Podologie

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II. Prise en charge d’un pied

Une usure anormale de la chaussure. Sa rapidité d’installation ou la gêne qu’elle entraîne doit inquiéter. Il est recommandé de surveiller l’usure des chaussures car même pour un sujet sain, une semelle trop usée, notamment au talon (usure complète de bon-bout), équivaut à un trouble statique. En effet, lors de la marche, l’attaque du pas s’effectuant par le bord postérolatéral du talon, cette partie a tendance à s’user rapidement. Elle provoque alors un véritable varus du talon qui peut être responsable d’entorses à répétition ou de « crampes » dans le mollet. L’instabilité de la cheville. Elle se manifeste essentiellement par une impression de déséquilibre lors de la marche, des douleurs ou des entorses répétées. Chez l’enfant, les troubles de rotation du membre inférieur (pieds en adduction ou en abduction) inquiètent souvent les parents.

Gène fonctionnelle En dehors de la marche, les activités quotidiennes privées et/ou professionnelles pâtissent de toute atteinte à la mobilité de la cheville et du pied : raideur, blocage, ankylose. La lésion d’une seule articulation suffit à provoquer une impotence. Elle oriente plutôt vers des pathologies rhumatismales ou traumatiques. L’amyotrophie, l’hypotonie ou à l’inverse la spasticité et les rétractions musculo-tendineuses, surtout des muscles extrinsèques, perturbent également la bonne mobilité du pied. Il convient de rechercher une myopathie, une neuropathie ou une maladie métabolique. Enfin, les dysesthésies souvent d’origine neurologique ont des répercussions propres au pied. L’hyperesthésie rend le chaussage inconfortable voire douloureux. L’hypoesthésie aggrave les hyperkératoses mécaniques et favorise leur évolution vers des complications cutanées (ulcère, bursopathie).

Déformations La raison qui conduit à examiner un pied pour une déformation dépend de l’âge du patient. Chez le nourrisson, toute anomalie fait craindre pour son avenir fonctionnel et justifie la consultation d’un spécialiste. Il faut distinguer la malposition de la malformation (cf. chapitre 7, page 103). Chez l’adulte, une déformation peut être un motif de consultation par simple souci esthétique, surtout chez la femme jeune. Une enquête étiologique se justifie pour ne pas passer à côté d’un diagnostic sérieux telle qu’une tumeur ou un rhumatisme débutant. Se méfier d’une déformation évidente, rapide, souvent indolore chez un diabétique atteint de neuropathie, le pied de Charcot par ostéoarthropathie n’est plus exceptionnel. Parfois, la déformation est responsable d’une gêne au chaussage. La chaussure de série ne tolère aucune saillie inhabituelle, même minime. Le conflit se traduit rapidement par une zone de frottement excessif et une gêne à la marche. Une déformation importante peut interdire tout chaussage de série.


4. Examen clinique

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Exploration neurologique La palpation des trajets nerveux peut révéler une tuméfaction sur un gros nerf (névrite). Le tonus musculaire est apprécié par le ballottement passif en imposant au pied des mouvements alternatifs de flexion plantaire et dorsale dans la cheville. L’examen de mouvements actifs contre résistance explore la force musculaire. La flexion dorsale forcée et brusquement relâchée du pied recherche le déclenchement d’un mouvement anormal. La sensibilité profonde est testée par la sensation des vibrations transmises par un diapason posé sur une saillie osseuse, par le sens de la position d’un orteil sans contrôle de la vue ou par la sensibilité à la pression ou aux différences de poids. Le diapason gradué permet une mesure semiquantitative ; un indice inférieur à 4 sur l’échelle de 8 indique une neuropathie sensitive débutante (pallesthésie) ou complète (pallanesthésie) à 0/8. La sensibilité superficielle doit être étudiée par différents stimuli pour mettre en évidence une éventuelle dissociation entre les sensibilités tactile, douloureuse ou thermique. L’instrument de référence est le monofilament calibré. Il a été le seul validé dans le programme nord américain LEAP (Low Extrimity Amputation Program) pour la prévention des amputations chez les patients porteurs d’une neuropathie. Il consiste à appliquer sur différentes zones cutanées du pied, sans hyperkératose, un fil de DE SEMMES WEINSTEINÒ de façon perpendiculaire, jusqu’à sa courbure. Il existe différents fils de diamètres différents permettant de dépister une neuropathie sensitive débutante (tableau 4.I) avec une sensibilité de 100 % et une spécificité de 80 %. Il mesure aussi l’évolution. La non-perception du fil 5,07 impose une prise en charge méticuleuse et quotidienne des pieds ; dans ce cas, le risque d’ulcération est multiplié par 10 et celui de l’amputation par 17. Une récente étude en France a montré que tous les fils 5,07, payants ou gratuits, n’ont pas la même valeur prédictive. À diamètre égal, ils n’ont pas la même flexibilité et donc n’exerce pas la même pression de 10 grammes sur la peau (vidéo 1 @ ).

Tableau 4.I Évaluation de la sensibilité superficielle de la peau par monofilaments de diamètre différent Taille du fil

État de la sensibilité

3,61

normale

4,31

diminution légère

4,56

diminution de la sensation protectrice

5,07 (= 10 g)

perte de la sensation protectrice + +

6,65

perception limitée aux fortes pressions


4. Examen clinique

65

Étude de la marche La marche est un mécanisme très complexe imposant des mouvements à tout le squelette de la tête aux phalanges distales du pied. Le podologue recherche surtout les répercussions éventuelles de la pathologie du pied sur la marche ou l’inverse. L’étude de la marche en cabinet ne permet pas une approche biométrique du pas : longueur, largeur, angle du pas, vitesse, répartition des pressions, projection du centre de gravité. En revanche, l’aspect qualitatif de la marche est facilement accessible.

