From Havas to Texas - SXSW Austin 2013

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un carnet

from Havas to Texas SXSW Austin 2013



FROM HAVAS TO TEXAS

4 JOURS COMPLÈTEMENT AWESOME AU SOUTH BY SOUTHWEST 2013

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“La meilleure manière de prédire le futur consiste à l’inventer” disait Peter Drucker, le grand théoricien américain du management. Voilà le genre de phrases à mettre la barre assez haut, non ? Si on se souvient bien, c’était d’ailleurs la maxime préférée de Steve Jobs (si, si, c’est écrit quelque part au milieu des 900 pages de sa biographie La vie d’un génie par Walter Isaacson). Pourquoi cette phrase ? Parce que c’est exactement de cela que je vais vous parler. Du futur. Notre futur, dudes. Et de gens qui, pour mieux l’inventer, se réunissent chaque année pour mettre leurs trouvailles et leurs réflexions en réseau. J’ai nommé : le South by Southwest (SXSW pour les intimes), cet événement devenu en quelques années la Mecque du High-Tech, l’Annapurna du RichMedia, le Taj Mahal du Digital – bref, un truc awesome, pour employer le mot le plus entendu dans ses coulisses remplies de joyeux geeks. Ça se passait à Austin, Texas en mars 2013 et je pourrai dire aux prochaines générations que j’y étais, tweetos parmi les tweetos d’une French team Havas & Friends bien décidée à dévorer cette édition riche en keynote speakers prestigieux (Al Gore, Nate Silver, Elon Musk, Bre Pettis, Dave Morin, Don Peppers et Martha Rogers, Henry Jenkins, Dennis Crowley…). Laissez-moi vous prévenir : voyager dans le futur ne laisse pas indemne. On en revient plein de drôles d’idées dans la tête. On pense open source. On rêve augmenté. On parle à ses amis de fusées réutilisables, d’imprimantes 3D et de concepts étranges comme la serendipity. C’est à ce voyage que je vous convie, à travers ce carnet aussi coloré, foutraque, éclectique et, je l’espère, inspirant que le fut pour nous le SXSW 2013. From Havas to Texas, with love… 5


Dans l’avion qui porte une joyeuse bande de tech-trotters

Mes neurones sont bien attachés, le voyage en Transmedia

jusqu’à Austin, un scan visuel du programme m’offre un

peut commencer. Je m’endors en regardant par le hublot :

aperçu des sujets phares du SXSW 2013 : sharing economy,

dans le ciel, les clouds sont pleins de données.

responsabilité sociale, marketing intuitif, privacy, storytelling, conquête spatiale… Un drôle de fourre-tout qui ouvre grand les portes de la réflexion sur notre époque. Savoureux. Et parfois très insolite, à l’image de certaines sessions aux intitulés colorés : «Hackathon for social good», «How to handle suicidal users without freaking out», «Prototype or die», «Open future meet up» et un audacieux «How to sell shit that doesn’t exist».

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Les membres de la french-team

Christophe Pelletier Frédéric Josué

Emmanuel Durand

Havas Media Labs - Conseiller de Dominique Delport Chairman & CEO Havas Media France, Global Managing Director Havas Media Group - Maître de conférence à l’Institut d’études politiques de Paris.

V i c e - P r é s i d e n t e n c h a rg e d e t o u t e s l e s activités marketing pour le leader mondial de l’Entertainment Warner Bros. Il couvre à ce titre le cinéma, la vidéo, le digital et les jeux vidéo.

Twitter : @cpe Twitter : @emmanuel_durand Linkedin : www.linkedin.com/in/emmanueldurand

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Directeur associé chez Havas Worldwide Paris, il dirige les comptes Orange, Emirates et Warner Bros Entertainment France qu’il accompagne sur des problématiques de réputation. A ce titre, il intervient sur les stratégies d’opinion visant à positionner, promouvoir et protéger la réputation d e s ma rq u e s, d e s e nt re p r i s e s, ain si q u e des dirigeants .

Linkedin : http://www.linkedin.com/in/cpelletier Mail : christophe.pelletier@havasww.com


Benoit Zante

Emmanuel Fraysse

Remi Carlioz

A co-fondé le site Petit Web en 2011. Aujourd’hui, Petit Web est à la fois média, organisateur d ’ événement s et cellule d e veille sur le s thématiques digitales pour les marques et les entreprises.

Digitaliseur passionné, Emmanuel Fraysse est consultant en Digital Business et Social Media, enseignant à Sciences Po et auteur de plusieurs livres. Il exerce notamment sa plume sur le s site s : w w w.emmanuelf r ay s se.com et www.businessisdigital.com.

