« Quinta-Urbana, la mécanique du sol » panser la Rive-Sud du Rio Tejo
« Quinta-Urbana, la mécanique du sol » panser la Rive-Sud du Rio Tejo
Coralie Barthe & Lauréline Lhuillier
Projet de Fin d’Étude encadré par Réza Azard & Nicolas Simon
École Nationale Supérieure d’Architecture de Versailles Session Juin 2017
Remerciements Nous tenons à remercier nos professeurs encadrant qui nous ont suivis et permis de vous présenter aujourd’hui ce Projet de Fin d’Etude, Réza Azard et Nicolas Simon. Mais aussi les personnes qui nous ont soutenues tout le long de ce semestre : nos familles respectives parents, frères, cousines, tantes, nos amis qui ont su nous épauler et sont restés attentifs à nos questions Alex, Amina, Camille, Constance, Jessica, Julien, Loris, Marie, Maéva, Mathilde et Roland. Ainsi que tous nos (nouveaux et anciens) compatriotes du Creusty Palace où nous avons élu domicile, Abel, Alex, Guilhem, Hongfei et Malcolm. Et puis, Loris sans qui ont aurait eu encore de longues heures de travail. Sans oublier toutes les personnes qui ont croisé notre chemin durant ce semestre et lors de nos voyages d’études. Un dernier remerciement à Thierry pour ses bonjours et aurevoirs journaliers.
Sommaire Analyse
Avant-propos
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« Quinta-Urbana, la mécanique du sol »
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Panser la rive sud du Rio Tejo
Urbanité Une Rive-Nord dense qui renoue avec le Tage Une Rive-Sud en attente regarde le Tage, impatiente
Mobilité Une Rive-Nord hyper-connectée Une Rive-Sud dépendante à la voiture
Morphologie Une Rive-Nord qui repousse les limites de la ville sur l’eau Une Rive-Sud à la nature persistante
Géographie
11 12 20
35 36 40
49 50 54
63
Une Rive-Nord aux atouts géopolitique de l’Estuaire Une Rive-Sud aux atouts environnementaux de l’Estuaire
64 68
Ouverture
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Lexique et Annexe
82
Bibliographie
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Avant-propos
Depuis ces dernières années, la belle Lisbonne a su renaître de ses cendres1 et tente de sortir petit à petit des crises simultanées2 qui ont touchées le Portugal. Son urbanisation est souvent questionnée et débattue afin d’en faire une ville accueillante, agréable et contemporaine. L’étalement de la ville dans les terres de la Rive-Nord est lui aussi mentionné, mais la Rive-Sud est absente des préoccupations actuelles. Face aux yeux émerveillés qui regardent la capitale, d’autres semblent empli de nostalgie lorsqu’ils détournent le regard plus au Sud. En interrogeant non plus une seule mais les deux rives du Tage, une dualité intrigante s’est dessinée. Parfois opposées, parfois liées, l’une protège l’autre et parfois l’une subordonne l’autre. D’époques en époques, d’années en années, cette dualité semble s’être affirmée et laisse place aujourd’hui à une réelle disparité. La Rive-Sud est enrôlée dans une dépendance à la Rive-Nord dont elle a du mal à se défaire. Cette confrontation territoriale ouvre la porte aux problématiques du versant Sud du Rio Tejo. Quel devenir pour l’ensemble de ses villes post-industrielles qui se meurent ? Comment réanimer la Rive-Sud endormie ? L’ensemble des interrogations dégagées dans l’étude du grand territoire se retrouve sur le site de la Quinta-Urbana3, bande végétale de la ville d’Almada délimitée afin d’apporter une réponse alternative aux problématiques actuelles. Pourtant défini comme l’un des territoires de la Rive-Sud le plus proche de Lisbonne (5 minutes de traversée en ferry suffisent pour l’atteindre), ni sa proximité ni sa sublime vue sur Lisbonne n’attire l’intérêt de la population ou des touristes. Témoin d’un passé glorieux, parsemé d’architectures remarquables, la bande déterminée comme échantillon à projet est enserrée entre le fleuve et la ville dense. En son sein une falaise s’érige, abrupte et infranchissable. La Quinta-Urbana s’étend sur plus de trois kilomètres de long et attend désespérément le jour de son renouveau.
de nombreux incendies se sont succédés suite au tremblement de terre de 1755, auxquels vient s’ajouter l’incendie qui dévasta le quartier central du Baixa-Chiado en 1988. 2 la crise industrielle qui touche l’Europe et le Portugal dans les années 70 puis la crise économique Européenne de 2008 qui enlise le pays dans les dettes. 3 La quinta est un terme portugais qui signifie une propriété rustique, entourée ou non d’arbres, de terres et généralement de maisons d’habitation. En Latin, quintana se réfère au «petit marché dans la ville». Son rapprochement avec le mot Urbana (urbain en portugais) implique une nouvelle échelle d’intervention et de nouveaux rapports. 1
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« Quinta-Urbana, la mécanique du sol » panser la rive sud du Rio Tejo
La Quinta-Urbana, c’est un lieu aux multiples visages. 60 hectares qui défient les limites du territoire. La falaise d’argile se développe comme un ruban laissant apparaître de fines tranchées, anciens lits de cours d’eau aujourd’hui asséchés. Ces érosions naturelles oscillent de haut en bas proposant de possibles parcours secondaires pour traverser le lieu. La végétation dense tente de se frayer un chemin sur cette topographie extravagante rongée par le vent marin, alors que des terrains agricoles prennent places sur les plateaux hauts là où l’air et l’exposition deviennent favorables. Un anneau minéral de 6,2 kilomètres encercle cette nature dévoilant l’expansion de la ville en arrière. En son sein, il retient les monuments remarquables qui ont participé à la naissance et à l’effervescence de la ville d’Almada. Une forteresse construite sous l’occupation musulmane de la péninsule ibérique au XIIème siècle, le Couvent do Seminario Maior de Sao Paulo construit au XVIeme siècle qui accueillait les fidèles de tout le Distrito de Sétubal, la propriété Casa da Cerca édifiée au XVIIeme siècle devenue un espace liant arts plastiques et botaniques, ainsi que le Cristo Rei sanctuaire religieux qui trône sur la falaise. Témoins d’une puissance, ces édifices ponctuent le versant haut du coteau. A partir du XVIIIe siècle, deux kilomètres dédiés à l’industrie surgissent sur la côte Sud du Tage. Lors de la période coloniale, le Tage devient un centre cosmopolite, carrefour des routes de l’Atlantique et de la Méditerranée, proche de l’Afrique et face à l’Amérique, sa position permet l’essor des échanges coloniaux puis internationaux. D’abord tourné vers le commerce alimentaire, des services de l’artisanat viennent densifier les bâtis du bord du fleuve au XIXe siècle puis, au XXe siècle se greffe les industries de constructions navales. Impulsé par l’arrivée de milliers de travailleurs durant l’apogée des chantiers navals, la ville d’Almada est poussée à se densifier massivement dans l’arrière des terres.
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C’est l’avènement d’un Age d’or, la transformation de la ville est lancée au milieu du XIXe siècle. La ville fleurit aux abords du site, brassant une multitude de classes sociales, de l’ouvrier aux familles d’investisseurs. Le trafic maritime et routier augmente nécessitant une expansion des réseaux et des transports sur les terres agricoles. Les nouvelles zones urbaines naissent si rapidement et si massivement dans l’arrière ville, que les ressources s’appauvrissent à grande vitesse. Les premières pénuries d’eau seront camouflées par la réussite des industries et le regain d’attractivité de la ville. Oui mais voilà, au milieu des années 70, la construction du pont de 25 Avril, la crise économique et la désindustrialisation généralisée au Portugal et en Europe viennent menacer l’artère côtière d’Almada. Dès 1980, les usines ferment les unes après les autres pour aboutir à son abandon total une décennie plus tard. De plans régulateurs aux tentatives de restructuration, la crise qui ne finit pas de sévir au Portugal enclave le site et la ville dans un cercle vicieux de délabrement continu. En 40 ans, l’espace s’essouffle, la population diminue, s’appauvrit et vieillit. Les nouvelles générations préfèrent se délocaliser dans les zones nouvellement urbanisées alors qu’Almada détient toutes les structures d’accueil, éducatives ou culturelles. Ces dix dernières années, des interventions ponctuelles ont pourtant pris place pour séduire à nouveau, mais l’entrée du site dans la Réserve Ecologique Nationale (REN) et dans la Réserve Agricole Nationale (RAN) est un frein pour la requalification du patrimoine bâti. La Quinta-Urbana reste à ce jour le berceau et la tombe d’une crise économique, sociétale et environnementale.
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URBANITÉ
URBANITÉ Def. Caractère de ce qui fait une ville
’’La Quinta-Urbana, territoire mis à l’écart, regarde la machine de Lisbonne qui lui fait face.‘’
Vue du Cristo Rei
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SINTRA
Étalement urbain : 1950
Étalement urbain : Aujourd’hui
Étalement urbain : 1850
Étalement urbain : 1980
LÉGENDE
172 120 habit ants 3 755 hab/km
OEIRAS
377 835 habit ants 1 195 hab/km
AMADORA
175 136 habit ants 7 368 hab/km
ALMADA
174 430 habit ants 2 478,7 hab/km
143 995habit ants 5 509 hab/km
ODIVELAS
LOURES
505 000 habit ants 162 000 véhicules 5066,4 hab/km
LISBONNE
205 054 habit ants 1 279 hab/km
SEIXAL
184 269 habit ants 1 691 hab/km
78 764 habit ants 2 330 hab/km
BARREIRO
MOITA
70 226 habitants 1 275 hab/km
MONTIJO
40 466 habitants 116 hab/km
PA L M E L A
58 222 habitants 126 hab/km
17 569 habitants 137 hab/km
ALCOCHETE
URBANITÉ
Une Rive-Nord dense qui renoue avec le Tage Campée sur la rive droite du Tage, Lisbonne a bravé les époques de manière remarquable. La ville se développe grâce à l’attractivité de son fleuve, elle grandit et se déploie le long de celui-ci. Durant la crise industrielle, la population se propage dans les terres sinueuses, la ville s’agrippe alors aux 7 collines à l’arrière du fleuve. S’étendant sur une superficie égale à celle de Paris, le tissu urbain apparait bien moins dense et plus disparate que celui de la capitale française. Chaque versant de collines laisse apparaître une densité urbaine différente, parfois dense parfois dilatée, des maisons qui se superposent aux immeubles posés systématiquement les uns aux côtés des autres. Cette diversité fait d’ailleurs de Lisbonne un paysage abstrait qui attire de plus en plus de touriste, attiré par l’authenticité que propose ses rues sinueuses. Lisbonne sait charmer ses promeneurs. Depuis ces dernières années, la politique de la ville se plie pour accueillir son public. De nombreux travaux de restructuration sont mis en place dans les quartiers historiques et un nouveau plan régulateur propose de redéfinir les berges du Tage.
