Emscher Park
International Building Exhibition Voyage d’études mars 2014 Sous la direction des enseignants : Patrick Thépot et Luna d’Emilio Master Aedification, Grands territoires, Villes
Iris Delbart, Camille Grandry, Elisa Lefebvre, Claire-Louise Salles
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Sommaire
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Préambule .................................................................................................
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L’Emscher Park, un projet urbain innovant .................................
p 6-11
Notre voyage ............................................................................................
p 12-15
Le Tétraèdre, un nouveau regard sur la Ruhr .............................
p 16-23
Zollverein, Se transformer pour survivre .....................................
p 24-35
La poétique des transports ................................................................
p 36-43
Des cheminements ................................................................................
p 44-57
Le projet Phœnix, une zone d’activité nouvelle génération
p 58-63
Une culture de la Ruhr? ........................................................................
p 64-69
Emscher Park, une architecture décomplexée? .........................
p 70-75
L’après IBA .................................................................................................
p 76-79
Bibliographie ...........................................................................................
p 81
Préambule Le travail de conception d’un projet urbain demande de constituer un corpus autour d’une catégorie de projets ; pour cette raison, nous nous sommes intéressées à la référence de l’Emscher Park dans une démarche de comparaison avec le Sud Grenoblois. Ce travail a fait appel à la fois à une recherche bibliographique, mais aussi à un voyage. Celui-ci nous a permis de prendre la mesure du projet dans sa dimension intellectuelle autant que dans sa dimension sensible. La restitution que nous faisons dans ce livret mêle ainsi analyse et recueil d’impressions.
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L’Emscher Park, Un projet urbain innovant
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L’Emscher Park, Un projet urbain innovant
L’Emscher Park est un projet de territoire innovant initié de 1989 à 1999 mêlant travail paysager, social, économique et culturel. La vision globale était celle de créer un paysage de parc de 75 km de long, en plein milieu d’une conurbation de 5 millions d’habitants. Ce parc devint le fil conducteur pour créer un nouveau profil économique pour une région en déclin. Une exposition, comme méthodologie urbaine L’exposition internationale se présente sous la forme de projets et d’objets variés : des stations d’épuration, la reconversion d’usines sidérurgiques, la promotion de nouveaux lieux de travail, la préservation des stations de train et des cités ouvrières. En effet, pour intervenir sur le territoire, la démarche se concentre autour d’interventions et d’altérations à des points spécifiques ; tels des points d’acuponcture à partir desquels les effets se répandent sur les espaces environnants. Ainsi l’Emscher Park est avant tout une surface délimitée de façon claire, une entité mentale nouvelle qui n’avait pas d’existence historique, qui a pourtant permis de fédérer une multitude projets variés. Derrière l’Emscher Park, une agence : L’IBA, Internationale Bauaustellung [International Buiding Exhibition] est une société privée fondée avec des fonds limités 35 millions de marks et 30 employés chargée par le Land de la restructuration économique, urbaine, architecturale, sociale, culturelle d’un district industriel. Malgré cette responsabilité, sa particularité est d’être une agence qui indique la direction à suivre pour le développement, par des suggestions et des conseils, en associant les acteurs locaux, inspectant les qualités des projets proposés et en analysant les résultats. 8
Allemagne Rhénanie du Nord-Westphalie Région marquée par l’industrialisation intensive depuis le XIXe s 1989-1999 INVESTISSEMENTS 1,5 millions d’euros d’investissement public (dont les subventions européennes) 1 millions d’euros d’investissement privé L’IBA Société privée Espace de planification : 800 km2 LE PARC PAYSAGER DE L’EMSCHER Superficie: environ 457 km2 Réseau de pistes cyclables : 700 km Chemins de randonnée : 131 km Routes touristiques à thèmes : 25 LES PROJETS Sites des projets : 93 Ensemble des projets : 119
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Ainsi l’agence n’avait pas de pouvoir décisionnel et se reposait sur l’esprit entreprenant des communes et individus pour mener à bien sa mission. Son rôle était ainsi de mettre en place des objectifs auxquels ces initiatives pouvaient se rattacher, mais pas celui d’une planification. Enjeu temporel : une durée limitée pour des effets à long terme Reconvertir en changeant la signification La majorité des projets concernaient effectivement la reconversion de paysages industriels afin de les préparer à de nouveaux usages (pour 24 des projets majeurs). En effet, il était logique que le plus gros du travail soit d’assigner de nouvelles significations à ces paysages. Cette démarche est d’autant plus pertinente que la majorité des infrastructures et équipements étaient en place mais dans un contexte de dynamique économique négative. Souvent, la première phase de reconversion se fit par la culture et l’événementiel. Cette démarche permit d’opérer en premier lieu un changement de signification dans l’esprit des habitants dans le but d’éviter que ces sites en friches restent des lieux d’activités peu attirantes (casse auto, déchets), ce qui aurait accentué la tendance négative dans la région. La reconversion de ces friches a ainsi eu un effet structurel pour l’ensemble de la région/ Les friches sont ainsi devenues de vrais lieux d’articulation entre la ville centre et les banlieues de la région, appréciées par les habitants. L’Emscher Park, 10 ans après L’IBA Emscher Park aura constitué une approche flexible et non conventionnelle qui a fait école, et qui a donné des résultats concrets en terme d’emploi en restructurant profondément toute une région. L’effet peut-être le plus important, et non des moindres, a été celui de changer l’atmosphère et « l’humeur » générale de la région. Aujourd’hui, la région et ses habitants affichent une certaine fierté et ont confiance en l’avenir grâce à la réussite du « pari » de l’IBA. 10
Des problématiques pertinentes pour la métropole grenobloise? Comment en sommes-nous arrivés à nous intéresser au projet de l’ IBA Emscher Park? Tout d’abord, le territoire autour de la rivière de l’Emscher était, comme le Sud Grenoblois aujourd’hui, un délaissé urbain en mal d’image, et ce, malgré un potentiel paysager et une certaine qualité de vie. Par ailleurs, les caractéristiques de l’Emscher Park rappellent le contexte de ville diffuse qui est le propre du Sud Grenoblois : une ville d’entre-deux, traversée par de grosses infrastructures (autoroute, route, train, rivières, canaux, etc). Enfin, tout comme à Grenoble, l’Emscher Park présente un grand nombre de friches industrielles et de sites de production, dont l’avenir a été remis en question et le devenir jugé stratégique pour la région de la Ruhr. Ainsi, l’un comme l’autre, possèdent des surfaces importantes de foncier disponible aux portes des villes, et au fort potentiel patrimonial.
