Le Délit du 15 mars 2015.

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Publié par la société des publications du Daily, une association étudiante de l’Université McGill

Mardi 15 mars | Volume 105 Numéro 16

C’est mieux en chapeau que pour les samosas depuis 1977


Volume 105 Numéro 16

Éditorial

Le seul journal francophone de l’Université McGill

rec@delitfrancais.com

«Choisissez vos champions!» julia Denis

Le Délit

L

es élections des membres de l’équipe exécutive de l’AÉUM auront lieu du 16 au 18 mars. Entre ces quelques animaux politiques – dont nous reconnaissons l’engagement pour la communauté mcgilloise, le travail et les bonnes intentions – l’équipe du Délit est là, cher lecteur, pour te guider au moment d’affronter la page Internet de Elections SSMU. Les candidats et les débats sont présentés en p.4 et 5. Présidence de l’AÉUM: Oui pour Ben Ger Le Délit soutien Ben Ger. Ce dernier a beaucoup d’expérience à l’AÉUM, a déjà œuvré pour l’association et est un proche du président actuel, Kareem Ibrahim: il connait donc les défis et les enjeux du poste de président. Ben n’apportera peut-être pas un coup d’air frais dans l’institution mais il en connait les rouages et ses propositions sont concrètes. On note aussi sa volonté de développer une politique de formation et d’ouverture pour sensibiliser et engager les étudiants à la gouvernance étudiante dès leur première année. V.-p. aux Affaires universitaires: Oui pour Erin Sobat Ce fut un «Oui» unanime que le conseil de rédaction du Délit lança au nom de M. Sobat. Une grande expérience au sein de l’AÉUM, de nombreux contacts parmi les étudiants et un engagement exemplaire au sein du Sénat en tant que représentant de la Faculté des arts. Que demander de plus? Un bon programme? Erin Sobat l’offre aussi: son projet de mise en place d’une semaine de relâche au semestre d’automne est réaliste et

il nous a présenté un plan précis pour le développement de la francophonie à McGill. V.-p. aux Affaires externes: Oui pour David Aird Face au récurent Simakov dont la stratégie est encore de l’ordre de la farce (p.6), M. Aird se présente comme un meilleur choix. Le Délit est particulièrement sensible au fait que ce dernier soit bilingue et souhaite travailler en coopération avec les affaires francophones et autochtones. De plus, rejoindre l’Association pour la voix étudiante au Québec (AVEC) permettra de mieux intégrer McGill au sein du réseau québécois. V.-p. aux Affaires internes: Oui avec hésitations et réserve pour Daniel Lawrie M. Lawrie propose des politiques réalistes pour améliorer la communication entre l’AÉUM et l’ensemble des étudiants et réformer la publication très coûteuse du Year Book. Cependant, son manque d’expérience tant au sein de l’AÉUM que d’autres associations représentatives facultaires est une véritable préoccupation. De plus, l’équipe du Délit était très divisée quant à son souhait de dépolitiser l’AÉUM. V.-p. aux Opérations: Oui pour Sacha Lefebvre Bien que M. Lefebvre ait parfaitement joué le rôle d’un candidat pour représenter le corps étudiant bilingue en proposant un site internet en français et en anglais, son programme est très vague et peu développé. Plutôt que de l’accabler sur ce point – dont il a admis être conscient lors des débats des élections (p.5) – nous encourageons cette can-

didature à un nouveau poste créé cette année par l’AÉUM dans le but de mieux distribuer les nombreuses tâches au sein de l’équipe exécutive. V.-p. aux Finances: Oui pour Niall Corolan Le projet de M. Corolan pour rationaliser les demandes de financements des clubs est nécessaire et prometteuse. V.-p. à la Vie étudiante: Oui avec réserves pour Elaine Patterson Le programme de Mme Patterson est extrêmement précis et complet et elle a su incorporer les politiques en cours avec ses nouveaux projets: un bon point pour l’équilibre et les projets à long terme de l’AÉUM vis-à-vis des clubs et services. La candidate a produit un programme concret et engagé pour la question de la santé mentale – question capitale pour les étudiants et qui fait maintenant partie du portfolio redéfini de ce poste. Cependant son concurrent, Dushan Tripp parait mieux préparé, de par son expérience, à gérer son rôle de coordination et coopération auprès des clubs étudiants. Bien que souvent critiquée par les étudiants – et par Le Délit qui relève minutieusement chacune de ses erreurs, l’équipe de l’AÉUM œuvre chaque années pour coordonner de nombreux services offerts aux étudiants en baccalauréat. Les résultats des élections étant généralement très serrés, nous invitons nos lecteurs à voter pour choisir leurs représentants. Alors, suivez-nos instructions ci-dessous, créez votre chapeau Délit de l’étudiant engagé et utilisez votre droit de vote sur le site de Elections SSMU – Simply Voting. x

rédaction 3480 rue McTavish, bureau B•24 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : +1 514 398-6784 Télécopieur : +1 514 398-8318 Rédactrice en chef rec@delitfrancais.com Julia Denis Actualités actualites@delitfrancais.com Chloé Mour Ikram Mecheri Hannah Raffin Culture articlesculture@delitfrancais.com Céline Fabre Vassili Sztil Société societe@delitfrancais.com Esther Perrin Tabarly Économie economie@delitfrancais.com Sami Meffre Coordonnateur de la production production@delitfrancais.com Baptiste Rinner Coordonnateurs visuel visuel@delitfrancais.com Mahaut Engérant Vittorio Pessin Coordonnateurs de la correction correction@delitfrancais.com Yves Boju Antoine Duranton Coordonnatrice réseaux sociaux reso@delitfrancais.com Inès Léopoldie-Dubois Multimédias multimedias@delitfrancais.com Matilda Nottage Événements evenements@delitfrancais.com Joseph Boju Webmestre web@delitfrancais.com Mathieu Ménard Contributeurs Luce Engérant, Prune Engérant, Alice Gaudreau, Sara Herlaut, Marion Hunter, Morgane Jacquet, Louise Kronenberger, Alex Le Coz, David Leroux, Magdalena Morales, Kary-Anne Poirier, Cécile Richetta, Philippe Robichaud, Etienne Rougier, Dior Sow, Margaux Sporrer, Jules Tomi, Louis-Philippe Trozzo Couverture Mahaut Engérant et Vittorio Pessin bureau publicitaire 3480 rue McTavish, bureau B•26 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : +1 514 398-6790 Télécopieur : +1 514 398-8318 ads@dailypublications.org Publicité et direction générale Boris Shedov Représentante en ventes Letty Matteo Photocomposition Mathieu Ménard, Lauriane Giroux, Geneviève Robert The McGill Daily coordinating@mcgilldaily.com Niyousha Bastani

2 éditorial

Les opinions de nos contributeurs ne reflètent pas nécessairement celles de l’équipe de la rédaction.

L’usage du masculin dans les pages du Délit vise à alléger le texte et ne se veut nullement discriminatoire. Le Délit (ISSN 1192-4609) est publié la plupart des mardis par la Société des publications du Daily (SPD). Il encourage la reproduction de ses articles originaux à condition d’en mentionner la source (sauf dans le cas d’articles et d’illustrations dont les droits avant été auparavent réservés, incluant les articles de la CUP). L’équipe du Délit n’endosse pas nécessairement les produits dont la publicité paraît dans ce journal. Imprimé sur du papier recyclé format tabloïde par Imprimeries Transcontinental Transmag, Anjou (Québec).

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Actualités

sport

actualites@delitfrancais.com

Un printemps bleu-blanc-noir Une fenêtre d’opportunité s’offre à l’Impact de Montréal. louis-philippe trozzo

Le Délit

A

lors qu’il est coutumier de voir la fièvre du hockey s’emparer de Montréal, à l’aube des séries éliminatoires de la Ligue nationale de hockey, soyez avisés que, cette année, vous vous trouverez bien mal si par malheur vous évoquez les Canadiens en compagnie d’un fanatique du club-dont-il-ne-faut-plus-prononcer-le-nom… En vertu des piètres performances de l’équipe cette saison, le Tricolore est véritablement devenu un sujet tabou pour plusieurs purs et durs. Le début imminent de la «saison de golf» du Canadien offre cependant une opportunité en or à une autre équipe montréalaise qui revendique depuis maintenant quelques années un plus grand soutien de la part des amateurs de sport montréalais: l’Impact de Montréal. Le moment semble d’ailleurs tomber à point puisque

l’Impact aligne assurément l’une des formations les plus solides du circuit nord-américain de soccer. La saison de l’Impact de Montréal? Éliminé in extremis en demifinale d’association la saison dernière, l’Impact de Montréal a certainement fait vivre une panoplie d’émotions fortes à ses fans en fin de campagne. L’Impact a maintenant l’occasion de reprendre le momentum de l’automne et de prouver que son parcours sensationnel en séries d’après-saison n’était pas épisodique. Alors que le président du club, Joey Saputo, parlait l’an dernier d’une fenêtre de trois ans avant de mettre sur pied une équipe compétitive qui aspirerait au titre, cette fenêtre est possiblement déjà arrivée à laisser voir la profondeur du club montréalais cette saison. Bien que l’effectif du club était déjà assez solide la saison dernière,

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M. Saputo ne s’est pas abstenu pendant l’entre-saison de faire de nouvelles acquisitions. C’est ainsi que Lucas Ontivero, un produit de l’académie du Réal Madrid, a pris la direction de Montréal, lui qui évoluait alors en Turquie avec le Galatasaray. Un autre venu d’importance avec l’Impact: Harrison Shipp, un excellent distributeur de ballon évoluant à la position de milieu de terrain offensif. Avec l’ajout de deux joueurs porteurs de grandes promesses, on peut certainement croire que M. Saputo y va «all-in» cette saison. À première vue, cela ne semble pas du tout déraisonnable puisque plusieurs joueurs d’impact, notamment Piatti et Drogba, écoulent la dernière saison de leur contrat. En parlant du loup, Didier Drogba voudra certainement faire trembler les filets adverses de nouveau cette année pour faire oublier la saga qui avait tant fait couler d’encre pendant la saison morte. Des rumeurs le renvoyant à

Chelsea pour qu’il devienne membre du personnel d’entraîneurs du club londonien avaient effectivement provoqué une fureur populaire chez les fans de l’Impact, eux qui avaient placé en la légende ivoirienne l’espoir de voir l’Impact rafler les grands honneurs en 2016.

Cette saga étant maintenant chose passée, Drogba a clairement fait savoir à ses détracteurs que son cœur était bel et bien à Montréal et qu’il était là pour gagner. «Si ma tête était à Chelsea, je serais à Chelsea. Mais à partir du moment où tout ça est fini et que je suis ici, je suis là à 200%!» a-t-il lancé avec énervement aux nombreux journalistes qui l’assaillaient. En définitive, les autres équipes du circuit savent très bien qu’ils devront trimer fort s’ils veulent venir à bout du Onze montréalais cette saison. En plus d’afficher une attaque dévastatrice, l’Impact alignera une défense quasi impénétrable pilotée par le défenseur par excellence de la dernière campagne, Laurent Ciman. Si l’équipe parvient à être aussi bonne sur terrain que sur papier, l’Impact s’appropriera assurément le printemps et relèguera aux oubliettes la saison catastrophique des Canadiens de Montréal. x

actualités

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Présentation des candidats

président

ben ger

jordan sinder

U2 - Environnement

U1- Microbiologie et Immunologie

Son expérience

Son expérience

Ben a déjà beaucoup d’expérience au sein de l’AÉUM derrière lui, et ce, à différents niveaux. Il a travaillé en tant que volontaire dans le Conseil de révision constitutionnelle du règlement intérieur et il a été Coordinateur au comité de Recherche des finances éthiques (Financial Ethics Research Committee, ndlr). Il a aussi prouvé ses capacités de leader et d’entrepreneur en tenant différentes positions d’exécutif (en résidence et dans sa faculté), mais surtout en ayant créé un tout nouveau poste au sein du conseil de l’AÉUM: celui de représentant de la Société des Étudiants en Environnement à Mcgill (McGill Environment Students Society, ndlr)

Président du Conseil de la Citadelle, Frosh leader pour la Faculté de sciences. Il a également travaillé durant deux ans dans quatre associations de McGill, dont TVM et le McGill Tribune. Son programme

Il se résume en cinq points. D’abord, Ben veut faire bouger la politique de santé mentale à McGill en créant un cours 101 pour le corps professoral et en accordant plus d’espace pour la clinique de santé mentale et les thérapies de groupes. Puis, en créant un Comité de Réforme du Conseil [de l’AÉUM], il cherche à augmenter la représentativité des groupes marginalisés au sein de ce même Conseil, qu’il ne considère pas assez représentatif des étudiants mcgillois. Troisièmement, il veut augmenter l’accessibilité et la visibilité de l’AÉUM auprès des étudiants mcgillois à travers différentes politiques, en augmentant la formation des étudiants à propos de l’AÉUM. Enfin, il a pour objectif de rééquilibrer le budget de l’AÉUM et d’accroître la communication et la coopération avec les Facultés de management et d’ingénierie.