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la Rive-Nord
Eric Fischer, Locals and Tourists #53, 2010 publications sur la toile : bleu - local, rouge - touriste, jaune-pas rĂŠpertoriĂŠ
16
URBANITÉ
Des zones programmatiques prennent place et viennent ponctuer la côte lisboète. Elles se définissent comme des îles urbaines car ne sont pas connectées au tissu urbain qui les entoure et gravitent autour du centre historique. Nous en avons répertorié deux sur la ville de Lisbonne, la première à Belém (au Sud) où les musées fleurissent et magnifient les environs des monuments déjà présents sur place et la seconde au Parc des Nations (au Nord) qui naît de l’exposition universelle de 1998 où, afin de démontrer la puissance Lisboète, de grands architectes sont convoqués pour théâtraliser les berges du Nord-Est de la ville. En leur sein, les artefacts de ces citées insulaires jouissent d’une relative autosuffisance. Ils se présentent comme des lieux dans lesquels il est possible de concentrer toute une série de services. Ces îles deviennent une source d’investissement et d’attractivité pour le tourisme, qui semble trouver dans ces espaces un autre visage de la magnifique Lisbonne.
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la Rive-Nord
SANTA CLARA 7 132 hab/km
OLIVAIS
LUMIAR
4 177 hab/km
7 241 hab/km
CARNIDE
PARC DES NATIONS
5 208 hab/km
3 864 h/km
ALVALADE 5 957 hab/km
MARVILLA 4 865 hab/km
SAO DOMINGOS DE BENFICA 7 702 hab/km
AREEIRO
AVENIDAS NOVAS
BENFICA
11 569 hab/km
7 232 h/km
5 605 hab/km
CAMPOLIDE 5 581 hab/km
ARROIOS
BEATO PENHA DE 5 177 h/km FRANÇA
14 860 h/km 10 320 hab/km
CAMPO DE OURIQUE AJUDA 5 422 hab/km
ALCANTARA
13 406 hab/km
2 750 hab/km
ESTRELA 4 375 hab/km
SANTO ANTONIO 7 943 hab/km
SAO VICENTE 7 708 hab/km
SANTA MISERI- MARIA MAIOR CORDIA 4 259 hab/km
5 956 h/km
BELEM 1 584 hab/km
DENSITÉ DE POPULATION données 2015, source aml.pt > 10 000 hab/km2 7 000 - 10 000 hab/km2 5 000 - 7 000 hab/km2 3 000 - 5 000 hab/km2 < 3 000 hab/km2
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URBANITÉ
Pourtant bien que ces îles attirent des foules le temps d’une journée, à la nuit tombée, elles se vident pour laisser place au silence. Le local n’habite pas ici, le foncier y est trop cher et principalement utilisé à des fins commerciales et touristiques. L’effervescence de ces espaces ne fait qu’accentuer les disparités avec les quartiers environnants. Le littoral du Tage en est l’exemple le plus significatif. Un ensemble d’entre-deux apparait, des espaces en attente où le local tente de vivre là où plus aucune activité n’est perceptible. La désindustrialisation a entraîné la délocalisation des industries dans les terres, conséquence : des façades barricadées, des anciens bâtiments abandonnés qui trônent encore comme de vieux vestiges. Dans ces espaces en latence, rares sont les visiteurs à s’y aventurer.
19
la Rive-Nord
20
URBANITÉ
Alors concentré en trois points stratégiques, le tourisme semble façonner la ville en la privant peu à peu de son authenticité. Directement victimes de la réussite du tourisme, les habitants sont repoussés hors des limites de la capitale après le rachat du patrimoine bâti des quartiers historiques par des investisseurs. Les loyers suivent la loi du marché touristique et ne cessent d’augmenter. La population ne peut suivre cette croissance hyperbolique et se voit alors chassée de sa ville. Dans l’obligation de quitter les rues qui les ont vu grandir, elle part s’exiler loin du touriste en quête d’une charmante escapade. Elle cherche alors à acquérir un nouveau logement non loin de la capitale qui accueille encore souvent leur lieu de travail. La Rive-Sud se place comme zone stratégique pour accueillir ces populations, mais elle n’arrive pourtant pas à attirer l’intérêt.
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SINTRA
Étalement urbain : 1950
Étalement urbain : Aujourd’hui
Étalement urbain : 1850
Étalement urbain : 1980
LÉGENDE
172 120 habit ants 3 755 hab/km
OEIRAS
377 835 habit ants 1 195 hab/km
AMADORA
175 136 habit ants 7 368 hab/km
ALMADA
174 430 habit ants 2 078,7 hab/km
143 995habit ants 5 509 hab/km
ODIVELAS
505 000 habit ants 162 000 véhicules 5066,4 hab/km
LISBONNE
SEIXAL
184 269 habit ants 1 691 hab/km
78 764 habit ants 2 330 hab/km
BARREIRO
MOITA
70 226 habitants 1 275 hab/km
MONTIJO
40 466 habitants 116 hab/km
PA L M E L A
58 222 habitants 126 hab/km
17 569 habitants 137 hab/km
ALCOCHETE
la Rive-Sud
Une Rive-Sud en attente regarde le Tage, impatiente Ces villes qui gravitent autour de Lisbonne semblent depuis la période post industrielle subir le naufrage de leur seule source de revenu. Polarités essentielles et existentielles courant du XIXe siècle à la machine lisboète, elles voient leur démographie exploser avec l’arrivée des familles de travailleurs. Résidences, écoles, hôpitaux, commerces ou cinéma voient le jour partout où les industries s’implantent. Le fleuve du Tage devient le berceau de nombreuses municipalités qui se construisaient aussi rapidement que les hommes arrivaient pour y faire quelques sous. Des barres de logements ouvriers aux quartiers pavillonnaires, chaque classe sociale trouvait son bonheur dans ces nouvelles zones urbaines. Mais personne ne pouvait prédire que le Tage deviendrait aussi la tombe de ces villes.
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URBANITÉ
Homme Femme
âge
âge
+
+
90
90
80
80
70
70
60
60
50
50
40
40
30
30
20
20
10
10
0
25
20
15
10
5
0 Homme Femme
5
10
15
20
25
en millier d’habitant
0
1000
800
600
400
200
0 Homme Femme
en millier d’habitant
200
400
600
Pyramide des âges à gauche Lisbonne, à droite fréguesia d’Almada et de Cacilhas source: pordata.pt, 2014
âge
Homme Femme
en centaine d’habitant
Population en (%) des personnes agées dans le Concelho d’Almada source: pordata.pt, 2014
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800
1000
en centaine d’habitant
la Rive-Sud
Almada s’expose comme l’exemple même des problématiques de dépendance à la capitale. Malgré sa situation privilégiée en face de Lisbonne, cette ville qui vivait de ses industries s’est éteinte au lendemain de la désindustrialisation il y a quarante ans de cela. Aujourd’hui, le château qui surplombe la falaise regarde tristement sur le versant Sud une ville qui s’essouffle. Sa population vieillit et a du mal à se renouveler empêchant toute relance d’une activité économique. L’ensemble des infrastructures sont abandonnées plongeant la ville dans un état de latence totale.
25
URBANITÉ
João Franco La traversée du Tage La sonnerie aiguë, qui indique le départ imminent du bateau et qui invite les voyageurs attardés sur le quai à monter rapidement dans l’embarcation, retentit en brisant le silence matinal rompu de temps en temps par le bruit des tasses qui se choquent sur une terrasse ou par le bruit de quelque mouette en quête de miettes de pain. Les deux créatures s’engagèrent sur la passerelle et montèrent sur le petit pont arrière, l’unique place d’où, lorsqu’on traverse le fleuve, on peut s’imaginer, le temps d’une cigarette, qu’on le longe jusqu’à son embouchure et que l’on pénètre dans l’océan. La cigarette était l’horloge intérieure du voyage : l’homme l’allumait aux premiers mouvements du bateau, la fumait silencieusement, lentement, régulièrement, en songeant. Quand les doigts qui la tenaient éprouvaient les premières sensations de brûlure, il aspirait une dernière et forte bouffée de tabac chaud, et jetait le mégot par-dessus bord. Il savait qu’il était arrivé et qu’il devait se dégager de sa rêverie. A quoi songeait-il pendant ces voyages quotidiens, personne ne le savait. Les employés l’avaient remarqué depuis plusieurs années, toujours à la même place, toujours dans la même posture. Quelquefois pourtant, il parlait après avoir fumé les derniers brins de tabac, il semblait s’adresser à son chien et lui dire : « Toi, tu ne pourras jamais comprendre, moi je me souviens. » Puis il sortait. A ce moment précis, il se redressa, tendit son corps, raidit ses jambes, lâcha la laisse du chien et se mit à marcher, ou plutôt à flâner le long du quai qui borde le Tage sur la berge de la colline d’Almada. Là, il écoutait ; son visage restait immobile, mais sa bouche s’ouvrait, parfois ses oreilles frétillaient : il entendait. Mélodie lointaine, tout se confondait. La musique que jouent les coques de bateaux en caressant les murets de pierres, pareil aux chants chinois, le grincement des cordes d’amarrage qui impriment dans l’atmosphère le rythme du flux et du reflux, le son de quelques vagues qui laissent un effet ondulatoire à chaque pas. Quiconque marche sur ce quai ne peut pas ne pas sentir le sol tanguer : l’homme le savait parfaitement. Il restait ainsi un long moment, attendant une saturation. Puis, comme par magie, quelques sons sortaient de sa gorge. D’abord des sons inarticulés, rauques, sans consistance. Peu à peu la voix s’affinait, s’éclaircissait, se rajeunissait ; les sons se transformaient en mots, les mots en phrases, les phrases en vers. Il chantait.
