Publié par la société des publications du Daily, une association étudiante de l’Université McGill
BILAN DE L’ANNÉE P. 8
+ CAHIER CRÉATION
Mardi 31 mars 2015 | Volume 104 Numéro 21
Je suis Emmet depuis 1977
Éditorial rec@delitfrancais.com
Derniers Délits Joseph BOju
Le Délit
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ermettez-nous un dernier mot. Nous avons observé cette dernière semaine un phénomène trop curieux pour ne pas être rapporté ici, à cette heure et en ce lieu. Il s’agit de la bêtise humaine, celle qui pousse des individus à créer une page sur notre prison sociale qu’est Facebook dont l’unique but est de moquer avec insistance une personne physique: Naomie Trudeau-Tremblay, victime jeudi dernier d’un tir de gaz lacrymogène à bout portant lors d’une manifestation devant l’Assemblée nationale à Québec.
Volume 104 Numéro 21 «À ce jour, près de 110 000 étudiant-es seront en grève le 2 avril pour la Manifestation nationale» Association pour une solidarité syndicale étudiante, le 30 mars. «J’en appelle aux recteurs et aux doyens: ramenez l’ordre et le calme au plus vite!» Mario Asselin, Journal de Montréal du lundi 30 mars. «Le drame de notre époque, c’est que la bêtise s’est mise à penser» Jean Cocteau. «Un livre est un ami qui ne trompe jamais» Un vitrail de la bibliothèque Redpath, citant à tort René Charles Guilbert de Pixérécourt (1773-1844).
Au-delà de l’incompétence et de la violence des forces policières, c’est le phénomène de cyberintimidation qui nous alarme et nous rend solidaires. Ces derniers temps à McGill, les élections de l’AÉUM — festival de mi-session où la faune étudiante se régale derrière son ordinateur —, nous ont aussi laissé voir passer sur Reddit et Yik Yak un certain nombre d’insultes, toutes aussi anonymes et plus dégradantes les unes que les autres, notamment à l’encontre de la nouvelle v.-p. aux affaires internes, Lola Baraldi. Nous les condamnons fermement. Sans surprise aucune, les deux victimes sont des femmes. Cela devient lassant. Quand Internet cessera-t-il d’être cette poubelle incontrôlable et incontrôlée? Fausse question. Archives The McGill Daily 1925
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ette année, l’équipe éditoriale du Délit était en majorité constituée de Français de France. Aussi, notre principal défi fut de nous éloigner de nous-mêmes. Mais la renégociation de l’accord FranceQuébec de 1978 sur les frais de scolarité ne pouvait nous laisser de marbre, nous nous y sommes donc opposés dans un hors-série dédié à la question. Cela devait être la seule entorse au règlement. Hélas, les attentats de Charlie Hebdo furent une autre baffe du réel à laquelle nous ne pouvions pas ne pas répondre. Notre édition du mardi suivant les attentats, qui fut la première sur le campus à traiter du sujet et la seule à republier des caricatures du journal irresponsable, titrait ainsi «La réplique» sur fond de marche de soutien montréalaise. Aujourd’hui, nouvelle infraction à la règle: plus de 1000 stages d’étudiants français au Québec seraient menacés par les nouvelles règles imposées aux stagiaires étrangers par le gouvernement Harper. Le changement de réglementation du programme Expérience Internationale Canada, édicté sans préavis ni consultations le 21 février dernier, demande que les employeurs paient des frais de 230 dollars par stagiaire embauché (comme ils le feraient pour un employé), et détermine des quotas d’entrée pour chacune de ses 32 ententes bilatérales. Le but principal d’une telle mesure est de favoriser l’embauche canadienne en limitant le recours aux travailleurs étrangers. Selon Le Devoir de ce matin, près de la moitié des 200 employeurs et organismes québécois à but non-lucratif qui avaient parrainé des stagiaires étrangers ont refusé de se plier aux nouvelles règles d’Ottawa. Mais le gouvernement
leur est revenu en les forçant à appliquer les mesures de verrouillage d’ici le 1er avril. Tout le problème est là: des étudiants français déjà acceptés pour différents stages se retrouvent désormais sur la glace, sans visa pour l’Amérique. Considérant les liens étroits qui unissent la France et le Québec, notamment au niveau de la recherche universitaire, ces mesures ont été dénoncées par plusieurs directions d’établissements, de l’Université du Québec à Rimouski à l’association des directeurs d’Instituts Universitaires de Technologie français, mais aussi par les ministres Christine St-Pierre et Kathleen Weil de l’exécutif québécois, pour qui «le rayonnement du Québec à l’étranger» est en jeu. De telles mesures mettent en péril les parcours scolaires et extra-scolaires d’étudiants français au Québec et au Canada, mais empêcheront aussi à l’avenir des stagiaires québécois d’aller en France. Une collaboration rendue à ce point fastidieuse pour les étudiants français et leurs employeurs au Canada pourrait en effet encourager les établissements français à cesser leurs différents partenariats avec le Québec. Mais la grogne n’est pas que franco-française, rassurez-vous; selon Le Devoir, «elle se fait sentir dans tout le Canada» et gagne tous les collèges du pays. Car en plus d’être prioritairement accordés aux étudiants canadiens, les stages visés par Ottawa font souvent partie du cursus universitaire des étudiants et ne sont pas rémunérés. Au nom de quel principe de telles ententes devraient-elles être révisées? La peur de l’autre?
e n’écrirai pas que ceci est mon dernier éditorial. Le Délit, cet objet de plus haute vertu, ce navire à la proue flamboyante, ira où bon lui semble. Lui qui tire ses bords tantôt sur la flaque de boue que laisse apparaître la neige fondante d’un Lower Field printanier,
tantôt sur le peuple-océan qui défile dans les rues du centre-ville, pareil au cortège des dieux anciens, fous de colère et d’épouvante, il n’aura pas de mal à trouver son cap. Vogue donc, ô vaisseau-amiral du journalisme étudiant francophone mcgillois! Moi je reprends ma liberté.
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À chaque Délit que je lie Le temps me rapproche de toi Ici-bas tout m’est interdit X raisons, nouveaux combats. x
2 éditorial
Le seul journal francophone de l’Université McGill rédaction 3480 rue McTavish, bureau B•24 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : +1 514 398-6784 Télécopieur : +1 514 398-8318 Rédacteur en chef rec@delitfrancais.com Joseph Boju Actualités actualites@delitfrancais.com Louis Baudoin-Laarman Laurence Nault Esther Perrin Tabarly Culture articlesculture@delitfrancais.com Noor Daldoul Baptiste Rinner Société societe@delitfrancais.com Gwenn Duval-Stojanovic Coordonnatrice de la production production@delitfrancais.com Cécile Amiot Coordonnatrices visuel visuel@delitfrancais.com Luce Engérant Eléonore Nouel Coordonnatrices de la correction correction@delitfrancais.com Any-Pier Dionne Céline Fabre Webmestre web@delitfrancais.com Mathieu Ménard Coordonnatrice réseaux sociaux réso@delitfrancais.com Inès L. Dubois Contributeurs Chloé Anastassiadis, Yulina Ashida, Julien Beaupré, Camille Biscay, Arthur Corbel, Virginie Daigle, Sophie Enault de Cambra, Danielle Green, Noémy Grenier, Amandine Hamon, Danielle Londono, Maria Magdalena Lotfi, Sami Meffre, Catherine Mounier-Desrochers, Matilda Nottage, Anaïs Rossano, Stéphane Stril, Victoria Svaikovsky, Arthur Van Havre, Théophile Vareille, Amanda Zhou Couverture Gwenn Duval-Stojanovic Eléonore Nouel bureau publicitaire 3480 rue McTavish, bureau B•26 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : +1 514 398-6790 Télécopieur : +1 514 398-8318 ads@dailypublications.org Publicité et direction générale Boris Shedov Représentante en ventes Letty Matteo Photocomposition Mathieu Ménard, Lauriane Giroux, Geneviève Robert The McGill Daily coordinating@mcgilldaily.com Dana Wray
Conseil d’administration de la Société des publications du Daily (SPD) Juan Camilo Velazquez Buritica, Dana Wray, Joseph Boju, Baptiste Rinner, Rachel Nam, Hillary Pasternak & Ralph Haddad.
L’usage du masculin dans les pages du Délit vise à alléger le texte et ne se veut nullement discriminatoire. Le Délit (ISSN 1192-4609) est publié la plupart des mardis par la Société des publications du Daily (SPD). Il encourage la reproduction de ses articles originaux à condition d’en mentionner la source (sauf dans le cas d’articles et d’illustrations dont les droits avant été auparavent réservés, incluant les articles de la CUP). L’équipe du Délit n’endosse pas nécessairement les produits dont la publicité paraît dans ce journal. Imprimé sur du papier recyclé format tabloïde par Imprimeries Transcontinental Transmag, Anjou (Québec).
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Actualités
Université d’Ottawa
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politique étudiante
Mauvais perdants? esther perrin tabarly
Le Délit
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ohanna Nikoletos, l’adversaire défaite de Lola Baraldi au poste de v.-p. aux affaires internes à l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM) a déposé une plainte auprès de la commission juridique dans le but d’invalider l’élection. Mme Nikoletos accuse Mme Baraldi d’avoir commis des infractions à la procédure de campagne. La plainte déposée la semaine dernière a été rejetée par la commission juridique qui n’a pas trouvé de preuves suffisantes pour destituer Mme Baraldi. Le vendredi 27 mars, Mme Nikoletos a donc soumis une pétition d’appel auprès de la commission, qui lui concède cinq jours pour rédiger une déclaration remettant en cause la décision. L’élection de Mme Baraldi est contestée au motif qu’elle aurait fait mettre une affiche sur le comptoir du café Lou Lou, au New Residence Hall le 14 mars, pendant quelques heures, alors que les lois de l’AÉUM interdisent de faire campagne dans les cafétérias. De plus, un témoin rapporte que Louise Smith, l’amie de Mme Baraldi et employée du café, a suggéré à plusieurs clients de voter pour la candidate. Louise Smith ne faisant pas partie de l’équipe de campagne de Mme Baraldi, il est
illégal pour elle de participer à la campagne. Mme Baraldi a réfuté les accusations sous prétexte qu’elle ignorait que l’affiche avait été posée sur le comptoir, et qu’elle avait demandé qu’on l’enlève dès qu’elle l’avait remarquée. De plus, elle affirme qu’elle ne savait pas que Mme Smith s’engageait publiquement pour elle. Une fois que Johanna Nikoletos aura soumis sa déclaration à la commission juridique de l’AÉUM, ce sera au tour du service d’élections de l’association étudiante de rassembler les informations et témoins nécessaires. Rachelle Bastarache, la directrice générale des élections auprès de l’AÉUM, a déclaré au Délit qu’elle fait tout pour fournir des éléments dénués de biais. Mme Bastarache dit avoir contacté le service de sécurité de New Rez pour obtenir les vidéos de surveillance du 14 mars, afin de clarifier l’événement. De plus, elle appelle et encourage fortement les témoins à se manifester. Ces élections ont été fortement contestées par leurs perdants, en effet, la commission a aussi à traiter la plainte déposée par Alexei Simakov contre le comité des élections (voir p.8). Il reste une douzaine de jours jusqu’à la fin du processus d’appel de la commission, au terme desquels l’élection de Lola Baraldi restera sans appel possible.x
V.-p. externes: les candidates sami meffre
les étudiants sur leur contenu et leurs implications.
