tous les visages
au public des parties oubliées de notre passé se retrouve dans la programmation de la Première suite d’orchestre de Debussy. L’œuvre que vous allez entendre est le fruit d’un long labeur de reconstruction à partir de brouillons et esquisses laissés par le compositeur. Il me semblait essentiel de faire vivre la recherche musicologique en inscrivant cette œuvre au répertoire de l’orchestre. Pouvons-nous en conclure que vous désirez offrir une nouvelle dynamique entre l’orchestre et son public ? DR : En quelque sorte, oui. Je désire un orchestre accessible à tous. Cette « désacralisation » se traduit par un processus double. D’un côté, nous proposons un programme assez diversifié en espérant toucher toutes les sensibilités. De l’autre, pour les novices désireux de découvrir l’univers de la musique, nous avons mis en place plusieurs projets. Nous reprenons les apérosconcerts, des concerts d’une heure sans entracte autour de grands chefs-d’œuvre du répertoire symphonique, introduits par le chef et/ou le soliste. Le concert est suivi d’un moment convivial permettant aux spectateurs d’échanger avec les artistes autour de l’expérience qu’ils viennent de vivre. Cette saison, ce sera par exemple le Concerto pour violon de Beethoven et le Concerto pour clarinette de Mozart. Pour ceux désireux d’apprendre à écouter une œuvre, de connaître son histoire et le contexte politico-culturel dans lequel elle fut composée, nous offrons régulièrement des clés d’écoute : un spécialiste présente les œuvres jouées au cours d’un programme afin de maximiser l’expérience des auditeurs. Enfin, nous souhaitons proposer régulièrement la possibilité à des chanteurs amateurs de tous niveaux de venir participer à un programme avec l’orchestre. Cette saison, ce sera avec le projet Mademoiselle Moselle, autour du répertoire de la chanson. 200 chanteurs de toute la Moselle, fédérés par l’INECC participeront à cette belle aventure ! Si cela concerne avant tout un public adulte, les jeunes ne sont certainement pas mis de côté. L’Orchestre national de Metz Grand Est est très engagé dans la sensibilisation des jeunes publics à l’appréciation musicale, ce qui n’est pas une tâche si facile ! Les jeunes oreilles de 3 ans ne sont pas celles de 7 ans et encore moins des oreilles de 13 ans. Nos musiciens sont très
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impliqués dans ce domaine et proposent, avec des conteuses des Bibliothèques-Médiathèques de Metz, des Îles aux bébés qui s’adressent aux tout-petits dès 3 mois et développent leur imaginaire. Pour les plus grands, je suis particulièrement enthousiasmé cette saison par le Concerto pour pirate de Dylan Corlay : c’est une œuvre remarquable fusionnant théâtre et musique qui séduira tant les petits que les grands ! Je tiens à rappeler également que nos répétitions sont régulièrement ouvertes au public et nous recevons des groupes scolaires en provenance de tout le département. Un autre aspect important de votre programmation se trouve également dans les nombreuses invitations artistiques. Oui, bien sûr. À l’origine d’une programmation vient toujours un désir esthétique, l’idée d’une pièce. En fonction de ces choix, je réfléchis ensuite aux meilleures conditions de leur expression artistique, que ce soit en tant qu’interprète ou bien en direction. Parfois, je sais exactement qui je souhaite inviter. Cela peut être un artiste avec lequel nous avons déjà collaboré et avec qui l’expérience avec l’orchestre fut extrêmement positive au point de vouloir renouveler ce lien. Ce sera le cas, par exemple, avec la venue du chef Adrian Prabava pour le Double Concerto pour violon et violoncelle de Brahms ou encore avec le pianiste Geoffroy Couteau qu’on retrouvera, toujours avec Brahms, dans son Deuxième concerto pour piano. Dans d’autres cas, le parcours de l’artiste invité en fait la personne idoine pour mettre en valeur le programme imaginé. C’est à la fois le désir d’offrir le meilleur pour notre public, mais aussi l’occasion de le faire participer et découvrir les talents d’aujourd’hui ! Nous aurons l’immense plaisir de recevoir de jeunes artistes aux carrières prometteuses qui se dessinent. Je pense à la cheffe Rebecca Tong, qui fut lauréate du premier concours La Maestra, ou encore la talentueuse mezzo française Adèle Charvet. Je considère ces aspects du programme presque aussi importants que le choix des œuvres car, au final, l’expérience d’un concert relève de la qualité humaine et collaborative de tous ces artistes, en partant du travail de compositeur jusqu’à la sensibilité de la direction, en passant par l’implication de tous les musiciens.