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Publié par la société des publications du Daily, une association étudiante de l’Université McGill
Journée internationale des femmes p. 4
Mardi 10 mars 2015 | Volume 104 Numéro 18
Où est notre v.-p. externe? depuis 1977
Éditorial rec@delitfrancais.com
Volume 104 Numéro 18
«J’agira être comme resource des relations publiques pour la société. […] En utilisant mon créativité et ma connaissance de l’institu, et par expérimentation et labeur, je suis commise à construire l’unité de l’identification des étudiants.» Johanna Nikoletos, aspirante V.P. aux affaires interne.
Abattre les cartes joseph boju
Le Délit
Motion portant sur la solidarité envers les étudiants et les protestataires demandant des gouvernements démocratiques, en particulier à Hong-Kong D’abord présentée pour l’assemblée générale d’automne, cette motion avait été reportée à l’assemblée générale d’hiver. Entre-temps, le conflit s’est essoufflé, étouffé. Est-ce pour cela que les pétitionnaires ont élargi leur champ d’attaque et rajouté un appendice faisant la liste des dizaines de pays à travers le monde ne disposant pas de démocratie électorale? Curieuse démarche, cela dessert l’intention première. Le Délit déplore la maladresse de cette motion et refuse par conséquent de la soutenir. Motion concernant les stages non-rémunérés Le Délit soutient cette motion, dans la mesure où les lois du travail applicables encadrent et autorisent à certaines conditions les stages non-rémunérés, dans les milieux caritatifs notamment. Motion concernant la politique de l’AÉUM pour une éducation accessible Sans hésitation aucune, Le Délit soutient cette motion. Nos prises de positions précédentes contre les différentes hausses des frais de scolarité, notamment cette année concernant les étudiants français, nous y convient expressément. Nous encourageons l’AÉUM à défendre une éducation postsecondaire accessible, et ce, aux niveaux de l’administration de McGill, du gouvernement provincial et du gouvernement fédéral. Cette défense passe aussi par une sensibilisation et une mobilisation des étudiants aux enjeux politiques liés à l’éducation postsecondaire, trop souvent absentes sur notre campus. Motion concernant le désinvestissement des compagnies profitant de l’occupation illégale des territoires palestiniens Ce dimanche 15 mars 2015, McGill sera de nouveau un microcosme de la géopolitique internationale. Ce qui va suivre est vulgaire. À votre gauche se trouve «Not in our name», slogan de la campagne du Oui, auquel répond la coterie des étudiants arabes et gauchistes. À votre droite, «SSMU for All Students» représente la campagne du Non, rassemblant les juifs et les libéraux-réacs’ du coin. L’amalgame est permis. Les terroristes contre les
pourfendeurs des droits de l’homme, les antisémites contre les islamophobes et les racistes, ou bien encore l’inverse. Tout cela va être dit car nous sommes au siècle du dicible. Les camps sont formés, les cartes s’abattent. Nous voyons McGill Student’s Solidarity for Palestinian Human Rights d’un bord, Israel on campus at McGill de l’autre; NPD McGill d’un côté, PLQ McGill de l’autre. Les pions avancent: Oxfam, Conservateurs, Désinvestissons McGill, Investissons McGill, Militarisons McGill, Démilitarisons McGill, etc. Tombant en pleine Semaine contre l’apartheid israélien, moment de l’année où l’activisme pro-palestinien bat son plein, la motion de ce dimanche semble avoir été mûrie durant de longs mois par les activistes étudiants. Il faut dire que plus d’un avaient eu de la difficulté à avaler la défaite de l’assemblée générale du 22 octobre, troisième pour la cause palestinienne sur le campus depuis 2009. En décembre dernier, la Concordia Student Union a voté une motion similaire sur le désinvestissement. Avec quelque petites 200 voix d’écart, les étudiants ont tranché en faveur des dépositaires, une première. Autant vous dire que la réaction de l’administration ne s’est pas fait attendre. Le lendemain du référendum, le président de Concordia Alan Shepard a fait savoir qu’il n’était pas ravi. Madame Fortier fera certainement de même si la motion de dimanche venait à passer. Quel message une telle motion enverrait en effet aux donateurs historiques et aux bienfaiteurs de l’Université? En outre, constatant l’inévitable fossé qui sépare les groupes en présence, nous pensons qu’il serait nécessaire pour l’AÉUM de créer une cellule spécialisée dans le dialogue inter-étudiants sur le conflit israélo-palestinien, notamment entre les différentes associations communautaires (McGill Student’s in Solidarity for Palestinian Human Rights et Hillel McGill, par exemple) afin de prévenir tout débordement et de trouver des solutions durables pour que chacun se sente en paix sur le territoire mcgillois. Rappelons-nous les débordements de 2002, lorsque Netanyahou avait été invité par Hillel à Concordia, le religieux-politique ne permet pas la demi-mesure. Les insultes fusent. Les débordements sont trop faciles. «It’s an emotional hot potato!» comme on dit dans des bureaux contigus aux nôtres. Mais pour aujourd’hui, la parole revient aux opprimés. Bien qu’elle soit encore truffée de fautes d’orthographe et de verbes aux conjugaisons inconnues, Le Délit soutient la motion en question, moins agressive et plus pragmatiquement formulée que celle proposée au semestre dernier. Il espère qu’elle sera un premier pas vers un dialogue ouvert et constructif sur ce campus aux milles possibilités. Amen. x
Le seul journal francophone de l’Université McGill rédaction 3480 rue McTavish, bureau B•24 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : +1 514 398-6784 Télécopieur : +1 514 398-8318 Rédacteur en chef rec@delitfrancais.com Joseph Boju Actualités actualites@delitfrancais.com Louis Baudoin-Laarman Laurence Nault Esther Perrin Tabarly Culture articlesculture@delitfrancais.com Noor Daldoul Baptiste Rinner Société societe@delitfrancais.com Gwenn Duval-Stojanovic Coordonnatrice de la production production@delitfrancais.com Cécile Amiot Coordonnatrices visuel visuel@delitfrancais.com Luce Engérant Eléonore Nouel Coordonnatrices de la correction correction@delitfrancais.com Any-Pier Dionne Céline Fabre Webmestre web@delitfrancais.com Mathieu Ménard Coordonnatrice réseaux sociaux réso@delitfrancais.com Inès L. Dubois Contributeurs Chloé Anastassiadis, Thomas Birzan, Julia Denis, Mahaut Engérant, Amandine Hamon, Frédéric Lefort, Philippe Robichaud, Laurent Ziegler Couverture Luce Engérant Éléonore Nouel bureau publicitaire 3480 rue McTavish, bureau B•26 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : +1 514 398-6790 Télécopieur : +1 514 398-8318 ads@dailypublications.org Publicité et direction générale Boris Shedov Représentante en ventes Letty Matteo Photocomposition Mathieu Ménard, Lauriane Giroux, Geneviève Robert The McGill Daily coordinating@mcgilldaily.com Dana Wray
Conseil d’administration de la Société des publications du Daily (SPD) Juan Camilo Velazquez Buritica, Dana Wray, Joseph Boju, Baptiste Rinner, Rachel Nam, Hillary Pasternak & Ralph Haddad.
Dans l'article «Nous ne sommes pas en crise» d'Esther Tabarly Perrin dans le numéro du mardi 24 février 2015, il aurait fallu lire que le gouverneur général du Canada David Johnston était un visiteur à distance, et non pas présent lors du conseil du Sénat. Nos excuses à l’intéressé.
2 éditorial
L’usage du masculin dans les pages du Délit vise à alléger le texte et ne se veut nullement discriminatoire. Le Délit (ISSN 1192-4609) est publié la plupart des mardis par la Société des publications du Daily (SPD). Il encourage la reproduction de ses articles originaux à condition d’en mentionner la source (sauf dans le cas d’articles et d’illustrations dont les droits avant été auparavent réservés, incluant les articles de la CUP). L’équipe du Délit n’endosse pas nécessairement les produits dont la publicité paraît dans ce journal. Imprimé sur du papier recyclé format tabloïde par Imprimeries Transcontinental Transmag, Anjou (Québec).