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la Rive-Sud
La rupture est si dure que la ville haute semble même tourner le dos à la côte qui lui a pourtant permis de rayonner des années auparavant. Les bâtis industriels sont en bernes, le quai qui les longe s’érode sous l’eau des marées qui accueillent les immenses bateaux de croisières venus passer la nuit dans le nouveau terminal de Terreiro do Paço (à Lisbonne). Dans un article datant du 26 Avril 2017, un ancien résident du quartier de l’Alfama à Lisbonne faisait entendre, que Cacilhas (sous commune d’Almada) avait été la meilleure alternative pour se reconstruire après avoir été forcé de quitter son logement dû au rachat de son immeuble. Sept familles auraient élu domicile à Cacilhas depuis ces derniers mois. La mise à l’écart des uns, peut-elle redonner espoir aux oubliés de la Rive-Sud ?
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la Rive-Nord
Lisbonne du Pont du 25 Avril
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la Rive-Sud
Almada du Pont du 25 Avril
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la Rive-Nord
Promenade au Parque das Naรงoes
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la Rive-Sud
Ancienne plateforme de la Compagnie Portugaise de PĂŞche, Olho de Boi
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la Rive-Nord
Museu da Electricidade, quartier de BelĂŠm
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la Rive-Sud
Ancien Club Nautique, Quinta do Ginjal
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la Rive-Nord
Terminal de Croisière, vue de l’Alfama
34
la Rive-Sud
Pêcheurs locaux sur les pontons d’Arealva
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MOBILITÉ Def. 1 Caractère de ce qui se déplace par rapport à un lieu, à une position. Def. 2 Caractère de ce qui varie, de ce qui est en mouvement.
‘’ La Quinta-Urbana, orpheline d’une ville qu’elle a animée durant de longues années. ’’
Vue du Mirador do Castelo
la Rive-Nord
Francisco Rocchini, Almada concelho Praça do Comércio e Rio Tejo Album sobre Lisboa e Cintra, 1868
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MOBILITÉ
La centralisation des réseaux A l’arrivée des beaux jours, les bateaux de croisière créent une valse sur le fleuve du Tage en allant et venant, déposant à chaque passage des milliers de visiteurs. S’entremêlent à ceux-ci les chalutiers qui apportent leurs butins aux commerçants lisboètes ainsi que les Ferrys qui transportent les usagers de part et d’autre du rivage. Les portes conteneurs font écho à un passé industriel glorieux où l’estuaire était encore un port puissant et effervescent. À la fin du XIXème siècle en raison de l’essor du commerce et des échanges, le trafic fluvial s’intensifie fortement obligeant les villes à proposer des itinéraires de substitution dans les terres. Le réseau routier prend de l’ampleur pour permettre de connecter les différents pôles attractifs. Simultanément apparaît la première ligne ferroviaire du pays qui s’étend sur toute la rive nord du Tage reliant Lisbonne à Cascais. Des arrêts sont créés aux emplacements stratégiques des différentes industries qui ont alors le plein pouvoir sur le fleuve.
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la Rive-Nord 6 5
1
2
3
4 BELEM
1
fleuve
ALCANTARA
2
fleuve
3
SANTOS
fleuve
port commercial
piéton
parking
cycliste
piéton cycliste
piéton cycliste
végétation jardin esplanade musée
entrpôts parking
voies x2 parking hangars
piéton
route
voies x2
voies ferrées voies ferrées
voies ferrées voies x2
trottoir piéton
trottoir musée
jardin
route
piéton
logements
bureaux
logements
route tram route trottoir musée
BELEM PLACE PRACA DU DACOMMERCE COMERCIO 4
ALCANTARA XABREGAS-GRILO-BEATO BEATO 5
SANTOS PARQUE P ARC DAS DES NACOES NATIONS
fleuve
fleuve
fleuve
piéton cycliste route promenade
port commercial
promenade
place
entrepôts esplanade
route barrière friche anciens rails muret piéton
restaurants
cycliste 2 sens
tram / bus route
jardin
route
trottoir route
cycliste piéton
bâtiments
bâtiments
trottoir
bâtiments
40
6
MOBILITÉ
La capitale devient une plateforme d’échange et le front maritime s’épaissit. Les bandes d’infrastructures se succèdent : industries et entrepôts, voies des réseaux ferrés, nouvelles routes, pour arriver jusqu’au front bâti qui s’agrippe aux collines. La désindustrialisation qui commence quelques années plus tard, amènera l’abandon du rivage. Les nombreuses crises qui suivent cette période ne permettent pas la requalification de cette bande qui devient alors déserte. Aujourd’hui, la promenade lisboète reste ponctuée de friches séparées de la ville par des réseaux d’infrastructures. Mais les nouveaux plans directeurs de la ville questionnent le littoral et propose petit à petit de renouer avec les berges de manière plus douce (promenade, parc, voie cyclable...). A partir des années 70, les industries présentes sur le fleuve laissent place à des activités du secteur tertiaire qui se délocalisent dans les terres du Nord. Le réseau routier est alors amené à se densifier pour reconnecter les travailleurs aux entreprises de services.
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MOBILITÉ
LISBONNE 162 000 INTRA-MUROS + 430 000 /JOUR
PONT VASCO DE GAMA 1998 POUR L’EXPO ‘98 LE PLUS LONG D’EUROPE
470 000 ENTRANT/JOUR 47 000 SORTANT/JOUR
52 000 VÉHICULES/JOUR ENTREE: 2,65 - 6,15 €
PONT DU 25 AVRIL 1966 RÉSEAU VIAIRE ET FERROVIAIRE 330 000 VÉHICULES/JOUR ENTRÉE 2,35 - 8,45 €
Mouvements pendulaires entre les Rives FLUX ENTRANT = 470 000 PERS/JOUR FLUX SORTANT =
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47 000 PERS/JOUR
la Rive-Sud
Une dépendance certaine à la voiture La Rive-Sud supporte mal la désindustrialisation. Malgré son retard au départ vis-à-vis de son développement urbain, les industries de sa côte lui avaient apporté un nouveau dynamisme qui fît croître les villes. La population vivait alors la plupart du temps dans la ville même qui lui avait offert un emploi entraînant un replis sur elle-même ne la poussant pas à développer son réseau viaire interne. A l’échelle de la Quinta Urbana, les connexions aux réseaux de transport de la ville sont rares. Ici la promenade le long des quais est parsemée de voitures arrêtées sur les rares pontons qui s’érigent encore sur l’eau. La nature dissuade les interventions humaines, l’érosion effrite la falaise et le vent transporte le sable à travers les petits pavés des rues. L’escalier du Boca do Vento est redevenu caduc, six ans après sa remise en état. A quoi bon ? Le site à l’abandon ne requiert plus d’accessibilité particulière. L’écoulement des eaux et la végétation reprend, dès lors, tous ses droits.
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MOBILITÉ
Carte des transports en commun dans le Région de Lisbonne Bus (Carris et TST), Metro, Comboios, Ferry
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la Rive-Sud
Deux infrastructures majeures auxquelles s’ajoute l’autoroute périphérique de Lisbonne, viennent bouleverser le quotidien des populations enclavées de la Rive-Sud: la création en 1966 du Pont du 25 Avril1 qui leur donne un accès direct aux activités tertiaires de la Rive-Nord, puis, en 1999, la mise en œuvre du plus long pont d’Europe, le Pont Vasco de Gama, lui reconnecte les deux rivages un peu plus à l’Est. Ce désenclavement pousse la population active à traverser le fleuve chaque jour et ces liaisons accentuent la dépendance de la Rive-Sud à la capitale. Les réseaux viaires et ferrés mis en place pour accéder à la capitale font exploser l’urbanisation au Sud dans les terres jusqu’à Sétubal. Chaque jour le brouhaha urbain du va et vient des travailleurs rythme les journées autour de Lisbonne. Plus des 157 trains par jour connectent les deux rives et les ponts accueillent environ 350 000 automobilistes par jour. Les réseaux sont saturés et désengorer le centre-ville devient indispensable. Afin de dissuader les travailleurs d’utiliser leurs voitures pour entrer dans la capitale, un onéreux péage est imposé pour entrer dans la capitale. S’ajoute à cela une loi interdisant la conduite de véhicules trop polluants à l’intérieur du centre-ville2, mais malgré ces mesures le trafic reste toujours aussi compact. Les réseaux en reliant physiquement les deux rives ne fait que mettre en lumière la dépendance de la Rive-Sud pour sa rive opposée. Les municipalités du Sud doivent trouver des alternatives pour palier à cet exode quotidien. L ’amélioration des réseaux de transport en commun est une variable sur laquelle elles peuvent jouer. Mais l’option la plus efficace reste de redonner à leur population une attractivité locale afin que leurs habitants puissent y rester pour travailler.