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Emily Boytinck Impliquée au sein de Divest McGill, Emily Boytinck dispose aussi d’une longue expérience à la Science Undergraduate Society (SUS). Mme Boytinck présente elle aussi un programme en trois points: intégration de McGill dans la communauté montréalaise, une plus grande transparence dans les programmes et actions politiques sur le campus et une campagne pour la préservation de l’environnement. Son premier point est simple: «percer la bulle mcgilloise» et ouvrir ses étudiants aux actions bénévoles de la ville. À cette fin, elle annonce la création d’une base de données qui regroupera les opportunités que les étudiants pourront saisir afin d’aider leur communauté. Mme Boytinck s’engage ensuite à faciliter l’accès et la participation aux actions politiques présentes sur le campus au travers d’un site internet, entre autres. Finalement, elle promet d’augmenter la participation de l’université à des actions pour la préservation de l’environnement. Elle compte ainsi réunir les différentes associations étudiantes du Québec afin d’augmenter la pression qu’exerce déjà les universités sur le gouvernement. x
Le Délit
Joanna Schacter i Joanna Schacter se présente comme une candidate qui manque d’expérience dans le monde de la politique étudiante, elle compte quelques années de pratique dans les journaux étudiants comme le Daily, le Tribune et le Harvard Independent. De plus, elle a participé à plusieurs actions bénévoles pour des associations locales. Étudiante en Histoire, elle base son programme sur trois points: inclusion, bilinguisme, et partage d’information. En effet, elle considère qu’il est très important que McGill fortifie ses relations avec les autres établissements universitaires du Québec et du Canada. Elle précise aussi qu’elle soutiendra l’entrée de McGill dans une fédération étudiante, afin de faire front commun sur des sujets tels que l’austérité ou le désinvestissement des énergies fossiles. Mme Schacter mentionne par ailleurs qu’elle désire renforcer le bilinguisme sur le campus afin de faciliter l’accès à l’information aux étudiants anglophones et francophones. Finalement, elle souhaite mettre en place des séances d’information avant tout référendum ou assemblée générale afin d’informer
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actualités
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montréal
Une austérité au poivre s.v.p. Une manifestation anti-austérité se termine prématurément après être déclarée illégale. Arthur van Havre
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e sont quelques milliers de personnes qui se sont retrouvées au parc Émilie-Gamelin vendredi 27 mars au soir à l’appel de l’Ostie de grosse manif de soir: Prise deux, préparée quelques jours plus tôt sur les réseaux sociaux. Organisé par l’Association générale étudiante du Cégep du Vieux-Montréal (AGECVM), ce rassemblement prévu pour 20h s’inscrivait sous la bannière du mouvement Printemps 2015 ayant pour but de s’opposer aux mesures d’austérité du gouvernement Couillard et à l’économie des hydrocarbures. On pouvait aussi lire sur la page Facebook de la manifestation qu’à ces revendications s’ajoutait un appel à un contingent féministe contre l’austérité patriarcale ainsi qu’un appel à la solidarité avec les arrêtés et les blessés des dernières manifestations. On rappelle que vendredi, près de 55 000 étudiants québécois détenaient un mandat de grève générale reconductible. Un contingent mcgillois s’est d’ailleurs rassemblé aux portes Roddick à 19h30 pour ensuite rejoindre le reste des manifestants au parc Émilie-Gamelin. Ce rassemblement comptait une dizaine d’étudiants actuels et anciens. En chemin, Robin Reid-Fraser, diplômée de McGill et ex-v.-p. aux affaires externes de l’AÉUM pour 2012-2013 expliquait son soutien
aux revendications féministes de la manifestation. «Il est important de s’exprimer explicitement contre [les conséquences du projet de loi 20 sur l’avortement] car c’est la justice reproductive qui est attaquée», expliquait-t-elle en parlant des contraintes qui seraient imposés aux médecins sur le nombre d’avortements pouvant être comptabilisés dans le suivi médical minimum requis. Elle a déploré de plus la brutalité avec laquelle le corps policier réprime les manifestations du Printemps 2015 en faisant un parallèle avec les pratiques observées en fin 2012.
Alors que l’Association générale des étudiants de langue et littérature françaises (AGELF) de McGill entame une grève d’une semaine à partir de ce lundi, Sam Quigley, étudiant en littérature anglaise s’exprimait en faveur d’une initiative semblable au sein de son département. Alors que son association (DESA) a annoncé la tenue d’un forum consultatif sur l’austérité, il déplore que cet événement ne puisse permettre la tenue d’un vote de grève officiel. «Certains d’entre nous ont rédigé une lettre demandant aux membres du conseil exécutif de l’Asso-
ciation de tenir une assemblée générale officielle qui permettra aux étudiants de se prononcer sur la tenue d’un vote de grève», explique-t-il. Interrogé plus tard durant la manifestation, un étudiant de philosophie de l’UQAM expliquait lui aussi l’importance des grèves étudiantes pour le mouvement:«Non seulement la grève libère du temps pour organiser le mouvement et exprimer notre désaccord, mais elle peut aussi servir de tremplin pour d’autres associations comme les syndicats de travailleurs qui peuvent moins facilement débrayer des mandats de grève.»
daniel Londoño
Au moment où le contingent de McGill rejoignait le reste des manifestants, la manifestation a été déclarée illégale par le Service de Police de la Ville de Montréal en vertu du règlement P-6, puisqu’aucun itinéraire n’avait été donné à la police. Une marche fut néanmoins entamée direction sud pour ensuite continuer de déambuler dans le centre-ville. On a pu remarquer une forte présence policière, les policiers suivant les manifestants tout le long du cortège. Un peu plus d’une heure après le début de la marche, alors que celle-ci atteignait le square Dorchester, les forces antiémeutes ont scindé le cortège en deux au moyen de grenades assourdissantes, de poivre de Cayenne et de l’«usage actif de la matraque» (tel que décrit par le SPVM). Un méfait perpétré par un manifestant contre une voiture de police serait à l’origine de cet avis de dispersion. Plusieurs manifestants ont tout de même tenté de poursuivre la marche pendant environ une heure alors que les policiers faisaient usage de bombes lacrymogènes et de force physique pour disperser la foule. Au final, 81 arrestations ont été faites en vertu du règlement municipal P-6. Le collectif Printemps 2015 prévoit plusieurs autres manifestations, dont une manifestation nationale le jeudi 2 avril prochain, alors que plus de 100 000 étudiants seront en grève.x
québec
La pilule ne passe pas Les étudiants en médecine de McGill manifestent à Québec. julien beaupré
Le Délit
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’est à Québec, devant l’Assemblé nationale, que les étudiants en médecine de l’Université McGill se sont rassemblés lundi le 30 mars pour manifester contre le projet de loi 20, accompagnés de leurs homologues de l’Université de Montréal, l’Université de Sherbrooke et l’Université Laval. Les manifestants, au nombre de quelques centaines, vêtus de sarraus et armés de stéthoscopes se sont principalement mobilisés contre le projet de loi 20 et l’imposition de quotas de patients pour les omnipraticiens qu’il implique. Il s’agit d’une manifestation historique:
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c’est le premier rassemblement réunissant les quatre associations universitaires de médecine au Québec. Aussi, cette mobilisation a directement affecté le milieu hospitalier universitaire puisque plusieurs manifestants sont des médecins externes. Par l’imposition de quotas de 1500 patients par médecin, sous peine de pénalités financières, le gouvernement cherche à augmenter leur productivité. En entrevue à Radio-Canada, Serge Keverian, président de la Fédération médicale étudiante du Québec (FMEQ), a peur que cette mesure résulte en une déshumanisation du rapport entre le médecin et ses patients. Il craint aussi que les étudiants en
médecine se désintéressent de la médecine familiale, principale profession touchée par le projet de loi, et que les étudiants finissent par faire résidence à l’extérieur de la province. Au lieu de cela, le président de la fédération propose que la prise en charge de patients soit valorisée à même les écoles. Le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, est resté imperturbable. À l’origine, le projet de loi 20 s’appuie sur des statistiques qui démontrent qu’au cours des quinze dernières années, le nombre d’heures travaillées par les médecins n’a cessé de diminuer malgré ce qu’il qualifie de mesures incitatives. Se gardant de parler de paresse, le ministre Gaétan
Barrette se contente de parler de «choix de vie». N’empêche que sa mesure vise à augmenter significativement le nombre de jours de travail des médecins de famille du Québec, soit actuellement 117 par année en moyenne. Ainsi, les médecins de famille devront respecter des quotas, mais aussi assurer leurs douze heures en institution. L’idée est que les patients aillent voir leur médecin de famille avant d’aller aux urgences. Cela implique que les médecins de famille revoient complètement leur profil de pratique, sans compter que la pondération des patients demeure contestée. À McGill, les étudiants ne sont pas les seuls à s’opposer au projet de loi 20. En effet, les
doyens des facultés de médecine du Québec ont déposé un mémoire en commission parlementaire pour dénoncer les effets du projet de loi. De plus, étudiants et doyens de McGill se sont entendus pour que les étudiants fassent la grève du 30 mars et puissent prendre part à la marche à Québec sans que leur absence soit pénalisée. Bien que cette journée de grève coïncide avec le départ de la grève étudiante de l’AGELF, l’Association générale des étudiants en littérature française, la fédération de médecine tient à ce que ses revendications soient distinguées du mouvement plus général contre l’austérité du printemps 2015.x
le délit · mardi 31 mars 2015 · delitfrancais.com
conférence
Affaires de cœur
VIVRE. APPRENDRE. JOUER. TRAVAILLER. LA CONSTRUCTION EST DÉJÀ BIEN AVANCÉE
MyVision tient un sommet sur l’entreprise sociale. Le Délit
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yVision McGill a organisé son deuxième sommet sur le thème de l’entreprise sociale, le 24 mars dernier, à la maison Notman. Lors de l’événement, étudiants, entrepreneurs et professionnels se sont côtoyés lors de discours, d’ateliers et de discussions autour du sujet «Repenser l’entrepreneuriat». À travers une présentation qui nous informait entre autres sur les mythes du monde corporatif, Richard St-Pierre, le président de la très populaire conférence C2 Montréal, a su motiver l’auditoire. Il a notamment insisté sur l’importance de créer un écosystème propice et de rassembler une bonne équipe autour de soi afin de réussir. Lorsqu’on lui a demandé ce qu’il conseille aux jeunes entrepreneurs, il a répondu sans hésiter: «Lancez-vous!» Il a également insisté sur le fait que «ce ne sont pas les barrières qu’il faut regarder en premier, ce sont les opportunités». Un certain positivisme émanait de la rencontre quant à la capacité des jeunes de percer dans l’entrepreneuriat social. Bien qu’il soit clair que pour réussir, un important travail est nécessaire, les invités semblaient appeler les jeunes à l’ac-
tion. «Ce que j’espère, c’est que les étudiants réalisent qu’ils ont autant de pouvoir que quelqu’un de plus expérimenté ou plus riche. Ce qui fait la différence; c’est l’engagement vis-à-vis la cause», a souligné Richard St-Pierre. Une idée qui est ressortie des propos des participants est la notion selon laquelle il n’existe pas de recette magique pour garantir le succès d’un projet d’entreprise. Le gagnant de la Coupe Dobson 2014 en entrepreneuriat social, Bernard D’Arche, expliquait que jamais il n’aurait cru à la phase initiale de son projet de reconstruction au Lac-Mégantic, que celui-ci prendrait une telle envergure. Son initiative, le Centre Magnétique, servira d’incubateur pour les entrepreneurs de la région et contribuera à l’expansion de l’économie locale. Collaborer pour innover Cofondé en 2013 par Yashvi Shah et Joanna Klimczak, MyVision McGill est une organisation innovante et unique sur le campus qui vise à promouvoir l’entrepreneuriat social et qui sert d’incubateur pour les initiatives mcgilloises. Sa mission est de sensibiliser les étudiants à l’entrepreneuriat social et de leur donner les moyens afin de mettre sur pied leur propre entreprise. Le mandat de MyVision