Aspects qualitatifs de la marche Recherche d’une boiterie ou d’une démarche inesthétique Elle se traduit par une asymétrie lors du passage du pas. Il faut en préciser les caractéristiques de la boiterie : steppage, pseudo steppage spastique, fauchage, marche pseudo ébrieuse, dandinante, talonnante, festinante : n positions relatives de la hanche, du genou et du pied (flexion ou extension excessive d’un segment de membre par rapport à l’autre) ; n marche en fauchant, un membre inférieur décrivant une courbe latérale ; n marche avec salutation ou inclinaison du tronc ; n rotation horaire ou anti-horaire d’un membre inférieur, entraînant le pied en abduction ou en adduction ; n retentissement au bassin et en amont ; n utilisation d’une canne, de béquilles, d’un déambulateur.

Longueur du pas Une marche à petits pas correspond parfois à une ankylose de l’articulation tibio-tarsienne.

Attaque du pas Normalement le pied se pose au sol en varus de l’arrière-pied, par la partie postéro-latérale du talon plantaire. L’attaque du pas par l’avant-pied traduit un équinisme (problème neurologique, inégalité des membres inférieurs, pied creux important, chaussure à talon haut).

Passage du pas Le pied non portant se fléchit sur la jambe et oscille d’arrière en avant. En cas de steppage, le pied reste en équin et frotte le sol : paralysie des extenseurs des orteils ou des fibulaires). Pour compenser cette difficulté, la flexion de la cuisse sur le bassin s’accentue.

Déroulement du pas Il faut observer si le pied se déroule bien en trois phases : taligrade, plantigrade et digitigrade.


6. Notions thérapeutiques

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en position médiane : hémicoupole médiale (ou voûte ou soutien sousnaviculaire), butée sous-cuboïdienne ; n l’hémicoupole est un élément de confort incontestable mais son emploi doit être limité aux pieds ankylosés. Sur un pied souple, il supprime, en partie, la récupération d’énergie élastique, il stimule le déroulement en varus, à la marche comme à la course, et sa forme bombée augmente la tension de l’aponévrose plantaire ; n à l’avant : voûte métatarsienne rétrocapitale (VMR), appui rétrocapital (ARC ou « pelote »), coin supinateur ou pronateur antérieur, barre rétrocapitale (BRC), barre métatarsophalangienne, élément sous diaphysaire ou anté-capital, coin interosseux, etc. Il est possible de les associer pour modifier les effets comme nous le verrons au cours des chapitres consacrés aux pieds pathologiques. La hauteur idéale d’un élément est la minimale efficace. Elle doit tenir compte de la mobilité articulaire, notamment métatarsophalangienne, de la hauteur habituelle des talons et ne pas entraver la physiologie du pied et le chaussage. Le tissu de recouvrement est fonction du contexte : souvent en cuir souple, sec et résistant (porc) ou plus doux (chèvre), parfois en une autre matière (tissu, chamoisine). Tous les cuirs sont sans colorant et tannés avec des végétaux. Les colles sont puissantes, dépourvues de nocivité, résistantes à la sueur mais dissolubles pour faciliter les modifications. Les nouveaux matériaux thermoformables permettent de fabriquer des éléments latéralisés, véritables ailerons, qui agissent sur le bord postérieur, latéral ou médial d’un pied. Ils reportent le frottement de la chaussure, à la manière d’une orthoplastie. Ils sont utiles en cas de saillie, osseuse ou non, gênant le chaussage (cf. fig. 8.8, page 122). L’aileron étant fixé à l’orthèse plantaire a des avantages sur l’orthoplastie : facile à installer et à entretenir, bien toléré, peu encombrant, actif sur le talon aussi bien que sur la face latérale ou médiale du pied, résistant à l’usure, léger, modifiable et pris en charge par les organismes sociaux. n

Orthèse monobloc L’orthèse ne comporte pas d’élément individualisé : orthèse façonnée par meulage, orthèse thermoformée, orthèse plantaire monobloc en résine coulée (SipseÒ réservée aux affections invalidantes rhumatoïdes et neurotrophiques du pied avec tarif de remboursement supérieur, à condition d’être précisée sur la prescription).

Orthèse thermoformée Une telle orthèse, moulant la plante du pied, n’assure aucun résultat bénéfique sans ajout de reliefs thérapeutiques ; par contre, elle fournit une première adaptée bien utile en cas de trouble majeur de l’assise plantaire. Il existe plusieurs techniques de thermoformage, plus ou moins adaptées à l’ajout de reliefs thérapeutiques : la thermopression formée en position neutre sur tapis mousse, la thermopression formée en position imposée par


6. Notions thérapeutiques

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À retenir Le pied bénéficie de nombreux traitements orthétiques, particulièrement adaptés aux troubles de sa fonction mécanique. Il ne faut pas oublier que dans notre pays, la principale orthèse reste la chaussure. La chirurgie du pied a fait d’importants progrès depuis 20 ans mais la fréquence des séquelles ostéoarticulaires justifie de bien peser les indications et de bien informer le patient des risques fonctionnels à long terme. Bibliographie Goldcher A. Orthèses plantaires. Rev Rhum. 1998, 65 (6) [Suppl. Pédagogique] : 51 SP-58 SP. Goldcher A. Bilan pré-orthétique : le point de vue du médecin. Progrès en médecine et chirurgie du pied. Sauramps médical: Montpellier, 2004 237-244. Goldcher A. Indications médicales des orthèses plantaires. Encycl Méd Chir, « Podologie », 27-130-A-15. Goldcher A. Orthèses podologiques spécifiques. Revue du Praticien, vol 60, 20 mars 2010.


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III. Pied pathologique

Troubles statiques de l’avant-pied Troubles statiques du gros orteil Hallux valgus (ÂŤ oignon Âť) Très frĂŠquent Ă tout âge, surtout chez la femme, il est dĂŠfini par une dĂŠviation latĂŠrale du gros orteil. L’Êtiologie statique n’est pas la seule Ă ĂŠvoquer car l’hallux valgus peut avoir une origine congĂŠnitale, traumatique, neurologique (sĂŠquelle de sciatique) ou inflammatoire. Le motif de consultation varie : simple dĂŠformation inesthĂŠtique, douleur, lĂŠsion cutanĂŠe en regard de la saillie osseuse (photo 29 @ ), bursite souscutanĂŠe voire gĂŞne fonctionnelle au dĂŠroulĂŠ du pas ou au chaussage. Les bilans clinique et radiologique dĂŠterminent les facteurs favorisants, l’importance de la dĂŠformation et les complications locorĂŠgionales.