Son mot d’ordre: rassembler les étudiants du campus. Pour ce faire, il promet davantage de neutralité politique de la part des représentants de l’AÉUM afin de mieux représenter la diversité étudiante. Il désire également une AÉUM plus transparente et responsable, qui se rapproche des étudiants, notamment en priorisant les intérêts des clubs et services du campus. Ses deux autres promesses électorales sont plus responsabilité fiscale en privilégiant des stratégies financières innovantes et créatives au lieu d’augmenter les frais étudiants, ainsi que l’amélioration des services de santé mentale pour un meilleur accès.

Son mantra

Son mantra

«Mes amis, l’amour est cent fois meilleur que la haine. L’espoir est meilleur que la peur. L’optimisme est meilleur que le désespoir. Alors, aimons, gardons espoir et restons optimistes. Et nous changerons le monde.» — Jack Layton

«On ne résout pas un problème avec les modes de pensée qui l’ont engendré.» — Albert Einstein

Son programme

V.-p. Affaires universitaires

V.-p. opérations

erin sobat

sacha lefebvre madger

U2 - Histoire

U2 - Biochimie

Son expérience

Son expérience

Il est cette année sénateur de la faculté des Arts et conseiller de l’AÉUM. Il a été dans le passé v.-p. aux Affaires académiques à l’Association Étudiante de la Faculté des arts (AÉFA) et coordonnateur du Fonds d’amélioration des bibliothèques à l’AÉUM.

Il a été en 2012-2013 représentant des étudiants en sciences pour l’Union des Étudiants du College Dawson (Dawson Student Union, ndlr). Il était coordinateur du Frosh de la Faculté des sciences cette année. Il est actuellement président de la Société des Étudiants en Biochimie de premier cycle (Biochemistry Undergraduate Society, ndlr).

Son programme Il s’articule autour de la santé mentale, le droit des étudiants, les finances, et l’espace sur le campus. Pour le premier point, on retient notamment sa volonté d’introduire deux journées de relâche au semestre d’automne. Pour le deuxième, Erin veut surtout augmenter la visibilité des étudiants. Quant aux finances, il veut empêcher l’augmentation des frais ancillaires et internationaux. Enfin, il a pour but d’augmenter l’espace disponible aux étudiants sur le campus. Pourquoi lui? Pour le projet d’une période de relâche en automne, projet pour lequel il avait déjà travaillé en tant que sénateur.

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Son programme Le point principal de son programme, c’est le projet ambitieux de créer un emplacement permanent où les étudiants pourraient dormir. Mais aussi, il veut augmenter la participation des étudiants dans les politiques de l’AÉUM: dans son cas, il veut qu’on entende plus la voix des étudiants dans les établissements qu’il doit lui-même gérer: Gerts et la Cafétéria des Étudiants (The Student Run Cafe, ndlr). Enfin, il souhaite améliorer la promotion des mini-cours. Pourquoi lui? Pour sa volonté d’inclure les étudiants dans le processus décisionnel. En entretien avec Le Délit, Sacha nous dit: «Je voudrais montrer aux étudiants que leurs idées ambitieuses peuvent aussi devenir réalité.»

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V.-P. vie étudiante elaine patterson U2 - Littérature anglaise Son expérience Son expérience montre qu’un lieu de prédilection d’Elaine est la communication, matière qui constitue par ailleurs une des mineures de son baccalauréat. Elle était v.-p. Communications dans sa résidence en 20132014 (elle a occupé un autre poste dans le comité des résidences mcgilloises l’année d’après), et elle occupe aujourd’hui la même position dans la Société des Étudiants de premier cycle en Arts (Arts Undergraduate Society, ndlr). Son programme Toujours au niveau de la communication, elle veut augmenter cette dernière avec les clubs et services de l’AÉUM. Mais aussi, elle veut s’investir dans l’amélioration de la politique de santé mentale de l’Association. Elle a en effet l’idée d’en harmoniser les services, de faire une évaluation de la politique deux fois par semestre, d’augmenter le bien-être mental des étudiants pendant le Frosh, ou encore de créer un programme de conseil mental de pair à pair.

dushan tripp U3 - Histoire Son expérience Dushan accumule une expérience importante au niveau des clubs et services. Il a été v.-p. Finances du club Tonal Ecstasy. Il a aussi rejoint l’administration de The Savoy Society, un club artistique de l’AÉUM. Il est actuellement Représentant des Clubs dans le comité législatif de l’AÉUM. Son programme Dans la même lignée que son expérience, son programme accorde une importance particulière aux clubs et services: augmenter la transparence des politiques de l’AÉUM vis-à-vis des clubs, créer plus d’espaces dans les bâtiments de l’AÉUM pour ces derniers, créer une plateforme internet qui leur serait dédié (ClubHub). La santé mentale est tout de même précisée dans sa campagne: il souhaiterait augmenter la visibilité des politiques de santé mentale de l’AÉUM. Pourquoi lui?

Pourquoi elle? Elaine a un programme concret et détaillé pour la politique de santé mentale. Ses connaissances en communication pourront être un atout pour la communication avec les clubs et services. Par ailleurs, en entretien avec Le Délit, elle rappelle que c’est la seule candidate féminine, et qu’elle veut «encourager plus de femmes à s’impliquer dans le gouvernement étudiant dans les années à venir.»

V.-P. finances niall carolan

U2 - Comptabilité et Marketing stratégique Son expérience Il a été membre du bureau d’administration et comptable senior de la Société de Management du Premier Cycle Universitaire (MUS), membre du conseil législatif, membre du comité de financement et réviseur-comptable de Clubs de l’AÉUM. Il a également géré les finances et opérations de la chaine Tim Hortons. Son programme Il se concentre sur trois points majeurs: rationaliser, simplifier et accélérer le processus de demande de financement des clubs, fournir des mises à jour financières concises, transparentes et claires, et enfin, collaborer avec le v.-p. Opérations afin de garantir la stabilité financière de l’AÉUM. Niall entrevoit deux sources potentielles de revenus pour l’AÉUM: relancer l’hébergement de locataires commerciaux et le mécénat d’entreprises. Son mantra «Cela semble toujours impossible, jusqu’a ce qu’on le fasse» — Nelson Mandela

V.-P. affaires externes david aird

U2 -Sciences politiques et philosophie Son expérience Il a été coordinateur des campagnes politiques sous la direction de l’actuelle v.-p. aux Affaires externes (Emily), et a mené la campagne Anti-Austérité. De plus, il a déjà eu l’opportunité de collaborer avec d’autres universités en organisant Philopolis, une conférence qui favorise les échanges philosophiques entre quatre universités montréalaises. Son programme Il contient trois axes principaux: une éducation accessible, le maintien des frais de scolarité bas pour tous les étudiants, et la garantie d’une éducation de qualité. Un point important de la politique de sa plateforme: David compte poursuivre la lutte contre l’austérité et les coupes budgétaires et rejoindre l’Association pour la Voix étudiante au Québec (association provinciale qui défend l’accès à l’éducation et fait valoir la voix des étudiants du Québec). Il compte amplifier la visibilité de la Comission des Affaires francophones et collaborer avec les associations autochtones de McGill, afin qu’elles prennent activement part aux politiques menées.

Il a beaucoup d’expérience et de savoir dans la gestion des clubs et services, à la fois en tant que membre et administrateur. En entretien avec Le Délit Dushan nous dit que «comme beaucoup de personnes, j’ai rejoint un club en 2012 pour diminuer mon stress et pour me faire des amis, mais je n’aurais jamais imaginé que la communauté de l’AÉUM deviendrait petit à petit une de mes passions.»

V.-P. affaires internes daniel lawrie U1 - Ingénieurie Son expérience Daniel a été directeur social de sa fraternité, représentant du comité pan-hellénistique (Inter-Greek Letter Council, ndlr), une association de fraternités et sororités, ainsi que Frosh leader. Il est actuellement administrateur de One Class, un site de partage de cours et de guides d’examens. Son programme Daniel compte regagner la confiance des étudiants, en améliorant la communication, notamment grâce aux applications telles que Snapchat ou l’application officielle McGill. D’autre part, il souhaite résoudre le problème du Yearbook — qui entraîne un déficit annuel de 20 000 dollars — en faisant payer les étudiants qui souhaitent l’obtenir. Dialoguer avec les étudiants sur les événements planifiés est une autre de ses priorités de communication, afin d’éviter que des échecs tels que «4 Floors» ne se reproduisent. Au niveau de l’organisation, Daniel maintiendrait une étroite collaboration avec les facultés, surtout lors du Frosh et de la semaine d’orientation, que l’AÉUM continuerait de superviser. Enfin, il promet une plus grande transparence et inclusion au sein de l’AÉUM. Son mantra «Tout ce que nous avons à décider, c’est ce que nous devons faire du temps qui nous est imparti» — Le Seigneur des Anneaux, J.R.R Tolkien. En entrevue, il nous confie que «cette citation [l]’inspire à entreprendre du changement au sein de l’AÉUM.»

alexei simakov

U4 -Développement International

Pourquoi lui? David est Montréalais, et fier de l’être. Il compte rester vivre au Québec dans les prochaines années à venir, et c’est pour cela qu’il est très attaché à maintenir une éducation accessible et de qualité. «C’est une manière pour moi de contribuer à la réalisation d’une société dans laquelle je souhaite vivre».

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chloé mour et hannah raffin

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Que les jeux commencent! esther perrin tabarly

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ercredi dernier, dans la salle de bal du bâtiment Shatner, les candidats aux postes exécutifs de l’Association des Étudiants de l’Université McGill (AÉUM) se sont réunis pour les débats médiatiques, lançant ainsi le début de leur campagne. Celle-ci commence d’ailleurs sur les chapeaux de roue, et la presse étudiante déplore qu’au moment des débats, il manque encore une plateforme accessible pour certains candidats. À la lumière de la candidature, puis du retrait non-officiel puis du retour de M. Simakov au poste de v.-p. aux Affaires externes, on pourrait s’attendre à une période d’élections haute en rebondissements. Toutefois, l’ancien opposant de M. Ibrahim

— aujourd’hui président de l’AÉUM — ne s’est même pas rendu au débat, laissant ainsi la parole à M. Aird , que l’on sait désormais officieusement seul prétendant à la couronne des Affaires externes. Peu d’opposition Il est intéressant de remarquer que la plupart des postes sont sujets à une seule candidature. Les seuls sièges qui impliquent une compétition cette année seront ceux de président, et de v.-p. à la Vie étudiante (précédemment v.-p. Clubs et services, ndlr). Lors des débats de mercredi, ce sont donc les seuls qui ont présenté un véritable intérêt et des nouveautés. La pierre angulaire du débat entre les potentiels v.-p. à la Vie étudiante a été la question de leur

Le mot final a été donné par les deux candidats à la présidence, Ben Ger et Jordan Sinder. Les deux candidats se sont dits

opposés à la motion pour amender la constitution afin de bloquer les motions «divisives» lors des Assemblées générales (dont le conseil législatif a discuté pour la première fois le 25 février, ndlr): l’exécutif se doit de rester neutre face aux débats d’ordre politique sur le campus. Ger de conclure: «Je suis entièrement pour la démocratie directe!». C’était cependant un des seuls points d’accord entre les deux candidats. Quand M. Ger a corrigé M. Sinder qui parlait de la gestion des clubs, lui disant que cette tâche ne relève pas du rôle du président, il a provoqué le départ furieux d’un membre de l’assemblée. M. Sinder en a profité pour relever «le grand problème dans notre institution: les clubs et associations étudiants sont la force directrice du campus», et méritent l’attention de l’AÉUM. x

pointant les dysfonctionnements du comité des élections de l’AÉUM. Au semestre dernier, M. Simakov s’était présenté au poste de v.-p. aux Affaires internes de l’AÉUM laissé vacant par Lola Baraldi, démissionnaire. Sa concurrente Céleste Pagniello s’était retirée le matin même de l’élection, et une campagne du «Non» contre M. Simakov avait été organisée dans la foulée par Ben Ger, candidat cette année au poste de président et proche de Kareem Ibrahim.

