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Antoine Colrat

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à Louis



1. Je me fixe une surface, un format. 2. J’achète une quantité de peinture et j’essaie de l’utiliser complètement, de façon à recouvrir l’entier du tableau. 3. Je tente de suivre la définition la plus stupide de la peinture : recouvrir une surface. Depuis le sommet des toiles, j’essaie de combler le vide. 4. Bien souvent, lorsque je travaille à une très grande toile, je mets moins de peinture au début en voulant en conserver pour la fin et, sur la fin, j’en mets des tonnes. Il y a donc souvent plus de couleur à droite qu’à gauche. Et je triche beaucoup. 5. Je reviens en arrière, parfois je reviens tout court… 6. La toile évolue chimiquement en séchant. 13. Tout ça, c’est la faute à Picasso.

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Le samedi 30 septembre 1967, j’allais au Port Authority Building à l’angle de la 41e Rue et de la 8e Avenue. J’y achetais le New York Times et Earthworks de Brian W. Aldiss, en livre de poche Signet. Ensuite j’allai au guichet 21 et y demandais un aller simple pour Passaic. L’autobus dépassa le premier monument. Je tirais le cordon de la sonnette et descendis à l’angle d’Union Avenue et River Drive. C’était l’improvisation du bouillonnement.

Pour le parfait flâneur, pour l’observateur passionné, c’est une immense jouissance que d’élire domicile dans le nombre, dans l’ondoyant, dans le mouvement, dans le fugitif et l’infini. être hors de chez soi, et pourtant se sentir partout chez soi ; voir le monde, être au centre du monde et rester caché au monde. S’involuer en lui (regarder longtemps les œuvres, mais aussi lire les livres de ta bibliothèque, refaire le parcours de tes errances océanes, scruter ce que tu photographies, etc.) sans s’imaginer un instant qu’une énigme serait résolue.

J'aime regarder les expositions par-dessus l’épaule de quelqu'un. La Chapelle de Rothko sans personne dedans est assez sordide ; avec quelqu'un dedans ou s'il y avait une boum ou un cocktail, cela serait fantastique...

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Autant que possible, je ne sors pas, même le temps d’une course, sans un appareil photo. «être aux aguets», espérant à chaque sortie d’éventuelles «rencontres». à chaque sortie, observer et utiliser l’appareil pour fixer une idée qui me vient concernant telle ou telle chose vue ou entendue. De retour chez moi, confronter ces images aux autres afin de poursuivre mon travail.

J’étais complétement sous l’empire de l’Instamatic. L’air vitreux faisait ressortir les structures du monument, tandis que je prenais photo sur photo. J’en fais plusieurs. Je veux de la profusion, je choisirai dans le nombre. Il m’en faut que je découperai pour faire des montages, mais d’autres que je veux garder, étudier. Au vrai, je voudrais toutes les garder, dans leur intégralité totale, purs fruits de l’empreinte sans retouche aucune. On verra plus tard. L’essentiel pour le moment est de faire ample moisson.

Tiens !

cette grille ! cette porte !

cet auvent !

ce chambranle !

ce réchaud brisé !

cette marmite fêlée !

Donnez tout ! Jetez tout ! Poussez, roulez, piochez, démantelez, bouleversez, écroulez tout ! C'était la collaboration du pavé, du moellon, de la poutre, de la barre de fer, du chiffon, du carreau défoncé. La masse près de l'atome...

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Je relis à l’instant un entretien entre Lizzie Borden et Richard Serra réalisé en 1977, je me souviens de propos concernant le poids du dessin, et à la question : qui, au vingtième siècle, d’après vous, a atteint à l’essentialité du dessin ? , Richard Serra répond : «le dernier Cézanne, Malevich, Mondrian, Johns, Matisse». Les mêmes noms reviennent toujours et encore...