1 2
nom donné après la Révolution des Œillets du 25 Avril 1974. actée en 2015
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la Rive-Nord
Franchir les infrastructures à Alcantâra
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la Rive-Sud
Obsolescence des connections à Olho de Boi
47
la Rive-Nord
ArrivĂŠe du ferry Ă Cais de Sodre, 8:15 du matin
48
la Rive-Sud
ArrivĂŠe du ferry Ă Cacilhas, 8:40 du matin
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MORPHOLOGIE Def. 1 Science, étude des formes. Def. 2 Partie de la géomorphologie qui s’intéresse aux formes du relief et de l’érosion.
‘’ Le relief extravagant de la Quinta-Urbana met en scène la nature persistante se heurtant à la ville en attente. ’’
Vue du sur les jardins ouvriers, Quinta d’Almaraz
la Rive-Nord
EXPANSION DE LA VILLE DE LISBONNE sur l’eau et dans les terres XVIIème siècle XIXème siècle XXème siècle
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MORPHOLOGIE
Une Rive-Nord pousse les limites de la ville sur l’eau Lisbonne s’étend, s’étale sur son fleuve et dans l’arrière des terres poussée par la croissance de ses industries. Sur l’eau, les rives du Rio Tejo sont une véritable interface pour l’activité industrielle depuis le XVIIIème siècle jusqu’au milieu du XXème siècle. Sur une longueur de plus de 12 km s’étende les docks, les quais, les bassins spécialisés : bateaux de pêche, grands paquebots, lignes d’Outre-Mer, cabotage de l’estuaire... La topographie de son fleuve moins prononcée de ce côté du rivage a permis une exploitation des berges. La Rive-Nord s’avance et gagne du terrain sur l’eau pour accueillir les industries portuaires. Au fil du temps, l’Homme a su façonner la limite entre l’eau et la terre pour l’adapter à son activité. .
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la Rive-Nord
Fernando Pessoa – Ombres et lumières, 2 : le matin Dans la brume légère de ce matin de mi-printemps, la Ville Basse se réveille, encore engourdie, et le soleil se lève avec une sorte de lenteur. Il règne gaieté paisible dans cet air où l’on sent encore une moitié de froid, et la vie, au souffle léger de la brise qui n’existe pas, frissonne vaguement du froid déjà passé – au souvenir du froid plus que du froid en soi, et par comparaison avec l’été proche plus qu’en raison du temps qu’il fait. Les boutiques ne sont pas encore ouvertes, sauf les petits cafés et les bistrots, mais ce repos n’est point torpeur, comme celui du dimanche ; il est simplement repos. Un blond vestige flotte en avant-garde dans l’air qui peu à peu se révèle, et l’azur rosit à travers la brume qui s’effiloche. Un début de mouvement s’amenuise par les rues, on voit se détacher l’isolement de chaque piétons, et aux rares fenêtres ouvertes, tout làhaut, quelques fantômes matinaux apparaissent aussi. […]
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MORPHOLOGIE
Sur la terre, s’étale également la capitale Lisboète. La population qui se densifie à cette époque cherche à se loger au plus près de ces activités. Elle se construit des logements tant bien que mal sur le relief bien particulier de la ville de Lisbonne. Domptant ainsi la topographie, l’urbanisation s’étend vers l’arrière des terres. Au-delà de ses limites administratives, la ville se poursuit. En amont, des établissements industriels s’établissent au milieu de cultures maraîchères, qu’ils anéantissent ou qu’ils repoussent plus loin. En aval, vers l’Atlantique, dans la partie appelée depuis quelques années Costa do Sol, se succèdent des plages ensoleillées, abritées des vents du Nord, qui reçoivent pendant l’été la population citadine aisée attirée par l’attrait maritime. Parallèlement les rapports de Lisbonne envers son fleuve ont évolué. A l’époque de l’industrialisation le fleuve nourrit, enrichi, élève la ville au rang de puissance mondiale. Aujourd’hui c’est la ville qui soigne son fleuve, en invitant les visiteurs à prendre la voie de l’eau pour arriver, transiter, se balader.
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MORPHOLOGIE
Rive Sud du Rio Tejo Archive militaire, configuration du terrain compris entre Pontal da Cacilhas et Praia da Costa, 1810
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la Rive-Sud
La nature persistante En face, le schéma est bien différent, sur la Rive-Sud le relief est plus contraignant et contient dans ses interstices des villes qui se densifient. La topographie extravagante protège la rive d’un développement urbain massif. Ici, la nature se donne en spectacle. Foisonnante et incontrôlable, la végétation et la morphologie du sol protègent la Nature de quelconques activités néfastes de l’Homme. La faune et la flore sont préservées dans ce morceau de territoire qui fut contraignante pour l’activité humaine. Le relief de ce rivage tombant brusquement dans le fleuve fait dévaler des cours d’eau le long de la pente. Rassemblés par les travaux des hommes pour former un approvisionnement en eau potable intarissable, ces cours d’eau ont constitué une source vitale. Les bateaux venaient se ravitailler à cette source, s’offrant alors une pause dans leur long périple. Aujourd’hui, Fonta de Pipa, la fontaine d’Olho de Boi, est asséchée et voit ses abreuvoirs se remplir seulement durant la période humide.
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MORPHOLOGIE
Luis de Camoes Sonnets
XXXIX.
XXXIX.
A fermosura desta fresca serra
L’admirable fraîcheur de ces montagnes,
E a sombra dos verdes castanheiros,
Le demi-jour sous les verts châtaigniers,
O manso caminar desdes ribeiros,
Le lent cheminement de ces ruisseaux
Donde toda a tristeza se desterra;
D’où toutes les tristesses sont bannies,
O rouco som do mar, a estranha terra,
Le bruit sourd de la mer, l’étrange terre,
O esconder do sol pelos outeiros,
Le coucher du soleil sur les collines,
O recolher dos gados derradeiros,
Le retour au bercail des troupeaux attardés, Des nuages épars l’inoffensive guerre,
Das nuvens pelo ar a branda guerra; Enfim tudo o que a rara Natureza
Enfin, tout ce que m’offre la Nature,
Com tanta variedade nos ofrece,
Si singulière en sa diversité,
Me está se não te vejo magiando.
M’est importun si je ne te vois pas.
Sem ti, tudo me enjoa e me aborrece;
Sans toi, tout me chagrine et m’impatiente ;
Sem ti, perpetuamente estou pasando
Sans toi, je suis perpétuellement
Nas mores alegrías mor tristeza.
Au plus fort de la joie dans la pire tristesse.
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la Rive-Sud
Passé un temps, les industries du rivage qui faisaient vivre les villes à l’arrière-pays disparurent avec la désindustrialisation. Aujourd’hui encore sur cette rive, le secteur tertiaire a du mal à trouver sa place et à se développer. La pêche et l’agriculture ouvrières sont les seules activités locales sur la Rive-Sud qui persistent à la crise et qui permettent encore une certaine autonomie à l’échelle de l’individu. Face à la machine de Lisbonne, ces micro-activités liées directement aux ressources mises à disposition par le territoire, ne connaissent pas, elles, de pénurie. La morphologie de l’Estuaire donne à chacune des rives des atouts différents qui forgent deux identités propres. Le rivage nord, par son littoral peu découpé a pu façonner son rivage et l’adapter aux activités commerciales. La RiveSud a tenté par le passé de développer des activités industrielles et artisanales en se saisissant de l’activité du fleuve. Mais le Tage ne lui a pas facilité la tâche, le territoire somptueux qu’il dévoile a été un frein à son développement. Aujourd’hui en attente, la Rive-Sud post-industrielle détient, probablement sans en être tout à fait consciente, les ressources nécessaires à son renouveau. La question locale et le développement durable seront-ils à l’ordre du jour ?
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la Rive-Nord
Quartier de lâ&#x20AC;&#x2122;Alfama, Lisbonne, 1944
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la Rive-Sud
Quartier pavillonnaire, Almada, 1940
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la Rive-Nord
L’industrie s’avance sur l’eau à Alcantâra
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la Rive-Sud
Le bâti cotoie le relief à Olho de Boi
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GÉOGRAPHIE Def. Science qui a pour objet la description de la Terre et en particulier l’étude des phénomènes physiques, biologiques et humains qui se produisent sur le globe terrestre.
‘’ La Quinta-Urbana est un véritable témoin du fleuve du Tage générateur de richesses. ’’
Vue du Cais do Ginjal
la Rive-Nord
José Saramago L’arrivée au port Ici la mer s’achève et la terre commence. Il pleut sur la ville blafarde, le fleuve charrie des eaux limoneuses, les rives sont inondées. Un bateau noir remonte le courant sombre, c’est le Highland Brigade qui vient accoster au quai d’Alcantara. Vapeur anglais de la Malle royale, il fait la navette entre Londres et Buenos Aires et traverse l’Atlantique d’un bord à l’autre, relâchant toujours dans les même ports, La Plata, Montevideo, Santos, Rio de Janeiro, Pernambuco, Las Palmas, dans cet ordre ou dans l’autre et, s’il ne coule pas pendant la traversée, il touchera encore Vigo et Boulogne-sur-Mer, avant de s’engager enfin sur la Tamise comme il s’engage maintenant sur le Tage, à chaque fleuve sa ville.
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GÉOGRAPHIE
Les atouts géopolitiques de l’Estuaire Dès le XIIème siècle, Lisbonne a su tirer parti du Tage pour développer son activité commerciale. Jouissant d’une position bien particulière, la ville prend place dans un entre-deux où le fleuve, ayant déjà parcouru 1100 km depuis sa source en Espagne, se dilate avant de se jeter dans l’Océan Atlantique. A ce point stratégique, il combine les avantages d’une baie repoussant les vents du large et d’un relief permettant de se hisser en hauteur pour surveiller les allées et venues dans l’estuaire. Plus exceptionnel encore, l’embouchure qui donne accès à l’estuaire s’étend telle une mer intérieure proposant un port naturel protégé. Les profondeurs atteignant jusqu’à 48 mètres ont permis d’accueillir tout types d’embarcation, de la barque de pêcheurs aux plus grands navires de l’époque coloniale, jusqu’à très récemment, le colossal MSC Meraviglia*. (le MSC Meraviglia est le plus grand navire de croisière d’Europe en 2017 avec ces 315 mètres de long).