Remi Carlioz dirige les activités digitales du Groupe PUMA (Kering). Il est basé à Boston, aux Etats-Unis. Twitter : @remic Instagram : bwamerica Mail : remicarlioz@gmail.com

Twitter : @bzante Linkedin : www.linkedin.com/in/benoitzante

Blog : www.emmanuelfraysse.com

Petit Web : www.petitweb.fr

Facebook : www.facebook.com/emmanuel.fraysse Twitter : @manufraysse Mail : efraysse@gmail.com

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DAY

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8 mars 2013

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Premier breakfast dans la ville. Je pensais voir des cow-boys et je tombe sur des aliens. Austin version SXSW n’a rien de l’image qu’on peut se faire d’une cité du Texas. Pas de Stetson ni de gros colts autour du Convention Center, centre névralgique du festival, plutôt des hipsters et des néo-geeks venus de la planète Manga. Reboot mental. Laissez toutes vos idées préconçues au vestiaire. Longtemps, le geek fut has-been. En 2013, c’est confirmé, geek is cool, fun, smart and beautiful. De façon générale, le SXSW vous oblige à revoir entièrement votre logiciel. Ça tombe bien, je suis ici pour prendre des claques. De celles qui vous secouent la tête et vous remuent la pulpe créative. Précieux, dans un métier de la communication où le futur arrive toujours plus vite que vous ne le pensez…

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Une joyeuse communauté shootée au social media : voilà

réel durant tout le festival et de nous gaver de l’expérience

à quoi ressemble la faune du SXSW. Drôle de dope. Qui

des autres. Impression de poser le pied dans la smart city

circule avant tout sous forme d’applis. Highlight, HootSuite,

du futur. Tous les lieux clés de l’événement – salles de

Google Maps, Foursquare… Mieux vaut se mettre à jour dès

conférences, bars, lobbies d’hôtels… – sont mis en réseau

son arrivée pour planer à la même altitude que les autres

par les applis de géolocalisation, dans une logique de smart

attendiees, pouvoir échanger les updates et se géolocaliser à

grid qui dynamise les comportements. L’énergie diffusée

tout moment. La petite colonie Havas & Friends (OK, ça sonne

"two ways" s’éparpille dans la ville. Les événements "popent

un peu compil’ de Pavarotti, je me contenterai du code H&F

up" en direct, créant une programmation parallèle rendue

dans mes notes futures) jette son dévolu sur GroupMe, une

possible par la connexion permanente de tous les festivaliers.

appli de chat qui va nous permettre d’échanger en temps

Effet wahou assuré.

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Déjeuner dans un restaurant japonais de l’East Side. La commande se fait via un iPad disposé devant chaque client. Le serveur porte des Google Glasses. Mes sushis ont un goût de futur.

Emmanuel Fraysse @manufraysse 8 mars #austin est une super ville. Habitants sympas, grosse ambiance... Et les meilleurs sushis de tous les temps pour moi

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Discussion avec Emmanuel Durand au sujet du programme de fidélité My Warner. Qu’est-ce que My Warner ?… Emmanuel Durand : « My Warner est un programme de fidélité développé en France conjointement avec MFG Labs une société de design algorithmique et Warner Bros, qui rémunère les spectateurs pour leur engagement sur les réseaux sociaux. Grâce à ce contrat passé avec nos clients finaux, nous sommes à même de récupérer une masse d’informations qui va nous permettre de mieux les connaître : nous serons en mesure de mieux organiser les conversations autour de nos sorties (EARNED), de mieux viraliser nos assets promotionnels (OWNED) et de révolutionner la façon dont nous allons segmenter nos achats online, par des critères d’historiques comportementaux très qualitatifs (PAID) ». Et l’algorithmie peut-elle venir au secours des studios ? « L’algorithmie est un peu le Graal des studios, en ce sens qu’elle représente un saut quantique supplémentaire dans la recherche des goûts du public : il ne s’agit plus d’organiser des projections test pour évaluer les qualités d’un film à peu près fini, mais de sourcer les attentes du public en fonction de leurs consommations passées, par une tentative d’extrapolation de leurs goûts (comme vient de le faire Netflix avec House of Cards). A titre personnel, je pense qu’un Graal devrait de préférence rester inaccessible… » 21


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Emmanuel Fraysse @manufraysse 8 mars Un homme qui imprime en 3d des nains de jardin m’est forcement sympathique #sxsw #3dprinting #Makerbot

Un des keynotes les plus attendus de cette première

« Comme Photoshop a changé le monde de la photographie,

journée : celui de Bre Pettis, PDG de la société Makerbot et

comme Dreamweaver a ouvert le design de sites a tout le

déjà pape du 3D printing. L’impression en trois dimensions :

monde, nous voulons révolutionner la création d’objets »,

sans aucun doute le frisson techno planétaire du moment,

proclame Pettis devant une salle comble. Sa nouveauté

à égalité, pourrait-on modérer, avec les Google Glasses.

disruptive : Digitizer, un scanner 3D qui permet, grâce à deux

Comment rester insensible à l’idée que l’on pourra bientôt

lasers et une webcam, de modéliser un objet de 17 cm en

tous imprimer la plupart des objets courants chez soi ?

moins de trois minutes. Le monde réel copié-collé sur votre

« Peut-être que dans dix ans, lorsqu’on dira "j’ai acheté une

ordinateur… Vous avez dit révolution industrielle ?

chaise", on parlera d’un fichier 3D » extrapole Clément Moreau, co-fondateur de Sculpteo. 23


Le SXSW, c’est d’abord un grand concours de tweets. Les pouces chauffés à blanc, chacun peut devenir en un instant le champion du gazouillis, aka le commentateur le plus retweeté de l’événement. Après le quart-d’heure de gloire warholien, le shoot de popularité par le microblogging.

