversité peut « contribuer à la durabilité du système urbain : sont définis des services d’approvisionnement (fourniture de nourriture, matériaux, etc.), de régulation (purification de l’air, régulation des pollutions, etc.) et culturels (esthétique, éducation, ambiance, etc.). »37 La multiplication des espaces verts peuplés par des végétaux spontanés et des insectes permettrait de rétablir des chaînes alimentaires essentielles au fonctionnement autonome des écosystèmes. De plus la mise en place de continuités vertes aurait un impact sur la climatologie locale. « Un alignement d’arbres peut baisser de 3 degrés la température d’une rue et dans un contexte de changement climatique, ce rôle prend un intérêt évident » 38 Ce qui pourrait répondre à la problématique des ICU évoquée plus tôt. 37

LINGLART Marine, MORIN Sylvain, PARIS Magali et CLERGEAU Philippe « Méthodologie de mise en place d’une Trame verte urbaine : le cas d’une communauté d’agglomération, Plaine Commune », mis en ligne le 06 juillet 2016, URL : http:// journals.openedition.org/cybergeo/27713, consulté le 30/04/2019, DOI : 10.4000/ cybergeo.27713 .

38

Ibid.


Étape 2 : Un problème spécifique et une intention | 95

Construire la continuité La Petite Ceinture de Paris envisagée comme continuité verte pourrait, tout d’abord, être un support pour la mobilité douce, parcourue par les cyclistes et les piétons. En changeant de paradigme, on ne peut pas imaginer remettre un système de transport comme on l’avait fait au siècle dernier, il faut inventer autre chose, transformer les infrastructures urbaines pour demain. De plus, elle pourrait constituer le seul véritable continuum écologique de la ville de Paris, et favoriser la sauvegarde de certaines espèces menacées. Le fait de la considérer en tant qu’espace vert permettrait aussi de rééquilibrer le rapport entre densité construite et espaces verts ouverts. Tout cela serait rendu possible par une reconnexion verte établie par un écoduc urbain entre le 15e arrondissement et le 16e arrondissement à l’emplacement du tronçon détruit. Un passage à plusieurs niveaux pourrait, à l’image de l’ancienne voie construite à partir du viaduc d’Auteuil, permettre la continuité naturelle. A partir de là, deux problèmes spécifiques se posent : à l’échelle du tronçon étudié, comment générer cette continuité verte ? L’objectif serait donc d’introduire et de maximiser la biodiversité du site, protéger l’habitat naturel, favoriser la faune et la flore. Ainsi, à l’échelle du tronçon étudié, nous pourrions nous intéresser aux processus naturels qui ont construit la Petite Ceinture d’aujourd’hui. Comment se sont mis en place les différents milieux naturels ? Comment la nature spontanée s’est-elle imposée sur l’infrastructure ? Mais aussi à une échelle plus précise, comment construire une structure qui soit suffisamment légère pour pouvoir être soutenue par le pont du Garigliano, conçu pour supporter son propre poids ainsi que celui des voitures et des piétons. L’objectif serait donc de trouver une solution de légèreté pour cet écoduc urbain.


96 | ProblĂŠmatiques des milieux urbains et biomimĂŠtisme


Étape 2 : Un problème spécifique et une intention | 97

Prospective pour le pont du Garigliano, Image (64)


98 |

Comme cette radiolaire, les structures naturelles contiennent plus d’air que de matière, Image (65)


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PROBLÉMATIQUE DES MILIEUX URBAINS ET BIOMIMÉTISME Étape 3 : Recherche de solutions biologiques


100 |Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

S’inspirer des processus naturels pour générer du territoire Dans un premier temps, pour répondre à l’objectif de génération d’une continuité verte, il ne suffit pas simplement de planter mais de comprendre comment le vivant permet à la diversité végétale de se mettre en place, de vivre et de se multiplier. La Petite Ceinture sur toute sa longueur présente une mosaïque de milieux et paysages variés. En traversant des milieux variés tels que des espaces de nature, des parcs (la coulée verte René Dumont, André Citroën, Georges Brassens, Montsouris, le square Charles Péguy, le parc des Buttes-Chaumont et celui des Batignolles), la Seine, des faisceaux ferrés et autres ; elle s’inscrit dans un réseau écologique plus large. Ainsi nous retrouverons à certains endroits plus de massifs arbustifs ou plus de ronciers, plus de rongeurs ou plus de reptiles. Ces différents milieux contiennent des organismes qui se sont adaptés aux caractéristiques, ressources et situations particulières.

Coupe représentant un échantillon de la biodiversité présente sur la Petite Ceinture Image (66)


Étape 3 : Recherches de solutions biologiques| 101

Ces différents milieux s’interpénètrent pour former ce qu’on appelle des écotones. Les écotones sont définis en écologie comme « des zones qui délimitent deux milieux naturels »39. Par exemple ce sera la zone entre une prairie et une forêt. Ces zones sont généralement très riches en biodiversité puisqu’elles accueillent des espèces appartenant à chacun des milieux ainsi que des espèces propres à l’écotone. C’est cet échange continuel entre espèces qui contribue alors à la dispersion des graines et du pollen, favorisant ainsi la dissémination et la diversité végétale. La mise en place des dispositifs entomophiles40 permettrait de maximiser la biodiversité de l’intervention, de la relier au contexte écologique, de protéger et créer de l’habitat naturel pour favoriser la faune et la flore. L’invitation d’insectes dans le projet permettrait la pollinisation et donc l’augmentation de la diversité végétale. Par ce biais, on considère que l’insecte est un élément qui génère du territoire.

La pollinisation comme outil générateur de territoire Image (67) 39

DUVIGNEAUD Paul, LAVERGNE Didier, PÉRÈS Jean-Marie et LAMOTTE Maxime, BIOCÉNOSES, Encyclopædia Universalis, URL : http://www.universalis-edu. com/encyclopedie/biocenoses/, consulté en ligne le 16 février 2019.

40

pollen

Dont la fécondation se fait par l’intermédiaire d’insectes qui transportent le


102 |Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

S’inspirer des structures naturelles pour concevoir Dans un second temps, pour répondre à l’objectif de construction d’un écoduc léger, on peut s’inspirer de la majorité des structures du vivant qui contiennent plus d’air que de matière. Ces dernières sont optimisées pour être résistantes en utilisant le moins de matière possible.

Le modèle biologique des architectures animales qui parasitent et qui s’appuient sur des structures existantes pour construire leurs habitats fait écho à la volonté de s’appuyer sur une structure existante sans la mettre en péril. On retrouve par exemple dans cette catégorie les insectes tisseurs comme les araignées ou les vers à soie.


Étape 3 : Recherches de solutions biologiques| 103

De manière générale, les insectes font partie des groupes d’animaux les plus diversifiés sur Terre, comprenant plus d’un million d’espèces décrites et représentant plus de la moitié de tous les organismes vivants connus. Le nombre d’espèces existantes est estimé entre six et dix millions et représente environ 90% des formes de vies animales. Les insectes peuvent être trouvés dans presque tous les environnements. Au cours de leur évolution, les insectes et les arthropodes ont évolué dans une grande variété de formes et de structures. 41

41

CHAPMAN Reginald Frederick, The Insects : Structure and function, Cambridge University Press, Edité par Stephen J.Simpson et Angela E. Douglas, 5e édition, ISBN 978-0-521-11389-2, . Architectures animales Image (68)


104 |Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

Si on s’y intéresse de manière globale, les matériaux, les structures les surfaces et les constructions de ces derniers présentent un grand intérêt scientifique et architectural. En effet, nous considérons que la durabilité et la multifonctionnalité sont aujourd’hui les grands défis architecturaux ; or les insectes sont parmi les organismes qui se sont le plus adaptés à ce genre de problématiques au cours de leur évolution. Et avec plus d’un million d’espèces décrites comme source d’inspiration, on peut s’attendre à beaucoup d’idées provenant de l’entomologie42. De plus, ces animaux construisent un certain nombre de constructions remarquables à base de soie, de colle et de matériaux non vivants environnants43. Les zoologistes, entomologistes et morphologistes ont rassemblé une grande quantité d’informations sur la structure et la fonction de tels bâtiments, ainsi que sur les matériaux utilisés. On peut étudier ces informations pour les imiter dans diverses applications de l’architecture moderne. Ici nous nous intéresserons principalement aux structures tendues en fil de soie. Chez les insectes tisseurs la toile a le rôle d’outil de communication, de transport, d’échange. Par un réseau de fils tendus au-dessus du vide, les usagers se transmettent des informations essentielles à la survie du groupe. Pour certaines espèces de chenilles, la structure en soie est le fil conducteur qui mène à la nourriture par exemple. Pour les araignées, la toile sert de structure qui capte et filtre les proies. C’est un lieu de ressources important. De plus la répartition de plusieurs toiles dans un milieu permet la régulation de la population d’insectes, impactant directement la biodiversité.