Facteurs anatomiques favorisants ou aggravants n n n n n n n

insuffisance anatomique du premier rayon (brachymÊtatarsie de M1) (photo 30 @ ) ; insuffisance gÊographique du 1er rayon (mÊtatarsus varus supÊrieur à 10 ) ; hallomÊgalie ou canon hyperÊgyptien (photo 31 @ ) ; 1re tête mÊtatarsienne trop sphÊrique ou dÊsaxÊe par rapport à l’axe MI ; rotation ou luxation mÊdiale du premier mÊtatarsien par rapport au sÊsamoïde latÊral (photos 32 @ a et b) ; interligne 1er mÊtatarsien-1er cunÊiforme trop oblique en avant et en dehors (photo 33 @ ) ; absence de crête intersÊsamoïdienne sous la tête de MI (fig. 8.6) (photo 34 @ ) ;

[(Figure_6)TD$IG]

Figure 8.6 Absence de crête intersÊsamoïdienne sous la 1re tête mÊtatarsienne sur une radio en incidence axiale. a : prÊsence d’une crête normale ; b : absence de crête.


9. Pied traumatique

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est commencée dès les premiers jours. Certains praticiens optent pour une méthode purement fonctionnelle par le simple port prolongé d’une chaussure de type rangers. On réserve la chirurgie aux entorses compliquées de fractures ou sur certains terrains (sportifs de compétition).

Souffrance post-entorse de cheville La persistance de douleurs après une entorse talo-crurale doit faire rechercher une lésion ostéochondrale, une neuropathie, une lésion capsulo-ligamentaire ou tendineuse, une dystonie réflexe ou un infiltrat périarticulaire. Une mauvaise cicatrisation des tissus mous entraîne leur relâchement (hyperlaxité par cicatrisation ligamentaire incomplète) ou leur resserrement (fibrose, épaississement capsulo-ligamentaire, œdème résiduel). En clinique, les tissus apparaissent empâtés, infiltrés, épaissis et sensibles. Les articulations du tarse postérieur semblent trop raides ou trop lâches. Pour éviter ces complications, des gestes préventifs existent : évacuation des grosses hémarthroses, mobilisation précoce en secteur protégé et lutte contre l’œdème. Le traitement consiste à diminuer la pression veineuse, augmenter la pression tissulaire et lutter contre l’œdème (surélévation du membre, compression veineuse, drainage lymphatique). L’infiltration de corticoïde se justifie en cas d’œdème persistant.

Diagnostics différentiels ou associés Entre une entorse de cheville et certaines fractures (malléoles, calcaneus, tubercules taliens) ou luxations (subtalienne), le diagnostic ne pose pas de difficulté avec un bon examen clinique et radiologique. Nous n’évoquerons que les cas peu évidents auxquels il faut toujours penser, surtout dans les circonstances suivantes : discordance entre la symptomatologie et l’examen, douleur ou impotence inexpliquée, impression d’instabilité, chronicité.

Luxation des fibulaires Les tendons passent par la gouttière rétro-malléolaire de la fibula, maintenus par le rétinaculum des muscles fibulaires lui-même renforcé par les rétinaculums supérieur et inférieur. Le court fibulaire s’insère sur la base du 5e métatarsien et le long fibulaire sur la face inférieure de la base du 1er métatarsien, après son passage sur la face latérale du cuboïde. La luxation se produit soit en flexion dorsale du pied parfois associée à une abduction ou à une adduction soit en varus équin forcé. Elle provoque une violente douleur latérale de la cheville parfois précédée d’une sensation de craquement ou de ressaut. La chute et l’impotence fonctionnelle sont inconstantes. Une tuméfaction se développe dans les heures suivantes comme pour une entorse du LCL. Une ecchymose rétromalléolaire latérale, remontant à la face latérale de la jambe, témoigne parfois de la gravité. La palpation rétromalléolaire réveille la douleur. La subtalienne est indolore.


12. Pied neurologique

203

Pied de l’infirme moteur cérébral (IMC) Les dysfonctions et les aspects morphostatiques sont très variés : spasticité, dystonie, réflexes archaïques persistants, équinisme, valgus, pied plat, pied creux varus, etc. Si l’IMC est capable de marcher, les lésions podales ne sont pas un obstacle, mais elles peuvent influer sur la qualité du pas. Tout doit être tenté pour réduire au minimum l’influence néfaste du pied. Le recours précoce à la chirurgie est justifié. Le pied dans l’hémiplégie cérébrale infantile pose des problèmes isolés. L’atteinte est unilatérale et distale. Dans la diplégie, l’atteinte est bilatérale, distale et liée aux problèmes de genoux.

Pied de la poliomyélite Rare depuis les années 1960. Les séquelles rencontrées siègent essentiellement au pied. La polio donne des paralysies isolées d’un ou plusieurs muscles. L’atteinte du nerf tibial antérieur est une séquelle très fréquente. Il faut lutter contre les rétractions et favoriser la marche notamment par le port de chaussures légères compensant un éventuel steppage (chaussures thérapeutiques).

Pied de la paraplégie Les accidents de la voie publique ont augmenté la fréquence de cette affection. Le pied est trop souvent négligé dans la phase initiale alors qu’une attitude préventive éviterait les rétractions gênantes. La spasticité par automatisme médullaire est fréquente. Elle favorise les rétractions et perturbe la marche de ceux qui se reverticalisent. La prévention doit porter sur les risques trophiques cutanés (escarre) et osseux (déformation, fracture, ostéome). Une lésion, tel qu’un ongle incarné, amplifie l’automatisme médullaire et augmente l’intolérance aux chaussures. Il ne faut pas négliger la moindre pathologie podale.

