Publié par la société des publications du Daily, une association étudiante de l’Université McGill
Mardi 29 septembre 2015 | Volume 105 Numéro 3
Pour Angus depuis 1977
Volume 105 Numéro 3
Éditorial
Le seul journal francophone de l’Université McGill
rec@delitfrancais.com
Y a-t-il un pilote dans l’association? julia denis
Le Délit
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ès aujourd’hui, le mardi 29 septembre, l’Association Étudiante de l’Université de McGill (AÉUM), sera sans Directrice Générale (DG). Jennifer Varkonyi, nommée à ce poste en février dernier a annoncé son départ il y a trois semaines. Elle a quitté son bureau du bâtiment Shatner hier soir, le téléphone à la main, en parlant au Délit. Les raisons de son départ sont «personnelles». Kareem Ibrahim, le président de l’AÉUM, avec qui Le Délit s’est entretenu en exclusivité hier matin a estimé qu’il ne pouvait pas nous donner les raisons de son départ, sous couvert d’une certaine confidentialité. Il a qualifié cette démission de «très déstabilisante» et l’a jugée «dommage», mais a affirmé qu’il respectait «cette décision». Jennifer Varkonyi, après une réponse par courriel tout aussi officielle que lapidaire, nous a laissé comprendre qu’il s’agissait de raisons familiales sur lesquelles elle ne souhaitait pas s’étendre. Il est regrettable qu’une information aussi importante n’ait pas été relayée plus tôt, et que même aujourd’hui nous devions traquer l’information pour se faire une image objective de la situation. L’équipe de l’AÉUM a préféré organiser un plan de contingence en urgence avant même de prévenir les étudiants qui sont pourtant les premiers concernés par la stabilité d’une association qui les représente et qu’ils financent. Il nous a fallu passer nos courriels au peigne fin et compter sur nos contacts personnels afin de comprendre l’ampleur de la situation. Un manque de communication et un mystère bureaucratique qui pourraient expliquer pourquoi l’affaire –pourtant grave– n’a pas été couverte par l’ensemble des journaux étudiants. Le poste de DG de l’AÉUM est d’une importance capitale pour l’équilibre de l’institution et pour sa durabilité face aux changements annuels des équipes exécutives d’étudiants élus. Le DG supervise trois portfolios concernant le bâtiment Shatner, les finances de l’AÉUM, et les ressources
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humaine de l’association. Ce sont des dossiers qui nécessitent un suivi régulier sur le long terme. La dernière DG, Pauline Gervais, avait quitté le paquebot après 12 ans de service. Le Directeur Général –qui n’est pas un étudiant mais bien une personne diplômée ayant déjà eu de l’expérience dans la gestion d’institution et d’équipes de cette envergure– est en quelque sorte le gardien de la mémoire institutionnelle de l’association. Une charge presque maternelle vis-à-vis des étudiants élus pour seulement quelques mois à la tête de l’AÉUM, changeant de visage comme d’idéologie, et de manière de fonctionner comme de programme. Le Président de l’Association étudiante pour l’année 2015-2016, Kareem Ibrahim, l’admet, cet évènement est extrêmement déstabilisant: c’est «quelque chose qui pourrait changer le cours de l’année entière». Déjà cette démission déstabilise énormément l’organisation de l’AÉUM. Avant qu’un nouveau DG ne soit recruté, les responsabilités de la DG seront en majorité transférées à l’équipe étudiante de Kareem Ibrahim. Celui-ci explique qu’il reprendra le portfolio des ressources humaines sur lequel il travaillait déjà en conjoncture avec Jennifer Varkonyi. Le v.-p. aux Finances et Opérations, Zacheriah Houston, se chargera des affaires de finances autrefois couvertes par la DG. Le portfolio de la gestion du bâtiment reviendra à Kimber Bialik, v.-p, aux Clubs et Services. Même si Kareem Ibrahim estime qu’ils ont les capacités pour porter ces nouvelles responsabilités, il a aussi conscience que cela va les empêcher de mettre en place les projets pour lesquels ils ont été élus l’année dernière. L’ensemble des étudiants sera donc touché: beaucoup des promesses qui les avaient portés jusqu’aux urnes ne seront pas tenues. On se maintiendra en équilibre à défaut d’avancer. De plus cette transition est très coûteuse pour l’AÉUM. «L’échec précipité de cette embauche nous a été coûteux» confie le président. Quant à la recherche d’un nouveau DG, elle va d’autant plus creuser le budget de l’association: Kareem Ibrahim a expliqué au Délit que les services d’un chasseur de tête coûteraient autour de 15 000 dollars. Le
président de l’association admet que pour le moment il «ne sait pas encore exactement où on va trouver l’argent». Un type de politique budgétaire «qu’on aime pas faire» dit-il; une politique incertaine et abstraite des plus inquiétantes dirons-nous quand on sait combien les finances de l’AÉUM sont serrées. Le départ précipité de Jennifer Varkonyi risque de causer des blessures bien plus profondes qu’un déséquilibre budgétaire ou qu’une année sans mise en place de nouveaux projets. «On ne peut pas dénier que beaucoup de la mémoire institutionnelle de l’AÉUM va être mal transférée voire perdue», nous affirme-t-on. Car chaque action de cette nouvelle équipe aura des répercussions pour le développement –ou devrionsnous dire aujourd’hui la survie?– de l’association étudiante. Comment de simples étudiants en Baccalauréat, comparables à chacun d’entre nous, pourront porter autant de responsabilités sans le soutien et l’expérience d’un directeur? Comment former un nouveau directeur apte à assurer la pérennité de l’institution? Comment expliquer un événement si précipité? Comment ne pas répéter les mêmes erreurs? Ainsi l’AÉUM se retrouve dans la tourmente. Malgré l’attitude tant bien que mal positive et le sourire de Kareem Ibrahim, beaucoup de questions se posent: que va devenir l’institution censée représenter les étudiants? Quid du programme des candidats? Va-t-on assister à un statu quo par rapport à l’année dernière - préférable à une débandade, certes, mais bien loin des espoirs suscités en début d’année par la nouvelle équipe exécutive? Ou bien aura-t-on le droit à l’effondrement des trois piliers de l’association, à savoir améliorer «l’accessibilité et la qualité de l’éducation», fournir «des services de qualité» et «promouvoir des opportunités sociales, culturelles et personnelles»? Avec une direction amputée et une gestion qui risque de prendre des allures de soins palliatifs, les motifs d’inquiétudes sont grands. x Un communiqué de presse de la part du Président de l’AÉUM sera publié dans le courant de la semaine.
rédaction 3480 rue McTavish, bureau B•24 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : +1 514 398-6784 Télécopieur : +1 514 398-8318 Rédactrice en chef rec@delitfrancais.com Julia Denis Actualités actualites@delitfrancais.com Laurence Nault Julien Beaupré Théophile Vareille Culture articlesculture@delitfrancais.com Céline Fabre Amandine Hamon Société societe@delitfrancais.com Esther Perrin Tabarly Économie economie@delitfrancais.com Sami Meffre Coordonnateur de la production production@delitfrancais.com Baptiste Rinner Coordonnatrices visuel visuel@delitfrancais.com Luce Engérant Eléonore Nouel Coordonnateurs de la correction correction@delitfrancais.com Yves Boju Côme de Grandmaison Coordonnatrice réseaux sociaux réso@delitfrancais.com Inès L. Dubois Multimédias Matilda Nottage Évènements Joseph Boju Webmestre web@delitfrancais.com Mathieu Ménard Contributeurs Ronny Al-Nosir, Chloé Anastassiadis, Marine Amélia Blanchard, Hortense Chauvin, Joachim Dos Santos, Antoine Duranton, Charles Gauthier-Ouellette, Alexandre Jutras, Sandra Klemet, François Legras, David Leroux, Paul Pieuchot, Philippe Robichaud, Zaliqa Rosli, Kharoll-Ann Souffrant, David Uzochukwu, Gilles Vidal, Margaux de Wilde, Joanna Wolfarth. Couverture Luce Engérant bureau publicitaire 3480 rue McTavish, bureau B•26 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : +1 514 398-6790 Télécopieur : +1 514 398-8318 ads@dailypublications.org Publicité et direction générale Boris Shedov Représentante en ventes Letty Matteo Photocomposition Mathieu Ménard, Lauriane Giroux, Geneviève Robert The McGill Daily coordinating@mcgilldaily.com Niyousha Bastani
L’usage du masculin dans les pages du Délit vise à alléger le texte et ne se veut nullement discriminatoire. Le Délit (ISSN 1192-4609) est publié la plupart des mardis par la Société des publications du Daily (SPD). Il encourage la reproduction de ses articles originaux à condition d’en mentionner la source (sauf dans le cas d’articles et d’illustrations dont les droits avant été auparavent réservés, incluant les articles de la CUP). L’équipe du Délit n’endosse pas nécessairement les produits dont la publicité paraît dans ce journal. Imprimé sur du papier recyclé format tabloïde par Imprimeries Transcontinental Transmag, Anjou (Québec).
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Actualités
VIVRE. APPRENDRE. VIVRE APPRENDRE JOUER. JOUER JOU TRAVAILLER. TRAVAILLER
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LA CONSTRUCTION EST DÉJÀ BIEN AVANCÉE
CAMPUS
Place à la réconciliation McGill sensibilise ses étudiants à la réalité autochtone.
nement afin de forcer les enfants à abandonner leur culture. M. Loft, lui-même un ancien élève d’une de ces écoles, a décrit ces établissements comme «une machine à génocide linguistique et culturel». Suite à la présentation du poème, la salle a été divisée en quatre groupes pour discuter des émotions provoquées par le poème. Les participants, des étudiants pour la plupart, mais aussi des membres du personnel de McGill et des visiteurs, ont tous été profondément émus. Un consensus s’est établi autour du besoin de parler davantage des pensionnats dans les écoles et de sensibiliser la population canadienne, jugée beaucoup trop ignorante, à ce sombre chapitre de son histoire. M. Loft a terminé sa réflexion en soulignant les piliers essentiels pour réconcilier autochtones et non-autochtones: le respect, le sens de la responsabilité et la coopération. Selon lui, tant et aussi longtemps que le gouvernement canadien ne respectera pas les traités signés avec les peuples autochtones, une relation saine sera impossible.