Je rentre à la maison. Mes chats sont là. Il y a du courrier, une plante asséchée, les autres pas ; et puis je regarde les fuites du plafond, les infiltrations, les moisissures : je m’y suis habitué. Finalement, j’aime bien ça. On dirait un paysage ou une toile de peintre abstrait. J’aurais adoré que le projet pictural des artistes soit aussi fort, explosif, qu’il vous claque à la figure chaque fois qu’on regarde un rouge, un jaune, ou un vert, qu’il soit aussi dangereux mais c’est si rare.

Généralement les peintres ne font malheureusement que participer à l’histoire de la peinture. Pourtant avant, elle a été employée de façon tellement exceptionnelle : par exemple dans les papiers découpés de Matisse c’est de l’explosif.

J’ai toujours eu une tendance à aimer voir les expositions comme de la décoration d’intérieur. Il serait intéressant d’accrocher une exposition classique de peinture et de produire simplement une impression de décor bien fait.

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Je le vis face à un monochrome de Klein mais je ne vis pas cela souvent.

la peinture sort de son cadre

et se réalise dans la sculpture de marbre polychrome ;

et la sculpture se dépasse et se réalise dans l'architecture ;

et l'architecture à son tour trouve dans la façade un cadre,

mais ce cadre décolle lui-même de l'intérieur, et se met en rapport avec les alentours de manière à réaliser l'architecture dans l'urbanisme.

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Parler du Miroir, c’est parler du reflet, d’une réalité déformée, d’une projection ; c’est parler d’une position : devant, dans, comme, au milieu. Utilisé comme outil pour voir, pour constituer ou reconstituer, il reste l’élément indispensable de l’appareil photographique...

Il y a la pièce que tu peux voir dans le Miroir... Elle est exactement pareille à notre salon, mais les choses sont en sens inverse. Je peux la voir tout entière quand je grimpe sur une chaise... tout entière, sauf la partie qui est juste derrière la cheminée. Approchez-vous, tout se brouille, s’aplatit et disparaît ; éloignez-vous, tout se recrée et se reproduit.

Je déteste les espaces vides ; pour moi une maison doit être remplie de choses. La multiplication est ici «paradigmatique» et «procédurale à un double niveau». J’accumule des objets qui ont une patine d’usage, mais c’est bien plus que cela.

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La forme obtenue par le moulage, à la fois ‘‘empruntée’’ (prélevée) et ‘‘empreintée’’ (physiquement marquée), passe directement de matière à matière.

« Avec peu d’effort, on peut encombrer. J’y trouve un certain intérêt mais c’est très personnel.» Pour ma part, je trouve un certain intérêt à utiliser un seul et unique objet manufacturé et à décliner le nombre. Construire en assemblant cet objet, le superposer, l’imbriquer, recouvrir des surfaces. Recréer un espace ou répondre à l’espace présent. Cela part souvent d’un attrait pour un objet, que ce soit du point de vue de la forme ou de la fonction. Rejouer ces éléments pour les souligner ou les contredire.

Il est probablement plus juste de commencer par séparer et trier, plutôt que de projeter un désordre dans lequel, par la force des choses et le poids des objets, nous finirions par être obligés de sérier. Nous obtiendrions le contraire de ce que nous souhaitions.

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La décoration d’un bâtiment est souvent un rajout ou un parement. Que ce soient des faïences, une mosaïque, un crépi de telle ou telle couleur, un papier peint ou un poster, j’ai toujours vu cela comme des éléments posés sur une surface, de manière triviale, comme on dresse une table, avec un résultat plus ou moins heureux. D’ailleurs, actuellement, les magasins de bricolage voient leurs rayons inondés de ces fausses briques, dalles imitant la pierre ou le galet jusqu’à des poutres en polystyrène.

L’acte d’habiter, l’architecture sont des choses auxquelles je suis sensible. Un vaste développement d'architecture polychrome, rehaussée d'or, annonçant le vacarme et l'éclat du commerce intérieur, accrochant les yeux comme un gigantesque étalage qui aurait flambé des couleurs les plus vives... L'entablement s'épanouissant comme la floraison ardente de la façade entière... Les mosaïques et les faïences reparaissant avec des colorations plus chaudes...