Ainsi dans le projet l’insecte pourrait devenir à la fois collaborateur et source d’inspiration. 42

Entomologie : en zoologie, étude scientifique des insectes – Définition de l’encyclopédie Universalis, consulté en ligne le 19/05/2019, URL : https://www. universalis.fr/

HANSELL Mike, Built by Animals: The natural history of animal architecture, OUP Oxford, 2007, ISBN 9780191578601, URL: https://books.google.be/ books?id=jwUkAM3DvE4C, .

43


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Toile en soie d’araignée, Exposition de Tomas Saraceno Image (69)


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Toile en nappe de l’Epeire d’Opuntia, Image (70)


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PROBLÉMATIQUE DES MILIEUX URBAINS ET BIOMIMÉTISME Étape 4 : Identification et abstraction des principes


108 |Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

Les toiles en nappe

Les structures tendues les plus connues sont celles des toiles géométriques qui vont chercher des appuis dans l’environnant pour construire un système de rayons et de spirales. Mais il existe d’autres sortes de toiles comme notamment les toiles irrégulières, non géométriques qui sont classées en plusieurs catégories. Celles qui m’ont intéressée en particulier sont les toiles nommées « pièges en nappe » qui forment une surface épaisse et horizontale. Ces nappes sont constituées d’un enchevêtrement confus de fils serrés formant une surface continue. Une espèce d’araignées, l’Épeire d’Opuntia, a la particularité de réaliser la construction de sa nappe par le biais d’une maille carrée régulière. Avec le temps et l’accumulation de plusieurs couches successives de soie, la surface s’épaissit et devient très solide. Toile en nappe de l’exposition de Tomas Saraceno Image (71)


Étape 4 : Identification et abstraction des principes| 109

En ce qui concerne leur structure et leur construction, ces toiles sont posées au-dessus de la végétation, suspendues par des fils verticaux à des supports. Ces sommets sont reliés par des fils de soie, «servant à l’édification d’une charpente, étape préalable au tissage de la nappe. La hauteur du réseau dépend de la présence de supports surplombant la zone où est construite la nappe. Plus les piquets sont grands, plus le réseau est haut.»44 Les toiles auront donc des aspects, formes et hauteurs différentes en corrélation avec l’environnement dans lequel elles s’insèrent.

44

BERNARD Alexandre, De l’activité individuelle à la coopération auto-organisée chez les arthropodes : exemple de la construction d’une toile chez les araignées, Sciences agricoles, Université Henri Poincaré Nancy, 2002, NNT : 2002NAN10232, consulté en ligne le 19/05/2019, URL : https://hal.univ-lorraine.fr/tel-01746868/ document .


110 |Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

A la différence des toiles collantes et gluantes de certaines espèces, les toiles en nappe sont constituées de fils de soie secs qui vont rendre difficile les mouvements des proies piégées. L’araignée ayant une vision lointaine et nocturne peu développée, c’est par la vibration de l’ensemble de ces fils qu’elle sera prévenue de l’arrivée d’un insecte. La toile a donc des propriétés acoustiques qui lui permettent d’absorber ces vibrations, qu’elles soient sous forme d’agitations physiques ou d’ondes sonores. Par ailleurs, pour B.Krafft, en plus de son rôle de capture des proies, « la toile correspond à un véritable prolongement des organes sensoriels de l’araignée, permettant ainsi une meilleurs maîtrise de l’environnement par ses capacités de transmission de toutes sortes d’informations vibratoires. […] C’est donc aussi un moyen de communication»45. De plus, les débris végétaux tombant sur la toile lui assurent un camouflage permettant de protéger l’araignée ainsi que ses cocons suspendus. La toile a ainsi un rôle d’abri. Contrairement aux toiles géométriques des araignées nommées « orbitèles », les toiles irrégulières en nappe sont des structures destinées à durer dans le temps. En effet, les orbitèles recommencent constamment leurs toiles ailleurs car elles s’abîment assez facilement, tandis que les araignées à toile irrégulière « conservent la même construction, la renforçant, la réparant par des dépôts répétés de soie, ce qui favorise l’extension du piège. Les tégénaires de nos caves, greniers, garages, nous en donnent un exemple remarquable avec leurs grandes nappes très solides et plus ou moins poussiéreuses qui ornent les encoignures».46 Pour finir, ce modèle biologique a déjà fait ses preuves dans nos milieux urbains. En effet, comme l’affirme R.Ramousse « Les araignées sont ubiquistes, mais sont spécialisées en termes d’habitat. Elles peuvent, ainsi, coloniser les nombreux micro-habitats et les microclimats variés que procure le milieu urbain. On

KRAFFT Bertrand, Le fil de la communication chez les araignées, Sciences et avenir, Hors série n°131, 2002. 45

LEBORGNE Raymond et PASQUET Alain, Les Araignées orbitèles de nos régions, SNPN, Le Courrier de la Nature n°73, 1981, p 13 à 17.

46


Étape 4 : Identification et abstraction des principes| 111

peut distinguer les araignées construisant une toile suspendue entre deux supports, celles se tenant dans un trou du mur et tissant une toile contre le mur et celles qui sont errantes. Les rebords de fenêtres et de toits, les pylônes, les poteaux électriques, les lampadaires, les clôtures, les rambardes des ponts et passerelles, souvent ajourées, et illuminées la nuit, assurent les supports nécessaires à la construction des toiles individuelles».47

Toile en nappe de l’exposition de Tomas Saraceno Image (72)

RAMOUSSE Raymond, Les araignées dans la ville, Grand Lyon, Regards sur les milieux naturels & urbains de l’agglomération lyonnaise.

47


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PROBLÉMATIQUE DES MILIEUX URBAINS ET BIOMIMÉTISME Étape 5 : Implémentation dans le projet - Création d›un écoduc urbain

Photo de la maquette 1/200e de l’Ecoduc urbain Image (73)


114 |Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

Univers sémantique Cette réflexion se rattache à des pratiques architecturales déjà existantes, intégrant cette démarche à un univers sémantique qui pourra aussi servir de source d’inspiration. En effet, on peut s’intéresser par exemple au travail d’Otto Frei qui, à travers son groupe de recherche des années 60 « Biologie und Bauen », cherche à mêler biologie et construction. Ainsi, l’architecte s’est particulièrement penché sur les structures légères qui, à l’époque, étaient novatrices en terme économie d’énergie et de matière. En général, le terme «légèreté» était vu comme le critère pouvant mener l’architecture et la technologie vers un avenir durable. Cette idée était partagée par de nombreux architectes et ingénieurs à la fin du 20e siècle, mais personne ne s’est positionné de manière aussi radicale qu’Otto Frei. Une réalisation iconique et souvent citée est celle de la toiture du stade Olympique de Munich, ainsi que le pavillon de l’Allemagne de l’EXPO67, inspirés des toiles d’araignée et de leur comportement face à la gravité et à la tension.

Maquette de la toiture Olympique du Stade de Munich, Frei Otto Image (74)


Étape 5 : Implémentation dans le projet| 115

On peut aussi s’intéresser au travail d’Achim Menges et notamment à ses pavillons fait en collaboration avec l’université de Stuttgart. Lui s’intéresse plus particulièrement au processus de la construction par les insectes tisseurs. A l’aide d’un robot industriel et de fibres de carbone, il reproduit le procédé de construction des architectures naturelles de soie, comme par exemple pour le pavillon de recherche CIP/ITKE 2014/15. Ce dernier propose de s’inspirer spécifiquement de la construction propre à l’araignée d’eau Argyroneta aquatica.