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Notre voyage
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Notre voyage Durée : 5 jours, du lundi 3 mars au vendredi 7. Objectif : Visiter les différents projets de l’Emscher park, en comprendre les processus et les répercussions
Matériel : Caméra, Carnet de croquis, Feutres Déplacements : En transports en commun Logement : Chez l’habitant à Essen Werden - 20 minutes en train depuis Essen centre
Bottrop
Parc et centre de santé Quellenbusch Gare centrale de Bottrop Tour Malakoff Prosper II Tétraèdre
Dortmund
Projet Phoenix ZAC nouvelle génération autour de l’ancienne cokerie
Essen
Zollverein puits XII et cokerie Musée
Gelsenkirchen
Nordsternpark Zone commerciale et industrielle du Nordsternpark Gare centrale de Gelsenkirschen
Oberhausen Gazomètre 14
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Le Tétraèdre,
Un nouveau regard sur la Ruhr
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Le Tétraèdre,
Un nouveau regard sur la Ruhr Situé au sommet de l'ancien terril Batenbrock, le Tétraèdre est une sculpture paysagère imaginée par le groupe d'ingénieurs Wolfgang Christ et Klaus Bollinger. Ce belvédère offre un nouveau repère visuel dans le paysage de la Ruhr en affirmant la singularité de sa forme pyramidale et la reconquête d'un espace d'entre-deux urbain.
Une sculpture dans un contexte urbain surprenant Le Tétraèdre est une figure importante de l'Emscher Park car il marque les esprits par sa forme et son emplacement. Il participe à la mise en relation et à la cohérence de l'ensemble des projets réalisés grâce à l'IBA ; et ce par les relations visuelles qu’il établit entre les différents points hauts comme le sommet des terrils ou les cheminées. Le territoire de la Ruhr, contrairement au territoire sud Grenoblois, présente peu de points hauts naturels à partir desquels il est possible de changer la vision d'un territoire. Le terril est la conséquence de l'exploitation industrielle et l'installation du Tétraèdre constitue le symbole fort de la réappropriation de l’industrie en faveur de la mutation du territoire.
L’environnement du Tétraèdre est assez surprenant, le terril de Batenbrock assaini et replanté entre 1963 et 1980, côtoie des industries encore en activité et le complexe sportif de l'Alpine Center. Pour rejoindre le cheminement piéton, nous sommes amenés à traverser de nombreuses infrastructures, telles qu'une route fréquentée par des poids lourds, une ligne de trains, des tunnels... Cette ambiance d'un quotidien toujours en lien avec l'industrie accentue le contraste qu'offre le terril : un ancien lieu industriel et pollué aménagé en lieu de promenade. Par ailleurs, on trouve peu d'habitations et peu d'activités de loisirs dans les abords immédiats du Tétraèdre, mais cela n’empêche pas la présence des promeneurs et des cyclistes qui profitent des aménagements paysagers. En outre, on peut rejoindre assez facilement le site Prosper II, un ancien site d'extraction minière juxtaposé à un site encore en activité. Le lieu réhabilité est aujourd'hui une salle d'escalade. 18
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Malgré l'isolement du belvédère et sa distance avec le centre actif de la ville, son accès est traité par des dispositifs simples et diversifiés : une passerelle pour traverser la voie ferrée, des escaliers, une rampe pour monter au sommet du terril et enfin, quelques bancs pour pouvoir se reposer. Cet ensemble d’aménagements divers répond aux besoins des promeneurs. Après avoir gravi les pentes du terril garnies de hêtres, quelle surprise pour le visiteur de découvrir le sommet du terril : « un craterre lunaire » sur lequel le Tétraèdre renforce l'aspect artificiel du site.