Pour Hugh Forrest, directeur du volet "Interactive" du SXSW, cette édition affirme une tendance : la masse prend le contrôle de la technologie et la transforme pour ses propres desseins. L’open source au pouvoir ? Le keynote de David Jones intitulé "Age of Damage, Be the Company You Want to Keep", élargit le constat. Le CEO de Havas y glisse un avertissement aux entreprises : à l’ère des médias sociaux, leur responsabilité sociale est observée à la loupe et à chaque seconde. Hypervisibilité et hyperconnexion technologiques obligent les marques à être plus civilisées que jamais. Et Jones de ressortir cette célèbre vidéo de surveillance où l’on voit un livreur Fedex balancer par-dessus le portique d’une maison un colis contenant… un ordinateur. Presque aussi néfaste pour l’image de la société prise en flagrant délit de désinvolture que l’opacité de Starbuck, Verizon ou Bank of America, qui leur a mis les réseaux sociaux à dos. Pour éviter le bad buzz, David Jones érige trois piliers : transparence, authenticité, réactivité. Et prend en exemple la marque des montagnards Patagonia, devenue coqueluche de la websphère grâce à sa politique résolument « open », sociale et responsable.

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Chritophe Pelletier @cpe 8 mars

Havas @havasgroup 8 mars

the industrial revolution empowered companies;

Dans un monde de #transparence radicale, la réalité

the social revolution empowers people» says

l’emporte sur l’image. @davidjoneshavas

@davidjoneshavas #ageofdamage #SXSW

bit.ly/Zs1h5e #ageofdamage #SXSW

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Keynote sur la Privacy par Dave Morin, le fondateur de Path. Outre-Atlantique, certains ne jurent que par ce Facebook à invitations limitées. Car la Big Idea de Path, c’est ça : 150 amis maximum, pour recréer une sphère intime autour de soi. Bref, quand vous êtes à la fois sur Twitter et Path, votre vie est calibrée à 140 caractères et 150 contacts. Amusant de voir comme Internet peut nous exciter par des contraintes numérales. Une question de Dave Morin m’interpelle : « la privacy est-elle une préoccupation pour les teenagers ? » Pas sûr… Et si Path incarnait un besoin naissant de refuges pour les internautes qui souhaitent rester connectés, mais aspirent à un peu de calme virtuel ?

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Toute la journée au SXSW, des débriefs spontanés ou "meet up" se créent entre festivaliers, ajoutant des événements non-programmés et passionnants au programme. Message de ralliement : «We forgot that we are just amateurs, not professionals.» Le meet up, c’est aussi notre stratégie, au sein de la team H&F, pour échanger nos expériences et évacuer la frustration de n’avoir qu’une vision parcellaire du festival. Notre plateforme de rencontre : la suite #1214 au douzième étage de l’hôtel W, au cœur de la ville. Emmanuel Fraysse résume bien la situation : « C’est la première fois que j’ai la sensation de vivre une expérience de société fluide, comme l’évoque Joël de Rosnay dans "Surfer la vie". La fluidité, ici, vient du fait qu’il n’y a aucune rétention d’informations. Elle circule librement, partout, tout le temps. La logique de flux exclut la logique de Frederic Josue @fredericjosue 8 mars

stock et crée de la valeur par la co-création. »

#path Dave Morin’s keynote, close friends, families, celebrities gather on #path because we respect privacy 27


Le coup de com’ du jour : à cause de la pluie qui tombait sur Austin, le keynote de Sam Decker, CEO de Mass Relevance, était menacé de désertion. Decker a adressé à la communauté un e-mail de dernière minute, dans lequel il offrait un poncho, un parapluie et un service navette gratuit à chaque spectateur qui se rendrait à son speech. Smart.

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DAY Frederic Josue @fredericjosue 9 mars #sxswnovella the @loner went for an early run with Brooks Cowboy Run, registration on SXSW app. That´s branding dudes

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9 mars 2013

SPOILERS, BIG DATA ET BUZZ-MODELS

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J’ai mon Philofax et mon Minox 35 GT est chargé d’un film N&B 100 iso, or il pleut des cordes à Austin : les limites du Hipster style. Les mêmes hipsters, leur sac Filson à l’épaule jugent déjà SXSW mainstream, trop d’agences de création, trop d’agences tout court et des keynotes corporate au discours commercial. « Tu peux pas avoir Depeche Mode et être pointu… Dude » ; même reproche fait à Coachella, devenu bling. Premier meeting au Driskill à l’heure où les runners emmenés par Brooks participent au Brooks SXSW Cowboy Run, enregistrement en ligne sur l’appli SXSW, j’hésite entre un Signature Austin American breakfast, un Paris TX Benedicts ou un Hippie Hollow à base de Cholestérol HD, soient les seuls mets non accompagnés d’un cœur rouge pour icône, ie Heart Healthy, freacky... j’opte pour le café au lait croissant.

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Alors que tous les membres de la team H&F éprouvent la même frustration devant la simultanéité des events de ce festival – cette désagréable sensation de louper mille choses passionnantes à la seconde… – un tweet-strike de David Cohen (fondateur de l’incubateur Techstars) nous permet de recouvrer un zeste de zen : «The best way to prepare for events like SXSW is to plan only half of your schedule. Leave the other half wide open and just go with the flow.» Autrement dit, dans cette étourdissante foire aux applis, aux keynotes et aux idées délirantes qui nous entourent, deux yeux et deux oreilles ne suffisent pas. Le seul moyen d’avoir une vision globale de ce futur grouillant est bien de trouver quelques cerveaux avec lesquels mettre le sien en réseau. À Austin, le mot "community" prend tout son sens.