Réflexion pour le pavillon de recherche CIP/ITKE 2014/15 Image (75)


116 |ProblĂŠmatiques des milieux urbains et biomimĂŠtisme


Étape 5 : Implémentation dans le projet| 117

Transposition architecturale Appliqués au projet, on retrouve les différents principes développés plus tôt. Dans un premier temps, la continuité verte vient se placer le long du boulevard rejoignant les deux extrémités existantes. Pour lui permettre de ne pas être coupée par les différents axes de circulation, le support de cette continuité verte vient ponter ces derniers. Des structures sont alors mises en place pour permettre cela, notamment au niveau du pont. Plan de l’écoduc urbain à l’échelle du quartier Image (76)


118 |Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

En effet une structure tendue vient parasiter le pont du Garigliano pour permettre de soutenir la continuité verte. En tant que réseau de communication elle vient chercher les différents flux, sur les quais, sur le boulevard et sur la Petite Ceinture.

Coupe transversale de l’écoduc urbain Image (77)

La structure de l’écoduc est travaillée comme une toile à nappe traduite par deux réseaux de nappes de câbles, qui fonctionnent comme deux membranes tendues produisant une épaisseur horizontale variable. Les ressources pour la spatialité de ce système sont en grande


Étape 5 : Implémentation dans le projet| 119

partie la tension et la gravité, à l’instar des toiles naturelles. La nappe supérieure va supporter la végétation, le jardin suspendu tandis que la nappe inférieure supportera le parcours humain. Cette dernière présente une surface plus réduite qui s’adapte à l’échelle du parcours piéton.

Perspective extérieure de l’écoduc urbain Image (78)

La différence d’emprise des deux nappes permet de créer des doubles hauteurs par endroits.

20 m


120 |Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

Plan et coupe longitudinale de l’écoduc urbain Image (79)


Étape 5 : ImplÊmentation dans le projet| 121

20 m


122 |Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

[A droite] Coupe transversale de l’écoduc urbain Image (80)

[En bas] Perspective intérieure de l’écoduc urbain Image (81)

Ces deux nappes sont jointes et maintenues ensemble par pincement ce qui va permettre le contact de la nappe inférieure et de la nappe supérieure permettant ainsi de se faire rencontrer le jardin suspendu et les piétons. A ces moments, les piétons pourront apprécier une vue sur la nappe végétale. Au niveau des appuis, le piéton se trouvera dans un espace plus englobé, abrité où il pourra s’arrêter.


Étape 5 : ImplÊmentation dans le projet| 123

20 m


124 |Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

Afin de permettre aux nappes d’être parcourues, par les humains ou par la faune et la flore, des éléments viennent reposer sur le maillage de câble pour créer des surfaces continues. Ces plateaux prennent appui et sont maintenus pas les nombreux nœuds servant à maintenir la maille carrée de câbles. Cette technique


Étape 5 : Implémentation dans le projet| 125

de construction existe actuellement pour les toitures comme celle du Vélodrome de Londres, mais ici elle est réemployée pour venir supporter des blocs végétalisés de 60 cm d’épaisseur environ (dans le cas de la nappe végétale) ou des plateaux de sol de 18 cm d’épaisseur (dans le cas de la nappe piétonne). Nous avons vu précédemment que le modèle biologique de la toile en nappe s’accompagne de nombreux fils verticaux qui permettent de maintenir l’ensemble, ici des câbles verticaux viennent se rattacher aux nœuds dans le but de sous tendre la structure. Cela renforce aussi la spatialité de l’intervention en lui offrant une densité de câble plus présente. Du côté pratique, ces câbles peuvent servir à délimiter et sécuriser les surfaces praticables en y fixant des gardes corps.

Coupe transversale détaillée de l’écoduc urbain Image (82)


126 |Problématiques des milieux urbains et biomimétisme 1

2 3 4

Substrat 1 Couche drainante et filtrante 2 Étanchéité 3 Plateaux en OSB 4 Nœuds métalliques 5 Câbles horizontaux 6 Câbles verticaux 7 5

6

Axonométrie éclatée du système de nœuds et plateaux Image (83)

Pose des nœuds sur la maille de câbles, Vélodrome de Londres Image (85)

7


Étape 5 : Implémentation dans le projet| 127

1

2 3 4 5 6 7

Coupe détaillée du système nœuds et plateaux Image (84)

Pose des plateaux de toiture sur la maille de câbles, Vélodrome de Londres Image (86)


128 |Problématiques des milieux urbains et biomimétisme

Sur la nappe végétale, les plateaux proposent un substrat allégé et des plantes adaptées à la situation en hauteur. Le choix peut se porter vers des plantes mellifères qui vont permettre une pollinisation efficace, et des plantes vivaces (Heuchère Caramel, Acanthus Mollis, Fushia Ricartonii, Fushia Genii, Saxifraga Umbrosa) et grimpantes (Trachelospernum Jasminoides, Hedera Helix, Akebia Quinata, Jasminum Officinal, Clematis Armandii). Ainsi, la flore devient un matériau de la construction. Ce support pour la nature se veut autonome, dans la continuité de nature sauvage proposée par la Petite Ceinture. Au sol, le long de la petite ceinture, les anciens rails donnent la direction du parcours. Ici les câbles principaux prennent le relais pour la partie aérienne du projet. Aux points hauts des abris à insectes sont proposés afin de permettre la pollinisation de la flore. Ces dispositifs sont visibles par le piéton qui passe en dessous et permettent de reprendre la traction des appuis. Les appuis viennent se greffer sur les piles du pont qui proposent trois points d’appui. Fonctionner avec trois appuis permet d’élancer des câbles dans différentes directions.


Étape 5 : Implémentation dans le projet| 129

Ici, le projet s’est interrogé sur la domestication de la toile des insectes tisseurs et comment l’homme peut habiter cette structure inspirée d’une structure naturelle. Mais la réflexion biomimétique a aussi amené le projet à concevoir pour et avec la faune et la flore en proposant un support à la nature. Ainsi l’écoduc propose de s’inspirer de la Nature pour réinventer son rapport avec la ville. Il s’agit alors de ménager la biodiversité tout en aménageant avec le Vivant.

Photos de la maquette 1/200e de l’Ecoduc urbain Image (00) et (00)


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CONCLUSION Concevoir avec le bio mimétisme pour répondre aux enjeux urbains ?


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Actuellement, la « ville biomimétique » se définit de manière multiple tant les discours et les applications diffèrent. Chaque acteur a ses propres intérêts en matière d’enjeux urbains et de biomimétisme, reflétant la position et la politique que chacun aborde par rapport aux problématiques urbaines. Nous avons pu voir que certains projets seront plus influencés par des aspects sociaux ou climatiques alors que d’autres le seront par des aspects programmatiques, etc. Rares sont ceux qui feront l’unanimité en répondant à tous les grands principes du biomimétisme. Aujourd’hui cela reste utopique de prétendre agir en tout point comme un organisme naturel, mais le biomimétisme nous pousse tout de même à tendre vers cet idéal. A travers cette recherche, j’ai tenté d’apporter une réponse à la question de départ : comment le biomimétisme en architecture peut-il répondre aux enjeux des milieux urbains ?

Le positionnement du biomimétisme en milieu urbain De cette étude mêlant à la fois l’analyse de l’état de l’art, de références et l’exercice projectuel, je ressors tout d’abord trois positionnements du biomimétisme en milieu urbain : Dans un premier temps, le biomimétisme se positionne en tant que philosophie. Pour le cas de l’écoduc urbain, le travail d’une continuité naturelle a offert une perspective d’intervention pour le biomimétisme qui visait à établir une connexion verte. Une des questions qui se posait en début de réflexion était la relation entre l’intervention et les habitants de la ville. A cela, P.Pitrou, A.Dalsuet et B.Hurant voient un réel intérêt à travailler les continuités naturelles qui permettent de « mobiliser la relation sensible que les humains entretiennent avec leur environnement. Et de faire émerger ce réaménagement des territoires à partir d’une rencontre vécue entre le naturel et le culturel »48.