Une sculpture qui renforce l’aspect artificiel du site
Une forme symbolique Par sa forme et sa mise en scène, le Tétraèdre représente pour nous la volonté de changer le regard que l’on porte sur la Ruhr et d'entamer une mutation positive et décomplexée de ce territoire. Peu importe qu'à quelques mètres de là, un site d'extraction de charbon soit encore en activités, ou que le bruit et l'odeur des industries nuisent encore un peu à l'ensemble! Le Tétraèdre a su donner à voir de manière symbolique le renouveau du territoire. Sa forme triangulaire surélevée par quatre poteaux de béton fait peut-être écho à la forme triangulaire du terril et renforce sa position symbolique au sommet du terril.
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Le récit d'une ascension surprenante L'exploration du Tétraèdre est une « expérience spatiale » unique qui plonge le visiteur au cœur de la mutation de la Ruhr. Le belvédère est constitué d'une structure métallique pyramidale surélevée, ce qui donne l'illusion qu'il flotte, notamment si on l'observe depuis d’autres points de vue de l'Emscher Park. Des escaliers et des plate-formes circulaires en caillebotis sont suspendus à la structure principale. Les matériaux utilisés sont peu coûteux, et nécessitent peu de maintenance tout en offrant une vue continue sur le sol. Afin de ne pas être en proie à la sensation de vertige due aux oscillations de la structure tendue et à la vision de ce qui se passe en-dessous, le regard s'accroche au paysage et profite d’une expérience unique. Enfin, la plate-forme la plus haute est constituée d'un anneau incliné incarnant le déséquilibre et le changement qui s'effectue en permanence dans la région.
Des principes à conserver Dans le Sud Grenoblois, nous avons pu constater lors de différentes visites que la contemplation d’un territoire depuis les hauteurs permettait d'en prendre possession et de comprendre les interactions entres ses
De loin, difficile d’imaginer que ce belvédère peut donner le vertige
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différentes entités. Observer le territoire depuis le haut est pour nous un excellent moyen de « s’approprier » visuellement l'endroit dont l'accès est limité depuis le sol, comme pour le cas des plates-formes chimiques de Basse-Jarrie et de Pont-de-Claix. Si en Allemagne, le Tétraèdre permet d'avoir une vision à 360° d’un territoire que l'on appréhende depuis un point unique, à Grenoble, nous pouvons profiter des reliefs qui créent des promontoires naturels et offrent une pluralité de relations visuelles au sein du même territoire. Dans un premier temps, nous souhaitons rendre l'accès à ces promontoires lisible, et ce par le biais de plaquettes d’informations ou des aménagements légers afin d'améliorer leur accessibilité. La création d'une structure temporaire de belvédère, permettra, dans un second temps d'incarner le symbole de la mutation du territoire. Il offrira également un nouveau repère géographique qui participera à la construction d’une identité régionale. L'exemple du Tétraèdre nous pousse à ne pas nous limiter dans la conception formelle de cet objet afin d'en faire une expérience unique et attractive de ce territoire.
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Zollverein,
“Survival through change� Se transformer pour survivre
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Zollverein,
“Survival through change” Se transformer pour survivre Le site industriel reconverti de Zollverein est en soit emblématique. En effet la force du lieu suscita, dès les années 70, avant même le déclin de sa production, l’intérêt de l’autorité régionale pour la protection des monuments historiques. Et cela se produisit également, avant l’exposition de l’IBA à laquelle il fut intégré plus tard pour en devenir sa figure de proue. FICHE TECHNIQUE Ancien site d’extraction, de lavage du charbon, et cokerie Surface site : 104 ha Surface musée : environ 1 000 m2 Architectes du Bahaus : Fritz Schupp & Martin Kremmer Construction : 1929-1932 Fermeture de la production : 1986 Restauration : 1998 par Heinrich Böll & Hans Krabel 2001 classé au patrimoine de l’UNESCO 2001 plan guide par OMA 2006 restauration du lavoir, Böll & Krabel https://www.zollverein.de/service/english-page
Une identité forte L’identité du site découle naturellement de l’image forte que les bâtiments conservés projettent. Par leur architecture particulière de grands volumes (jusqu’à 40m, chevalement à 50m) concurrençant les plus grandes cathédrales, les rythmes des façades, la couleur particulière des briques et de la peinture de l’acier. Ces particularités sont d’ailleurs reconnues et protégées par des copyrights et labels. 26
Le logo de Zollverein est devenu le symbole de toute une rĂŠgion.
Ces éléments distincts participent à la création d’un symbole, d’une référence ancrée dans les mémoires collectives présentes dans la région et au-delà. Zollverein est doublement symbolique. Tout d’abord parce qu’il représente le passé glorieux de l’industrie, l’ingéniosité, mais aussi la force de travail ainsi que les blessures qui marquèrent les hommes et l’environnement de la Ruhr. En second lieu, parce qu’il est le symbole du renouveau et de l’innovation, comme l’affirme le mot de conclusion de l’exposition de son musée “survival through change” se transformer pour survivre. Une signalétique spécifique continue de porter cette image. Elle se manifeste par des maquettes, des logos ou icônes qui sont désormais associés à la Ruhr Gebiet [Région de la Ruhr] ou l’Emscher Park.