Pied des hérédo-dégénérescences Ces neuropathies héréditaires donnent des pieds creux (fig. 12.1), excepté l’hérédoataxie cérébelleuse de Pierre-Marie, ce qui la distingue de la maladie de Friedreich. La paraplégie spastique de Strumpell-Lorrain associe un syndrome pyramidal, une hypertonie des membres inférieurs en extension et des troubles de la marche. La polynévrite sensitivo-motrice distale, avec hypertrophie palpable des troncs nerveux, évoque la névrite hypertrophique de Dejerine-Sottas. La maladie de Charcot-Marie-Tooth est responsable d’un steppage bilatéral et d’une amyotrophie jambière.


204

III. Pied pathologique

[(Figure_1)TD$IG]

Figure 12.1 Pied creux unilatéral d’une hérédodégénérescence.

Pied du spina-bifida L’aspect clinique est fonction du siège de la malformation, de son importance et de l’âge de découverte. Malposition néonatale, pied plat ou pied creux unilatéral peut être le seul élément diagnostic. Il s’agit d’un pied paralytique complexe associant déficit moteur anténatal, déficit sensitif et troubles trophiques. Le pied convexe et le pied varus, avec ou sans équin, sont fréquents. Après correction éventuelle par chirurgie médullaire, la lésion podale ne régresse pas. Seules les déformations mal tolérées (pied varus) justifient une opération pour rétablir un bon appui plantaire.

Pied dystonique ou crampe du marcheur Le trouble statique évolue vers un varus équin avec spasme des orteils en flexion ou hallux érectus. Une gêne fonctionnelle bénéficie d’injections de toxine botulique dans le muscle tibial postérieur ou dans l’extenseur long de l’hallux.

Pied des neuropathies périphériques Qu’elles soient circonscrites (syndromes radiculaire, tronculaire et plexulaire) ou diffuses (polynévrite, polyradiculonévrite, multinévrite, meningo-radiculite), ces neuropathies distales touchent particulièrement les pieds. Elles associent des algo-paresthésies avec un déficit sensitif superficiel et/ou profond, un déficit moteur, une abolition de réflexe ostéotendineux et parfois des troubles neurovégétatifs et trophiques. L’utilisation du questionnaire DN4 facilite le dépistage. Le déficit moteur est hypotonique, avec ou sans amyotrophie, gênant souvent la marche (steppage). Les troubles sensitifs se traduisent par des symptômes « en plus » (paresthésie, dysesthésie, névralgie, causalgie, hyperesthésie) ou « en moins ». Les neuropathies localisées au pied sont liées à une atteinte soit tronculaire partielle du sciatique, soit isolée d’une branche du nerf sciatique. Plus d’une


12. Pied neurologique

205

centaine de causes ont été recensées. Les plus fréquentes sont d’origine métabolique, inflammatoire, traumatique, toxique ou médicamenteuse (cf. chapitre 18, page 267), para-néoplasique et infectieuse. La polynévrite toxique ou carentielle, donne des atteintes distales, bilatérales, symétriques et d’évolution subaiguë. La polyradiculonévrite inflammatoire (Guillain Barré) est surtout motrice, ascendante, bilatérale, symétrique et aiguë. La neuropathie diabétique est distale, symétrique et douloureuse (page 188 Neuropathie à risque).

Pied et « sciatiques » Dès son origine le gros nerf sciatique comporte des fibres issues des racines L4 à S3 groupées en 3 contingents : le nerf fibulaire commun (FC), le tibial (T) et les nerfs ischio-jambiers. Une étude minutieuse des atteintes motrices et sensitives permet de préciser si la lésion est radiculaire, plexulaire, tronculaire ou distale (cf. tableau 12.II, page 199). En particulier, l’unilatéralité oriente vers une lésion radiculaire (L4-L5) ou tronculaire. L’atteinte du tronc commun du nerf sciatique est possible lors d’une injection intramusculaire, d’un traumatisme, d’un abord chirurgical de la hanche ou d’une compression. Chez le nourrisson, elle entraîne un raccourcissement du membre inférieur, un défaut de croissance du pied, des troubles trophiques et un pied ballant ou équin. Lorsque le T et le FC sont lésés simultanément, le premier récupère plus vite. La paralysie du tibial touche la motricité des fléchisseurs plantaires et du tibial postérieur, ainsi que la sensibilité plantaire. Le réflexe calcanéen est aboli et la mise en charge sur les pointes devient impossible. La paralysie du fibulaire commun est très fréquente, notamment au cours d’un traumatisme ou d’une compression au col de la fibula (fracture, position assise jambes croisées, plâtre). La flexion dorsale du pied et des orteils, ainsi que l’abduction, sont déficients. La ferme médiale du pied s’affaisse par paralysie du long fibulaire. Le steppage et les griffes d’orteils gênent la marche. Il s’y associe une hypoesthésie de la face dorsale du pied et parfois de la face antéro-latérale de la jambe. Les associations au membre inférieur précisent le diagnostic (cf. tableau 12.II, page 199). En l’absence de cause évidente, il faut évoquer une multinévrite débutante. Les principales étiologies sont alors le diabète, la périartérite noueuse (début brutal et douloureux, biopsie neuromusculaire) et la lèpre (séjour en pays d’endémie, gros nerf palpable). Dans la lésion par compression, la réversibilité est favorisée par la kinésithérapie active. La prescription d’un releveur simple du pied aide à la reprise précoce de la marche. La récupération clinique intervient vers la 4e semaine. Sinon un bilan électrophysiologique s’impose vers la 5e ou 6e semaine.

Syndromes canalaires Ils correspondent à des atteintes neurologiques sur le pied lui-même.


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III. Pied pathologique

Syndrome du canal tarsien Il traduit l’irritation ou la compression du nerf tibial dans le canal tibio-talocalcanéen de Richet. Ce tunnel ostéofibreux situé en arrière et sous la malléole médiale est inextensible. Il contient des éléments vasculaires, le long fléchisseur de l’hallux, le long fléchisseur des orteils et le tibial postérieur satellite du nerf tibial.