PITROU Perig, DALSUET Anne et HURAND Bérengère, Modélisation, construction et imitation des processus vitaux. Approche pluridisciplinaire du biomimé-

48


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Le travail de la toile permet en effet de mettre sur le même « réseau » la biodiversité de la Petite Ceinture ainsi que les riverains. Cette « philosophie biomimétique » varie encore une fois en fonction des orientations de chacun. Ce qui fait d’elle une approche politisée, où des projets technologiques, high tech et futuristes comme ceux de Vincent Callebaut ou Mick Pearce se différencient de la vision de Luc Schuiten par exemple qui prône la symbiose entre architecture et monde du Vivant. Malgré ces différents positionnements, un changement profond des pratiques et des regards reste l’objectif maître de l’ensemble de ces pensées. Ensuite, le biomimétisme se positionne en tant que directive qui intervient et influence dès le début de la conception pour encadrer le projet. La méthode se place comme un cadre référentiel qui va cerner et évaluer la pertinence de chaque décision. Les principes et méthodes identifiés plus tôt ont servi de guide pour l’élaboration du projet. Enfin, le biomimétisme apparaît en grande partie comme une technique pour renouveler nos constructions urbaines. La grande partie du travail et la plus concrète à mes yeux a été de transposer des connaissances issues de la biologie vers une application architecturale et technique. Des principes des toiles irrégulières des araignées jusqu’à la mise en place d’une toile anthropisée qui s’adapte à un milieu et des techniques humaines. Ces techniques humaines qui ont déjà été éprouvées par le passé avec notamment, pour le cas de l’écoduc urbain, le travail d’Otto Frei qui donne un univers sémantique au projet développé. Finalement, au travers des différents projets et réflexions rencontrés, j’ai compris que les conceptions biomimétiques adhèrent souvent à un univers sémantique, à l’instar de l’Eden Project que nous avons analysé et qui se rapprochait du travail de B.Fuller et de ses dômes géodésiques. Cela tout en apportant des éléments d’innovation et permettant à ces architectures de venir s’adapter aux enjeux contemporains. tisme, Natures Sciences Sociétés, Volume 23, p 380-388, 2015, ISSN 1240-1307, DOI 10.1051/nss/2015063, URL: https://www.cairn.info/revue-natures-sciences-societes2015-4-page-380.htm, consulté en ligne le 20/04/2018, depuis Cairn.info, .


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Les limites du biomimétisme en milieu urbain En outre, après avoir identifié les différents positionnements du biomimétisme dans nos milieux urbains, j’ai aussi perçu les limites auxquelles se heurte l’approche. En premier lieu, le biomimétisme fait face au flou de sa définition, rendant l’approche imprécise. Nous avons vu en début de réflexion que le bio mimétisme a été définit théoriquement comme une méthode visant à comprendre et imiter le vivant pour y rechercher des solutions durables à nos problèmes techniques. Avec la réalisation de l’Ecoduc Urbain, j’ai pu me rendre compte que le biomimétisme peut se retrouver extrêmement lié avec d’autres notions telles que la biophilie. La conception biophilique permet de contrer les effets néfastes des environnements urbains en insérant par exemple des modèles de nature ou des espaces naturels dans l’environnement construit. Il semble que, à la manière de Luc Schuiten, ces deux notions peuvent se chevaucher et cela semble assez logique puisqu’elles naissent de la même philosophie qui consiste à apprécier la nature comme une source de solution à nos difficultés humaines. On peut considérer que ce lien étroit ne peut que profiter au biomimétisme pour apparaître comme un véritable outil pour changer de paradigme et repenser notre relation à la nature. Cependant, il existe un risque qui est celui d’effacer la notion de biomimétisme avec celle de biomorphisme dont la finalité est tout à fait différente. Il s’agit plus d’une imitation de l’aspect naturel à des fins esthétiques. Le biomimétisme, à sa différence, recherchera plutôt l’efficacité. Lorsque nous avons parcouru l’histoire du bio mimétisme, nous avons pu apercevoir la Sagrada Familia de Gaudi. Bien qu’esthétiquement très ressemblant aux formes naturelles arborescente et donc par définition biomorphique, cet édifice a pu profiter de ces formes pour obtenir un gain de résistance et une optimisation de matériau. C’est un projet qui a donc des aspects biomorphiques sur un fond de réflexion essentiellement biomimétique, à l’instar du travail d’Otto Frei, mais aussi du projet personnel développé.


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Cette confusion entre les différentes définitions de l’inspiration naturelle n’est pas sans rappeler le cas du « développement durable », concept considéré comme « passe partout ».

De plus, la démarche rencontre des limitations financières, techniques et institutionnelles. En effet, les réflexions biomimétiques, bien que nombreuses, ne sont que rarement réalisées car elles demandent un financement certain pour la recherche afin d’aboutir à des solutions fonctionnelles. L’approche considérée comme utopique aux yeux du plus grand nombre, met alors du temps à se mettre en place ; en ce cas il faudrait qu’elle s’installe dans les institutions et qu’elle soit étudiée dans les prémices de chaque décision. Cela grâce à la multidisciplinarité, notamment des formations, qui pourrait par exemple encourager des futurs architectes à entrer en communication avec des biologistes pour imaginer le futur de nos milieux urbains.

Enfin, bien que l’approche biomimétique puisse paraitre séductrice pour la conception architecturale et technique, elle doit tout de même s’inscrire dans une participation et une amélioration qualitative des facteurs environnementaux et humains. Il est nécessaire de se demander à qui sert un projet bio inspiré et à quoi sert le projet bio-inspiré. Ici, ma réflexion du projet d’écoduc urbain biomimétique s’est arrêtée à un objet, un projet bien spécifique qui vient compléter le milieu urbain, le parasiter et lui offrir une extension qui résonne avec les problématiques d’un site. La difficulté dans un milieu urbain existant est que le tissu est déjà constitué, depuis plus ou moins longtemps. Les voies de circulations et le bâti sont enracinés dans un système où il reste peu de place à l’insertion de nouvelles structures et infrastructures. L’enjeu serait alors de trouver des solutions pour connecter les différents objets d’innovation biomimétique et venir parasiter nos milieux urbains en aboutissant alors à la création d’une ville empreinte de bio-inspiration. Mêlant ainsi villes existantes et nouveaux paradigmes.


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Les possibilités du bio mimétisme en milieu urbain ou pour aller plus loin Ma réflexion biomimétique de l’Ecoduc Urbain s’est intéressée à des aspects choisis du modèle biologique tels que la légèreté structurelle des toiles et leur qualité de ressource. Pour aller plus loin, on pourrait envisager de continuer l’analyse pour y trouver des réponses aux exigences écologiques du XXIe siècle, notamment en termes de matérialité.

En effet, la nappe de câbles en acier utilisée comme transposition technique de la toile ; éprouvée dans les projets d’Otto Frei et améliorée par l’ajout de végétation dans le projet ; pourrait être largement innovée par une réflexion sur sa matérialité. Actuellement, une des seules réinterprétations architecturale de la soie des insectes tisseurs sont les fils de fibre de carbone. Bien que beaucoup plus légers que l’acier et aussi résistants que ce dernier à la traction, leur fabrication et leur manipulation reste très énergivore, nécessitant des températures extrêmes pour leur transformation. Alors que l’araignée produit sa soie simplement à partir de mouches et d’eau, sans processus énergivores et polluants. Néanmoins, plusieurs recherches sont faites pour produire de la soie artificielle d’araignée, aux mêmes caractéristiques biodégradables, légère et résistante, qui pourrait être utilisée pour la fabrication de textile. Le saut d’échelle pour proposer par la suite un matériau destiné à la construction reste en revanche une limite matérielle à résoudre par les chercheurs en matériaux. De manière générale, par le biais de ces recherches, nous pourrions alors envisager une architecture biomimétique construite avec des matériaux «bio-inspirés», ce qui contribuerait à une cohérence plus affirmée de la démarche.

Par ailleurs, un autre aspect sur lequel la réflexion pourra être poursuivie est la qualité dite « régénérative » des applications biomimétiques. Cette notion reste encore assez utopique à l’échelle d’une ville puisqu’il s’agit de considérer que nous pouvons reconstituer des écosystèmes fonctionnels dans leur intégralité et


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dans lesquels les cycles ressources/énergies/déchets sont fermés. Même si ce concept s’applique à certains bâtiments, on pourra se poser la question et explorer son application à l’entièreté d’un milieu urbain existant.