le délit · mardi 10 mars 2015 · delitfrancais.com
Actualités actualites@delitfrancais.com
Obsolète, la FEUQ? La FAÉCUM va voter sur sa sortie de la FEUQ. louis baudoin-laarman
Le Délit
L
a Fédération des associations étudiantes du campus de l’Université de Montréal (FAÉCUM) a présenté un rapport suggérant la sortie de la FAÉCUM de la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ), à l’occasion de son conseil central du 25 février dernier. Le rapport, signé par l’ensemble du comité exécutif de la Fédération, propose que les diverses associations étudiantes décident de la potentielle sortie de la FAÉCUM, ainsi qu’un débat soit tenu quant à la création d’une nouvelle organisation nationale étudiante lors du congrès annuel qui aura lieu à la fin mars. Outre le vide énorme que causerait le départ de la FAÉCUM au
sein de la FEUQ, l’idée de la création d’une nouvelle organisation nationale étudiante représenterait un véritable tremblement de terre pour la sphère politique étudiante québécoise. En effet, la FAÉCUM, un des membres fondateurs de la FEUQ en 1989, représente avec ses 40 000 étudiants la plus grande association membre de la FEUQ, et exerce à ce titre une influence assez importante en son sein. L’équipe du comité exécutif de la FAÉCUM a expliqué dans un rapport très critique les raisons de sa désillusion vis-à-vis du travail de la FEUQ: «La FEUQ n’est plus en mesure de répondre aux aspirations de ses membres et n’est plus efficace d’un point de vue politique», peut-on lire dans le document. Le mandat de la FEUQ, qui est de réunir diver-
ses associations étudiantes pour mieux défendre leurs intérêts lors de négociations avec le gouvernement provincial, est, selon le document, compromis entre autres par des problèmes de structure et de gestion. Ceux-ci se sont reflétés, toujours selon le rapport, par les reculs en matière des droits des étudiants. On compte entre autres les nombreuses compressions budgétaires en matière d’éducation au Québec, l’augmentation de l’endettement étudiant et des frais de scolarité, ou encore le sous-financement des fonds de soutien à la recherche. Ce que redoute la FAÉCUM à court et moyen terme, c’est surtout une communauté étudiante québécoise dénuée d’une organisation forte pouvant la protéger et la défendre de certaines politiques
gouvernementales qui pourraient lui être nuisibles. «Il importe que notre association étudiante nationale soit en mesure de faire face à ces défis majeurs qui se poseront inévitablement», prédit le rapport. La perte de crédibilité récente de la FEUQ ne fait selon eux qu’empirer cette situation. La sortie de la FAÉCUM de la FEUQ verrait néanmoins cette dernière encore plus affaiblie, ce que craignent certains membres des comités exécutifs d’autres associations étudiantes. La FEUQ a quant à elle refusé de commenter le rapport de la FAÉCUM. En guise de solution de rechange à la FEUQ, le rapport propose la création d’une nouvelle organisation nationale québécoise et invite d’autres associations à se joindre au mouvement. La décision reste toutefois entre les mains des associations étudiantes de l’Université de Montréal. Vincent FournierGosselin, le secrétaire général de la FAÉCUM, a affirmé au Délit que la décision sera prise de manière démocratique et que la création d’une nouvelle fédération dépendra des diverses associations étudiantes, à l’Université de Montréal et ailleurs: «Il sera important d’assoir tout le monde autour d’une table une fois que la décision aura été
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prise. L’important c’est de réunir le plus grand nombre d’associations étudiantes.» Les associations étudiantes de l’Université du Québec à Rimouski, Chicoutimi et à TroisRivières ont fait part le 26 février de leur appui à l’idée d’une nouvelle «structure nationale à leur image [des associations]», dans un communiqué de presse. Victor Bilodeau, vice-président aux affaires politiques et externes du Regroupement des étudiantes et des étudiants de maîtrise, de diplôme et de doctorat de l’Université de Sherbrooke (REMDUS), a quant à lui affirmé qu’il ne souhaitait «ni la TaCEq, ni la FEUQ, mais une association pour les membres et par les membres». D’autres craignent qu’une nouvelle fédération fondée par la FAÉCUM implique une trop grande influence de celle-ci, forte de ses 40 000 membres. Une source officielle d’une autre association étudiante membre de la FEUQ a de son côté affirmé souhaiter «un débat honnête, transparent, et d’égal à égal». Dans les circonstances actuelles, où nombreux sont ceux qui voient la FEUQ comme obsolète, l’avenir de cette dernière dépendra donc peut-être de la décision des associations de la FAÉCUM à la fin du mois de mars. x
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Montréal
Marcher pour l’égalité
Un forum et une marche à Montréal pour la Journée internationale des femmes. Esther Perrin Tabarly
Le Délit
À
l’occasion de la Journée internationale des femmes dimanche 8 mars, une marche ainsi qu’un forum ont été organisés à Montréal afin de “dénoncer l’hypocrisie actuelle du gouvernement canadien, des élites et des grands États impérialistes qui prétendent aujourd’hui se battre […] pour la liberté et la démocratie” dans un environnement qui reste foncièrement sexiste. Dimanche à 13 heures, une foule relativement mixte que la police a estimée à environ 800 personnes s’est réunie près de Concordia, où se déroulait la conférence qui avait précédé la manifestation. La manifestation a débuté sur la place NormanBéthune, au croisement des rues Guy et Maisonneuve, et s’est poursuivie le long de la rue Sainte-Catherine avant de remonter sur la rue McGill College jusqu’à Sherbrooke, où la procession s’est achevée vers 15 heures. En guise d’interludes, plusieurs activistes et porte-paroles d’associations pour les droits des femmes dans divers domaines ont abordé les nombreuses facettes du machisme dans la société canadienne.
éléonore nouel
Femmes et Printemps, main dans la main La manifestation a été organisée dans le cadre du forum marquant l’occasion du 8 mars, forum qui comprenait une série de conférences intitulée «Construisons le monde que nous voulons !», par l’association Femmes de diverses origines, un groupe du Groupe de recherche en intérêt public (GRIP) Concordia. En effet, toute la marche était axée autour d’une volonté d’universalité: c’était le manifeste d’un événement féministe sans religion, sans natio-
nalité, mais uni contre le sexisme, l’impérialisme et l’austérité. En entretien avec Le Délit entre deux roulements de tambour, une activiste du mouvement Québec Solidaire a expliqué que les femmes sont les premières victimes de l’austérité, soit ses premières licenciées parce qu’elles représentent aussi la grande majorité des employés dans le secteur public. Dans un discours d’introduction, les porte-paroles de Femmes de diverses origines ont dénoncé les politiques libérales du gouvernement provincial, «les coupes et attaques envers les services de santé, l’éducation, le coût
de l’énergie, les transports, l’assurance emploi et les droits les plus fondamentaux à une vie décente, à la dignité, et au travail», trop souvent excusées par le contexte économique actuel. En parcourant la foule du regard, on ne pouvait que noter l’abondance de pancartes de mouvements sociaux et syndicats dont l’axe de mobilisation principal est politico-économique: le Parti Communiste Révolutionnaire (PCR), Québec Solidaire (QS), Médecins Québécois pour le Régime Public (MQRP), mais aussi Femmes unies contre l’austérité (FUCA)… Plus qu’une réunion strictement féministe, la marche a servi à plusieurs reprises de véritable tremplin du mouvement naissant contre les politiques d’austérité. Une thématique multiple D’autres thèmes ont cependant été abordés au cours du rassemblement, notamment la place des femmes autochtones ou des femmes immigrées dans la population, la reconnaissance des activités au foyer, le consentement, le conflit israélopalestinien ou encore les oléoducs et les sables bitumineux… Tant de
sujets qui soulignent l’importance de «la moitié de l’humanité», pour reprendre les mots de Femmes de diverses origines au lancement de la marche. Un monde trop masculin Chaque année le 8 mars symboliquement, et chaque jour activement, les mouvements sociaux poussent les femmes à tenter de s’approprier une place dans un monde souvent trop masculin. Laure-Camille Chéné fait une majeure en mathématiques et statistiques, et une mineure en économie à McGill. En entretien avec Le Délit, elle a expliqué qu’alors que «dans [ses] classes, il y a toujours plus de gars que de filles», elle n’a jamais été témoin ou victime d’aucun acte discriminatoire. «Je crois plutôt que la discrimination survient plus tard, dans le milieu de travail, et non à l’université», a-t-elle déclaré. Si McGill n’était pas forcément très représentée dans l’organisation de la marche de dimanche, une conférence organisée par l’association McGill Students for UN Women aura cependant lieu sur le campus mercredi 11 mars pour les mêmes raisons. x
Québec
Pas de sirop de pipeline
McGill s’inscrit dans le mouvement contre l’oléoduc de TransCanada. Julia Denis
Le Délit
L
e mouvement d’opposition à la construction de l’oléoduc Énergie Est au Québec, formé d’associations, de citoyens, mais aussi d’institutions publiques et de municipalités se développe et évolue. Depuis quelques semaines, c’est le chemin institutionnel et démocratique pour annuler le projet Energie Est qui a été privilégié par les opposants au projet. En effet, plus de 1800 individus ou associations ont soumis à l’Office national de l’énergie (ONÉ) des demandes de participation aux audiences sur le projet Énergie Est. Une partie de ces demandes provient d’étudiants mcgillois, dû à la campagne organisée par l’association Divest McGilll depuis quelques semaines pour que les étudiants démontrent leur opposition au projet. Faire couler le projet En août 2013, la compagnie TransCanada annonçait son projet d’oléoduc Énergie Est: une vaste entreprise de construction d’oléo-
4 actualités
ducs, de conversion de gazoducs en oléoducs et d’aménagements annexes (installations maritimes, créations de terminaux de réservoirs pétroliers, etc.) qui aboutirait à la création d’un réseau de 4600km de tuyaux pouvant acheminer 1,1 millions de barils de pétrole brut issu de l’exploitation de sables bitumineux vers l’Est du Canada. «Énergie Est», comme tout projet de construction énergétique, doit maintenant être approuvé par l’Office national de l’énergie du Québec (ONÉ). Plus de 1800 associations, organismes publics, municipalités et communes se sont inscrits aux audiences organisées à ce sujet par l’ONE, un nombre impressionnant qui démontre bien que la mobilisation prend une ampleur considérable. Le Devoir attribue cette réaction exceptionnelle entre autres à l’inquiétude: inquiétude d’HydroQuébec, qui appréhende les externalités négatives sur son réseau de distribution électrique et sur le développement de ses infrastructures d’énergies vertes au Québec, inquiétude du Ministère des transports quant à la manière dont les chantiers
Luce engérant
vont affecter le trafic, inquiétude de l’Union des producteurs agricoles pour leurs exploitations, et inquiétude de nombreux individus qui ne veulent pas voir passer des millions de litres de pétrole sur leur propriété. La voix étudiante cherche à se faire entendre. Beaucoup d’étudiants ont aussi rempli les formulaires d’inscription aux audiences de l’ONE afin de peser dans la balance. Plus
de quatre-vingt-quatre à McGill selon Bronwen Tucker, membre de Divest McGill, qui a organisé plusieurs évènements d’inscription. Lors de leur demande de participation, les étudiants devaient expliquer en quoi le développement d’Énergie Est les concernait. N’ayant pas un bout de jardin qui risquerait de se voir traversé par un de ces oléoducs, leur motivation était essentiellement celle du changement climatique. Or, sachant que le mandat de l’ONE a été modifié en 2013 pour ne plus
inclure les questions de changement climatique; cette petite centaine de McGillois risque de ne pas être reconnue par l’organisme comme étant «directement touchée» par le projet, et ainsi voir leurs demandes rejetées. En réaction à ce que Divest McGill décrit comme une procédure d’examen «ridicule» et «faible», l’association a justement poussé les étudiants à prendre le contrepied et continuer à défendre l’argument du changement climatique afin de démontrer l’illégitimité de la décision de l’ONE. Pour Divest McGill, qui est tout à fait consciente du peu de chances de réussite de cette opération, ceci n’est en aucun cas un dernier acte. En effet l’association – qui concentrait plutôt ses efforts sur les tactiques de désinvestissements et n’avait été qu’un support aux actions de la campagne de justice climatique de l’AEUM contre Énergie Est – a confié au Délit être en train de prévoir un développement plus important de leurs opérations de sensibilisation et de leurs actions directes sur les pipelines pour cet été. x
le délit · mardi 10 mars 2015 · delitfrancais.com
chronique visuelle
L’illus’ tout crue
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Le Délit
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actualités
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Les candidats aux postes
L
a période de campagne électorale de l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM) a officiellement démarré le lundi 9 mars à 9h, et se poursuivra jusqu’au 20 mars prochain à 17h, quand les résultats seront annoncés au bar étudiant Gerts. D’ici là, les sept candidats officiellement en lice pour les postes exécutifs de l’AÉUM présenteront à diverses occasions leurs programmes, comme à la conférence de presse le 12 mars ou au débat des candidats le 17 mars, afin de convaincre les étudiants de leurs aptitudes pour les postes qu’ils briguent. Les étudiants membres de l’AÉUM, c’est-à-dire l’ensemble du corps étudiant de premier cycle à McGill, seront appelés à voter du 18 au 20 mars pour choisir leurs représentants pour l’année 2015-2016.