À l’heure où nous écrivons ces lignes, un dernier rebondissement dans les élections de cette année a lieu: M. Simakov a publié une lettre ouverte à l’AÉUM sur le site de la version mcgilloise du Tab — une plate-forme dédiée au journalisme étudiant — dans laquelle il dénonce «le cirque SSMU» et la faillite de représentativité de l’Association étudiante. Il a aussi annoncé en privé au Délit qu’il était encore candidat. Tous ces coups d’éclat ont bien l’air d’une campagne électorale rondement menée. x

gestion du temps pour jongler entre l’avancement de la question de la santé mentale sur le campus et le reste des fonctions qui leur incomberaient. Dushan Tripp a mis l’emphase sur la présence de représentants des clubs et services. Son opposante Elaine Patterson, elle, s’est dite confiante en sa capacité à gérer une telle quantité de travail. Mentionnant, par la même occasion, que les difficultés rencontrées par l’actuelle v.-p., Kimber Bialik, s’expliquent par les multiples démissions qu’a vécues l’AÉUM au cours de l’année. Débat présidentiel

L’étrange campagne d’Alexei Simakov baptiste rinner

Le Délit

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e candidat au poste de v.-p. Externe Alexei Simakov s’est retiré de façon officieuse de l’élection du conseil exécutif de l’AÉUM. Dans un message humoristique publié sur sa page Facebook, M. Simakov a ironiquement déclaré vouloir se présenter aux élections présidentielles américaines devant la vague de soutien envers Donald Trump. Alors qu’il a souhaité bonne chance à son adversaire David Aird pour l’élection

à venir, il ne s’est toutefois pas retiré de la course, selon Elections SSMU, mais ne mène pas campagne pour autant. Certains étudiants y voient une tactique électorale de la part de M. Simakov, qui n’en est pas à son premier coup d’éclat dans sa carrière politique étudiante. L’année passée, il s’était incliné avec un écart de 225 voix face à l’actuel président de l’AÉUM Kareem Ibrahim. Il avait décidé quelques temps plus tard de déposer une plainte auprès de la commission juridique

La politique a-t-elle sa place à l’AÉUM? La motion «anti-polémique» proposée au référendum est controversée. Une proposition qui fait polémique

dior sow

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a dernière assemblée générale de l’AÉUM qui s’est déroulée le 22 février dernier s’est fait remarquer par son caractère polémique. En effet, la motion concernant le soutien au mouvement BDS McGill avait fait controverse durant les semaines précédant l’assemblée et ne fut adoptée qu’au terme d’un long et virulent débat. Suite à cela, Adam Templer, Matthew Sattherthwaite et François-Paul Truc — trois étudiants représentants à l’AÉUM — ont proposé un amendement soutenant la création d’un comité de directeurs externes à l’Association qui auraient la responsabilité de poser un droit de véto sur les motions jugées controversées et extrinsèques à la vie étudiante. Lorsqu’interrogé sur la composition d’un tel comité Adam Templer nous répond que ce dernier «devrait inclure des membres de l’AÉUM en général qui s’ajouteraient au comité directeur actuel (en charge des révisions grammaticales des

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motions et de la conformité de ces dernières avec le règlement intérieur, ndlr).» De plus, ils proposent que ce type de motion doive nécessiter l’obtention des deux tiers du vote étudiant par la suite. Templer ressent aussi la nécessité d’apporter une clarification sur l’amendement en lui même: «[…]qualifier certaines motions comme étant polémiques et externes est juste une mise en garde au corps étudiant de McGill pour s’assurer que de telles motions bénéficient d’un large soutien plutôt que d’une simple majorité.»

Cette éventualité divise au sein même de la direction de l’Association. En effet, si la résolution a aujourd’hui obtenu assez de soutien pour être présentée au référendum, elle est aussi fermement rejetée par une partie des exécutifs. Emily Boytinck, v.-p. aux Affaires externes, s’explique: «L’Assemblée générale est l’un des seuls endroits où les membres de l’AÉUM peuvent participer de manière démocratique et directe, il est donc très important que nous soyons capables de discuter et de débattre d’un large éventail de questions.» Boytinck, ainsi que Kareem Ibrahim et Chloé Rourke, ont donc constitué en vue du référendum un comité en faveur du «Non». Face à la contestation, Adam Templer défend néanmoins le projet et réfute les accusations de censure et d’atteinte au processus démocratique: «Il ne s’agit pas là de couper court au débat mais plutôt de le favoriser. Les motions concernant des questions externes à la vie étudiante sont

bénéficières d’un soutien financier supérieur à la moyenne, en conséquence les étudiants deviennent victimes d’un effet de mode et prennent parti sans savoir. D’autre part, il y a des moyens bien plus probant pour défendre une cause que l’Assemblée générale: une campagne de sensibilisation par exemple est bien plus efficace qu’une discussion d’un exécutif de l’AÉUM avec un responsable de l’université à huit clos». Il ajoute que les divisions qui résultent de certaines motions ont un impact qui dépasse la simple controverse: «Certains incidents m’ont été reportés par des étudiants, des actes antisémites, islamophobes ou racistes. Le jeu en vaut-il la chandelle?» La nécessité d’une politique étudiante engagée Pour certains exécutifs tels que Rourke, ce discours est trompeur et extrêmement problématique. Pour elle, le fait de qualifier une motion comme étant «politique» ou «controversée» est un acte politique en lui-même. De plus, elle s’interroge sur la

pertinence du terme externe: «Est ce que manifester sa solidarité envers les femmes indigènes disparues et assassinées est un problème externe à l’université? Qu’en est-il d’une motion qui se pose en faveur du mouvement Black Lives Matter? S’agit-il là de questions externes à la vie des étudiants indigènes ou noirs?» Elle affirme que faire de l’AÉUM une organisation fermée aux débats d’opinions revient à ignorer la diversité du corps étudiant et refuser à certains la possibilité de faire entendre leur voix. Cette vision d’une AÉUM «plus représentative» et «moins politique» devient problématique lorsqu’elle est appliquée aux principes d’équité et de justice sociale. L’amendement reçoit un accueil tiède, parmi les étudiants: si certains nous ont confié qu’ils voyaient dans cette motion un geste raisonnable et justifié, certains comme Mary (U2) trouvent cela «aberrant» ou encore comme Reem (U0), «à l’encontre de l’esprit de l’université». Reste donc à savoir quelle sera l’issue du référendum qui approche à grand pas. x

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conférence

De l’inspiration à la réalisation Six femmes qui proposent des modèles de leaderships gagnants. vittorio pessin

sarah herlaut

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amedi 12 mars, de 10 heures à 18 heures, McGill Women in Leadership Students’ Association (Association étudiante de McGill des femmes dans les postes de responsabilité/dans le leadership, ndlr) organisait sa seconde conférence annuelle. Six femmes de carrière, venant de secteurs variés, nous ont donnés leur définition du leadership.

Alors que pouvons-nous faire aujourd’hui?

La différence dans la réussite Du charisme imposant de Helen Christodoulou — de l’Institut Canadien de la Construction en Acier — à la douceur de Pira Marra de la banque Desjardins, on se rend compte qu’il n’existe pas un modèle de leadership unique. Démontée, l’idée qu’une femme ne peut gagner le respect de ses pairs qu’en se calquant sur le stéréotype le plus agressif du leadership masculin. Eleni Bakopanos, ancienne membre du parlement canadien, et Sylvia Piggott, ancienne chef du service d’informations commun du Fonds Monétaire International et de la Banque Mondiale, nous parlent ensuite de l’importance de saisir les opportunités qui se présentent. Mme Bakopanos, avec deux enfants en bas âge, est partie en campagne électorale. Sylvia aussi a décidé de partir à Washington alors même

de leadership direct, il est possible d’être une leader parmi les autres stagiaires. Il faut toujours être prête à rester des heures en plus, prendre des initiatives, parler au plus de personnes possible dans l’entreprise. Le rejet est inévitable selon toutes les panélistes: Mme Pirolo, spécialiste de recrutement à Hybris SAP Labs, nous encourage à continuer à envoyernotre CV jusqu’à obtenir gain de cause — elle a été refusée à trois postes chez SAP avant d’être embauchée!

que sa famille restait derrière elle. Inévitablement, la question des difficultés auxquelles les femmes font face lorsqu’elles doivent combiner grosses et carrière professionnelle est abordée. Si ces femmes sont très honnêtes avec nous — il est extrêmement compliqué d’arriver à équilibrer ces deux entités — elles sont des preuves vivantes que si souhaitée, la conciliation de maternité et carrière professionnelle est réalisable. Malgré le soleil dehors, rayonnant, et les heures passant, la salle est restée captivée par chacune de ces femmes. On rit des anecdotes qu’elles nous racontent

sur la misogynie intériorisée en entreprise. Une vague d’émotion parcourt l’assemblée lorsque Mme Bakopanos explique aux sceptiques du féminisme que oui, nous en avons encore besoin dans le monde du travail, et que c’est notre devoir de nous battre contre les barrières qui nous sont posées et surtout, contre celles qu’on se pose à nous-mêmes. Certains conseils reviennent régulièrement: l’importance de s’affirmer, d’élargir continuellement son réseau. Il faut absolument, selon Mme Piggott et Marthe Kassouf, chercheuse chez Hydro-Québec, apporter sa vision personnelle dans

son travail. Mmes Christodoulou et Bakoupanos évoquent l’importance d’avoir le plus de mentors possibles pour nous guider: des mentors femmes et hommes. En effet, selon Mme Bakoupanos, «On ne peut pas y [l’égalité dans le monde du travail] arriver sans eux.» Le leadership en pratique Les panélistes nous donnent également des exemples plus concrets et réalisables pour des femmes de nos âges, encore à l’université. En tant que stagiaire, si nous ne sommes pas en position

On nous encourage à établir le plus vite possible une idée précise de ce que nous voulons faire de notre avenir: pour elle, l’ambivalence ne fait que disperser nos efforts pour atteindre nos objectifs. Mme Pirello souligne l’importance de se créer une image, une patte, que l’on gardera toute notre carrière: c’est ainsi que nous pouvons nous différencier. McGill propose également plusieurs programmes pour trouver des mentors, qui peuvent nous orienter dès aujourd’hui. On sort de cette conférence impressionnées par ces femmes brillantes, inquiètes du chemin qu’il reste à parcourir mais plus déterminées que jamais. Car comme Mme Christodoulou l’a si justement dit: «Le monde attend juste des femmes qui osent.» x

chronique

La langue académique

David Leroux | Espaces Politiques semestre, c’est celle du survol du plan de cours. C’est ce moment où chaque professeur, invariablement, mentionne la politique linguistique de notre Université, soit la possibilité pour les étudiants de remettre leurs travaux et de rédiger leurs examens en français. Le jargon administratif nomme cela «politique du bilinguisme passif».

C

haque nouveau semestre, l’Université McGill compte son lot de traditions. Il en est une que je tiens aujourd’hui à souligner, même si nous passons tout juste le cap de la mi-session. À l’heure où les examens nous reviennent et où les travaux se rédigent, plus que jamais, il me semble pertinent que nous nous attardions sur le cas du français à l’Université. Cette tradition de début de

Le French Side de McGill Tous comprendront que l’institution que nous fréquentons est de langue anglaise, et que quiconque s’y inscrit en est pleinement conscient et donc, on suppose, consentant. L’enseignement sera dispensé en anglais, les cours seront en anglais, les examens et consignes de travaux seront en anglais. Il n’est pas question de remettre cela en question dans cette chronique. Seulement, il me semble nécessaire de rappeler

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que du chemin reste à faire pour que la politique de bilinguisme dépasse le stade du simple objectif et prenne pleinement et efficacement effet. D’abord, on doit s’assurer que chaque cours dans lequel les travaux et examens comportent une part de texte compte au moins un assistant d’enseignement maîtrisant le français. Cette maîtrise doit impérativement être plus que minimale: il faut être en mesure de comprendre efficacement des écrits de niveau universitaire. Accepter moins que cela consiste d’une part, pour l’institution internationale qu’est McGill, à ne pas prendre au sérieux sa propre politique linguistique et, d’autre part, à admettre que certains de ses étudiants se verront remettre un diplôme basé sur des évaluations dont la valeur est discutable. N’est-ce pas là un accroc important au prestige académique dont l’Université se targue?

Tout ou rien L’ouverture de McGill à la langue française est tout à fait louable, mais il me semble inacceptable de se satisfaire d’un entre-deux imparfait. McGill doit être parfaitement bilingue, ou alors admettre qu’elle ne l’est pas réellement. Il en va de la crédibilité même de l’institution. Il en va aussi de son intégration à son milieu. McGill est une université québécoise et elle doit, à ce titre, avoir comme préoccupation d’être capable de faire une place privilégiée à la langue de la communauté dans laquelle elle évolue et qui la subventionne, la langue du Québec: le français. Il ne s’agit pas de politique partisane mais d’aller au-delà des vœux pieux. Il s’agit de passer d’une politique de bilinguisme passif à l’acceptation d’occuper un rôle majeur dans la préservation de la richesse des écosystèmes culturels mondiaux. Aussi, Mcgill se doit de soutenir activement la

nation francophone d’Amérique du Nord dans un effort constant, pour éviter qu’elle ne se dilue culturellement dans l’univers-marchandise ISO 9001 proposé par les dogmes idéologiques actuellement dominants en Occident. La diversité culturelle dont on se réclame aujourd’hui avec fierté, il faut d’abord y faire attention, et agir pour qu’elle continue d’exister, si on veut continuer de l’embrasser et de s’en enorgueillir. Sans cela, nous ne serons rien de plus que quelques pions sur le grand échiquier de l’homgénéisation des peuples et, ultimement, des individus. C’est dans cette optique surtout que je rappelle en ces pages que la cause de la langue française à McGill doit aller bien au-delà d’une mascarade de tolérance dans laquelle on se vautre et se complaît: elle doit prendre la forme d’un engagement actif de notre institution pour la promotion etla défense de l’héritage français de la nation québécoise. x

actualités

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conférence

Soyons difficiles à gouverner La 11e édition des Rencontres Maîtres chez Vous 2016 appelle à l’implication. kary-anne poirier

