le délit delitfrancais.com
Leaker les déserteurs > 4 Une journée d’Omar Khadr > 5 Un ver d’oreille irrésistible à l’Espace Libre > 11 Denis Gagnon fait son entrée au Musée > 13 Publié par la société des publications du Daily, une association étudiante de l’Université McGill.
Les portes du temple s’ouvrent à vous pages 8&9
Le mardi 2 novembre 2010 - Volume 100 Numéro 8, le seul journal francophone de l’Université McGill.
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Référendum d’automne 2010 Campagne électorale : du 2 au 8 novembre Période de scrutin : du 5 au 11 novembre Questions référendaires : Question référendaire sur le renouvellement des frais exigés par SACOMSS Êtes-vous d’accord pour renouveler les frais de 0,75$ par session (pour les étudiants à temps plein et à temps partiel) pour financer le Centre d’aide pour les victimes d’agressions sexuelles de l’Association Étudiante de McGill (SACOMSS) à partir de l’automne 2010 jusqu’à l’hiver 2013? Question référendaire sur le Comité de Fonds de charité de l’AÉUM Êtes-vous d’accord pour payer des frais de 0,50$ (désinscrivables) par session pour financer un fonds de l’AÉUM qui sera distribué aux pays frappés par les désastres naturels, et pour la création d’un comité de charité de l’AÉUM qui supervisera le Fonds et qui organisera des événements de charité à McGill (la structure spécifique de ce comité et les détails concernant les événements sont disponibles au www.votecharitycomittee.tk)?
Questions plébicitaires : Question plébicitaire sur l’introduction d’un représentant de la Faculté d’Arts et Sciences au Conseil législatif de l’AÉUM Êtes-vous d’accord pour que l’AÉUM repense sa constitution afin de permettre à un conseiller de la Faculté d’Arts et Sciences de siéger au Conseil législatif?
Consultez le texte intégral de chaque question sur ssmu.mcgill.ca/elections
Des bureaux de vote seront ouverts les 5 et 9 novembre, dans le couloir du pavillon Leacock. D’autres informations concernant les dates et emplacements des bureaux de vote seront diffusées prochainement par courriel et sur ssmu.mcgill.ca/elections Pour toute question, contactez Élections McGill à elections@ssmu.mcgill.ca
Nouvelles nouvelles@delitfrancais.com
BILLET
Ennui ou apathie?
Mai 68 est loin derrière le quadrilatère McTavish, Penfield, Peel et Sherbrooke. Emma Ailinn Hautecoeur Le Délit
L
’amertume des étudiants face à l’utilité de l’assemblée générale ne date pas d’hier. “Je ne suis pas sûr de ce que l’Assemblée peut donner, je ne peux pas toucher à la constitution, je ne peux licencier personne et je ne peux pas toucher aux finances,” sont les premiers mots qui apparaissent en haut du document des résultats des Assemblées de 2000 à 2009. Parle-t-on d’apathie en général ou d’un sentiment d’impuissance partagé par tous les étudiants? N’ayant pas de liens avec valeurs anglo-saxonnes, les AG
sont chose courante au Québec. Comment font les UQÀMiens? Est-ce dans leur sang, tout comme les français, de faire grève, porter le carré rouge et pousser des gueulantes? Heureusement, l’assemblée d’hiver était inclusive d’une question qui permettait aux animosités étudiantes de s’épanouir dans la tribune. Entre les lignes de la motion sur la création d’un comité de responsabilité sociale d’entreprise, la vraie question débattue était de savoir si les entreprises pro-israéliennes seraient admises. Cet automne, une question a provoqué le rire (jaune) de la petite centaine présente: «La prochaine fois, pourrons-nous nous assu-
APPEL DE CANDIDATURES La Société des publications du Daily, éditeur du Délit et du McGill Daily, est à la recherche de candidat(e)s pour combler
plusieurs postes étudiants sur son Conseil d’administration. Les candidat(e)s doivent être étudiant(e)s à McGill, inscrit(e)s à la prochaine session d’hiver et disponibles pour siéger au Conseil d’administration jusqu’au 30 avril 2011. Les membres du Conseil se réunissent au moins une fois par mois pour discuter de la gestion des journaux et prendre des décisions administratives importantes. Les candidat(e)s doivent envoyer leur curriculum vitae ainsi qu’une lettre d’intention d’au plus 500 mots à chair@dailypublications.org, au plus tard le lundi 8 novembre. Contactez-nous pour plus d’informations. xle délit · le mardi 2 novembre 2010 · delitfrancais.com