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Twitter, c’est justement le sujet du premier keynote de la journée. Plus précisément : "Comment Twitter a changé notre façon de regarder la TV". C’est surtout de fictions dont il est question. Aux Etats-Unis, la saison 3 de la série Pretty little liars a représenté plus de 52% du trafic Twitter, soit près de 39,000 tweets par minute. « Des gens meurent tout le temps, ils ont tous des problèmes, c’est parfait pour Twitter » s’amuse la maîtresse de cérémonie. Une conséquence de cette twitterisation de la télé : mieux vaut mater ses programmes préférés lors de leur première diffusion, car 77% des gens qui tweetent les shows le font en live. Twitter est devenu un immense spoiler, qui oblige à entrer dans le jeu de la "real-time participation"… ou à regarder sa série en sachant, la plupart du temps, qui meurt à la fin.

Jeremy Waite @jeremywaite 9 mars The rise of Social TV; 88% people multi-task while watching TV #SXSW

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Dans un bar hipster d’Austin, un speech de Nate Silver sur le thème : "Le marketing intuitif est-il mort ?" Silver, pour mémoire, c’est ce statisticien considéré comme la Madame Irma de notre ère depuis qu’il a prévu quasi parfaitement les résultats des élections américaines de 2008 et 2012. Le jeune gourou révèle un secret de sa magie : « Ne jamais isoler les Big Data des éléments de contexte. » Un exemple ? « Les banlieues avec des trottoirs ont une probabilité supérieure de voter démocrate, celles qui n’en ont pas de voter républicain. » Wah, on peut donc lire l’avenir dans le bitume. Si tu sais interpréter les Big Data, le marketing intuitif est à tes pieds, mec.

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L’espace, un des grands fils rouges de ce SXSW. La NASA, qui en a sans doute marre que le monde se demande ce qu’elle fout depuis qu’elle a envoyé le premier homme sur la Lune, a planté son drapeau sur Austin. Et posé son futur télescope spatial "James-Webb" en plein sur la pelouse du Long Center. Cet énorme joujou qui remplacera Hubble en 2018 devrait permettre de récupérer des données datant de 10 milliards d’années et ainsi de remonter jusqu’au Big Bang et à la formation des différentes galaxies. Huge. Pardon : awesome. Mais le nom que l’on associe le plus aux étoiles, au SXSW 2013, c’est ce jeune mec au nom et à la gueule de héros Marvel : Elon Musk.

Inspiration officielle, d’ailleurs, du Tony Stark aka Iron Man de John Favreau, le créateur de Paypal et CEO de SpaceX a tout simplement développé la première fusée réutilisable. Démonstration dans une vidéo révélée par ses soins devant un parterre médusé, où l’on voit Grasshopper – le nom de cette fusée grande comme un immeuble de dix étages – décoller dans un nuage de feu, s’élever à 80 mètres, rester en suspension quelques secondes, redescendre tout doucement et se poser avec une grâce de ballerine sur son point de départ. "Iron Musk" en est persuadé : avec la fin des fusées jetables, envoyer des hommes sur orbite va devenir rentable et les entreprises privées vont enfin pouvoir s’engager dans le tourisme spatial. « Si l’humanité doit aller au-delà de notre planète, il faut résoudre le problème du coût. Et ce n’est pas pareil d’acheter un avion que d’en refaire le plein d’essence. » Le social media a beaucoup plus d’avenir que je ne le pensais : avec des types comme Musk, on tweettera un jour sur Pluton. 38


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Quand on vient de rencontrer Iron Man, un keynote d’Al Gore

Comme le note Jérôme Duchamps, DG de BETC Digital,

perd un peu de son sel. Accueilli comme un oracle par 3000

« voir autant de monde à la conférence d’Al Gore sur le

personnes, l’ex-futur président des Etats-Unis enfonce des

futur de la démocratie qu’à celle de Cindy Gallop sur le

portes à moitié ouvertes. « Le futur de la démocratie est

futur du porno démontre bien l’ouverture et la singularité

intimement lié à la liberté du Web. »

de South By ». En effet, pendant qu’Al Gore martèle, à

Et si on parlait du climat, Al ?

propos des lobbys américains, « our democracy has been hacked », c’est de "sexe social" qu’il est question dans une salle voisine. L’entrepreneuse anti-puritaine Cindy Gallop y présente sa création : MakeLoveNotPorn.tv, un

Emmanuel Fraysse @manufraysse 9 mars Al Gore en train de gribouiller sur mon boukin... enfin le sien que j’ai. #sxsw #fun pic.twitter.com/qUKgBexy62

réseau convivial sur lequel les internautes peuvent partager leurs vidéos coquines et parler crûment de cul. Miss Gallop souhaite que nos conversations courantes ne se résument plus à « quel est le dernier film que tu as vu ? » ou « qu’est-ce que tu écoutes en ce moment ? », mais puissent aussi inclure des questions du type « t’as fait quoi dernièrement au lit ? ». Et de conclure devant une salle hilare : « Nous voulons être le Yelp du sexe. »