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Un sombre chapitre
Laurence Nault
Le Délit
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endant un peu plus d’une semaine, du 18 au 25 septembre, les étudiants de McGill ont eu l’occasion d’en apprendre un peu plus sur les peuples autochtones du Canada, dans le cadre de la Semaine de Sensibilisation aux Cultures Autochtones. Il s’agissait de la cinquième édition de cet évènement organisé par le Bureau pour l’Équité Sociale et la Diversité de McGill (Social Equity and Diversity Education). Les festivités ont débuté par le traditionnel pow-wow de septembre en face de l’université et se sont poursuivies tout au long de la semaine suivante. Parmi les évènements, on comptait des conférences sur la mobilisation des communautés ainsi qu’un atelier de fabrication de capteurs de rêves. Réfléchir sur les pensionnats Les organisateurs avaient deux objectifs: célébrer et faire découvrir la culture des diffé-
rents peuples autochtones du Canada, mais surtout déclencher une discussion autour des répercussions de la Commission de Vérité et Réconciliation du Canada. Cette dernière est une initiative du gouvernement canadien et porte sur les sévices subis par les enfants autochtones dans le réseau de pensionnats du gouvernement canadien entre les années 1880 et 1996. Mardi soir, la réflexion animée par M. Michael Loft, professeur en travail social, était organisée dans le cadre de ce deuxième objectif. Plus d’une cinquantaine de personnes s’étaient réunies dans le bâtiment de la Faculté d’éducation afin de discuter ensemble de la Commission. M. Loft a débuté la réflexion par la présentation d’un poème écrit par un survivant des pensionnats. Le pensionnat mentionné dans le poème fait référence aux réseaux d’écoles, souvent des pensionnats, où le gouvernement canadien a obligé plus de 150 000 enfants autochtones à séjourner sur une période de presque cent ans. Les sévices corporels et la violence psychologique y étaient utilisés quotidien-
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Le réseaux de pensionnats et écoles était surtout maintenus par des communautés religieuses. Des 150 000 enfants y étant allés, près de 3200 y ont perdu la vie, principalement à cause de maladies causées par les mauvaises conditions sanitaires et la malnutrition. La Commission a récolté les témoignages de plus de 7000 anciens élèves et responsables. Elle a duré plus de 6 ans et a été établie en 2007 suite à la Convention de Règlement Relative aux Pensionnats Indiens. Des audiences ont été tenues à l’échelle du Canada afin que tous puissent faire entendre leur voix. La Commission a produit par la suite 94 recommandations. L’une des principales étant l’adoption par le Canada de la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des Peuples Autochtones. Le juge Murray Sinclair, président de la Commission, a lui aussi choisi les termes de «génocide culturel» pour parler des pensionnats lors de la remise des recommandations de la Commission. Le Premier Ministre Harper a, quant à lui, préféré parlé «d’assimilation forcée» sans jamais prononcé le mot «génocide». x
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Campus
Et vogue la galère L’AÉFA est déjà sur son erre d’aller et revient sur ses récents accomplissements. ’est sur les terres ancestrales non cédées des Kanien’kehá:ka que s’est ouvert, le 23 septembre dernier, le second conseil législatif de l’année 2015-2016 de l’Association des Étudiants de la Faculté des Arts (AÉFA). Plusieurs thèmes ont été abordés au cours de cette séance rythmée par les rapports des nombreux acteurs présents. Toutefois, l’attention de la salle a d’abord été retenue par une allocution du doyen par intérim de la Faculté des Arts, le professeur Hudson Meadwell et par un retour final sur l’édition 2015 de Frosh.
vices qui seront affectés. Ces défis comptables, nous a-t-il assuré, n’altèrent pas son optimisme quant au règlement des négociations entre le syndicat des assistants d’enseignement et l’université. Une décision du syndicat sur l’offre de l’université est en effet attendue le 1er octobre et un vote de grève sera tenu dans les dix jours suivant l’éventuel — mais apparemment peu probable — refus. Il a été aussi évoqué l’embauche de 13 ou 14 nouveaux enseignants à la faculté en août prochain, et autant de nouveaux cours offerts ainsi que la construction d’une nouvelle «salle de classe interactive et intelligente de 97 places» dans le pavillon des Arts.
Faculté: Budget limité
Un Frosh 2015 réussi
Un budget croissant en temps d’austérité semble un peu contradictoire, mais c’est l’impression que nous a laissée le doyen par intérim. «Nous ne sommes pas encore sortis des méandres du budget», nous a-t-il annoncé d’emblée, en évoquant les difficultés budgétaires auxquelles la faculté devra faire face cette année. Il n’a cependant pas donné de détail sur les ser-
C’est sur ce clair-obscur que s’est continué le conseil législatif. Élus et représentants départementaux ont tour à tour présenté leur compte-rendu. On retiendra surtout un élément important constant dans cette série de rapports: le bilan du Frosh de cette année, unanimement positif. L’événement constitue environ 25 % des dépenses annuelles de l’AÉFA. Sa
David Leroux
C
ouvertement vœu de sobriété. Nul n’a été exclu à cause de son désir de ne pas boire et tous ont apprécié de leur expérience, selon les propos tenus à l’AÉFA. Cette traditionnelle activité de la rentrée mcgillienne fut donc un franc succès, tant sur le plan budgétaire que sur le plan social. Sa pérennité est assurée. Projets en cours
Luce Engérant
réussite particulière cette année, à l’exception de l’organisation de la Journée Plage dont l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM) s’était portée responsable, n’a pas manqué de réjouir l’assemblée. Malgré leur grand nombre, les 1410
«froshies» de la cohorte 2015 et les plus de 200 chefs de groupe qui leurs étaient associés ont su éviter les écueils dangereux de la célébration excessive. Par souci moral, les groupes comptaient parmi eux cette année des chefs et des participants faisant
Quelques annonces ont aussi été faites, notamment l’entrée en fonction officielle du service de prêt d’ordinateurs portables, disponibles au laboratoire informatique du 3e étage de l’édifice Ferrier. Autre projet, la continuation du projet d’aménagement de Leacock (Leacock Space Project, ndlr) consistant à réaménager et repenser l’espace dans le pavillon Leacock afin de le rendre plus convivial et d’éliminer du mobilier peu pertinent. Sera aussi précieuse la formation d’un comité de surveillance s’assurant que les salaires versés aux élus de l’AÉFA par eux-mêmes soient justes et que les heures déclarées travaillées correspondent à la réalité. Le prochain conseil aura lieu au Leacock 232 le mercredi 7 octobre à 18 heures.x
L’AÉFA, de ses finances Aperçu du fonctionnement pratico-pratique des finances et de Frosh chez l’AÉFA. Julien Beaupré
Le Délit
L
e 15 septembre dernier, Le Délit publiait une brève en exclusivité web qui revenait sur le premier conseil de l’AÉFA de l’année, plus précisément sur les finances en montagnes russes des dernières années. Pour plus de précisions, cette semaine, le président de l’association, Jacob Greenspoon, et le vice-président aux finances, Mirza Ali Shakir, ont accepté de nous éclairer au sujet du fonctionnement des finances de l’AÉFA. Ce qui suit est un résumé de la rencontre. Financée par les étudiants Le principal moyen de financement de l’association réside dans les frais étudiants, plus comunément appelé les student fees. Ces frais sont récoltés à même les droits de scolarités
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et ne sont pas sous le contrôle direct de l’association étudiante. Il s’agit de la principale source de revenus de l’AÉFA, soit 40 %. On dénombre présentement six frais étudiants finançant l’AÉFA. Ces frais doivent être acceptés par référendum ainsi qu’approuvés par l’administration de McGill. Chaque frais doit être renouvelé aux trois ans. D’ailleurs, rappelons que cette année trois propositions de ce genre auront lieu concernant le fond des étudiants en Arts, le fond du laboratoire informatique et celui de l’amélioration de la vie étudiante. L’AÉFA est une entité complètement séparée de l’AÉUM. C’est une organisation à but non lucratif et elle répond en tant que telle au gouvernement du Québec. De ce fait, son mandat est donc d’éviter autant que possible l’endettement et le profit. L’administration de McGill limite donc sa contribution à la collecte et la remise des
frais aux étudiants. Le budget doit être prêt avant novembre, présenté et approuvé par le comité de management aux finances (Financial Management Committee, ou FMC). Celui de cette année devrait être présenté d’ici le 7 octobre. C’est là qu’il sera ratifié et approuvé. L’argent remis à chaque département dépend ensuite d’une formule qui repose sur le nombre d’étudiants inscrits à la majeure et à la mineure. Un Frosh 2014 déficitaire Le Frosh est la plus grande dépense à laquelle l’association doit faire face chaque année. Celle de l’année passée ne fut pas un succès économique, loin de là. En effet, le déficit se chiffrait dans les environs de $30 000, à l’image de cette année financière qui fut la pire de l’histoire de l’association. Ce qui étonne davantage c’est que l’association n’a réellement
su le montant de ce déficit qu’au milieu de l’organisation du Frosh de 2015-2016. En effet, le budget de 2014-2015 n’a été complété qu’une fois le Frosh débuté. De plus, il comportait de nombreuses erreurs. La situation a obligé le présent vice-président aux finances à tout recommencer au courant de l’été. Les membres de l’AÉFA ont ainsi dû s’adapter pour éviter un déficit du même genre pour l’année 2015. Ainsi, quand les éditions de 2012 et 2013 ont enregistré des surplus de $15 000 celle de 2015 est arrivée juste. Il est à noter que cette année l’évènement a généré un revenu de $200 000 et qu’il affichait complet. Des v.-p. qualifiés? La transition à chaque année entre les vice-présidents aux finances est ainsi un point crucial du point de vue de l’AÉFA. Normalement, les vice-présidents
sortants sont responsables de préparer ceux de l’année suivante. Malheureusement, et ça s’est avéré vrai par le passé, cette préparation n’est pas suffisante pour un candidat aux finances non qualifié pour ce genre de travail. Ainsi, l’AÉFA entend avancer les élections cette année pour allonger la durée de cet entraînement. Elles auraient lieu en février, avant la semaine de relâche. De plus l’AÉFA désirerait faire une présélection des candidats pour s’assurer de leurs compétences. Le président de l’AÉFA est convaincu que l’embauche d’un comptable, pour remplacer le vice-président comme c’est le cas dans l’association d’ingénierie, n’est pas nécessaire puisque les candidats aux compétences nécessaires existent et que ce serait les priver d’une expérience très enrichissante. Sans compter que pour payer un comptable, il faudrait élever les frais aux étudiants.x
le délit · mardi 29 septembre 2015 · delitfrancais.com
Politique fédérale
Sans metteur en scène ni vedette Retour sur le Débat des Chefs organisé par Radio-Canada. et Thomas se parlent parfois, faisant référence au fait que l’on reproche souvent au chef néo-démocrate de changer son discours selon qu’il s’exprime en français ou en anglais. Son parti reste condamné à l’opposition et ses positions partagées avec Harper (notamment sur le niqab et L’État islamique) n’ont fait qu’aider le Premier Ministre sortant.