Un traitement architectural sans complaisance Le traitement architectural et urbain de Zollverein n’est donc nullement neutre, il est « engagé » et contribue à créer cette image forte. 3 types d’interventions auraient été possibles pour Zollverein, comme le confirme les différentes entrées du concours au sujet de sa restauration et sa réhabilitation. Une première attitude aurait été de tout préserver en l’état dans un esprit de conservatisme. La seconde attitude aurait encouragé un changement radical qui tranche avec le passé par la table rase (prévu par l’industriel du départ) soit un projet très contemporain « parachuté ». Le choix retenu fut celui de conserver, sans tomber toutefois dans le piège de la « muséification ». Ainsi les lieux ont été détournés de leurs usages de départ même si certains ont été conservés tels quels. Des expositions contemporaines se mêlent à l’ancien par un travail complexe d’enchevêtrement. L’attitude qui prime est celle d’une position sans complaisance, décomplexée, ludique parfois même ironique qui joue avec le terrain donné. Exemple : la création d’une piscine malgré les odeurs d’huiles mécaniques Nous pouvons donc conclure en affirmant que le projet tel qu’il a été réalisé, a su conserver son atmosphère de friche et l’esprit des lieux. En outre, il continue de susciter la curiosité d’« explorateurs urbains », qui sont attirés par ses zones interdites toujours en cours de dépollution. 29
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Le bâtiment devient lieu d’exposition par un savant jeu d’analogies.
Les usines deviennent le théâtre de nouveaux usages : piscine et café. Le traitement architectural joue avec les codes des objets qui sont familier s: bleu piscine, tulipes en plastique, etc.
De nouveaux usages Les activités liées à la production se sont longtemps déroulées à l’abri des regards. Les machines étaient protégées par les grandes façades rideaux des usines. Cet univers restait la prérogative des ouvriers qui y travaillaient. Par ces dispositifs il n’est donc pas étonnant que ces lieux suscitent naturellement la curiosité. Or, depuis peu, ils sont ouverts au grand public, du moins en partie, sinon par un accès contrôlé, plus ou moins discret. C’est le cas également à l’échelle urbaine : de grandes traverses ont été aménagées pour relier ce qui est devenu un parc (au sens large), au reste de la ville. Pourtant, des clôtures nous rappellent à l’ordre : certains lieux ne sont toujours pas décontaminés, ni aménagés. D’autres fonctionnent encore. L’enchevêtrement de ces deux types d’espace fait partie de la stratégie de reconversion, mais permet également la découverte et l’exploration de sites toujours en friche. Enfin, par le biais de nouveaux publics, de nouveaux usages ont été mis en place : école de Design, musées et expositions temporaires, cafés, boutiques, bureaux tertiaires, qui profitent tout à la fois d’un cadre exceptionnel par son patrimoine, qu’il soit industriel ou naturel. (“biodiversity of this new industrial nature”). L’ensemble donne la sensation d’un paysage en mouvement, qui se transforme et se réinvente.
Recommandations pour les Moulins de Villancourt : pistes Au vue de l’identité forte des moulins de Villancourt, par le bâtiment à l’architecture remarquable, nous pouvons nous interroger sur le degré d’intervention entre préservation d’un patrimoine et la table rase. Dans une optique de tourisme urbain avec le besoin de susciter la curiosité en permanence ; la préservation partielle peut être préconisée malgré les investissements supplémentaires que cela sous-entend. De plus, si la volonté est de faire des Moulins un ensemble pérenne comme c’est le cas pour les fabriques du site industriel de Zollverein alors, comme l’envisage Koolhaas dans son masterplan, les lieux doivent être préservés en partie tout en adaptant le bâtiment à de nouveaux usages. 33
Cette attitude est confortée par le diagnostic fait sur l’école de musique adjacente qui a réinvesti les anciens silos du moulin. Même si il y eu des initiatives de conservation, le caractère passé est quasi anecdotique, les espaces sont trop exigus pour en faire des lieux réellement accueillants pour de larges publics. Au contraire, l’impact de la préservation est minime, alors que les différents éléments architecturaux légués ont le potentiel de faire des Moulins un lieu réellement emblématique de l’ingéniosité et de ré-invention de Pont-de-Claix au service d’une stratégie métropolitaine. Ce statut emblématique peut donc être conforté par une intervention architecturale mesurée qui donne aux programmes l’espace dont ils ont besoin pour se développer aujourd’hui (et à long terme). Cette position implique deux choses: - Conserver ne veut pas dire « muséifer ». Une intervention contemporaine en contrastant avec ce qui est à préserver met mieux en lumière les changements. - Pour donner toute la place utile aux programmes, pour envisager leur évolution et leur agrandissement, nous conseillons de déplacer certains éléments du programme des Grands Moulins dans un autre lieu de la ville. Bien que déplacés, ces programmes peuvent être cependant connectés au site de Villancourt : physiquement par des cheminements signalés et aménagés, ou mentalement (comme les initiatives de l’Emscher qui forment un tout.) Ainsi, le rayonnement et les retombées économiques escomptées par la réalisation des programmes des Grands Moulins de Villancourt peuvent être mieux répartis sur le territoire de Pont-de-Claix.
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Des éléments d’architecture contemporaine (ici l’oeuvre de Rem Koolhaas) symbolisent la mémoire des lieux et des hommes qui travaillaient dans l’industrie sidérurgique.