Signes fonctionnels Des paresthésies et/ou des douleurs de la plante du pied et des orteils doivent orienter vers le diagnostic. Les symptômes sont volontiers nocturnes, améliorés par la marche ou la station debout prolongée. Leur intensité est progressivement croissante. Il s’agit de brûlure, de « pied mort », d’engourdissement, de fourmillement ou de douleur. Le territoire des nerfs plantaires (cf. fig. 4.4, page 58) est touché en totalité ou en partie (face plantaire du talon ou 2 à 3 orteils). Des irradiations sont possibles, vers le haut, à la face médiale de la jambe. Les massages et la position déclive amènent parfois un soulagement.

Signes cliniques Les troubles sensitifs sont parfois déclenchés par les mouvements forcés de pronation et de flexion dorsale. Il faut rechercher une anesthésie ou une dysesthésie dans les territoires concernés. Seul un examen minutieux permet de mettre en évidence les formes parcellaires. L’atteinte de la sensibilité profonde est rare. Les troubles moteurs sont discrets et inconstants. Ils touchent en particulier les courts fléchisseurs plantaires, donc la flexion et l’écartement des orteils. Ils se recherchent comparativement avec le côté sain. n Sur le podoscope, en station debout, l’appui pulpaire des orteils touchés est partiel, voire inexistant. n Le signe du papier (de Bardot) révèle que le gros orteil lésé ne peut plus retenir une feuille de papier placée sous la face pulpaire et tirée brusquement par l’examinateur. Du côté sain, la feuille se déchire (fig. 12.2, vidéo 6 @ ). n Le signe du chevauchement montre que lors de la flexion plantaire des orteils, le premier passe au-dessous du 2e. Les tests diagnostics. Les paresthésies et les douleurs peuvent être reproduites par la percussion fine au marteau à réflexe ou par la pression du canal tarsien (signe de Tinel). La sensibilité du test est augmentée par la pronation forcée ou la mise en place d’un garrot pneumatique sur la jambe. Dans les territoires concernés, on constate un déficit de la sensibilité profonde (diapason gradué) et/ou superficielle (monofilament calibré). Les modifications locales. Une tuméfaction sous- ou rétro-malléolaire peut être observée en se plaçant derrière le malade debout sur le podoscope. Sa pression déclenche les symptômes. Il n’y a pas de trouble circulatoire. La coloration et la température cutanée sont normales. Les modifications trophiques sont inconstantes : peau sèche et amincie, plis cutanés effacés.


12. Pied neurologique

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[(Figure_2)TD$IG]

Figure 12.2 Signe du papier de Bardot.

Examens complémentaires Les examens biologiques sont normaux ou traduisent des modifications étiologiques. L’EMG confirme un ralentissement de la vitesse de conduction dans le segment jambier du nerf tibial (baisse de 10 %). L’infiltration intracanalaire de corticoïde sous échographie peut être utilisée comme test diagnostique. Les résultats sont inconstants. Les radiographies, TDM et IRM sont pratiquées en fonction de l’étiologie évoquée.

Orientation étiologique Le syndrome idiopathique semble plus rare que pour le canal carpien mais reste très fréquent. Il existe quatre facteurs principaux, parfois associés, responsables du syndrome : n les traumatismes locaux et leurs séquelles : contusion (hématome), entorse, luxation subtalienne, fracture, fibrose, plâtre, arthrodèse ; n les vasculopathies : varice, anomalie artérielle ; n les troubles statiques : valgus ou varus calcanéen associé à des microtraumatismes répétés (station debout prolongée, marche forcée, entraînement sportif) et surtout une chaussure à tige ou contrefort rigide ; n les tendinopathies : hypertrophie tendineuse, ténosynovites inflammatoires, goutte (tophus). . . D’autres causes sont plus rares : arthrite de voisinage (synovite), lipome, dépôt tophacé ou amyloïde, kyste (téno)synovial, adénopathie, canal étroit congénital, névrites à gros nerfs (diabète, lèpre), etc.


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III. Pied pathologique

[(Figure_3)TD$IG]

Figure 12.3 Infiltration du canal tarsien. 1 : malléole médiale. 2 : tendon calcanéen. 3 : artère tibiale postérieure.

Le syndrome du canal tarsien semble jouer un rôle dans l’algodystrophie du pied et certains maux perforants plantaires (acropathie ulcéro-mutilante).

Traitement Le traitement médical associe l’infiltration locale de corticoïde sous échographie et le traitement étiologique (AINS, orthèse correctrice, chirurgie). L’infiltration se fait dans le canal tarsien (fig. 12.3) ou loco dolenti en cas de tuméfaction visible. Si trois injections espacées de 5 à 7 jours sont inefficaces, il faut envisager une neurolyse chirurgicale, suivie d’une immobilisation plâtrée d’un mois, en légère pronation. Les paresthésies disparaissent d’abord, suivies du déficit sensitif puis moteur.

Syndrome du canal métatarsien ou « Morton » Il traduit la compression ou l’irritation des éléments contenus dans un canal inextensible limité par les têtes métatarsiennes latéralement, l’aponévrose plantaire en bas et le ligament transverse du métatarse en haut. Il contient un nerf interdigital plantaire, des tendons lombricaux, des bourses séreuses et des vaisseaux digitaux. Dans la majorité des cas, l’origine provient d’un chaussage mal adapté, en particulier trop étroit en volume.

Diagnostic essentiellement clinique Signes d’appel Ils siègent à l’avant-pied. Il s’agit de métatarsalgies, à début paroxystique, survenant au cours de la marche. L’intensité est telle qu’elle « porte au cœur » obligeant le malade à s’arrêter, se déchausser et se masser en pleine rue. La douleur siège entre deux têtes métatarsiennes, surtout dans le 3e ou le e 4 espace rarement dans le 1er ou le 2e. Elle irradie parfois vers les orteils adjacents, plus rarement la face dorsale de la phalange unguéale ou le dos du pied. Elle est comparée à un coup de poignard, un broiement, une crampe très intense ou parfois à une décharge électrique. Les symptômes sont amplifiés par l’hyperflexion dorsale des orteils (talons hauts). La station


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debout prolongée, le port de chaussures étroites (signe du soulier) ou à première de montage gaufrée, usée, et la chaleur locale favorisent l’apparition des douleurs, surtout dans les formes évoluées. Les signes d’appel sont parfois moins caractéristiques dans leur intensité (paresthalgie modérée), leur siège (diffus ou partiel) et leur mode de début (sans paroxysme).