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ANNEXES


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ETUDE DE CAS Eastgate Center Harare, Zimbabwe Mick Pearce


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Souvent cité dans les ouvrages d’architecture biomimétique, l’Eastgate Center d’Harare par Mick Pearce représente le projet précurseur de la démarche biomimétique. L’Easgate Center a été construit entre 1993 et 1996, pour abriter des fonctions commerciales et de bureaux sur une surface de 9313 m².49 Ici nous verrons comment la méthode de conception biomimétique, expliquée plus tôt, s’applique à la conception de Mick Pearce.

ETAPE 1 : ANALYSE DU SITE FORME DE LA TERRE ET DE LA VILLE Harare se situe sur une partie élevée du plateau de Highveld au Zimbabwe, en Afrique Australe. Parce qu’elle se situe à une altitude d’environ 1500 mètres et qu’elle bénéficie d’un flux d’air frais du sud-est ; Harare présente un climat plus froid et plus sec qu’aux alentours qui peut être décrit comme tropical ou subtropical. Les rues du centre-ville d’Harare ont été tracées au cordeau autour des Harare Gardens (le plus grand parc de la capitale). Cet énorme espace vert au cœur de la ville renferme une piscine, un théâtre, un centre de loisirs avec terrain de bowling et abrite aussi la galerie nationale. Autour se développe un tissu compact qui suit la trame orthogonale tracée au sol, auquel l’Eastgate Center semble contraint. (Image 32) SITUATION CLIMATIQUE Le climat d’Harare est essentiellement tempéré voir chaud. En hiver (de juin à septembre dans l’hémisphère sud) la température moyenne est de 15° et le climat est assez sec. En été, la température moyenne est de 21° mais peut monter jusqu’à 30°, de plus le climat est très humide à cette période. En revanche, les nuits sont fraîches et la température peut descendre jusqu’à 4°. La plupart des bâtiments de la capitale ne s’adaptent pas à ce climat car ils ont été pensés comme ceux construits en Europe ou en Amérique du Nord. De ce fait, l’ajout de climatiseurs a été un réflexe automatique 49

PEARCE Mick, Eastgate, (consulté le 16/09/2018), [En ligne], http://www. mickpearce.com/Eastgate.html.


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dans ces constructions, or la climatisation artificielle a pour effet d’augmenter la chaleur de l’air lors de son fonctionnement créant ainsi des îlots de chaleur urbains. De plus, ce type de climatisation est responsable de pics de consommation électrique lors de fortes chaleurs et les fluides réfrigérants utilisés rejettent de puissants gaz à effet de serre.

ETAPE 2 : UN PROBLEME SPECIFIQUE ET UNE INTENTION Le climat d’Harare est essentiellement tempéré voir chaud. En hiver (de juin à septembre dans l’hémisphère sud) la température moyenne est de 15° et le climat est assez sec. En été, la température moyenne est de 21° mais peut monter jusqu’à 30°, de plus le climat est très humide à cette période. En revanche, les nuits sont fraiches et la température peut descendre jusqu’à 4°. 50 La plupart des bâtiments de la capitale ne s’adaptent pas à ce climat car ils ont été pensés comme ceux construits en Europe ou en Amérique du Nord. De ce fait, l’ajout de climatiseurs a été un réflexe automatique dans ces constructions, or la climatisation artificielle a pour effet d’augmenter la chaleur de l’air lors de son fonctionnement créant ainsi des îlots de chaleur urbains. De plus, ce type de climatisation est responsable de pics de consommation électrique lors de fortes chaleurs et les fluides réfrigérants utilisés rejettent de puissants gaz à effet de serre. 51 L’enjeu principal était donc de concevoir un bâtiment climatisé naturellement, qui conserverait une température stable tout au long de la journée et de la nuit.

Carte topographique de Harare et sa région. Image (87) Carte du réseau viaire de Harare et sa région. Image (88)

50

, Analyse climatique de Harare, Zimbabwe, (consulté le 15/09/2018), [En ligne], https://fr.climate-data.org/location/3530/.

51

Arup, Eastgate Development, Harare, Zimbabwe, 2006, (consulté le 15/09/2018), [En ligne], https://web.archive.org/web/20060205062226/http:/www. arup.com:80/feature.cfm?pageid=292.


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ETAPE 3 : RECHERCHE DE SOLUTIONS BIOLOGIQUES Les termitières sont présentes dans de nombreux climats similaires à celui du Zimbabwe ; leurs formes variant selon leur localisation. Au Zimbabwe, une espèce spécifique de termites, les Odontotermes transvaalensis, construisent des ‘’chimney mound’’ dans lesquels une cheminée centrale émerge de terre. Les termites ont des besoins spécifiques en termes d’humidité et d’oxygène pour se reproduire, élever les larves et ‘cultiver’ le champignon qui les nourrit. En effet, le climat, l’habitat et les besoins physiologiques des termites sont liés. Mick Pearce a donc étudié comment ces termitières peuvent réguler leur hygrométrie, et ainsi leur température et renouveler l’oxygène des termitière dans un climat similaire à celui d’Harare. ETAPE 4 : IDENTIFICATION DES PRINCIPES L’analyse de ces termitières a démontré que la cheminée n’est présente que lors des mois chauds et humides : de l’air frais entre en partie basse par des petits tunnels dans la termitière et arrive au contact de la colonie de termite. Cela a pour effet de réchauffer l’air et de le charger en CO2, ainsi la cheminée vient accentuer l’ascension de l’air chaud et permet de l’évacuer. Cette dépression d’air a pour effet de faire entrer rapidement de l’air neuf en partie basse, rafraichi en passant sous terre avant d’atteindre le cœur de l’édifice et les différentes chambres. Et ainsi de suite. C’est aussi par la cheminée que l’eau en excès peut s’évaporer. En refermant ou en ouvrant les petits tunnels, les termites peuvent réguler la quantité d’air entrant.52 Par ailleurs, l’orientation est-ouest de leurs surfaces leur permet d’absorber la chaleur du soleil le matin après une nuit froide, tout en s’en protégeant aux heures chaudes en ne présentant qu’une surface minimale exposée au soleil de midi.53 52

CRUZ Estelle, Innover durable, Rapport de recherche n°1, Tour, Biomimicry World, Zimbabwe, septembre 2015, www.biomimicry-worldtour.com, . 53

PAWLYN Michael, Biomimicry in Architecture, 2e édition, Publishing, RIBA, 2016, 176 pages, ISBN 1859466281, .


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Processus de ventilation d’une termitière. Image (89) et application à un bâtiment. Image (90)


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ETAPE 5 et 6 : ABSTRACTION et IMPLEMENTATION RÉGULATION THERMIQUE Pour ce qui est de la ventilation, le fonctionnement est calqué sur celui des termitières. 48 cheminées sont placées le long des bâtiments de l’Eastgate Center. La différence se situe au niveau de l’entrée d’air frais qui se fait en partie basse du bâtiment aidée par une hélice mécanique, l’air frais passe dans les dalles creuses qui, grâce à leur inertie thermique, restituent l’air frais de la nuit durant la journée. Les reste est très similaire, l’air entré est réchauffé par les activités humaines et est évacué par effet de convection. Chaque étage est relié à la cheminée et évacue son air chaud. Même sans la climatisation conventionnelle, des ventilateurs doivent fonctionner la nuit pour permettre jusqu’à dix changements d’air par heure et des ventilateurs à faible volume sont activés pendant la journée, permettant deux changements d’air par heure pour maintenir un confort optimal.

Coupe perspective de la ventilation dans une pièce de l’Eastgate. Image (91) Processus de ventilation de l’Eastgate Center. Image (92) et application à un bâtiment. Image (93) Coupe conceptuelle de l’intention pour la régulation thermique Image (94)


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Cheminée centrale Conduits d’air Bureaux Ventilateurs

Air capté avec le ventilateur

Air apporté dans la partie basse des espaces

Air chauffé au contact de

Air évacué par convection et

l’activité humaine

effet cheminée

collectifs

Conduits d’air

Espaces collectifs

Cheminée centrale


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ORGANISATION SPATIALE Ce système devient aussi facteur d’organisation dans le bâtiment. Comme une termitière, l’édifice propose une série de loges aérées par des galeries. En revanche, la différence entre le modèle naturel et la réalisation architecturale est que les galeries ne sont pas liées à la circulation. L’Eastgate Center propose en effet une circulation indépendante de ce système qui se place dans le vide central de l’atrium et dessert les deux masses construites. L’organisation des niveaux de bureaux est orthogonale et rappelle la trame urbaine. Les travées de circulation centrales débouchent chacune sur un noyau de circulation dans les masses. Les espaces techniques et de circulation de l’air viennent se greffer à ces noyaux, cloisonnant ainsi partiellement les espaces destinés aux bureaux. Le rez de chaussée qui s’ouvre aux commerçants et au public propose une rue intérieure à parcourir dans sa longueur. Pour ce qui est de l’orientation, celle des termitières a pour but de minimiser ses surfaces atteintes par le soleil de midi, en revanche ici, c’est une des surfaces la plus grande qui est exposée. On peut se demander si cela n’a pas un impact sur efficacité du système.