La poĂŠtique des infrastructures
La poétique des infrastructures Les parcours En parcourant une grande partie de la Ruhrgebiet [Région de la Ruhr] en transports en commun, notre première impression a été celle d’une sensation de continuité urbaine entre les villes. Par ailleurs, le tissu du bâti est relativement lâche ce qui laisse place à de la verdure. On y décèle une véritable cohésion, une force d’ensemble, qui présente des villes qui s’emboîtent, se complètent. Ensuite nous pouvons affirmer que l’ensemble du réseau prend sa force au niveau des connexions entre les différents transports en commun. Tout est balisé par des panneaux et des indications. Nous avons également toujours été très bien renseignées par les offices de tourisme et les passants, nous n’avons jamais eu à attendre nos correspondances, à subir des retards ou à se perdre dans les gares.
Témoignage Sara, jeune active de Bochum et habitante de Essen, nous explique qu’il n’y a pas de sensation de coupure entre les villes . Il est tout aussi facile de vivre dans une ville et travailler dans une autre, que de devoir déménager pour raison professionnelle. « Ici, il n’y a pas de problèmes de liaisons et de transports. La Ruhr c’est comme une grosse ville, mais surtout ne le dites pas, chaque ville tient à sa spécificité! » 38
Tramway rose à Gelsenkirschen, près de Essen
Gare ferroviaire de Oberhausen Centro
Les arrêts La plupart des gares ont été rénovées dans le cadre de l’IBA, donnant une touche de « modernité » à d’anciennes stations toujours très utilisées. Ces travaux ont surtout permis d’ancrer les gares dans le tissu urbain : en effet, on retrouve régulièrement des places et des parvis publics accolés aux entrées des stations, soulignés par des différences de niveau ou quelques marches d’escalier. Ce sont des endroits notamment conçus pour l’attente et la détente. Une autre grande force de ces points d’arrêt sont les services de proximité à l’intérieur des stations : que ce soit un snack, un café, un marchand de journaux pour les plus petites d’entre elles, ou encore un supermarché, un restaurant ou une pharmacie pour les plus importantes. Ces lieux nous ont semblé vivants, animés, et sécurisés. Ils répondent aux besoins actuels des actifs ou des jeunes voyageuses.
Les plus Quelle surprise de voir passer un bus sur une voie de tramway suspendue ou un tramway utiliser les rails du train! Quelle surprise de découvrir une station accueillant deux types de transport et qui présente des hauteurs de parvis adaptées aux deux sortes de véhicules! Quelle surprise de voir qu’un arrêt de métro peut accueillir trois lignes de métro différentes. Par ailleurs, il arrive que sur la route, il se dessine trois rails incrustées dans le sol, laissant la possibilité aux trains, tramways ou bus d’emprunter la même voie. Dans l’Emscher Park, on mutualise ! On installe les réseaux pour qu’ils soient capables de gérer l’ensemble des différents transports et ce en fonction de l’affluence des passagers. 41
Tramway en direction de Gelsenkirschen
Retour sur impression Une des réussites de l’IBA est sa capacité à liaisonner les lieux d’intervention. Bien entendu certains sites spécifiques sont encore mal desservis et périlleux ! Il est néanmoins intéressant de constater que « la Route de la Culture industrielle » est aussi bien une route touristique de loisirs pour les habitants, qu’un moyen de se rendre à son bureau chaque matin.
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Sur le chemin du Tétraèdre près de Bottrop
Des cheminements
Démultiplication des circuits Un enjeu spatio-temporel Passerelles aériennes Traitement des sols Relier les paysages Réseaux cyclables Préfiguration
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Des cheminements
Une première étape pour une urbanité et une vision territoriale Les cheminements doux constituent la première étape de mise en réseau des paysages de l’Emscher Park. Profitant des infrastructures déjà en place sur le territoire industriel de la Ruhr, ces cheminements traversent les lieux et ont permis, dans un premier temps, de redonner une place importante à la nature et de créer un nouvel attrait paysager pour la région.
L’IBA c’est ... Un rapport au temps et à l’espace particulier qui comprend : • Un enjeu temporel : une durée limitée pour des effets à long terme • Un enjeu spatial : l’urbanité, mais qui s’intègre par ailleurs à une vision territoriale Les cheminements doux (circuits pédestres, pistes cyclables, etc.) sont souvent des interventions minimes mais qui, à terme, rendent possible de nouveaux usages et l’appropriation par les habitants locaux de leur territoire. Ils ont donc des effets à très long terme. Par ailleurs, c’est assez naturellement que viennent s’installer de nouveaux projets d’urbanisation le long de ces cheminements, profitant également du réseau de déplacements déjà en place (transports en commun, infrastructures routières, ...). Ainsi, la préfiguration par les cheminements répond aux deux principaux enjeux spatio-temporels de l’IBA Emscher Park et va de pair avec sa philosophie.
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jets
jets: 93 s projets: 119les Relier
paysages isolés afin de requalifier les différents territoires et projets
I.
n réseau de la culture industrielle
II.