Signes d’examen Des épreuves déclenchent la douleur en cas de névrome ancien et volumineux : n le signe de la sonnette par pression plantaire directe de l’espace intercapitométatarsien atteint ou par pression transversale latéro-médiale de l’avantpied (signe de Gaenslen) ou en associant les deux (signe de Mudler) ; n la marche sur les pointes de pieds ; n l’hyperflexion dorsale des orteils adjacents (« Lasègue » de l’orteil). L’hyperflexion plantaire des orteils soulage rapidement. La pression douloureuse des têtes métatarsiennes adjacentes n’est pas habituelle et doit faire évoquer un autre diagnostic. La sensibilité au monofilament de la pulpe ou des faces latérales des orteils adjacents est rarement perturbée (hypoesthésie en feuillet de livre). Les signes objectifs sont inconstants : tuméfaction dorsale, trouble statique de l’avant-pied, écartement de 2 têtes métatarsiennes sur une radiographie comparative des avant-pieds de face. Les appareils actuels d’échographies visualisent sans difficulté les bursites et les nerfs interdigitaux. La présence de deux rameaux nerveux dans le 3e espace intercapitométatarsien (un du plantaire latéral et un du plantaire médial) explique l’augmentation de volume habituellement retrouvé. Aucun signe paraclinique ne permet d’affirmer que le « névrome » soit la cause directe de la douleur à la marche ; il existe souvent des nerfs augmentés de volume mais asymptomatiques dans des espaces voisins. La biologie et l’EMG standard n’apportent aucun élément.

Orientation étiologique Avant de rechercher une étiologie, plusieurs diagnostics doivent être éliminés : ostéonécrose d’une tête métatarsienne, traumatisme, bursopathie, arthrite, arthrose, kyste synovial, syndrome capitométatarsien (marche en varus, syndrome de la 4e tête, syndrome douloureux aigu du 2e espace, périostite), tendinopathie. Le syndrome du canal métatarsien peut être dû à un ou plusieurs névromes sur le ou les nerfs interdigitaux plantaires. Il s’agit alors de la maladie de Morton. La perception d’un ressaut, lors de la compression transversale de l’avantpied, après la mobilisation du névrome vers le haut, est quasi constante (signe de Mulder) mais non spécifique. Lorsque les symptômes existent sans la présence d’un névrome, on parle de syndrome de Morton. Dans les deux cas, il faut rechercher un contexte inflammatoire (polyarthrite, goutte), un trouble statique de l’avant-pied et surtout un chaussage trop étroit.


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III. Pied pathologique

Le syndrome est parfois primitif. Il touche surtout l’adulte, avec une légère prédominance féminine. Il est favorisé par le surmenage professionnel ou sportif, la surcharge pondérale ou un traumatisme. Sa fréquence augmente avec les années ce qui évoque une responsabilité accrue des chaussures (largeur trop étroite, semelle rigide bloquant le déroulé du pas, assise talonnière trop inclinée et absence quasi constante de « rempli » dans la première de montage). Une évolution de 15 jours à 5 ans est habituelle en l’absence de traitement et sans changement du chaussage.

Traitement Le traitement médical est efficace dans environ 80 % des cas. Il comporte en première intention un changement de chaussure. Il faut proscrire tout modèle nécessitant un travail en force de l’avant-pied (escarpin, mocassin, mule, sabot), une tige trop étroite (richelieu, sandale, ballerine), un étirement des nerfs plantaires (talon haut). Il faut conseiller les modèles laissant de la place aux orteils : Derby ou mieux Derby cycliste, Salomé, Charles IX, Lamballe, bottine avec fermeture. En cas de résultat insuffisant, il faut associer le port d’orthèses plantaires dans l’un des modèles précédents, en bannissant les chaussures usagées. Elles visent à corriger les troubles statiques éventuels et écarter les têtes métatarsiennes par un appui rétrocapital ou un renflement médian. Une orthoplastie fixant les orteils douloureux en flexion est parfois efficace. Dans un troisième temps, on propose une à trois infiltrations de corticoïde dans l’espace intercapitométatarsien par voie dorsale, sous échographie pour éviter l’atrophie du capiton plantaire et des séances de physiothérapie. En cas d’échec, un geste chirurgical se discute. Il comporte l’ablation du névrome ou de la bifurcation nerveuse, plus rarement la neurolyse avec simple section du ligament transverse du métatarse.

Syndrome du nerf fibulaire profond L’atteinte du nerf à la face antéro-médiale du cou-de-pied ou à la face dorsale du pied est favorisée par un traumatisme direct, une inversion forcée ou une ténosynovite rhumatoïde. Elle se traduit par une douleur médio-tarsienne augmentée par la flexion plantaire, une parésie du pédieux qui s’atrophie et parfois des troubles sensitifs de la première commissure et des orteils adjacents.

Syndrome du nerf sural L’irritation du nerf à la face latérale du calcaneus est favorisée par un cal vicieux ou par une chaussure aux contreforts trop rigides. Elle provoque des paresthésies le long du bord latéral du pied et à la face dorsale du 5e orteil. La percussion du nerf latéral déclenche les troubles.

Syndrome du nerf fibulaire superficiel Peu fréquent, il est aussi décrit sous le nom de podalgie paresthésique. Les troubles siègent dans le territoire du nerf lésé (face antéro-latérale du


12. Pied neurologique

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cou-de-pied, face médiale de l’hallux, etc.). Ils sont favorisés par le port de chaussures à tige étroite et rigide, un trouble statique (pied creux valgus, « tarse bossu ») ou des microtraumatismes professionnels ou sportifs.