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la Rive-Nord
Lit et ramifications du Rio Tejo Lâ&#x20AC;&#x2122;influence du fleuve dans les terres portugaises et espagnoles
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GÉOGRAPHIE
Navigable sur l’ensemble de son cours, le Tage était devenu jusqu’au milieu du XXème siècle un axe commercial et industriel fluvial majeur. La déferlante de navires qui le traversait ne fît qu’accroître l’influence et la puissance de Lisbonne. Devenu centralité rayonnante de la péninsule Ibérique, sa position géographique face à l’Afrique et à l’Amérique en a fait un point stratégique maritime. L’activité commerciale de la ville se développe grâce aux nouvelles conquêtes de l’époque coloniale, modelant ainsi l’expansion de la ville de manière linéaire le long du rivage. Aujourd’hui, une promenade tente de se frayer un chemin à travers ces industries, dévoilant des berges et placettes aménagées à la contemplation du fleuve. Lisbonne a su tirer parti de son positionnement au sein de la mer de Paille pour développer son économie et mettre en place une géopolitique forte mais le territoire détient encore des atouts insuffisamment exploités.
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GÉOGRAPHIE
Fernando Pessoa – Ricardo Reis Poetes de Lisbonne
Uns, com os olhos postos no pasado
Certains, les yeux rivés sur le passé
Uns, com os olhos postos no pasado,
Certains, les yeux rivés sur le passé,
Vêem o que não vêem; outros, fitos
Voient ce qu’ils ne voient pas ; d’autres, fixant
Os mesmos olhos no futuro, vêem
Sur le futur le même regard, voient
O que não pode ver-se
Ce qui ne peut se voir.
Porque tão longe ir pôr o que está perto -
Pourquoi si loin chercher ce qui est près -
A segurança nossa ¿ Este é o dia,
Notre sécurité ? Là est le jour,
Esta é a hora, este o momento, isto
Là est l’heure, là est l’instant, voilà
E quem somos, e é tudo.
Qui nous sommes, c’est tout.
Perene flui a interminável hora
Pérenne coule l’heure interminable
Que nos confessa nulos. No mesmo hausto
Révélant notre néant. Dans le souffle
Em que vivemos, morremos. Colhe
Où nous vivons, nous mourrons aussi. Cueille
O dia, porque és ele.
Le jour, tu es le jour.
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la Rive-Sud
Les atouts environnementaux de l’Estuaire La Rive-Sud apparait comme un territoire de potentialités. Sur cette Rive, le fond marin n’était pas assez profond pour permettre de dévier l’itinéraire des matelots durant l’époque coloniale. La navigation y était périlleuse surtout que des zones marécageuses et des cordons de sable se laissaient deviner près des côtes. Les activités agricoles battaient alors leur plein dans ce territoire difficile d’accès. On passait de Quinta en Quinta de la même manière que de commerces en commerces sur la Rive-Nord. Avec l’industrialisation, des villes apparaissent malgré tout ponctuellement le long de la côte, là où la nature le permet, les berges ne permettant pas aux industries de se développer massivement. Au XVIIIème siècle, l’implantation d’industries et le travail agricole qui dessine le sol dans les terres, permettent à ces villes de rendre la Rive-Sud dynamique. Le relief y est bien plus abrupt que sur la Rive-Nord, les vents marins sont venus façonnés la falaise, rendant celle-ci parfois complexe à urbaniser. A Almada, on aperçoit très bien que la ville a dû s’adapter à ce relief, dévoilant une bande végétale enserrée entre le fleuve et la ville. Ce développement restreint permet, aujourd’hui, la sauvegarde de paysages naturels sur le site.
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GÉOGRAPHIE
juin 20,2°
SAISON SÈCHE
Alcachote
N température [°C]
239 h
Almada
5 mm 69 mm
mars
Lisbonne
O
0
11,4°
S
SAISON HUMIDE
ensoleillement
E
157 h
108 mm
[heure]
sept.
18,5°
précipitation [mm]
déc.
Conditions climatiques du Tage températures, pécipitations, ensoleillement et vents dominants
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la Rive-Sud
L’Estuaire est aussi une source de richesses naturelles abondantes. Ses paysages naturels sont marqués d’amont en aval par l’omniprésence de l’eau. Y abondent les éléments nutritifs grâce aux dépôts des alluvions, propices à la croissance de la faune et de la flore et créent un écosystème à la biodiversité remarquable. La rencontre entre l’eau douce du fleuve et de l’eau salée de l’océan Atlantique crée une dynamique particulière dans l’estuaire. Comme si l’océan rentrait dans les terres, les marées (pouvant atteindre 4 mètres) et l’eau saumâtre constituent des facteurs primordiaux pour l’écosystème. Des plans de protections voient le jour afin de préserver cet écosystème. La ville d’Almada inclut dans son plan directeur municipal deux mesures de protections : la Réserve Ecologique Nationale, le R.E.N (créée en 2004) et la Réserve Agricole Nationale R.A.N (créée en 1993). Toutes deux imposent des mesures de protections des ressources hydriques et des sols afin de réduire les risques d’érosion du littoral, les inondations et l’enlisement des terres. L’usage des sols est sensiblement contrôlé. Pour autant, l’implantation d’activités sur ces sites n’est pas prohibée si elle ne vient pas perturber l’environnement. Le site de la Quinta-Urbana s’inscrit dans ces deux réserves.
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GÉOGRAPHIE
Carte hydrographique de l’Estuaire du Tage, 1964-1974 Source : Hidrografico Marinha Portugal
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la Rive-Sud
L’environnement de l’estuaire est très sensible et peut très vite être mis en danger par les activités de l’Homme. Une réserve naturelle, la Reserva Natural do Estuario do Tejo, protège l’équilibre de l’estuaire. Le site de 14 192 ha est la zone humide la plus dense du pays et l’une des dix plus importantes d’Europe. Ce statut lui a été conféré pour la protection des oiseaux aquatiques migrateurs qui accourent ici. La richesse naturelle de l’estuaire du Tage est reconnue à l’échelle européenne et internationale, ce patrimoine est intégré au réseau européen NATURA 2000, et de ce fait, bénéficie de mesures de protection et de gestion spécifiques. La géographie du territoire disparate d’une rive à l’autre entraine le développement d’usages aux caractères différents. Elle permet au sud, des activités locales liées à la navigation, la pêche et l’agro-alimentaire et au nord, des activités internationales, ports et échanges commerciaux. Leur rayonnement diffère, c’est pourquoi la Rive-Sud doit faire son possible pour redevenir indépendante. Comment la Rive Sud peut-elle retrouver une autonomie ?
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la Rive-Nord
Ribeira das Naus, terrasse du Kiosque
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la Rive-Sud
Promenade, Quinta do Ginjal
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la Rive-Nord
Terminal Multiusos do Beato
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la Rive-Sud
Jardins ouvrier, Quinta de Almaraz
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Ouverture
A l’inverse d’un projet qui viendrait redensifier les berges par une urbanisation massive et qui, en modifiant le territoire de manière trop brutale, viendrait rompre l’équilibre environnemental du site, le projet propose de travailler avec les ressources territoriales locales. En harmonie avec son environnement, il participe à la protection et à la valorisation du territoire. Il pourrait, de ce fait, permettre de débloquer des fonds Européens dans la mesure où il favorise le développement durable. La faiblesse de l’économie locale liée à la protection particulière de l’environnement qu’impose les plans d’urbanisme amènent à interroger les ressources directes locales issues de l’eau et de la terre. Comment faire du concret avec peu de moyens dans un projet urbain ? En s’appuyant sur les traditions locales, la Quinta Urbana tente de respecter le lieu qu’elle souhaite révéler. Les traditions constructives et artisanales au Portugal sont reconnues bien au-delà du pays. Le sol est un élément auquel les portugais ont toujours été sensibles. À Lisbonne, les petits pavés de granit qui couvrent l’intégralité de la capitale à la manière d’une mosaïque impressionnent chacun et chacune. Sur la rive sud, plus agricole, c’est le travail de la terre est privilégié en raison des conditions climatiques. Aussi, dans un site où les débris des bâtiments abandonnés jonchent le sol, la récupération de ces résidus pour le recyclage s’impose naturellement. Le sol sera le premier outil fédérateur du projet. Par le biais d’une reterritorialisation, la Quinta-Urbana participe à la valorisation du territoire et de son milieu en les rendant compatibles avec le développement économique. En mettant en relation les trois composantes du territoire : le milieu végétal, le milieu minéral (patrimoine bâti) et le milieu aquatique, elle souhaite faire de ce site unique, une île productive.