Ronny al-nosir
J
eudi dernier, en direct des studios de Radio-Canada à Montréal, les Québécois s’attendaient à assister à un débat en français mettant en vedette les cinq chefs des partis majeurs. Gilles Duceppe, Stephen Harper, Elizabeth May, Tom Mulcair et Justin Trudeau étaient censés discuter en français des services sociaux, de l’économie, des institutions démocratiques, de l’environnement et de la place du Canada dans le monde. Même si ces sujets ont été abordés, nous avons eu droit à une pièce de théâtre sans metteur en scène et sans vedette… Après une soirée de débat, les analystes se demandent généralement quel participant en est ressorti gagnant. Dans ce cas-ci, difficile de déterminer un vainqueur, mais on peut facilement dire que le grand perdant de la soirée a été le public. Anne-Marie Dussault occupait le rôle de modératrice. Cependant, tout au long de la soirée, elle a été plutôt passive. À plusieurs occasions les échanges étaient cacophoniques et incohérents. D’ailleurs, selon Radio-Canada, le moment le plus discuté sur Facebook était la
Stephen Harper (PCC):
conversation sur le niqab, entre Stephen Harper et Tom Mulcair, qui n’était pas sans rappeler la confrontation entre Javert et Valjean dans Les Misérables. Les deux chefs se faisaient face en criant l’un sur l’autre, alors que Justin Trudeau, Gilles Duceppe et Élizabeth May restaient immobiles et silencieux. Mme Dussault a dû les rappeler à l’ordre à maintes reprises, et les deux hommes n’ont pas cessé de se chamailler avant d’avoir fini leurs points. Cet extrait n’est qu’un exemple parmi
tant d’autres qui a nui à la qualité du débat… Nonobstant la modération et l’organisation de qualité douteuse, il faut aussi regarder la performance de chaque chef. Gilles Duceppe (BQ): Il a attaqué tous ses adversaires dans un français impeccable et sur des sujets touchant spécifiquement le Québec. Il remporte haut la main le prix citron du meilleur coup de la soirée pour avoir demandé à Mulcair si Tom
M. Harper semblait agité et parlait un peu trop fort. Il a bien fait passer son message conservateur de stabilité économique et de sécurité en priorité, mais il a émis plusieurs commentaires douteux. Il a notamment affirmé que l’Arabie Saoudite était un allié important et il n’a pas bronché lorsqu’on l’a questionné sur l’usine canadienne qui vend armes à ce pays. Élizabeth May (PV): Elle a abordé des sujets importants ignorés par ses adversaires, tels que l’environnement et les étudiants. Cependant, son français, même s’il s’est considérablement amélioré, lui a nui. Finalement, son petit poids politique a été un atout, lui permettant
d’éviter d’être la cible d’attaques, mais lui a aussi valu d’être quasiment ignorée. Thomas Mulcair (NPD): Le chef du NPD, à l’instar de Harper, était très énervé et haussait trop souvent le ton. Avec son parti en tête dans les sondages au Québec, le chef M. Mulcair a été victime de plusieurs attaques de la part de Harper, Trudeau et, surtout, Duceppe. Le chef néodémocrate n’a rien fait pour voler le débat, mais il s’est bien tenu debout. Justin Trudeau (PLC): Trudeau a été, contrairement à Mulcair et Harper, très calme et concentré sur le message de son parti. Tout au long de la soirée, il s’est concentré sur la classe moyenne et sur les infrastructures, deux piliers de son plan économique. Cependant, le chef libéral a eu quelques problèmes avec son français, et avait la fâcheuse habitude de revenir à ses deux piliers économiques, peu importe la question débattue. Malgré tout, Trudeau ne s’est pas prêté aux chicanes, et il a certainement bénéficié des nombreuses attaques de Duceppe envers Mulcair. x
Les Élections en quelques chiffres matilda nottage
Le Délit
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actualités
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campus
Zaliqa Rosli
«Désinvestissons McGill» dort chez vous L’association organise sa semaine anti-énergies fossiles. Théophile Vareille
Le Délit
«D
ésinvestissons McGill» (Divest McGill, ndlr), une des associations les plus reconnues de McGill, organisait ces derniers jours sa semaine anti-énergies fossiles. «Désinvestissons McGill» milite pour le désinvestissement de l’Université McGill hors des énergies fossiles, qui nuisent à l’environnement. McGill possède en effet $70 millions d’investissement dans le secteur, sur une dotation totale de $1.3 milliard. Les deux entreprises, desquelles McGill détient les parts les plus importantes sont Shell et Enbridge. Deux firmes menant des projets très controversés: Shell tente de devenir la première compagnie pétrolière à forer les ressources de l’Arc-
tique, tandis qu’Enbridge est le développeur du fameux oléoduc Keystone, reliant le Texas à l’Alberta. Cinéma et bataille de hip hop Au programme, entre veillée aux chandelles pour la paix et bataille de rap contre les sables bitumineux, s’est tenue une séance nocturne de cinéma en plein air, mardi soir. Co-organisée avec Cinema Politica et Cinema Out Of The Box, cette séance tentait de sensibiliser les assez nombreux et divers spectateurs — Le Délit a noté quelques quadragénaires — aux effets du réchauffement climatique sur les communautés autochtones, ainsi qu’à l’influence d’une mobilisation populaire contre ce même réchauffement global. Deux documentaires ont été projetés sur une toile alors que le système était alimenté par
une bicyclette, sur laquelle se sont relayés des volontaires durant la séance. Alors qu’un froid automnal s’installait, l’assemblée pouvait alors s’allarmer devant la situation d’Inuits désemparés par des glaces apparaissant trop tard et des neiges fondant trop tôt. La fin de la semaine s’inscrivait dans une plus large ambition: le groupe s’est joint à la marche sur le débat des chefs du 24 octobre et la semaine s’est terminée vendredi dans une volonté de pointer le caractère international du mouvement Désinvestissons. Un mouvement ayant fait des petits à Montréal —déjà présent à Concordia et depuis peu à l’UQAM —et en vogue aux ÉtatsUnis, où universités, églises et pensions sont pressées de se désinvestir des énergies fossiles; ce qui n’est peut-être pas inintéressant alors que l’industrie est à un bas historique.
Zaliqa Rosli
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Une semaine militante et culturelle Au vue de ces faits, les demandes de «Désinvestissons McGill» peuvent sembler sensées pour un grand nombre. C’est dans l’optique de fédérer un soutien important —afin d’appuyer celui de nombreux professeurs — qu’était organisée cette semaine anti-énergies fossiles. Guillaume Joseph, porte-parole de «Désinvestissons McGill», revendique de vouloir «répandre le message de Divest dans McGill et Montréal». Il s’agit d’un enjeu qui concerne toute une communauté et «Désinvestissons McGill» compte bien mettre la pression sur une administration à laquelle on avait imposé un délai de six mois pour prendre sa décision, lors de la présentation du rapport estampillé «Désinvestissons McGill» en
faveur du désinvestissement. C’était en avril dernier. Afin d’attirer le plus possibles de participants, «Désinvestissons McGilll» a décidé de donner une orientation militante et culturelle à sa semaine. Une dizaine de tentes ont été plantées dans le carré de la communauté, en face de la porte Milton et aux pieds des bureaux de l’administration de McGill, là où le tout McGill défile à longueur de journée. Une douzaine de membres y ont dormi la semaine durant, et animé la journée des évènements pour interpeller et intéresser les passants. Une stratégie d’ensemble qui a garanti une belle exposition au mouvement. À se demander pourquoi d’autres évènements similaires — telle la semaine anti-austérité — ne se font pas remarquer sur le campus de pareille manière. x
Zaliqa Rosli
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Montréal
Un Festival de la lune à Montréal Le 26 septembre s’est déroulé le premier Festival de la Lune à Montréal. Marine Amélia Blanchard
S
amedi dernier, la première édition du Festival Chinois de la Lune avait lieu à l’Université Concordia en l’honneur de la culture Han, qui représente la majorité du peuple chinois. Ce festival, encore très méconnu, réunissait deux principaux organisateurs, plus de vingt bénévoles et environ 30 visiteurs. Il s’agissait d’un moyen de promouvoir la culture Han et le Hanfu, un habit traditionnel chinois d’avant la dynastie des Mings (c’est-à-dire, il y a plus de 300 ans), qui n’a été réadopté que récemment, comme. Origine Le Festival de la lune, appelé également fête de la mi automne, est un festival très important en Chine: il représente la fin des moissons. Durant cette fête, les familles se réunissent et mangent des gâteaux de lune aux haricots
Joachim Dos SAntos
rouges, appelés yuè bing. La lune est contemplée et admirée, car elle est réputée pour être particulièrement belle à cette saison de l’année. Un pique-nique est aussi organisé durant la nuit pour profiter au maximum de l’éclat de la lune. La fête est également célébrée dans d’autres pays asiatiques
tels que le Japon, la Corée du Sud et la Corée du Nord. Déroulement Les visiteurs avaient donc la possibilité d’essayer les différents types de Hanfu, de voir des spectacles de chant, de danse, d’opéra et
d’instruments traditionnels, puis d’admirer des peintures d’ art classique chinois ainsi que de la calligraphie. De la nourriture traditionnelle telle que des pâtisseries, de la soupe aux haricots rouges et du thé étaient en vente également. Il y avait aussi des objets fabriqués manuellement par les bénévoles et organisateurs à
vendre, comme des bracelets et des colliers en pierre de jade, des bâtons à cheveux, des pendentifs et des cartes postales importées de Chine. Le festival était donc l’occasion de présenter diverses facettes de la culture chinoise. L’évènement a été organisé par l’Association de la Culture Han de Concordia et par l’Association pour la Conservation des Habits Traditionnels Chinois de Montréal. Les organisateurs ainsi que la majorité des bénévoles étaient des étudiants. C’est l’Université Concordia et la Caisse Desjardins qui ont financé le projet ainsi que la vente de produits réalisée le jour même. Le festival était donc gratuit et ouvert de 11h à 17h pour les visiteurs. Il se déroulait en français, anglais et chinois. Les étudiants de McGill étaient les bienvenus ainsi que ceux d’autres universités. Après cette première édition du Festival de la lune à Montréal, les organisateurs espèrent pouvoir le réorganiser. Souhaitons leur une réussite encore plus grande l’an prochain.x
Chronique visuelle
Un Français à Montréal
Paul pieuchot
le délit · mardi 29 septembre 2015 · delitfrancais.com
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enquêtes
L’échec scolaire n’a pas de sexe Le décrochage scolaire des jeunes fille reste dans l’ombre du patriarcat. kharoll-ann souffrant
Le Délit
A
u cours des dernières années, les médias, la population et le gouvernement ont accordé une attention grandissante au décrochage scolaire des garçons au Québec. Ces derniers tireraient moins leur épingle du jeu en milieu scolaire comparativement à leurs camarades féminines. L’école ne serait pas adaptée à eux, bien que cela reste encore à démontrer scientifiquement. Plusieurs craignent que cet argumentaire soit récupéré et instrumentalisé par un mouvement masculiniste –qui est une forme d’antiféminisme– pour jeter de l’ombre sur une réalité qui est très peu abordée: le décrochage scolaire des filles.
L’étude révèle que les filles décrocheraient pour des raisons différentes que les garçons. Les problèmes d’adaptation en milieu scolaire chez les garçons seraient beaucoup plus visibles, extériorisés et exprimés par un «acting out», une «extériorisation»: l’agressivité, les problèmes de comportement, la toxicomanie ou encore l’intimidation. Chez les filles, ils seraient intériorisés et plus discrets (manque de confiance en soi, problèmes familiaux, violences sexuelles, etc). Les problèmes d’adaptation en milieu scolaire vécus par les filles seraient donc moins perceptibles, plus difficiles à déceler, voire carrément invisibles. Bien que l’adversité familiale ait des répercussions néfastes
la richesse et l’instauration de politiques sociales adéquates. Les récentes mesures d’austérité qui touchent notamment le secteur de l’éducation le démontrent, explique Isabelle Marchand, en entretien avec Le Délit. Déconstruire les stéréotypes sexuels Les chercheurs Pierrette Bouchard et Jean-Claude StAmant ont réalisé une vaste enquête au Québec auprès de jeunes du secondaire dont les résultats ont été consignés dans le livre Garçons et filles: stéréotypes et réussite scolaire (1996). À la lumière des résultats, la conclusion est que les jeunes adhérant le plus
nes garçons également. Lise Gervais ajoute cependant que les emplois traditionnellement masculins sont généralement mieux rémunérés. Cette situation est surtout visible en région. En ce sens, lorsque les jeunes garçons décrochent, les
«Plus une mère est scolarisée, plus les jeunes sont susceptibles de rester sur les bancs d’école» options disponibles pour eux sont donc beaucoup plus attrayantes: à long terme, ils se retrouvent dans une situation financière beaucoup moins précaire que celles des jeunes décrocheuses. On parle en effet de 16 414 dollars de esther perrin tabarly
Des raisons différentes au décrochage En 2012, une recherche exploratoire de la Fédération Autonome de l’Enseignement (FAE) en partenariat avec RelaisFemmes et la chercheuse Isabelle Marchand de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) s’est penchée sur la question. L’objectif était de mieux comprendre le phénomène du décrochage scolaire chez les jeunes filles et de trouver les meilleurs moyens de les réintégrer à nos institutions académiques.
«Les jeunes adhérant le plus aux stéréotypes sexuels véhiculés dans la société sont beaucoup plus susceptibles de décrocher du milieu scolaire.» Cette recherche, qui repose sur des bases empiriques crédibles, ne vise aucunement à généraliser ses données à l’ensemble de la population, mais cherche plutôt à soulever des questionnements qui ont été mis de côté par les instances gouvernementales devant le «succès évident» des filles dans le réseau scolaire.