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Twitter et la TV, marketing intuitif, conquête spatiale, politique, sexe… Le French meet up du jour, au douzième étage de l’hôtel W, ne manque pas de sujets. Sont également évoqués : des cousines japonaises des Google Glasses capables d’effectuer des recherches sur l’interlocuteur de celui qui les porte, la mise en musique interactive des bandes-dessinées Marvel sur tablette ou encore l’incroyable buzz réussi un mois plus tôt par la marque de biscuits Oreo. Le 4 février 2013, en pleine finale du Super Bowl entre San Francisco et Baltimore, une panne de courant plonge le stade de la Nouvelle-Orléans dans un black-out de 34 minutes. Une éternité pour un des événements télévisuels préférés des Américains. Oreo, qui a compris depuis longtemps les ressorts du like, tourne la panne à la blague sur la Toile. Son équipe de community management poste un tweet déjà culte dans la petite histoire de la com’ digitale : «Power out? No problem. You can still dunk in the dark». Yep, l’obscurité n’empêche pas de grignoter nos biscuits… Retweetée plus de 16 000 fois, cette pub gratuite a réussi à voler la vedette aux coûteux spots TV diffusés pendant le Super Bowl. Le buzz-model par Oreo : de l’humour, de la jugeote et cette réactivité dont parlait David Jones dans son keynote hier.

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Le keynote "The power of marketing in the moment" nous éclaire sur le coup de génie réussi par Oreo au Super Bowl en nous invitant à réfléchir sur le real-time marketing. On y pioche quelques règles essentielles à garder en mémoire : traiter le community management comme un art à part entière en le confiant à une agence ou une équipe dédiée, imprégnée des valeurs et du tone of voice de la marque. Identifier des événements stratégiques et mobiliser une équipe pour les couvrir et réagir sur l’instant. Savoir adapter les contenus en fonction des plateformes : on ne poste pas la même photo sur Pinterest que sur Instagram. Et ne pas se satisfaire d’un tweet, même bien trouvé, s’il est décorrélé de la campagne globale.

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Des meet up sauvages entre festivaliers. Des keynotes qui vous retournent le cerveau. Des files d’attente qui s’étirent dans la rue pour y assister… Bien plus qu’un Woodstock des Tweetos, le SXSW est une immersion dans ce qui se fait de mieux – ou de pire – en matière de social media. Une leçon pour les publicitaires et pour les marques, qui peuvent assister in vivo aux comportements que provoquent sur les êtres les outils de la sharing economy.

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DAY

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10 mars 2013

STORYTELLERS ET CRÉATEURS DE CHANCE

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Emmanuel Durand @emmanuel_durand 10 mars The French wolf pack @cgiorgi @michelreilhac Dès 6h, des messages GroupMe inondent mon smartphone. Objet : le passage à l’heure d’été. Petit reminder : dans ce

@bzante @cpe @worldwale @carolezibi @ manufraysse @ #SXSW2013

coin du monde, on change d’heure le 10 mars. Branle-bas de combat dans la team H&F : plus personne ne sait quelle heure il est. Nos cerveaux multi-retournés comme des buns par les keynotes du festival se désorientent facilement. L’avalanche de messages met en exergue les limites de mes équipements de baroudeurs IT. Mon iPhone s’est mis à la bonne heure automatiquement, au contraire de mon Samsung Galaxy. Les mêmes questions affluent en simultané sur mes trois applis de chat. Les réponses ne se synchronisent pas, laissant les questions en "pending". Le social media, c’est aussi ça : la menace du chaos à chaque grain de sable…

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Habit=cue, action, reward. Problem: the brain develops a sense of anticipation. Hence the importance of the surprise factor #scienceofstory


Une des conférences les plus attendues par tous les fabricants d’images et d’histoires réunis à Austin : "The science of storytelling" par les journalistes Matthew Danzico de la BBC et Amy O’Leary du New York Times. Pour un auteur de série comme un community manager ou un blogueur, le défi est le même : comment intéresser durablement le spectateur ou un lecteur à ce qu’on raconte ? Le credo des deux speakers : "l’addictive loop". Une boucle addictive formée de deux éléments qui se répètent : l’attente et la surprise. Le sel de la promesse et le piquant de la récompense… « Romans, articles, vidéos, réseau social… Quand le cerveau entre dans cet "addictive loop", il commence à anticiper ce qui l’attend et à réclamer lui-même des hooks : ces points de tension ou de surprise du récit qui lui déchargent des doses de dopamine. Au narrateur de ne pas le décevoir… »

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%

of our waking hours are spent day dreaming #scienceofstory 49


En écho à la réflexion de 14h sur le storytelling, celle de Google sur la création publicitaire. Non content d’agiter les coulisses du SXSW avec ses Google Glasses qui fleurissent sur les visages des hipsters du futur, le géant de l’Internet propose de repenser la pub. Insuffisant, désormais, selon ses porte-paroles, de miser sur le duo graphiste / concepteurrédacteur pour embarquer le public dans une histoire forte. Google propose un nouveau mantra : Art, Copy & Code, ou comment les marques ont intérêt à intégrer la technologie et les données pour sortir de la narration so sixties image + texte. Comme si elle sortait un lapin d’un chapeau, la team Google a illustré ce projet en présentant un nouveau produit : les talking shoes. Créées en partenariat avec Adidas, ces chaussures de sport qui parlent se servent de microcapteurs et de haut-parleurs pour mesurer vos efforts avec précision et vous coacher par des commentaires motivants. Parfait pour courir sur les trottoirs démocrates de Nate Silver.

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Créée en partenariat avec Adidas, la chaussure de sport Google se sert de micro-capteurs et de haut-parleurs pour mesurer vos efforts et vous coacher par des commentaires motivants.