Les villes en réseau à ‘intérieur de l’Emscher Park (conurbation) (I) et La Route Industrielle de la culture, route touristique de découverte (II)
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Voie ferrée Pipeline
Il existe autour de l’Emscher Park différents réseaux cyclables qui se superposent les uns aux autres : • • • •
La “Route der Industriekultur per Rad” [Route de l’héritage industriel à vélo], L’ “Emscher Park Radweg” [la piste cyclable de l’Emscher Park] La “Rundkurs Ruhrgebiet” [le circuit de la région de la Ruhr] L’ “Emscherweg” [le chemin de l’Emscher]
Tous ces cheminements cyclistes et pédestres longent par endroits, d’anciennes voies ferrées, les berges de la Ruhr ou de la rivière Emscher, empruntent les sentiers forestiers et enfin les routes de petite influence. Si les réseaux de pistes cyclables sont multiples et sans doutes gérés par des collectivités territoriales différentes (Länder, communautés de communes, communes, etc.) ils sont tous extrêmement bien balisés par une signalétique efficace (panneaux d’information avec map, indications aux croisements avec kilométrage et temps de parcours, informations touristiques...). l’Emscher
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Quelques caractéristiques du traitement paysager de l’Emscher Park
Des passerelles piétonnes au caractère industriel et de structure légère
Nous avons toutes été très impressionnées par le nombre de passerelles piétonnes présentes dans l’Emscher Park. Cellesci accompagnent les cheminements doux pour traverser une voie rapide, un boulevard urbain, une rivière, un canal, une voie ferrée... Très nombreuses, elles constituent une sorte de “mobilier urbain design” qui participe au renouvellement de la construction mentale que se font les habitants de leur propre territoire. Ces passerelles aérienne s’intègrent par ailleurs au nouveau traitement paysager des friches industrielles, comme au Nordstern Park de Gelsenkirsche par exemple, où les structures tendues rouges créent de nouveaux repères dans le paysage industriel.
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Enchevêtrement de ponts et passerelles Oberhausen
Passerelle piétonne vers le musée d’art contemporain de Essen
Passerelle piétonne à Bottrop. Ponton sur un ancien bassin de rétention, à Oberhausen.
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Pont piéton qui traverse à la fois la rocade, la Ruhr et l’Emscher (Oberhausen)
Passerelle piétons et cycles (Oberhausen)
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Des escaliers métaliques en acier sur les terrils
Un autre élément d’architecture nous a marqué. Il s’agit des escaliers métalliques sur pilotis en caillebotis. Ils permettent en général d’accéder au sommet des anciens terrils à proximité des mines de charbon. Ces terrils ont par ailleurs été plantés, nettoyés et entièrement intégrés à l’Emscher Park. La réutilisation du vocabulaire industriel par le biais de ces escaliers métalliques, permet entre autre, le travail de mémoire dans l’aménagement paysager. Par ailleurs, ces escaliers sont pratiques, simples à mettre en place et peu couteux. On imagine donc très bien pouvoir les employer dans le Sud Grenoblois, notamment pour créer de nouveaux accès au plateau de Champagnier depuis la plaine du Drac, au niveau des Îles de Champagnier.
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Escaliers menant au Tétraèdre de Bottrop
Bottrop : Les escaliers permettent de révéler le terrassement des terrils
Parking paysager de Zollverein Des escaliers permettent de rejoindre la promenade le long des anciens rails
Le soin et la simplicitĂŠ dans le traitement des sols Essen, Zollverein
Bottrop, piste cyclable
Essen, Zollverein
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La démultiplication des cheminements, l’exemple de Dortmund
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Lac artificiel
Piste piétonne 2
Passerelle
Piste piétonne 1
Piste cyclable
Le projet de rénovation urbaine autour de « Phœnix See » à Dortmund.
Lac artificiel
Piste piétonne 2
Piste piétonne 1
Deux cheminements piétons de nature différente se font face à proximité du lac artificiel de Phœnix.
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Le projet Phœnix, Une zone d’activités nouvelle génération
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Le projet Phœnix,
Une zone d’activité nouvelle génération Le projet Phœnix de Dortmund s’inscrit dans la continuité des projets développés dans le cadre de l’IBA Emscher Park mais n’est pas directement associé à l’IBA. En effet, il a été conçu seulement 10-15 après la fin de la procédure de l’IBA et est seulement aujourd’hui à son stade de réalisation. Pour notre part, nous avons pu assister à l’avancement des travaux du côté du “Phœnix See” [lac de Phœnix] et du quartier de Phœnix Ouest. Les deux sites sont aujourd’hui reliés entre eux par des cheminements doux. il s’agit des deux anciens sites industriels de Dortmund (industrie charbonnière et métallurgique).
Préfiguration du maillage routier et des cheminements à Dormund Phœnix Ouest.
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Phœnix Ouest constitue pour nous un exemple de développement urbain “open source” où la préfiguration est le maître mot du développement urbain. Le parti pris est celui de la construction progressive d’une zone d’activités sur l’ancien site d‘extraction minière. Les terrains, après avoir été nettoyés et dépollués, ont été intégrés à un projet paysager d’ensemble qui inclut les terrils aux alentours. Un maillage de cheminements doux et des avenues urbaines on été construites afin d’attirer de nouveaux investisseurs. Tout a déjà été installé (éclairage urbain, mobilier urbain, nouvelles lignes de bus, etc.)! Il en résulte, certes, un espace vide de construction, mais pas désert pour autant! Les promeneurs y sont nombreux en journée. L’endroit est apprécié, tout comme à proximité de l’opération immobilière en construction autour du lac de Phœnix.