rer d’inclure une question sur le Moyen Orient pour ne pas avoir à s’inquiéter du quorum?». Cet automne, les résolutionsblagues se prétendaient le nouveau moyen de pression devant la sourde-oreille de l’administration. Il est clair qu’une recrudescence des moyens dits «de protestation» sur le campus contraste avec les centaines de chaises vides à l’Assemblée Générale. L’auteur de la résolution à l’origine de l’apellation «SSTEIRBBPPUSAMC», devant remplacer «AÉUM» dans toutes les communications, a menacé Le Délit d’humiliation publique dans leur list-serve, si le journal n’utilisait pas l’acronyme. Et ce, bien que l’association étudiante n’ait toujours pas commandé la traduction de son nouveau nom. Il semble aussi y avoir certaines tensions au sein de l’association elle même, comme en témoigne un membre proche du SSTEIRBBPPUSAMC, qui maintient que ces motions dérisoires contribuent à discréditer l’AG. Eli Freedman se dit déçu d’avoir présenté une résolution –et qu’elle soit passée–, mais que l’association étudiante n’ait pas agit en conséquence par la suite traduit un manque de responsabilité face au vote étudiant. Il pense que si les étudiants s’intéressaient vraiment à la politique étudiante, il n’aurait pas eu besoin de présenter cette motion. Comment combattre l’apathie étudiante? Il «aimerait connaître la réponse» et va tenter de le faire en présentant, avec le sénateur Tyler Lawson, «une motion qui va décider ou non si nous devrions tenter de battre le record Guinness du plus gros Samosa, la collation étudiante par excellence! Peut-être que cette blague permettra à l’effort de protestation de se réaliser». Il semble pourtant permis de douter du lien entre un record de nourriture géante et le manque d’engagement généralisé. Sur un autre front, les étudiants qui ne profitent pas d’un «statut politique» essaient de se mobiliser à l’exemple de Mai 68. Jeremy Bunyaner pense que l’AG est un bon moyen d’expression mais que l’ordre du jour semble de plus en plus exclusif aux affai-
res de l’AÉUM. Il fait partie du mouvement étudiant Mobilization McGill et relate des difficultés encourues par ce groupe. Il est assez délicat de déterminer les sphères de mécontentement des étudiants de McGill, «parce qu’il est difficile pour la plupart des gens de voir grand. Certaines personnes pensent que nous nous concentrons trop sur la fermeture du Café, mais quand nous essayons de rallier les gens autour de plus vastes problèmes, on nous demande comment cela aidera le Architecture Café.» À son avis, l’apathie est effectivement un phénomène mcgillois. Quand Mobilization Mcgill est allé à Concordia par solidarité pour leurs confrères protestataires, ils ont senti beaucoup plus d’«acti-
visme énergétique qu’à McGill». Jeremy pense que c’est à cause de la charge de travail et de la compétition académique constamment ressentie par les étudiants de McGill. Quelle que soit la source du manque d’engagement sur notre campus, il semble urgent de remédier à ce mal par sa propre solution; comme beaucoup le murmurent dans les couloirs des quartiers généraux du SSTEIRBBPPUSAMC, il est temps de débattre ouvertement et d’arriver à un consensus sur la pertinence de l’AG, pour que le malaise s’évapore. x Avez-vous réponse à la question? Répondez sur delitfrancais.com
La perte de corum était chronique à la dernière assemblée. Hannah Palmer / Le Délit
Nouvelles
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Qu’est-ce que Wikileaks? Alexandre Breton Le Délit
W
ikileaks, cette organisation, qui est aussi détestée au Pentagone et dans les pays engagés en Afghanistan que les ennemis talibans, est assez mystérieuse dans l’opinion publique qu’une mise au point de l’organisation s’impose. Wikileaks, organisation à but non lucratif, dévoile depuis quelques mois déjà des informations ultra confidentielles sur les mis-