Les éléments du site se dressent comme des murs affublés en puissance de leur coefficient «cube», stratification, matière, etc., comme les murs d’une salle.

Les façades de ces temples ont été modifiées plusieurs fois. Les façades sont superposées Une façade les unes sur les autres. par-dessus l’autre. C’est inextricable.

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Les façades sont chargées de spirales et sont tissées de pierres taillées selon la forme de lignes emmêlées. C’est très beau.

Quan d f r a g m des ents se détachen t, j e les la isse.


En sortant, sur le boulevard, j’ai eu l’impression d’être devant quelque chose de jamais vu, un changement complet de la réalité… Oui, du jamais vu, de l’inconnu total, merveilleux. Alors il y a eu transformation de la vision de tout…

J’obtiens des sortes de plans ou de cartes, topographies qui me plaisent fort. Encore une peau ! De plus en plus incontestable ! C’est de la peau toute frémissante ! D’une épreuve à l’autre elle se change ! Peau de fœtus, peau de crapaud, peau de dame, peau de vieillard. Voici maintenant les peaux de limace, les peaux de tortue ! Puis qui se craquèlent, on dirait qu’elles veulent changer de règne.

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S’est posée la question de la longueur de certaines citations. Plus j’en réduisais certaines, plus je me retrouvais avec des mots ayant de moins en moins de parenté avec leurs auteurs. Même si les sources des textes ne figurent pas dans les pages, je voulais pourtant ceuxci comme identifiables, par la teneur de leurs propos, par leur manière d’utiliser la langue, voyant ces extraits comme des images au même titre que les photographies ou reproductions et constituant un environnement au milieu duquel s’organise mon travail.

Je regardais les Halles sortir de l'ombre, sortir du rêve, où je les avais vues, allongeant à l'infini leurs palais au jour. Elles se solidifiaient, d'un gris verdâtre, plus géantes encore, avec leur mâture prodigieuse, supportant les nappes sans fin de leurs toits. Elles entassaient leurs masses géométriques ; et, elles apparurent comme un gigantesque ventre de métal, boulonné, rivé, fait de bois, de verre et de fonte, d'une élégance et d'une puissance de moteur mécanique.

‘‘ - C’est un changement d’échelle. Un gratte-ciel de Mies van der Rohe devient lui-même un ornement urbain…

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Lorsque je conçois mes ronds, je les peins en principe scrupuleusement. Même visuellement c’est assez différent. Les cercles sont rarement disposés en quinconce : souvent ils sont alignés de façon symétrique. Cela dit, au niveau de la fabrication ou de la présentation, il y a chez Toroni une image en somme plus radicale ; on retrouve un peu ce propos dans mes toiles.

Et effectivement, les cercles ne sont pas en quinconce ; je ne m’en étais pas aperçu tout de suite. Après avoir assisté au vernissage, je m’empressais d’aller photographier et prendre des mesures dans les rues de Tarbes : devant ce grand mural orange et mauve, j’avais vu un par-terre en relief signalant les passages piétons aux aveugles. Je m’étais trompé.

- Et bien ça, c’est le problème de la polychromie architecturale qui peut être donné par la couleur ou par les matières .’’

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En architecture, nombreux sont ceux qui ont voulu oublier l’ornement, voire l’humilier. Or, ce sont les plus grands négateurs de l’ornement qui l’ont le mieux célébré et pratiqué. Simplement leur vision négative a été transcendée dans une autre pratique. La répétition de motifs est un ajout ornemental, tous les éléments qui composent ces façades ne sont pas également nécessaires. Il ne s’agit pas de pure charpente. Ce supposé degré zéro de l’ornement est un ornement.

Mes toiles avec des cercles renvoient bien entendu au «all-over» et sont objectivement des tableaux.