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Lexique et Annexe MARITIME Berge : chemin, route longeant un cours d’eau. Bord d’un cours d’eau en pente souvent escarpé, formé naturellement ou artificiellement Côte : zone maritime entre rivage et large Embouchure : similaire à Estuaire, partie d’un cours d’eau qui s’ouvre sur la mer Estran : zone tantôt couverte tantôt découverte par la marée Estuaire : partie en aval d’un fleuve, large embouchure où la marée et les courants se font sentir Fleuve : voie naturelle aboutissant à la mer, facilitant l’entrée dans le continent Littoral : zone de contact entre l’hydrosphère, l’atmosphère et la lithosphère Marnage : amplitude de la marée Quai : retient les berges d’une rivière et facilite l’accostage fluvial Rive ou rivage : bande de terrain qui borde une étendue d’eau GÉOGRAPHIE Escarpement : pente raide et abrupte Interface : surface de contact entre deux milieux Percée : ouverture, trouée naturelle ou artificielle dans un paysage. Ouverture dans un espace urbain afin d’y dégager un point de vue ou y créer un passage Promontoire : pointe de terre qui s’avance sur la mer. Relief élevé qui domine un autre relief moins élevé Relief : ce qui fait sailli sur une surface URBAIN Frontière : limite qui naturellement détermine l’étendue d’un territoire ou qui par convention sépare deux états Infrastructure : Support, base indispensable à l’édification, au maintien ou au fonctionnement d’une structure concrète ou abstraite. Ensemble des installations, des équipements permanents qui conditionnent le fonctionnement d’un organisme, d’une région ou d’un pays Limite : ligne qui détermine une étendue. Chose ayant un développement spatial. Ligne qui sépare deux étendues. 84
RÉGION
DISTRITO
SOUS-RÉGION
division administrative de l’Etat central, représenté par un gouverneur. Ne correspond pas à la limite des régions
CONCELHO = municipalité, division administrative, pouvoir administratif
FREGUESIA Le plus petit échelon de collectivité territoriale
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QUINTA(-urbana) une propriété rustique, entouré ou non d’arbres, de terre et généralement de maisons d’habitation
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Sommaire Projet
« Quinta-Urbana, la mécanique du sol »
88
Panser la rive sud du Rio Tejo
L’aire nautique, CPP, Olho de Boi
95
Les bains publics, Cais do Ginjal
103
La conchyliculture, Cais do Ginjal
111
La criée, Quinta da Arealva
119
L’école horticole, Chateau Almaraz, Almada
127
L’épuration des eaux, Cristo Rei, Pragal
135
Le maraîchage, Parry & Son, Cacilhas
143
Le marché, Seminario Maior de Sao Paulo, Almada
151
L’oliveraie, Cristo Rei, Pragal
159
Annexe
166
Bibliographie
170
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« Quinta-Urbana, la mécanique du sol » panser la rive sud du Rio Tejo
Autour de la capitale Lisboète, l’urbanisation s’est étalée et la Rive-Nord s’est densifiée. En face sur l’autre rive du Tage, les villes se vident et l’activité s’éteint. Ces villes dépendent entièrement de l’activité économique de Lisbonne. Les flux pendulaires quotidiens entre les deux rives posent les problèmes de saturation du trafic, de l’engorgement de la capitale et de la perte d’autonomie de la Rive-Sud. Comment panser la Rive-Sud tu Tage ? Lisbonne a développé son activité en créant des centres d’attractivités programmatiques. Trois zones d’attraction éloignées les unes des autres se dessinent. Semblables à des îles qui, déconnectées de leurs contextes recréent un monde en soi, elles réactivent les aires urbaines le long de Tage. Chacune soulève par des programmatiques propres une activité économique qui se répercute au-delà de l’ ‘’île’’ même. L’île urbaine est donc un moyen afin de redynamiser une aire urbaine. En regardant la Rive-Sud depuis Lisbonne, une frange de territoire escarpé, envahi par la végétation, se distingue. Cette frange est contrainte par les limites physiques du territoire : entre la limite côtière du fleuve et la limite du front urbain sur le plateau haut, en son sein, la falaise s’érige comme une troisième barrière. ‘’L’île’’ est géographiquement le lieu le plus proche et le plus accessible depuis la capitale. Cinq minutes en Ferry suffisent pour passer de l’une à l’autre. Cette proximité n’amène pourtant pas les travailleurs de la capitale à déménager sur la rive opposée et la population de la Rive-Sud ne se renouvèle pas. Cette île qu’on nommera la Quinta-Urbana propose une nouvelle alternative pour rendre l’autonomie à la ville post-industrielle d’Almada. C’est un échantillon de territoire qui fait l’hypothèse d’un renouveau par un processus de déterritorialisation. Située à l’embouchure de l’Estuaire la Quinta-Urbana fait partie d’un écosystème unique et fragile. Protégée par des règles de protection de l’environnement (R.E.N Réserve Ecologique Naturelle et R.A.N Réserve Agricole Naturelle) les usages des sols sont réglementés. Pour renverser la tendance actuelle qui fait du milieu naturel unique un frein au développement, la Quinta-Urbana propose d’exploiter les richesses du territoire du site.
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En se basant sur la réflexion des artistes du Land Art, de Robert Smithson, Robert Morris ou encore Nils Udo, la Quinta-Urbana propose une nouvelle lecture du territoire grâce aux éléments présents sur le site. Leur travail, souvent politisé, questionne sur les pratiques et les décisions prises dans notre société. En travaillant avec le sol et les matériaux présents sur le site (bois, terre, pierres, sables, roche, débris), la Quinta-Urbana propose de réutiliser des éléments pour l’aménagement de nouveaux sols. Afin de valoriser l’identité du lieu, est instauré un système de relation vertueuses entre les trois composants du territoire: le milieu naturel, le milieu construit et le milieu humain. Le milieu naturel correspond au relief escarpé, à sa végétation dense qui protège la falaise et au fleuve qui la borde. Le milieu construit se réfère aux quelques bâtiments publics et de logements parsemés sur le site. Le milieu naturel se retrouve dans chacune des situations de la Quinta-Urbana mêlant l’eau, le végétal et le minéral. Ces trois éléments naturels intégrés dans les lieux remarquables identifiés, suggérent de nouvelles situations, de nouveaux usages. Ce travail fait référence aux recherches de Luis Barragan (architecte mexicain) et de Lina Bo Bardi (architecte brésilienne), qui tous deux allient le rationalisme du Mouvement Moderne à la plasticité de l’art vernaculaire. Luis Barragan comme Olafur Eliason travaillent la lumière, la forme et la couleur et Lina Bo Bardi elle par le terme de ‘’substances’’ plutôt que de matériaux exprime la composition de son architecture. A partir de ces substances qui sont l’air, la lumière, la nature et l’art, elle conçoit ses projets qui associent l’usage quotidien et l’énergie de ses habitants. Afin de corréler ces milieux, une analyse sur les attributs du territoire a été faite afin de connaître quels sont ces ressources et quels sont les outils possibles à sa revitalisation. La transformation opérée par la Quinta-Urbana s’inscrit dans une approche territorialiste, définie par Alberto Magnaghi pour repenser la notion de développement durable en liaison avec un fort ancrage local, économique et culturel. Ces valeurs territoriales du site, retravaillées par l’Homme, acteur du territoire, se transforment alors en ressources. Le projet de transformation est l’instrument de refondation de la ville. C’est un processus de construction locale lié à un renforcement de la société locale : producteurs, habitants et consommateurs.
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En redonnant du travail aux habitants par l’exploitation des valeurs territoriales, le projet ne se réduit pas à la conservation du territoire mais opère donc ce qui sera définit par le terme de reterritorialisation1. Sauvegarder et valoriser le territoire suppose que l’on se développe aux ‘’biens’’ communs qui constitue l’essentiel de l’identité locale. Ces biens, désignent des réseaux écologiques, des bassins hydrographiques, des systèmes côtiers des types d’établissements territoriales et urbains qui perdurent à travers le temps. La Quinta-Urbana détient des bâtiments remarquables qui font référence à des époques différentes. Le château ravive la mémoire de l’invasion des Maures puis d’une puissance militaire, le monastère rappelle l’époque de la rechristiannisation du sud du Portugal, les ruines le long du Tage sont les témoins d’une ville industrielle florissante . Sur le site à l’état actuel, les communautés traditionnelles continuent d’exploiter les ressources locales de façon rationnelle par la pêche depuis les quais du littoral et au large et l’agriculture dans les jardins ouvriers. Le projet tente de catalyser ces activités locales pour les transformer en activité économique vivrière. Le Projet perçoit l’agriculture comme un secteur stratégique de développement et met en place: - la reforestation et l’aménagement traditionnel des sols comme instrument de défense hydrologique - la création de potagers urbains - des champs d’expérimentation pour l’agriculture - la conception d’écosystèmes-filtres pour le traitement biologique des eaux, l’irrigation et la création de zones humides Ces fonctions multiples liées au secteur agricole ne produisent plus seulement des biens pour le marché mais un capital social fixe et des biens d’utilité publique. L’agriculture devient alors un service hautement productif mêlant les questionnements environnementaux, économiques, paysagers, sociaux et culturels. Elle n’est donc alors plus un secteur assisté. La revitalisation savante du monde rural constitue le principal facteur de croissance d’une société locale .
1. Selon Alberto Magnaghi, la reterritorialisation conçoit la valorisation du territoire et du milieux comme compatibles avec le développement économique. Elle nécessite l’intervention active des producteurs des territoires urbains et ruraux. L’objectif du processus de reterritorialisation est d’augmenter la valeur de la ressource territoriale.
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Les habitants deviennent alors les producteurs du paysage et du milieu. Aux franges du centre urbain, le territoire ouvert est traversé par des couloirs écologiques dans les mailles desquels s’insèrent des zones productives dont les habitants profitent pleinement. La communauté travaille à la Quinta-Urbana comme jardinier, pêcheur, maraîcher, agriculteur …, pour en faire une nouvelle aire productive. L’économie de matière et plus largement de moyen est inhérente au site. Le Portugal se relève difficilement de la crise et a peu de moyens publics pour les travaux urbains. Le site, en plus de cela, appartient à une ville post-industrielle en déclin. Le projet convoque un minimum d’efforts et de moyens pour déployer une logique territoriale globale. Les travaux de Lina Bo Bardi sur l’usine SESC Pompeia en centre de loisir, à Sao Paulo, ou les installations d’Ettore Sottsass avec Metafore, arquitectura virtuale rappellent qu’avec peu il est possible d’insinuer et d’inciter une multiplicité d’usages. Dans cette démarche de territorialisation, notre méthode s’établit en trois temps pour proposer un projet évolutif dans le temps. Le geste premier correspond à la gestion infrastructurelle de l’eau. Bien qu’il y ait quatre saisons au Portugal, deux se distinguent : l’hiver, humide et froid et l’été, sec et aride. Dans un site inscrit dans deux Réserves nationales, les questionnements autour des facteurs pouvant dégrader l’équilibre de l’écosystème de l’Estuaire ne peuvent être négligés. L’élément principal de l’eau relie l’ensemble des problématiques du site. Lors de la saison humide, on canalisera cette eau de pluie pour la récupérer pour la saison sèche à venir, on la redirigera loin de la falaise pour éviter qu’elle ne se fragilise davantage par l’érosion. Durant l’été, les terres asséchées par les longues journées ensoleillées tentent de faire face aux vents qui menacent à tout moment un départ de feu. La morphologie du site laisse apparaître des aspérités résultant des efforts des vents et des anciens cours d’eau qui sont venus façonner la falaise et rappelle que cette nature est fragile et qu’il faut la modeler avec soin. La Quinta urbana propose de mettre en relation les éléments naturels présents sur le site afin de révéler les possibilités qu’elle détient. En créant une infrastructure première basée sur un réseau d’eau, elle tend à unifier le territoire.