sions en Afghanistan et en Irak qui dressent un portrait peu reluisant des différentes armées des pays engagés dans ces missions. En effet, Wikileaks se spécialise dans la publication de fuites d’informations gardées secrètes par divers organismes gouvernementaux ou privés. L’organisation connue à travers le monde garde ses collaborateurs et ses créateurs très secrets; ceux-ci n’ont jamais pu être formellement identifiés. Aujourd’hui, Wikileaks, représenté par l’Australien Julian Assange, est basé sur un réseau
important de journalistes, d’informaticiens et d’avocats volontaires. Le site Internet de Wikileaks a été mis en ligne en janvier 2007 et, depuis ce temps, les autorités internationales n’ont pas pu mettre fin aux publications. Depuis ce temps, et selon l’organisme Wikileaks, «la publication [d’informations] augmente la transparence, et la transparence crée une meilleure société pour tous. Une plus grande vigilance [des médias] mène à moins de corruption et à des démocraties
plus fortes.» Certains, comme les État-Majors des pays impliqués dans les fuites de Wikileaks, nous préviennent que cette approche met en péril la sécurité des troupes présentes en Irak et en Afghanistan. L’organisme Wikileaks met l’accent sur une protection «sans faille» de ses sources pour recueillir des informations de dénonciateurs anonymes. Les informations sont stockées sur des serveurs éparpillés partout dans le monde et principalement en Suède (en raison des lois favora-
bles du pays). L’organisation publie ensuite ces informations sur Internet et en informe les médias traditionnels. Wikileaks s’est surtout fait connaître du grand public cette année avec la mise en ligne d’une vidéo montrant une bavure de l’aviation américaine en Irak, puis avec la publication de 92 000 documents confidentiels de l’armée américaine sur la guerre en Afghanistan. Le 22 octobre, le groupe a également publié près de 400 000 documents classés secrets concernant la guerre en Irak. x
POLITIQUE FÉDÉRALE
Le déserteur, écrit par Jason Kenney Emma Ailinn Hautecoeur Le Délit
B
ien que le Canada ait refusé de participer à la guerre en Irak, il contribue aujourd’hui indirectement à l’effort militaire américain en refusant d’accepter les demandes d’asile des déserteurs américains. Un bulletin opérationnel (B.O.) commandé par le ministre de la citoyenneté, de l’immigration et du multiculturalisme, Jason Kenney en juillet dernier, vise précisément ce groupe de «criminels». Le demi million de témoignages révélateurs des atrocités de la guerre en Irak, lâché dans le cyberespace par le site Wikileaks a donné un souffle de vie à la Campagne d’appui aux «résistants à la guerre en Irak», ces soldats qui refusent de combattre. Selon un sondage Angus Reid de 2008, l’opinion publique à travers toutes les provinces et les couleurs partisanes, supporte aussi cette cause. Et curieusement, les Conservateurs ont essayé de détourner l’attention de cette politique controversée en annonçant, quatre heures après l’exposition des documents officiels par Wikileaks, que le Canada aiderait 8600 réfugiés irakiens de plus à se réinstaller. Michelle Robidoux, porte-parole de la Campagne d’appui aux résistants de guerre, dénonce l’ironie de ces mesures.
4 Nouvelles
Le Délit (LD): Comment l’initiative a-t-elle été lancée? Michelle Robidoux (MR): La campagne de soutien aux soldats qui refusent la guerre a commencé en 2004, quand le premier soldat américain qui a décidé de ne pas combattre en Irak est venu demander asile au Canada. Depuis lors, nous sommes venus en aide à près de cinquante militaires. LD: Les choses étaient-elles différentes en 2004? MR: Oui, dans le sens où c’était encore tout nouveau. En 2004, il n’y avait qu’une poignée de soldats refusant la guerre qui venaient ici: Jeremy Hinzman et quelques uns de ses compatriotes, puis bien d’autres encore les ont rejoints. C’était à la fois dû au déroulement de la guerre et à la prise de conscience des Américains que le Canada acceptait traditionnellement les objecteurs de conscience. Mais depuis, les Conservateurs ont été élus et ils sont farouchement opposés à ce que les soldats refusant la guerre puissent rester. Sous le gouvernement libéral, on avait du mal à savoir de quoi il retournerait. On a commencé à faire du lobbying auprès des Libéraux en 2004-2005. C’est un long processus, mais alors que celui-ci commençait à porter ses fruits, les Conservateurs