Tout de même, vous arrivez par l’emploi de la couleur à mettre beaucoup d’ordre. Vous classez les évènements, vous les hiérarchisez, vous donnez des intentions, vous relevez des êtres architecturaux obscurs - des pauvres petits murs de rien du tout

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à cet égard, le cercle ou la rayure était la possibilité de marquer la surface de la façon la plus neutre possible, c’est-à-dire sans la charger de significations... Moi, je voulais que la peinture soit aussi bonne que la peinture sur la toile. Dans la mesure où j’estimais avoir trouvé une solution je l’ai répétée.

La répétition est avant tout, chez moi, la répétition d’un faire. Cela a commencé quand j’étais étudiant à Limoges, avec l’apprentissage de techniques de moulage. Au fur et à mesure, cela a pris de plus en plus d’ampleur, accumulant des pièces et ayant pour chacune une production de plus en plus importante, ne sachant d’ailleurs qu’en faire. Aujourd’hui, la répétition est toujours présente dans mon travail.

Le tableau est tellement rempli de plis qu'on obtient une sorte de « bourrage » schizophrénique, et qu'on ne pourrait les dérouler sans le rendre infini, en en tirant la leçon spirituelle. Il nous a semblé que cette ambition de couvrir la toile de plis se retrouvait dans l'art moderne : le pli all-over.

J’avais besoin de cette façon de faire pour qu’il apparaisse comme une œuvre, comme un Mondrian : vertical et facial.

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Même si je sais réaliser une céramique, je ne suis pas pour autant potier, et si je suis capable de mouler de la résine, je ne le ferais jamais aussi bien qu’un spécialiste.

Ce n’est plus cette chose-substitut d’un référent absenté ; c’est d’emblée un mouvement substituant, un travail figural de la substitution qui ne cesse plus, paradigmatiquement, de s’engendrer elle-même, c’est-à-dire de proliférer en s’associant...

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Le problème, c’est que tout cela est réel, ça existe. On ne le croit pas, pourtant c’est bien la larve qui fait le cocon... et puis je tiens beaucoup au fait que les pièces soient vraiment précieuses. Dans la mesure où il n’y a pas d’alibi dans la manière dont les choses se sont réalisées, il n’y en a pas non plus quant au matériau. Je prends le plus cher, les pierres précieuses, l’or ou les tirages Cibachromes pour la photo. Je travaille sur le faire-semblant et en même temps ça se donne avec le réel le plus tangible. Parce qu’aussi bien j’aurais pu prendre des paillettes, du strass, faire de petits tirages.

Je ne puis rien dire de l'objet sur une planchette qui est rouge ; je m'identifie avec lui.

Il est toujours impressionnant de voir que l’on a accumulé autant de choses.

La pièce fut très attentivement moulée (l’opération nécessitant un moule de sept pièces, pas moins) de façon à obtenir non seulement une série, mais encore plusieurs séries, plusieurs générations d’arrangements différentiels.

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Matière, matériau, architecture sont des termes qui reviennent régulièrement. Que je parcoure mes notes ou carnets de dessin, des fiches techniques réalisées pour des installations voire même des rapports de stages, ces mots sont là, et s’articulent de différentes manières : juxtaposition, causalité, opposition, recouvrement...

En résumé, dans les spectacles architecturaux, les éléments du site interviennent en vertu de leur cube, de leur densité, de la qualité de leur matière, porteurs de sensations bien définies et bien différentes (bois, marbre, arbre, gazon, horizons bleus, mer proche ou lointaine, ciel).

C'est trop complexe. Alors, il faut essayer de copier simplement pour se rendre un peu compte de ce qu'on voit. C'est comme si la réalité était continuellement derrière les rideaux qu'on arrache... Il y en a encore une autre... toujours une autre.

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la pomme de Newton

Par exemple un carré porte plus de poids en tant que masse que ne le fait un rectangle et, en général, un trapèze davantage qu’un losange. Les formes elles-même renvoient à leurs masses internes. Chez Cézanne, par exemple, les objets ont du poids à cause de leur caractère géométrique propre.

Dans des maisons, des villas, ce sont partout des carrés. Suivant cet exemple, nous pourrions prolonger cette forme de mosaïque, utiliser les données qui existent et en créer d’autres.

