Rift, vers un village vertical à Hanoï (01)

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INTRODUCTION

CORENTIN LEBOUCHER / PROJET DE FIN D’ÉTUDE / 2019 ENSEIGNANTS : LAURENT SALOMON / GWENAÊLLE RUELLAN / KACHA LEGRAND


THÈME

Né d’une fascination pour la culture vietnamienne et d’une volonté d’imaginer la ville de demain, le choix du site du projet de fin d’étude d’architecture s’est porté sur la région du nord du Vietnam, et plus précisément sur la future mégapole d’Hanoï. D’une complexité certaine, la tâche première a été de comprendre l’organisation d’éléments essentiels composant le paysage urbain vietnamien, apparaissant comme disparates, hétéroclites, déconnectés mais en réalité étroitement liés intrinsèquement. L’utilisation d’une grille tridimensionnelle a permis dans un second temps d’imaginer l’organisation d’un morceau de ville, à la fois dans son dessin global mais aussi dans l’agencement de ses détails, tout en laissant libre d’usage son schéma systématique comme support de la richesse du mode de vie spontané de ses habitants.

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CONTEXTE

Depuis son ouverture sur le monde en 1989, le Vietnam a vu sa croissance économique s’accélérer mais aussi sa population s’accroître. Comptant 67 102 000 d’habitants en 1990, le pays en recense aujourd’hui 96 395 051, dont 80 % vivent en ville contre 30 % en 1980. L’emprise des villes, comme celle de Hanoi, la capitale du pays, n’a cessé d’augmenter. Avec 7 588 000 habitants en 2015 pour une superficie de 332 890 ha, l’aire urbaine d’Hanoi est la 2e plus grande du vietnam (derrière HôChi-Minh-Ville dénombrant 8 637 000 habitants en 2019). Le centreville regroupe 2 600 000 habitants pour des densités de population extrêmement variables selon le type de tissu urbain (32 631 hab./km² pour le district de Dong Da, quasiment celle du 20e arrondissement de Paris en comparaison, contre 3 146 hab./km² pour le district périurbain de Tanh Tri).

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CONTEXTE

L’espace rural est repoussé de plus en plus loin du centre-ville par ce phénomène d’étalement urbain, et ses activités de production et de transformation des ressources se retrouvent prises dans une économie globale là où primait auparavant un fonctionnement local. Il en résulte un transport motorisé incessant et polluant des matières prélevées ou produites vers les différents pôles de consommation. D’autre part, les villages artisanaux ou villages de métiers, auparavant à l’écart de la cité impériale, se retrouvent aujourd’hui englobés dans l’aire urbaine de la future mégapole (on parle alors de ‘cluster’ urbain) et voient leurs activités modifiées, notamment celles liées à l’agriculture qui leur permettait un fonctionnement autonome local et vertueux.

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ROUTE

PRÉMICES D’UNE URBANISATION

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ROUTE

Premier vecteur d’urbanisation au Vietnam, les voies de communication dessinent un vaste réseaux allant de l’autoroute multivoies à l’allée d’un mètre de large. Il suffit qu’un tracé routier se dessine pour observer l’apparition d’une multitude d’activités et d’installations humaines exploitant l’attractivité nouvellement crée pour promouvoir et faire fructifier le commerce.

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VILLAGE

MODÈLE DE MICRO-SOCIÉTÉ

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VILLAGE

Làng (le village), premier modèle de société au Vietnam, est particulièrement important. C’est à partir de cette entité que se sont développées une majorité des villes vietnamiennes. La plupart des populations étant aujourd’hui sédentaires, ce sont des activités comme l’agriculture et l’artisanat qui les caractérisent. Sur le plan social, un làng est composé d’une ou de plusieurs familles organisées à l’origine selon un système patriarcal encore aujourd’hui relativement prégnant. Le village a un rayonnement bien plus faible que la ville impériale (quelques kilomètres à partir du cœur du village pour l’agriculture, l’acheminement d’eau, les ressources…) mais présente la particularité de pouvoir fonctionner en autarcie. La ville contemporaine se développe de manière tridimensionnelle : horizontalement et spontanément, où l’autoconstruction joue un rôle majeur dans le dessin du visage de la ville, précédant et supplantant de par sa rapidité et par le manque de cadre légal les schémas d’organisation globaux (la maison ‘tube’ héritée de la présence chinoise au Vietnam en est l’exemple le plus marquant) ; verticalement et généralement aux mains d’entreprises privées, plus soucieuses d’une réponse partielle et quantitative à des questions urbaines comme celle du logement, qu’à une intervention qualitative proposant un mode d’habiter plus en lien avec la culture vietnamienne. Dans les deux cas, le recours aux architectes est très rare et s’adresse davantage à une population aisée qu’à l’ensemble des citadins, et les solutions qu’ils pourraient proposer pour améliorer la gestion pour l’instant energivore de la ville, tant en air climatisé qu’en organisation des réseaux d’eau et d’électricité, s’en voient malheureusement limitées.

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CENTRE SYMBOLIQUE

CONG LANG, AO, CAY DA, DINH, CHUA...