avaient gagné les élections. Depuis lors, ils ont fait entendre très clairement leur opposition aux soldats refusant la guerre. Ils sont allés jusqu’à intervenir assez directement dans le processus de demande d’aide humanitaire, qui devrait pourtant être impartial. LD: Le taux d’acceptation des demandes d’asile était-il supérieur avant la publication du Bulletin Opérationnel? MR: Cela a été un combat dès le début. Jeremy Hinzman a été le premier à venir; il a fait une demande pour le statut de réfugié, avant d’être débouté. Il a fait appel auprès de la Cour fédérale et a porté l’affaire jusque devant la Cour suprême. Quand celle-ci a refusé de d’y donner suite, la campagne politique a pris le relais. Ils ont dû faire face à plusieurs difficultés, notamment l’interdiction qui leur a été faite de parler de la guerre en Irak pendant les auditions. On le leur avait clairement signifié dès les premières procédures, ce qui a beaucoup compliqué notre travail. Quelques semaines avant la publication du BO, la Cour d’appel fédérale avait arrêté que lorsqu’un soldat américain refusant la guerre faisait une demande d’assistance humanitaire et compassionnelle, l’agent d’immigration canadien devait
prendre en considération son opinion sincère sur la guerre en Irak, ce qui n’avait pas été le cas pour Jeremy Hinzman. La Cour a jugé à l’unanimité qu’il devrait être autorisé à faire une nouvelle demande. Nous pensons que c’est une décision majeure. LD: Quelle est la procédure habituelle pour le traitement des demandes d’asile des soldats refusant la guerre? MR: Chaque procédure devrait être examinée individuellement sur la base de son mérite propre. Auparavant, il n’avait jamais été question de mettre à part ces militaires sur la seule base de leur crime de désertion. Pourtant M. Kenney a déclaré que la désertion était un crime aux États-Unis et que donc ces gens étaient des criminels [au Canada]. On remarquera combien ce B.O. devient ironique à l’heure où plus de 400 000 documents de guerre classés top secrets ont été publiés sur Wikileaks, détaillant très clairement que la façon dont la guerre est menée, viole toutes les lois internationales imaginables, la convention de Genève, que sais-je encore. Pour la plupart des personnes de bon sens, il y a quelque chose de fondamentalement répréhensible dans le fait de traiter ainsi des gens qui ont déjà beaucoup risqué, il y a
quelque chose de répréhensible dans la politique du gouvernement canadien. LD: Qu’est ce qui vous fait penser qu’il y a un lien entre l’affaire Wikileaks et l’annonce par le ministre Kenney que le Canada allait étendre les mesures d’aide aux réfugiés irakiens? Est-ce une coïncidence de calendrier ou est-ce parce que ça entrait en conflit avec la politique d’immigration et d’accueil des réfugiés menée par le gouvernement Conservateur depuis deux ans? MR: Si tous les militaires avaient fait la même chose que ces soldats qui refusent la guerre, il n’y aurait eut aucun réfugié Irakien à accueillir. Ces soldats ont dit qu’ils refusaient de participer à une entreprise qui avait jeté 2 millions de personnes sur les routes. Comment pouvezvous vous dire sincère quand d’un côté vous accueillez des réfugiés irakiens et que de l’autre vous dites aux soldats qui refusent de participer à cette guerre qu’ils sont des criminels. Il y a dans cette position une malhonnêteté morale que je trouve profondément choquante. x Propos recueillis par Emma Aillin Hautecoeur et traduits de l’anglais par Anthony Lecossois.