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autant chez les garçons que les filles, ces dernières ont tendance à se «parentifier» (assumer un comportement de parent, ndlr) lorsque de telles situations surviennent, explique au Délit Lise Gervais de Relais-femmes. Il y a unanimité sur le fait que la pauvreté est le facteur de risque le plus important lorsque l’on parle de décrochage scolaire, autant chez les garçons que chez les filles. Malgré la reconnaissance de ce fait, il y a eu peu de volonté politique au cours des dernières années pour assurer une meilleure redistribution de
aux stéréotypes sexuels véhiculés dans la société sont beaucoup plus susceptibles de décrocher du milieu scolaire. Il y aurait une tendance chez les garçons, particulièrement ceux issus de milieux modestes, de s’éloigner du milieu scolaire en raison de cette identité de genre rigide et formatée. Celle qui veut que les garçons soient actifs et dérangeants contrairement à leurs camarades féminines chez qui le fait d’être dociles, à l’écoute et tranquilles est généralement prôné. On peut donc dire que le patriarcat fait non seulement du tort aux jeunes filles, mais aux jeu-
(IRIS) dévoilait une publication qui visait à rappeler que, malgré des avancées considérables, le partage des tâches domestiques était encore inégal entre les femmes et les hommes. En effet, ce sont encore les femmes qui accomplissent une grande partie des soins
salaire en moyenne par année pour une fille sans diplôme d’études secondaires, contrairement à 24 434 dollars pour un garçon sans diplôme d’études secondaires. Mme Gervais insiste sur le fait que le Québec rattrape son retard en matière de décrochage, car les garçons raccrochent beaucoup plus aisément que les filles qui se retrouvent très souvent avec des responsabilités familiales, ce qui joue à la fois comme une barrière et une source de motivation pour le retour aux études. En octobre 2014, l’Institut de Recherche et d’Informations Socio-économiques
des membres du ménage, ce qui comprend l’aide aux devoirs aux enfants, dans les pays de l’OCDE. «Plus une mère est scolarisée, plus les jeunes sont susceptibles de rester sur les bancs d’école», conclut Mme Gervais. Des pistes de solutions Pour changer la tendance, il faudrait s’attaquer de front à la pauvreté, considérant que c’est la cause première du décrochage chez les jeunes. De plus, il faut contrer les stéréotypes sexuels. Il est impératif de miser sur une analyse différenciée selon les sexes lorsque l’on parle de décrochage scolaire, de ses causes et de ses conséquences. La FAE suggère notamment de revenir au recensement long obligatoire aboli par le gouvernement Harper en 2011. Ce recensement était utilisé par le Ministère de l’Éducation et apportait des données essentielles notamment sur la situation des femmes et des jeunes filles. Finalement, il faut déployer des ressources et des structures plus solides pour repérer et intervenir auprès des jeunes filles, entre autres, victimes de l’adversité familiale. Considérant le peu d’études réalisées sur la question du décrochage scolaire chez les jeunes filles au Québec, on peut se demander si cette réalité est aussi marginale que l’on tente de nous le faire croire. Une chose est sûre: lutter contre le décrochage scolaire des filles –non pas exclusivement, mais de manière spécifique– c’est lutter contre le décrochage scolaire des filles et des garçons. Dans une société se disant juste en droit envers tous s es citoyens, il est donc dans l’ordre naturel des choses de chercher à contrer l’abandon des jeunes garçons envers leurs études, sans pour autant ignorer la situation chez les filles. C’est une question d’équité. x
le délit · mardi 29 septembre 2015 · delitfrancais.com
À la recherche du bonheur État de l’utilisation et de l’utilité des antidépresseurs. matilda nottage
Le Délit
M
algré la constance et l’ubiquité de la recherche médicale, certaines découvertes en particulier marquent des sociétés entières. Parmi ces dernières, on peut compter le vaccin par Pasteur en 1885, l’invention de l’aspirine par Hoffman à la fin du XIXe siècle, ou encore la pénicilline par Fleming durant le siècle suivant. En 1957, le psychiatre suisse Roland Kuhn découvrait le premier antidépresseur, l’imipramine. Ce n’est cependant qu’à partir de la fin années 80, avec l’apparition de la fluoxétine, que cette nouvelle classe de médicaments commença à impacter la société de manière remarquable. Cette pilule blanche et verte, mieux connue sous le nom de «Prozac», fut accueillie avec un enthousiasme sans précédent: pourrait-elle être la clef pour guérir la dépression? C’est le parti pris par la journaliste américaine Elizabeth Wurtzel dans son autobiographie intitulée Prozac Nation, sortie en 1994. L’histoire de sa lutte contre la dépression et de sa victoire permise par la fluoxétine devint rapidement un best-seller aux États-Unis et sera même adaptée pour le grand écran en 2001. Le Canada est le troisième plus grand consommateur d’antidépresseurs de tous les pays membres de l’Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE), selon le rapport Panorama de la santé 2013. D’après ce même rapport, au sein des pays membres plus d’un adulte sur dix consomme des antidépresseurs. La consommation de ces médicaments a aussi
fortement augmenté au cours des dernières années: elle a en moyenne presque doublé entre 2010 et 2011. Pourtant, l’enthousiasme quasi-unanime s’est effacé depuis les années 1990, et le recul a laissé place à de nombreux doutes et controverses. Quels sont donc les facteurs à l’origine de cette augmentation? La consommation d’antidépresseurs est-elle toujours justifiée? Davantage de diagnostiques? Les troubles de la santé mentale ont un long précédent de stigmatisation. Aujourd’hui encore, 60% des gens souffrant de troubles mentaux n’ont recours à aucun service, selon la Commission de la Santé Mentale du Canada (CSMC). Il est cependant impossible d’ignorer le progrès effectué au cours des dernières décennies. Depuis 2009, par exemple, la CSMC œuvre avec les professionnels de la santé, les jeunes, la main-d’œuvre et les médias pour éradiquer les préjugés liés à la maladie mentale, à travers l’initiative Changer les mentalités. Une acceptation grandissante de ces troubles, en plus de l’évolution des outils d’évaluation et de diagnostiques à la disposition des professionnels, pourrait expliquer les tendances à la hausse observées dans l’utilisation d’antidépresseurs. En effet, si plus de gens sont éduqués sur la santé mentale et les ressources qui sont à leur disposition, et si les professionnels peuvent mieux les évaluer, il s’ensuit que plus de gens reçoivent un traitement. Pourtant, selon Marc Laporta, directeur du Centre collaborateur OMS pour la re-
cherche et la formation en santé mentale et professeur adjoint à McGill, en entrevue avec Le Délit, «la hausse de diagnostiques est certainement une partie de la réponse, mais pas son intégralité.» Il explique que ces médicaments sont prescrits pour gérer des problèmes «tels que l’anxiété, qui incluent les troubles obsessionnels compulsifs, les phobies sociales et le stress post-traumatique», mais qu’«ils sont aussi malheureusement souvent prescrits dans des situations qui ne justifient pas leur utilisation, comme les formes légères de dépression, les réactions temporaires au stress, l’insomnie et autres». Une solution rapide et lucrative Si les antidépresseurs sont souvent prescrits pour des problèmes autres que la dépression, c’est en partie parce que les problèmes mentaux sont extrême-
images par eléonore nouel
le délit · mardi 29 septembre 2015 · delitfrancais.com
ment complexes et variés. Il existe des troubles trop spécifiques pour mériter autant d’attention des chercheurs que la dépression. Dans ce type de cas, les antidépresseurs sont prescrits par manque d’alternative plus adaptée. La littérature scientifique montre pourtant un succès très mitigé de cette classe de médicaments sur les troubles autres que la dépression. Le recours fréquent à la pharmacologie s’explique aussi par son côté pratique. Pour le patient, c’est un traitement concret qui a le potentiel pour agir vite, et qui ne demande ni autant de temps ni autant de travail que la thérapie. Pour le médecin, c’est aussi une économie de temps, une façon de satisfaire un patient qui attend une solution, et la prescription représente de plus parfois un intérêt financier. Une grande partie de la controverse qui a entouré l’utilisation d’antidépresseurs ces dernières années est liée à une méfiance vis-à-vis de l’industrie pharmaceutique. De toute évidence, cette industrie gagne à encourager l’approche pharmacologique plutôt que la thérapie. «La santé est une industrie et les groupes d’intérêts ont beaucoup de moyens d’influencer plus ou moins subtilement la recherche, les diagnostiques et les tendances de traitements. On a besoin d’une vigilance constante de la part des organismes subventionnaires, et je pense qu’on le fait mieux qu’avant», commente Marc Laporta. Selon le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (plus connu sous le sigle DSM), ouvrage aux dimensions quasi-bibliques pour les psychologues en Amérique du Nord, l’industrie pharmaceutique a une forte influence qui va
jusqu’à l’origine du diagnostique. Une étude réalisée en 2006 par Lisa Cosgrove de l’Université du Massachusetts révélait que sur 170 membres du comité responsable de l’édition du DSM-IV, 95 étaient associés financièrement avec des compagnies pharmaceutiques. Dans le comité des troubles de l’humeur, catégorie qui inclut les troubles dépressifs et bipolaires, premiers concernés par les antidépresseurs, tous les membres ont admis avoir des liens avec cette industrie. Critique, mais pas cynique Si les années 1990 ont été le point culminant de l’enthousiasme vis-à-vis de la fluoxétine et de ses cousins, ces dernières années ont vu naître un certain cynisme à l’égard de médicaments qui ne sont finalement pas la solution miracle tant attendue, qui ne sont pas toujours prescrits adéquatement, et qui semblent servir à alourdir les poches de l’industrie pharmaceutique. Il est aujourd’hui important d’être informé des risques et limites de ces médicaments et de connaître les possibles motivations de ceux qui les prescrivent. Il faut aussi être conscient de leur efficacité, prouvée bien supérieure à celle de simples placébos dans la littérature scientifique, en particulier pour les cas sévères. «Nous sommes tellement loin de pouvoir aider ceux qui en ont besoin que nous sommes heureux de voir une tendance vers plus de diagnostiques et de traitements», conclut Marc Laporta. Reste à explorer les possibilités de la psychothérapie, qui est souvent moins accessible; les meilleurs résultats observés sont obtenus en combinant cette méthode avec la pharmacothérapie. x
société
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opinion
Le marxisme est un individualisme Liberté et égalité vont de pair. antoine duranton
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’actuelle campagne électorale canadienne, tout comme les précédentes, peut être perçue comme un affrontement de valeurs entre une droite qui favoriserait la liberté individuelle et une gauche qui contraindrait cette liberté, au nom d’une plus grande égalité. Liberté et égalité seraient ainsi dans un rapport conflictuel, l’une ne pouvant s’accomplir qu’au détriment de l’autre. Cette opposition, intériorisée par les partis de gauche eux-mêmes, ne va cependant pas de soi. Karl Marx, le grand théoricien du socialisme, auquel remontent de façon plus ou moins directe et assumée les partis de gauche d’aujourd’hui, propose ainsi une grille de lecture entièrement différente: à l’inverse de ce que l’on dit souvent à son sujet, Marx voit dans l’égalité non pas un objectif à atteindre qui remplacerait la liberté mais plutôt la condition à sine qua non cette dernière. Libéralisme anti-libertés En effet, pour Marx, le libéralisme, en postulant que tous les individus sont égaux à leur
naissance, nie une réalité de fait: il y a de profondes inégalités économiques qui font que certains n’ont d’autre choix que de proposer leur force de travail, tandis que d’autres héritent des moyens d’acheter cette force. En d’autres termes, et pour reformuler l’idée de Marx, la majorité des individus travaille car elle n’a pas d’autres moyens de survie tandis qu’une minorité peut investir les moyens qu’elle a en surplus pour employer ces individus.
«Le marxisme prétend mettre le tout au service de la libération de chaque individu.»