Pied psycho-social Le pied n’échappe pas aux névroses, évoquées devant l’absence de signes objectifs clinique et paraclinique associée à un contexte familial ou socioprofessionnel déstabilisant. Il existe un syndrome de douleur chronique d’origine bio-psycho-sociale qui bénéficie d’une prise en charge psychologique parfois aidée d’un traitement par neurostimulation transcutanée (Tens), à raison de 4 séances de 40 min par jour pendant 4 semaines. Tout syndrome anxio-dépressif peut aggraver une pathologie du pied ou déclencher une somatisation. L’ hystérie de conversion existe. Elle se traduit généralement par un pied varus unilatéral évoluant vers un varus équin qui perturbe uniquement le chaussage. Le patient conserve une « belle indifférence » envers son symptôme. À retenir Le pied est le parent pauvre de la neurologie, peut être du fait de sa position trop éloignée du cerveau. Ce désintérêt s’observe aussi bien dans la sous estimation de la fréquence des atteintes podales et dans la pauvreté des thérapeutiques. L’interrogatoire est un temps essentiel du diagnostic, les neuropathies iatrogènes étant relativement fréquentes, en particulier chez les personnes âgées. L’utilisation généralisée du monofilament et du diapason gradué devrait se généraliser pour dépister cliniquement les anomalies débutantes, éviter les explorations inutiles, et coûteuses, ainsi que l’emploi de thérapeutiques inefficaces. Bibliographie Bouhassira D, Attal N et coll. Comparison of pains syndromes associated with nervous or somatic lésions and development of a new neuropathic pain diagnostic questionnaire (DN4). Pain 2005 ; 114, 1 : 29-36.


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Pied vasculaire

Exceptées les manifestations visibles de certaines malformations (angiome), les signes qui orientent vers une pathologie vasculaire ne sont pas spécifiques. Douleur, œdème et trouble trophique peuvent avoir une origine neurologique, métabolique ou autre. Un bon examen clinique peut différencier les affections d’origine artérielle, veineuse ou capillaire.

Sémiologie vasculaire Claudication intermittente Lors d’une étiologie artérielle, la douleur est très intense, obligeant brusquement à s’arrêter. Elle s’accompagne de l’abolition d’un pouls périphérique, d’un refroidissement du pied et parfois d’un souffle vasculaire. Notons que tous les patients ne marchent plus assez pour ressentir ce symptôme. En revanche, ils présentent souvent des facteurs de risques d’athérosclérose. La claudication intermittente d’origine veineuse par obstruction poplitée diminue très lentement à l’arrêt de l’effort et ne s’accompagne pas d’une abolition de pouls. L’examen neurologique est normal. La claudication d’origine médullaire est plutôt à type d’engourdissement avec sensation de dérobement des jambes et troubles neurologiques associés (sphincter). La claudication du syndrome de la queue de cheval, est à type de striction et calmée immédiatement par l’accroupissement ou la flexion antérieure du tronc. Des paresthésies, une érection passagère et un steppage sont des signes d’accompagnement habituels. La claudication d’origine sciatique ne survient pas uniquement à la marche. L’examen peut retrouver des antécédents de lombalgie parfois impulsive à la toux, des paresthésies et surtout un signe de Lasègue et une abolition du réflexe achilléen.

Douleur d’origine veineuse Elle doit être évoquée en dehors des claudications. La varice douloureuse ou phlébalgie variqueuse diminue à la marche et augmente à la fatigue. La crampe musculaire correspond à une dilatation variqueuse tendue et sensible au toucher. La brûlure sous-malléolaire, souvent médiale, apparaît en regard d’un lacis veinulaire visible. La douleur térébrante pré-ulcéreuse augmente progressivement et s’accompagne de troubles trophiques.

Podologie 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.


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III. Pied pathologique

La douleur plantaire de la phlébite surale aiguë est associée à des signes de phlébite (ballottement musculaire, Homans, température, anxiété). Certaines talalgies ou métatarsalgies d’allure mécanique peuvent guérir après traitement chirurgical d’une insuffisance veineuse.

Douleur d’origine capillaire (acrosyndrome) Elle survient soit au froid, soit à la chaleur et s’accompagne localement de modifications cutanées de couleur et de température. La prise de certains médicaments (ergotisme, b-bloquant) favorise leur apparition.

Œdèmes Les artériopathies pures ne provoquent pas d’œdème. L’œdème d’origine cardiaque, rénale, hépatique, iatrogène ou carentielle est bilatéral et apparaît dans un contexte évocateur. La différence entre l’œdème veineux et lymphatique n’est fiable qu’au début de la maladie veineuse. Les deux sont ensuite associés.

Œdèmes veineux L’œdème de la maladie variqueuse essentielle est blanc, mou, peu douloureux et vespéral. Il se localise souvent aux régions sous- et rétro-malléolaires. Il prend le godet. Après plusieurs mois, il s’étend vers la jambe et devient plus ferme, rosé, douloureux et peu réductible, même après l’alitement. Il s’accompagne de troubles trophiques mineurs et d’une composante lymphatique. L’œdème cyclique idiopathique est une forme particulière avec participation lymphatique et hormonale. Il survient par période et ne disparaît pas avec la surélévation du pied. La chaleur, la position assise prolongée et l’anxiété le favorisent. L’œdème postphlébitique a l’aspect commun, mais il s’amplifie au cours de la matinée et devient dur et sensible. Le pied est bleu par dilatation des veines près des malléoles. Les troubles trophiques dominent du côté lésé. Cet œdème favorise l’apparition d’un ulcère.

Lymphœdème essentiel Il débute le plus souvent au pied de façon insidieuse. Comme l’œdème veineux il est blanc, ferme, vespéral et intermittent au début. Il n’est jamais cyanosé ni douloureux et ne régresse qu’incomplètement la nuit. Il devient rapidement dur, fibreux et permanent, sans caractère postural. Il prend peu le godet. Il siège surtout à l’avant-pied, aux orteils qui prennent une forme cubique, puis à la face dorsale du pied. Le pincement de la peau au niveau de la face dorsale de P1 des orteils se révèle difficile et ne fait apparaître qu’un pli épaissi (signe de Stemmer).