xle délit · le mardi 2 novembre 2010 · delitfrancais.com
POLITIQUE INTERNATIONALE
Polémique: le retour au bercail d’Omar Khadr Khadr plaide coupable à cinq chefs d’accusation: voie rapide (OU porte de sortie) vers le Canada Humera Jabir Le Délit
A
près huit années de procédures judiciaires et de retards, le procès d’Omar Khadr est enfin arrivé à son terme à Guantánamo Bay, dans un tribunal militaire décrit à la fois comme erroné et illégal. Dimanche dernier, Omar Khadr a été symboliquement condamné à quarante ans de prison, bien qu’il ne fera que huit ans après l’entente de plaidoyer négociée la semaine dernière. Omar Khadr, qui a toujours nié les accusations de crimes de guerre dans le passé, a soudainement retourné sa veste et plaidé coupable à cinq chefs d’accusation qui incluent meurtre, espionnage et soutien au terrorisme. En échange de son plaidercoupable, Omar Khadr a accepté un accord le condamnant à huit années additionnelles de prison, mais lui permet d’être extradé vers le Canada après un an. Dans un communiqué publié immédiatement après la conclusion de la peine dimanche, l’avocat de Monsieur Khadr, Dennis Edney, a déclaré que le rapatriement éventuel de son client au Canada ne changeait en rien le fait que celui-ci n’avait
pas bénéficié d’un procès équitable. «La justice n’a pas été illustrée aujourd’hui. Le fait que le procès d’un enfant soldat, Omar Khadr, ait terminé avec un plaidoyer de culpabilité en échange de son extradition vers le Canada ne change pas le fait que les principes fondamentaux du droit et de procédure ont été abandonnés depuis longtemps dans le cas d’Omar», a déclaré Maître Edney. La défense a été limitée par l’entente de plaidoyer à l’appel de quatre témoins seulement, tandis que l’accusation a été autorisée à appeler dix témoins. Au total, seulement deux témoins ont été appelés par la défense. De plus, le juge de la commission a refusé de traiter le jeune Canadien comme un enfant soldat en dépit du fait qu’il était mineur au moment de l’arrestation. Les États-Unis sont signataires de la Convention internationale des droits de l’enfant, qui reconnaît les enfants soldats comme victimes de la guerre plutôt que premiers responsables des crimes commis. La commission n’a également pas permis la présentation de preuves démontrant que Monsieur Khadr était menacé de mort et de viol quand il a été
interrogé, bien que des déclarations incriminantes lui étant attribuées, qui lui ont été soutirées sous la contrainte lorsqu’il était blessé et sans avocat, aient été acceptées. Wayne Marston, porteparole des droits de l’homme au NPD a aussi hésité à appeler l’entente de plaidoyer une amélioration dans ce cas. «Cela dépend de ce que vous appelez progrès. Il avait deux choix: huit ans ou la prison à vie. Il n’y avait pas de troisième option. Qu’auriez-vous fait?» a posé Marston, ajoutant que les ententes de plaidoyer sont utilisées aux États-Unis de manière pragmatique pour réduire le nombre de cas devant les tribunaux. «Vous avez un jeune homme qui dit qu’il est coupable. Qui peut être coupable, ou innocent. Il était un enfant soldat, protégé par les Conventions sur les droits de [l’enfant], et le gouvernement Harper a totalement échoué sur ce point», a déclaré Marston. Au cours des années passées, le gouvernement canadien a tenté de se distancier de l’affaire Khadr. Un communiqué publié ce mois-ci par le ministre canadien des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, explique que la question «est entre M. Khadr
et le gouvernement des ÉtatsUnis». Avec les termes de l’entente de plaidoyer, Omar Khadr peut désormais demander son extradition, et en effet deviendra l’affaire du gouvernement Harper. Sukenya Pillay, de l’Association canadienne des libertés civiles a discuté des implications de l’accord, insistant pour que le gouvernement canadien s’assure que le futur transfert de Omar Khadr se déroule sans heurts. «Nous nous attendons à ce que le gouvernement canadien n’entrave pas le transfert [de Omar Khadr]. Nous avons toujours dit que le gouvernement canadien devrait le rapatrier et qu’il ne devrait rien faire pour contrecarrer cela» affirme Pillay. Selon François Crépeau, professeur de droit à l’université McGill, si Omar Khadr était rapatrié, ses avocats et lui pourraient contester l’entente de plaidoyer au Canada, à la recherche de la réduction ou même de l’annulation complète de la peine. «Il est difficile de faire des prédictions, mais depuis, la Cour suprême des États-Unis et la Cour suprême du Canada ont dit que les commissions militaires ne sont pas appropriées pour Omar Khadr […] ses avo-
