Rencontre avec Orianne Lallemand

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#QUI SE CACHE DERRIÈRE...

LOUP ET P'TIT LOUP CV EXPRESS ORIANNE LALLEMAND 46 ANS AUTEURE

TEMPS DE LECTURE J'AI TRÈS PEU DE TEMPS À CONSACRER À LA LECTURE, ENTRE MA GRANDE FAMILLE ET MES DIFFÉRENTS PROJETS, MES DÉPLACEMENTS, C'EST UNE VRAIE FRUSTRATION. MAIS J'Y CONSACRE ENVIRON 30 À 45 MINUTES PAR JOUR.

SIGNES PARTICULIERS JE NE TIENS PAS EN PLACE, JE SUIS PARFOIS UN PEU « FOFOLLE » !

LIVRE(S) DE CHEVET J'AI TOUJOURS À MES CÔTÉS UNE ANTHOLOGIE DE LA POÉSIE FRANÇAISE, QUAND JE N'AI PAS LE TEMPS, JE LIS L'UN OU L'AUTRE POÈME… PAR AILLEURS, JE DOIS AVOIR UNE CINQUANTAINE DE LIVRES D’AVANCE - POSÉS À CÔTÉ DE MON LIT.

PASSER UN MOMENT EN COMPAGNIE D'ORIANNE LALLEMAND PROCURE UNE GRISANTE RECHARGE D'ÉNERGIE POSITIVE, VU QUE LA MAMAN (ENTRE AUTRES) DU LOUP ÉDITÉ CHEZ AUZOU, NE MANQUE PAS D'IDÉES, DE RÉPONDANT, ET NE PRATIQUE PAS LA LANGUE DE BOIS. L’ÉCRITURE A TOUJOURS FAIT PARTIE DE VOTRE UNIVERS ? J'ai toujours écrit, depuis toute petite, je remplis des carnets. Et je passais également beaucoup de temps à dévorer des livres… sans pour autant que me vienne à l'esprit un quelconque besoin de devenir moi-même auteure. J'ai finalement suivi des études me destinant à travailler dans l'édition. Ensuite j'ai été stagiaire chez Hachette, puis je suis entrée chez Casterman - dans un premier temps pour effectuer un remplacement. En fin de compte, je me suis retrouvée à superviser les livres pour enfants. Au bout d'un moment, j'ai réalisé que j'avais moi-même pas mal d'idées. Du coup, je me suis lancée avec un premier essai, plutôt bien accueilli, qui a été finalement publié sous le titre Tendresse aux éditions Mango (1995), c'était un livre de poésie et comptines. J'ai eu mon premier enfant à peu près à cette période, et j'ai finalement quitté le milieu de l'édition où je vivais mal la pression. Je n'étais pas faite pour ce travail en entreprise. D’autant que je n'ai pas l'esprit cartésien. Je suis alors devenue free-lance, et j'ai fait pas mal de petits boulots d’édition. En 2000, alors que nous vivions mon mari, mes trois enfants et moi-même, dans notre petite maison en forêt de Compiègne, j'ai décidé de me consacrer totalement à l’écriture pour la jeunesse… c'était un pari, un défi.

J'ai progressivement lâché mes jobs alimentaires. Ensuite, tout s'est enchainé avec plusieurs publications chez Casterman et chez Hachette. Sans faire de vagues, mais avec régularité. Je travaillais seule dans mon coin, et surtout, je faisais ce que j'aimais.

L'ARRIVÉE DU LOUP A CHANGÉ CETTE « ROUTINE » ? En 2008 ou 2009, j'ai été recontactée par une ancienne éditrice de chez Mango, Florence Pierron, qui venait d’arriver aux éditions Auzou, au moment où cette maison d’édition lançait un nouveau positionnement dans la tranche jeunesse. Florence avait conservé un texte titré Le loup qui voulait changer de couleur… dont personne n'avait voulu parmi mes éditeurs habituels. Ça m'amuse de raconter cela maintenant ! (rires). Elle m'a donc relancée à propos de ce travail et d'un autre texte que j’avais écrit au même moment, Petite taupe, ouvre-moi ta porte (une petite taupe qui a aussi fait un beau chemin aux éditions Auzou). Du coup, j'ai contribué à la collection des « Petits albums » avec ces deux textes.


#QUI SE CACHE DERRIÈRE...