Cette année, seuls les postes de président et de vice-président aux affaires internes de l’AÉUM offriront la perspective d’un réel débat entre les différents candidats, car les postes de v.-p. aux finances, v.-p. aux affaires universitaires et v.-p. clubs et services n’ont qu’un seul candidat chacun. Aucun candidat ne se présente au poste de v.-p. aux affaires externes pour le moment, un poste pourtant très chargé politiquement et très important pour les liens entre le campus et le reste de la communauté étudiante québécoise. Le Délit a rencontré pour vous les candidats de cette année afin de vous présenter leurs objectifs et projets de campagne.
Présidence de l’aéum
Kareem Ibrahim
P
résent sur tous les fronts à la fois, Kareem Ibrahim combine sa casquette de Floor Fellow à celles de sénateur des Arts à l’Association Étudiante de la Faculté des Arts (AÉFA) et de représentant du sénat à l’AÉUM, auxquelles s’ajoutent divers postes qu’il a occupés par le passé qui lui confèrent une certaine expérience en politique étudiante. Sa campagne à la présidence de l’AÉUM s’articule sur trois axes: la communication, l’accessibilité et la représentation. Du côté des communications, il souhaite promouvoir la consultation de la communauté étudiante à travers divers forums en ligne et de manière plus générale mieux informer les étudiants sur les diverses manières dont l’AÉUM
peut leur être utile. Pour ce qui est de l’accessibilité, M. Ibrahim aimerait voir plus de débats autour de l’accessibilité et de l’inclusion se dérouler au sein de la communauté mcgilloise, et assurer que les groupes marginalisés puissent se sentir plus inclus à l’AÉUM. Enfin, M. Ibrahim compte user de son expérience en matière de plaidoyer étudiant pour garantir une meilleure représentation des étudiants lors des discussions avec l’administration, et prioriser la planification financière à long terme en anticipant les coupes budgétaires à venir du gouvernement provincial. De tous ces objectifs, M. Ibrahim priorisera en premier lieu la communication, qui selon lui sera primordiale pour mieux accomplir ses autres projets.
Alexei Simakov
A
lexei Simakov veut du changement à l’AÉUM, et il le crie haut et fort. Il a participé à la mobilisation étudiante en 2011 pour s’opposer à l’occupation du bâtiment d’administration et se décrit lui-même comme une figure d’opposition en politique étudiante depuis. Il s’est opposé à la grève lors du Printemps étudiant et a travaillé pour le comité du non au sujet de la motion sur la Palestine cet automne. Il ne s’inquiète pas de ne jamais avoir été impliqué directement dans l’AÉUM. Selon lui, l’AÉUM a besoin de quelqu’un qui peut œuvrer pour les intérêts concrets des étudiants, pas de technocrates. Une chose est certaine, on ne peut pas accuser Simakov d’être vague dans ses promesses. Ses objectifs sont clairs: ouvrir les portes de
la bibliothèque Redpath, améliorer l’accès aux espaces d’étude ouverts jour et nuit, ramener les sandwichs à Snax et surtout, faire de l’AÉUM une organisation apolitique. Ce dernier point revêt une importance toute particulière pour Simakov: selon lui, l’AÉUM devrait œuvrer à unir la communauté étudiante plutôt qu’à prendre position sur des questions politiques. Par ailleurs, il ne croit pas du tout en l’efficacité des grèves étudiantes pour contrer les politiques gouvernementales. Il s’oppose férocement à l’arrêt des cours lors d’une grève. Selon lui, les étudiants qui ne souhaitent pas y prendre part ne devraient pas en subir les conséquences. Simakov veut recentrer les activités de l’AÉUM sur les problèmes du campus comme la température de McLennan en été, trop basse selon lui.
Aux yeux du Délit, Kareem Ibrahim est sans hésitation le plus compétent des deux candidats. Son parcours dans le monde de la politique étudiante a été, jusqu’à ce jour sans faute. Si nous l’attendons de pied ferme sur ce qu’il entend par «planification budgétaire à long terme», nous croyons en ses capacités pour peser concrètement dans le débat avec l’administration. En plus de désirer l’inclusion de toutes les voix au chapitre de la vie étudiante, Monsieur Ibrahim parle français, ce qui en fait un interlocuteur privilégié. Mais que demande le peuple? L’ouverture des portes de la bibliothèque Redpath ou un président compétent et respectueux?
Chloe Rourke
C
hloe Rourke est l’unique candidate au poste de v.-p. aux affaires universitaires. Son expérience en tant que sénatrice des Arts et Sciences auprès de l’AÉUM a pu la familiariser avec le fonctionnement des échanges entre les associations étudiantes et l’administration de l’Université. Mme Rourke estime qu’il est important qu’elle couvre tous les axes de son portefeuille. La thématique de la santé mentale est selon elle fondamentale et
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actualités
VP aux affaires universitaires doit être abordée avec sensibilité, mais rapidement. La candidate a souligné sa volonté de poursuivre et approfondir les campagnes de sensibilisation aux maladies mentales, trop souvent stigmatisées. La santé mentale comme la politique concernant le traitement des agressions sexuelles doivent être défendues et comprises par tous les partis concernés, de l’administration aux étudiants, mais doivent rester contrôlées et construites par les étudiants. De plus, la candidate compte conser-
ver une position ferme pour protéger les droits et les besoins des étudiants face aux coupes budgétaires endurées à McGill: il s’agira de faire entendre la voix de la communauté étudiante dans des débats majoritairement réservés aux professeurs et administrateurs. Enfin, Mme Rourke se dit investie par le devoir de familiariser les étudiants avec les actions de leurs représentants auprès des différentes associations au sein de l’Université, sur un campus très diversifié.
le délit · mardi 10 mars 2015 · delitfrancais.com
exécutifs de l’AÉUM 2015-16 Vp aux affaires internes
Johanna Nikoletos
C
’est dans l’Association Étudiante de la Faculté des Arts que Johanna Nikoletos a fait ses classes. Avec assurance, elle affirme que son présent poste de v.-p. social (qu’elle occupe en remplacement de Kyle Rouhani depuis décembre) ainsi que son expérience professionnelle en communications lui fourniront tous les outils nécessaires pour remplir le poste de v.-p. aux affaires internes à l’AÉUM. Mme Nikoletos base sa campagne sur quatre piliers: la communication entre l’AÉUM et les étudiants, l’amélioration de la semaine d’orientation, la recentralisation de l’image de l’AÉUM
et la poursuite de l’engagement de l’AÉUM dans la communauté. Une fois élue, Nikoletos veut concentrer ses énergies sur l’amélioration des communications entre l’AÉUM et les étudiants en diversifiant les voies de communication, même si elle ne parle pas de projets concrets pour atteindre cet objectif. Son but: prouver à la communauté mcgilloise que l’AÉUM est une association fiable qui joue un rôle essentiel. Au sujet des affaires francophones, Nikoletos prévoit d’augmenter la visibilité de la Commission des Affaires Francophones (CAF) lors de la semaine d’orientation et lui donner une voix lors de l’organisation de l’événement.
Lola Baraldi a le soutien du Délit. Sa connaissance des réalités francophones, bien qu’elle nous semble améliorable à plusieurs égards, la qualifie sans difficultés devant sa concurrente. Quoique nous l’ayons peu vue sur le terrain politique à proprement parler, Lola Boraldi est forte d’une solide expérience en communication et planification d’événements, nécessaire pour ce poste. De plus, si ses promesses sont tenues, nous pensons qu’elle pourrait devenir une personne clé pour la francophonie sur le campus. C’est donc vers elle, avec espoir, que notre regard se tourne.
Lola Baraldi
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tudiante en histoire, science politique et communications, Lola Baraldi a l’intention d’utiliser les réseaux et l’expérience en évènementielle qu’elle a acquise en politique étudiante par le passé pour mieux servir ses objectifs si elle devait devenir v.-p. interne de l’AÉUM. Elle est présentement v.-p. aux affaires externes de l’AÉFA, ainsi que représentante de la Faculté des arts au conseil de l’AÉUM. Communication, évènementiel et francophonie sont les trois sphère autours desquelles elle se concentre sa campagne. Vis-àvis de la communication, Mme Baraldi souhaite institutionnaliser le Comité Ad Hoc pour l’Engagement Étudiant, créé par l’AÉUM il y a quelques mois mais inactif jusqu’à présent, et qui permettra de consulter les étudiants et compiler leurs plaintes concernant l’AÉUM.