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A la manière d’Alvaro Siza avec sa Quinta Malagueira à Evora ou encore le travail plastique de Cristo, l’infrastructure permettra de lier l’ensemble des situations ponctuées le long des six kilomètres de la Quinta-Urbana. Ce réseau trouve une unité et est magnifié par la possible utilisation d’un matériau unique. La mise en valeur de l’eau grâce à un seul matériau rappelle l’attention portée aux détails liés à la matérialité de Carlo Scarpa. Le travail de l’eau lié au travail du sol érige le décor de mises en scène différentes, des situations multiples peuvent trouver leurs places dans le patrimoine bati présent sur le site. En passant du plateau haut au bas de l’île, d’un bâtiment à un autre, le projet se déploie sur l’ensemble du site proposant une lecture non linéaire, sinon davantage situationiste (en référence aux travaux de Guy Debord sur le situationisme). Les situations prennent place au sein d’espaces capables. Lieux non utilisés, qui attendent d’accueillir les ramifications du nouveau système proposé. Libre d’interprétation, ces espaces se donnent à lire comme une partition de John Cage, le plan est flexible et adaptable. A partir des nouvelles matérialités de sols et des réseaux qui forment les invariants des lieux, l’île productive est source de multiples possibles.
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L’aire nautique, Olho de Boi
Sur le large quais qui s’avance sur le fleuve, débarquent les voyageurs en provenance de Lisbonne. En quelques minutes, ils ont traversé le Tage ils passent d’un monde à l’autre, d’une ville riche façonnée pour le touriste à une Rive-Sud pleine de nature préservée pour et par les habitants. Dès l’arrivée sur la Quinta-Urbana, on plonge dans une atmosphère bien différente. Comme sur une île, loin de la foule, on échappe, le temps d’un instant, au vacarme de l’urbanisation. Là, le milieu naturel a été modelé pour exploiter les ressources du site sans en altérer son équilibre. La gestion de l’eau et l’exploitation des terres en font une île productive ou le local a retrouvé sa place. Producteurs , pêcheurs, étudiants et enfants, tous se mêlent dans une dynamique nouvelle qui rappelle le passé florissant de cette rive à l’époque où les industries agro-alimentaires faisaient vivre le lieu. Il est loin le temps où ce morceau de territoire délaissé attendait tristement son renouveau.
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Historique : - 1838, Quinta, habitation et entrepôts Les bâtiments qui sont encore visibles sur le site d’Olho de Boi datent du XIXe et XXe siècles. Ils appartenaient de l’ancienne Compagnie portugaise de la pêche (CPP). Le temps n’a pas fait disparaitre les murs bâtiments. Une partie de cette zone appartenait au comte de Sao Lourenço. - Compahnia Portuguesa de Pesca (CPP) 1922-1984 max. travailleurs : 833 en 1970 Ils construisent les infrastructures nécessaires pour réceptionner et distribuer du Bacalhau ainsi que pour la maintenance de leurs bateaux. Entre l’Olho de Boi et Fonte da Pipa, le quai permettait aux bateaux de se ravitailler en eau douce. Elle fonctionne jusqu’au début du XXe siècle. Dans les années 1920, il passe aux mains de la CPP. Cette entreprise détient alors des espaces qui avançaient sur le Tage dédiés aux ateliers et à ses entrepôts. Les déchargements se faisaient par la plateforme supportée par des piliers. - Fermeture du site en 1986
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plan 1:1000
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taquet d’amarrage en laiton
chape de béton lisse coloré
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béton brut
0,00
couvertine, U en laiton -0,60
poutre en I mĂŠtallique
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platelage bois
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Les bains publics, Cais do Ginjal
23 juin, c’est aujourd’hui la «São-João», l’école est fermée et les chaudes journées commencent à se faire sentir. Les enfants rêvent d’aller se baigner. Les bains publics de la Quinta sont leur aire de jeux favorite. A peine dépassé l’entrée, ils courent déjà entre les vestiaires et les différents bassins. Dans ce labyrinthe, impossible de les rassembler. Les uns préfèrent les cascades qui se déversent de bassins en bassins, d’autres jouent à cache-cache et serpentent d’étages en étages pour trouver la meilleure cachette. La journée est passée si vite, excepté pour la mère exténuée par ses enfants. Elle décide de s’allonger sur l’herbe et de profiter d’un moment d’accalmie. Mais il faut partir, les enfants, eux, ne sont pas décidés à quitter ce lieu merveilleux.
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Historique : - Au XIXe siècle, des usines de glaces pour ravitailler les navires prennent place dans le complexe bâti. - Dès l’arrivée de la désindustrialisation, les industries ferment et fin des années 80, le lieu est laissé à l’abandon.
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plan 1:1000
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cascade de la gouttière
gouttière 50x50cm U en laiton
déversement du bassin supérieur
évacuation
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Bassins de déversement
gouttière en laiton
3,50
pierres calcaires bec verseur en laiton 2,60
mur d'origine en pierres maçonnées
pavés de granite -0,55
-1,50
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0,00
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La conchyliculture, Cais do Ginjal
Malgré une mer moutonneuse qui agite le bateau et fait entendre son claquement contre la houle, l’ostréiculteur s’approche vers la Quinta-Urbana. Il se dirige vers le ruban qui descend abruptement par les escaliers enserrés dans la falaise, jette sa passerelle en bois sur le fleuve pour enfin repousser la limite du quai à flanc du relief. L’eau s’étale sur la plage et au rythme des marées, les tables à huîtres et les piquets des cultures de moules se couvrent et se découvrent. Bravant le mauvais temps, l’ostréiculteur vient récupérer les huîtres qui seront vendues directement sur la place, dans le bar qui fait face à ses installations de conchyliculture. A l’abri, il regarde la pluie en attendant l’accalmie. Les gouttières en laiton prennent aujourd’hui tout leur sens et évacuent sans relâche l’eau qui s’abat sur la Quinta-Urbana.
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Historique : - H. Parry & Son, Hugh Parry et George Oakley 1860-1986 maximum de travailleurs : 1294 en 1970 deux sites : Ginjal et Cacilhas - Demande de construction navale augmente sensiblement dans les annĂŠes 1893. NationalisĂŠ en 25 avril 1974 - Fermeture en 1938
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plan 1:1000
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6,80
parement en azulejos
garde-corps en laiton
0,00
ponton rigole d’évacuation d’eau
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piquet en bois de mytiliculture
bac pour plantation h: 0.45m irrigation par canal en laiton
mobilier en béton lisse
dalle béton lisse garde corps en laiton
canal de récupération d'eau en laiton
platelage bois
table en bois d'ostreiculture
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La criée, Quinta da Arealva
Sur la rive sud, à l’écart du brouhaha, dans la brume matinale, on distingue à peine les pêcheurs qui arrivent avec leurs pêche du jour jusqu’au ponton d’Arrealva. Après une nuit de travail en mer, ils rentrent par l’embouchure du Tage, pour mettre pied à terre et vendre leurs poissons à la Criée de Quinta urbana. Dans les anciennes cuves vinicoles des bâtiments industriels le long du Tage, l’accès à l’eau est rétabli et permet l’alimentation en eau nécessaire à la vie de la Criée, grâce à la récupération des eaux épurées par la phyto-épuration dans les tranchées sur le plateau haut. A présent les pêcheurs peuvent vendre leur pêche du jour dès leur retour, sans intermédiaire. Dans quelques heures, l’activité du marché commencera, les premiers clients, connaisseurs, seront là dès l’aube, tandis que la foule se bousculera un peu plus tard dans la matinée pour acheter du poisson frais au prix le plus avantageux. Les terrasses des restaurants attenants à la Criée se rempliront de promeneurs curieux et friands de fruits de mer autour de l’heure du déjeuner.
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Historique : - 1700, fours de fabrication pour de la brique et des tuiles en terre cuite chapelle de S. Joao Baptista de Arealva - 1766, entreprise viticole - Fermeture du site en 1984
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plan 1:1000
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ouverture zénithale
eau récupérée de la phytoépuration
ancienne cuve
carreaux de ciment
éclairage
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8,0
pavĂŠs de granite
tuiles en terre cuite rouge
3,8
ferme en bois
tube en laiton
carreaux de cĂŠramique 0,00
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L’école horticole, Chateau Almaraz, Almada
Le soleil descend et la température commence à baisser, c’est l’heure de l’arrosage des terrasses horticoles. Les auréoles dorées qui encerclent le château s’estompent alors dans une brume d’eau qui rafraîchit l’atmosphère. Pendant ce temps, les étudiants rangent les bêches, les pèles et autres outils pour préparer les terrasses à la venue des visiteurs de demain. Tout doit être prêt pour la journée portes ouvertes du mois, qui invite les locaux à travers les jardins ouvriers et propose à la vente les cultures de saison à replanter. A cette occasion, les étudiants seront là pour donner leurs meilleurs conseils et pour sensibiliser les plus jeunes qui dessineront le futur de la Quinta-Urbana.