Le Délit

L’

implication de la relève dans la société civile, mais surtout en politique agissait à titre de point focal de l’ensemble des discours des panélistes et conférenciers présents à cette 11e édition des Rencontres Maîtres chez Vous. Présenté par Force Jeunesse, le colloque a eu lieu le 12 mars dernier à HEC Montréal. Les Rencontres Maîtres chez Vous sont devenues un incontournable pour les jeunes passionnés des affaires publiques. Elles mettent à l’honneur le débat public en proposant un espace privilégiant les échanges entre les jeunes de notre génération et les décideurs et les personnalités influentes de notre société. Les discussions éclatées qui découlent enrichissent les rencontres et l’événement demeure

règle. La règle, quant à elle, doit être élaborée par la majorité.» Inspirantes paroles. Bien entendu, elle a également fait référence au récent tollé suivant son désaccord avec le projet de loi sur la déchéance de la nationalité, ce dernier l’ayant poussée à démissionner de son poste de ministre de la Justice. Comment

dangereux et destructeur. Le danger actuellement est que l’opinion publique mondiale se base sur des minimalismes. Par exemple, prenons les outils technologiques, ces derniers finiront par nous submerger et fracturent le monde plutôt que de l’unir si l’on écarte la recherche d’un équilibre. Décidément, l’auditoire a accueilli l’idéaliste de grande façon, sous un flot d’applaudissements, voire une ovation.

qui doivent bien souvent se soumettre à une délocalisation obligée pour poursuivre des études supérieures? Rééquilibrer la société Le troisième conférencier Jean-Martin Aussant, directeur général du Chantier de l’économie sociale fera-t-il un retour en politique? Qui sait, mais son

kary-anne poirier

Une discussion enflammée En clôture, animée par Jean-Philippe Cipriani, une revue de l’année et des perspectives pour 2016 a permis à la foule présente d’interpeler directement les experts et observateurs siégeant sur la discussion. En effet, à l’aide de Twitter, les journalistespanelistes ont réagi aux questions qui fusaient directement des utilisateurs. L’animateur Jean-Philippe Cipriani a tâché à la répartition de celles-là et animait de belle façon le débat. Cette discussion de haut niveau est même devenue bien enflammée par moment. Il faut dire que les principaux experts et observateurs concernés, pensons à Chantal Hébert, Michel C. Auger, Jonathan Trudeau ainsi que Philippe-Vincent Foisy ont su mettre la barre très haute. Les questions, axées sur la politique québécoise et canadienne, nous ont donné un aperçu de ce qui est à venir au courant des prochains mois. Or, la situation politique de nos voisins du Sud est également venue se tailler une place au sein de l’échange. Abordant non seulement la toute récente visite du premier ministre Justin Trudeau à Washington, ils en ont profité pour élaborer quelques prédictions quant aux prochaines élections. Donald Trump a bien évidemment fait sourciller, mais les analystes ont affirmé

«Les mots sont des événements, car ils en provoquent» non-partisan. C’est justement la beauté de la chose, puisque des jeunes de tous les horizons sont pour une rare fois regroupés dans une même assemblée, et ce, peu importe leur allégeance politique. La journée se déclinait en cinq volets. D’abord, la conférence d’ouverture a été donnée par Christiane Taubira. S’est ensuivie une série de panels simultanés portant sur les nouveaux médias, l’économie de partage, les changements climatiques et sur les raisons qui nous poussent à nous syndiquer en 2016. Ont suivi les conférences de Mme Hélène David, ministre de l’Enseignement supérieur ainsi que de M. Jean-Martin Aussant, directeur général du Chantier de l’économie sociale. Une personnalité inspirante En ouverture, la présence de Christiane Taubira, ancienne ministre de la Justice française, marquait indubitablement de plein fouet le début du colloque. La prestance de la dame impressionne, rien de moins. La justesse des mots empruntés a tâché de maintenir l’intérêt de l’auditoire: «les mots sont des événements, car ils en provoquent.» Mme Taubira a pris la parole au sujet de la démocratie, et en a profité pour réitérer les grands idéaux de gauche qu’elle tente de défendre, comme la justice sociale, penser à la société dans son intégralité et l’atteinte de l’égalité sous toutes ses formes. «La démocratie c’est le règne du droit, le droit, c’est la

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reconnu la puissance du message livré samedi après-midi: un fort message économique basé sur des faits. «Tenez-le vous pour dit, le modèle d’équilibre général en économie: ça ne fonctionne pas!» Enfin, M. Aussant a proposé fortement aux jeunes de s’impliquer en politique, «surtout si vous n’aimez pas ça, puisqu’il n’y a rien de pire que des gens qui s’impliquent en politique parce qu’ils aiment ce qu’ils voient, cela ne peut que faire perdurer le status quo.»

garantir nos libertés individuelles lorsque nous sommes confrontés au terrorisme? Mme Taubira a notamment affirmé que «nous commençons à annoncer notre défaite collective lorsque nous renonçons à nos libertés.» Tout en faisant de forts parallèles historiques sur les événements qui ont précédés certaines grandes guerres, la Seconde Guerre Mondiale notamment, Mme Taubira a su contextualiser la situation actuelle et le terrorisme pour mieux expliquer son argumentaire. Elle fit également un point sur l’ascension inquiétante que connaît «l’individuation», le terme se transformant en un narcissisme

Des modèles pour la jeunesse Lors de sa conférence, la ministre Hélène David en a profité pour souligner l’importance et surtout la préservation des collèges des régions éloignées du Québec. Également, elle a mentionné les grands impacts directs que peuvent avoir les jeunes représentant une première génération d’universitaires tant au niveau micro (dans la famille immédiate par exemple) qu’au niveau macroscopique, en termes de participation dans le reste de la société civile. Qu’en est-il de ceux issus des régions

«Nous commençons à annoncer notre défaite collective lorsque nous renonçons à nos libertés.» discours bien inspirant redonnerait peut-être une couleur et un vent de fraîcheur à la scène politique québécoise. Bien qu’il soit souvent associé au projet d’indépendance du Québec, M. Aussant reste porteur de grands idéaux basés sur un équilibre entre l’apport du privé et du public en économie. Peu importe l’allégeance politique, les jeunes présents ont

en quasi-totalité que l’élection du candidat populiste est peu probable. En vain, tournant la fin en humour, on a affirmé que M. Trump n’était décidemment pas le seul à pouvoir faire usage de Twitter. Dans ce ce cas-ci, on parlait bien entendu d’un bon usage face à celui privilégié par le politicien qui est, ma foi, douteux par moment. x

le délit · mardi 15 mars 2016 · delitfrancais.com


Société

opinions

societe@delitfrancais.com

Des millionaires dans l’embarras? Le syndicalisme n’est pas mort et il est encore indispensable.

Alice gaudreau

A

ux rencontres Maîtres chez vous organisées par Force Jeunesse samedi dernier, un panel portait sur les raisons de se syndiquer en 2016. Mais au vu de son contenu, il aurait pu être rebaptisé: De l’importance de se syndiquer en 2016. Les syndicats, une nécessité Les syndicats n’ont pas la cote dans les médias. Omar Aktouf, professeur à HEC Montréal va plus loin: «les syndicats sont perçus comme une maladie sociale.» Selon Youri Chassin, de l’Institut économique de Montréal, ils sont vus comme bureaucratiques et résistants au changement. Pourtant, lorsqu’un travailleur débute un nouvel emploi au salaire minimum, il n’a pas à débattre pour obtenir ce salaire. En partant en vacances, il a la garantie d’avoir tout de même un chèque de paie en revenant. Ça vous semble normal, mais ça ne l’a pas toujours été. Les gains que font

les syndicats aujourd’hui seront éventuellement considérés comme normaux, eux aussi. La sécurité d’emploi, la conciliation travail-famille, ce n’est pas un rêve, c’est du progrès. Ce dernier, contrairement au rêve, n’est pas illusoire. Il est en construction. Ceux qui contribuent au progrès ne sont pas seuls. Guy Caron, député néo-démocrate, rappelle qu’isolé, l’employé n’a pas de pouvoir face à la machine capitaliste qu’est son employeur. Les syndicats viennent rééquilibrer le rapport de force entre l’employeur et l’employé. Pour ce dernier, son salaire «est un impératif de survie» dit Guy Caron. Devant les demandes de son employeur, l’employé ne peut que plier. Bien que certains employeurs aient réellement une vision progressiste, ces progrès viennent des rapports de force des syndicats. Lutter contre les inégalités Avons-nous la mémoire courte au point d’oublier les batailles ga-

gnées par des syndicalistes dévouant leur énergie au mouvement des travailleurs? Le Nouveau Parti démocratique (NPD) est né de ce mouvement en 1961, par l’union du Parti social démocratique du Canada et du Congrès du travail du Canada. Ils créèrent le NPD qui se bat pour que l’écart entre les riches et les pauvres

létariat exploité, mais comme des millionnaires temporairement dans l’embarras.» Il est là, le cœur du problème. Les plus privilégiés peinent à voir les faveurs auxquelles ils ont accès et les moins fortunés refusent de se voir comme tels. Nous sommes fiers, nous aimerions

«Les plus privilégiés peinent à voir les faveurs auxquels ils ont accès et les moins fortunés refusent de se voir comme tels» diminue. Depuis 2015, selon Oxfam, 1% de la population mondiale possède plus de richesses que l’autre 99%. Clairement, la lutte n’est pas finie. Malgré cet écart, en politique, on parle souvent de classe moyenne. C’est pratique, car presque tous les électeurs s’y associent. Ronald Wright a écrit dans son livre Brève histoire du progrès que «le socialisme ne s’est jamais enraciné aux ÉtatsUnis parce que les pauvres s’y voient non pas comme un pro-

réussir par nous-mêmes sans l’aide de personne. Mais à quoi bon? On ne peut pas trouver une réponse individuelle à un problème qui est collectif. Le travail, c’est ce que l’on accomplit individuellement mais qui nous affecte collectivement. Et les jeunes, dans tout cela? «Aujourd’hui, l’employé n’est même plus dans la honte d’être exploité, il est dans la hantise

de ne pas être exploitable» dit Aktouf. Caron rappelle que les jeunes se font compétition afin d’obtenir des stages qui ne seront même pas rémunérés. Louise Chabot, présidente de la Centrale des syndicats du Québec, déplore que 62% des jeunes soient dans des situations atypiques au travail, soit un travail à temps partiel, à contrat, précaire, etc. Le portrait qu’ils brossent du marché du travail canadien est déplorable. Avons-nous à baisser les bras et l’accepter sans mot dire? Le mouvement syndical canadien est une expression de la démocratie. «C’est un lieu de débat et d’échanges. Les syndicats ont comme mission de travailler à une société plus juste et plus équitable», a dit Chabot. Cette mission revient aussi à nos élus. Nous sommes en droit d’exiger plus du pouvoir exécutif. Exigeons que les parlementaires se soucient des véritables personnes, plutôt que des entreprises qui n’ont qu’une personnalité juridique, mais pas d’âme. x

Intégration ou beaux discours? Quelle est la réalité des politiques d’accueil des réfugiés au Québec? québécoise tout en conservant les pratiques qui sont les leurs depuis si longtemps, et ce par le biais d’organismes comme l’Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI), qui, depuis trois ans déjà, lutte en faveur d’une aide humanitaire pour des millions de Syriens. La société civile québécoise a donc posé ses cartes sur la table depuis un long moment.

alexandre le coz

A

lors que le nouveau gouvernement Trudeau a finalement rempli à la fin du mois de février 2016 son objectif d’accueil de 25 000 réfugiés syriens, il paraît pour le moins évident de prévoir l’avenir de ces personnes, auparavant persécutées par une guerre dévastatrice et meurtrière qui ravage aujourd’hui encore une vaste partie du territoire syrien. Ayant accueilli 20% du nombre total de réfugiés syriens au Canada, de quelle manière le Québec accueille-t-il ces nouveaux arrivants? Quelles sont réellement les mesures prises pour faciliter l’arrivée, l’installation et l’assimilation culturelle des migrants? Un rapprochement culturel plutôt qu’un remplacement Comme le démontre le communiqué officiel de la ville de Québec sur l’accueil des personnes immigrantes datant de juin 2010, la municipalité «considère la promotion, l’accueil, l’intégration, le rapprochement interculturel et la rétention des

Le Québec en est-il capable?

nouveaux arrivants comme des actions à privilégier.» Le Québec, comme le Canada, suit donc une politique de rapprochement interculturel plutôt que d’assimilation, ce qui différencie la province de l’ogre américain qui prône une intégration sous forme d’un «melting pot». En effet, sur le sujet de l’immigration, les États-Unis adoptent une politique plus fermée que la politique canadienne en incitant ses nouveaux habi-

le délit · mardi 15 mars 2016 · delitfrancais.com

tants à délaisser les pratiques culturelles et linguistiques qui étaient les leurs dans le passé afin d’imprégner la culture locale: langue, pratiques et coutumes. Une différence qui constitue un atout pour le Canada et sa province francophone, capables de reconnaître la diversité ethnoculturelle d’un territoire historiquement biculturel. Les nouveaux habitants du Québec sont donc invités à prendre place dans la société