Cité comme un exemple d’innovation digitale par Google dans son keynote Art, Copy and Code, le Sleep Art. Une technologie imaginée par BETC Digital pour les hôtels Ibis qui permet de transformer son sommeil en œuvre d’art. Pendant que vous dormez, des capteurs analysent les mouvements et la température de votre corps et les retranscrivent sur une toile numérique. L’invention du pixel dripping ?

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Un des mots-stars du SXSW : serendipity. Un concept qui désigne le fait de trouver… ce que l’on ne cherche pas. Plusieurs sessions inscrites au programme s’appuient sur cette formule de création, comme un écho aux différents speechs sur le marketing intuitif. Je jette mon dévolu sur un panel qui présente la sérendipité comme l’arme de disruption absolue. Pour ses défenseurs, la sérendipité nous permet de miser sur les idées que l’on pense bonnes lorsqu’elles ne sont encore que des intuitions. Et qu’il n’y a encore que soi pour y croire… On ne sait pas ce que l’on cherche, mais on pressent qu’il y a quelque chose d’awesome au bout. « Si vous n’arrivez pas à la verbaliser, c’est sans doute que votre idée est vraiment cool », affirme un des orateurs. Il ajoute que cela demande beaucoup de foi et de pugnacité car la démarche intuitive se heurte le plus souvent au scepticisme des esprits conventionnels ou rationnels, qui peuvent la bloquer net. Celui qui croit en la sérendipité est souvent seul, au départ, mais se donne l’opportunité de trouver des choses nouvelles et étonnantes. Il garde un "beginner mind", cet esprit débutant allégé des habitudes et donc des inhibitions qu’un être développe avec l’expérience. Il se fabrique de la chance en osant la provoquer. « Il peut y avoir bien plus de possibilités créatives dans l’esprit d’un "beginner" que dans celui d’un expert », conclut le speaker. « Une question que devraient se poser tous les dirigeants pour leurs équipes est : comment préserver leur "beginner mind" ? »

christophe pelletier @cpe

10 mars

How to use technology to find what we are not looking for? #SXSW #serendipity #SXSWLucky

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Un bon exemple de ce que peut produire un "beginner mind" est donné dans une salle voisine, avec la présentation, par la jeune ingénieure en robotique Heather Knight, d’un robot nommé Data. Sa

spécificité : il est le premier droïde humoriste. Dressé face à l’auditoire, il balance

des vannes froides comme du métal, nous annonce qu’on va tous crever dans les 24 heures et adapte son numéro en fonction des réactions du public. Le coup de cœur awesome du jour.

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Conversation avec Rémi Carlioz, head of digital Monde chez Puma. En confiant la couverture d’événements à des créateurs de Tumblr, la marque a su se donner une image digitale edgy. Je demande à Rémi trois choses qui l’ont frappé dans ce festival…

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« Bre Pettis, l’inventeur du 3D printing et du Makerbot. J’en vois l’application immédiate dans

mon métier et nous avons d’ailleurs commencé, mais

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« Elan Musk, ce visionnaire qui a fait fortune en cocréant puis en revendant PayPal. Les trois sociétés

qu’il dirige aujourd’hui révolutionnent chacune un pan

3

« La force de la sharing econonomy, qui faisait à juste titre la couverture du journal The Economist

la semaine de SXSW. Elle bouleverse bien des domaines

l’impression en 3D dépasse ce que notre imagination

majeur de l’économie voire de la société : les modes

et des business models existants. Wikipedia bien sur,

est capable de concevoir. Du fait de sa radicalité, c’est

de transports avec Tesla, l’énergie avec SolarCity et la

mais aussi Airbnb, Etsy, RelayRides, Kickstarter… autant

une disruption qu’il est impossible d’appréhender

conquête de l’espace avec SpaceX. Il est fascinant de

de marques qui ont su transférer le coût du travail au

pleinement, comme il aurait été difficile d’imaginer ce

penser que Musk s’est initialement posé en concurrent

consommateur et bouleverser nos comportements.

que changeraient le téléphone, l’avion, la télévision ou

de la NASA - pensant pouvoir faire mieux et moins

Intéressant de voir que cette économie parallèle, par

l’Internet 5 ans avant leur apparition. Je pense réellement

cher… - avant qu’elle ne devienne son principal client.

le jeu de l’auto-régulation collective, engendre des

que cela peut être une révolution industrielle. Cela pose

Personne ne peut mieux illustrer l’adage - sans mauvais

expériences clients souvent plus positives que dans

évidemment comme toujours la question de l’usage de

jeu de mot - the sky is the limit. Et cela devrait nous

l’économie "classique". En donnant une valeur inédite

la technologie. Aujourd’hui on est en mesure d’imprimer

inspirer tous. Si Musk peut envoyer des gens sur Mars,

à l’avis du consommateur, des services comme Airbnb

des prothèses pour enfants mais aussi des armes. Oui,

je dois pouvoir réussir à m’atteler à n’importe quel

et Uber offrent des prestations bien meilleures que

on imprime des armes aujourd’hui. »

projet, même d’ambition plus modeste… Et il redonne

dans bien des hôtels ou des ta xis traditionnels.

aux Américains une nouvelle frontière - la planète Mars -

C’est une tendance de fond, la réputation qui vient

50 ans après Kennedy. Mais c’est un privé qui redonne

remplacer la législation comme outil de régulation. Une

du rêve et non plus un Etat. »

économie qui ne va pas sans soulever de nombreuses questions, comme celle de la place du créateur, à l’instar de Wikipédia qui compte 5% de contributeurs et 95% d’utilisateurs. »

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DAY

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11 mars 2013

ON VA TOUS ÊTRE AUGMENTÉ

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Onze ans après Minority Report, c’est officiel, le réel a rattrapé la science-fiction. Je suis à la présentation du Leap Motion Controller, un des produits les plus awesome de ce SXSW. Disposé près de votre ordinateur, ce boîtier capte les mouvements de votre main et vous permet d’interagir avec l’écran en remuant les doigts comme un sorcier vaudou. Prix de ce bond dans le futur : 79 dollars.