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Historique : - VIII siècle, apparition des premiers murs du chateau durant l’occupation musulmane. - 1147, récupération du bâtis durant l’époque de la Reconquête Chrétienne de la Péninsule Ibérique. - Du XVe siècle à aujourd’hui, construction de la forteresse et de la muraille durant l’époque de D. Manuel I.` - Aujourd’hui les locaux sont inutilisés mais la Garde Civile Républicaine a pris place dans trois batiments construits sur une dalle en béton au sein du Château
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plan 1:1000
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poteau carré 20x20cm
rigole de récupération
réseau d’éclairage
gaine verticale en laiton, 50x50cm
circuit de redistribution de l’eau de la ville
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gaine horizontale en laiton 50x25 réseau d'eau réseau électrique
plantations maraîchères basses 7,80
gaine horizontale en laiton 50x50
rideau séparateur
système d'arrosage
luminaire
végétation semi-intensive
3,10
3,00
jardin de pleine terre 0,85
0,00
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L’épuration des eaux, Cristo Rei, Pragal
Cette habitante s’était toujours demandé ce qui se passait derrière cette entrée monumentale. Elle avait tenté de s’imaginer ce qui se cachait au delà du mur et sous terre mais jamais elle n’avait pensé franchir le pas de cette porte. Pour une fois, la porte est ouverte et la femme ose s’y aventurer. Elle découvre une percée sur le paysage, qui offre une vue imprenable sur la capitale. Des bassins plantés se succèdent et rythment l’allée. Dans cette agréable quiétude, un habitué assis sur un rebord est plongé dans sa lecture. Il lève les yeux sur elle et s’exclame: «n’est ce pas incroyable ce paysage ?» Un dialogue amical s’instaure entre les deux inconnus.
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Historique : - Une des réserves en eaux usées est enterrée ici. 21 000 m3 sont purifiés avant d’être déversés dans le fleuve. - Construction dans les années 60.
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plan 1:1000
137
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N+1 0,70
N-0 0,00
filtre plantĂŠ 1 joncs et iris
filtre 2 plantes aquatiques
dĂŠversement
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végétation intensive 0,00
0,00
substrat h: 30cm étanchéité isolation pare-vapeur
sable
gravillon
Bassin de phytoépuration joncs et iris
cailloux
tuyau d'irrigation, laiton
- 5,22
pierres - 5,75
drain
- 6,00
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Le maraîchage, Parry & Son, Cacilhas
Au milieu de la masse végétale de la Quinta-Urbana, se détache un bâtiment élégant aux larges fenêtres et sa tourelle. Il semble dominer le flanc de la falaise. L’hiver a été long, les pluies abondantes, les cuves servant de réservoir sont toutes remplies à ras-bord et la production est, en conséquence, très intense. Le lieu et sa production hydroponique se sont fait connaître rapidement. La population raffole des produits locaux, au bon goût du terroir. Beaucoup de curieux viennent voir le site de production pour comprendre le fonctionnement transposable chez eux à une échelle domestique.
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Historique : - H. Parry & Son, Hugh Parry et George Oakley 1860-1986 maximum de travailleurs : 1294 en 1970 deux sites : Ginjal et Cacilhas - Les usines de Parry & Son étaient utilisées pour la fabrication d’huile de foie de morue. Nationalisé en 25 avril 1974 - Fermeture du site en 1986
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plan 1:1000
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2,00
arrivée d’eau
vers épuration : bassin aquaponique
évacuation des eaux 0,00
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végétation basse plantes herbacées
pavés 10x10 granite noir muret en béton blanc
baie mi-hauteur
plantes maraîchères système hydroponique
tube d'irrigation
cuve d'origine diam : 3,80m, béton
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Le marché, Seminario Maior de Sao Paulo, Almada
Dans l’ancien monastère, c’est le lieu de toutes les rencontres. Toutes les générations se confondent, les producteurs, vendeurs et clients se retrouvent ici chaque jour. C’est la fin du marché et les meilleures affaires sont à faire. Le maraîcher brade ces dernières salades, concurrencé par les cris des vendeurs du poissonnier. Sous l’ombrière recouverte de végétation grimpante qui dégage ses parfums floraux, une vieille femme regarde l’effusion générale comme elle regarderait une scène de théâtre. Harassée par la chaleur et bercée par le bruit des passants, elle s’assoupit et, à son réveil, la place du marché s’est vidée. Les vendeurs ont replié leurs structures et les clients sont retournés à leurs activités du jour. Au centre, les miroirs d’eau reflètent les arches du couloir du cloître. A la contemplation de ces doux reflets, la vieille femme laisse divaguer ses pensées et se surprend à rêver de son mari. Avant de partir, elle passe au magasin lui acheter ses outils manquants.
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Historique : - 1730 couvent de S. Paulo - Depuis quelques années, le monastère n’est plus utilisé laissant la porte close à tous.
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plan 1:1000
153
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4,20
cercle en laiton
tuiles concassĂŠes
miroir dâ&#x20AC;&#x2122;eau 0,12
0,00
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pavés 10x10cm granite noir
pavés 12x12cm granite blanc
accroche pour structure
sol stabilisé pavé en terre cuite
cercle en laiton
miroir d’eau h : 15cm
tuiles concassées
pergola en acier canal d’évacuation d’eau en laiton
pavés en terre cuite 30x20cm
végétation, graminés
poteau en acier cruciforme
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L’oliveraie, Cristo Rei, Pragal
Sur le plateau supérieur, aux pieds du Corcorado, le vent fouette le visage des travailleurs saisonniers. Le mois de novembre est entamé et avec lui, les premières gelées sont arrivées. Il est désormais temps de récolter les olives à maturité pour leur transformation locale dans les bâtiments voisins. Une huile parfumée des terres de schiste ou de calcaire sera produite. Depuis la densification de l’oliveraie, de nombreux habitants ont trouvé du travail au plus près de leur lieu d’habitation. Fiers de participer à la production locale de Quinta-Urbana, ils travaillent avec entrain. Cette année, la récolte sera bonne. Le système d’irrigation fait de noues végétales, de rigoles en pierre et des paillis en tuiles récupérées des toits écroulés des ruines le long du fleuve sur le plateau bas, permet à chaque arbre d’accéder à la même quantité d’eau. La période sèche n’est plus dévastatrice pour les récoltes, les oliviers passent à présent l’été sans souffrir du manque d’eau
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Historique : -Le Sanctuaire de Cristo Rei s’élance sur 110 mètres de haut regardant Lisbonne depuis 1959. - En 2009, lors de la visite du Pape Benoit XVI, l’allée principale dites «voie sacrée» est réaménagée et des oliviers sont plantés dans le parc qui encercle le monument. - Grâce à son belvédère, de nombreux touristes traversent le Tage pour regarder Lisbonne qui s’étend sur la rive opposée.
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plan 1:1000
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noue végétale L : 2m
rigole en laiton
fossé pierres sèches
0,00 -0,30
-1,00
fossé pierres sèches
paillis tuiles concassées
0,00
-1,00
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olivier
rigole en pierre
rigole en laiton 30 cm
noue végétale 1m
paillis de copeaux de bois rouge
fossé naturel
gravillons de grès blanc
pierre naturelle 50x50 granite blanc
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Carlo Scarpa, Magasin Olivetti, 1958
Robert Smithson, Glue Pour, 1969
Luis Barragan, Cuadra San Cristobal, 1967
Ettore Sottsass, Metafore arquitectura virtuale, 1971
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John Cage, partition de Fontana mix pour bande magnĂŠtique, 1958
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Projet urbain et grands projets emblématiques : réflexions à partir de l’exemple d’expo 98 à Lisbonne dans: Villes et projets urbains en Méditerranée [Tours : Presses universitaires François Rabelais, 2002, [en ligne] <http://books.openedition.org/pufr/276> , consulé le 10/04/2017 Requalification urbaine et mutations industrielles ‘’un échange d’expériences de requalification urbaine entre régions industrielles en déclin de la Communauté européenne’’, Communautés européennes, dir. Politiques régionales, edition Luxembourg/ Office des publications officielles des Communautés européénnes, 1993 [en ligne] <https://catalogue.sciencespo.fr/ark:/46513/sc0000194754>, consulté le 25/003/2017
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POEME L’arrivée au port L’année de la mort de Ricardo Reis, José Saramago traduit du portugais par Claude Fages, Edition du Seuil, 1988 Ombre et lumière Le livre de l’intranquillité, Fernando Pessoa traduit du portugais par Françoise Laye, Editions Christian Bourgois, 1999 La traversée du Tage Le 11 janvier 1986, João Franco traduit du portugais par Raoul Migrod, Edition L’insomniaque , 1999 L’admirable fraicheur de ces montagnes Sonnet CXLIII, Sonnets, Luís Camões (traduit par Anne-Marie Quint en collaboration avec Maryvonne Boudoy, Edition Chandeigne, 2014 Comme je ne possède pas et Dispersion Mário de Sá-Carneiro, Poètes de Lisbonne, traduit par Elodie Dupau, Edition bilingue, 2016 Certains les yeux rivés sur le passé Fernando Pessoa sous l‘hétéronyme de Ricardo Reis, Poètes de Lisbonne, traduit par Elodie Dupau, Edition bilingue, 2016 Le quais Ode maritime de Fernando Pessoa, traduite par Armand Guibert, Editions Fata Morgana, 2013 Phare de lumière et Le mendiant Terra/Terre, Daniel Bastos traduit par Paulo Teixeira , Edition Converso, 2014
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Photographies Maquette
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Coralie Barthe & Lauréline Lhuillier
Projet de Fin d’Étude encadré par Réza Azard & Nicolas Simon
École Nationale Supérieure d’Architecture de Versailles Session Juin 2017