On pourrait peut-être se satisfaire de cet état de fait dans la situation idéale de relations de travail harmonieuses, dans lesquelles le patron viserait d’abord l’intérêt collectif de ses employés. Le problème est que le système capitaliste actuel cherche avant tout le profit et impose à cette fin des conditions de travail aliénantes, notamment à travers un rythme de production effréné. Il prive de ce fait la
majorité de la société de toute vraie liberté, atteinte selon Marx, lorsqu’un individu est «auto-actif», à savoir lorsqu’il peut choisir un travail dans lequel il peut se «réaliser», s’épanouir. Tous pour un Aujourd’hui, la majorité des travailleurs est dans une situation de travail aliénante, forcés à atteindre un niveau de productivité toujours plus grand, sans pouvoir espérer choisir un travail où la logique économique serait placée derrière son bien-être. Ainsi, le libéralisme en acceptant la perpétuation du système capitaliste, promeut une fausse liberté, un système dans lequel seuls quelques individus, les plus aisés, peuvent se satisfaire de leur condition. Le projet marxiste est donc de planifier une nouvelle organisation de la production, plus égalitaire, afin que la dépendance naturelle de chacun à autrui ne soit plus une condition d’asservissement de la majorité par une minorité mais la possibilité pour chacun de trouver un travail libérateur. Le marxisme va donc bien au-delà d’une simple remise en cause des inégalités économiques: il vise plus d’égalité pour
matilda nottage
permettre à chacun d’avoir les moyens de se libérer. Ainsi, le marxisme ne prétend pas effacer l’individu au profit du tout, mais il prétend au contraire mettre le tout au service de la libération de chaque individu. Il vise à mettre en place une société dans laquelle le libre développement de chacun est la condition du libre déve-
loppement de tous. Aujourd’hui, il convient donc de rappeler: le marxisme est un individualisme, un courant qui veut plus d’égalité pour permettre à chaque individu d’être réellement libre. La gauche canadienne, tout comme celle européenne, ferait ainsi bien de se rappeler qu’égalité et liberté ne sont pas des objectifs distincts mais complémentaires. x
chronique
Quand le pape s’en mêle Esther Perrin Tabarly | La minute écolo François dénonce un «défi urgent» et fait appel à tous, sans distinction de religion, pour «sauvegarder notre maison commune». Un geste radical
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abemus papam, et il a compris bien des choses. Six mois avant la COP21 de Paris, le Pape François a publié une encyclique, Laudato si, dans laquelle il aborde le sujet de l’écologie comme peu ou pas de pontifes auparavant. Au cours des dernières décennies, ses prédécesseurs avaient mentionné l’impératif écologique (parfois), ses causes anthropiques (rarement).
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société
Le pape dénonce la «faiblesse de la réaction politique internationale», et encourage par conséquent à développer des institutions mondiales «plus fortes et efficacement organisées» pour lutter contre le réchauffement climatique. En outre, il aborde le sujet compliqué de la dette écologique, celle des pays développés envers les pays en développement, qu’il décrit comme «liée à des déséquilibres commerciaux». Plus loin, il insiste sur le fait qu’il n’y aura pas de changement écologique sans l’intégration d’une perspective sociale, qui prenne en compte les droits des plus défavorisés, souvent
les plus vulnérables face aux catastrophes naturelles et autres désastres liés au réchauffement climatique. Il faut prendre en compte le rapport fondamental entre l’environnement, l’économie, et la société pour soigner et rééquilibrer la planète. Encourager la décroissance Le souverain pontife conclue que pour redresser la situation, on ne pourra se contenter d’un compromis entre développement économique et lutte contre le réchauffement climatique. Le mot clé ici est «sobriété». Le pape appelle à un changement radical de mode de vie, de consommation et de production: «La sobriété, qui est vécue avec liberté et de manière consciente, est libératrice. […] Le bonheur requiert de savoir limiter certains besoins qui nous abrutissent […]».
Alors que les justes milieux ne font que retarder l’échéance, il nous faut, dit-il, réfléchir à une nouvelle définition du progrès. Il s’agit d’évaluer notre rapport à la technique moderne. Malgré le fait qu’elle ait permis de grandement augmenter nos conditions de vie ces derniers siècles, elle est devenue l’objet d’un culte qui donne aux Hommes l’impression d’un pouvoir sans fin sur leur habitat. Pire encore, la technique est devenue l’essence même du bonheur. Laudato si invite donc les Hommes à changer de regard sur la nature, à revoir sa valeur et à la protéger. Laisser parler la religion? L’encyclique a provoqué des réactions négatives chez certains groupes conservateurs chrétiens, et surtout de la part des climatosceptiques. Ces derniers ne nient pas nécessairement la réalité du
réchauffement climatique, mais ses origines anthropiques. Parmi ces critiques, plusieurs hommes politiques républicains (et catholiques) aux États-Unis ont exprimé leur désaccord, pressant le pape de laisser la science aux scientifiques et la politique aux politiciens. Voilà un argument qui n’apparaît pas quand il s’agit de condamner l’avortement… Le pape s’adresse non seulement à la population chrétienne, mais aussi au reste de l’humanité. On pourrait discuter du vrai impact de ce message universel, de l’influence réelle de François sur les individus ou sur la politique internationale. Néanmoins, l’encyclique a fait du bruit, surpris, fait réfléchir, provoqué des débats. Elle encourage un dialogue entre la science et la religion, et de plus grande envergure encore, pour chercher une révolution de nos modes de vie. x
le délit · mardi 29 septembre 2015 · delitfrancais.com
Économie economie@delitfrancais.com
Français facile
Uber vers le futur Cet article a été écrit par une élève en cours de français à McGill. Amanda Frankel
«B
on après-midi», s’est exclamé le chauffeur. «Voulez-vous une bouteille d’eau? Un bonbon pour la petite fille à l’arrière?» La voiture était neuve et bien soignée. Prudemment, notre conducteur s’est dirigé vers le centre-ville de Montréal. À la fin de notre course, je n’ai pas bien compris. Pas de paiement par espèce? Ma mère m’a expliqué que non, le paiement est enregistré automatiquement sur son compte. On a ainsi pu quitter le véhicule en échangeant simplement des remerciements. C’était ma première expérience avec UberX, l’alternative au taxi qui transforme l’industrie du transport. Uber, toujours controversé, nous accueille avec les bras ouverts— pourquoi devrait-on lui tourner le dos? Une guerre contre les taxis Lancé à Montréal pour la première fois en novembre 2014, Uber continue de dépasser les attentes du marché. Mais seulement deux ou trois semaines après le lancement, Denis Coderre, le maire de Montréal, a dénoncé le service. Où est la controverse? Le problème, selon la mairie de Montréal, est qu’Uber opère essentiellement comme un service de taxi, mais qu’il le fait sans
camille charpiat
permis. Les permis exigés pour les chauffeurs de taxi traditionnels peuvent coûter jusqu’à 250 000 dollars, selon La Presse, tandis que les chauffeurs et les usagers d’UberX ne paient ni permis ni impôt. Pas étonnant que les chauffeurs de taxi ne soient pas précisément heureux de cette concurrence. À Montréal, le service est officiellement dénoncé et illégal, mais rappelez-le aux chauffeurs d’Uber et ils vous souriront au nez. La loi
est rarement appliquée, et quand bien même un véhicule d’Uber serait mis à l’amende, Uber paierait la pénalité. Ailleurs, l’histoire est la même. Uber s’est rapidement installé dans 250 villes, situées dans à peu près 50 pays. Pour la plupart, il est toléré, même si les différents gouvernements surveillent le service avec intérêt. En Europe, quelques pays, dont l’Espagne et la France, en sont même arrivés à tout bonnement interdire le service.
Berlin et Hambourg l’interdisent aussi. Les plaintes de chauffeurs de taxi résonnent dans de nombreuses villes autour du globe, et les manifestations sont fréquentes. Les taxis dans la rue Cette polémique est loin de se calmer. La semaine passée, 3 500 taxis ont conduit vers l’aéroport Trudeau de Montréal à basse vitesse, pour essayer de montrer à Québec
que la législation contre les transports alternatifs devrait être encadrée. De pareilles manifestations à Ottawa ont eu lieu cette semaine. La réaction des dirigeants est mixte: le 20 août dernier, M. Coderre a annoncé à la presse une «intensification de la lutte contre le transport illégal». Mais la même journée, il a admis qu’«à Montréal, comme partout dans le monde, on a besoin d’encadrement où tout le monde travaille sur le même pied». Sur le même fil, Bill de Blasio, le maire de New York, a récemment annulé l’idée d’une limite sur le nombre de voitures d’Uber dans la rue. Le vent change-t-il enfin de direction? Est-ce que le gouvernement réalise l’erreur commise en tentant d’interdire le service? Au Canada, on a un gouvernement qui sert à protéger nos libertés et qui est mandaté pour maintenir la grande machine du marché bien huilée. Ici, on voit un ralentissement de l’économie et un ralentissement du progrès, à cause d’une industrie historiquement inefficace qui utilise les réglementations du gouvernement pour résister contre l’évolution. Oui, Uber a besoin d’une réglementation plus claire et plus juste, et oui, à l’instar de chaque nouvelle technologie, cette nouvelle évolution vient avec son lot de problèmes à régler. Mais nous pouvons être confiants que ce service moins cher et moins formel nous embarque, prudemment et soigneusement, vers le futur. x
théorie
Une histoire de QE
Retour sur une méthode de redressement économique. sami meffre
Le Délit
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onsidéré comme une des armes les plus puissantes des banques centrales en temps de crise, le QE, assouplissement quantitatif (Quantitative easing, ndlr) a un seul et unique but: stimuler l’économie par la libération de capitaux privés. Ce mécanisme, utilisé tour à tour par la Banque du Japon, la Banque d’Angleterre, la Banque centrale américaine («Fed», ndlr) et dernièrement la Banque centrale européenne (BCE), est en théorie très simple. Crise de liquidité Le marché obligataire est un marché sur lesquels les compagnies
peuvent «vendre de la dette» avec un intérêt et une date d’échéance, c’est à dire s’endetter auprès de tous types d’investisseurs, et les entreprises en ont vitalement besoin pour financer leurs nouveaux projets. En temps de crise, les investisseurs, et tout particulièrement les plus réticents au risque, se séparent généralement de tous leurs actifs (éléments de leur patrimoine, ndlr) à risque pour se refugier vers des actifs dits «sans risque» comme la dette souveraine des pays développés. Cela a pour effet direct de créer une crise de liquidités sur le marché obligataire, c’est à dire que plus personne n’achète ou vend quoi que ce soit. Si les compagnies ne peuvent plus accéder à ce type de marché, il leur faut soit se tourner vers d’autres solutions de financement pour leurs projets,
le délit · mardi 29 septembre 2015 · delitfrancais.com
soit tout simplement les abandonner. Si les compagnies ne peuvent plus s’endetter, on assiste généralement à une chute brutale de la croissance telle que celle de 2008. Éléments de définition C’est dans ce contexte que l’assouplissement quantitatif entre en jeu. Les banques centrales vont alors créer de la monnaie pour racheter de la dette souveraine, et ainsi augmenter la demande pour cette dernière. Avec une offre constante, cette demande additionnelle va faire augmenter les prix de la dette souveraine. Si les prix augmentent, le rendement relatif de la dette souveraine va quant à lui baisser. Cela a pour effet de forcer les investisseurs à se tourner vers des
marchés plus risqués comme le marché des actions, mais aussi le marché obligataire celui des produits dérivés. En théorie, ce mécanisme devrait permettre aux compagnies de pouvoir de nouveau s’endetter et ainsi reprendre leurs projets. Pour et contre Quand il s’agit de commenter l’efficacité de l’assouplissement quantitatif, les économistes ont du mal à tomber d’accord. En plus de stimuler l’économie, le QE aurait pour atout de faire baisser le coût de l’emprunt pour les entreprises ainsi que donner plus de confiance aux investisseurs. Dans le camp du contre, on trouve des arguments tout aussi valables: le risque d’une inflation galopante, celui d’une augmen-
tation irrationnelle et possiblement spéculative des prix sur le marché des actions (si certains pensent qu’une majorité des investisseurs vont être forcés à quitter le marché de la dette souveraine, et ainsi acheter et vendre de façon spéculative), et enfin la quantité de risque d’envergure macroéconomique prise par la banque centrale… D’autant plus qu’en réalité, si on regarde les impacts du QE sur l’économie réelle, les résultats sont eux aussi mitigés. Les pays comme le Royaume-Uni et les États-Unis se sont définitivement sortis de la crise, mais lorsque l’on observe l’état de la zone Euro, et celui du Japon, on peut encore espérer que les banques centrales trouveront bientôt une solution un peu plus efficace pour stimuler leurs économies respectives. x
Économie
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Culture articlesculture@delitfrancais.com
exposition
Volonté d’afficher
Le fier arbre de Vittorio: 50 ans de création urbaine exposés au Musée McCord. Philippe Robichaud
Le Délit
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xaminez la vie des hommes […] les plus féconds, et demandez-vous si un arbre qui doit s’élever fièrement dans les airs peut se passer du mauvais temps et des tempêtes […] ?» - F. Nietzsche, Le Gai Savoir. Parlant de fécondité, Vittorio Fiorucci (1932-2008), mieux connu sous son seul prénom Vittorio, a été affichiste, concepteur (designer) graphique, écrivain, caricaturiste, photographe, scénariste, bédéiste, illustrateur, éditeur de magazines, auteur de livres pour enfants, de livres de photographies et sculpteur. Immigrant dans l’aprèsguerre, il débarque sans-le-sou à Montréal en 1951 et œuvre parmi les artistes de la «Petite Europe» (Molinari, Mousseau, Groulx, etc.). Le regard sur sa vie qu’offre l’exposition actuelle au Musée McCord indique qu’il n’a jamais mieux créé que lorsqu’il était entouré de contraintes -du moins, de ce que la plupart des gens appelleraient des contraintes. Vittorio, lui, y tire sa force. Épaules haussées, paumes vers le ciel, il s’y enracine.