«Ça me rend excessivement fier qu’on soit capable comme peuple de retourner une situation horrible comme celle que ces gens fuient.». Telles sont les paroles de Philippe Couillard lors de l’arrivée de réfugiés syriens à Montréal fin 2015. Des paroles pleines de contentement, qui témoignent d’une envie forte d’inclure ces nouveaux arrivants au sein de la société québécoise. Si l’envie y est, le Québec est-il pour autant doté de capacités suffisantes pour assurer le bienêtre économique de plus de 5000 Syriens? Pour Régys Caron, journaliste au Journal de Québec, la

province risque de manquer de ressources en cas de catastrophe économique. En effet, le nouvel objectif du gouvernement Couillard (remanié au début de l’année 2016, ndlr) étant le rééquilibre budgétaire, une hausse des dépenses gouvernementales afin d’optimiser la situation économique des migrants semble contrarier les politiques mises en place par le gouvernement du Québec. Ce dernier cherche à promouvoir les emplois partiels, saisonniers, et les stages tout en stimulant l’entrepreneuriat pour les nouveaux arrivants sur le territoire. Des politiques d’accueil honorables qui requièrent néanmoins des investissements financiers que le gouvernement Couillard s’était engagé à ne pas entreprendre. Face à une telle contradiction, comment le gouvernement québécois va-t-il garder ses promesses électorales tout en assurant le bien-être économique de milliers de Syriens? Ces milliers de réfugiés arrivés au Québec dans l’objectif d’une vie meilleure parviendront-ils réellement à bénéficier de toutes les promesses gouvernementales? C’est l’avenir lointain qui nous le dira. x

société

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Introspection journalistique

enquête

La profession dans la ligne de mire. cécile richetta

Le Délit

L

ors d’une discussion récente avec une camarade de classe, je l’écoutais me dire qu’en choisissant sa faculté à McGill, elle avait pris en compte des facteurs tels que le métier qui allait le mieux payer, ou celui qui avait le plus «d’avenir». Je n’ai jamais voulu me poser cette question, probablement par peur de la réponse, enfouissant ma tête dans le sable comme une autruche. Alors que mon expérience à McGill tire à sa fin, la question me taraude: le journalisme a-t-il encore un avenir? Payer ou ne pas payer pour l’information? Maintenant qu’Internet est partout dans nos vies, les sources d’informations sont inépuisables. En tant que lecteur, c’est merveilleux! Mais en tant que journaliste, cette abondance d’informations pose une question: puisqu’elle est si accessible, doit-on vraiment payer les journalistes? Les blogueurs, eux, ne sont pas payés. En 2012, le Huffington Post français avait refusé de payer ses blogueurs, pourtant considérés comme des contributeurs fréquents. Les blogueurs s’étaient insurgés, et les journalistes avaient probablement lâché un soupir

de soulagement — au moins, ce n’était pas leur profession. Aude Baron, ex-rédactrice en chef du Plus du Nouvel Observateur (l’Obs, ndlr), un hebdomadaire français, explique que «tout travail mérite salaire», mais que les blogueurs, contrairement aux journalistes, ne sont pas là pour produire de l’information mais pour l’enrichir, en apportant un point de vue alternatif ou une opinion. La recherche, les sources, le travail de terrain ne relèvent donc pas du travail d’un blogueur. Néanmoins, l’Obs avait alors pris la décision de payer certains de ses contributeurs sur la base de la popularité des articles qu’ils produisaient. Plus l’audience aimait les contributions, plus le blogueur avait de chances d’être rémunéré. Le modèle est peut-être économiquement viable, mais il est impossible de s’empêcher de penser à tous les articles ayant peu d’intérêt politique, économique ou social qui envahissent la toile. Lorsque les contributeurs sont payés aux «J’aime», aux partages sur Facebook et aux nombres de commentaires, la qualité des sujets peut être remise en question. Ce qui plaît n’est pas toujours ce dont il faut parler, déclencher des controverses inutiles pour le simple plaisir des trolls d’internet n’est pas le travail d’un journaliste. Pour avoir une petite idée de ce que veut dire payer ses contributeurs aux

«J’aime», il suffit de regarder du côté du MTL Blog. Payer un journaliste, c’est payer la recherche, l’assurance de sources fiables, la réflexion, le travail parfois long, les nuits blanches et les casse-têtes. Le journaliste certes produit de l’information, mais il produit surtout un certain type d’information qui mérite un salaire. Une qualité d’information essentielle à l’éducation de nos sociétés et à leur bon fonctionnement. Jongler entre la déontologie et un salaire fixe Puisqu’il faut payer les journalistes, le souci de la somme devient épineux. L’équilibre entre déontologie et salaire est alors au cœur du débat. Selon Le Devoir, de 1981 à 2013, au Québec le salaire d’un journaliste indépendant a chuté de 40%. En plus de cela, le journalisme reste un milieu inégalitaire, où les femmes pigistes sont en moyenne payées 14% de moins que les hommes. La précarité des journalistes affecte nécessairement la qualité de leur travail, car quand bien même on se veut idéaliste et parler de sujets qui fâchent et qui remettent en question le statu quo, il faut aussi payer ses courses, ses factures téléphoniques, internet, et son loyer. La précarité est, selon moi, l’une des raisons principales pour laquelle l’opinion publique est de moins en moins en faveur des journalistes, et semble parfois avoir l’impression que les journalistes feraient tout pour un gros titre. Lorsqu’un métier est peu ou mal payé, et qu’il faut néanmoins en vivre, la qualité peut devenir un obstacle à un revenu confortable. C’est donc une question de déontologie — se conformer aux codes et aux règles du métier de journaliste, un pilier pour que la profession soit respectée et légitime. Le Conseil de Déontologie en Belgique publiait en 2013 un nouveau code de déontologie, et stipulait clairement «Les journalistes évitent tout conflit d’intérêts.» Les intérêts individuels sont en conflit direct avec les intérêts de la profession. La pression repose entièrement sur les épaules des journalistes qui doivent alors jongler entre maintenir un niveau de vie décent et résister à toute pression extérieure pour maintenir leur intégrité. Il est essentiel qu’ils le fassent, car sans la déontologie, la profession n’a plus aucune légitimité. La vague du numérique

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prune engérant

société

raison, inquiets pour leur avenir. Un article de La Presse datant de 2012 expliquait qu’un journaliste à Radio Canada avait dû attendre onze ans avant de devenir un «permanent». Pas de plan de carrière pour les journalistes, et drôle de perspective d’avenir pour les étudiants. De nouvelles qualifications La question fondamentale est celle du numérique: comment les étudiants en journalisme doivent-ils s’adapter, se préparer, pour espérer être compétitifs sur le marché du 21e siècle? Si l’on accepte les salaires, la précarité, les critiques de la société, il reste encore le problème d’être embauché. Les journalistes et les recruteurs ont exploré en profondeur la question et voici quelques conseils qui ressortent de leurs analyses. Tout d’abord, le journaliste du futur sera polyvalent, et hyperqualifié, mais les professionnels ne sont pas d’accord sur l’intérêt d’une école de journalisme. Selon certains, l’envie d’être journaliste

est plus importante qu’une école, et selon d’autres, les techniques d’écriture et d’investigation que l’on enseigne dans les écoles restent centrales. Ce qui ressort du débat est que le journaliste n’écrira pas seulement un article, il devra être capable d’enregistrer et d’éditer des sons, des vidéos, et des images. Il devra aussi être calé en codage CSS et HTML, et parfaitement maîtriser les réseaux sociaux, pour pouvoir être compétitif dans le marché du numérique. Tous s’accordent sur le fait que le journaliste du futur devra à lui tout seul regrouper plusieurs professions. En plus de cela, il faudra rajouter le style de vie: ne pas compter les heures, être réactif et innovateur, gérer le stress et la compétition, tout en produisant une qualité d’information sous l’œil critique de l’audience. Est-ce trop en demander? Peut-être. Qui peut se prétendre expert en codage, en photographie, en vidéo, en écriture et en reportage? Il semble déjà que les aspirants journalistes n’auront pas le choix. Les mutations sont déjà en cours. x

ASSEMBLÉE GÉNÉRALE L’assemblée générale annuelle de la Société des publications du Daily (SPD), éditeur du McGill Daily et du Délit, se tiendra

le jeudi 31 mars 2016 à 17h30 au Pavillon McConnell de génie, Salle 204 Les membres de la SPD sont cordialement invités.

Aujourd’hui, les étudiants en journalisme sont, non sans

le délit · mardi 15 mars 2016 · delitfrancais.com


Révision du journalisme

À défaut de mourir, l’industrie journalistique demande à faire ses preuves. Yves boju

Le Délit

L

a mort du journalisme, un titre qui marque, non? Vous l’aurez lu et entendu de si nombreuses fois que cela est devenu presque un lieu commun où chacun propose son opinion. Et pourtant cette «mort» est un peu devenue une expression valise, sans que l’on sache trop quelles conceptions nous englobons dans ce terme funèbre. D’un côté, on place la perte des profits de l’industrie du journalisme, de l’autre l’inadaptabilité des journalistes quant à l’évolution de leur profession, et, au milieu, une révision des codes journalistiques avec l’avènement des nouvelles à 140 caractères. Il est évidemment tentant face à ces évolutions-là et tant d’autres d’écrire chacun notre épitaphe de feu le journalisme, cette expérience «brève mais intense». Concrètement, analysons la portée économique du changement de l’industrie, à commencer par la perte des profits mentionnée plus haut. Qui touche-t-elle? Par médias, on entend la globalité des moyens de communications. Étant donnée la largeur du terme, concentrons-nous sur le journalisme et mettons-en marge la télévision et les radios, l’industrie du film et la publicité. Il est vrai que le marché global des journaux est en perte de vitesse. Si l’on se concentre sur la période de 2010 à 2014 par

exemple, les chiffres indiquent un taux d’évolution annuel moyen de -2,1% ou bien une baisse de la valeur globale du marché de 124,2 milliards de dollars en 2010 à 113,9 milliards en 2014. Au Canada, même tendance entre 2009 et 2013: une baisse de la valeur du marché de 1,1% pour arriver à 2,87 milliards en 2013. Mais si l’on se penche sur les sources du problème, cette chute n’est pas due au fait que les Canadiens lisent moins les grands journaux puisque selon le rapport Perspective sur le Loisir Global et les Médias 2013-2017 (Global Entertainment and Media Outlook 2013-2017) publié par PriceWaterhouseCoopers (PwC), près de 70% des Canadiens les lisent régulièrement. La cause serait plutôt une importante chute des revenus publicitaires papier. En effet, tandis que ces derniers s’élevaient à 2,7 milliards de dollars en 2008, ils ont constamment baissé au cours des huit dernières années et devraient atteindre 1,7 milliard de dollars en 2017. Évaluation des forces du marché Au vu de ces évolutions, certaines forces qui guident le marché sont à prendre en compte: tout d’abord, le rapport de force client-fournisseur. Les clients ne disposent pas d’un pouvoir particulièrement important sur l’industrie, celui-ci repose sur la diversification des médias et une sensibilité relative aux évolutions

«Le rapport de force client-fournisseur dépend principalement de la capacité du client à pouvoir substituer un journal à un autre, et de la relative flexibilité des structure de coûts des fournisseurs» des prix des journaux. Du côté des fournisseurs, les prix relativement bas des journaux annulent en partie le pouvoir des clients: quand le prix augmente, le journal restreint sa clientèle, et réduit donc son emprise sur une plus grande part de marché. En revanche, le coût de la substitution du capital est important pour les entreprises déjà implantées dans le marché étant donné la nécessité de s’adapter à de nouveaux modèles commerciaux. À l’instar de l’industrie la qualité des produits affirme la compétitivité hors-prix des entreprises étant donné l’investissement important destiné à la main d’œuvre — les journalistes étant des personnes habituellement diplômées et expérimentées. En somme, le rapport de force client-fournisseur dépend principalement de la capacité du client à pouvoir substituer un journal à un autre, et de la relative flexibilité des structure de coûts des fournisseurs. Ensuite, la menace de la substitution par de nouveaux acteurs. La variante à considérer ici est le modèle de diffusion des nouvelles: en ligne, par papier, ou bien les deux. Si les coûts pour établir une start-up en ligne sont

significativement plus bas que la diffusion papier en termes d’investissement de capital, les conditions du marché peuvent décourager les entrepreneurs et réduisent alors la probabilité de substitution des entreprises déjà établies. En revanche, la montée en force du numérique représente une menace sérieuse pour le modèle d’entreprises typiques du journalisme et ouvre la voie à d’autres secteurs pour se faire une place dans le monde des «news». Bien entendu, le déclin des revenus intensifie la compétition dans ce marché. L’absence de coûts réels pour le client de substituer un journal à son journal habituel participe à cette intensification. Cependant, la diversification des conglomérats qui détiennent les journaux permet en partie d’annuler ces effets et certains d’entre eux arrivent mieux à s’adapter que d’autres. Le géant québécois des médias Quebecor Inc., par exemple, enregistre une évolution de 3,61 milliards de dollars de revenus en 2014 à 3,88 milliards en 2015, soit un taux de croissance annuel environ supérieur à 7%. Le Financial Post reportait mercredi dernier que toutes les branches de la compagnie avaient affiché une croissance positive en glissement annuel au cours du dernier quart financier. Mais il s’agit là du cas isolé d’un conglomérat très diversifié, d’autres comme Postmedia Network Canada Corp. ou bien Torstar Corporation affichent en général des baisses plus ou moins importantes de revenus, qu’il est possible de lier à la diversification de leurs activités. Adaptation à de nouveaux modèles Certains médias établissent pourtant des précédents en matière de renouvellement. La Presse est un exemple de journal qui a réussi sa reconversion numérique. En abandonnant sa version papier en semaine pour se concentrer sur le développement de ses plateformes numériques. Guy Crevier, président et éditeur au journal, expliquait en septembre 2015, après l’annonce de changement de modèle de la part de La Presse, que les revenus principaux des journaux provenaient des abonnements et de la publicité. Selon lui, étant donné les