Zachariah Houston
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ntre les événements déficitaires comme la soirée 4 floors et le manque de transparence dans le budget, les défis sont nombreux pour le potentiel prochain v.-p. aux finances Zachariah Houston. Unique candidat au poste, il promet de s’attaquer à ces problèmes afin de redorer le blason de l’AÉUM auprès des étudiants. M. Houston occupe présentement le poste de représentant de la Faculté des sciences au conseil législatif de l’AÉUM.
Il fait de l’amélioration de la transparence des opérations financières de l’AÉUM sa priorité. L’étudiant compte réviser les règlements autour des finances et surtout, continuer à rendre le budget plus accessible à la communauté étudiante. Son expérience dans plusieurs autres initiatives de l’AÉUM est une source d’inspiration aussi pour les changements qu’il souhaite apporter. M. Houston travaille au café étudiant Le Nid depuis son ouverture et compte profiter de ses connaissances pour rentabiliser l’éta-
vp aux finances blissement et même planifier son expansion dans l’avenir. De plus, M. Houston attache une importance particulière à l’amélioration du système de vérification financière des clubs. Son objectif est de créer un comité spécial dédié à cette tâche afin d’améliorer les communications entre les clubs et les vérificateurs. Il souhaite aussi faciliter l’application à l’aide financière de l’AÉUM pour les différents groupes sur le campus. Là encore, son expérience lui sera précieuse comme il a siégé au comité de financement durant deux ans.
Kimber Bialik
D
epuis l’abandon de son adversaire Max Drabkin, Kimber Bialik est la seule candidate au poste de v.-p. clubs et services. Cette année, Mme Bialik était Coordonnatrice du Groupe d’intérêts de l’AÉUM et a participé au Comité de revue des services et au Comité Club ad hoc. La candidate est en outre forte d’autres expériences au sein des clubs mêmes: elle est actuellement la présidente ou co-prési-
Elle compte aussi écrire des rapports mensuels sur les activités du conseil exécutif de l’AÉUM, qui seront partagés par écrit et par vidéo. Côté évènementiel, Mme Baraldi veut créer un deuxième comité chargé de l’organisation d’évènements dédié à des évènements plus petits en collaborant plus avec les divers clubs du campus, ainsi qu’un calendrier des évènements en ligne qui permettrait d’alléger le listserv de l’AÉUM. Quant à la francophonie, c’est une priorité pour Mme Baraldi, qui affirme vouloir augmenter la visibilité de la Commission des Affaires Francophones (CAF) en établissant des liens entre celle-ci et d’autres groupes. De plus, si elle est élue, Lola Baraldi promet faire de son mieux pour trouver un local pour la CAF et la compagnie de théâtre francophone Franc-Jeu dans le bâtiment Shatner.
VP clubs et services dente de quatre clubs au sein de l’AÉUM dont deux visent à aider les enfants ayant des incapacités d’ordre physique ou mental, et deux représentent des intérêts des étudiants mcgillois. Si elle est élue, la représentation des clubs représentera l’aspect le plus important du mandat de Mme Bialik, dans le sens où les nombreux clubs de l’Université sont souvent exclus des négociations majeures. La candidate
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compte aussi en profiter pour étudier et aborder l’amélioration de l’infrastructure à disposition des clubs et services sur le court terme comme sur le long terme. Un autre objectif fondamental à son programme est de regagner, dans le cadre des négociations sur le renouvèlement de la convention collective avec l’administration, le droit pour les clubs d’utiliser le nom de McGill pour faciliter leurs initiatives de publicité.
actualités
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Société societe@delitfrancais.com
La foi du voyage, quatre Une étudiante de McGill participe luce engérant
L
e Délit (LD): Bonjour Léa, pourrais-tu expliquer brièvement le contexte du voyage que tu as entrepris? Comment as-tu entendu parler du programme InterFaith Tour? Léa Frydman (LF): L’année dernière, en vacances à Buenos Aires, j’ai rencontré Ilan, Josselin, Samuel, Ismael et Victor, cinq jeunes hommes qui m’ont dit faire le tour du monde de l’interreligieux. D’abord fascinée par l’idée d’un tour du monde, puis interpelée par celle de l’interreligieux, j’ai insisté pour enregistrer avec eux un débat qui a été filmé lors de la dernière étape de leur tour du monde. C’est à Montréal, en avril dernier, que j’ai passé une journée de débat en leur compagnie et celle de l’équipe de Standpoints. Les quatre thèmes centraux que nous avons abordés étaient: religion et état, religion et identité, religion et guerre et l’avenir de la religion. La qualité de cet échange m’a poussée à m’intéresser au sujet interreligieux dont les multiples implications sociales, politiques, identitaires ou même parfois économiques suscitaient en moi une vive réflexion. J’ai donc suivi de près leur projet et leurs actions avant de poser ma candidature pour faire partie de l’équipe qui s’élance cette année à la rencontre des initiatives et des principaux acteurs de l’interreligieux autour du monde. Avec Samir, Lucie et Ariane, nous prendrons notre envol le 1er juillet. LD: Depuis quand est-ce que le projet existe? Quels organismes
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sont impliqués? Comment est-ce financé? LF: Le projet existe depuis 2013. La première édition a été lancée par l’équipe que j’ai croisée en Argentine. C’était un projet pilote qui avait vocation à se perpétuer, puisque l’objectif est de couvrir d’année en année une partie du monde de l’interreligieux de plus en plus vaste. L’interFaith Tour est un projet de Coexister, le mouvement français interreligieux des jeunes, une entreprise sociale qui agit à travers le dialogue, la sensibilisation et la solidarité sous le slogan «diversité dans la foi, unité dans l’action». L’InterFaith Tour a été co-imaginé et co-fondé avec Sparknews, une plateforme de journalisme participatif en ligne. Nous sommes soutenus par de grandes institutions, comme le ministère français des Affaires étrangères et l’ambassade des États-Unis en France. Le réseau diplomatique français a accompagné la dernière équipe comme il devrait le faire cette année encore. Il constitue une aide précieuse pendant nos déplacements, d’une part parce qu’il assure notre sécurité, d’autre part parce qu’il nous guide dans nos rencontres sur le terrain. Nous travaillons également avec le KAICIID, un centre de recherche sur l’interreligieux basé à Vienne qui est le résultat d’une collaboration entre l’Autriche, l’Espagne et l’Arabie Saoudite. Le budget de l’InterFaith Tour est de 100 000 euros et son financement, assuré par des dons
privés ou publics (entre autres par les organismes mentionnés ci-dessus), est obtenu par la seule conduite de l’équipe. C’est évidemment un projet à but non-lucratif. Tous les fonds récoltés sont destinés à financer les transports, les démarches administratives, le matériel, ainsi que les outils de communication. Aucun bénéfice n’en ressort ni pour les participants, ni pour l’association à son initiative.
l’InterFaith Tour, nous allons rencontrer toutes les initiatives et représentants du monde de l’interreligieux, c’est-à-dire les points de transmission pour les interactions entre communautés de différentes convictions. Cela peut aller du pape François qu’ils ont rencontré l’année dernière à des dirigeants d’établissements scolaires qui intègrent dans leurs programmes un enseignement de l’interreligieux.
LD: Quelles sont les religions représentées ? Les gens que vous allez rencontrer seront-ils tous croyants? LF: On préfère parler de convictions. Au sein de l’association Coexister comme dans les équipes de l’InterFaith Tour, on compte des membres croyants, des non croyants et aussi des agnostiques qui ne se prononcent pas. De l’équipe de l’année dernière, Samuel est chrétien, Josselin agnostique, Victor athée, Ismael musulman et Ilan juif. Cette année nous sommes quatre: je suis juive, Ariane athée, Lucie chrétienne et Samir est musulman. On pourrait parler d’ «interconvictionnel», puisque l’on intègre des non-croyants dans notre démarche. C’est le sens d’ «Interfaith» dans le monde anglophone. À Coexister, on prône la Coexistence active comme facteur de cohésion sociale. Si on prend l’exemple français, un tiers de la population est athée. Il est donc impensable d’exclure une si grande partie des Français de notre démarche. Pendant
LD: Dans ta vie de tous les jours, la religion occupait-elle une place prépondérante avant que tu n’entreprennes ce projet? Porterez-vous des signes distinctifs en lien avec vos religions? LF: J’entretiens avec la religion une relation particulière. Il est, je pense, important de préciser que je suis juive d’origine, athée de conviction. Je ne suis donc pas croyante mais la religion juive fait partie intégrante de ma culture et de mon éducation, et donc de mon identité. Mes arrière-grands-parents du côté de mon père ont été exterminés durant la Seconde Guerre mondiale parce que juifs, et le reste de ma famille paternelle a perdu la foi suite à ces drames. Ma grand-mère maternelle est juive, pied-noir d’Algérie. Elle est arrivée en France après avoir donné naissance au troisième de ses sept enfants. Avec eux, j’ai longtemps célébré les fêtes juives, qui restent aujourd’hui les principales occasions de nous réunir en famille. C’est donc un lourd passé que je revendique. Il me semble
que la religion juive a cette particularité d’être une pratique et une communauté, une histoire et une culture parfois avant même d’être une croyance. Je ne dirais pas que la pratique religieuse occupait une place prépondérante dans ma vie de tous les jours avant que je n’entreprenne ce projet et ce n’est toujours pas le cas. C’est en revanche une partie cruciale de mon identité en cela que mon histoire familiale a défini mes valeurs et ma façon d’entrer en relation avec les autres. Mon arrière-grand-oncle, ancien déporté à Buchenwald et Auschwitz, chevalier de la Légion d’honneur, résistant et témoin à charge lors du procès de Maurice Papon, a participé activement, par ses nombreux témoignages, à définir pour moi les notions de dignité humaine et d’honneur jusqu’à son décès il y a quelques semaines. J’en profite pour lui rendre hommage. C’est ainsi que ma religion fait partie de moi. L’adjectif «juive» est donc une étiquette qui vulgarise une réalité complexe, mais surement au même titre qu’Ariane, Lucie et Samir ont des personnalités complètes et complexes dont la conviction n’est qu’une des multiples facettes. D’ailleurs, le projet de l’InterFaith Tour est de découvrir, promouvoir, documenter et mettre en lien des initiatives porteuses de potentielles solutions. Nous sommes donc là pour écouter, pas pour donner des leçons. Nous ne portons pas la voix de nos religions ou convictions respectives et ne porterons aucun signe distinctif pendant notre voyage.