D’abord, cette décision d’être graphiste. En entrevue à Cabine C en 2007, il confie qu’il aurait bien voulu écrire ou même tourner des films. Toutefois, catapulté à Montréal, il ne parle ni anglais ni français. Les mots lui manquaient. Barrière linguistique? Plutôt: focalisation obligée d’une puissance créatrice qui l’aurait assurément trop éparpillé si elle n’avait pas été canalisée dès le départ.
déjà âgé, garde toute sa vitalité caractéristique et n’a même pas l’ombre d’une formalisation lorsqu’il répond aux questions pointilleuses que Biron lui lance sur son statut d’immigrant, sur son manque de formation. Ses mouvements sont généreux, comme l’est sa tignasse léonine. On dirait qu’il ne s’aperçoit de rien, mais au fond, il est bel et bien conscient de sa posture inconfortable.
Sensualité et scandales Cette proximité lui est essentielle: Vittorio était avant tout un homme sensuel. Le corps est à l’honneur dans son travail, tant comme sujet représenté que comme observateur anticipé et censé ressentir quelque chose de fort. Certaines de ses affiches ont ébranlé suffisamment de sensibilités pour lui valoir une réputation d’artiste à scandale.
Le corps est à l’honneur dans son travail, tant comme sujet représenté que comme observateur anticipé et censé ressentir quelque chose de fort. Un artiste proche des gens Ensuite, sa situation d’autodidacte. Une autre entrevue, assez datée mais toujours disponible en ligne, dévoile le personnage. À gauche, Normand Biron, critique d’art aussi maniéré que célébré, un nœud papillon de style lord en soie mauve au cou, les jambes délicatement croisées, les cheveux d’une ouate brune peignés en combover, alterne vouvoiement agité et «r» roulés. À droite, Vittorio,
«Ha ! Je m’excuse,» lance-t-il au critique, «tu me donnes du vous, moi je te donne du tu!» Les deux rient, mais les castes pronominales restent closes. Malgré ce vouvoiement venu de haut, Vittorio n’a jamais bronché dans son tutoiement fraternel. D’ailleurs, avant sa mort, il prononce ces mots placés en exergue à l’entrée de l’exposition: «Il y a des gens qui disent qu’une affiche, ce n’est pas de l’art. Moi, j’ai toujours eu la conviction que c’était la forme d’art la plus près des gens.»
Selon le Dictionnaire de la censure au Québec, Vittorio réalise en 1965 des affiches pour une exposition dédiée aux sculptures de Robert Roussil. Celles-ci représentent le célèbre sexe masculin de La Famille; elles se feront décrocher la veille du vernissage. Ironiquement, le complexe artistique québécois d’antan a plutôt servi de toile de fond terne pour mieux faire éclater le mythe du personnage. Elle l’a sans doute aussi enhardi contre le refus, comme lorsqu’en 1990, l’Opéra
de Montréal rejette une série de ses affiches. «Qu’à cela ne tienne», se dit-il. L’artiste payera lui-même pour que ses œuvres soient collées un peu partout au centre-ville; l’Opéra finira par les lui acheter. À tout prendre, il se dégage lors de l’exposition une forte impression d’équilibre entre la mesure du personnage qu’était Vittorio et les défis qui lui ont été lancés. Pas de souffrance écrasante ni de triomphe à tout casser. Plutôt, un éternel rictus cynique: frondeur mais comblé, inébranlable comme un chêne. Ce que d’autres appelleraient des «poisons» –vivre la guerre jeune, l’émigration, un pays inconnu, la pauvreté, la société conservatrice, etc.– n’auront servi qu’à «élever fièrement» le graphiste de renommée mondiale. «Le poison qui fait périr la nature plus faible est un fortifiant pour le fort– aussi ne l’appelle-t-il pas poison.» x
Montréal dans l’oeil de Vittorio Musée McCord Jusqu’au 10 avril 2016
elÉonore nouel
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Culture
le délit · mardi 29 septembre 2015 · delitfrancais.com
festival international de littÉrature (FIL)
Serge Gainsbourg, poète mineur? Discussion sur l’héritage de l’artiste légendaire avec Jane Birkin et Michel Piccoli. cÉline Fabre
Le Délit
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ne petite pièce sombre, un bureau et trois sièges. Nul n’aurait deviné que, d’ici quelques minutes, ces places seraient occupées par les comédiens de «Gainsbourg, poète majeur», pièce d’ouverture du FIL (Festival International de la Littérature) qui ne sont autres que Jane Birkin, Michel Piccoli et Hervé Pierre. Le Délit revient ici sur cet échange surréel, cette entrée dans l’intimité d’un des plus grands compositeurs, paroliers et interprètes français à qui l’on doit l’intemporelle «Javanaise». L’idée de la création d’une pièce en hommage à l’œuvre de M. Gainsbourg a germé à Toulouse, alors que Jane Birkin faisait la tournée de son album Arabesque avec le concepteur artistique Philippe Lerichomme. Elle a suggéré de remplacer des reprises musicales par de simples lectures des textes de celui avec qui elle a partagé sa vie pendant près de douze ans. Une façon de «découvrir en Gainsbourg le poète, plus que le chanteur ou le compositeur», explique le comédien Hervé Pierre qui rappelle que «parfois, le poème a une musicalité toute aussi grande que la chanson». En détachant les mots de leur mélodie, Jane Birkin a même redécouvert certains textes de «Serge». «Et ce ne sont pas des
Gilles Vidal
choses qu’on réécoute tellement souvent en fait; les ‘paroles paroles’. On croit qu’on connaît, un peu comme la marseillaise, mais non. Après un vers, on est cuit.» Questionnée par Le Délit sur la façon dont elle a abordé le travail de la pièce, Jane Birkin mentionne surtout l’émoi que lui inspirent de tels textes, notamment ceux que Serge lui a dédiés. «Je découvre des textes que je ne connaissais pas et souvent, ça me fait une émotion! Et c’était écrit il y a, je ne sais pas, 50 ans? C’est fou.» Et s’il était encore là, demande un journaliste, auraitil endossé la pièce? L’icône anglaise
répond: «Je n’en sais rien car il était très imprévisible. Mais je pense que le culot de Michel et la drôlerie d’Hervé: il aurait adoré. Ça c’est
le soir de la présentation, quand la voix d’Hervé Pierre a lancé avec gravité: «Ah quel suspens sur mon hippopodame, avec un «d» comme
«Un certain monsieur, qui ne vit plus...Mais qui est admirable.» sûr.» Car si la pièce – que les trois comédiens ont présenté le 24 septembre au théâtre Maisonneuve – a de quoi émouvoir, certaines chansons, comme «L’hippopodame», deviennent comiques une fois privées de leur musicalité. En témoignent les réactions du public,
dans vas-y mollo». Monsieur Piccoli, dont la carrière théâtrale massive revêt presque des allures d’arsenal, ressemble tout autant à un personnage dans la vie réelle. Une fois interrogé sur son travail d’acteur il convient: «Quand à moi, je suis toujours
L’ennemi, ce sont les livres
dans la folie d’être de plus en plus passionné avec les passionnels et les fous. Et les menteurs. J’aime les menteurs». En s’adressant autant à Jane Birkin qu’aux journalistes, il décrit Serge Gainsbourg comme «un certain monsieur, qui ne vit plus… Mais qui est admirable. Voilà». Et à nouveau, il brise le silence qui venait de s’abattre: «J’aime bien parce que c’est assez silencieux après ça. Ça prouve que c’est très con, ou très intelligent» déclenchant un rire consensuel parmi les journalistes. Il est ensuite question de l’héritage de M. Gainsbourg au Québec. Jane Birkin retrace: «Il a eu une période rose, il a eu une période bleue et une période cubiste avec Gainsbarre. Jusqu’au bout il a écrit. Alors l’œuvre est absolument monumentale.» Mais tandis qu’il considérait la chanson comme un art mineur, elle précise qu’il ne se considérait pas comme un «poète majeur» et qualifie le titre de la pièce de «prétentieux», car il admirait de grands poètes. «Autant, être considéré comme prétentieux ou poète ça le gonflait parce qu’en effet il aimait Rimbaud, Apollinaire... Mais je pense qu’il savait qu’il était un très bon parolier. Ce n’était pas prétentieux.» Et après une courte pause, elle conclût, non sans une touche d’ironie: «Un peu comme quand quelqu’un lui a demandé: «Quelle sera la fin du monde?» et qu’il a répondu: ‘Ma mort.’» x
Retour sur l’adaptation cinématographique de la dystopie Fahrenheit 451. Joanna Wolfarth
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’est au Théâtre Outremont que l’adaptation de Fahrenheit 451, par le réalisateur François Truffaut a été diffusée dimanche 27 septembre. Réalisé en 1966, ce film est aujourd’hui présenté parle Festival International de la Littérature (FIL) dans le cadre des Journées de la Culture. Il présente une époque future sombre, durant laquelle la lecture est interdite et les pompiers ont pour mission de brûler tous les livres existants. Il ne s’agit cependant pas d’une dénonciation de la censure, malgré les nombreuses idées reçues: «Le peuple se complaît dans son état de béatitude comme des automates obsédés par le divertissement» explique Thomas Hellman, chanteur et chroniqueur littéraire diplômé de McGill. L’histoire serait inspirée d’évènements historiques tels que l’incendie de la bibliothèque d’Alexandrie; les autodafés, ou encore les «actes de foi», qui se sont répétés récemment à Mossoul, en Irak. Ces actes ont pour but
l’abdication de la raison au nom d’une vision unique du monde. Fahrenheit 451 examine donc l’aspect matériel de la culture, qui sera finalement intériorisé à la fin du film, le tout avec les touches d’humour du réalisateur. Suite à la projection, Thomas Hellman a tenu une discussion avec les spectateurs. On souligne alors les similitudes entre Le meilleur des mondes de Aldous Huxley, 1984 de Georges Orwell et Fahrenheit 451 de Ray Bradbury, œuvres qui présentent chacune des formes diverses de sociétés totalitaires. Des systèmes dans lesquels, pour atteindre le bonheur, on tente de rendre tous les citoyens égaux, et d’enlever aux individus leur «supplément d’âme». Lors de la discussion, la thèse que défend Hannah Arendt dans La crise de la culture a très justement été mise en parallèle avec le film. Cette dernière souligne la confusion entre culture et divertissement, le consumérisme et l’aspect staliniste du rôle de l’artiste; ses œuvres doivent être aussi réalistes que possibles pour rendre crédible ce semblant d’égalité entre tous les individus. Le livre et le film, datent res-
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pectivement de 1953 et 1966. Ils présentent un univers futuriste, dans lequel le divertissement et les médias ont prit le dessus sur la culture et les livres. Néanmoins, l’œuvre de Bradbury est beaucoup plus axée sur la science-fiction que ne l’est son adaptation cinématographique qui semble étrangement contemporain malgré son ancienneté. La version de Truffaut est tout de même plus porteuse d’espoir que le livre; le personnage de Clarisse et la femme du personnage principal, Montag, sont jouées par la même actrice, et représentent respectivement l’anticonformisme et le conformisme.Dans le livre, Clarisse disparaît rapidement, tandis que dans le film, elle est présente jusqu’au bout et laisse à l’anticonformisme une chance de survivre. Malgré l’âge des œuvres, les «prédictions» et les similitudes vis-à-vis de notre réalité sont saisissantes, alors que le livre ne se veut pas être une œuvre d’anticipation. Samedi 26 septembre, une autre discussion sous forme d’un café philosophique a eu lieu dans le cadre du FIL: «Devons-nous brûler nos livres?» en était la problémati-
que centrale. Des questions concernant le futur des bibliothèques et des livres ont été abordées: qui a le pouvoir de décider ce qui doit être conservé ou au contraire détruit?