Pas cher pour devenir Tom Cruise.

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Debrief avec Jérôme Duchamps. Pour le DG de BETC Digital et vice-président de l’AACC Interactive, « l’exemple de Leap Motion préfigure de nouveaux types d’interactions et d’interfaces utilisateurs. Idem pour Revel, une technologie développée par Disney Research qui permet de reproduire sur tablettes les sensations du touché. De façon générale, ce SXSW nous montre que le digital fusionne plus que jamais avec le monde physique. Après les objets connectés qui digitalisent le monde physique, c’est le monde physique qui enrichit le digital. Autre cas frappant : les technologies d’impression 3D Makerbot et Cubify. Pourquoi sont-elles vues comme une révolution industrielle ? Parce que pour la première fois, un élément digital donne naissance à un élément physique. »

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« Nous avons 3 milliards de check-in pour 30 millions d’utilisateurs. Individuellement, les check-in ne sont pas si intéressants. Mais collectivement, c’est fascinant. C’est comme Twitter à ses débuts : les gens pensaient que ce n’était qu’une bande de geeks qui partageaient leur humeur du déjeuner. Mais agrégées, ces données sont très puissantes. » Keynote de Dennis Crowley, fondateur de Foursquare. Son éloge de la géolocalisation fait écho à l’un des thèmes sous-jacents de ce festival : la quête de fluidification de nos mouvements les plus quotidiens. Impressionnant de voir le nombre de star t-ups dont le credo est de faire tomber les barrières du monde physique, à l’image des créateurs de Movie Pass, une application qui permet de prépayer sa séance de cinéma et de ne plus avoir à piétiner devant un guichet, ou de Uber, ce service de taxis par abonnement qui permet de voyager sans un doll dans la poche. 60


La dématérialisation de l’argent : un sujet connexe à cet te re c herc he d e f luid i té. Pa s étonnant q u’ il provoque des combats de coqs entre les entreprises engagées sur ce marché. Et leur provoque des pulsions marketing agressives, à l’image de Level Up, dont les vendeurs offrent 5 dollars de crédit aux festivaliers qui téléchargent leur système de paiement via smartphone. On comprend que la présence de Google sur ce segment, avec son système Google Wallet, les oblige à une grande proactivité commerciale, mais pas sûr que soudoyer les clients soient une approche… payante. Plutôt un cash-flop, à mon avis.

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Le tweet qui circule est une vantardise (légitime) d’Airbnb. La nuit dernière, 8 000 maisons ou appartements d’Austin ont hébergé des utilisateurs du site, dont on peut imaginer que ce sont presque tous des festivaliers… L’entreprise qui a révolutionné l’hôtellerie n’a cessé d’être citée sur les scènes et dans les coulisses du SXSW comme LE modèle de sharing economy et de revirement du virtuel au service du IRL (In Real Life). Et comme si ces bons points ne suffisaient pas, elle a été tout aussi souvent prise en exemple pour le design de son interface, qui semble inspirer toutes les start-up en quête d’ergonomie contemporaine.

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Keynote "WTF is a DEO?", qui entend définir le profil d’excellence d’un Design Executive Officer, ce dirigeant à la croisée de la création et du business. Un portrait-robot du DEO idéal est dressé à partir de figures américaines emblématiques, de Richard Branson à Oprah Winfrey en passant par Mark Zuckerberg ou Michael Bloomberg. Un mode d’emploi en six points du business-success s’en dégage :

1. Penser "out of the box" 2. Avoir une vision systémique 3. Développer une forte empathie 4. Prendre des risques 5. Etre curieux et imaginatif 6. Etre engagé pour l’excellence Il y en a même un septième : tous les grands DEO sont très "GSD" : « Getting shit done »… 63


du cœur

animaux mignons

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identitaire

nostalgie

humour

humanitaire

capturer l’instant

se méfier de l’impactant à première vue


La partie Interactive du SXSW se termine. Demain, les volets Musique et Cinéma vont prendre le relais et refermer cette parenthèse futuriste. Un dernier keynote pour la route : celui de la société Buzzfeed, créateur de contenus obsédé par les ressorts de la viralité. Leur credo : le Bored at Work Network et le Bored In Line Network. Autrement dit : exploiter le filon des personnes qui s’ennuient au bureau ou ont simplement un moment à perdre en leur concoctant des contenus rapides et fun à ingurgiter. Au service de la pub, cela donne par exemple une page sponsorisée par Toyota Prius, listant « les 20 animaux hybrides les plus cools » de la planète. Utile pour tous les créateurs de contenus à vocation virale, la liste Buzzfeed des 8 insights qui favorisent le partage sur Internet :