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ENTREVUE
jeunes préparent leur bagage à un tour du monde interreligieux. LD: Aurais-tu entrepris un tel voyage s’il ne reposait pas sur la foi; je veux dire, est-ce que c’est le voyage et les rencontres qui t’attirent le plus ou c’est vraiment important pour toi que ce soit autour de la foi? LF: L’essence du projet est justement sa triple composante: l’interreligieux, la mobilité et l’engagement de la jeunesse. L’InterFaith Tour puise sa force et son originalité dans ses trois aspects, qui sont aussi il me semble la raison pour laquelle InterFaith Tour a occupé le paysage médiatique français et international l’année dernière. J’ai été séduite par le projet pour son impact social et parce qu’il démontre la capacité pour la jeunesse de s’impliquer dans une initiative à dimension mondiale, viable et autonome, soutenue par des institutions de taille. C’est un tout donc. Oui, le voyage me séduit, mais pour avoir quitté mon Paris natal à mes 18 ans, j’en connais aussi les plus dures réalités. La question de l’interreligieux m’interroge sur ma propre identité. L’expérience humaine qu’est la combinaison des deux m’a paru difficilement résistible. LD: Tu es étudiante dans quel programme à McGill? LF: Je suis étudiante en philosophie à McGill. J’étudie également le marketing et la langue arabe. Je trouve parallèlement à mes études un réel épanouissement dans mes différents engagements associatifs, par exemple la création, avec Victor Gassmann, de l’association francophone de théâtre à McGill: Franc-Jeu. J’écris de temps en temps pour Le Délit, aussi. Je prends une année de césure pour ce projet, qui est en réalité aussi lié à mes ambitions professionnelles puisque je suis portée vers une carrière dans le journalisme, le droit international et l’entreprenariat social. L’InterFaith Tour correspond à mes aspirations puisque pendant un an nous effectuons en équipe un travail de recherche académique, de journalisme et de diplomatie. Je reviendrai ensuite à McGill pour ma dernière année de baccalauréat en septembre 2016! LD: Pourrais-tu donner quelques précisions sur la composition de l’équipe cette année?
LF: L’InterFaith Tour prolonge l’action de Coexister en faveur de la Coexistence active en proposant à des jeunes de convictions différentes de faire l’expérience d’une vie commune pendant douze mois. Cela fait donc partie intégrante du projet que de vivre au sein d’une équipe multiconvictionnelle pendant cette période prolongée, 24 heures sur 24 et 7 jours du 7. Nous avons tous des expériences de vie, du voyage et de l’interreligieux très différentes, et cela va constituer une partie cruciale de la qualité humaine de ce voyage. Je pars avec Samir, Ariane et Lucie. Lucie Neumann, chrétienne, 19 ans. Lucie est en deuxième année d’études de gestion des entreprises et des administrations à l’IUT de Sceaux. Elle a rencontré l’association Coexister lors du Train de la Mémoire à Auschwitz en 2013, année pendant laquelle elle est devenue responsable sensibilisation du groupe parisien de l’association. Elle est aujourd’hui présidente du groupe Coexister Paris. Elle ne compte plus les heures de son engagement associatif dans l’interreligieux duquel l’InterFaith Tour est l’évidente continuité. Ariane Julien, athée, 27 ans. Ariane a suivi des études en sciences humaines, sociales et politiques. Habituée au voyage en complète autonomie, elle a notamment passé plusieurs mois en Algérie où elle a réalisé un reportage sur la liberté de la presse. Attachée au lien social, Ariane s’est impliquée dans le projet InterFaith Tour par volonté de créer des passerelles entre différentes communautés, religieuses ou non. Expérimentée dans le domaine journalistique et dans le montage de vidéos, l’InterFaith Tour est pour elle l’opportunité de mettre en application ses compétences dans un domaine qui lie l’Humain. Samir Akacha, musulman, 28 ans. Samir, après avoir vécu en Algérie dans ses jeunes années, vit aujourd’hui à Marseille. Il a rejoint Coexister à la suite d’un voyage à Jérusalem en 2013, qui a été sa première véritable expé-
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rience de l’interreligieux. Celle-ci lui a inspiré la tenace conviction que l’échange avec juifs, chrétiens et athées était nécessaire à l’exploration de sa propre identité. Il est à présent président du groupe Coexister Marseille. Convaincu de la place de la croyance dans une France laïque, Samir envisage l’InterFaith Tour comme faisant partie intégrante de son cheminement personnel dans l’interreligieux. LD: Pour l’instant, vous vous préparez à partir. Le départ est prévu le 1er juillet; d’ici-là, qu’estce que vous faites exactement ? LF: Le travail préparatoire est énorme! D’abord, nous travaillons activement à collecter le reste du financement du projet, dont nous avons déjà bien plus de la moitié. Avant le départ prévu dans plus de trois mois, il nous faut également finaliser l’organisation de nos transports. Nous voyagerons en avion mais essaierons de limiter l’impact environnemental de nos déplacements et donc de voyager aussi en bateau, en voiture, en train… Nous organisons aussi nos hébergements puisque nous dormons chez l’habitant partout, sans aucune exception, pendant un an. Nous contactons les initiatives que nous allons rencontrer, même si une partie des mises en relations se feront directement sur place. Enfin, nous travaillons sur la communication du projet et notre lancement médiatique qui aura lieu sous peu, 100 jours avant le départ. LD: À quoi ressemblera votre itinéraire? LF:Nous partons pendant dix mois autour du monde, puis nous effectuerons un tour de France de deux mois. En France, nous raconterons ce que nous avons vu lors de conférences de restitution dans les écoles, les mairies, les universités… Les capitales sont les points de chute et nous nous déplacerons dans les pays. LD: Le programme a l’air chargé. Tu as parlé de journalisme, publierez-vous des comptes rendus de vos rencontres? LF: Pour chaque pays, nous avons l’intention de produire un grand reportage écrit, une vidéo et une infographie. Avec la diffusion en ligne, nous pourrons transmettre une grande quantité d’information de manière claire et précise. x
Itinéraire
- Royaume-Uni 01/07/15 au 05/07/15 EUROPE Londres - Norvège 06/07/15 au 10/07/15 EUROPE Oslo - Russie 11/07/15 au 16/07/15 EUROPE Moscou - Pologne 17/07/15 au 20/07/15 EUROPE Varsovie - Bosnie-Herzégovine 21/07/15 au 25/07/15 EUROPE Sarajevo - Albanie 26/07/15 au 30/07/15 EUROPE Tirana - Tunisie 31/07/15 au 15/08/15 AFRIQUE Tunis - Liban 16/08/15 au 31/08/15 MOYEN-ORIENT Beyrouth - Jordanie 01/09/15 au 14/09/15 MOYEN-ORIENT Amman - Israël-Palestine 15/09/15 au 30/09/15 MOYEN-ORIENT Jérusalem - Sénégal 01/10/15 au 07/10/15 AFRIQUE Dakar - Burkina Faso 08/10/15 au 15/10/15 AFRIQUE Ouagadougou - Rwanda 16/10/15 au 23/10/15 AFRIQUE Kigali - Tanzanie 24/10/15 au 31/10/15 AFRIQUE Dodoma - Afrique du Sud 01/11/15 au 08/11/15 AFRIQUE Le Cap - Éthiopie 09/11/15 au 16/11/15 AFRIQUE Addis-Adeba - Oman 17/11/15 au 22/11/15 MOYEN ORIENT Mascate - Azerbaïdjan 23/11/15 au 29/11/15 EUROPE Bakou - Inde 30/11/15 au 10/12/15 ASIE New Delhi - Bhoutan 11/12/15 au 21/12/15 ASIE Thimphou - Mongolie 22/12/15 au 01/01/16 ASIE Oulan-Bator - Japon 02/01/16 au 10/01/16 ASIE Tokyo - Corée du Sud 11/01/16 au 19/01/16 ASIE Séoul - Philippines 20/01/16 au 28/01/16 ASIE Manille - Viet Nam 29/01/16 au 06/02/16 ASIE Hanoi - Malaisie 07/02/16 au 15/02/16 ASIE Kuala Lumpur - Singapour 16/02/16 au 23/02/16 ASIE Singapour - Indonésie 24/02/16 au 29/02/16 ASIE Jakarta - Chili 01/03/16 au 10/03/16 AMÉRIQUE Santiago - Brésil 11/03/16 au 20/03/16 AMÉRIQUE Brasilia - Venezuela 21/03/16 au 30/03/16 AMÉRIQUE Caracas - Mexique 31/03/16 au 07/04/16 AMÉRIQUE Mexico - États-Unis 08/04/16 au 30/04/16 AMÉRIQUE Washington - 30/04/16: voyage de retour vers Paris -
société
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chronique
Anna dans l’abysse
Raconter au prix d’une v ie | Esther Perrin Tabarly
«S
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE L’assemblée générale annuelle de la Société des publications du Daily (SPD), éditeur du McGill Daily et du Délit, se tiendra
i vous voulez continuer à travailler comme journaliste, c’est une servilité totale envers Poutine. Sinon, ça peut être la mort, le poison, ou un procès – selon ce que nos services spéciaux, les chiens de garde de Poutine, jugent approprié.» Voici ce qu’écrivait en septembre 2004 Anna Politkovskaïa pour le Guardian, sur ses craintes d’une rechute dans une «abysse soviétique». Quelques jours plus tôt, la journaliste russe avait survécu à une tentative d’empoisonnement; elle parlait en connaissance de cause. Quelques années plus tard, elle sera abattue dans l’ascenseur de son immeuble à Moscou. Des trois châtiments qu’elle évoquait, Anna Politkovskaïa n’a jamais eu droit au procès. Elle écrivait pour le petit
journal d’opposition libérale Novaïa Gazeta (fondé entre autres par l’ex-soviétique Mikhail Gorbatchev, en 1999), et de temps en temps pour le Guardian. Alors qu’elle n’était que la treizième journaliste assassinée depuis la consécration du président Poutine en 2000, c’est son nom qui s’est le plus ébruité. Anna Politkovskaïa était connue parmi les rares critiques du Kremlin pour ses récits de la guerre de Tchétchénie, de ses bombardements et camps de tortures, des enlèvements, et de la corruption. Son autre sujet de prédilection était le gouvernement Tchétchène sous le premier ministre pro-russe Ramzan Kadyrov, le manque de transparence, les nombreuses et opportunes disparitions… Politkovskaïa considérait que l’impuissance du peuple russe, désinformé, face à un système de justice qui cultivait l’impunité des autorités, était au centre du problème de la Russie de Poutine. Elle était un symbole pour ceux qui la connaissaient dans son pays de plume, où elle était bannie de la télévision. On a longtemps ignoré qui était coupable de l’assassinat de la journaliste. En 2014, soit huit ans après les évènements, cinq hommes ont été inculpés
dans l’affaire. Deux d’entre eux, dont le meurtrier et l’homme responsable de l’organisation de l’exécution, ont été incarcérés à perpétuité. Les trois autres ont reçu des peines allant de douze à vingt ans pour leur participation plus indirecte. Quatre de ces hommes proviennent de la même famille tchétchène. Cependant, nombreux sont ceux qui considèrent que justice n’a pas été faite: le commanditaire du meurtre reste inconnu. Il pourrait être au Kremlin comme il pourrait être un haut fonctionnaire du gouvernement tchétchène. Quelques jours avant de mourir, Anna Politkovskaïa avait publiquement traité Kadyrov de «criminel». Elle avait aussi provoqué de nombreuses frictions au sein du Kremlin scindé en groupe, sa mort aurait pu être le résultat d’une vengeance. Politkovskaïa restera un nom accolé à l’idée d’État dans l’État russe, à la corruption et au manque crucial d’une quelconque liberté de la presse dans la Fédération. Le doyen de la Faculté de journalisme de l’Université de Moscou, où Politkovskaïa avait étudié, a commenté à la suite de son assassinat: «l’honneur du journalisme russe a été tué.» x
jeudi le 19 mars
au Pavillon McConnell
Salle 204, 17h30
Les membres de la SPD sont cordialement invités. La présence des candidats au conseil d’administration est obligatoire.