Troubles trophiques Les modifications de couleur (orteil bleu) et de température cutanée, les troubles de la sudation et les dermatoses (engelure, dermite, nécrose,


13. Pied vasculaire

215

hyperkératose) apparaissent assez tardivement. Il existe alors un contexte évocateur de pathologie vasculaire. Devant un ulcère du pied ou de la cheville, avec ou sans pathologie vasculaire évidente, il faut éliminer une étiologie non vasculaire : neuropathie (signes neurologiques), infection (contexte fébrile, mycose, Leishmaniose), collagénose (VS accélérée), cancer (infiltration, bourgeonnement), traumatisme (circonstances de survenue), divers (anémie hémolytique, piqûre d’insecte). Des éléments cliniques permettent de distinguer les différents ulcères d’origine vasculaire (tableau 13.I). L’allongement notable d’un membre ou d’un pied doit faire rechercher une malformation vasculaire.

Examen vasculaire Dans tous ces cas, il doit être particulièrement minutieux : n inspection des téguments (couleur, chaleur, œdème, varices, lésions) ; n palpation des pouls (le pouls pédieux n’est pas perçu chez 11 % environ de la population saine), des trajets veineux et recherche d’un pli cutané ; n auscultation des trajets artériels à la recherche d’un souffle ; n mesure du temps de recoloration de la peau au gros orteil après pincement : plus de 15 secondes, l’ischémie est certaine ; n recherche d’une incontinence des veines superficielles : impulsivité à la toux de la crosse de la grande saphène, transmission du flot de haut en bas après percussion (manœuvre de Schwartz) ; n la mesure de l’index IPS (rapport de la pression systolique moyenne à la cheville sur la pression humérale moyenne), la plus apte au dépistage précoce (sensibilité 95 %, spécificité proche 100 %). IPS normal égal à 1,1 W 0,10 ; IPS > 1,30, en faveur d’une médiacalcose (diabète) ; n le Doppler fait partie de l’examen systématique annuel des patients à risque vasculaire (diabétique, artéritique. . .) et doit être demandé au moindre doute artériel ou veineux.

Pied artériel Pied artéritique Le signe d’alarme de l’artériopathie chronique oblitérante des membres inférieurs est la claudication intermittente. La douleur apparaît brutalement après un certain périmètre de marche. Elle est aggravée à la marche rapide, à la montée d’une côte et par temps froid. À type de crampe, de broiement ou de brûlure intense, elle oblige le patient à ralentir le pas ou à s’arrêter. Elle cède complètement et réapparaît après la même distance. Elle siège généralement au mollet, parfois à la cuisse. La douleur de la plante du pied est moins fréquente et signe une atteinte distale, poplitée ou jambière. La jambe est glacée et marbrée. Les douleurs reprennent pour des distances de plus en plus courtes, puis deviennent progressivement permanentes. Lorsque la marche est peu usitée, les troubles peuvent être ressentis au piétinement, à la station assise prolongée (jambes croisées), à la conduite


Cas cliniques

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[(Phot_8)TD$FIG]

Photo 18 a. Aspect clinique de l’hallux. b. Aspect radiographique.

métabolique, le syndrome inflammatoire biologique est souvent modeste. Le cliché de 3/4 montre une encoche de la première tête métatarsienne en position juxta-articulaire, caractéristique d’une goutte ; les autres incidences paraissaient normales. 3. Le meilleur examen serait la recherche de microcristaux dans le liquide articulaire mais la 1re articulation métatarsophalangienne est une petite articulation et la quantité de liquide est souvent insuffisante pour être ponctionnée. Il convient d’éliminer une hypothyroïdie et une hyperparathyroïdie. 4. Pour soulager la douleur, l’AINS essayé étant insuffisant, il faut prescrire un autre AINS ou un corticoïde associé à la colchicine. Étant donné la récidive des poussées, l’arthrite et la lésion osseuse, un traitement de fond à vie se discute ; traitement indispensable en cas de tophus. L’insuffisance rénale du patient donne une préférence au febuxostat, en débutant par 80 mg par jour associé à la colchicine.


Index – de l’épine calcanéenne, 119 – de Morton, 137, 143, 209, 252, 259 – de Poems, 181 – de processus talien postérieur, 259 – de Raynaud, 180 – douloureux aigu du 2e espace intermétatarsien, 134 – du canal tarsien, 166, 174, 259 – du sinus du tarse, 155 – exostosant antérieur, 259 – fissuraire, 173, 259 – régional complexe, 227 Synostose, 75, 114, 139, 140, 154, 293 Synovite, 179, 181 Système calcanéo-plantaire, 12

339

– postérieur, 9, 10, 141, 174 Tiroir talien, 149 Tophus, 185, 230 Torsion tibiale, 275 Triangle de Käger, 157, 158 Triceps sural trop court, 36, 59, 121 Trochlée talienne, 152, 158 Trouble – statique, 91, 257, 283 – trophique, 32, 35, 47, 160, 191, 214, 217, 218, 227, 230 Tumeur, 179, 247 – glomique, 238

U T Tabès, 189, 232 Talalgie, 141, 143, 169, 170, 175 Talonnade, 119 Talonnette, 116, 119 Talus, 15, 35 Tarsalgie, 166 Tarse bossu, 142 TDM, 77, 78, 107, 134, 147, 152, 155, 159– 161, 178, 179, 191, 207, 228, 275, 276, 287 Tendinite, 184 Tendinopathie, 172, 175, 176, 271 Tendinose, 119, 177 Tendon calcanéen, 9 Ténosynoviopathie, 79, 166, 169, 174, 207, 210 Ténosynovite, 259, 272 Tens, 202, 211 Thermoformée, 87, 89, 272 Thévenard (maladie de), 231 Tibial, 13, 205

Ulcère, 215, 216, 230

V Valgus, 17, 121, 139 – calcanéen, 54, 140, 141, 207, 279 – du talon, 275 – interphalangien, 265 Varice, 220 Varus, 17 – calcanéen, 54 – du talon, 142 – équin, 35 Vascularite, 271 Verrue, 96, 243, 247, 257, 273 Voûte métatarsienne rétrocapitale, 88, 89, 138, 144

X Xanthomatose, 70


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