cats peuvent demander que toute la procédure soit annulée, étant donné qu’il a été torturé, détenu en tant qu’enfant-soldat, et n’aurait pas dû être traité comme un adulte» , a déclaré Monsieur Crépeau. Alors que la loi canadienne peut favoriser Omar Khadr, la couverture médiatique récente a indiqué que l’opinion publique canadienne a continué à s’opposer à son rapatriement. Crépeau a attribué à cette opposition certains facteurs: la croyance conservatrice que les individus sont responsables de leurs actions à l’étranger, la confiance totale de certains Canadiens dans le système judiciaire américain et la conviction qu’Omar Khadr et sa famille ne sont pas dignes de la citoyenneté canadienne. De nombreux Canadiens devront mettre leurs opinions de côté si les termes de l’accord sont remplis; et le Canada, seul pays occidental à ne pas avoir rapatrié ses ressortissants de Guantanamo, est tenu de le faire dans l’année à venir. Alors qu'Omar Khadr a été condamné à 40 ans de détention, Amnistie internationale poursuit son travail de sensibilisation à la cause des enfant-soldats. x
CHRONIQUE
Le règne de la Belle-Famille ou l’art du suspense au PQ Le Franc-Parleur
Francis L. Racine
Le parti Québécois devrait sérieusement penser à acheter les studios Mel’s Cité du Cinéma et créer leur maison de production cinématographique (Séparation) parce que, depuis deux semaines, le PQ nous propose leur dernier chef d’œuvre: «Quand la Belle-Famille subjugue la chef; l’histoire vécue d’un parti séparatiste dit québécois au Québec»; version anglaise aussi offerte (doublée par Mme Marois elle-même): «Separatist’s Holy Vendetta, Episode VII: The Family-in-law Strikes Back». Sortez votre pop-corn, ce dernier épisode est digne du Rocky Horror Picture Show. Vendredi, le 29 octobre, le caricaturiste du journal Le Soleil de Québec nous offrait une caricature des plus savoureuses: les Belles-Mères. Ne vous méprenez pas, il ne s’agit pas de n’importe quelle belle-mère, mais bien celles du Parti Québécois. En effet, sur la caricature, on peut apercevoir Lucien Bouchard, Jacques Parizeau, Bernard Landry et Pierre Marc Johnson habillés de la jaquette et du bonnet «Môman» de La Petite Vie. L’entête était la suivante: «Avec le vieillissement de la population les démoxle délit · le mardi 2 novembre 2010 · delitfrancais.com
graphes prévoient une forte augmentation du nombre de Belles-Mères». Pourquoi? Dans le sacro-saint but de ne pas briser la convention de retenue (c’est-à-dire de ne pas commenter l’actualité politique du jour) de la part des anciens premiers ministres (s’il vous plaît, voyez ici du sarcasme), Jacques Parizeau a encore une fois fait une sortie pour réaffirmer que le leadership de Pauline Marois était chancelant et que -nouveauté- : Gilles Duceppe défend mieux les intérêts du Québec à l’étranger, au Canada et au Québec. En fait, si l’on illustre sa pensée, imaginez Gilles Duceppe et Pauline Marois sur une bicyclette tandem où seul Gilles Duceppe, à l’avant, pédale pour les deux… mais ils sont à l’unisson, affirme haut et fort Pauline Marois sur toutes les Tribunes. Ce n’est pas la première fois que les Belles-Mères du Parti Québécois sortent pour dénoncer une certaine situation dans la société, mais, plus souvent qu’autrement, elles dénoncent la direction du Parti Québécois. Il suffit se remémorer la sortie de Lucien Bouchard affirmant que le Parti Québécois prend la place de l’ADQ dans la niche du radicalisme. En plus des Belles-Mères telles que dessinées dans la caricature, le PQ a désormais deux nouvelles BellesSœurs fraîchement sorties de l’ombre. Elles répondent aux noms de François Legault et de Joseph Facal. En effet, ces derniers sont sortis dans les médias pour parler de leur nouveau projet: Force Québec, le parti de la droite unifiée (pas de chicane souverainiste/fédéraliste). La question qui tue: Comment se faire élire au Québec sans justement prendre position sur ce débat? Doit-on comprendre qu’on maintient le statut quo et donc, le fédéralisme? Ceci est un autre débat, mais le fait est que deux anciens ministres du dernier Gouvernement du Québec dirigé par le Parti Québécois font une sortie remettant en cause leur parti d’origine et en (presque) fondant un nouveau parti politique… c’est dur pour l’orgueil. Cette semaine en réplique à la sortie de Jacques Parizeau, nous avons vu la valse des Agnès Maltais et