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chutes de revenus depuis 2000, un changement s’imposait. Dans une entrevue donnée à Radio-Canada le 16 septembre dernier, il annonçait alors que «70% des revenus […] vont venir de LaPresse+». En y ajoutant deux autres données, il concluait que 85% de leurs revenus allaient provenir de leurs plateformes numériques. 2017 se fait donc attendre pour que soient disponibles les déclarations de revenus de La Presse et que l’épreuve soit validée ou non côté financier. Côté satisfaction du client, il est certain que le contenu est travaillé et dépasse au niveau interactif (et contenu aussi sans aucun doute) certaines sources d’informations telles que Vice et autres Buzzfeed qui ont déjà fait leurs preuves en terme de popularité. Dans une réflexion plus large, le cas de La Presse peut donner à penser que le journaliste est adaptable si l’entreprise elle-même s’adapte. Définir le débat La presse en général est en difficulté, c’est un fait indéniable. Cependant, parler de la mort du journalisme est largement exagéré, surtout quand ceux qui appellent à ses funérailles sont les mêmes blogueurs et journalistes citoyens qui tentent de percer dans un nouveau modèle de diffusion de l’information. Mutation oui, mort certainement pas. Les chiffres de MarketLine prédisent d’ailleurs une reprise du marché global des journaux qui atteindrait 117,7 milliards de dollars en 2019, soit 3,3% de plus qu’en 2014. Le journalisme est un service d’intérêt public. Il a pour but d’informer le lecteur afin de lui donner les outils nécessaires à une approche intelligente dans ses choix. Il paraît donc plus probable que l’industrie soit simplement dans une phase de mutation au cours de laquelle les «dinosaures» — les compagnies historiques de l’industrie— laissent place à une nouvelle génération de compagnies plus flexibles ou se reconvertissent elles-mêmes. On peut d’ailleurs observer la même mutation dans l’industrie de la vente au détail où les revenus des géants tel que Walmart ou BestBuy se sont fait peu à peu grignoter par le commerce en ligne. x

société

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Culture articlesculture@delitfrancais.com

Chaque printemps, le Festival International du Film sur l’Art permet de faire rayonner l’art d’ici et d’ailleurs. Le Délit en a recueilli quelques rayons...

Plaisir, gloire et affaires louise kronenberger

Le Délit

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e vendredi 11 mars, à l’Auditorium Maxwell-Cunnings (Musée des beaux-arts de Montréal), était projeté Jeff Koons : Diary of a Seducer. Un documentaire signé Jill Nichols qui nous présente cet artiste très controversé de la fin du 20e siècle, dans le cadre de la 34e édition du FIFA. Le film commence sur un extrait d’un épisode de Popeye, personnage iconique de la culture populaire américaine. Jeff Koons, artiste et homme d’affaires américain, a grandi plongé dans cette «pop culture» de l’après-guerre. La publicité, la télévision, la production de masse font partie intégrante de son environnement et vont grandement déterminer son style. Dans un ordre chronologique, on assiste alors à son enfance, puis ses différentes phases jusqu’à la plus importante: Celebrations (avec le très connu Balloon Dog). Plusieurs entrevues de l’artiste et d’intervenants – comme

l’artiste anglais Damien Hirst – viennent ponctuer le film et une bandeson bien composée (Led Zeppelin, Patti Smith ou Lou Reed) permet également de mieux saisir et illustrer le caractère de Koons. Entre «Readymade» et «Pop Art» L’oeuvre de l’artiste est présentée comme un hybride entre le «Readymade» (objet préfabriqué) de l’artiste dada Marcel Duchamp et de la technique inspirée de la publicité d’Andy Warhol. Les images nous font traverser toutes les étapes de l’évolution de Koons. On remarque que ce qui persiste est la représentation, ou même utilisation, d’objet de tous les jours. Comme Fontaine de Duchamp (un simple urinoir disposé dans une galerie), Koons présente des aspirateurs, des jouets qu’il n’a pas fabriqués lui-même. Des artisans réalisent ses œuvres pour lui. L’artiste devient un patron et n’est plus un homme manuel. L’utilisation d’imagerie populaire (comme Michael Jackson, ou la Panthère Rose) rap-

Le mythe Barthes clayton Lapoire

Le Délit

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oland Barthes: sa vie, son œuvre. Voilà le titre que le documentaire, projeté à la BanQ dans le cadre du FIFA, signé Chantal et Thierry Thomas, aurait pu porter. Les auteurs ont préféré emprunter à Barthes l’une de ses expressions, et le documentaire s’intitule donc «le théâtre du langage». Une composition très simple, qui suit une chronologie très classique: la naissance du Roland Barthes que l’on connaît, ses premières œuvres, des anecdotes de vie, son succès, sa mort (spoiler, il meurt à la fin). Très didactique, le documentaire, on le sent, fait tout pour mettre le spectateur en

pelle Warhol et ses reproductions de célébrités. Filmé lors de la rétrospective de Koons à New York, un visiteur déclare «je me sens vivant». En effet, Koons joue sur l’aspect excitant et séduisant dans son esthétique. Grâce à des techniques de polissage élaborées et coûteuses, il arrive à un résultat très parfait et brillant. Le rendu est clinquant et réveille les sens du spectateur ébloui. L’artiste américain main-

tient également sa réputation de séducteur en réalisant sa série Made In Heaven. Il produit des photos qui le mettent en scène avec son épouse (une star pornographique italienne) dans des positions osées. De quoi nous faire réfléchir sur la limite entre l’art et la pornographie, et la question de l’humain comme objet. Le titre du film annonce bien la couleur. En suivant son histoire et évolution au fur et à mesure de

sa rétrospective, on découvre les différentes facettes de cet artiste séducteur, porté sur l’image, qui essaye de nous attirer par son style aguicheur. Son art a été tout d’abord dénigré par les critiques, puis acclamé par les foules. Jeff Koons: Diary of a Seducer nous permet vraiment de capter l’essence de l’artiste, et mieux comprendre le contexte de ses œuvres affriolantes. Cet artiste et ce film soulèvent quelques questions: la limite entre la vie de tous les jours et l’art, de même que l’aspect commercial de l’art. Chez Koons, l’artiste devient un homme d’affaire. Les images et le montage dynamiques de Jill Nichols nous plongent réellement dans l’univers pétillant et socialement représentatif de Jeff Koons. Le FIFA est une opportunité à ne pas manquer si l’on veut se plonger en profondeur dans l’œuvre de multiples artistes. De plus, ce documentaire sur Koons est un bel hommage pour fêter le centenaire du dadaïsme, et montre son héritage à travers l’histoire de l’art. x

Le documentaire, ironiquement, participe plus de la méthode de l’histoire littéraire que de «l’activité structurale» (Barthes), en se concentrant – malgré la place majeure accordée à ses propres paroles – sur sa personnalité, son «personnage», son «obsession du langage» plutôt que sur ses résultats de recherche. En témoignent les coupures des entrevues, qui laissent voir son humour et sa finesse (rendant le documentaire amusant), mais coupent les phrases qui touchaient droit au sujet de ses recherches. On apprend donc que l’on aime Barthes, mais on n’est pas sûr de savoir pourquoi. x

confiance: il s’agit d’apprendre à connaître Barthes et son importance. On y apprend qu’il aimait le quartier Saint-Germain, qu’il fumait des cigares, qu’il était émotif, ironique, drôle. On ne peut enfin qu’aimer Barthes. Mais aime-t-on l’individu Barthes, comme l’aurait fait le critique SainteBeuve (critique littéraire du 19e siècle qui n’étudiait les œuvres littéraires que par le prisme de la vie des auteurs. Voir le Contre SainteBeuve de M.Proust, ndlr), ou le structuraliste? Le documentaire évite de se mesurer à Barthes et contribue quelque peu au mythe Barthes. Car rappelons-le: l’auteur est désormais sacré en littérature. Un article d’un blog du Monde intitulé… «Briller en société», lui est consacré, qui compile un top 10 des

choses à savoir sur Barthes. Barthes aurait doucement ri. L’auteur des Mythologies est lui-même devenu… un mythe. Et c’est sur ce point précis que le documentaire manque d’audace, certes pour des raisons d’accessibilité. Mais si l’on proclame la mort de l’auteur Barthes, que reste-t-il? Qu’est-ce qu’un signe? Un signifiant? Un signifié? Tout cela reste bien flou, et le mythe Barthes continue sans danger de se balader dans SaintGermain.

1920, le second est déjà connu, déjà riche et couronne son succès avec la publication de Gatsby le Magnifique en 1925.

vains, le documentaire retrace l’évolution de leur relation. Alors que dans les premiers temps, Hemingway se fait corriger par Fitzgerald et demande son soutien pour se faire publier, le rapport s’inverse rapidement. De fait, alors que Fitzgerald tombe dans un alcoolisme profond, Hemingway connaît la célébrité avec ses romans, notamment L’adieu aux armes en 1929. D’une amitié sincère, les deux hommes passent à la détestation, d’abord seulement confiée à leur éditeur commun puis ouverte — surtout après les descriptions dédaigneuses de Fitzgerald par Hemingway dans certains de ses livres. Le documentaire, très détaillé par les lettres et des images d’archives, aurait pu être intéressant et il le fut parfois. Malheureusement, il tombe vite dans la lecture plate des lettres, sans aucune critique,

Fitzgerald et Hemingway, d’encre à encre antoine duranton

Le Délit

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endredi 11 mars, dans le cadre de la 34e édition du FIFA, l’auditorium de la Grande Bibliothèque BanQ a accueilli la projection de Fitzgerald / Hemingway: Une question de taille. Un documentaire signé Claude Ventura sur les relations houleuses de F. Scott Fitzgerald et Ernest Hemingway. Les deux célèbres écrivains américains, peut-être les plus connus du 20e siècle, se sont tout d’abord rencontrés en France, où l’un et l’autre passèrent une large partie de leur existence. Hemingway fit ainsi la connaissance de Fitzgerald lors de vacances passées dans le sud du pays: alors que le premier peine encore à se faire publier et survit difficilement dans le Paris des années

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Culture

À travers une revue détaillée des nombreuses lettres échangées par les deux écri-

«D’une amitié sincère, les deux hommes passent à la détestation» se contentant de commentaires banals dont certains frôlent l’hagiographie de l’écrivain inspiré par les muses. Retraçant chronologiquement, mais très partialement, le parcours des deux écrivains, il peut intéresser celui ou celle qui ne connaît rien aux deux auteurs et qui souhaite quelque chose de plus interactif qu’une simple page Wikipédia. Si vous cherchez une analyse de leur style, passez votre chemin, ce n’était visiblement pas le but du réalisateur Claude Ventura. x Dernière projection le 18 mars à la BAnQ.

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Fragrances d’amours et peintres

Quand deux artistes classiques détonnent à l’auditorium du Musée des Beaux-Arts. marion hunter

Le Délit

Fragonard, Les gammes de l’amour

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e réalisateur Jean-Paul Fargier a conçu un documentaire, avec le témoignage d’historiens de l’art, sur la variété des représentations de l’amour dans l’œuvre du grand artiste classique Jean-Honoré Fragonard. Malgré un succès remarquable auprès de l’académie en peintures historiques, le peintre français s’est aussi attaché à des thèmes plus frivoles dans des décors rococo. Ce sont ces scènes d’amour et de courtoisie qui font le succès de Fragonard auprès de la cour, pour le plaisir des yeux des plus nobles. Jean-Paul Fargier dévoile donc le côté érotique et sensible de peintures qui représentent des adolescentes au regard joueur. Des spécialistes passionnés nous racontent, avec pudeur, des anecdotes sur la vie de cour. L’exploration de la notion de courtoisie mène à un style de peinture plus privé qui nous donne des sources historiques sur la pratique de l’amour au 18e siècle. On s’amuse avec des scènes animées dans les dortoirs où Fragonard représente

avec génie de jeunes adolescentes dénudées qui s’excitent devant des incidents impromptus. Certaines femmes du public rient de nervosité devant des scènes suggestives et des symboliques toujours explicites. On retiendra de ce documentai-