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Photo, coupes et plans de l’Eastgate. Image (95)


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FAÇADE Par ailleurs, une réflexion biomimétique sur la façade a été effectuée en cours de conception, en coplément de celle sur la ventilation. En effet, la façade ne devait pas être une source de récupération de chaleur, pour cela Pearce s’est inspiré de la surface dentelée des cactus qui absorbe moins bien la chaleur qu’une surface lisse, et rejette beaucoup mieux le peu de chaleur absorbée. En effet, des éléments de pierre massifs en saillie protègent non seulement les petites fenêtres du soleil, mais augmentent également la surface extérieure du bâtiment afin d’améliorer les pertes de chaleur la nuit et de minimiser les apports de chaleur le jour. Ces différents systèmes ont permis à l’édifice de conserver une température intérieure entre 21 et 25°C.54 Pearce a également utilisé des par soleils profonds pour protéger du soleil les fenêtres et les murs. Ombrageant ainsi complètement les murs du fort soleil d’été, tout en permettant au soleil d’hiver de réchauffer le bâtiment le matin. De plus, l’Eastgate se positionne par rapport à la culture locale en se référant à des images de l’architecture et de l’art locales mais aussi internationales. Mick Pearce intègre à sa réflexion biomimétique une dimension culturelle. Il fait notamment référence aux tabourets traditionnels Shonas pour la structure de la façade en béton préfabriqué. Le travail des colonnes en pierre en saillie rappelle le travail de Ledoux pour les Salines royales.

Comparaison entre les Salines de Ledoux (Image 97) et la façade de l’Eastgate. 54

PEARCE Mick, Eastgate, (consulté le 16/09/2018), [En ligne], http://www. mickpearce.com/Eastgate.html.


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Croquis explicatifs de la façade de l’Eastgate. Image (96)


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MATÉRIALITÉ Pearce s’éloigne de la tour de verre immaculée vers un style régionalisé qui prend son inspiration dans l’ancienne architecture de pierre traditionnelle du Grand Zimbabwe. En effet, le Grand Zimbabwe est un site de ruines d’une cité médiévale (XIIIe-XVe) construite en pierre. Étymologiquement, «zimbabwe» signifie d’ailleurs «la grande maison faite de pierre» en Shona. La maçonnerie des murs présente un niveau élevé de qualité artisanale, avec une décoration constituée de chevrons et de damiers qui rappelle le travail de la pierre sur la façade de l’Eastgate Center. En effet, des éléments de pierre massifs en saillie sur la façade sont faits de béton préfabriqué, brossé pour exposer l’agrégat de granit qui rappelle les roches couvertes de lichen dans le paysage sauvage du Zimbabwe. Les rebords saillants horizontaux sont ainsi interrompus par des colonnes d’anneaux d’acier soutenant les vignes vertes pour ramener la nature dans la ville. Au-delà de la référence culturelle, l’utilisation de pierre, de brique et de béton cellulaire permet au bâtiment de maintenir une inertie thermique importante.


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Photographie d’un mur du Grand Zimbabwe, Détail extérieur de la muraille du Grand enclos en 1977 Image (98)

Photographie d’un mur du Grand Zimbabwe Image (99)

Photographie de la façade de l’Eastgate Center Image (100)


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Photographies du site d’Êtude


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BIBLIOGRAPHIE


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le 29/04/2019. LEBORGNE Raymond et PASQUET Alain, Les Araignées orbitèles de nos régions, SNPN, Le Courrier de la Nature n°73, 1981, p 13 à 17. LEON Olivier, La populations des région en 2040, publié le 07/12/2010, Insee premiere n°1326. LINGLART Marine, MORIN Sylvain, PARIS Magali et CLERGEAU Philippe « Méthodologie de mise en place d’une Trame verte urbaine : le cas d’une communauté d’agglomération, Plaine Commune », mis en ligne le 06 juillet 2016, URL : http:// journals.openedition.org/cybergeo/27713, consulté le 30/04/2019, DOI : 10.4000/cybergeo.27713 LIPIETZ Alain, Les pièges de la densification en Ile de France, CONSTRUCTIF, URL: http://www.constructif.fr/ bibliotheque/2013-6/paris-un-cas-d-ecole.html?item_ id=3336, consulté en ligne le 08/05/2018. LIPIETZ Alain, Green Deal, Editions la Découverte, 2012. LORTHIOIS Jacqueline, Paris Métropole : de la pieuvre à la méduse ?, Métropolisation : les nouveaux enjeux. Le cas de l’Île-de-France, publié le 1er février 2013, URL: http://jlorthiois.fr/?p=259, consulté le 08/05/2018. MUSY Marjorie, Une ville verte : les rôles du végétal en ville, Editions Quae, Séries Synthèses, Versailles, juin 2014, 200 pages, ISBN : 978-2-7592-2171-4. PAWLYN Michael, Biomimicry in Architecture, 2e édition, RIBA Publishing, 2016, 176 pages, ISBN 1859466281. PEARCE Mick, Eastgate, consulté en ligne le 16/09/2018, URL: http://www.mickpearce.com/Eastgate.html. PEDERSEN-ZARI Maibritt, Regenerative urban design and ecosystem biomimicry, Routledge research in sustainable urbanism, Oxon, 2018, ISBN 978-1-138-07948-9. PITROU Perig, DALSUET Anne et HURAND Bérengère, Modélisation, construction et imitation des processus vitaux. Approche pluridisciplinaire du biomimétisme, Natures Sciences Sociétés, Volume 23, p 380-388, 2015, ISSN 12401307, DOI 10.1051/nss/2015063, URL: https://www.cairn. info/revue-natures-sciences-societes-2015-4-page-380.htm, consulté en ligne le 20/04/2018, depuis Cairn.info.


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ICONOGRAPHIE


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BIOMIMÉTISME ET ARCHITECTURE Présentation du bio mimétisme (01) Macrophotographie de la surface d’une pomme de pin, prise par Court Whelan, à partir de https:// dailywildlifephoto.nathab.com/photography-guide/wp content/uploads/2015/11/bark.jpg, consulté le 20/05/2019 (02) Macro photographie d’une aile de libellule, Dragonfly wing, prise par Karen Thomas de Salal Studio, consulté en ligne le 18/05/2019 à l’adresse URL : http://www.salalstudio. com/3xhpp53czjxy5lvqnju33g2htt1ic5 (03) Dessin d’une aile d’éolienne, Renzo Piano, à partir de https://inhabitat.com/renzo-pianos-dragonfly-inspiredturbine-can-harvest-energy-from-the-slowest-winds/, consulté le 02/01/2018 (04) Macrophotographie d’une carapace d’un scarabée de la famille des Carabidae, par GORB Stanislas et GORB Elena de Insect-Inspired Architecture: Insects and Other Arthropods as a Source for Creative Design in Architecture, p74, dans Biomimetic Research for Architecture and Building Construction Biological Design and Integrative Structures de KNIPPERS Jan, NICKEL Klaus et SPECK Thomas. (05) Dessin du principe du scarabée de Namibie, à partir de http://www.coroflot.com/johncombs/aquamat, consulté le 02/01/2018 (06) Tableau de huile sur toile, «Dédale et Icare», 1799, à partir de http://www.bridgemanimages.com/en-GB/asset/553426, consulté le 03/01/2018 (07) Esquisse d’une machine volante, Leonard de Vinci, 1488, à partir de http://www.drawingsofleonardo.org/, consulté le 03/01/2018 (08) Photographie de la Sagrada Familia, A.Gaudi, Barcelone, à partir de http://www.art-nouveau-around-the-world.org/en/ artistes/gaudi.htm, consulté le 10/01/2018. (09) Photographie de l’intérieur de la Maison Horta, Victor Horta, Bruxelles, à partir de https://commons.wikimedia.org/ wiki/File:HortaELWI.jpg, consulté le 10/01/2018. (10) «Le gigantesque nénuphar (Victoria Regia), en fleur à Chatsworth,» de London News, 17 novembre 1849, 328