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Dès mes premières interventions ‘‘décoratives’’ sur les façades de l’école, je me suis aperçu que cela impliquait autre chose (ce que l’observation photographique ne m’avait pas fait immédiatement pressentir). Il s’agit d’arpenter des espaces, de s’adapter à des volumes, de considérer des plans... Décorer l’intérieur ou l’extérieur d’un bâtiment implique forcément le corps au même titre qu’un crayon, qu’un mètre, qu’un niveau ou une échelle.

Dans la Maison en céramique, j’ai fait l’expérience de la solitude physique et mentale. Mon corps était un outil. Comment être au cœur ? Comment finalement se fondre dans un projet ? Cette œuvre, est-ce qu’elle s’est faite du bout des doigts ? Ou est-ce qu’on y est immergé ? Est-ce que le corps y participe ?

Essayer de tracer une généalogie, c’est forcément remettre en question ce qui semble acquis, ce qui va de soi. Il y a un support osseux,

sanguins,

lymphatiques,

il y a des réseaux

nerveux

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il y a des forces musculaires,


Le cabanon était fait de pain et le toit était fait de gâteaux, les fenêtres de sucre transparent. Je veux bien manger un morceau de toit, et manger la fenêtre, c’est sucré. Je me hissais sur le toit et ramenais un peu du faîtage pour le goûter, tandis qu’elle se tenait près de la fenêtre et la grignotait. Elle brisa un morceau rond de la fenêtre, s’assit et s’en rassasia.

La dimension de l’œuvre était en rapport direct avec les possibilités du lieu, comme si ce mur de briques avait été coupé et ensuite suturé par une sorte de maçon chirurgien. Il y avait un évènement intense : avec une caisse à savon, faire un palais.

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J’aimerais maintenant établir l’irréversibilité de l’éternité au moyen d’une expérience toute simple ; imaginez le bac à sable divisé en deux avec, d’un côté, du sable noir et, de l’autre, du sable blanc. Prenons un enfant et faisons-le courir dans le bac cent fois dans le sens des aiguilles d’une montre, jusqu’à ce que le sable se mélange et commence à devenir gris ; ensuite, faisons-le courir en sens inverse ; cela n’aboutira pas à rétablir la division initiale, mais à davantage de gris.

Le problème : éviter une structure architectonique, c’est-à-dire faire en sorte que l’œuvre soit à la fois dense, lâche et équilibrée. Ces sculptures tendaient vers le haut et s’affaissaient sur le sol à la fois. Décomposition et fermentation, deux temps matériels bien différents, travaillent dialectiquement la matière comme une systole et une diastole travaillent un cœur...

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ça devenait des taches blanches et noires, c’està-dire qu’elles perdaient toute signification, et au lieu de regarder l’écran, je regardais les voisins qui devenaient pour moi un spectacle totalement inconnu. L’inconnu était la réalité autour de moi et non plus ce qui se passait sur l’écran !

Photographier les différents stades d’un projet est devenu une habitude. Je pense qu’au début, ce n’était ni plus ni moins que pour documenter ma démarche. Mais, que se passe-t-il quand le temps est un des acteurs du travail, quand la destruction voulue du travail est liée au temps ? Et quand le déroulement d’un processus est le travail luimême, quand la durée entre en compte ? Dans les deux cas, l’action a son importance. La photographie ne peut alors plus n’être que documentaire. Son statut change. Parfois, c’est même la seule et unique trace, le projet ne pouvant, pour x raisons, être réalisé.

Cela s’est concrétisé par un geste très spécifique : la destruction de la Maison. La clef de voûte entre l’avant et l’après. La destruction en art a du sens quand elle fait partie du projet, quand ce n’est pas du nihilisme mais quand elle est dynamique, positive, quand on en fait quelque chose. Nous sommes alors proches de la scène où l’incompétence totale de Laurel et Hardy, déguisés en livreurs, pousse le propriétaire (aprés la presque totale destruction de son appartement) à détruire à la hache le piano qu’ils étaient venus livrer.