APPEL DE CANDIDATURES La Société des publications du Daily, éditeur du Délit et du McGill Daily, est à la recherche de candidat(e)s pour combler
plusieurs postes étudiants sur son Conseil d’administration. Les candidat(e)s doivent être étudiant(e)s à McGill, inscrit(e)s à la prochaine session d’automne et disponibles pour siéger au Conseil d’administration jusqu’au 30 avril 2016. Les membres du Conseil se réunissent au moins une fois par mois pour discuter de la gestion des journaux et pour prendre des décisions administratives importantes.
Les candidat(e)s doivent envoyer leur curriculum vitae ainsi qu’une lettre d’intention d’au plus 500 mots à chair@dailypublications.org, au plus tard le jeudi 19 mars à 17 h. La période de nomination commence le jeudi 12 mars.
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société
le délit · mardi 10 mars 2015 · delitfrancais.com
Culture
exposition
articlesculture@delitfrancais.com
La Grèce accoste au Vieux-Port
chloé anastassiadis
Exposition d’envergure sur la naissance, l’histoire et l’héritage de la Grèce antique. chloé anastassiadis
Le Délit
«C
onnais-toi toi-même». Cette phrase attribuée à Socrate, et que je suis loin d’être la première ou la dernière à reprendre, semble être le fil conducteur de l’exposition «Les Grecs - D’Agamemnon à Alexandre le Grand» présentée au musée Pointe-à-Callière. Bien que tout musée d’histoire se targue de créer des liens entre le passé et le présent, les organisateurs de cette exposition auraient pourtant pu se contenter d’un simple inventaire d’antiquités. Les objets présentés représentent près de cinq mille ans de création continuelle, et certains sont tellement précieux qu’ils n’avaient jamais quitté la Grèce jusque-là. Parmi eux, le fameux masque mortuaire dit «d’Agamemnon», que Schliemann, qui le découvrit, nomma d’après le tristement célèbre chef mycénien. L’archéologue entre ainsi dans la lignée de tous ces Européens, puis Américains qui, passionnés de mythologie, cherchèrent dans la Grèce contemporaine les traces d’un passé glorieux. Un passé parfois lourd à porter, de l’aveu même des Grecs, et la source d’un (petit) complexe d’infériorité dont l’écrivain Nikos Dimos se moque gentiment: les Grecs ne sont plus ni guerriers au pied léger, ni beautés diaphanes aux rondeurs assumées, ni éphèbes aux sourires de sphinx. Cependant, la beauté de cette exposition, c’est qu’elle nous rappelle que cet héritage est aussi le nôtre: si la démocratie n’est pas encore universellement acceptée, nous avons tous le droit de se l’approprier. Enfin, se l’approprier;
il y a aussi un art et une manière de le faire. Lorsqu’au 19e siècle les Européens partirent à la découverte des merveilles d’une Grèce qui se libérait du joug ottoman, certains de ces touristes se firent
protogéométrique, géométrique, archaïque, classique et hellénistique suivent. Chacune de ces époques est marquée par l’essor puis la perte d’influence d’une région, d’une cité, d’un royaume.
Se rappeler le passé pour le comprendre, non pour le pleurer assez mal remarquer. Byron, qui gravait son nom sur les ruines, fut pardonné car il participa à la guerre d’indépendance; en revanche, Lord Elgin, diplomate britannique duquel les agents avaient obtenus auprès des Turcs l’autorisation de s’approprier les marbres de l’Acropole, faisant scier les morceaux «encombrants», ne fit pas grand bien à la réputation des Britanniques. Si aujourd’hui le Royaume-Uni est l’absent remarqué de cette tournée mondiale, c’est bien un pied de nez fait à l’ancien ambassadeur. Cependant, les objets exposés ne représentent pas seulement l’âge classique de la Grèce, époque à laquelle Athènes dominait le monde grec tant sur le plan artistique que politique et militaire, et où le Parthénon fut bâti. L’exposition commence avec le néolithique, puis les époques cycladique, minoenne, mycénienne,
le délit · mardi 10 mars 2015 · delitfrancais.com
Par des styles aussi: la simplicité des statuettes des Cyclades forme un contraste brutal avec la richesse des ornements mycéniens. D’ailleurs, la transition entre les différentes époques n’est pas claire. Comment à la somptueuse dague mycénienne ornée de tortueux motifs taillés dans l’or peuvent donc succéder les candides dessins géométriques? Je vous le dis tout de suite, la réponse n’est pas donnée explicitement dans l’exposition. Beaucoup de réponses n’y sont pas, et c’est cela une des qualités de l’exposition. Le public n’en sort pas repu, mais au contraire assoiffé. À première vue bien sage, l’exposition «Les Grecs D’Agamemnon à Alexandre le Grand» est pourtant loin de se contenter de chanter les louanges d’un âge d’or heureux. Les Spartiates étaient en effet de redoutables soldats, mais difficile
d’oublier, même devant le buste d’un Léonidas, la sinistre pince que les soldats emmenaient avec eux pour extirper les flèches du corps des blessés. Ou encore, devant les pendentifs d’or finement ciselés des princesses, de ne pas penser au triste sort des sept femmes de Philippe II. Se rappeler le passé pour le comprendre, non pour le pleurer, c’est en somme le but de l’exposition. Se rappeler que nous devons beaucoup aux Grecs, même notre langue. Au moment où les terroristes de Daech détruisent leur propre histoire, cela fait peut-être mal quand on se rappelle à quel point celle-ci fait partie de notre identité; mais on se sent un peu mieux en se disant que
En sortant de l’exposition, on se repose la question: qui sont donc les Grecs? Tant de traditions, de modes de vie, de lieux, et pourtant une seule culture. Comment Athéniens et Spartiates ont-ils pu s’unir contre les barbares? «Barbares»... C’est justement là que réside la réponse. Le barbare est celui qui ne parle pas le grec, celui qui n’est pas humain par conséquent. C’est un terme qui oppose deux mondes, celui de l’Autre sans culture, et celui de l’homme civilisé. Les Grecs avaient leur propre façon de catégoriser les humains. Nous ferions bien cependant, nous dont la langue a tant hérité de la leur, de réfléchir à deux fois avant d’ouvrir
Tant de traditions, de modes de vie, de lieux, et pourtant une seule culture l’histoire ne meurt pas complètement, quelles que soient les attaques lancées contre elle. Sous les yeux émerveillés des enfants, des vidéos montrent un artisan grec reproduire, armé des mêmes outils que ses ancêtres, les boutons dorés trouvés dans les tombes mycéniennes. Une tradition que l’on crut un jour perdue, mais qu’historiens, archéologues, artisans, et bien d’autres ont pu ressusciter. gracieuseté du musée pointe-à-callière
la bouche. Appeler l’autre un barbare, c’est admettre qu’aucun accord, aucune communication n’est possible. C’est renoncer à la paix et déjà parler de domination et de guerre. C’est la peur de l’inconnu. Comprendre les Grecs, les voir tels qu’ils étaient et non tels qu’ils sont pleurés, c’est aussi ouvrir son esprit. Grâce à la participation de plus de vingt musées grecs, le musée Pointe-à-Callière réussit le pari de nous faire nous sentir un peu plus proches de ces Grecs, qui jusqu’au tombeau pleuraient la mort et célébraient la vie. x
Les Grecs - D’Agamemnon à Alexandre le Grand Musée Pointe-à-Callière Jusqu’au 26 avril 2015 $12 prix étudiant
CULTURE
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rentrée littéraire
Écrire entre parenthèses Patrick Nicol publié pour la première fois au Quartanier.