«Sa création est une création de sens» re une morale atypique. C’est dans un esprit de légèreté que l’on comprend que l’art humoristique, moins sérieux, n’est pas une forme basse d’art. Il nous semble presque que le documentaire dévoile un Fragonard qui élève les dessins humoristiques au niveau de la peinture historique et légitime aux yeux de l’Académie française. Le documentaire nous fait réfléchir sur des notions toujours valables concernant le jugement de l’art noble. Derrière des scènes d’amour se cache une technique artistique remarquable. Par une liste précise des amours représentés, Fragonard, Les gammes de l’amour parvient avec succès à expliquer le génie de l’artiste, un libertin rebelle qui jouait avec les limites du contrôle

courtoisie FIFA sexuel. En filmant un rétrospective formelle, Jean-Paul Fargier retrace une période de révolution mue par les pouvoirs de l’amour. Plutôt divertissant. Chagall, peintre de la musique Le documentaire de Mathilde Deschamps-Lotthé retrace le succès d’un peintre moderne franco-russe mordu de musique. Nous sont montrés, entre autres, l’effet de la musique sur Marc Chagall tout autant que l’influence de ce dernier sur les musiciens. Sa création est une création de sens. On entend la musique dans ses peintures, une peinture aux

compositions dissonantes. C’est avec succès que les cinquante-trois minutes d’images nous montrent le travail spectaculaire de Chagall. Quand on regarde ses muraux dans les opéras, il ne manque plus que les danseurs pour remplir l’espace et la musique pour donner du mouvement. Dans des formats extraordinaires, il donne des ambiances mystérieuses aux peintures et au spectacle. Chagall donne vie au ballet et le ballet donne vie aux peintures. La simplicité de ses peintures aux compositions fluides nous donne l’impression de plonger dans un rêve. On retient particulière-

ment le mélange de mélancolie et de gaieté que Chagall transmet. C’est une fusion des sens qui pourrait représenter la sensation d’une personne touchée par la synesthésie, où les couleurs sont associées aux sons et lettres. L’artiste russe raconte: «Je veux que la couleur joue et parle seule.» Son œuvre de contraste émotif est sa signature la plus connue. Mathilde DeschampsLotthé montre à merveille comment les toiles sont efficaces et explique avec attachement le génie du peintre. On regrette cependant le manque de détails plus historiques et de remarques plus académiques sur un artiste qui fut si reconnu durant sa carrière et qui eut tant de succès. En effet, le documentaire balaye des périodes historiques qui furent sans aucun doute des éléments charnières à sa création. On peut tout de même dire que malgré cela, on adore les témoignages, presque innocents, de ses petites filles maintenant grandes, qui se rappellent du processus de production de ces majestueuses œuvres d’art. x Dernière projection le 20 mars au MBAM

cinéma

Au cœur des Assises

L’Hermine: quand le réalisme divise à travers le jeu de Fabrice Luchini. Morgane Jacquet

Le Délit

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éalisé par Chritian Vincent, L’Hermine, est sorti dans les salles de Montréal le 11 mars. Il met en scène l’acteur français Fabrine Luchini dans la peau de Michel Racine, récompensé pour ce rôle par le prix de la meilleure interprétation masculine de la Mostra de Venise 2015. On retrouve aussi l’actrice danoise Sidse Babett Knudsen, notamment connue pour son interprétation de la première ministre danoise dans la série Borgen, également récompensée dans l’Hermine pour son rôle en tant que Ditte Lorensen-Coteret dans la catégorie de la meilleure actrice dans un second rôle aux Césars 2016. L’Hermine surprend avec un scénario original et rare dans le cinéma français: celui d’une séance en cour d’assises et du rapport des jurés face à la justice. Un sujet finalement peu connu du large public, qui associe généralement la justice bien plus avec les séries américaines et les procès théâtraux que ces dernières peignent, qu’avec la réa-

lité d’une audience de cour française. La mise en scène d’un procès de cour d’assises est captivante et très réaliste dans son ensemble. On assiste à presque l’intégralité du procès, qu’il s’agisse des séances d’audiences, avec la succession de témoins et des plaidoiries des avocats, ou des délibérations des membres du jury. L’importance du jury dans les affaires criminelles est mise en avant, présentant notamment des jurés très variés, issus de milieux sociaux différents les uns des autres.

Incontestablement, le film charme par le jeu des acteurs. Fabrice Luchini joue le rôle d’un magistrat redouté et très peu apprécié à la cour d’assises de Saint-Omer, près de Lille. Alors qu’il appelle un par un les jurés pour juger un cas d’homicide, Michel Racine se surprend à appeler parmi ces jurés un amour passé, qu’il n’avait pas revu depuis six ans, Ditte Lorensen-Coteret. Tandis que jusque-là, dur envers son entourage et les accusés qu’il se doit de juger, il restait caché

Jérôme Prébois / Albertine production - Gaumont

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derrière son hermine – la fourrure rouge que porte le Président de la cour d’assises –, l’homme sensible refait surface et va tenter de renouer avec la femme dont il est follement amoureux et qu’il n’avait jamais pensé revoir un jour. Assis dans nos fauteuils, on ressent la tension entre les deux personnages. On intercepte les regards échangés et peu de dialogues sont nécessaires pour palper le malaise, mais aussi l’attachement particulier que Michel Racine éprouve envers Ditte Lorensen-Coteret. Si le scénario et les acteurs rendent le film intéressant et prenant, on ne sort pourtant de la salle que partiellement satisfait, avec la sensation de n’avoir vu qu’une portion de film. Malgré la justesse des scènes qui donne le sentiment de voir beaucoup de choses, le scénario général manque de contenu. En dépit de la précision du procès, rendue possible à travers des témoignages, des arrêts sur images de l’accusé, de la partie civile, ainsi que du public, on regrette une couverture partielle du contenu de ce dernier. Il va dans le détail

sur certains aspects, mais échoue finalement à montrer l’essentiel, notamment le dernier jour de procès et comment le jury se prononce sur la sentence finale. Il en est de même dans le traitement de la relation entre les deux protagonistes. Le film se termine, et on pourrait croire, ou tout du moins espérer, qu’il ne s’agit que d’un entracte.

«Le film charme par le jeu des acteurs»

L’Hermine présente donc un scénario intéressant et prometteur, et on trouve dommage que l’idée n’ait pas été portée jusqu’au bout, en sortant de la séance avec le sentiment que quelque chose de plus complet aurait pu être réalisé. Le film apparait donc paradoxal sur de nombreux aspects: il apporte beaucoup de précision, notamment sur le jeu des acteurs, avec une caméra toujours très proche des personnages et centrée sur leurs visages et expressions corporelles, mais il reste malheureusement vide dans son contenu et ainsi, dans sa globalité. x

Culture

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théÂtre

Du foutre... plein la panse! Un tourbillon cérébral est en prévision à l’Usine C de Montréal. étienne rougier

Q

u’il est désobligeant de voir et d’entendre les immondices du marquis. C’est un orgasme retenu mais triomphant que nous pouvions déclamer au théâtre du Trident de Québec. Amis montréalais, nul besoin de vous flageller, vous pouvez maintenant assister à cette pièce, d’une prestation remarquable. Quills, de Robert Lepage et Jean-Pierre Cloutier est le fruit d’un travail pluridisciplinaire: le texte est à l’origine du texan Doug Wright et a servi de scénario pour le blockbuster hollywoodien Quills, la plume et le sang, film qui a le mérite de poser la question: peut-on américaniser la littérature française? Quoi qu’il en soit, le texte narre les derniers jours de la vie de Sade, interné à l’asile de Charenton, pour diverses affaires de viol, sodomie, torture, orgie, profanation... Mais surtout, pour avoir couché ses histoires sur papier. Jean-Pierre Cloutier repère l’intérêt théâtral de ce texte, qu’il traduit en français et adapte à la mise en scène. Ce dont se chargera Robert Lepage qui interprète brillamment le marquis de Sade. Tout ceci

donne donc à voir et à entendre une pièce qui allie littérature, art dramatique et histoire. Imaginez-vous à l’époque triomphante des Belles Lettres, dans les plus hautes sphères de l’aristocratie française, un enfant né d’une des plus anciennes maisons de Provence. Il grandit dans la décadence de la monarchie absolue et dans l’émancipation intellectuelle des Lumières. Chez ses parents entre cour de Versailles et hôtels parisiens, puis chez son oncle dans un monastère en Auvergne, il est élevé avec la conviction d’appartenir à une espèce supérieure, ce qui affirmera la légitimité de sa despote. Le marquis, adulte, possède ainsi trois armes: son esprit diabolique, sa verge et la plus dangereuse, sa plume. Principes subversifs Robert Lepage joue un marquis en avance sur son temps, qui a compris les enjeux de sa société, les viles intentions de ses contemporains, la faiblesse morale du monde ecclésiastique. Il joue la liberté, se retrouvant symboliquement nu sur scène,

dépouillé de tout confort et de l’écriture. Ses derniers jours vont decrescendo vers l’élimination et la privation de toutes les libertés «humaines» et animales. Plus les moyens d’expression sont réduits, plus Sade use de ses fourberies pour écrire tantôt avec ses excréments, tantôt avec son propre sang. Et si les écrits ne sont pas troublants, leur symbolique subtile est effrayante. Mais est-il encore possible de choquer au 21e siècle? Progressivement, le récit devant nous, très justement interprété par Jean-Pierre Cloutier (l’abbé) et Pierre-Olivier Grondin (le directeur) nous interroge sur le religieux et le politique dans l’encadrement des mœurs et les répressions de l’Ancien Régime. Mais cette question n’est pas arriérée, puisqu’elle s’applique très bien à nos sociétés. Cette pièce, avec un certain recul, bouleverse nos conceptions de la morale et du juste entendement, réinterroge notre époque démocratique de la présupposée liberté, réinterroge également la folie. Des frontières des relations humaines à la signification de la justice, Quills est la cause

«Mais est-il encore possible de choquer au 21e siècle?»

Magdalena Morales

de moult réflexions psychiques. Qui forme l’institution? La verge ou la soutane? Le sceptre ou la plume? Si la nature est dans toute chose, la nature est-elle dans le crayon? Le travail de Robert Lepage et Jean-Pierre Cloutier offre diverses masturbations: intellec-

tuelles, physiques (sur le plateau évidemment) et sensorielles. En effet vous aurez le droit à une scène hautement sexuelle, mystique et profane voire psychédélique et complètement délirante... Une pièce époustouflante, sans parler du décor ex-machina, créé par Lepage. x

Opini-art-re

C’est un sourire qui exprime cette idée qu’ils se font de la chance qu’ils ont. Et quand je hausse les épaules et je leur dis qu’on se suicide plus en Occident que partout ailleurs, ils me répondent Hey, why do you say that. It makes me a little bit uncomfortable when you say that.*

—Jules Tomi

*Hé, pourquoi tu dis ça. Ça me rend un peu mal à l’aise quand tu dis ça.

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Culture

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théÂtre

S’interroger gentiment

Un animal (mort) nous guide vers une douce transformation. part, dépendant de l’Autre pour s’aboutir. La mort dans ce conte théâtralisé devient alors une étape dans l’accomplissement de soi. C’est une opportunité de rédemption, une renaissance qui viendrait toujours avec le regard de l’autre.

margaux sporrer

L

e metteur en scène Félix Antoine Boutin revient au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui du 8 au 26 mars avec Un animal (mort). La pièce, inspirée d’un conte indochinois, invite à une réflexion sur ce que nous étions, ce que nous sommes et ce que nous devenons. On entre dans une petite salle tamisée à l’ambiance intime. Les lumières s’éteignent et le premier acte commence, avec vous. C’est un moment que l’on vit comme un rêve, avec des personnages qui nous parlent et nous interrogent, le 4e mur n’existant plus. C’est une histoire simple mais dont découle beaucoup de réflexion et de poésie. Le jeu est délicat, touchant et comique et rend la pièce rafraîchissante. On assiste à la rencontre de deux amants, la naissance de leur amour, mais aussi au doute qui naît entre eux dû à une tierce personne.

L’illusion d’un soi isolé

nans bortuzzo Les générations se confondent ensuite et c’est un discours sur la transmission qui conclut le spectacle. L’Homme caméléon La beauté de cette pièce et sa poésie résident dans sa capacité à interroger le concept de relation entre deux personnes. Il semblerait que nous ne soyons

chez nous nulle part, même avec soi, jusqu’à ce que nous tombions amoureux. L’autre devient alors miroir de soi et c’est en lui que l’on se rencontre. Felix Antoine Boutin nous pose comme immigrant de nulle

Dans un deuxième temps, Un animal (mort) aborde l’héritage que nous laissons derrière nous aux prochaines générations. Le plus frappant est la tendresse qui se dégage du discours entre les personnages. Celle-ci aide à soutenir l’idée que nous sommes une des parts d’un patrimoine qui appartient à tous. Une histoire qui se partage, qui se transmet et qui ne peut être contenue par nos corps respectifs. Ce n’est pas notre vie que l’on vit, mais la vie. «La vie passe en nous

«L’autre devient alors miroir de soi et c’est en lui que l’on se rencontre»

comme le vent dans le bleu du ciel», dit l’un des acteurs pour peindre l’idée. L’esthétique du dernier spectacle de Félix Antoine Boutin, ainsi que les thèmes abordés font de Un animal (mort), une œuvre de qualité. Des questions sont levées mais avec humour et poésie et c’est ce qui fait le charme de cette création. Finalement, le discours qu’entretiennent les comédiens avec les spectateurs pose la question de la relation entre le public insatiable et les acteurs qui prennent vie grâce à celui-ci. Ils naissent car nous les faisons naître. La pièce rappelle ainsi que l’on est tous plus que le rôle que l’on nous donne. Il est alors possible de se retrouver à l’infini car la mort dans la fable devient une occasion de renaître toujours meilleur et plus proche de soi. x

Un animal (mort)

Mise en scène de Félix Antoine Boutin Centre du Théâtre d’Aujourd’hui Du 8 au 26 Mars

musique

Lamento pour un monde mesuré La mélancolie d’Andreas Staier s’est accordée la salle Bourgie. philippe robichaud