Florence a demandé à Eléonore Thuillier de faire des essais de couleurs et des esquisses pour le loup… En voyant le résultat, je me suis dit immédiatement que c'était exactement ça qu’il fallait, c'était super. C'était le début d'une belle collaboration, nous avons enchaîné les publications, ça marchait gentiment. Trois ans plus tard, en 2012, les choses ont décollé avec Le loup qui cherchait une amoureuse. On a vraiment senti un changement, l'éditeur a mis le paquet, Le loup a commencé à entrer dans les écoles, ça frémissait de partout, notamment dans la « blogosphère ». Eléonore et moi avons alors commencé à travailler main dans la main, malgré la distance qui nous sépare… nous sommes d'ailleurs devenues amies. Nous discutons souvent par téléphone ou par mail des différentes idées que nous avons, ensuite nous les soumettons à l'éditeur. Ces échanges, ce travail à trois est important, c'est une véritable équipe au cœur de laquelle chacun apporte son savoir-faire spécifique.

LE SUCCÈS A-T-IL AMENÉ DES GRANDS CHANGEMENTS DANS LE TRAVAIL ET SUSCITÉ L'ENVIE DE LANCER LA COLLECTION P'TIT LOUP ? P'tit loup, c'est ce qu'on appelle un personnage miroir, c’était plutôt l’idée des éditions Auzou, nous avions d'autres propositions dans les cartons. Mais Auzou a bien senti qu'il fallait saisir cette opportunité. C’est le rêve de toutes les maisons d'édition, et de beaucoup d'auteurs, de pouvoir installer ce genre de personnage «satellite». Ce n'était pas vraiment mon cas. Il faut avouer que travailler sur P'tit loup, c'est un peu moins rigolo, car les histoires sont beaucoup plus simples et archétypées vu qu'elles sont destinées à un lectorat de 0 à 3 ans qui doit se reconnaître dans ce petit héros, autour d’aventures du quotidien. Du coup, on tourne autour

« Je me suis dit que ce serait rigolo de tout inverser : qu'il soit gentil, maladroit, qu'il fasse des bêtises, qu'il se trompe comme un enfant… qu'il devienne une sorte d'anti-héros très attachant. »

de thèmes comme l'école, le pot, la politesse… Mais j'essaie par ailleurs d'insuffler le plus d'humour possible dans cette série. Il faut savoir que, vu le public auquel P'tit loup se destine, nous avons plus de directives de la part de l'éditeur, voire des parents car on touche à l’éducation. Contrairement aux fictions du Loup, qui fonctionnent à l’imaginaire pur, il faut faire attention aux thématiques et à la manière de les traiter. Les livres 0-3 ans servent parfois de « médicaments », agissant contre la peur du noir par exemple, et sont du coup lus tous les soirs. Voilà, il y a donc des thématiques plus simples que d'autres, un P'tit loup aime la galette ça va, il n'y a pas trop de risques, moins que P'tit loup va sur le pot! Mais attention, ne vous y trompez pas, je l'aime mon P'tit loup ! Visuellement, Eléonore le maîtrise aussi bien que Loup, il est très très bien posé. Et ultra-attachant !

VOUS AVEZ CHOISI DE FAIRE UN HÉROS DU LOUP, CE GRAND MÉCHANT PAR EXCELLENCE DANS BEAUCOUP DE CONTES. POURQUOI ? Dans nos contrées, le loup est effectivement la figure même du Mal, le dévoreur, féroce… Cette image m'agaçait en tant que maman. J'en avais assez que

P’tit loup fait du ski Auzou 4,95 €

cet animal ait toujours le mauvais rôle. Je me suis dit que ce serait rigolo de tout inverser : qu'il soit gentil, maladroit, qu'il fasse des bêtises, qu'il se trompe comme un enfant… qu'il devienne une sorte d'anti-héros très attachant. Toute l'essence de ce personnage se retrouve dans le premier titre (ndlr : voir plus haut). Après, nous nous sommes fait plaisir à le développer, à enrichir son univers. Au fil du temps, tout le monde s'est attaché à cet anti-héros imparfait : parents, enfants, enseignants… Et il a fini par franchir les frontières. Lorsque j'étais à Singapour, je me suis rendu compte que peu importait que ce soit un loup, c'étaient les singularités, les traits de caractère du personnage qui prenaient le dessus. Mais pas pour tout le monde : j'ai participé à une conférence sur la peur… et on m'a reproché d'avoir neutralisé la crainte du loup ! Pourquoi cette fixation ? Les contes ne manquent pas d’autres personnages effrayants, comme les monstres. D'un autre côté, des parents viennent régulièrement m'expliquer que nos albums ont soigné cette angoisse par rapport au loup, et que leurs enfants dorment avec un doudou Loup ! Moi, je trouve ça chouette. Nous vivons dans une société terriblement stéréotypée… Tentons de lutter contre cela de toutes les manières possibles.


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