mahaut engérant
baptiste rinner
Le Délit
A
près trois romans chez Leméac, un autre chez VLB et un essai sur les événements de 2012 autour de la grève étudiante publié chez La Mèche, Patrick Nicol revient ce mois-ci avec un livre publié dans la série QR au Quartanier, La nageuse au milieu du lac. Le Quartanier a l’habitude de sous-titrer ses livres par le genre du livre en question, roman, prose narrative, fiction, fictions, succession. Il y a évidemment un jeu sur le genre, ce à quoi s’amuse Patrick Nicol avec son album, sous-titre de La nageuse au milieu du lac. De quoi serait-ce un album? Le livre est ponctué de courtes parties, entre une et dix pages, qui donnent d’abord l’impression de tableaux ou de poèmes en prose. Ces morceaux de texte peuvent se lire progressivement comme des nouvelles, prenant de l’ampleur au fil du livre. Il s’agirait plus précisément d’épisodes, épisodes dans la vie d’un prof de cégep alors que sa mère est en train de mourir. Le narrateur, qui comme l’auteur s’appelle Patrick et enseigne le français au cégep de Sherbrooke, évoque des épisodes de son enfance, y mêlant les femmes de sa vie, ou plutôt les femmes dans sa vie: sa mère, sa fille, ses blondes, ses étudiantes, ses collègues. Ce narrateur joue de dédoublements, images
réfléchissantes de femmes, sa mère, lui-même. On assiste à la douce et subtile folie d’un pseudo-schizophrène hanté par la maladie qui a des troubles de concentration. Sa prose est ponctuée de doutes, de hantises, d’erreurs: «J’ai peur à l’erreur. Je pense à l’erreur et j’ai peur.» La lecture de La nageuse au milieu du lac est passionnante à la lumière des recherches récentes autour du roman québécois, notamment avec Michel Biron, qui a développé la notion de conscience
du désert dans un essai du même nom paru en 2010 chez Boréal, et plus récemment avec Isabelle Daunais et son essai Le roman sans aventure (Boréal, 2015) (Tous deux sont par ailleurs professeurs au Département de langue et littérature françaises de l’Université McGill). La nageuse s’inscrit effectivement dans la lignée des romans québécois, sans aventure, dans lesquels se déploie le drame silencieux d’une pensée vagabonde et pourtant enfermée, des personnages sans
lieu, sans présent, sans avenir, et seulement de vagues réminiscences d’un passé qui n’a peut-être pas eu lieu. Cela se fait pourtant sans faux lyrisme romantique, sans apitoiement même. La nageuse, comme ses illustres prédécesseurs – auxquels elle n’a rien à envier – est un livre qui se fait dans l’échec: «C’est effrayant tout ce qu’il me faudrait réussir et que je n’arrête pas d’échouer.» Et plus loin «J’ignore comment ça se fait, mais la capacité
d’accomplir m’a quitté.» On ne peut s’empêcher de penser à un Hubert Aquin. D’ailleurs, le lac du titre serait-il le lac Léman de l’incipit de Prochain épisode? Un lac tranquille, où rien ne se passe, dans un à-côté de l’histoire. Si la question nationale se lit entre les lignes au fil de La nageuse, le dernier épisode est un peu plus explicite et confirme cette lecture. Le narrateur, apparemment installé à Philadelphie, envie les Américains et leur narrative, le mythe des Pères fondateurs. Que reste t-il à un pays sans aventure, en marge de l’histoire, sans narration collective? Si le narrateur a conscience du désert, il a aussi conscience de l’écriture et c’est cela, l’aventure dans le roman québécois. À l’image d’un Ducharme, c’est la langue qui se fait aventure, c’est par la langue que se remplit le vide romanesque. Patrick Nicol et son écriture itérative jouent avec la langue, sur la phonétique, la diction, les homophones hétéromorphes, les participes présents et les adjectifs verbaux. Nicol tire sans répit, avec une subtilité cynique et un sourire en coin, à boulets rouges sur les conventions langagières, les discours convenus, le conformisme des réunions et la prédictibilité des échanges. Il écrit entre parenthèses l’indétermination propre à la littérature québécoise et l’absence d’horizon au pays de Québec. x
Lever le voile Abnassi Shalmani nous livre un récit autobiographique revendicateur. éléonore nouel
Le Délit
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homeiny, Sade et Moi, c’est l’histoire d’une petite fille iranienne qui, du haut de ses six ans, lorsque Khomeiny et les «barbus» (gardiens de la République islamiste) prennent le pouvoir, se révolte contre le voile qu’on lui impose en courant nue dans la cour de récréation de son école. Révoltée, provocatrice, Abnousse Shalmani devenue adulte fait paraître en avril 2014 ce livre autobiographique. Le récit commence avec sa vie à Téhéran, avant, pendant et après la Révolution islamiste de son pays, puis continue à Paris, en France, terre d’exil pour ses proches qui ont choisi de fuir pour continuer à vivre. Un départ lourd de conséquences pour sa famille qui se retrouve démembrée, éclatée par les circonstances et les événements, par l’incompréhension de certains envers la tolérance des uns et la soumission des autres.
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Culture
Dans ce livre profondément optimiste et plein d’espoir, Abnousse Shalmani présente non seulement sa vie mais aussi un point de vue critique des événements socio-politiques en France et dans le monde, une critique on ne peut plus actuelle discutant de Charlie Hebdo, de Marine Le Pen et des «barbus», de l’importance de ne pas confondre «cultuel et culturel», et particulièrement du corps féminin, si souvent stigmatisé. Des arguments appuyés sur une culture par les livres, et notamment un regard sur la femme transformé par sa «rencontre» avec Sade et Pierre Louÿs. Khomeiny, Sade et Moi, c’est le récit de l’exil, de l’adoption d’une nouvelle culture, de la lutte pour l’intégration. C’est l’histoire de l’Iran, des printemps arabes, de la France surtout: de la prise de la Bastille aux coupes du Monde de football de 1998 et 2006, en passant par les élections de 2002. C’est une déclaration d’amour à ce pays qui l’a parfaitement adoptée et dont elle est devenue citoyenne
à la date symbolique du 11 février 2009, trentième anniversaire de la République islamique en Iran. Khomeiny, Sade et Moi, c’est une ode à la femme forte, au corps libéré, aux «putes» et à toutes les autres; un discours profondément féministe destiné à tous, hommes comme femmes. C’est une critique de tout et de tous, des «vieux barbus» comme de la jeunesse anarchiste. C’est une lutte contre les préjugés, une guerre contre le voile et contre la violence faite aux femmes de toutes religions, de toutes nationalités. Mais l’œuvre de Shalmani est aussi et surtout un appel à la tolérance, à l’ouverture d’esprit, et au respect de l’autre en tout temps et toutes circonstances. Par ses mots crus et ses opinions loin d’être voilées, Abnousse Shalmani offre un regard radical restant frais et réfléchi. Un livre franc, drôle et intelligent que je vous invite à dévorer avec empressement, particulièrement en cette semaine d’action pour les droits de la femme. x
«J’aimerais que les petites filles soient félicitées comme les petits garçons, et à haute voix, des ravages probables qu’elles pourraient faire avec leur cul.» (p.169) «Je me confronte à la violence imaginaire de Sade pour être capable de tenir tête à toute forme de violence réelle.» (p.213)
frédérique lefort
le délit · mardi 10 mars 2015 · delitfrancais.com
Rentrée littéraire
Auteure cherche lecteur compréhensif Claire Legendre dévoile les angoisses qui contrôlent sa vie. amandine hamon
Le Délit
«N
ous cultivons en nous-mêmes les monstres qui nous dévorent», écrit Claire Legendre dans son nouveau livre publié chez Les Allusifs. Le petit livre d’une centaine de pages est sorti en janvier 2015, né d’une idée de créer une collection sur les peurs, imaginée par Jean-Marie Jot. Entre essai et récit, Le Nénuphar et l’araignée est un inventaire des peurs, une réflexion sur ces angoisses qui façonnent le comportement. En partageant ses propres faiblesses, l’auteure, professeure de critique littéraire à l’Université de Montréal, examine sa vie d’hypocondriaque, de paranoïaque, de superstitieuse, ou tout simplement d’une personne comme les autres. Vivre otage de ses peurs En trente-cinq courts chapitres, Claire Legendre raconte les expériences déterminantes de sa vie: ses jeux d’enfance, ses rêves de jeunesse, ses histoires d’amour, sa peur des insectes, ses déménagements… Elle relie chaque souvenir à une angoisse. Particulièrement affectée par la peur que l’on envahisse son
intimité, l’auteure résume son inventaire dans l’analogie entre l’hypocondrie et l’arachnophobie, une métaphore dans laquelle elle compare ses organes malades à des insectes (d’où le titre qui joint l’araignée au nénuphar, mot que l’auteure utilise pour désigner sa maladie du poumon). L’auteure rappelle l’ironie tragique qui frappa Œdipe, et souligne ainsi la peur de ne pas contrôler son destin, de découvrir des parasites comme obstacles à sa finalité: un insecte dans les draps, un amant dans le placard ou un cancer du poumon l’angoissent parce qu’ils la prennent par surprise. Pour elles, les maladies envahissent le corps de la même façon vicieuse que l’araignée apparait dans un coin de la maison, ce qui la rend hypocondriaque. Elle se retrouve à avoir peur de trouver des maux avant même d’en avoir, provoquant ainsi ellemême des symptômes. Confession intime Dans un style très simple et direct, Claire Legendre se dévoile en examinant son for intérieur et exclut le monde de son récit, qui ne concerne qu’elle, ses jalousies, ses maladies, ses peurs et ses espoirs. Elle n’abandonne son corps que lorsqu’elle raconte un
séjour à l’hôpital. Dans ce chapitre bouleversant, l’auteure décrit la plus grande invasion d’intimité que l’on puisse vivre, expérience si aliénante qu’elle utilise la deuxième personne du singulier pour parler d’elle-même. Elle se tutoie, comme si elle avait été sortie d’elle-même, se résignant à l’hôpital à être traitée comme un objet et non plus comme un sujet, abandonnant son contrôle sur son propre destin au savoir des infirmières et du chirurgien. Le récit devient général et impersonnel, comme pour rappeler l’aspect procédural et public d’un séjour à l’hôpital.