Passerelle suspendue sur le haut d’un ancien pipeline, Phœnix Ouest à Dortmund.
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Avenue et piste cyclable nouvellement créées, Phœnix Ouest à Dortmund.
Passerelle suspendue au-dessus du pipeline, Phœnix Ouest à Dortmund.
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Cheminements sur le terril, Phœnix Ouest à Dortmund
L’opération nous a semblé intéressante notamment parce qu’elle rappelle le contexte des plates-formes chimiques du Sud Grenoblois. Elle représente une solution possible pour le maintien des activités productives dans ce secteur tout en s’intégrant “à retardement” au projet paysager de l’Emscher Park. Le projet Phœnix constitue pour nous un modèle en terme de reconversion progressive de sites fortement pollués. Enfin la préfiguration par les cheminements et le parc est ici le premier stade de renouvellement, ce qui est aussi un principe que nous souhaitons appliquer dans le sud de l’agglomération grenobloise.
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Une culture de la Ruhr?
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Le jardinet devant la maison Un sentiment de sécurité Civilité allemande « Rosenmontag » Jardins ouvriers Populaire Propreté Foot
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Une culture de la Ruhr?
Un respect des espaces publics et une identité populaire Existe t-il une identité, une culture de la Ruhr? Au delà des clichés qui sont souvent attribués aux populations ouvrières, nous avons essayé de relever certaines caractéristiques culturelles spécifiques à l’Emscher Park et à la Ruhr. Nous en développerons brièvement quelques-unes ici. Il s’agit d’abord de la culture du jardin, que ce soit devant la maison, ou plus loin, le long d’une route, sur une parcelle isolée. L’entretien du jardin se retrouve aussi bien devant ou derrière les anciennes maisons ouvrières de Dortmund, que dans les lotissements plus récents de l’Emscher Park (ci-contre Bottrop). Enfin, nous avons aussi remarqué à Essen Werden que des espaces extérieurs collectifs pouvaient être investis, voire cultivés par certains habitants motivés, alors que ces derniers appartiennent à la copropriété. Un autre point concerne le carnaval, un événement extrêmement suivi dans la région de la Ruhr (les plus grosses parades ont lieu à Düsseldorf, Essen, et Cologne). Le carnaval attire les jeunes comme les plus âgés, à la différence de “chez nous”, où il est seulement célébré dans le cadre de l’école ou à l’extérieur, mais toujours à l’intention des enfants. Il représente donc un rassemblement populaire important. Le lundi du carnaval (Rosenmontag) est notamment un jour férié, ainsi les enfants ET les parents, assistent au défilé! Un autre élément nous a interpellé : il s’agit de l’attention portée aux espaces publics, ainsi que leur entretien et leur propreté... Si les villes de la Ruhr ont été “ sales” et les constructions, couvertes de suie, il est aujourd’hui incroyable de constater le soin qu’on leur porte en comparaison avec nos villes françaises. Cela est peut-être dû à l’attachement ou à la fierté des habitants de vivre dans un territoire renouvelé, ou encore, à la civilité allemande, autre sujet intéressant que nous ne développerons pas ici. Enfin, une dernière observation porte sur l’atmosphère qui règne dans les quartiers résidentiels. Il se dégage en effet, une impression de sécurité depuis la rue. Cela pourrait bien être lié au fait que beaucoup de façades de logement donnent directement sur la rue. Y a t-il un effet de “surveillance” depuis les fenêtres ? Ou est-ce simplement lié au masterplan? 67
La parade du « Rosenmontag », carnaval de Essen.
Jardins ouvriers, Phœnix See
La parade du « Rosenmontag », carnaval de Essen.
Appropriation devant
68Le stade de foot de Dortmund
Individualisation d’anciennes
Propreté : espace public à côté du centre commercial de Oberhausen.
les habitations collectives, Essen.
maisons ouvrières, Phoenix.
Propreté : devant la gare ferroviaire de Essen.
Un sentiment de sécurité dans les ruelles résidentielles, Bottrop.
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Emscher Park,
Une architecture décomplexée?
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Emscher Park, une architecture décomplexée? Des confrontations paysagères contrastées Lorsqu'on parcourt le territoire de l'Emscher Park, nous nous immergeons dans des séquences paysagères plus ou moins plaisantes. En effet, nous sommes parfois amenés à longer ou traverser à l'aide d'une passerelle l'autoroute. Plusieurs fois, nous avons senti les odeurs, résidus du passé “d'égout à ciel ouvert” de l'Emscher. Mais pour autant, l'ensemble des chemins existants ont au moins le mérite d'exister et finalement participe à la diversité et la richesse de l'espace public de ce territoire. De plus, l'expérience de ce contraste, dans la confrontation entre cheminements doux et voies rapides, ou entre cheminements doux et restes d’industrie, n'est pas inintéressante. Elle permet de mettre en lien passé, présent et futur. Ces chemins, plus ou moins traités demandent finalement peu de travail d'entretien. Finalement, ce n'est pas un traitement paysager homogène qui caractérise l'Emscher Park mais bien l’interaction permanente entre des projets (signalés par des panneaux d'indication ou des connexions visuelles). On observe également la démultiplication des cheminements, qui, en plus de donner le choix, permet de traiter différents modes de déplacement et sécurise. Il arrive souvent que
Reprise de structures industrielles ou abandon? En tout cas elles participent à la fabrication de l’espace public.