McGill inclut la formation des étudiants sur l’entrepreneuriat social à travers des événements, la création et mise en place de projets ainsi que la facilitation de rencontres entre étudiants et gens de l’industrie. «L’idée est venue d’un besoin; il y avait des groupes avec des idées ingénieuses, mais aucune structure pour regrouper ces étudiants. Alors nous avons voulu développer une plateforme pour favoriser les rencontres d’idées», explique Yashvi Shah. La présidente et cofondatrice a souligné l’expansion de l’organisation sur le campus et la planification de nombreux événements stimulants pour la prochaine année scolaire. L’entrepreneuriat social est une approche mise de l’avant par le Dr Muhammad Yunus, un entrepreneur et économiste bangladeshi, qui prône l’idée selon laquelle les compagnies devraient, au lieu de verser des dividendes à leurs actionnaires, réinvestir l’ensemble de leurs profits dans des activités à caractère social. Ce nouveau modèle met également l’emphase sur l’importance d’une pratique durable et soucieuse de l’environnement. Mme Shah a souligné l’expansion de MyVision McGill sur le campus et la planification de nombreux événements stimulants pour la prochaine année scolaire. x
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actualités
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Politique Étudiante
Conseil-marathon à l’AÉUM Programme chargé pour un conseil qui réagit aux coupes du gouvernement. Théophile Vareille
Le Délit
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e conseil législatif de l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM) s’est réuni le jeudi 26 mars pour une séance bien remplie, qui s’est étirée de 18h à minuit passé, preuve de l’investissement des membres du conseil de l’AÉUM dont le travail est plus souvent décrié et moqué que salué. Le début de la session a fait place aux habituelles présentations, à propos cette fois-ci d’une politique de recrutement équitable pour la Faculté de McGill, ainsi que d’une proposition de révision du règlement administratif de l’AÉUM, redéfinissant les prérogatives de différents acteurs tels le conseil judiciaire et le conseil des directeurs. Deux échanges ont eu lieu par la suite sur des sujets traitant de l’organisation interne de l’AÉUM. Suite à des attaques
répétées, Lexi Michaud, représentante du Conseil de première année (CPA), a d’abord eu à justifier l’organisation d’une fête sur le toit du stade olympique, au budget de 15 000 dollars mais avec seulement 300 participants, soit un déficit de 9000 dollars en soustrayant les 6000 dollars de tickets vendus à 20 dollars chaque. Mme Michaud a admis que le CPA avait commis certaines erreurs mais a aussi décrié le manque total d’assistance apportée à une organisation sans expérience car composée uniquement d’étudiants en première année. Mme Michaud a annoncé qu’elle et d’autres membres du CPA participeraient aux réunions du conseil l’année prochaine pour encadrer les nouveaux arrivants. Toujours dans un souci de «mémoire institutionnelle» – expression en vogue à l’AÉUM, où toute l’équipe est renouvelée chaque année – le conseil a longuement débattu du statut à offrir à un
nouveau membre de l’AÉUM responsable exclusivement du développement durable, c’est-à-dire soit une vice-présidence (élue par le corps étudiant pour un an), soit un simple employé (potentiellement en poste pour plusieurs années). La majorité des membres du conseil s’est pro-
La «mémoire institutionnelle», expression en vogue à l’AÉUM, où toute l’équipe est renouvellée chaque année. noncée en faveur d’un employé responsable de la durabilité, voulant faciliter la mise en place d’une politique à long terme, et aussi ne pas complexifier et élargir un conseil dont les postes ont déjà du mal à se remplir. En
effet, le poste de v.-p. aux affaires externes pour l’année prochaine est pour l’instant vacant, faute de candidat aux élections d’il y a deux semaines. Pour y remédier, le conseil a statué sur l’organisation d’une élection partielle du 1er au 3 avril. Deux candidates se sont présentées depuis, Emily Boytinck et Joanna-Rose Schacter. Grèves étudiantes et positions politiques Entrant dans le sujet principal du jour, le conseil s’est divisé sur la réponse à offrir aux coupes budgétaires mises en place par le gouvernement Couillard, qui réduisent de 205 millions de dollars les subventions aux universités, soit une réduction de 20 millions pour McGill seule. Le débat portait sur la question de l’engagement politique de l’AÉUM, à savoir si l’AÉUM a le devoir, ou même le droit, de se prononcer
sur des sujets sensibles au nom de 25 000 étudiants qui se sentent majoritairement étrangers à cette organisation. Malgré la volonté de membres tels que David Benrimoh – sénateur de la Faculté de médecine – et Amina Moustaqim-Barette – v.-p. aux affaires externes –, le conseil a décidé de soumettre préalablement à un référendum une motion déclarant que l’AÉUM se positionne contre l’austérité et reconnaissant l’éducation secondaire comme un droit universel. Le conseil a en revanche entériné une motion visant à informer le corps étudiant des réalités et enjeux de la situation, via, entre autres, des listes de diffusion envoyées aux étudiants. Joshua Chin, représentant de la Faculté de médecine, a aussi annoncé que certains de ses constituants se rendraient à Québec le lundi 30 mars pour protester contre le projet de loi 20 devant le parlement du Québec. x
Continuez sans nous Les associations de la FAÉCUM votent la désafilliation de la FEUQ. louis baudoin-laarman
Le Délit
L
es associations étudiantes de la Fédération des associations étudiantes du campus de l’Université de Montréal (FAÉCUM) ont officiellement voté, à l’unanimité, pour la désaffiliation de la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ) lors de leur congrès annuel le samedi 28 mars dernier. La Fédération s’apprête donc à perdre sa plus grande association membre, qui représente 40 000 étudiants, soit environ 40% des membres affiliés à la FEUQ. La FAÉCUM était par ailleurs l’une des associations fondatrices de la FEUQ en 1989. La FEUQ a refusé de commenter les résultats du vote. Les résultats du vote des 83 associations membres ont été accueillis sans surprise, près d’un mois après la publication d’un rapport de l’exécutif de la FAÉCUM le 28 février dernier sur l’état actuel de la FEUQ qui proposait «que la FAÉCUM ne soit plus membre de la Fédération étudiante universitaire du Québec et qu’elle participe à la création d’une nouvelle organisation nationale étudiante». Le même rapport citait comme raison de départ la baisse de l’efficacité politique de la FEUQ lors de négociations avec le gouvernement. Sur
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matilda nottage
la scène de la politique étudiante québécoise, ce départ représente un tremblement de terre, car il pourrait bien mener à la fin de la FEUQ, si d’autres associations membres décident de suivre la FAÉCUM dans son appel à une nouvelle organisation étudiante au Québec. Dans un communiqué de presse de l’exécutif de la FAÉCUM, le président Vincent Fournier
Gosselin a commenté que les étudiant(e)s de l’Université de Montréal «[…] envoient un message très clair qu’ils souhaitent une nouvelle organisation pour mieux défendre leurs droits et intérêts». Vers une nouvelle organisation? La nouvelle organisation étudiante voulue par l’exécutif de la FAÉCUM en est encore au
stade théorique, mais certaines associations étudiantes de région telles celles des Universités du Québec à Rimouski, à Chicoutimi et à Trois-Rivières ont démontré un certain intérêt pour une nouvelle organisation dans un communiqué le 26 février. Certains craignent cependant une régénération de la grande influence que la FAÉCUM possédait déjà au sein
de la FEUQ due à sa taille supérieure aux autres associations étudiantes. C’est le cas entre autres de Jean-Michel Duguay, représentant de l’Association des étudiants en mathématiques et statistique de l’UdeM, qui a affirmé au journal Quartier Libre que «le peu de représentativité qu’on [la FAÉCUM] accordait aux associations de régions a fait en sorte que ces derniers se sont dernièrement désaffiliés [de la FEUQ]». À McGill aussi, Julien Ouellet, v.-p. externe de l’Association étudiantes des cycles supérieurs de l’Université McGill (AÉCSUM), également membre de la FEUQ, confie craindre cette trop grande influence si les associations étudiantes devaient se rallier sous l’égide de la FAÉCUM. En réponse à ces craintes, Vincent Fournier Gosselin a affirmé dans son communiqué de presse que la nouvelle organisation serait mise sur pied démocratiquement et en tenant compte de tous les représentants associatifs, ajoutant que les représentants des associations étudiantes de l’UdeM «[…] devront jeter les bases d’une organisation démocratique, solidaire et articulée.» Reste à savoir si une fois créée, l’ancienne influence de la FAÉCUM ne reprendra pas le dessus. x
le délit · mardi 31 mars 2015 · delitfrancais.com
Conférence
Islam 101 Des étudiants organisent une journée d’activités pour découvrir l’Islam. Inès Léopoldie-Dubois
Le Délit
L
es étudiants mcgillois ont pu «Découvrir l’Islam», vendredi 27 mars dernier, à travers un événement de deux heures organisé par l’Association des Étudiants Musulmans de McGill (MSA McGill) dans la salle de bal du bâtiment Shatner. Le Président de MSA McGill, Ahmer Walli explique au Délit que «Discover Islam» fait partie du portfolio de la MSA. En effet, d’après son mandat, l’association se doit d’organiser des événements de ce genre de temps en temps afin d’informer les étudiants sur la religion musulmane, et essuyer les idées fausses et préjugés qu’ils peuvent avoir. L’événement était basé sur la compréhension ainsi que la découverte de l’Islam, et visait le corps étudiant au complet. Pour M. Walli, l’événement se voulait rassembleur: «On voulait cibler à la fois les musulmans familiers avec ces sujets, afin de leur rappeler des notions de bases mais aussi des non-musulmans afin de leur donner à la fois une compréhension de base de la religion ainsi qu’une nouvelle façon d’approcher l’Islam.». La salle était donc divisée en deux parties avec d’un côté différents kiosques offrant des informations plutôt basiques sur
Inès Léopoldie-Dubois
les bases de la religion, tels que l’explication des cinq piliers de l’Islam, une opportunité de lire et écouter le Coran, des informations sur le prophète ainsi que ses paroles et une présentation de femmes connues dans l’histoire de l’Islam. Des ateliers calligraphie, essayage d’hijab, et henné étaient aussi proposés, le tout modéré par des étudiants volontaires. Une des activités les plus populaires était la pose de henné,
mais aussi l’essayage du hijab, voile porté par les femmes musulmanes, activités plus interactives, et moins statiques que ce que proposaient les autres stands. L’autre côté de la salle offrait des discussions de 30 on n’en veut pas!» Plusieurs agents du Service de Police de la Ville de Montréal (SPVM) étaient aussi sur place pour empêcher toute altercation. minutes modérées par des intervenants extérieurs, sur dif-
férents thèmes tels que la dépendance et le contrôle de soi, le rôle de l’individu dans la communauté, la justice sociale, la famille, la réponse de l’Islam face à la violence et l’intolérance, et comment les études islamiques peuvent aider à gérer le stress et l’anxiété. À la table ronde sur la réponse de l’Islam face à la violence et l’intolérance, l’intervenant a expliqué que la réponse devrait toujours être le jihad, mais que signifie ce
terme ? L’intervenant a expliqué que le mot jihad signifie «résister le mal afin qu’il ne s’étende pas. Mais cela s’applique aussi aux maux intérieurs de chacun. Faire le jihad veut donc dire résister à tous les maux, intérieurs et extérieurs». La discussion s’est ensuite peu à peu axée sur le rôle des femmes dans la communauté en général. Chaque discussion partait d’un thème assez large mais les gens présents autour de chaque table pouvaient diriger la conversation dans le sens qui leur plaisait. Les organisateurs semblaient satisfaits de la présence quasi constante de personnes tout au long de l’événement, avec chaque table ronde plus ou moins remplie en fonction des sujets et un flux stable de personnes de stand en stand. Alexei Simakov, étudiant dans la Faculté des Arts en U3 nous a dit avoir apprécié le fait que cet événement «parte d’une initiative étudiante et qu’il ne soit pas organisé par l’AÉUM directement». Gabrielle Martin, étudiante dans la Faculté de management en U0 nous avoue être venue «pour le thé et le henné» mais a vraiment appris «de nouvelles choses sur la religion musulmane». M. Walli était content de voir des élèves de différents horizons, et pas seulement des musulmans, à cet événement qu’il considère un succès. x
Montréal
Tous unis contre l’islamophobie Une manifestation anti-islamisation échoue. Julien Beaupré
Le Délit
U
ne manifestation islamophobe organisée par le groupe Pegida-Québec (patriotes européens contre l’islamisation de l’Occident) près du Petit Maghreb a été contrée samedi dernier, le 28 mars, par une contre-manifestation sur le même lieu. La manifestation organisée par Pegida-Québec a causé beaucoup de remous lors des deux semaines précédant la manifestation, avant que celle-ci ne soit annulée au dernier moment dû au nombre réduit de participants. Le groupe Pegida Québec est une extension du mouvement Pegida qui a vu le jour voilà près de cinq mois en Allemagne
et s’est rapidement transposé en Amérique depuis. Leurs revendications non-politiques comprennent une lutte contre l’islamisation de l’Occident par l’implantation graduelle de la charia. En entrevue téléphonique avec Radio-Canada, le dirigeant de Pegida-Québec, Jean-François Asgard, a déclaré: «L’islam doit se réformer ou quitter l’Occident.» Ces prises de position controversées ont créé de vives réactions dans l’opinion publique. Dès l’annonce d’une manifestation, une contre-manifestation s’est rapidement organisée. Divers groupes de gauche présents sur place dès le début prévu de la manifestation Pegida ont été rejoints après quelque temps par des manifestants revenant de la manifestation heb-