lui permet aussi de transformer ses malheurs en lyrisme et la mort comme finalité. L’auteure en accuse l’orgueil démiurgique du romancier. Il semble que cet inventaire soit un remède pour Claire Legendre, qui consacre son dernier chapitre à une liste exhaustive de ses angoisses, terminant par la peur de ce que le lecteur pensera d’elle. Même si son écriture est simple sans trop de charme, Le Nénuphar et l’araignée est
touchant par sa sincérité et le dévoilement intime qu’il offre. L’auteure se détache de son orgueil et se révèle entièrement pour trouver la source de ses plus grandes faiblesses, mais aussi pour proposer une réflexion sur la psychologie des relations sociales. Dans ce que l’auteure appelle «une génération occupée à mesurer sa vitesse d’autodestruction», ce serait par peur de se détester soi-même que l’on se met à détester les autres. x
Remèdes Tout au long du récit, Claire Legendre mentionne différents types de remèdes, comme les anxiolytiques qui couvrent les peurs sans nécessairement les faire disparaître. Garder un coup d’avance est le moyen le plus sûr de ne pas être surpris par l’araignée, la maladie ou la trahison. Ainsi, ses peurs se traduisent en besoin de contrôler, d’organiser, de rationaliser sa vie. Écrivaine, Claire Legendre raconte donc qu’elle a fini par transformer sa vie en chantier de livre, dans lequel tout contribue à une totalité signifiante, ce qui
luce engérant
chronique
Énigme à tics Gwenn Duval | Petit cours d’écriture à l’usage de tous. ballon de baudruche à quiconque trouve, par la force de son souffle, la réponse sans trébucher sur les dictons. Coup de vent, lecteur, c’est mon thème de la semaine, je reprends la théorie du verbe et je la laisse de côté, elle a perdu la côte, dévalé la côte, les poules ont des dents, tout le monde sait ça. Ce mardi, c’est lecture à rebours, une nouvelle proposition s’est dessinée à l’horizon.
S
alut lecteur, tu m’excuseras, je n’ai pas beaucoup de temps cette semaine, seulement 500 mots pour te faire deviner. C’est comme d’habitude? Pas tout à fait, et je me retiens de te lancer le défi d’aller compter mes mots. J’offre un
Ici, début, point zéro À voix haute, plan vertical, exploration en altitude, voyage à travers les nuages, coup de rame dans les gouttelettes, évaporation parallèle. Refus conjugatoire. Non à la dérivation en fonction du sujet et du temps. Récif
le délit · mardi 10 mars 2015 · delitfrancais.com
approximatif, à tâtons. Nouvelle conjugaison, fonction d’espace. Axe vertical: i-grec. Escalade, escapade de l’idée dans le mot. Premier pas: niveau zéro, retour aux sources. O, eau, oh! Exclamation, étonne, détonne, des tonnes de possibilités! Trop peu d’expressions univoques et pourtant… douceur de certains sons. Drôle de compréhension, mot vase, groupe obscur. Répétition des rapides, remous, ressac, vague, perte de sens, jamais, multiplication, choix, galère, prospère. (Joie, manière, arrières), ATTENTION! Coup monté sur échasses, passe. Chanson, sessions, thème, nosnahc snoisses emèht. Kwak, kot kot kot. Origine, espèce d’humanoïde!
Tu m’as crue? Moi je cris «vive les verbes!» et quand je dis «n’importe quoi!», j’espère que tu n’entends pas «j’apporte quoi?» Laisses tout derrière, apporte juste ta tête, apporte-la partout, par tous les vents, tous les temps, par tous les ports. Une âme dans chaque port, un port dans chaque âme. Une porte pour chaque trame et sonne le cors, vois la dérive. Riverain sournois, ton trottoir longe le fleuve et l’afflux ronge l’averse. Amer, amer, un amer en mer est un repère. Côtier du large, sais-tu que ta ville est une île? Délirant, rang de délit. Sais-tu ce qu’une pierre posée en délit? Une pierre disposée dans un sens différent que celui du lit, maintenant vous savez. Un sens différent que celui qui se lit, un
sens lifférent de celui qui se dit. Le fleuve est sortit de son lit, la lyre est sortie de son fleuve, l’axe coule et mon cap oscille comme un enfant naïf cherchant la source de l’instinct avec sa baguette en chantée. Timbré comme une enveloppe à la poste, mon je se dédie de tout ce que je n’ai pas dit, mon je se délie de tout ce qui échappe au timbre du rire. Comme on fait son lit on se couche, je vais te le dire, lecteur, ce qui a guidé mes pas ce soir. Je vais l’annoncer, vaste lectorat, ouvre bien les orteils: la quarte de do + TI + va-nus-pieds. Il y a des nuits blanches et des cafés noirs à l’horaire, il y a 500 mots soumis aux intempéries, aux limites de l’épuisement des ressources énergétiques, au tangage de la vie quoi! x
Culture
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danse
La sociologie est un sport de combat Le duo Greco/Scholten explore les rapports qui existent entre danse et boxe. Mathias Bronz
Le Délit
A
près une programmation aussi canonique (Pina Bausch) qu’irréprochable (O Vertigo, Akram Khan ou encore Cherkaoui, pour ne citer qu’eux), c’est au tour d’Ickamsterdam d’être invité à la Place des Arts par le diffuseur Danse Danse. Menée par le duo Emio Greco/Pieter Scholten, fraichement nommé à la tête du Ballet National de Marseille, la compagnie y présente le très primé Rocco, dont le titre et le propos s’inspirent du classique de Visconti, fresque néo-réaliste sur fond d’après-guerre et de boxe. Cette double thématique de la violence (infligée sur le corps physique et sur le corps social), on la retrouve in medias res dans la pièce de la compagnie néerlandaise. Ainsi, dès l’entrée dans la salle (dont la scène a été remplacée par un ring), le spectateur découvre deux hommes, torse nu, une cigarette à la bouche, se dévisageant brutalement et longuement. Et pourtant, voilà l’horizon d’attente d’un antagonisme violent rapidement déjoué par l’arrivée, depuis les gradins, de deux autres interprètes déguisés en Mickey Mouse hyperactifs, dont les mimiques caricaturales se superposent à l’absurdité d’une
bande-son juvénile et cartoonesque. Progressivement, les deux lurons s’immiscent sur le ring, et finissent par s’y stabiliser, hors de la rivalité des deux premiers danseurs. Un cône luminescent asperge subitement le centre du plateau. Les deux combattants s’y dirigent lentement. Enfin, le pugilat débute.
que cela implique. Le mouvement y devient une arme de conquête du territoire; les déplacements une façon de remodeler la carte, d’ouvrir ou de fermer des fronts. Rocco déploie ainsi une esthétique martiale de la stratégie, dans laquelle chaque geste est aussi fébrile que décisif, parfois imprécise mais efficace et novatrice, toujours brusque.
spectateurs, et fait ainsi exister la thématique de l’affrontement et du dévisagement hors-scène, au sein du public lui-même. Ensuite parce qu’en supposant nécessairement une égalité de visionnement des spectateurs, elle oblige une symétrie parfaite de la part des danseurs et conditionne par là même une danse cardinale et dynamique Laurent Ziegler
Un autre film nous l’a appris: la sociologie est un sport de combat. La volonté du duo Greco/Scholten est de présenter la boxe, par l’intermédiaire de cet espace conflictuel qu’est le ring, comme un microcosme sociétal, avec tous les enjeux de domination, de lutte et d’aliénation
Le programme scénographique demeure la clef de voûte du spectacle et fait du choix d’un ring en lieu et place d’une scène traditionnelle une contrainte hautement génératrice et fertile. D’abord parce qu’elle ouvre Rocco aux possibilités de la quadri-frontalité des
puisque répétée face à chacun des quatre gradins. Ce rythme, Rocco l’articule aussi en respectant parfaitement la temporalité épuisante d’un match de boxe, en présentant la chorégraphie sur le mode fragmentaire du round: trois minutes d’action pour une minute de repos.
L’enjeu névralgique de Rocco est risqué; il semble à la fois esthétiquement original et politiquement trouble. Déterritorialiser le vocabulaire de la danse vers celui de la boxe au travers de leur dénominateur commun — le corps — c’est nourrir l’art scénique et permettre l’enrichissement de sa syntaxe, à l’instar d’un Sidi Larbi Cherkaoui (Sutra). Mais au lieu de tenir d’une main de fer cet équilibre hybride, Rocco multiplie les oxymores gestuels, accordant une phrase de sa chorégraphie à la confrontation et aux mouvements d’uppercut, la suivante à l’homoérotisme ou aux ronds de jambes scolaires. Cette dimension hautement antithétique, que l’on retrouve dans la surabondance chiasmique des plus élogieux articles consacrés au spectacle, est douteuse. Proposer (ou se réjouir de) la réconciliation de la boxe et de la danse, c’est présupposer leur opposition. C’est donc travailler dans le sens de l’idéologie dominante, en réactualisant le manichéisme mensonger d’une série de couples oppositionnels: virilité/ sensualité, divertissement/art, populaire/noble. On suppose que là n’était pas la volonté des chorégraphes, souhaitant sûrement désamorcer les clichés par une complexe mise en abyme critique et caricaturale. Et pourtant, entre l’intention et la réception, quelque chose semble s’être égaré. x
CHRONIQUE VISUELLE
L’illus’ tout cru
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Culture
luce engérant
Le Délit
le délit · mardi 10 mars 2015 · delitfrancais.com
Essai-photo
mars.nyc.2015 philippe robichaud
Le D茅lit
le d茅lit 路 mardi 10 mars 2015 路 delitfrancais.com
Culture
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