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SYMBOLES

Un village existe s’il comporte quatre constituants symboliques : cong làng (la porte du village), đình (sorte de maison communale permettant le rassemblement, le culte des ancêtres, les échanges sociaux…), cây đa (figuier des banians) et ao (étang, point d’eau, bassin). Il peut également comprendre un ou plusieurs đen (temples), chùa (pagode), ou mieu (temple pour petites divinités)…

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HABITATION, COMMERCE, SERVICES & ARTISANAT LA ‘MAISON TUBE’, THÉATRE D’UNE SOCIÉTÉ ASIATIQUE

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HABITATION, COMMERCE, SERVICES & ARTISANAT

Héritée de l’occupation chinoise, la ‘maison tube’ doit son nom à sa forme exiguë, sa façade étroite et sa profondeur importante. En ville, ces habitations dont on ne voit que les ‘tranches’ respectent une certaine notion d’alignement et de hauteur mais c’est avant tout le nombre d’habitants et les ressources financières de ces derniers qui vont déterminer les dimensions de cette habitation ‘multitâche’. En effet, le rez-de-chaussée de ce type d’habitat comporte 3 zones allant de l’espace le plus ‘public’ (une cour intérieure ou l’entrée, dans laquelle on gare le scooter familial) au plus intime (cuisine, pièce d’eau ou parfois chambre), en passant par un espace intermédiaire généralement utilisé comme salon. Le rez-de-chaussé est souvent transformé en bureau, en atelier ou en commerce, puisqu’il donne sur la rue. Les étages supérieurs regroupent les chambres et pièces d’eau complémentaires mais peuvent également être loués ou devenir des espaces recevant du public (café, bar, restaurant, commerce...).

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ARTISANAT & INDUSTRIE LÉGÈRE

UNE HYPER-SPÉCIALISATION LOCALE DES SAVOIRS-FAIRE

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ARTISANAT & INDUSTRIE LÉGÈRE

Après avoir constaté la liberté d’usage de la ‘maison tube’, on peut aisément envisager l’hyper-libéralisation dans la construction et dans l’organisation des activités en ville et à la campagne. Il n’existe pas de stratégie de zoning mise en place à grande échelle pour l’artisanat et l’industrie légère comme on peut en trouver pour l’industrie lourde. Dans cette mesure, ces activités s’installent selon le bon vouloir des entrepreneurs, industriels ou habitants désireux de lancer leur propre affaire. De ce libre entreprenariat émerge la notion de village de métier évoqué précédemment et qui concerne l’hyperspécialisation de certains villages dans la confection d’un type de produit (village du papier, village du métal, village du bambou...).

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ENVIRONNEMENT

GESTION DE L’EAU, DES ESPACES ‘NATURELS’ & DES DÉCHÊTS

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ENVIRONNEMENT

Hanoi étant une ville de la région du delta du Fleuve Rouge, elle est très sensible au changement climatique entrainant principalement une monté du niveau des eaux, et pouvant accroître l’effet de la mousson ayant lieu chaque année. De plus, les modifications apportées au fleuve en amont de Hanoi pour la production électrique ou l’industrie influent directement sur les pratiques agricoles dans cette zone culminant à quelques mètres seulement au dessus du niveau de la mer, et tendent à modifier les écosystèmes en place depuis des siècles. D’autre part, la question de la gestion des déchets solides dans la région de Hanoi se pose également depuis la fermeture de la Chine à l’import de déchets plastiques. Le Vietnam est ainsi devenu depuis quelques années une nouvelle alternative pour l’export de ces matières depuis l’Europe et les USA, implicant malheureusement une industrialisation très largement polluante mais bien nécessaire. Plus largement, dans le contexte de crise écologique planétaire, il est urgent de proposer dès maintenant une alternative à nos modes de vie de consommateurs et de commencer a réellement expérimenter ou retrouver des schémas vertueux cycliques, en replaçant nos déchets dans une économie durable, en produisant en quantité et en qualité satisfaisante de quoi nourrir les villes, en harmonisant échelle globale et locale dans les échanges afin de traiter des problèmes environnementaux contemporains à toutes les échelles mais aussi d’anticiper nos besoins futurs sans altérer notre confort.

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HANOI / TRIEU KHUC SITE DE PROJET

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VERS UN PROJET

Au sud-ouest d’Hanoi, au bord de la 3e couronne routière ceinturant la future megapole, dans un paysage d’entre-ville, un terrain de 34 hectares est pour l’instant à l’état de friche en attendant le développement d’architectures spontanées pionnières déjà implantées à ses abords. Bordé au nord par le 3e périphérique, à l’ouest par le village de Trieu Khuc, cet espace vient questionner toutes les notions présentées auparavant. Anciennement une constellation de lacs interconnectés par un système hydraulique traditionnel permettant de gérer l’apport en eau pour les cultures du village, cette zone maintenant asséchée artificiellement est vouée à court terme à devenir un ‘KDTM’, une ‘gated-community’ vietnamienne. Ce fragment rural qui faisait parti d’un ensemble bien plus grand et bien plus riche est maintenant isolé et détourné de sa fonction primaire : nourrir le village. Cependant, les qualités et les enjeux de ce site sont nombreux et il est souhaitable d’éviter une nouvelle forme de privatisation du sol. Cet espace doit venir connecter la future mégapole à un village de métier du textile et du tri des déchets, et être construit en expérimentant une architecture contemporaine qualitative à habiter, intégrant une gestion bioclimatique des éléments et empreinte de culture vietnamienne afin de répondre au besoin d’extension de la ville tout en pensant au confort d’usage d’une population urbaine toujours plus nombreuse. Il devra également devenir le symbole de resistance et d’alternative à la pollution des sols, de l’eau et de l’air, et proposer un modèle d’agriculture urbaine...

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