le délit · mardi 31 mars 2015 · delitfrancais.com
domadaire contre l’austérité qui se déroulait un peu plus au sud. Les effectifs de la contre-manifestation ainsi augmentés, les manifestants de Pegida-Québec se sont rapidement retrouvés submergés en nombre face à leurs adversaires politiques. Sur place, samedi, on avait peine à trouver un seul membre de Pegida osant montrer le bout du nez. Ironiquement, sur la page Facebook de l’événement, on pouvait lire: «Le seul but est de réunir un maximum de personnes de toutes origines, politiques et ethniques et qui veulent sauvegarder nos valeurs démocratiques face à l’islamisation.» C’est effectivement ce genre de foule qui s’est aggloméré au point de rassemblement, quelques centaines, mais tous scandaient haut et fort
des slogans antiracistes: «Pegida, on n’en veut pas!» Plusieurs agents du Service de Police de la Ville de Montréal (SPVM) étaient aussi sur place pour empêcher toute altercation. Même si le droit de manifester est garanti par la Charte des droits et libertés, cela n’a pas empêché le maire de Montréal. Denis Coderre, de condamner fortement les visées du groupe. «Le groupe Pegida n’est pas le bienvenu à Montréal. Des groupes de ce genre n’ont pas leur place ici.», a-t-il affirmé publiquement. De même, les parlementaires de l’Assemblée nationale ont adopté une motion à l’unanimité pour manifester leur inquiétude par rapport au groupe. Tout ce contre mouvement n’aura pas provoqué
que des réactions enjouées. Dans la foulée des manifestations étudiantes illégales, faute d’itinéraire, les organisateurs de Pegida ont protesté contre la supposée illégalité de la leur. En effet, un itinéraire aurait été remis aux policiers. Ainsi, étouffé et indigné par ce contre mouvement, le groupe Pegida a annoncé sur sa page Facebook l’annulation de ses prochains événements pour prendre le temps de restructurer et de réorganiser le mouvement pour y apporter de nouvelles balises qui devraient préciser le but de l’organisation ainsi que sa pertinence. Les organisateurs espèrent ainsi atténuer la haine généralisée à leur égard qui les empêche de profiter librement de leur droit de manifester.x
actualités
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bilan
Année 2014-15: les grands sujets au Délit L’austérité en résumé
L
es mesures d’austérité libérales auront fortement été présentes au Délit cette année, de la première édition à la dernière. À la rentrée, on se souviendra des policiers et des pompiers avec leurs véhicules couverts d’autocollants (ils le sont toujours d’ailleurs). Alliés avec tous les autres employés municipaux, leur lutte concernait le projet de loi 3 visant les pensions de retraite. C’est par la suite l’idée du mouvement Printemps 2015 qui a vu le jour le 9 octobre 2014 lors d’une réunion de syndicats et d’étudiants luttant contre l’austérité et pour les droits syndicaux. Le comité Printemps 2015 s’inscrivait donc dans une mentalité parascolaire, c’est-à-dire en solidarité avec les services de santé, les services sociaux, les droits syndicaux et les hydrocarbures. Déjà,
une grève étudiante était envisagée comme moyen de pression. Le 27 octobre 2014, le vice-principal exécutif de McGill, Anthony Masi, conviait une réunion pour exposer les effets concrets des coupures dans le budget de l’Université. La conférence pourrait être résumée par cette brève affirmation: «Ceci n’est pas une crise financière, c’est une situation difficile mais nous nous en sortirons.» Évidemment, ce constat n’aura pas été partagé par toute la population québécoise. Le 31 octobre a eu lieu une énorme manifestation en soutien à la classe moyenne qui est la plus durement touchée par les mesures d’austérité. Àl’inverse de McGill, les cégeps du Québec se sont largement indignés des coupures à leur endroit. Le 22 février, la semaine dérangeante contre l’austérité débutait avec notamment
un Craie-in contre l’austérité et l’occupation des bureaux de l’Association des Banquiers Canadiens, suivis d’une quarantaine d’actions à travers le Québec. Les grandes manifestations anti-austérité ont officiellement débuté avec le début du printemps, le 21 mars, dans la première grande manifestation organisée par l’ASSÉ, conférant ainsi au mouvement un caractère foncièrement étudiant. Depuis, les manifestations de jour et de nuit se multiplient, les itinéraires sont rarement fournis, et les arrestations et les altercations policières se multiplient. Enfin, lundi 30 mars, l’AGELF, l’Association générale des étudiants de langue et littérature françaises, première association mcgilloise à s’engager officiellement contre l’austérité, a officiellement amorcé une grève d’une semaine.x
Désinvestir McGill
C
ette année aura été très productive pour le mouvement de désinvestissement qui a fait l’actualité à plus d’une reprise, la plupart du temps à travers l’association mcgilloise Divest McGill. L’objectif du mouvement est de convaincre les dirigeants des administrations des institutions d’enseignement supérieur en Amérique du Nord et plus particulièrement de McGill – dans le cas de Divest McGill – de cesser d’investir dans l’industrie des combustibles fossiles. Après avoir organisé le transport des activistes mcgillois vers la marche pour le climat à
New York en septembre dernier, l’association a fait ses preuves le 2 février 2015 en présentant une seconde pétition et un résumé de recherche pour Comité de conseil en matière de responsabilité sociale (CAMSR) [Committee to Advise on Matters of Social Responsability, ndlr] afin de convaincre ses membres qu’investir dans les hydrocarbures n’est pas éthique. Cette fois-ci, leur démarche était appuyée par plusieurs professeurs de McGill. Les professeurs Shaun Lovejoy, Darin Barney et Christopher BarringtonLeigh ont d’ailleurs publié le 10 février une
lettre ouverte dans The Montreal Gazette pour donner leur appui au mouvement et réclamer que l’Université retire ses investissements dans le domaine des hydrocarbures. Divest McGill a continué sa croisade le 13 février lors de la journée internationale d’actions pour le désinvestissement. L’organisation a profité de l’occasion pour hisser des bannières dans le local 132 du bâtiment Leacock et dans l’amphithéâtre Dawson Adams. À Montréal, l’Université Concordia a entamé des procédures de désinvestissement au mois de décembre.x
L’AÉUM à l’ombre de Tariq Khan
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n avril 2014, la commission juridique de l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM) invalidait l’élection de Tariq Khan au poste de président, pour cause d’infraction au règlement des élections. Au mois de mai, le candidat destitué attaquait l’AÉUM en justice, à la Cour supérieure du Québec. L’affaire s’est poursuivie jusqu’en octobre dernier, quand M. Khan a retiré sa plainte. Pourtant, au premier jour de la période de vote pour les élections du conseil exécutif de cette année, Tariq Khan a fait une réapparition surprise sur la page de campagne Facebook du candidat au poste de président, maintenant élu, Kareem Ibrahim, l’accusant de s’être introduit par infraction sur son compte à
la suite des affaires de l’an dernier afin de prouver sa culpabilité. À l’appui des accusations de Tariq Khan, des captures d’écran de conversations entre Kareem Ibrahim et Lola Baraldi, alors candidate au poste de v.-p. aux affaires internes, publiées sur Reddit le matin même. M. Khan a déclaré son intention de mettre à jour la plainte déposée à la police, afin qu’elle contienne l’accusation de M. Ibrahim. Le caractère inédit des élections de l’an dernier a manifestement établi un précédent de contestation des résultats à l’AÉUM. Lola Baraldi a vu son élection contestée auprès de la commission, à la suite d’une plainte de son adversaire Johanna Nikoletos. Les élections du conseil exécutif de cette année ont compté 25,9% de
participation, une baisse de 5% par rapport à l’année dernière. 16,7% du total des électeurs ont choisi de s’abstenir sur le vote présidentiel. Les affaires qui s’enchainent semblent entraver la confiance des étudiants envers leur association étudiante. Un vent de contestation souffle sur l’AÉUM, thème particulièrement abordé dans la campagne présidentielle d’Alexei Simakov. Le candidat sortant a déposé jeudi une plainte auprès de la commission juridique pointant les dysfonctionnements du comité des élections de l’AÉUM. En attendant la résolution des affaires en cours de la commission, on peut se demander si les précédents chroniques des élections de l’AÉUM se poursuivront dans les années à venir. x
Des AG mouvementées
L
’année 2014-2015 a vu une participation étudiante aux assemblées générales de l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM) sans précédent, rassemblant près de 750 étudiants au semestre d’automne, et plus de 400 au semestre d’hiver. Cependant, l’intérêt porté pour la politique étudiante cette année était dû plus aux propositions de motions controversées aux AG qu’à un réel désir de participation à la politique étudiante. La motion proposée à l’automne sur la solidarité avec les peuples des territoires palestiniens occupés et pour la condamnation des actes de violence
8 actualités
de l’État israélien l’été précédent a été reportée indéfiniment, après plusieurs heures de débat sur la controverse que suscite le sujet. Au semestre d’hiver, c’est une motion proposant le désinvestissement des compagnies profitant de l’occupation illégale des territoires palestiniens qui a été rejetée. Depuis 2009, c’était la quatrième fois que des motions liées au conflit israélo-palestinien étaient rejetées. Au semestre d’automne, toutes les motions sont passées avec quorum, la motion sur les territoires palestiniens ayant été une des dernières débattues. Au semestre d’hiver cependant, le quorum
n’avait pas été atteint pour la dernière motion, sur l’éducation accessible, après que la grande majorité des étudiants aient quitté la salle une fois terminé le vote sur la motion pro-Palestine, débattue en premier. L’espoir que les étudiants mcgillois seraient subitement devenus plus avides de politique étudiante n’est donc qu’un mirage. Dans la foulée de l’effervescence participative, des motions sur la lutte contre le réchauffement climatique, contre la recherche militaire, et contre les stages non-rémunérés à McGill auront tout de même été approuvées cette année. x
louis baudoin-laarman, julien beaupré, laurence nault & esther perrin tabarly
Le Délit
le délit · mardi 31 mars 2015 · delitfrancais.com
enquête
Les salades du légume
Société societe@delitfrancais.com
Enquête sur le journal satirique québécois Le Navet. CÉline Fabre
Le Délit
C
ombien de lecteurs de journaux n’ont jamais entendu parler du Navet? Probablement un trop grand nombre. Cela n’empêche pas les deux cofondateurs de ce journal en ligne indépendant que l’on connaît sous les pseudos Théophile PaulHenri de Bourguignon et Trevor Wochestershirde Kingsburry et leurs collaborateurs de détourner régulièrement l’actualité du Québec et d’ailleurs depuis maintenant deux ans. En entretien avec Le Délit, Théophile Paul-Henri de Bourguignon – de son surnom – raconte comment, après plusieurs expériences, Le Navet a fini par voir le jour. Tout commence lorsque Trevor et lui travaillent ensemble dans la même entreprise et ont l’idée d’envoyer de faux communiqués de presse à leur patron, pour plaisanter. Ils se mettent ensuite à publier ces écrits sur tumblr où ils s’amusent à expérimenter différents styles d’écriture puis à observer les réactions des internautes. En janvier 2013, ils créent leur propre site et lui donnent le nom affectueux qu’on lui connaît, en référence à The Onion, le journal satirique de fausses nouvelles américain qui ridiculise lui aussi le ton
parfois trop grave que revêtent certaines affaires publiques. Un rire qui a du sens Chez Le Navet, drôle ne rime pas avec absurde et T.P-H de Bourguignon précise que le but n’est pas de rire sans réfléchir mais de repenser l’actualité de façon constructive. À l’instar de certaines professions, celle de Bourguignon et de Kingsburry ne consiste pas à éplucher des légumes mais les nouvelles de la journée. À la rédaction du Navet, ils réfléchissent aux moyens de parler de problèmes politiques ou économiques d’une façon nouvelle, en déformant l’information reçue et aux manières de faire passer un message. C’est à la suite d’une telle recette que sur le site du Navet, le Service de Police de la Ville de Montréal (SPVM) part à la chasse aux marginaux, le directeur de Radio-Canada s’annonce à luimême qu’il est congédié pour réduire son déficit budgétaire ou que Belzebuth, prince des enfers, promeut la souveraineté du Québec. À travers des histoires et des citations qui peuvent sembler insensées, l’équipe du gros radis caricature, déforme, parodie et dresse le portrait des autorités et hommes politiques québécois s’ils allaient jusqu’au bout de leurs idées et étaient cohérents avec les moins sages d’entre elles. Au cours de l’entretien avec Le
Délit, Théophile de Bourguignon souligne cependant que le but est de rire de tout sans prendre parti. Ils cherchent à se moquer de tous et à cibler seulement ceux qui pourraient rire en voyant de tels articles.