1. Avoir un cœur. Les émotions sont sociales 2. Etre identitaire. Les internautes partagent les choses qui leur parlent. Exemple : parler des gauchers intéressera forcément les gauchers 3. Capturer l’instant, agir en temps réel 4. Respecter les animaux mignons 5. Cultiver l’humour, ce trait intrinsèquement social 6. Flatter la nostalgie 7. Miser sur les droits de l’homme et les grandes causes 8. Se méfier des contenus qui semblent impactants à première vue mais dont on sait que les internautes ne les partagent pas. Exemple : les photos de célébrités nues, qui cartonnent dans les recherches Google mais font un flop dans les partages Facebook et Twitter. 65


Avant de filer à l’aéroport, un bruit qui court depuis le début de ce SXSW me parvient aux oreilles. Pour les hipsters-bohèmes qui viennent depuis plusieurs années à la grande geek-party d’Austin, le festival est devenu beaucoup trop mainstream. Trop de businessmen argentés, trop d’agences de pub, trop de bling. « La vraie tendance, mec, c’est ce petit festival geek qui s’est créé récemment à Portland. 500 aficionados max. De vraies start-up innovantes. » Et shit… même dans le futur, des gens vous disent que c’était mieux avant.

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EPILOGUE

« PUT DOWN THE DEVICE, INTERACT ! » 67


Les portiques de sécurité de l’aéroport international Austin-Bergstrom me paraissent archaïques. Bye bye, monde fluide et sans barrières physiques dont j’entends parler depuis mon arrivée… En attendant d’embarquer, me reviennent des phrases attrapées à la volée lors de ces quatre jours d’échanges ininterrompus, comme autant de points de vue et de prédictions sur les changements technologiques et digitaux qui s’avancent. Je me souviens de Rémi Carlioz me disant lors de notre conversation d’hier : « Il est intéressant de se demander ce que cela susciterait de se réveiller un matin sans

Path. Rien. Rien de plus qu’une frustration passagère. Et cela vaut pour 99% des choses présentées lors de ce festival… », ce qui est une façon de s’émerveiller du 1% restant. Ou d’un speech de Bruce

Sterling, l’auteur de science-fiction cyberpunk : « Une innovation intéressante ne veut pas dire une bonne innovation. Un milliard d’applications ont été vendues, soit. Où est le mieux ? Imaginez que les Google Glasses soient détournées de leur usage.

Si j’étais un spécialiste du spam, je trouverais que le spam par les Google Glasses constitue une avancée. » Yep, la disparition de frontières crée toujours quelques inquiétudes, et celles qui séparent le monde virtuel du monde matériel sont bel et bien en train de s’effacer.

christophe pelletier @cpe 18 mars SXSW 2013 en une leçon : « Put down the device, interact ! » par @fredericjosue http://po.st/KyYvPo via @bzante et @petit_web

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A titre personnel, les impressions que me laissent ce voyage sont bien plus positives. "Sharing economy", "sharing knowledge"… Plutôt cool de voir que le partage jaillit spontanément dans l’espace nouveau qui se crée. Et important de comprendre qu’il engendre une inversion des pouvoirs entre les marques et les consommateurs. De l’histoire de l’économie moderne, ces derniers n’ont sans doute jamais été si puissants, si autonomes, si chahutants pour les marques qui ne produisent pas les services et les expériences qu’ils demandent. Ces marques, comme devant tout changement profond des mœurs, n’ont d’autre choix que de s’adapter. Comment ? Well… Toutes les têtes pensantes d’Austin semblent se rejoindre sur une réponse : «Put down the device, interact!» Autrement dit, si l’on souhaite vraiment impliquer le public dans une histoire, arrêtons de multiplier les dispositifs et concentrons-nous seulement sur ce qui crée de l’interaction et du décloisonnement.

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S’agissant du décloisonnement physique, ce SXSW a fait émerger deux tendances : les solutions "machine to machine", soit tous les équipements et outils capables de "travailler" ensemble et de créer des "smart grids" (ces réseaux intelligents qui rendent nos vies plus agréables et plus fluides). Et les solutions "machine to me", ces outils que l’on porte sur soi et qui interagissent avec notre environnement pour nous le rendre plus accessible et familier. Je parle notamment de ces applications baguette magique qui ouvrent toutes les portes sur votre passage, mettent en marche votre voiture quand vous y prenez place et valident votre ticket sans que vous ayez à sortir les mains de vos poches, quand vous montez dans le bus ou embarquez dans votre avion.

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À ce propos… L’hôtesse appelle les passagers de notre vol au micro. Retour en France, avec mes complices de la French team Havas & Friends. La France, pays é ton na m m e n t a bse n t d e ce SX S W, q ua nd ta n t d’entrepreneurs de tous continents s’y bousculent pour se remplir la tête d’idées ou faire émerger les leurs. Wired. Je jet te un coup d’œil aux derniers échanges de tweets à Austin. Un festivalier demande si quelqu’un a un chargeur de Blackberry. Une blogueuse de San Francisco lui répond du tac au tac : « Ringard ». Décidément, on est toujours le has-been d’un autre.

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Direction du projet : Nathalie Orban / Vincent Boucheron Direction de la création : Francis Edelin Conception et rédaction : Mathieu Dupont / Frédéric Josué Direction Artistique : Nicolas Pageau Planning Stratégique : Paul Cotti-Piccinelli Exécution : Raphaël Bazzo Suivi de Production : Elie Boussira Havas Digital Factory n-square

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www.havasmedia.com


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