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plusieurs passerelles s’enchaînent ou bien qu’elles desservent plusieurs réseaux à la fois (passerelles piétons-vélos ; voitures ; train-tram...).
Vivre le processus de transformation du territoire Les différents projets de l'Emscher s'illustrent également par un “effet patchwork”. En effet, plutôt que de miser sur une infrastructure unique qui pourrait desservir l'ensemble des villes, les projets jouent sur différents réseaux connectés les uns entre les autres (connexion avec un bus plutôt que d'attendre la création d'un tram). Par ailleurs, on observe souvent des contrastes forts au sein d'une même opération, comme à Zollverein où l'ancienne cokerie a été transformée en musée de la Ruhr par Rem Koolhaas tandis qu'une autre unité de l'usine est encore grillagée et inaccessible. Le processus de l'évolution d’un site est exposé à la vue des passants, et, le fait qu'une partie du site soit encore en travaux, n'empêche pas l'autre de fonctionner activement.
Réemploi d’éléments industriels en éléments de paysage. L’objet dans son nouveau contexte n’est pas sans évoquer le péristyle grec.
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Se laisser aller à l'auto-dérision ? Aménager le sommet d'un terril, comme un cratère sur lequel viendrait se poser un vaisseau spatial en plein milieu d'une zone d'activité? Remplacer un pylône électrique par “un pylône dansant”? Installer une école de communication dans un bâtiment de Sanaa au milieu de nulle part? etc. Les programmes ne cessent de nous étonner, soit par leur emplacement, soit par leur forme. Cependant, c'est par l’interaction qu'ils créent et la double échelle sur laquelle ils agissent (le territoire et ses habitants) qui est ici intéressante à étudier. Ces interventions permettent d'attirer un public large et diversifié. Elles donnent l’opportunité de relancer l'économie locale ; quant aux espace publics générés, ils bénéficient quotidiennement aux habitants qui redécouvrent leur propre territoire. Ces programmes témoignent d’une certaine forme d'humour et d’une sorte de “complicité” établie entre les habitants et leur territoire autrefois dédié à la production industrielle.
Pilône dansant de Oberhausen
En haut du musée de la Ruhr : panorama touristique sur une skyline de cheminées et de fumées
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Les fesses de l’Hercule géant et néoexpressioniste de la tour de Nordstern
Un bâtiment de Sanaa dans un endroit improbable : « l’ancienne banlieue prolétaire » de Essen, Conservation d’un portail massif en briques pour ouvrir la voie « dans le vide » sur une piste cylable.
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L’après IBA
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L’après IBA « Welcome to Emscher Park » est aujourd’hui la devise de l’ancienne IBA, effectuant un service « après-vente » en continuité avec le projet. C’est ainsi que l’on retrouve des bureaux accueillant les entreprises souhaitant s’implanter sur les sites. Ils semblent recevoir une prise en main et une expertise sur place. Par ailleurs, on s’étonne aussi des nouveaux projets tels que Dortmund-Phoenix qui se développent plus de 25 années après le lancement de l’IBA. Aujourd’hui, si les habitants ne reconnaissent pas spécialement le titre d’ Emscher Park pour l’ensemble de leur territoire, ils sont conscients du potentiel urbain, culturel, social et touristique de leurs anciens espaces industriels. Les politiques en font un atout et essaient d’y attirer de nouvelles activités. Pour nous, il s’agit simplement d’une continuité logique de l’histoire industrielle des lieux (cela illustre parfaitement le passage de la société industrielle à une société post-industrielle basée sur une économie tertiaire et de loisirs...). Pour finir, ce qui est sans doute le plus remarquable dans les projets de l’IBA, c’est l’habilité que les concepteurs et penseurs allemands investissent dans le « recyclage des espaces » et leur capacité à préserver et même à « magnifier » la mémoire des lieux.
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Bibliographie Collectif, Emscher park, 10 ans après, TU Dortmund Ed, 2008, 304p Karl GANSER, ”Emscher Park Building Exhibition a motor of structural change”, TOPOS European Landscape Magazine n°26, 1999 (pp 6-15) Dorothée KOHLER The IBA Emscher Park: un typical german project?”, TOPOS European Landscape Magazine n°26, 1999, (pp 24-30) Wolfgang PEHNT, “Changes have to take place in people’s heads first”, TOPOS European Landscape Magazine n°26, 1999, (pp 16-23) Charles BACHOFEN, Viviane CLAUDE, Philippe REVAULT, René TABOURET , Les professionnels dans le projet urbain : de l’Emschertal à l’Emscherpark - hypothèses pour un questionnement à partir du cas de l’Internationale Bauaustellung (IBA), Ecole d’architecture de Strasbourg, Strasbourg, 1993
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