«L’ironie et la désinformation dont ce journal fait preuve poussent à réfléchir à la réelle désinformation des médias de masse Divertir son potager Bien que récent, Le Navet a exploré plusieurs formats depuis sa parution début 2013. Des revues papier permettent aux lecteurs les plus dévoués de tenir entre leurs mains les articles de l’année passée, sous forme de livrets édités par les maisons Cardinales et disponibles sur le site du même nom où l’équipe du Navet recommande humblement: «sa revue annuelle vous fera rire et sacrer, en plus d’avoir un impact historique aussi significatif que la révolution
industrielle et l’invention de la roue.» Pour pouvoir se moquer de ce qui l’entoure avec dignité, le journal montréalais a compris qu’il doit aussi savoir rire de lui même et ne pas trop se prendre au sérieux. Entre deux articles satiriques, il se repose parfois dans cette branche-là, comme nous le montre le faux sondage datant de novembre 2013 qui assure que 95% des arbres du Québec veulent être abattus et transformés en page de la Revue de l’année du Navet. Depuis peu, leur sens de l’humour se traduit aussi par le format vidéo sur un ton qui n’est pas sans rappeler les fausses émissions du trio comique français Les Inconnus. Une nouveauté que Le Navet espère développer si son financement le permet. Juger de sa saveur Avec plus de 15 000 mentions «j’aime» sur sa page Facebook, Le Navet a su conquérir un public perspicace et désireux de varier ses sources d’information. Pour Alexandra Leblanc, étudiante à McGill, l’ironie et la désinformation dont ce journal fait preuve poussent à réfléchir à la réelle désinformation des médias de masse du Québec. «Peut-être aussi que ça incite à vouloir mieux s’informer sur ce qui se passe réellement. Bref, les articles du Navet font remettre en question la nouvelle.»
Pour sa part, c’est par hasard, peut-être à travers les médias sociaux de la grève de 2012, que l’étudiant de l’UQAM Roderic Archambault-Lavigne a découvert Le Navet. Ce qui lui plaît chez ce qu’il voit comme du «métajournalisme», c’est la façon dont ses auteurs croisent les différentes nouvelles. «Par exemple, l’article du 26 mars 2015 titré Le SPVM suggère aux manifestants de saccager l’hôtel de ville pour éviter les arrestations récupère un événement datant de la fin août 2014, lors d’une manifestation contre des mesures budgétaires où les manifestants – dont certains étaient policiers – ont saccagé la salle d’assemblée de l’hôtel de ville. Le Navet rappelle ce moment en ironisant la violence qu’offre actuellement le corps policier envers les manifestants, qui militent essentiellement contre les mêmes mesures d’austérité. Je trouve ce jeu de nouvelles drôle et intelligent.» Il arrive très exceptionnellement que Le Navet ne parodie pas les nouvelles et les reprennent telles que les grands médias les ont rapportées, l’effet tristement comique en est redoublé, le ministre Bolduc en a fait les frais le 17 février 2015, avec l’affaire des très respectueuses fouilles à nu sur des élèves. Quand on n’en croit pas ses oreilles, peut-on en croire son navet? x
LUCE engérant
le délit · mardi 31 mars 2015 · delitfrancais.com
Société
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POINTs de vue Lettre ouverte
Austérité, un mot mal choisi L’équilibre budgétaire, une question d’équité intergénérationnelle. Stéphane Stril
Président de PLQ-McGill
«S
accage des services publiques», «austérité néolibérale» et «destruction du modèle québécois» sont des expressions souvent utilisées par les opposants aux mesures de rigueur du gouvernement du Québec. Dans ce contexte rempli de confusions et d’exagérations gênantes il me semble pertinent d’éclaircir certains malentendus. Les mesures prises par le gouvernement libéral font suite à une promesse électorale présentée par Philippe Couillard durant l’élection générale du printemps 2014, soit celle de rétablir l’équilibre budgétaire lors de l’exercice financier de 2015-2016. Cette cible n’avait rien d’exagérée. La Coalition aAvenir Québec s’était fixée le même objectif, idem du côté péquiste. La semaine dernière, près d’un an après l’arrivée au pouvoir du Parti
libéral, le ministre des finances, M. Carlos Leitão, a présenté un budget équilibré, le premier en 6 ans, et le 7e des 40 dernières années. Chose promise, chose due. Si les trois principaux partis politiques québécois se sont engagés à équilibrer le budget dès cette année, c’est car il existe un consensus selon lequel la dette brute québécoise de 274 milliards de dollars, la plus lourde au Canada, doit être réduite. Pourquoi? Car cette dette devra un jour être payée. Par qui? Par nous, les jeunes. Nous payons d’ailleurs déjà 11 milliards de dollars en intérêts par an, soit près de 30 millions par jours. Une somme colossale qui n’est pas investie dans nos écoles, nos hôpitaux ou nos programmes sociaux. La réduction de la dette est donc d’abord et avant tout une question d’équité intergénérationnelle. Pour garantir la pérennité de nos services publics, le niveau d’endettement du Québec doit être réduit.
La réduction de la dette publique du Québec passe donc par la fin des déficits. Pour ce faire, l’État dispose de deux leviers: augmenter ses revenus à travers des hausses de taxes, d’impôts et de tarifs ou réduire ses dépenses. Pour le Parti libéral du Québec, et pour une très vaste majorité de Québécois, la province a atteint un plafonnement au niveau des revenus, les contribuables québécois étant aujourd’hui les plus imposés en Amérique du Nord. L’atteinte du déficit zéro ne peut donc pas passer par une augmentation du fardeau fiscal des Québécois, c’est plutôt à l’État de faire le ménage dans sa propre cour. Entre 2003 et 2014, la moyenne d’augmentation des dépenses de l’État était de 4,5% par an. Un rythme insoutenable sachant que la moyenne de la croissance économique du Québec durant cette même période n’était que de 2%. Le gouvernement libéral a donc pris la décision, non pas comme le prétendent certains,
de «réduire les dépenses», mais plutôt de réduire la croissance des dépenses. En d’autres mots, les dépenses du Québec continuent à grandir, mais moins rapidement qu’avant. Qualifier les gestes posés par le gouvernement de «mesures d’austérité» relève donc de l’inconscience ou de la malhonnêteté intellectuelle. Je m’adresse donc ici à tous ces jeunes qui ont des craintes
sincères et légitimes de voir disparaître certains acquis de notre société. Sachez que le gouvernement ne vous a pas laissé tomber. Bien au contraire. Les mesures de rigueurs mises en place depuis un an ont comme objectif ultime de vous léguer, de NOUS léguer, un Québec débarrassé de sa dette, un Québec dans lequel nous serons maîtres de notre destin. x
LUCE ENGÉRANT
Opinion
Nous venons en protecteurs La peur du terrorisme pave la route à Big Brother. Chloé Anastassiadis
Le Délit
A
u lendemain du crash de l’A320 de Germanwings, «l’hypothèse terroriste», bien que non privilégiée par les experts, a très vite trouvé un grand support sur Internet. Même maintenant que l’enquête pointe du doigt la piste du suicide, l’adjectif «terroriste» continue d’être utilisé par beaucoup pour parler du copilote dépressif. Celui-ci, dans le cas où les soupçons des enquêteurs seraient avérés, est effectivement un meurtrier; son acte reste isolé cependant, sans aucune revendication particulière, et ne semble donc pas mériter l’appellation de «terroriste». Que son acte ait vocation d’instaurer un climat de terreur sans être lié à une organi-
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sation, est-ce suffisant pour parler de terrorisme? Du moins donne-t-il l’occasion de se pencher encore une fois sur la question et sur les mesures que les gouvernements prennent, se nourrissant de la crainte inspirée par les actes violents perpétrés contre la population. Tout attentat n’est pourtant pas terroriste. Durant les dix dernières années, de nombreux gouvernements se sont targués de défendre la sécurité nationale en s’arrogeant de nouveaux droits. C’est ce qui justifie le projet de loi C-51 sur les pouvoirs d’enquête au 21e siècle. Si dans ses principes il peut sembler approprié, dans l’application le texte est trop vague pour permettre le contrôle de l’exécutif et de ses agences fédérales. Il peut paraître raisonnable que le Service canadien du renseignement
matilda nottage
société
de sécurité (SCRS) ait le droit d’enfreindre certaines lois dans le cadre de la lutte antiterroriste. Qu’il puisse le faire avec le simple accord d’un juge et sans qu’aucune commission parlementaire ne puisse surveiller les faits et gestes de ses agents est simplement une aberration. Une aberration que les Québécois semblent pourtant accepter à présent, malgré leur opposition initiale à des projets de loi donnant trop de pouvoir aux agences fédérales. Pourquoi? Outre les attentats ayant visé le Canada, les attentats de Paris ont eu un grand impact émotionnel au Québec, où beaucoup de citoyens sont sensibles aux malheurs des «cousins français». Ce qui expliquerait que 74% des Québécois interrogés entre le 2 et le 5 février 2015 sont d’accord avec ce projet de loi. Le sondage a été réalisé auprès du grand public dans l’ensemble des régions du Québec pour Le Devoir et publié le 7 février. Le fait qu’une majorité de citoyens acceptent le projet C-51 ne le rend pas plus légitime cependant. Il n’est fondé ni dans le droit, ni dans l’équité, ni dans la justice – principes de base de la légitimité selon le Larousse. C’est d’ailleurs ce que la chef du Parti vert, selon le Journal de Québec, remet en cause. Le parti
propose 60 amendements au projet de loi, dont «le retrait du mot “légitime” de la section “bizarre et obscure” de l’article de C-51 portant sur les manifestations et l’expression artistique». En opposition avec les principes de la Charte canadienne des droits et libertés, la loi sur les pouvoirs d’enquête est aussi un moyen légal facile pour stigmatiser certaines initiatives citoyennes plus que d’autres, notamment celles des dits «éco-terroristes»; il n’y a donc pas de principe d’équité qui vaille. Quant à la justice, elle se base sur les deux premiers principes; la loi C-51 est donc une loi injuste. Donner plus de pouvoirs à l’exécutif n’est pas la voie à suivre; celui-ci dispose déjà de nombreux moyens, tels la loi C-36, et savoir s’appuyer sur ces outils pourrait déjà éviter des bavures comme l’affaire Maher Arar. Le Canada n’est pas le seul pays où le terrorisme justifie, selon certains, l’augmentation des pouvoirs «spéciaux» de l’État. Au Japon, le gouvernement Abe tente actuellement d’imposer un projet de loi sur le secret d’État, malgré l’opposition grandissante des citoyens japonais. Afin de «préserver la sécurité nationale», l’exécutif aurait le droit de faire taire les voix trop dérangeantes.