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En ce moment, je réalise un travail avec de la rubalise. J’ai commencé à l’appliquer sur le plafond en utilisant une colle constituée de farine et d’eau. Après deux jours de travail, de la moisissure à commencé à apparaître sous la bande. Au bout de quatre jours, le plafond était complétement taché. Je décidai alors de tout enlever et j’observai un curieux résultat : les parties rouges de la bande s’étaient partiellement imprimées sur le plafond et les murs et s’entremêlaient à la pourriture.

s u r D é s o r m a i s,

c e t es pa ce

a u t r e f o i s d é s e r t,

Et là vous voyez encore ces piliers. Eh bien, c’est difficile à dire mais ils auraient pu servir de socles pour tenir des torches ou quelque chose comme ça. Tous les blocs sont identiques. Le plan, faisceau d’idées et intention intégrée dans ce faisceau d’idées, est devenu un feuillet de papier où des points noirs qui sont les murs, et des traits qui sont des axes, jouent à la mosaïque, au panneau décoratif, font des graphiques aux étoiles étincelantes, provoquent l’illusion d’optique.

u n m il li er d e to et u rs

d e m i n a r e t s

é tin ce l an t s

p o i n t e n t

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l e u r s

v e r s

ci el l e

g r a c i e u s e s

e t

a lt i è r e s

s i l h o u e t t e s


Le but aurait été de ne pas reconnaître mon œuvre... Mettez 50 carrés ensemble, ça fait un grand carré de 50... Avouez que cela donne à réfléchir...

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Par ordre d’apparition : Le Corbusier

John M Armleder

Max Jacob Robert Smithson

Victor Hugo Charles Baudelaire Georges Didi-Huberman

Jean Dubuffet Agnès Varda Jean-Pierre Raynaud

Gilles Deleuze Lewis Carroll Alberto Giacometti

pages 4, 21, 28, Le Modulor, édition Poséidon, 1953 pages 12, 20, 26, Vers une architecture, 3ème édition, Champs arts, 1928 pages 15, 16, 21, 22, 23, 27, Entretiens avec Georges Charensol (1962) et Robert Mallet (1951), Fremeaux & associés, 1999 pages 5, 6, 8, 11, 14, 16, 19, 21, 27, Une sorte de salade russe, sans oublier la mayonnaise, deux entretiens avec John M Armleder, (Mardi 1er août 2006 et Samedi 19 août 2006), réalisés par Christian Bernard et Françoise Ninghetto à l’occasion de l’exposition Amor vacui, horror vacui page 10, exposition au Parvis, centre d’art contemporain, Ibos, du 17 décembre au 24 janvier 2009 pages 15, 16, John Armleder, Helmut Federle, Olivier Mosset, Ecrits et entretiens, Maison de la Culture et de la Communication de Saint-Etienne, musée de Peinture et de Sculpture de Grenoble, 1987 page 5, extrait de lettre citée dans Picasso cubisme 1907 - 1917, Joseph Palau I Fabre, 2ème édition, 1999. pages 6, 7, 24, Une visite aux monuments de Passaic, New Jersey dans Robert Smithson : Une rétrospective, le paysage entropique, 1960-1973, éditions les Musées de Marseille et la Réunion des Musées Nationaux, 1994 pages 12, 23, 26, 27, Hotel Palenque, conférence donnée à l’université d’Utah, 1972 page 11, Miroir avec coquillages brisés, 1969 pages 6, 7, Les misérables page 6, Le peintre de la vie moderne page 6, Dialogue sur l’inestimable, entretien avec Pascal Convert, Art press n°248, juillet 1999 pages 10, 11, 18, 19, Figéee à son insu dans un moule magique..., Les Cahiers du MNAM n°54, hiver 1995 pages 7, 13, L’homme du commun à l’ouvrage, Gallimard, 1957 page 8, Les Glaneurs et la glaneuse, 2000 pages 8, 9, 12, 17, 22, 25, Opération Raynaud, entretiens avec Maud Benayoun, bookstorming, 2004. pages 28, 29, exposition de mille sceaux métalliques au CAPC, Bordeaux, 1993 pages 9, 17, Le pli, Leibniz et le Baroque, Les éditions de minuit, collection Critique, 1988 page 10, à travers le miroir pages 10, 20, entretien avec Pierre Schneider, juin 1961 pages 13, 19, 25, Écrits présentés par Michel Leiris et Jacques Dupin, Hermann, 1990 - réédition 2001