Le Délit

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ans dire un mot, Andreas Staier est entré sur scène et s’est mis à interpréter la Suite XXX en la mineur de Johann Jacob Froberger. Quelques neuf minutes plus tard, la modeste cadence finale de la Gigue est jouée: l’instrumentiste laisse ses doigts dans les sillons de la tierce picarde qui clôt la pièce. Le clavecin est accordé à 415hz: il s’agit d’un la d’une autre époque dont le son s’éteint en se mêlant au bruit des sirènes du centre-ville montréalais. La poitrine de Staier se soulève lentement, ses yeux se ferment le temps d’un instant; il soupire. Il se dit sans doute qu’il est temps de se lever pour aller parler au public, rite obligé dans ces concerts qui ne vont pas de soi. Après plus de cinquante enregistrements acclamés, des tournées internationales, de nombreuses invitations de la BBC, Carnegie Hall et nombre de festivals prestigieux, la réputation du claveciniste de Göttingen n’est plus à faire; ainsi ce concert n’avait-il pas la fébrilité de ceux où les interprètes pensent devoir se prouver. Tout au contraire, le programme se lit comme le florilège intime d’un magister musicae qui n’a rien à faire d’une interprétation de greatest

hits, de flaflas tout-prêts à s’acoquiner aux appétits d’un public en mal d’orchestres symphoniques sur des patinoires. Ouvert par une ellipse, le concert porte le titre de l’album dont il est issu, «… pour passer la mélancolie» (Harmonia Mundi, 2012). D’ailleurs, à sa sortie, les voix de la presse internationale s’étaient unies en dithyrambe encomiastique à son égard. Douce ironie pour ce geste artistique de renoncement au monde: même les commentaires d’acheteurs sur Amazon sont nombreux et unanimement de cinq étoiles sur cinq, d’où l’on pourrait sans doute conjecturer que le disque s’est malgré tout bien vendu. Nos oreilles s’accordent aisément aux jugements des critiques: c’est un album d’une rare qualité. Une sélection de pièces de compositeurs du 17e siècle se resserre autour de la mélancolie, vécue comme conscience accrue de l’éphémérité de toute chose. Le facteur de clavecins anversois Andreas Ruckers – le même dont les plans ont été suivis pour construire l’instrument du concert — n’inscrivait-il pas Sic transit gloria mundi sur le couteau au-dessus de ses claviers? Staier le remarque et donne raison à la locution en faisant miroiter la gloire passée de noms oubliés du grand public: Froberger, D’Anglebert,

le délit · mardi 15 mars 2016 · delitfrancais.com

Fischer, Couperin (non pas François «Le Grand», mais son oncle, Louis), Clérambault et Muffat (encore là, pas Gottlieb, plus connu, mais son père, Georg). Tout musicien des rois ne risquet-il pas d’être un jour interprété qu’en salles à moitié vides par des virtuoses éplorés et passéistes? C’est ce à quoi ressemblait le concert de jeudi. Un manque d’enthousiasme de la part du public

Les musiciens des rois, interprétés aujourd’hui en salles désertiques par des virtuoses passéistes montréalais a doté la salle Bourgie d’effectifs habituellement réservés à des récitals de fin de baccalauréat, non à des légendes vivantes qui jouent souvent à guichets fermés. Staier ne se sentait manifestement

luce hyver

pas en compagnie d’honnêtes gens: gêné, bafouillant, il peinait à expliquer des rudiments d’histoire musicale d’un ton qu’on devine essayer de cacher son didactisme. Du parterre, il est possible d’entendre des gens qui s’impatientent alors qu’il développe posément l’importance de la tradition du tombeau et de la plainte musicales, «trous ou arrêts du répertoire». Peut-être est-ce cela qui a déconcentré le maître au point de lui faire introduire, dans certaines pièces, des fausses notes; l’une de celles-ci était même ponctuée d’une douloureuse grimace. Quoi qu’il en soit de ces désarçonnements passagers, Staier a été égal à lui-même: le Tombeau de M. de Blancrocher de Couperin valait le déplacement pour lui seul. Les traits de gamme généreux de l’Uranie de Fischer, la solennelle Allemande sur jeu de nasal de la Suite en do mineur de Clérambault, la sensibilité de l’interprétation des préludes non mesurés… tous s’impriment dans la mémoire de l’auditeur comme tant de délices goûtés au concert, mais aussi, surtout, en souvenir, longtemps après s’être retiré du hall. x

Culture

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Entrevue

L’Impact refait le printemps

Entrevue exclusive avec le capitaine de l’Impact de Montréal Patrice Bernier.

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surtout à ce niveau-là, ou chez les jeunes. C'est la meilleure transition pour tranquillement réaliser que tu ne joues plus. Si tu arrêtes d'un coup, c'est drastique et beaucoup de joueurs le regrette. J'aimerais transmettre aux jeunes l'expérience que j'ai gagnée. Le soccer, c'est mon école (rires)!

e printemps bleu-blanc-noir est bel et bien là (p.3)! L’Impact a gagné ses deux premiers matchs, confirmant par la même occasion l’excellence et la cohésion de ses joueurs. Au pas de course, Patrice Bernier, le capitaine du Onze montréalais s’est joint à nous pour nous parler de cette équipe qui n’a pas fini de faire rêver ses supporteurs!

LD: Si tu devais mettre une chanson pour motiver le vestiaire, tu mettrais quoi? PB: C'est difficile. Là, t'as Didier qui met ses chansons à lui, du zouk, de la musique africaine, entraînante. Je ne sais pas si tout le monde aime (rires), mais c'est entraînant. Pour motiver le groupe, je ne sais pas. On est un groupe très calme, mais pas très flyé (rires)!

Le Délit (LD): C’était bien l’entraînement? Patrice Bernier (PB): Oui, c’était bien! Je suis blessé donc je m’entraîne tout seul. Par contre la guérison avance bien. Ce n’est pas toujours évident d'être blessé quand tu es athlète mais je vais jouer cette saison! LD: Ton rôle en ce moment au sein de l'équipe est donc moral… PB: En quelque sorte oui, mais quand tu es à l'écart, tu es à l'écart! En tant que capitaine j'essaye de garder le contact avec les joueurs, mais c'est sûr que je suis moins actif. Quand tu n'es pas sur le terrain, ce n'est pas la même chose. LD: Puisque tu es blessé, tu n’as pas pu suivre ton équipe à l’étranger, est-ce que tu as suivi les exploits de tes coéquipiers? PB: Oui, comme tout le monde, depuis les estrades et à la télé (rires)! C'est bien, on fait un bon début de saison, mais la saison est encore longue, il ne faut pas s'emballer non plus. Il y a des hauts et des bas. On se souvient de 2013, on avait très bien commencé et on n'a pas fini en top forme. Au moins la confiance est là, on est optimistes pour la saison à venir.

«J’aimerais transmettre aux jeunes l’expérience que j’ai gagnée. Le soccer, c’est mon école» LD: Quelles sont les objectifs pour cette saison? PB: L'objectif c'est de faire les séries, c'est sûr! On l'a fait deux fois en quatre ans et la réalité de cette ligue c'est que les plus gros clubs veulent faire les séries chaque année, sinon c'est la crise. On veut devenir un club comme ça. Et une fois que tu es en série, tout est possible! On a l'expérience d'avoir fait ça l'année passée, on arrive avec ça en poche. L'objectif c'est de finir dans les deux-trois premiers de notre association pour avoir l'avantage à domicile pour la suite. LD: Beaucoup d'analystes disent que vous pouvez faire quelque chose de grand cette année. Est-ce que ça ajoute une pression supplémentaire? PB: Je ne m'intéresse pas à ce que disent les analystes. En 2013, ça a pris deux mois pour qu'on nous donne du cré-

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entrevue

Impact de Montréal dit. Aujourd'hui, on nous le donne plus tôt parce que ça va bien, mais il ne faut pas s'emballer! On est serein, on veut faire quelque chose de spécial. Après, c'est vrai qu'il y a une pression supplémentaire parce qu'on a bien joué l'année passée. Il faut utiliser cette pression pour rester performants. Après deux bons matchs, tout le monde nous attend! LD: Est-ce qu'il y a un rival à surveiller cette saison? PB: Il y a toujours des équipes performantes, je pense au New York Red Bulls qu'on a battus cette fin de semaine. Il y a beaucoup de bonnes équipes dans l'association de l'Est, qui ont pris du volume. Toronto était bon l'année passée, ils se sont encore renforcés cette saison. Et puis c'est sûr que ce sont des rivaux, ils sont juste à côté. Le but c'est d'être dans les premiers, on verra après une dizaine de matchs, c'est la constance qui va déterminer; qui va aller loin! LD: Le point positif du début de saison — deux victoires contre deux bonnes équipes — c'est que l’Impact a gagné sans Didier Drogba, considéré comme le talisman de l'équipe l'année passée… PB: Oui c'est sûr, même si on était déjà une équipe l'année passée, avec Didier on a pris une autre dimension, par ce qu'il apporte sur le terrain: le facteur intimidation, son expérience et sa personnalité entraînante! C'est un défi pour ceux qui jouent: Dominic Oduro marque des buts, Nacho (Piatti, ndlr) a retrouvé son niveau de 2014. La saison est longue et une équipe qui a plusieurs joueurs performants pourra maintenir une cadence positive. C'est sûr que l'année dernière, pendant deux mois, Didier a marqué beaucoup de buts et a maintenu cette vague-là. Il nous reste 32 matchs, c'est bien de voir Nacho, Harry Shipp, (Lucas, ndlr) Ontivero. LD: Tu es le seul joueur de l'équipe à avoir connu l'Impact avant la Ligue

Majeure. Qu'est-ce que ça te fait de porter cet héritage? PB: C'est vrai, je suis le plus vieux, ça fait huit ans que je suis au club (rires)! C'est spécial de voir où on est arrivés aujourd'hui, regardez les banderoles. Il y a deux clubs de supporteurs, les Ultras et le groupe 1642, et on voit l'engouement qu'on crée dans la ville, le stade est plein, j'ai joué avec Didier Drogba, Alessandro Nesta, Marco di Vaio. En tant que Montréalais, c'est bien. Jamais je n’aurais pensé — sincèrement — que le club serait dans la MLS (championnat américain de soccer, ndlr) et à ce niveau-là! Le club a fait des grands pas, c'est bien pour tous les fans de soccer dans la ville. C'est comme voir ton petit frère grandir et réaliser qu'il est très bon! LD: On parle d'héritage, et justement l'entraîneur-chef Mauro Biello a un historique avec l'Impact, il a été joueur au club pendant plus de quinze ans. Qu'est-ce qu'il apporte dans le vestiaire? PB: Mauro a remis les choses en route. On avait été bons en 2012-2013, puis on s'est perdus en 2014. On ne savait plus qui on était. Il a proposé une façon de jouer qui était propre à nous autres, aux joueurs que le club a repêchés. Le staff de l'académie fait aussi un bon travail: enseigner aux jeunes les principes du club pour avoir une corrélation quand ils arrivent chez les pros. Je suis content pour Mauro, il a travaillé fort ces quatre dernières années comme assistant, et aujourd'hui, les résultats qu'on a prouvent que quelqu'un d'ici peut être bon sur le terrain et en tant qu'entraîneur. Ce qu'il a apporté c'est des certitudes, de la confiance, de la sérénité dans ce qu'on fait, et puis une identité. On a des bons joueurs, et c'est facile d'avoir des bons joueurs, c'est autre chose de bien jouer en équipe. Le but c'est qu'il puisse être là longtemps. LD: Tu as 36 ans, est-ce que tu as pensé à ta reconversion? PB: Oui, je sais déjà ce que je vais faire. J'aimerais ça, rester sur le terrain, coacher,

LD: Et toi, une chanson qui te motiverait avant l'entraînement? PB: Dernièrement, la chanson que j'aime bien, même si c'est pas nouveau, c'est I'm back (Numéro 1, ndlr) de Sans Pression. C'est un groupe d'ici, de Montréal! Et puis ils ont des racines haïtiennes. Les paroles sont inspirantes, ça me motive! Sinon vous écoutez Empire? Il y a une chanson qui s'appelle Powerful, avec Alicia Keys, qui est excellente!

«On est serein, on veut faire quelque chose de spécial» LD: Cet été, c'est l'Euro 2016. Prédictions? PB: La France, car ils jouent chez eux! Quand tu es pays hôte, tu as un avantage. J'aimerais bien que la Belgique fasse quelque chose, avec la génération qu'ils ont! Ça serait bien pour Laurent (Ciman, défenseur belge de l'Impact, ndlr). Mais ça peut faire comme le Portugal de la génération de Luis Figo et Rui Costa, qui n'a rien gagné. Les Allemands et les Espagnols sont toujours à redouter. Mais ça va être intéressant, il y a beaucoup d'équipes pour qui ce sera le premier Euro! LD: Tu vas regarder? PB: Oui, c'est sûr. Je regarde tous les tournois, je ne rate jamais une opportunité de regarder du foot de haut niveau (rires)!

En rafale Ligue des Champions? Barça MLS? L’Impat de Montréal Didier Drogba? Gagnant Les partisants de l’Impact? L’âme L’académie? Le futur Montréal? Chez nous

Propos recueillis par

Ikram mecheri, baptiste rinner et Louis-philippe trozzo le délit · mardi 15 mars· delitfrancais.com


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