Stéphane Bédard réaffirmant que leur cheffe était la meilleure et que, selon Agnès Maltais, elle serait au gouvernement avec Mme Marois lorsque le Québec sera indépendant, après les prochaines élections. J’aime bien penser que Agnès Maltais pensait la même chose sous Lucien Bouchard, Bernard Landry et André Boisclair; le club des Belles-Mères presque réuni. Lundi, le 1er novembre 2010, coup de théâtre: le club jeunesse de la Belle-Famille: les Beaux-Enfants font leur entrée dans la danse en ligne. En effet, l’ancien président des jeunes bloquistes, Jean-François Landry, et quarante-neuf autres jeunes séparatistes (péquistes et bloquistes réunis) ont signé une lettre ouverte dans Le Devoir remettant en cause le leadership et surtout le Plan Marois pour l’indépendance du Québec. La Belle-Famille au complet se réunit en État-Major, devrait-on déjà les voir scander: Le roi est mort, vive le roi? Le vieil adage le dit si bien: le PQ est dur avec ses chefs. Depuis la sortie des Belles-Sœurs du PQ, la cheffe se fait servir des crocs-en-jambe l’un à la suite de l’autre; remettant sérieusement en question son leadership. Ceux des Belles-Mères ne font qu’aggraver les choses et celui des Beaux-Enfants rajoute de l’huile sur le feu. En espérant que Mme Marois soit encore en poste aux prochaines élections pour assurer une victoire libérale, car pour l’instant le message séparatiste ne passe pas avec la population, Pauline Marois récolte un point de plus que Jean Charest sur la question «Qui ferait le meilleur premier ministre?». Pour être conséquent avec eux-mêmes, les militants du PQ devraient laisser la chance au coureur lors de la prochaine élection et ensuite décider de son sort (malheureusement écrit dans le ciel avec de grosses lettres fluorescentes) en cas de défaite du PQ. Ainsi, Mme Marois pourra enfin rejoindre la constellation des BellesMères dans le firmament des ex-politiciens ne respectant pas la convention de retenue… même André Boisclair (seulement chef du PQ) la respecte normalement… pour l’instant. x
Nouvelles
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CHRONIQUE
Se souvenir Attention, chronique de droite
Jean-François Trudelle
Le mois de novembre débute. L’hiver s’installera bientôt, la session tirera à sa fin dans peu de temps et nous aurons bientôt tous la tête à l’esprit de Noël. Toutefois, lorsque vous dégriserez de vos fêtes d’Halloween, vous devrez vous rappeler que des gens sont morts pour que vous puissiez fêter ainsi sans vous inquiéter. Les onze premiers jours de novembre sont là pour eux. Peu importe vos opinions politiques, peu importe ce que vous pensez de la guerre et peu importe ce que vous pensez de la société dans laquelle nous vivons, vous devez au moins témoigner votre gratitude envers ceux qui ont choisi de donner leur vie pour l’Humanité, pour les enfants de cette dernière, pour vous et pour moi. Nous tenons souvent nos libertés pour acquises. Or, il y a soixante-dix ans, nous étions loin de la coupe aux lèvres. L’Europe était sous la botte nazie et le Japon étendait sa sphère de coprospérité. L’Amérique allait bientôt être frappée et le Vieux Continent semblait perdu. Or, des hommes et des femmes ont refusé que le monde sombre dans l’obscurité. Ils ont eu le courage et l’abnégation de considérer que leur seule et unique vie valait bien d’être sacrifiée pour la liberté. Ce sont des millions d’êtres humains qui ont caché des Juifs, abrité des résistants et pris les armes pour combattre. L’Italie, la Hollande, l’Afrique du Nord, l’Angleterre, la France et l’Allemagne furent la scène de l’horreur. Ils furent le tombeau de jeunes
hommes plein de vie. Or, leur sacrifice ne fut pas en vain. Nous vivons encore dans un État de droit, l’Europe est libérée de la dictature et le Japon est une démocratie. Ne pas leur témoigner de respect tient de l’ingratitude la plus dégoûtante. Se souvenir d’eux, c’est les remercier d’avoir considéré que leur vie valait bien ce qui restait d’Humanité dans le monde de l’époque. Il ne s’agit pas d’une prise de position belliciste. Au contraire, c’est s’opposer de manière claire et nette aux barbarismes les plus répugnants. Du 1er au 11 novembre, affichez-vous. Portez un coquelicot et remerciez les vétérans que vous croiserez dans les commerces et dans les rues. Ils ont vu leurs amis périr. Rappelez-leur