Mark Dion

Emile Zola Hubert Duprat

Olivier Mosset

Richard Serra Pascal Convert

Les frères Chapuisat Les frères Grimm Gaston Bachelard Rem Koolhas Henri Matisse Marion Robin Ruben Ramos Balsa Henri Cartier-Bresson Antonio Gaudi CRAFT Anne Lacaton & Jean-Philippe Vassal Jan Fabre Adolf Loos

pages 10, 18, Camouflages, entretien avec Natacha Pugnet, Marseille, avril 2005 inclus dans le dossier de presse de l’exposition The Natural History of the Museum, Carré d’Art de Nîmes, du 07 février au 22 avril 2007 page 12, Au bonheur des dames page 14, Le ventre de Paris page 13, Sans titre, 1991 page 19, entretien avec Eric Audinet, Inmagazine n°2, février 1986 page 31, exposition Massive centrale, Centre international d'art et du paysage, Vassivière, 6 juillet au 25 octobre 2008, prolongée jusqu’en 2009 page 17, John Armleder, Helmut Federle, Olivier Mosset, Ecrits et entretiens, Maison de la Culture et de la Communication de Saint-Etienne, musée de Peinture et de Sculpture de Grenoble, 1987 pages 21, 23, 24, Écrits et entretiens 1970-1989, Daniel Lelong éditeur,1990 page 22, Dialogue sur l’inestimable, entretien avec Georges DidiHuberman, Art press n°248, juillet 1999 page 25, Grout/Mazéas, Casse à la chaîne, Art press n°259, été 2000 page 22, Cryptamnesia, exposition Printemps de Septembre, Les Abattoirs, Toulouse, 2007 page 23, Hansel et Gretel page 24, La Terre et les rêveries de la volonté, essai sur l’imagination de la matière, 2ème édition, 1947 page 26, New York délire, éditions Parenthèses, 1978 page 28, Harmonie en touge, 1908 page 28, résidence à Pollen, Monflanquin, exposition du 13 mars au 30 avril 2009 page 28, Sans titre, impressions, 148 x 120 cm, 2002, exposition au Parvis, centre d’art contemporain, Ibos, du 08 octobre au 29 novembre 2008 page 29, Alberto Giacometti rue d’Alésia, Paris, agence Magnum, 1961 page 30, Palais Güell, Barcelone, 1885-1889 pages 30, 31, Sagrada Familia, Barcelone, 1884-1926 page 30, réalisation pour le Centre Saint Martial sur un dessin de Saguez & Partners, Limoges, 2008 page 30, New uses for ceramics, CRAFT, Limoges, Ceramic Network, 2002 pages 30, 31, Heaven of Delight, décoration du plafond du salon des Glaces du Palais Royal de Bruxelles, 2002 page 31, Looshaus, immeuble sur la Michaelerplatz, Vienne, 1909-1911


Merci à tous les auteurs ainsi qu’à tous ceux ayant contribué de près ou de loin à la réalisation du présent objet et merci tout particulièrement à Marjorie, Guy et Gilles.



Arrêter le processus, obtenir un instantané et observer : un environnement se dessine alors. Il y a les murs de mon appartement, les trajets quotidiens où s’entrecroisent clichés et conversations entendues, les mêmes réflexions qui souvent reviennent, des souvenirs de lectures... Le tout donnant une accumulation boulimique d’images et de signes avec articulation ou pas, confrontation ou pas, se mêlant ou pas. Et, moi, au milieu, parmi.


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