C’est une problématique qui trouve particulièrement son sens à l’heure de l’avènement de notre ère du numérique. x
chloé anastassiadis
Culture
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exposition
L’insouciance de Marilyn
Le meilleur des années 50 selon Zimbel au Musée des Beaux-Arts de Montréal. alexandre Jutras
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usqu’au 3 janvier, l’exposition Un photographe humaniste de George S. Zimbel nous est présentée par le Musée des Beaux-Arts de Montréal. Le visiteur a accès gratuitement à une cinquantaine de photographies argentiques ainsi qu’à un court documentaire portrayant l’homme derrière cette œuvre fondamentalement humaine. Exposé à Valence, Tokyo et New-York, le travail de cet artiste est déjà bien connu et il est agréable de pouvoir en profiter dans la ville où il habite désormais. La durée de présentation de l’exposition ainsi que sa gratuité devraient convaincre
tous les méfiants que les œuvres du photographe américain valent le détour. C’est équipé de son fidèle appareil Leica que l’artiste, natif du Massachussetts, a photographié des icônes de son époque. Son cliché de Marilyn Monroe, jupe au vent, est particulièrement célèbre, même s’il n’a été développé que vingt ans après sa capture. Passionné de politique depuis son séjour à l’Université Columbia, en compagnie du futur président américain Dwight David Eisenhower, il quitta les États-Unis pour s’installer à l’Île-du-Prince-Édouard, choqué par l’implication de son pays au Vietnam. L’œuvre de Zimbel fait ressortir le caractère humain qui
habite les gestes les plus anodins de la vie quotidienne et permet une réflexion profonde à propos du rôle que le photographe occupe dans notre société. Il visite aussi bien des boîtes de nuit que des chantiers de construction ou des bibliothèques pour nous présenter une réalité riche, intéressante, mais surtout vivante. Photographier pour célébrer Le point de vue depuis lequel il réalise sa photographie de John F. Kennedy, lorsqu’ils se trouvent tous les deux dans la même voiture à l’occasion d’une parade très achalandée, nous permet de mesurer le caractère improbable de ce type de cliché aujourd’hui.
L’exposition fait ressortir le talent d’un homme qui a su utiliser son art pour célébrer et non pour condamner. Véritable anthropologue, il nous fait revivre une époque où l’ambiance était à la naïveté plutôt qu’à la crainte et la méfiance. Il est un peu regrettable cependant que l’exposition soit si courte: une seule petite salle. On aurait aimé en voir plus, compte tenu de la qualité du travail de cet homme que certains ont eu la chance de découvrir tout récemment. Il est aussi vrai que la photographie argentique s’adresse à un public averti compte tenu de la popularité de réseaux sociaux comme Instagram ou Snapchat. Il est agréable de penser en
sortant du musée que le petit monsieur aux cheveux blancs que nous décrit le film d’introduction est en quelques sortes l’ancêtre de mouvements très populaires comme Humans of New York ou même sa version montréalaise Portraits de Montréal. Il est rassurant de constater que l’art peut rapprocher autant de gens encore aujourd’hui en présentant la vie de personnes ordinaires. x
George S. Zimbel, un photo graphe humaniste Au Musée des Beaux-Arts Jusqu’au 3 janvier 2016
Crédit photo franCois legras
cinéma
Silence assourdissant
Soudain, le silence suit les tribulations d’un chanteur d’opéra en deuil de sa voix. Hortense Chauvin
Le Délit
T
rente ans après son premier long-métrage Medium Blues (1985), l’ancien producteur de télévision québécois Michel Préfontaine revient au cinéma avec Soudain, le silence, long-métrage intimiste en salle depuis le 25 septembre. Mettant en vedette la chanteuse montréalaise Chantal Bellavance et le baryton québécois Etienne Dupuis pour son premier rôle au cinéma, ce film tente de plonger le spectateur dans l’univers peu connu des artistes lyriques. Robert Gaspard, chanteur d’opéra français de passage à Montréal pour un récital, se réveille désemparé au lendemain de sa première répétition, ayant perdu l’usage de sa voix. Ce père de famille désabusé se résout alors à occuper le temps de sa convalescence par la découverte d’une ville qu’il jugeait jusque-là insignifiante, accompagné de Katie, l’assistante de son produc-
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Culture
teur. Cette relation professionnelle évolue sans surprise en une aventure amoureuse sans lendemain, lui apportant un semblant de réconfort dans sa solitude mêlée de frustration artistique. Si Michel Préfontaine s’applique à retranscrire par l’image la solitude des artistes itinérants en perpétuel transit, son scénario manque de relief. Il peine à relever une intrigue romantique si ponctuée de clichés qu’elle tend vers la platitude. Articulant autour de cette relation sans saveur sa réflexion sur le désespoir d’un artiste face à la perte de son moyen d’expression, Michel Préfontaine parvient difficilement à captiver un spectateur accoutumé à ce style d’épopée amoureuse obéissant à un schéma récurrent. En effet, le scénario peine à construire une véritable tension entre les personnages et manque cruellement de surprises, faisant appel à de nombreux tropes rebattus. Évoquant ce film comme la «réalisation d’un rêve», l’attachement pour le moins original
du réalisateur à faire découvrir la vie des chanteurs lyriques est miné par la répétition de scènes similaires, s’étirant dans la longueur et à l’esthétique inégale, donnant une vision des rapports sociaux interculturels sans nuance et versant facilement dans le lieu commun. L’effort lyrique Cela dit, Soudain, le silence est louable pour les prestations musicales de ses acteurs, notamment Étienne Dupuis, ancien de l’Atelier Lyrique de l’Opéra de Montréal. Interprétant successivement «Pourquoi me réveiller», air en français tiré du drame lyrique Werther de Jules Massenet, et l’air italien «Di Provenza il mar, il suol», extrait de l’opéra La Traviata de Giuseppe Verdi, ses interprétations étoffent un personnage principal sans surprises. Le film nous permet également de découvrir la voix de l’artiste montréalaise Chantal Bellavance, premier rôle féminin dont le dernier
IXION Communications
EP, J’attends, est sorti en 2013. La bande originale soignée de ce film au ton léger rattrape une réalisation à l’aspect parfois maladroit et un scénario quelque peu bancal. Ancien producteur d’émissions musicales sur l’opéra et la musique classique, on peut également saluer la volonté du réalisateur de rendre hommage à une vocation artistique méconnue et pourtant digne de susciter l’intérêt,
dont l’envers du décor a rarement été évoqué au cinéma. «Toutes les grandes villes se ressemblent», susurre l’artiste lyrique désenchanté à sa collègue pétillante, aux prémices d’une relation dont le dénouement semble déjà trop évident. Malheureusement –pourrait-on lui répondre– tous les films pseudo-romantiques se ressemblent aussi. x
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Théâtre
«Je te regarde et je me vois mourir» Le cri de détresse d’un jeune marginalisé, au Théâtre d’Aujourd’hui. Sandra Klemet
Le Délit
A
près Oxygène, le metteur en scène Christian Lapointe coupe à nouveau le souffle des Montréalais en présentant Sauvageau Sauvageau, au Théâtre d’Aujourd’hui du 22 septembre au 10 octobre. En se basant sur l’œuvre et la vie d’Yves Sauvageau, Christian Lapointe nous fait découvrir ce jeune artiste québécois des années 1970, mythique en son temps mais désormais inconnu du grand public. Yves Hébert, de son vrai nom, était un brillant auteur et acteur dramatique qui connut un début de carrière fulgurant, peu de temps avant de se donner la mort, à l’âge de 24 ans. On fait alors la connaissance d’un homme au talent prometteur mais à la sensibilité à fleur de peau tout au long de la pièce, au travers des dialogues et des monologues de deux personnages seulement. Deux personnages, ou plutôt une seule et même personne sortie de deux époques différentes: un Sauvageau figé à 24 ans, et un Sauvageau qui aurait eu aujourd’hui 69 ans s’il n’était pas parvenu à ses fins suicidaires. La pièce commence: entrent en scène les deux Sauvageau. L’un met en marche une vieille radio qui retransmet les témoignages de personnes ayant connu l’homme. En arrière-plan, une grande boîte qui ressemble à une télévision géante servira tout au long de la
pièce à la fois d’écran de projection, de livre et de cadre photo. En parallèle des témoignages, les photos de l’artiste défilent sur l’écran et retracent sa vie, de sa petite enfance jusqu’à ses derniers instants. Les deux acteurs sont assis de part et d’autre de la scène et assistent à cette commémoration comme des spectateurs. Les images s’accélèrent jusqu’à ce que tout s’arrête. Les Sauvageau se mettent au centre de la scène, revêtent les mêmes habits et c’est là que tout débute. La pièce, sans entracte, se découpe en quatre plans principaux aux intensités différentes. Sur
fond de piano, le jeune Sauvageau entame d’abord un discours à travers lequel il décrit sa faim et sa soif de vivre, ses frustrations, sa colère et son désarroi face à une société, un monde qu’il ne comprend pas. Il exprime son mal-être et s’entrechoquent des mots qui reflètent son envie de vivre et d’être acteur de ce monde, avec d’autres paroles qui décrivent son désir ardent de mourir, de quitter cet environnement dans lequel
il ne se retrouve pas et se sent marginalisé. Le vieux Sauvageau, plus lucide, lui répond de manière intermittente et tente de calmer ces pulsions de mort, tout en comprenant la rage exprimée par le jeune homme. Le vieux Sauvageau représente la manifestation fantasmagorique de Sauvageau s’il n’avait dit oui à la mort. Il est blasé, mais il aime la vie. S’ensuivent deux autres plans, durant lesquels
le jeune Sauvageau monte en intensité, déclame sa colère de manière de plus en plus véhémente. Au cours d’un monologue de presque vingt minutes, véritable performance de l’acteur, une litanie de mots se déversera pour enfin mener au quatrième plan, durant lequel les deux Sauvageau se retrouvent et continuent leur dialogue. La scène se clôture par une danse psychédélique, presque candide.