Que font les citoyens? Assez peu de choses en règle générale. D’où le mérite de ceux qui luttent. La SASPL (Students Against Secret Protection Law) organise, à l’aide de slogans dans un anglais douteux et de manifestations pacifiques, la résistance. Un mouvement jeune, relativement peu populaire dans une société japonaise en mode «pilote automatique» selon les mots mêmes d’un de ses membres, Aki Okuda; mais malgré les moins de 4000 «J’aime» sur leur page Facebook, nos confrères japonais continuent de manifester, quitte à ce qu’on leur dise de «retourner étudier sagement». «Retournez étudier.» Voilà l’éternel refrain adressé à tout étudiant qui tente de se faire entendre, quel que soit le motif de sa protestation, au Canada comme au Japon. Pourtant, il s’agit bien de notre avenir, et il est donc légitime que les étudiants aient voix au chapitre. Si nous voulons un État qui respecte sa propre Constitution, il faudra bien que nous fassions valoir nos droits nous-mêmes. Remettre la menace terroriste à sa juste place est le premier pas. Étudier oui, mais l’esprit critique que l’on aiguise à l’université doit bien servir aux citoyens que nous sommes. x
le délit · mardi 31 mars 2015 · delitfrancais.com
Culture
exposition
articlesculture@delitfrancais.com
Le sexe des femmes
LOVE ME, Love My Doll remet en question les mythes de la féminité fantasmée. éléonore nouel
amandine hamon
Le Délit
L
es chercheuses féministes ont observé une sexualisation de la culture (Gill, 2007), typique du post-féminisme depuis les années 1990. L’exposition LOVE ME, Love My Doll exploite et dénonce cette standardisation des comportements et la création sociale du mythe d’une féminité fantasmée, définie par le plaisir de consommation. La Centrale, centre féministe fondé en 1974, expose la série de peintures de la jeune artiste Gabrielle Lajoie-Bergeron jusqu’au 10 avril. Volontairement provocantes, les peintures de l’artiste interrogent la mince frontière entre la jeune fille et la femme, entre sujet et objet sexuel. Le titre de l’exposition est aussi le titre d’un documentaire de Nick Holt diffusé par la BBC en 2007 qui raconte les histoires d’hommes qui tombent amoureux de poupées de taille humaine. Dans une vidéo mise à disposition des visiteurs de l’exposition, l’artiste explique qu’après avoir vu ce documentaire, elle a souhaité réagir et exprimer la dualité qui existe entre l’épanouissement sexuel par lequel passe une jeune fille et l’objectification ou la domination sexuelle qu’une
femme subit, que ce soit dans sa représentation médiatique ou dans la réalité. La série LOVE ME, Love My Doll propose une représentation surprenante et déconcertante de jeunes filles entre l’innocence et la provocation. Cette image du corps féminin est soumise au regard du visiteur, qui perçoit une étroite limite entre l’objectification de la femme et la liberté de la jeune fille. La femme-objet est peinte comme une poupée prête à l’emploi tandis que la jeune fille épanouie main-
tient un regard perçant et défiant qui assure une indépendance et qui rend à la femme le contrôle de son corps. La dualité entre la domination et la liberté, l’innocence et l’objectification sexuelle, est flagrante dans la peinture d’une jeune fille blonde vêtue d’un juste-au-corps de gymnaste rose et blanc, à cheval sur un chevalet. Son corps est dévoué à la gymnastique, ce qui lui donne un air innocent et libre. Pourtant, la bouche de la jeune fille est peinte toute ronde, grande ouverte et vide, rappelant
la bouche des poupées gonflables et donc l’objectification sexuelle. Comme un symbole de la sexualité féminine, un fruit peint quelques centimètres sous l’entre-jambe de la jeune fille vient rappeler la position sexuée de celle-ci. Sur le mur d’en face on voit une femme, assise sur le sol, les yeux noirs, vides, l’air inerte et la bouche grande ouverte. C’est une poupée posée, dans une chambre, par son propriétaire. Sur le tableau suivant, une femme brune se tient debout, une cigarette à la main, les
seins à l’air et le regard droit. Elle contrôle sa sexualité et semble défier quiconque oserait remettre son pouvoir en question. Plus perturbant, un tableau plus petit représente le sexe féminin et les jambes d’une femme dont on ignore si elle est de chair ou de plastique. Le tableau métonymique n’indique que son sexe, et met en avant la réduction de la femme à son organe génital. Cette peinture, à la différence de L’origine du monde, célèbre tableau de Gustave Courbet (1866), ne représente pas le consentement mais plutôt la domination, car le sujet est représenté de dos. C’est une idée provocante que la peintre a souhaité exposer. Elle dérange. Elle fait remarquer que l’on est habitué à une sexualisation de la culture qui chevauche cette limite très fine entre les différentes fonctions du corps féminin. Pour fil conducteur, l’exposition pose la question de la domination. Qui domine le corps de cette jeune fille? Qui domine sa sexualité? La réponse se trouve dans les yeux, la bouche, les symboles et autres indicateurs subtilement placés par l’artiste à l’intérieur de chaque tableau. La femme est-elle une poupée, une jeune fille ou simplement une femme épanouie et maîtresse de sa propre sexualité? x
cinéma
Les artistes de la place Tahrir
Le FIFA présente Art War, un documentaire sur l’art de rue d’une Égypte secouée. céline fabre
Le Délit
«L
e jour où vous cesserez de vous battre, je serai vraiment mort.» Voilà ce qu’on peut lire sur les murs d’une rue du Caire, un message qui se mêle aux portraits de victimes des heurts d’un des matchs de football les plus meurtriers de l’histoire, le 2 février 2012. Un hommage en peinture, une façon pour les survivants de répondre au brouillard politique qui couvre la ville égyptienne depuis janvier 2011 et les premières révoltes contre le président Hosni Moubarak. En plus d’avoir été le premier soulèvement de masse après trente ans de régime autoritaire, ce mouvement marque le retour de formes d’art que les outils de propagande de l’ère Moubarak asphyxiaient. Aujourd’hui, la programmation du Festival international du film sur l’art propose au public montréalais de découvrir des
témoignages capturés par le cinéaste allemand Marco Wilms dans son film Art War. De juin 2011 à juillet 2013, alors que les violences et confrontations entre policiers et manifestants battaient de leur plein, Wilms est allé à la rencontre de jeunes révolutionnaires et artistes égyptiens. Caméra sur l’épaule, son approche directe et intimiste rend plus authentiques les espoirs et désillusions qui composent cette période, que le terme de «printemps arabe» englobe de façon trop vague. Au cours des 53 minutes du film, on suit le quotidien de Hamed, Ramy, Ganzeer, Ammar et Bosaina, des poètes, peintres ou musiciens dont les portraits, entrecoupés de repères historiques, nous permettent de situer les étapes de la chute du régime de Moubarak et du chaos qui s’en est suivi. La nuit, le graffeur Ganzeer profite des moments de calme pour organiser une «contre-propagande», et reproduire des affiches d’avis de
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recherche aux policiers qui détournent le sens de ceux qui étaient destinés aux ennemis du Conseil suprême des forces armées, au pouvoir depuis le départ du président Moubarak. Il voit aussi le graffiti comme une façon d’accompagner la révolution, au moyen de messages d’encouragements comme «Oubliez le passé, souciez-vous seulement des élections». Devant la caméra
de Wilms, il confie qu’il cherche seulement à exprimer ses opinions de façon pacifique et ne devrait être ni condamné ni applaudi pour son art. Le chanteur Ramy, lui, n’a pas besoin de se cacher et donne des concerts en pleine journée, au milieu de la foule. À travers des chansons comme Laugh with the Revolution, il rassemble et encourage les manifestants dans une am-
Heldenfilm
biance qui donne à la place Tahrir des airs de festival d’été. C’est donc par une réelle mosaïque créative que les artistes du Caire résistent et soutiennent leurs idéaux de liberté. Pour le peintre Ammar, ce climat d’art populaire ne sort pas de nulle part et puise son inspiration dans le langage artistique de l’Égypte ancienne. Pour le prouver, il nous emmène à Louxor, sa ville natale située au milieu du désert et dont les fresques murales l’émerveillent toujours autant. Avec un air pensif, il se demande: «Où est-ce que ces personnes ont trouvé la force de créer d’aussi belles peintures?» Avec une finesse et un entrain qui séduisent, Art War remet les choses en perspective. Comme ceux qui, au cœur du désordre, ont su prendre de la distance, les images de Marco Wilms nous donnent envie de nous projeter et de regarder toujours un petit peu au-delà de ce qui nous pend au nez. x
CULTURE
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entrevue
En pair Le Délit a rencontré Laurence Lafond-Beaulne le pigeon
M
ilk & Bone est un groupe de musique alternative formé de Camille Poliquin et de Laurence Lafond-Beaulne. La formation montréalaise lançait son premier album Little Mourning le 17 mars dernier et les semaines qui ont suivi ont donc été un tourbillon de publicité et de critiques enthousiastes pour les harmonies et mélodies envoûtantes des deux jeunes artistes. Le Délit a eu l’occasion de discuter par téléphone avec la moitié du talentueux duo, Laurence Lafond-Beaulne, qui a répondu avec chaleur et un enthousiasme palpable aux questions posées au sujet du projet déjà très bien lancé qu’est Milk & Bone.
Le Délit (LD): Pouvez-vous raconter comment votre band est formé? Laurence Lafond-Beaulne (LLB): C’est formé de Camille Poliquin et moi, Laurence Lafond-Beaulne. En spectacle, c’est seulement nous deux avec nos claviers. Pour l’album, on a travaillé avec Gabriel Gagnon, notre réalisateur. Il a beaucoup aidé à trouver une direction au projet et aussi au son. On a vraiment travaillé les trois en studio pour ce qui est de l’album.
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Culture
LD: Comment est-ce que vous êtes arrivées à ce son, assez particulier? LLB: Au départ toutes nos chansons sont piano-voix, ou ukulélé-voix. Nos influences à Camille et moi sont sensiblement les mêmes, donc ça a pas été trop difficile de savoir où on voulait s’en aller avec ça. Deux choses qui étaient claires pour nous c’était qu’il fallait que les voix soient pas mal à l’avant parce que notre instrument principal aux deux, c’est la voix. C’est ce qu’on maîtrise le mieux et ce avec quoi on a le plus travaillé, donc on savait qu’on voulait utiliser énormément les vocales, comme mélodies
«Notre instrument principal, c’est la voix.» et comme lead. On savait aussi qu’on aimait vraiment beaucoup les synthétiseurs, toutes les couleurs que donnent les sons des synthétiseurs, en ajoutant nos voix et quelques fois des éléments acoustiques. C’était assez évident où on s’en allait avec ça en fait.
LD: Quelle formation musicale est-ce que vous avez eu respectivement avant de commencer le band? LLB: Les deux on a beaucoup étudié en musique. Camille a étudié le piano classique dès un très jeune âge, et elle a aussi étudié le violoncelle à l’école primaire. Ensuite elle a fait une audition pour le Cirque du Soleil pour faire le rôle principal de la petite fille dans Quidam et elle a été choisie. Elle a fait la tournée à 12 ans, donc des spectacles à chaque soir, elle a beaucoup voyagé avec ça, ça lui a donné pas mal d’expérience. Ensuite elle est allée au cégep St-Laurent où les deux on s’est rencontrées. Les deux, on était en chant, mais elle avait fait le profil composition, donc elle arrangeait pour des bands et des orchestres. Pour ce qui est de moi, j’ai plus commencé au secondaire, à Joseph-FrançoisPerrault, je faisais du trombone classique, assez sérieusement, je travaillais comme une folle et j’étais très impliquée. J’étais surtout dans le classique et rendue au cégep j’ai décidé que j’étais un peu tannée; je suis allée en jazz pour voir ce que c’était, parce que ça m’intriguait et j’avais envie d’essayer autre
chose. Pis après une session j’ai décidé que j’étais tannée du trombone (rire) et j’ai fini ma technique en interprétation chant-jazz à St-Laurent. C’est là que j’ai commencé à jouer de la basse électrique aussi. À partir du cégep j’ai commencé à jouer dans des bands, avec David Giguère où Camille était aussi, elle était choriste et moi je jouais de la basse; c’est là qu’on s’est vraiment rencontrées. J’ai aussi joué avec Fanny Bloom. Je suis rentrée à l’université un an en chant jazz et interprétation, pis j’ai lâché parce que je commençais à avoir trop de spectacles. LD: Quelle est la chose la plus intéressante que vous avez apprise en accompagnant d’autres artistes? LLB: La première chose je pense, c’est que la job d’une bonne choriste c’est de réussir à se mouler à la voix du chanteur principal et je pense aussi que c’est une des raisons pourquoi on a de la facilité à chanter ensemble; c’est qu’on sait comment se coller à la voix d’une autre personne. Pis on est chanceuses parce que nos timbres vont naturellement bien ensemble. L’expérience de tournée
aussi c’est quelque chose d’assez important, d’avoir voyagé beaucoup, on sait à quoi s’attendre. Ça nous fait pas peur de penser qu’on sera pas souvent à la maison, qu’on va vivre dans nos valises. C’est sûr que c’est un plus.
«On s’équilibre vraiment bien.» LD: Votre vidéo pour New York est vraiment magnifique et c’est même un «vimeo staff pick». Comment s’est passée la réalisation de la vidéo? C’était quoi le concept? Qui était votre directeur? LLB: On a travaillé avec Mégane Voghell, c’est la réalisatrice, et en fait c’est ma meilleure amie du secondaire. C’était pas mal son premier vidéoclip. C’est tout son concept à elle, elle voyait notre esthétique, où on voulait s’en aller et c’est vraiment ses idées à elle. On lui a donné carte blanche, et quand elle est allée avec ses idées à elle on était tellement contentes. On a tourné ça en studio, avec une petite équipe, pas beaucoup de budget pis finalement ça a donné un clip assez merveilleux, on est vraiment, vraiment contentes du résultat.