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(photo: Colgate University Library), à partir de http://staging. doaks.org/research/publications/doaks-online-publications/ bourgeois/bourgch10.pdf, consulté le 09/01/2018 (11) John Fiske Allen, Victoria Regia (dessous de la feuille et cantilevers rayonnants), chromolithographie, «Regia de Victoria; ou le grand nénuphar d’Amérique» (Boston: Dutton et Wentworth, 1854) (photo: Mortimer Rare Book Room,Smith College), à partir de http://staging.doaks.org/ research/publications/doaks-online-publications/bourgeois/ bourgch10.pdf, consulté le 09/01/2018 (12) Transept terminé du Crystal Palace de Joseph Paxton, London News , 25 janvier 1851, (photo: Colgate University Library), à partir de http://staging.doaks.org/research/ publications/doaks-online publications/bourgeois/ bourgch10.pdf, consulté le 09/01/2018

Le bio mimétisme appliqué à la conception architecturale (13) Macro photographie d’ailes de papillon Morpho, prise par Chris Perani, publiée le 19/09/2018 à partir de l’adresse https://www.chrisperani.com/Butterfly-Wings/i-SJSBJFb, consultée le 20/05/2019 (14) Schéma personnel des principes de conception architecturale biomimétique, réalisé le 05/05/2018 (15) Élévation personnelle, réalisée à la tablette graphique le 01/09/2018, de l’Arbre Blanc de OXO Architects et Sou Fujimoto, à partir de la source en ligne http://www.oxoarch. com/front/project/tour-mixte-a-montpellier, consultée le 05/05/2018 (16) Coupe perspective personnelle, réalisée à la tablette graphique le 01/09/2018, de l’Arbre Blanc de OXO Architects et Sou Fujimoto, à partir de la source en ligne http:// www.oxoarch.com/front/project/tour-mixte-a-montpellier, consultée le 05/05/2018 (17) Schémas personnels, réalisée à la tablette graphique le 01/09/2018, de l’Arbre Blanc de OXO Architects et Sou Fujimoto, à partir de la source en ligne http://www.oxoarch. com/front/project/tour-mixte-a-montpellier, consultée le 05/05/2018


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(18) Coupe détaillée, réalisée à la tablette graphique le 01/09/2018, de l’Arbre Blanc de OXO Architects et Sou Fujimoto, à partir de la source en ligne http://www.oxoarch. com/front/project/tour-mixte-a-montpellier, consultée le 05/05/2018 (19) Dessin personnel des principes écosystémique du projet Moebius de Michael Pawlyn, réalisé à la tablette graphique le 01/09/2018, à partir de la source en ligne http://www. exploration-architecture.com/projects/the-mobius-project, consultée le 04/05/2018 (20) (21) (22) (23) Photos et croquis du projet Orquideorama de Plan B Arquitectura par PlanB:Arquitectos, Atlas d’Architecture écologique, éditions Place des Victoires, p14 à 23 (24) Schéma de l’auto organisation et de la structure hiérarchique d’un conifère comme modèle pour la construction architecturale, par KNIPPERS Jan, NICKEL Klaus et SPECK Thomas dans Biomimetic Research for Architecture and Building Construction Biological Design and Integrative Structures, p.2 (25) (26) (27) Schémas personnels de la structure de la Gherkin Tower, réalisé à la tablette graphique le 01/09/2018 (28) Croquis d’une euclepta aspergillum, à partir de The Popular science monthly, Volume 3, consulté en ligne le 04/05/2018, URL : , https://archive.org/details/popularsciencemo03newy/ page/534 (29) Schéma personnel des niveaux d’inspirations, réalisé le 01/09/2018 (30) Schéma personnel de la méthode biomimétique, réalisé le 01/09/2018, modifié le 20/05/2019. Etude de cas (31) Photographie d’un dôme d’une serre du Eden Project, à partir de la revue Detail Inspiration, n°5 de 2001, «Eden Project in St Austell» (32) Photographie de l’état de la carrière avant construction, de Grimshaw architects, à partir de la source en ligne https:// grimshaw.global/projects/the-eden-project-the-biomes/, consulté le 30/04/2019


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(33) Photographie de bulles de savon, consulté en ligne le 20/05/2019 sur URL : https://i.pinimg.com/originals/71/f3/ dc/71f3dc1b4d86792bb990be9c49cca568.jpg (34) Radiolaires, Adapté par J.P. Caulet de Coineau, Kresling 1987, à partir du livre «Biomimetics for architecture and design. Nature-Analogies-Technology» de Goran Pohl et Werner Nachtigall, Editions Springer, ISBN 978-3-319-191195 (35) Simulation en 3 dimensions de bulles sur la carrière de l’Eden Project, de Grimshaw architects, à partir de la source en ligne https://grimshaw.global/projects/the-eden-projectthe-biomes/, consulté le 30/04/2019 (36) Axonométrie de l’Eden Project, à partir de la revue Detail Inspiration, n°6 de 2000, «The Eden Project, Cornwall» (37) Coupe transversale du=’une serre de l’Eden project, de Grimshaw architects, à partir de la source en ligne https:// grimshaw.global/projects/the-eden-project-the-biomes/, consulté le 30/04/2019 (38) Domes géodésiques de B.Fuller, à partir du livre «Biomimetics for architecture and design. Nature-AnalogiesTechnology» de Goran Pohl et Werner Nachtigall, Editions Springer, ISBN 978-3-319-19119-5 (39) Détail de fondation des serres de l’Eden Project, à partir de la revue Detail Inspiration, n°5 de 2001, «Eden Project in St Austell» (40) Axonométrie filaire de la double structure de l’Eden Project, à partir de la revue Détail Inspiration, n°6 de 2000, «The Eden Project, Cornwall» (41) Photographie de la construction d’un dôme, à partir de la revue Détail Inspiration, n°6 de 2000, «The Eden Project, Cornwall» (42) Photographie de la pose des panneaux d’EFTE sur les dômes, à partir de la revue Détail Inspiration, n°6 de 2000, «The Eden Project, Cornwall»


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PROBLÉMATIQUES DES MILIEUX URBAINS ET BIOMIMÉTISME Problématiques générales (43) REUTERS/GONZALO FUENTES, Photo vue de Paris lors d’un pic de pollution, le 18 mars 2015, à partir de https://www.lemonde.fr/pollution/article/2016/06/21/lapollution-de-l-air-est-responsable-de-9-de-la-mortalite-enfrance_4954518_1652666.html (44) Dessin aquarelle du projet de ville Lavasa, Inde, A new community rooted in nature par HOK Architects, à partir de la source en ligne https://www.hok.com/design/region/india/ lavasa-hill-station-master-plan/, consultée le 20/05/2019 (45) Coupe personnelle conceptuelle de l’intention pour la régulation thermique de l’Eastgate Center d’Harare, réalisée au feutre le 06/02/2019 (46) Schémas de carte représentant l’étalement urbain de l’île de france sous 2 visages, LOTHIOIS Jacqueline, Paris Métropole : de la pieuvre à la méduse ?, Métropolisation : les nouveaux enjeux. Le cas de l’Île-de-France, 1er février 2013, http://j-lorthiois.fr/?p=259. (47) Emprise végétale (bois, parcs et forêts) de la petite couronne et de Paris intra muros, réalisée à partir de donnée GIS le 25/01/2019 (48) Carte de la température de l’air à 2m du sol le 10 aout 2003 à 6h du matin, Atelier parisien d’Urbanisme, Les îlots de chaleur urbains à Paris Cahier n°1, Décembre 2012. (49) Évolution de la nature à Paris de 1730 à nos jours, APUR, Evolution de la nature à Paris de 1730 à nos jours n°122, note, Février 2018. (50) Espèces disparues, en voie de disparition, menacées ou vulnérables, graphique personnel réalisé à partir des données des listes rouges entre 2003 et 2016 de l’Agence Régionale de la Biodiversité, à partir de l’adresse http://www.arb-idf.fr/, consultée le 18/02/2019