Le vieux Sauvageau représente la manifestation fantasmagorique de Sauvageau s’il n’avait dit oui à la mort. Sauvageau Sauvageau est avant tout une pièce textuelle dont le but n’est pas d’être intégralement absorbée par le spectateur, mais plutôt que celui-ci perçoive les émotions et idées qui s’en dégagent. Le texte est sans aucun doute très beau et travaillé mais il demeure cependant très lourd et donc difficile à suivre jusqu’au bout. Heureusement, le metteur en scène a choisi d’équilibrer la densité de son texte par un décor sobre et les mouvements mesurés des acteurs. En définitif: une pièce pas évidente à regarder, mais l’exercice de concentration vaut le détour. x
Sauvageau Sauvageau valérie remise
Théâtre d’Aujourd’hui Jusqu’au 10 octobre.
chronique
Dans l’œil des hyènes Charles Gauthier-Ouellette | Le port littéraire
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oman d’espionnage? Récit de trahison et de mensonge? Revisite de l’œuvre de Georges Orwell à saveur contemporaine? Dès les premières pages, le nouveau roman d’Alexandre Soublière semble jongler entre les différents genres du suspense, tout en possédant une touche très personnelle. Nommé après une
sorte de champignon vénéneux, Amanita virosa joue abondamment avec l’omniprésence de la technologie afin de bâtir son récit. Ce livre suit le parcours de Winchester Olivier qui, avec l’aide du policier corrompu Samuel Colt, forme l’entreprise Hyaena. Celleci, dont le but est de fournir différentes vidéos ou photos à de riches hommes d’affaires, prospère grâce à son habileté hors du commun à obtenir du matériel pouvant satisfaire les fantasmes les plus fous. En effet, du simple voyeurisme au plus déviant des plaisirs, c’est dans cette sphère marginale que les protagonistes bâtissent leur fortune. Au gré des divers contrats qui leurs sont offerts tout au long du récit, le lecteur assiste au déploiement de ce réseau de vol d’informations, de caméras cachées et d’oblitération de la vie
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privée. De quoi se sentir en plein 1984 (de George Orwell, ndlr). Pour arriver à un tel résultat, l’auteur confronte le lecteur à un univers qui lui semble familier aux premiers abords, mais qui, au fil du récit, entre dans le romanesque. Que ce soit en se lavant chez ses victimes afin de s’attribuer leur odeur, en surnommant les individus en fonction de leur QI ou en ne s’abreuvant que d’eau de pluie, car la sècheresse mondiale lui semble imminente, les manies du personnage principal apparaissent progressivement et donnent un bon aperçu de cette distanciation progressive par rapport au réel. Comme si l’ambiance n’était pas assez trouble, le passé du protagoniste exalte le mystère: un antécédent militaire pour une compagnie privée auquel s’ajoute un amour
désastreux pour une infirmière prénommée Cécili. Dans cet univers contemporain, l’auteur intègre une composante narrative des plus appropriées: l’usage du texto et autres technologies dans son écriture. Ceci surprend au premier regard, mais elle est si bien utilisée qu’elle devient inséparable au récit. En effet, cela permet de présenter les relations entre les différents personnages depuis un angle particulier, en remplaçant les discussions de vive voix par un échange de textos, ou un aparté par un article sur Tumblr. Le choix d’une langue abâtardie favorise aussi cette narration particulière. Comme pour son premier roman Charlotte Before Christ (Charlotte avant le Christ, ndlr), Soublière écrit dans une langue où cohabitent le français et l’anglais, sorte de mélange
imitant la langue parlée dans le milieu montréalais. Cette langue complète le microcosme unique de ce livre atypique. C’est avec une ferveur inouïe que les yeux traversent les pages du nouveau roman d’Alexandre Soublière. Il existe trop peu de termes pour qualifier un livre aussi particulier que celui-ci. Parfait pour tous les amateurs de suspense, mais aussi pour les lecteurs cherchant un roman horsnorme et mémorable, Amanita Virosa saura s’immiscer dans votre intimité. x
Amanita Virosa Par Alexandre Soublière Paru le 25 août 2015 Éditions du Boréal
Culture
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Entrevue
HAUTE, influences réciproques
À l’aube de la sortie de leur tout premier EP Reciprocity, le duo musical mcgillois HAUTE a accepté de répondre aux questions du Délit.
L
e Délit (LD): Tout d’abord, pourquoi ce nom de groupe: «HAUTE»? Romain Hainaut (RH): On a une formule pour cette réponse d’habitude! Anna Magidson (AM): Oui parce qu’on nous le demande tout le temps. Déjà, on voulait un nom qui marchait en français et en anglais. Et HAUTE représente bien l’esthétique qu’on avait en tête. RH: On voulait qu’à partir de notre nom on puisse déterminer qu’on a des racines françaises…Parce qu’il y a un contraste entre la musique américaine qui est très énergique, presque violente, et la touche française qui est plus raffinée et délicate. Et on a un petit peu ça en nous, surtout Anna, qui est très influencée par le R&B américain et puis moi j’ai été influencé par la musique française. On trouvait que le nom permettait de garder cette connotation de la french touch tout en faisant de la musique anglophone. AM: Et aussi, visuellement, le mot «haute», je trouve ça très agréable à voir, sur papier.
«Le nom du groupe permet de garder la french touch tout en faisant de la musique anglophone.»
RH: On voulait faire quelque chose d’élégant sans pour autant être arrogant ou prétentieux. LD: Et c’est pour marquer le contraste que vous n’avez que des titres anglais? RH: On a des titres anglais surtout parce que c’est la langue dans laquelle Anna préfère écrire et chanter pour l’instant. AM: On n’avait pas vraiment pour but de marquer un contraste mais c’est vrai que c’est assez drôle que malgré le nom français, toutes les chansons soient en anglais. LD: Les deux premières chansons que vous avez sorties: «Down» et «U should know» sont plutôt calmes, sur un ton assez posé. Est-ce que toutes les chansons de votre EP seront comme ça? AM: Non, il y a des chansons qui sont un petit peu plus agressives tandis que ces deux chansons sont vraiment des balades. «So high» ou «Reciprocity», par exemple, sont plus rapides. LD: Justement, parlez-nous un peu de votre EP. RH: Donc notre single digital va sortir sur iTunes vendredi prochain, le 2 octobre. Et ensuite, le reste de notre EP sortira le 23 mais la précommande sera annoncée dès vendredi!
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Entrevue
nationalités différentes, c’est assez rare de rencontrer des personnes qui arrivent à intégrer deux cultures tout en obtenant un résultat cohérent. LD: D’autres projets après cet album? RH: Oui! On va travailler sur une mixtape gratuite qui sera quelque chose de moins léger, fait un peu plus instinctivement et plus orienté hip hop, qui sortira cet hiver. Composé de une ou deux covers de chansons R&B des années 2000 et peut-être des «featuring» de rappeurs de la scène locale d’ici. À confirmer.
david uzochukwu
Après le succès du mix «Down» sorti pendant l’été 2014, la chanteuse Anna Magidson et le producteur Romain Hainaut (ancien illustrateur du Délit) continuent d’explorer la sphère musicale, mélangeant des influences pop, électro et R&B. LD: Vous aviez défini une ligne directrice pour votre album? Ou bien est-ce que vous vous êtes donné beaucoup de liberté, sans idées précises de ce que ça allait donner? RH: On s’est donné pas mal de liberté dans le sens où on n’a pas fait des chansons par rapport aux autres chansons. On a fait chaque chanson individuellement mais les textes d’Anna ont quand même des thèmes qui les rapprochent. Parce que ce sont tous des morceaux assez sentimentaux en fait. Il y a toujours une relation entre deux personnes. AM: Oui ce sont toujours des dialogues. C’est un petit peu ça le but des chansons. Et justement, le titre de l’EP c’est Reciprocity et pour qu’il y ait une réciprocité, il faut que ça soit un dialogue. LD: Comment est-ce que vous définiriez votre style musical? RH: Je n’arrive pas à mettre un terme dessus mais je pourrais en mettre deux. C’est de la musique électronique mélangée à du R&B contemporain. AM: C’est une fusion de genres différents. Et beaucoup de gens me disent que ça ressemble à du trip hop. LD: Au niveau de la composition, ça se passe comment? AM: À la base, c’était moi qui faisait une petite démo sur GarageBand, les paroles et les accords au piano et un petit beat en dessous, puis Romain orchestrait toute l’instrumentation. Mais ça dépend, parfois c’est lui qui m’envoie des rythmes et j’écris les paroles par-dessus. C’est assez fluide. RH: Ouais c’est un échange, c’est vraiment moitié-moitié. LD: Si vous avez commencé à faire du son et de la musique en laquelle vous croyez,
c’est que vous avez l’impression d’avoir quelque chose de spécial à apporter… AM: Et bien notre marque c’est justement la fusion de genres et la fusion de nationalités. Et surtout l’harmonie qu’on arrive à avoir entre nous deux, parce que c’est assez rare quand même de pouvoir travailler avec quelqu’un comme ça. LD: Ça s’est fait tout seul? AM: Ouais carrément, on ne se connaissait pas avant de travailler ensemble.
«C’est assez rare de rencontrer des personnes qui arrivent à intégrer deux cultures tout en obtenant un résultat cohérent.»
RH: On s’est rencontrés avec ça en fait, sur un groupe Facebook de musiciens de McGill. Et on a commencé à travailler ensemble avant de se rencontrer en vrai. AM: Oui voilà. Heureusement qu’on n’a pas envie de s’entretuer (rires). Ce qui nous démarque c’est juste qu’on transcende un peu les genres et qu’on a un penchant pour la musique. RH: Parce qu’on ne peut pas vraiment caractériser notre musique de «française» vu que, dans les textes, elle ne l’est pas. Mais on est quand même français et il n’y a pas tant de Français qui font ce style de musique. En tout cas c’est peutêtre un des points qui nous a rendus plus intéressants auprès des gens avec qui on a signé cet été. AM: Même si ce n’est pas rare de rencontrer des gens qui viennent de deux
LD: Maintenant, des questions un petit peu plus personnelles: si vous deviez choisir un concert auquel aller dans votre vie? AM: Moi, ça serait Stevie Wonder, c’est obligé. Ou Amy Whinehouse mais c’est plus possible. Et puis Mickael Jackson aussi. RH: J’aurais kiffé voir Led Zeppelin en concert, je crois que ça aurait été mon concert préféré. Quand j’étais plus jeune j’écoutais du rock, et même si je n’en écoute plus trop, je trouve qu’en concert c’est plus sympa à voir que de la musique électronique. LD: Et est-ce qu’il y a un artiste avec lequel vous aimeriez travailler? AM: J’aimerais bien travailler avec Frank Ocean, avec Tink –une rappeuse de Chicago–, avec Timbaland...Ou Kanye West. RH: On avait dit «un» artiste (rires). Moi j’aimerais bien travailler avec James Blake, le producteur anglais, et puis comme chanteur ou chanteuse… AM: Shakira! Non, Rihanna! RH: Ah oui, j’avoue Rihanna…je ne rigole même pas, ça me plairait vraiment. LD: Et enfin, si vous deviez donner un conseil à des étudiants qui voudraient se lancer dans la musique? RH: Youtube (rires). Non mais c’est vrai, on apprend tout sur Youtube. AM: Moi je dirais: profite des ressources qu’offre Montréal, va voir des concerts, va à des sessions open-mics. Et puis, rencontre des gens, parce qu’il y a plein de gens de notre âge qui s’intéressent à tout ça. RH: Et passes du temps à t’entraîner, à faire de la musique. C’est avec le temps qu’on fait des trucs bien. x Propos recueillis par
céline fabre Le Délit HAUTE
Reciprocity Électro Diez Records Sortie le 2 octobre
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