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et en os du groupe montréalais Milk & Bone. LD: Comment êtes-vous venues à chanter en anglais? LLB: Ça pas été tant un choix que davantage une évidence. Quand on a commencé à chanter ensemble, c’est venu naturellement en anglais. Nos influences, du plus loin qu’on se souvienne, toute la musique qu’on écoutait quand on était jeunes était en anglais. J’ai grandi dans un quartier anglophone donc j’entendais autant d’anglais que de français quand j’étais petite. Camille a habité deux ans en Australie, les deux on a un bon anglais. On a déjà écrit en français mais les chansons sonnent vraiment pas pareil.
«C’est vraiment un honneur de jouer à Osheaga.» LD: Est-ce qu’on va vous entendre en français un jour? LLB: Pas pour ce projet-là, je pense pas. Mais on est ouvertes à plein de projets, on accompagne plein d’artistes francophones, et on écoute beaucoup de musique d’ici. LD: Votre lancement au centre Phi était vraiment bondé, est-ce que vous vous attendiez à tant de monde? Quelle a été votre réaction?
LLB: On avait vu sur les réseaux sociaux qu’il y avait beaucoup de gens qui étaient «attending» mais en même temps des fois… tu sais jamais
partie cinéma, mais moi évidemment j’ai plus erré dans la scène musicale. C’est cool parce que tu te promènes dans les rues et tous les bars sont transformés
«Chanter en anglais a été une évidence.» ce que ça veut dire. On s’attendait à, oui, que nos amis soient là, et quelques personnes qu’on connaissait pas, mais je pense pas qu’on s’attendait à une aussi grande réponse. Il y avait une file incroyable dehors, les gens étaient de bonne humeur. C’était magique en fait, on retombe doucement de cette soirée-là… LD: Vous avez récemment joué au festival à South by South West (SXSW)? Comment a été votre expérience? À quoi ressemble l’ambiance du festival? LLB: C’était malade! En fait SXSW, c’est un show de showcases comme on appelle, comme Rideau par exemple. C’est des mini-spectacles de trente minutes. Tu vas là-bas, pis y’a des gens de la business qui sont là qui viennent pour essayer de recruter des nouveaux talents. Mais y’a aussi des gens qui achètent leur passe, un peu comme à Osheaga, donc il y a des plus gros spectacles, et des gens qui viennent juste découvrir de la musique. Donc c’est un festival de mélomanes. Y’a aussi une
en salles de spectacle pour le festival, tout le monde marche dans la rue, tout le monde a un instrument de musique avec lui. C’est vraiment spécial comme ambiance, mais c’est tripant. On a rencontré plein de gens. Moi je pense vraiment que c’est un festival que tu dois vivre au moins une fois dans ta vie quand tu trippes sur la musique. LD: Êtes-vous excitées à l’idée de jouer à Osheaga? LLB: On est vraiment, vraiment excitées pour Osheaga! On croisait fort les doigts pour être invitées cette année. On a hâte et on a envie de monter des nouveaux arrangements pis peutêtre une nouvelle chanson pour le festival, quelque chose d’un peu plus exclusif. Juste de faire partie de cette programmationlà c’est vraiment un honneur, on est vraiment contentes! LD: À quoi va ressembler votre spectacle à cette occasion? LLB: Le spectacle c’est vraiment juste nous deux. Ce qu’on a fait en studio avec Gabriel c’est
pas mal des trucs qu’on est capables de recréer nous-mêmes. Donc oui on veut garder le spectacle à deux, parce qu’il fonctionne bien comme ça à date, donc ça va être pas mal la même formation, mais peut-être qu’on va travailler ça un peu, pour rendre le son plus «festival». LD: Est-ce qu’il y a un artiste que, personnellement, vous avez plus hâte de voir chanter au festival? LLB: Oui! Moi j’ai vraiment, vraiment hâte de voir jouer Kendrick Lamar. Je suis vraiment, vraiment fan de Kendrick, je suis un peu énervée de pouvoir le voir! Je pense pour Camille qu’il y a Father John Misty qui vient. Je sais qu’elle trippe beaucoup pour lui. LD: Des deux filles, qui joue quel rôle dans le band? Êtes-vous très différentes ou est-ce que vous vous ressemblez? LLB: On est vraiment à l’opposé l’une de l’autre et je pense que c’est une bonne chose en fait. Dans la vie on est des meilleures amies déjà, et dans le band on a pris nos rôles assez naturellement. Camille est peutêtre meilleure sur le côté business, le côté des réseaux sociaux, des images, pour calculer toutes ces choses-là. Alors que moi j’ai peut-être le côté un peu plus hu-
main, pour aller parler aux gens, établir des contacts, c’est plus dans mes facilités à moi. Pour ce qui est de la création, on travaille vraiment à deux là-dessus, on a chacune nos forces mais y’a personne qu’est vraiment poche dans quelque chose et l’autre qui est vraiment bonne. Je pense qu’on s’équilibre vraiment bien en studio, et dans nos idées et quand on compose ensemble. LD: Quelle est la chose dont vous parlez le plus ensemble à part de la musique? LLB: Hum… Je suis obligée de dire les garçons (rire), comme tout le monde! On parle de tout, tout, tout Camille et moi, on s’appelle pour n’importe quoi. C’est sûr qu’on parle beaucoup du projet parce que là on baigne là-dedans, ça va bien et tout. Mais on prend beaucoup de temps aussi pour nous… On se dit souvent qu’on est comme un vieux couple, il faut qu’on se fasse des dates pour pas parler du projet et se parler de nos vies. x
Virginie daigle Le Délit
Électro pop
Little Mourning Milk & Bone Bonsound
mégane voghell
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Culture
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événement
Lis-moi ta thèse
Première édition à la fois modeste et respectable d’un colloque étudiant au DLLF. JULIEN BEAUPRÉ
Le Délit
C
’est dans la prestigieuse salle Arts 160 que se tenait vendredi dernier, 27 mars, la toute première édition d’un colloque dédié aux étudiants de premier cycle organisé par l’Association générale des étudiants de langue et littérature françaises (AGELF). Cette rencontre amicale, qui s’est étendue de midi à cinq heures, était une opportunité pour six étudiants de dernière année de spécialisation en langue et littérature françaises de présenter leur projet final devant collègues et professeurs. Dans leur discours inaugural, les trois principaux organisateurs, Marianne Godard, Frédéric Doré et Ghislaine Le Moing, ont exprimé leur volonté de créer un «espace d’échange pour les étudiants» qui soit différent de celui qu’offrent les cours. C’était aussi un espace de reconnaissance pour ces étudiants qui travaillent depuis le début de l’année à leur travail de recherche respectif. Les présentations étaient organisées de manière chronologique selon la datation des corpus à l’étude. Ce fut donc Michaël Blais qui a ouvert brillamment le bal avec son exposé intitulé Le vêtement et le nu dans les Essais de Montaigne: coïncidence entre le vêtir et le dire, qui met en relation la pureté du langage et celle du corps nu. Suite à quoi Julyen Renaud a pris le relais avec son travail qui portait sur l’œuvre, malheureusement oubliée, de Guez de Balzac dans une grande entreprise de démystification et de définition des concepts d’honnêteté, d’atticisme et d’urbanité.
En troisième, c’est Joseph Boju, d’ailleurs rédacteur en chef du Délit, qui a accaparé l’attention avec son exposé sur les Odes funambulesques du poète Théodore de Banville, dans une optique d’analyse à la fois politique, journalistique et transhistorique. En quatrième, Baptiste Rinner, qu’on connaît au Délit pour son amour de Proust, s’est chargé de
universitaire d’Albert Camus, La postérité du Soleil, qui mêle photographie et fragments, pour réconcilier l’homme et le monde. Il s’agissait, et ce pour tous les présentateurs, d’une première exposition officielle de leurs travaux à un public critique. Bien que la date de remise et le professeur associé pouvaient varier d’une présentation
de certains participants, qui présentaient pour la première fois quelque chose de cette envergure, dans la difficulté éprouvée par certains à respecter la contrainte de temps (soit trente minutes de présentation et trente minutes de questions), mais surtout dans l’inachèvement de plusieurs travaux, qui pourtant n’endigua pas leur pertinence.
à l’autre, aucun d’entre eux n’avait vu son travail révisé de manière finale par une autorité professorale. Cette réalité, que le comité colloque avait en tête, s’explique surtout par le fait que la fin de session laisse peu de place à ce genre d’événement. Dure à gérer, cette contrainte aura majoritairement paru dans le stress
L’idée d’organiser un colloque a séduit. D’abord, pour Jeanne Simoneau, étudiante en première année de spécialisation, ces présentations lui auront surtout permis d’éclaircir l’idée générale du travail de fin de baccalauréat, puisqu’elle le sait inévitable en fin de cycle. Pour Michaël Blais, panéliste, c’était
GWENN DUVAL
séparer ledit auteur du narrateur de À la recherche du temps perdu afin d’analyser les scènes d’inversion qui pourraient constituer une partie de la vérité cherchée et trouvée dans le roman. Finalement, Thomas Birzan, un ancien du Délit, s’est investi dans une œuvre quasiment inconnue et délaissée par la critique
l’occasion d’entrevoir enfin le travail personnel de ses camarades qu’il côtoie depuis maintenant trois ans. «On n’a pas souvent la chance d’entendre et de lire ce que nos camarades font. Ce genre d’exercice ne peut être que pertinent.» Dans une optique d’encouragement, l’étudiant a mentionné son intérêt à ce que cet événement se poursuive à l’avenir et devienne une tradition à McGill. Selon l’un des organisateurs, Frédérique Doré, cette initiative est partie d’un intérêt pour imiter un événement qui existe au Département de langue anglaise de McGill et au Département de littératures de langue française à l’Université de Montréal: «On a eu le culot de le faire.» Toujours selon lui, l’optique de l’événement était totalement conviviale: «L’université n’est pas une industrie intellectuelle, c’est un espace d’échange. C’est cela qu’on a cherché à créer: prendre la facette productive reliée aux études universitaires et la rendre dans un contexte non-performatif.» Dans un autre ordre d’idée, et à l’image du journal Le Délit et de la revue Lieu Commun qui mobilisent plusieurs étudiants du département, ce colloque se veut une institution tentaculaire de l’association étudiante au niveau académique. Avide de commentaires constructifs, l’équipe souhaite également que cette initiative se reproduise dans le futur afin de «donner ses lettres de noblesse à l’AGELF». Somme toute, la journée peut se vanter d’un succès modeste qu’il tiendra aux futurs membres de l’AGELF de poursuivre et d’incruster dans la tradition mcgilloise. x
chronique
Ultime bafouille
Gwenn Duval | Petit cours d’écriture à l’usage de tous.
V
oici venu le temps de conjuguer le bonjour avec l’au revoir. Au carillon quelconque de mon intelli-téléphone-réveil j’ai compris, ce matin, que l’heure avait sonné. Je n’aime pas conclure, et ce serait mentir effrontément que de
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Culture
le faire. Au revoir le dit bien, j’aurais dit à jamais si j’avais voulu dire à jamais. Je vous annonce ici que je ne disparais pas à jamais. Mais que cela peut-il bien vous faire? Quand bien même je disparaîtrais, je serais toujours là, encrée treize fois dans les pages du Délit. Non, je ne disparais pas, je me déplace, oui comme les mots sur leurs pages, je suis amovible. Je vais voguer ailleurs, m’exercer comme dirait l’autre, à ma fantasque escrime et regarder ma lame dans le déroulement infini de mes gammes. Le Délit est commis, l’intention y était. Et j’y aurais appris, non sans épancher ma soif d’écrire à la sueur de mon propre front, que la direction vers laquelle regarder, seule l’expérience complexe de l’altérité a la force de la distinguer d’un point fixe. Le point fixe est une tâche.