Etape 1 : Analyse d’un site d’étude – La Petite Ceinture, un espace de nature sauvage (51) Photographie personnelle de la Petite Ceinture du 15e, prise le 20/03/2019, Paris


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(52) Plan de Paris, 1898. Petite Ceinture (violet), F.A. Brockhaus’ Geogr.-artist. Anstalt, Leipzig — F.A. Brockhaus, Leipzig, Création : 1 janvier 1898 (53) Le pont du Garigliano a remplacé le viaduc d’Auteuil, Photomontage personnel réalisé le 20/02/2019 (54) Plan du territoire et de l’existant montrant le tronçon manquant, dessin personnel réalisé à la main et modifié à l’aide du logiciel Photoshop, réalisé le 20/04/2019 (55)(56)(57) Photographies le long de la Petite Ceinture, par Pierre Folk, à partir de l’adresse https://phototrend.fr/2014/10/ petite-ceinture-paris-pierre-folk/, consultée le 20/02/2019 (58)(59)(60) Photographies personnelles de la Petite Ceinture du 15e, prises le 20/03/2019, Paris (61)(62) Photographies personnelles du pont du Garigliano, prises le 20/03/2019, Paris Étape 2 : Un problème spécifique et une intention – La Petite Ceinture, un espace vert continu (63) Plan schématique personnel de la Petite Ceinture, réalisé au feutre le 02/02/2019 (64) Prospective pour le pont du Garigliano, photomontage personnel, réalisé le 20/04/2019. Étape 3 : Recherche de solutions biologiques (65) Squelette de radiolaires vue au microscope électronique, par Annick Baudrimont, Université de Bordeaux I, Laboratoire de géologie et d’océanographie, à partir de l’adresse https:// www.les-petites-dalles.org/Caralp/Radiolaires.html, consultée le 20/05/2019 (66) Coupe représentant un échantillon de la biodiversité présente sur la Petite Ceinture, dessin personnel réalisé au feutre le 02/02/2019


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(67) Illustration Les bienfaits de la pollinisation en milieu urbain - Share the city with flower and friends, par Aaron Birk, collage de paysages urbains associant biodiversité et pollinisateurs, à partir de l’adresse https://www.pollinator.org/shop/posterurban, consulté en ligne le 15/03/2019 (68) Architectures animales, photomontage personnel, réalisé le 18/04/2019 (69) Toile en soie d’araignée, Exposition Hybrid Webs de Tomas Saraceno, à partir de l’adresse https://studiotomassaraceno. org/hybrid-webs/, consulté en ligne le 20/04/2019

Étape 4 : Identification et abstraction des principes (70) Photographie d’une toile en nappe d’Epeire d’Opuntia, à partir de l’adresse http://groupenaturefaverges.over-blog. fr/2018/01/l-araignee-des-cactus-l-epeire-de-l-opuntiacyrtophora-citricola-forsskal-1775.html, consultée le 20/05/2019 (71) et (72) Toile en nappe de l’exposition Floating galaxies de Tomas Saraceno, construite par un duo de Nephia Edulisa pendant 6 semaines, 2018, pièce finale en soie d’araignée, fibre de carbone, métal, encre acrylique, à partir de l’adresse https://www.designboom.com/art/rolls-roycetomas-saraceno-spiders-geneva-motor-show-03-06-2019/, consultée le 20/05/2019 Étape 5 : Implémentation dans le projet - Création d’un écoduc urbain (73) Photographie personnelle de la maquette 1/200e de l’Ecoduc urbain, réalisée le 20/04/2019 (74) Photographie de la maquette de la toiture Olympique du Stade de Munich, Frei Otto, à partir de l’adresse http://www. freiottofilm.com/, consultée le 15/05/2019 (75) Planche illustrant la réflexion pour le pavillon de recherche CIP/ITKE 2014/15, dans par GORB Stanislas et GORB Elena de Insect-Inspired Architecture: Insects and Other Arthropods as a Source for Creative Design in Architecture, p74, dans Biomimetic Research for Architecture and Building Construction Biological Design and Integrative Structures de KNIPPERS Jan, NICKEL Klaus et SPECK Thomas, p.62.


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(76) Plan de l’écoduc urbain à l’échelle du quartier, travail personnel réalisé au crayon et à l’aide du logiciel Photoshop, réalisé le 20/04/2019. (77) Coupe transversale de l’écoduc urbain, travail personnel réalisé à l’aide du logiciel Photoshop, réalisé le 20/04/2019. (78) Perspective extérieure de l’écoduc urbain, travail personnel réalisé à l’aide du logiciel Photoshop, réalisé le 20/04/2019. (79) Plan à l’échelle du pont et coupe longitudinale de l’écoduc urbain, travail personnel réalisé à l’aide du logiciel Photoshop, réalisé le 20/04/2019. (80) Coupe transversale de l’écoduc urbain, travail personnel réalisé à l’aide du logiciel Photoshop, réalisé le 20/04/2019. (81) Perspective intérieure de l’écoduc urbain, travail personnel réalisé à l’aide du logiciel Photoshop, réalisé le 20/04/2019. (82) Coupe transversale détaillée de l’écoduc urbain, travail personnel réalisé à l’aide du logiciel Photoshop, réalisé le 20/04/2019. (83) Axonométrie éclatée du système de nœuds et plateaux, travail personnel réalisé en filaire le 10/05/2019 (84) Coupe détaillée du système de nœuds et de plateaux, travail personnel réalisé en filaire le 10/05/2019 (85) Photographie de la pose des nœuds sur la maille de câbles, Vélodrome de Londres, à partir de la revue Détail Inspiration, n°10 de 2011, «Velodrome in London», p1212 (86) Photographie de la pose des plateaux de toiture sur la maille de câbles, Vélodrome de Londres, à partir de la revue Détail Inspiration, n°10 de 2011, «Velodrome in London», p1212 Annexes (87) Carte topographique de Harare et sa région, réalisée à partir de données GIS le 06/02/2019 (88) Carte du réseau viaire de Harare et sa région, réalisée à partir de données GIS le 06/02/2019 (89) (90) Schémas du fonctionnement de la termitière appliqué au projet de l’Eastgate Center de M.Pearce, par


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CRUZ Estelle, Innover durable, Rapport de recherche n°1, Tour, Biomimicry World, Zimbabwe, septembre 2015, [En ligne] www.biomimicry-worldtour.com, (91) Coupe perspective schématique personnelle d’un espace ventilé au sein de l’Estgate Center d’Harare, réalisé au feutre le 06/02/2019 (92) (93) Schémas du fonctionnement de la termitière appliqué au projet de l’Eastgate Center de M.Pearce, par CRUZ Estelle, Innover durable, Rapport de recherche n°1, Tour, Biomimicry World, Zimbabwe, septembre 2015, [En ligne] www.biomimicry-worldtour.com, (94) Coupe conceptuelle de l’intention pour la régulation thermique de l’Eastgate Center d’Harare, réalisée au feutre le 06/02/2019 (95) Photos plans et coupes de l’Eastgate, Mick Pearce, (consulté le 16/09/2018), [En ligne], http://www.mickpearce. com/Eastgate.html. (96) Croquis explicatif du traitement de la façade de l’Eastgate center d’Harare, dessin personnel réalisé au feutre le 06/02/2019 (97) Photographie des Salines de N.Ledoux, prise par Daniel Dunham le 15 avril 2011 (98) Photographie d’un mur du Grand Zimbabwe, Détail extérieur de la muraille du Grand enclos en 1977. Prise par Rolph31000 / creative commons (99) Photographie d’un mur du Grand Zimbabwe, Détail extérieur de la muraille du Grand enclos en 1977. Prise par Rolph31000 / creative commons (100) Photo d’une façade de l’Eastgate, Mick Pearce, (consulté le 16/09/2018), [En ligne], http://www.mickpearce.com/ Eastgate.html.


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Mémoire imprimé sur du papier recyclé et relié chez Re-Projet Reprojet Rue du Crampon, 28 7500 00.32.69.22.14.90




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