Ceci n’est pas un carré blanc sur un fond blanc. Ceci est un front blanc sur une carte blanche. La tâche se dessine, j’ai perdu ma gomme. Je vous laisse, lecteurs, fidèles lecteurs, à votre volonté. Et je laisse entre vos mains la tâche de suivre encore le cours de tous ces usages sujets à caution. Et je laisse entre vos pensées la tâche de suie qui court encore sur les jeans des enfants pas sages, mais attention. Attention de vous perdre. Attention de ne jamais croire que vous vous êtes trouvés. Attention de ne jamais croire que vous avez raison. Attention de ne jamais croire savoir. Attention de toujours changer la phrase en question avant de l’étaler comme du beurre sur une tartine. Attention de ne pas toujours chercher à comprendre, attention
de toujours chercher à entendre. Attention au mot persuadé, dit trop vite on entend: perd (perdre), sua (suer), dés (un coup de). À ton attention, lecteur, je porte cette considération: Loin de moi était l’idée de prétendre à quelque érudition littéraire. Loin de moi reste-t-elle. Érudition, dit-on, dis donc, la reine Dinon qui dîna, vous savez, de ces dodus dindons. Oui, voici toute mon érudition lecteur — des sons, des phonèmes, des mots dans ma bouche qui se bousculent pour s’articuler alors qu’ils respiraient l’air frais de la pensée, les voici qui s’embouteillent soudain dans des petits pots de beurres — puis se dépetipodebeurrisent. Et tous ces verbes que l’on plie, et les lettres, ces plis, tous ces épis que l’on cueille dans les écueils
que trois gros raz-de-marée gris auraient pris pour des souris si le temps le leur avait permis. Y a-t-il quelqu’un qui ait mal aux maxillaires? Près de moi est venue l’idée de prétendre à quelque rébellion littéraire. Près de moi reste-t-elle. Les phrases naissent en continuité, se succèdent et s’allient. Croyez-en mon expérience incertaine, certaines d’entre elles n’ont pas besoin de leur contexte. Aussi, lorsqu’après vous avoir fait avaler environ 6500 mots de délire hebdomadaire, je vous demande de faire preuve de bienveillance à mon égard, c’est que je compte sur votre écoute pour saisir, sans vous offusquer, le sens de cette dernière phrase que je soumets à votre bon vouloir référentiel: c’est en frondant que l’on fonde Les Frondeurs. x
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cinéma
Mystérieuse Amina
Le Profil Amina révèle les travers d’un monde digital pendant le conflit syrien. anaïs rossano
Le Délit
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out commence en 2011, lorsque, sous l’influence du Printemps Arabe engagé par les pays du Maghreb, les Syriens commencent à manifester dans le but de faire basculer le sort du pays resté sous l’emprise autoritaire de la famille Assad depuis deux générations. Le Profil Amina, présenté en première mondiale au festival du film de Sundance et en première canadienne au Rendez-vous du cinéma québécois, raconte l’histoire d’Amina Arraf, jeune révolutionnaire américano-syrienne qui entretient une relation érotique en ligne avec Sandra Bagaria, une jeune française installée à Montréal. Leur correspondance devient quotidienne, et les deux femmes se confient de plus en plus sur leurs sentiments partagés l’une envers l’autre. Un jour, Amina décide de créer le blog «A Gay Girl in Damascus» [Une fille gaie à Damas, ndlr.], dans lequel elle partage sa vie sous le régime autoritaire installé en Syrie. Elle révèle la violence infligée à la population, les intimidations lancées à
sa famille et dévoile son activisme poussé par le désir de voir un jour son pays devenir libre. Sandra suit de près son blog, et l’encourage dans sa révolte contre le gouvernement. Mais un jour, Amina se fait kidnapper en plein centre de Damas par la police secrète syrienne. Les journaux s’emparent vite de l’histoire et révèlent au grand jour le blog de la jeune activiste. Bientôt, Amina se voit projetée en tant que figure de la
révolution syrienne et une grande mobilisation internationale voit le jour pour la faire libérer et lui éviter la torture, voire le viol et même la mort. Des appels à témoins apparaissent pour essayer de contacter sa famille ou proches. Or, au fil des recherches, un doute apparaît: qui est donc réellement Amina? C’est à ce moment-là que l’histoire bascule: Amina se révèle être un canular, une imposture, une
tromperie. Amina n’est pas une jeune femme lesbienne syrienne mais bien un américain quadragénaire hétérosexuel et marié. Le Profil Amina; réalisé par Sophie Deraspe, est conduit tel un polar impliquant les services secrets américains, les plus grands médias du monde, et une foule d’activistes et de blogueurs sympathisants des révolutions arabes. Le documentaire prend place aux quatre coins du monde,
de San Francisco à Tel-Aviv, en passant par Washington, Istanbul et Beyrouth, renforçant d’autant plus la notoriété internationale qu’avait apportée le blog d’Amina. Le documentaire délaisse alors la révolution syrienne pour s’attarder sur l’influence et le pouvoir – malsain - que peut avoir le monde d’Internet. Sandra peinera à s’en remettre. Elle fait face à Thomas MacMaster, l’homme qui l’a manipulée pendant plusieurs mois sous l’apparence d’Amina. À ces entrevues poignantes viennent s’ajouter une reconstitution sobre de l’histoire ainsi que plusieurs archives visuelles de la révolution syrienne. Le fil conducteur est mené par les messages échangés entre Sandra et Amina et viendra renforcer le désir pervers de l’imposteur sous les traits de la jeune syrienne. Abordant l’émancipation sexuelle, les relations virtuelles, le conflit syrien et le pouvoir médiatique, Le Profil Amina a le mérite de combiner des thèmes actuels importants sans perdre son spectateur au fil des scènes. Le documentaire lève le voile sur une ère digitale aux effets pervers et destructeurs pour son entourage et le monde entier. x
faisant notamment référence à la hausse de la taxe sur l’acier importé imposée par George W. Bush en 2004. Métamorphologie raconte l’histoire de l’art du XXe siècle, mais plus généralement celle des courant géopolitiques et socioéconomiques structurant le discours
de l’art. L’exposition retrace l’histoire archéologique et anthropologique de ces matériaux transformés par l’homme dans son processus capitaliste d’exploitation. Réflexion sur le commerce mondial, Métamorphologie rappelle que l’art, c’est aussi une histoire de matériaux et d’argent. x
esperamos films
exposition
L’art de transformer Le MAC expose les œuvres de Simon Starling. amandine hamon
Le Délit
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aut-il définir l’art comme une production esthétique ou technique, comme la recherche de beauté ou comme une construction méthodique? C’est avant tout le travail, le pouvoir de transformer et le charme poétique de la métamorphose que fait ressortir l’exposition Métamorphologie au Musée d’art contemporain de Montréal. Jusqu’au 10 mai 2015, le musée met à l’honneur les œuvres de Simon Starling, artiste anglais audacieux récompensé du prestigieux Prix Turner en 2005. L’artiste, né au Royaume-Uni en 1967, a étudié à la Glasgow School of Art, et vit désormais à Copenhague. Sous le commissariat de Dieter Roelstraete du Museum of Contemporary Art de Chicago, Métamorphologie expose les outils des économies de production, de reproduction et de circulation des ressources, de l’énergie, des images et de la matière, en représentant la pierre, le calcaire, le marbre, le platine, l’argent, l’acier et le bois, qui sont au cœur de la démarche de Simon Starling. Photographies,
sculptures, installations et images en mouvements sont présentées dans quatre salles successives afin de célébrer le travail de l’artiste, qui repose principalement sur la recherche et l’observation minutieuse de ce qui l’entoure. Il s’inspire de grandes figures de l’histoire de l’art du début du XXe siècle comme Henry Moore, Constantin Brâncuzi ou Marcel Duchamp, dont certaines œuvres sont aussi exposées. Pour commencer, sont proposées cinq photographies d’une mine de platine Sud-Africaine, œuvre intitulée Une Tonne II. L’intérêt des épreuves se trouve dans le contraste entre la légèreté de la surface riche en platine tirée à la main et la complexité de l’ingénierie dont l’œuvre résulte. Le contraste apparaît également entre l’échelle colossale de la mine et la structure chimique délicate du procédé de tirage photographique ancien. Il est surprenant de trouver de la poésie dans la représentation d’une mine, et c’est ce charme intrigant qui attire l’œil curieux du visiteur. L’exposition se poursuit avec une série de trentehuit diapositives couleur qui représentent l’activité de bricolage sur une barque en pleine mer. La série
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porte le titre compliqué d’Autoxylopyrocycloboros (2006), dérivé du mot grec ouroboros, désignant le mythique serpent de l’alchimie qui se mord la queue, et inspire un sentiment d’autodestruction que s’inflige sans fin une société d’humains bricoleurs. La salle maîtresse de l’exposition est composée d’installations et de sculptures surprenantes. Un projecteur montre le fonctionnement de la première calculatrice électromagnétique programmable, une voiture est suspendue sur un mur vertical, une sculpture représente un homme coupé en deux, puis il y a une photographie d’une roue de vélo déformée dans un atelier. Ce qui impressionne finalement dans cette immense salle, ce sont les matériaux bruts. Deux énormes blocs de marbre sont accrochés au plafond et pendent, immobiles. Plus loin, Bird In Space 2004, une plaque d’acier de deux tonnes produite en Roumanie est massivement posée contre un mur. Le réalisme frappant de ces œuvres rend compte des évolutions et des changements au niveau du transport des matériaux et des taxes à l’importation,
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À tous nos contributeurs, un grand merci!
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an Afif, Chloé Anastassiadis, Antoine, Astghik
Larcheveque, Claire Launey, Shayne Lavedière, Bianca
Aprahamian, Yulina Ashida, Olivier Assayas, Pablo-
Lavric, Josée Lecomte, Mathieu Lefèvre, Frédérique Lefort,
Vladimir de la Batut, Gabrielle Beaulieu, Julien
Alexandra Lelyuk, Nadia Lemieux, Blanche Lepage, John
Beaupré, Léa Bégis, Arnaud Bernadet, Laurence Bich-
London, Danielle Londono, Maria Magdalena Lotfi, Yannick
Carrière, Thomas Birzan, Camille Biscay, Émilie Blanchard,
Macdonald, Zoma Maduekwe, William Manning, Eva
Clément Bletton, Yves Boju, Lauren Boorman, Théo
Martane, Samy Meffre, Charlotte Mercille, Julien Mignot,
Bourgery, Félix Broede, Frédérick Brousseau-Gauthier,
Jeremy Mimnagh, Catherine Mounier-Desrochers, Matilda
Cabu, Jeremie Casavant-Dubois, Inès Chabant, Pierre
Nottage, Suzanne O’neil, David Ospina, Samuel Pagé-Plouffe,
Chablin, Frédéric Chais, Alexis de Chaunac, Hortense
Renata Pajchel, Hannah Palmer, Olivier Pasquier, Christophe
Chauvin, Gabriel Cholette, Thomas Cole Baron, Emma
Pele, Esther Perrin Tabarly, Vittorio Pessin, Alexandre
Combier, Arthur Corbel, Anne Cotte, Miruna Craciunescu,
Piché, Kary-Anne Poirier, Thomas de Pommereau, Lynn
Virginie Daigle, Julia Denis, Fred Dubé, Lisa ElNagar, Robert
Poulin, Anne Pouzargues, Romane Prigent, Sam Quigley,
Elswit, Sophie Enault de Cambra, Mahaut Engérant, Julia
Youssef Rahmani, Scarlett Remlinger, Léo Richard, Philippe
Faure, Jean-Louis Fernandez, John Foley, Chloé Francisco,
Robichaud, Amelia Rols, Zaliqa Rosli, Anaïs Rossano,
Mira Frischhut, Mathilde Fronsac, Pascal Gaudreault,
Djamila Saad, Saito, Yuna Saudemont, Alice Shen, Thomas
Pascal Gely, Lauriane Giroux, Georgia Gleason, Samy Graia,
Simonneau, Jan Simonson, Myra Sivaloganathan, Victor
Côme de Grandmaison, Danielle Green, Isabelle Grégoire,
Sokolovitch, Kharoll-ann Souffrant, Stéphane Stril, Jovan
Noémie Grenier, Marie-Claude Hamel, Amandine Hamon,
Stojanovic, Tanim Sujat, Victoria Svaikovsky, Miklos Szabo,
Vincent Harion, Honoré, Horatiu Ivan, Sandrine Jaumard,
Jessica Szarek, Tignous, Cécile Tissot, Victor Tricaud,
Prune K., Sandra Klement N’Guessan, Kamil Kouhen,
Arthur Van Havre, Théophile Vareille, Sananne Wartabetian,
Brigitte Lacombe, O. Lamarre, Julie Landreville, Camille
Wolinski, Amanda Zhou. x
Et bienvenue à la nouvelle équipe: Rédactrice en chef: Julia Denis
Chef de section Économie: Sami Meffre
Coordonnateur de la production: Baptiste Rinner
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Coordinatrice illustration: Luce Engérant
Chef de section Arts et culture: Céline Fabre
Coordinatrice web: Inès L. Dubois
Secrétaire de rédaction Arts et culture: Amandine Hamon Multimédia: vacant Chef de section Société: Esther Perrin Tabarly
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