qu’ils ont fait le bon choix. Le devoir du souvenir se doit d’être transmis à notre génération, nous qui n’avons pas vécu les sacrifices et qui connaissons bien peu d’anciens combattants. Aussi, dites-vous qu’en ce moment, dans le désert afghan, nos soldats se battent encore pour la même cause qui a animé des millions de personnes au cours du XXe siècle. Là-bas, la barbarie n’a pas encore cédé. Là-bas, ils ne sont pas libres d’aller à l’université. Là-bas, plus de 150 de nos combattants sont tombés. À vous jeunes désabusés. À vous de porter l’oriflamme. Et de garder au fond de l’âme. Le goût de vivre en liberté. Acceptez le défi, sinon. Les coquelicots se faneront. Au champ d’honneur. John McCrae Ne les oublions jamais. x
LETTRE OUVERTE
Réponse à la chronique du 28 septembre Le conseil de rédaction a longuement hésité à publier ce courrier. Nous avons décidé de le faire, confiants en la capacité du lecteur à différencier les opinions exprimées ici de celles du journal. C’est donc formellement et avec le plus grand sérieux que nous rappelons que «les opinions exprimées dans cette lettre n’engagent que leur auteur et ne reflètent en rien celles du conseil de rédaction». Montréal, le lundi 18 octobre 2010 Cher Monsieur Trudelle, Je lis votre chronique du 28 septembre avec retard. (Mais je ne suis pas de McGill; j’y fréquente les bibliothèques.) Vous vous méprenez gravement, il me semble, en ce qui regarde la Constitution des USA. Voici quelques mots à ce sujet. Si vous lisez bien le Premier amendement, que vous citez une partie seulement, vous pouvez y voir l’interdit formel (et matériel!) de toute religion établie. Il n’est donc absolument aucune liberté religieuse aux USA, et ceci parce que l’établissement est une condition sine qua non des libertés en ce domaine. Pour ma part, je privilégie les thèses d’Aristote: «l’établissement, bien naturellement, et l’attribution du sacerdoce aux seuls “séparés” de l’État, c’està-dire aux retraités.» (Voir La Politique, spécialement VII, 9; IV, 15, initial; VI, 8, in fine; III, 1) Considérez maintenant le Quatorzième amendement, et sa section 3. Parce que trop long, j’évite de le citer ici-même. Mais vous pouvez aisément constater qu’on y interdit strictement ici encore, de remettre en cause la Constitution des États-Unis: il n’est donc absolument aucune liberté d’expression ou de presse possibles aux USA, tout comme il n’est de liberté religieuse. Alors que là on attaque l’«établissement», ici on frappe la «Constitution». Dans les deux cas, et ils sont majeurs ou totaux, on a un seul et
6 Nouvelles
même interdit d’apostat tel qu’il prévaut en terre d’Islam: ce régime peut être appelé «Islamerica»… Rien d’étonnant à cela du reste, puisque cette constitution –de même pour les quelques vingt imitations de l’Amérique ibérique– est essentiellement d’origine sémitique ou juive. Le régime de la séparation des pouvoirs nous vient en effet de la STOA. Qui étaient les stoïciens? D’abord des sémites, ce qui fut de notoriété publique dès l’Antiquité. Citons uniquement ici Diogène Laërce VII, 25: «il ne m’[Polémon, de l’Académie plotoricienne] échappe pas, mon cher Zénon [de Cittium], que tu pénètres par la porte du jardin et qu’ayant dérobé nos doctrines tu les habilles à la mode phénicienne.»1 Quant a l’identification explicite des stoïciens aux juifs, vous le trouverez dans Flavius Josèphe. Un dernier mot sur ce point. Dans la Grèce civilisée, la STOA appartient à l’école des socratiques : vertu-science en éthique et communisme (biens; femmes et enfants) en politique. La réputation complète des thèses socratiques se trouvent bien entendu dans les Éthiques et La Politique d’Aristote. Cependant, la STOA s’imposera totalement dans la Rome antique, comme vous savez. Après les centaines de millions de meurtres crapuleux du communisme stoïcien moderne –ce que l’Église universelle (et l’Allemagne anticommuniste) appela 1 Comparez de nos jours Henri Poincaré (: E=mc2; relativité, restreinte et générale) littéralement dépouillé par le communiste Albert Einstein
au siècle dernier le «judéo-bolchévisme»– il y a sans doute lieu de s’interroger sérieusement cette fois sur la Constitution stoïcienne américaine (du Nord et ibérique). La Constitution civilisée du Canada, c’est-à-dire parlementaire, fait donc exception au milieu ou au-dessus de régimes congressionnels. Enfin, au-dessus de l’audessus faut-on dire, se trouve la langue universelle elle-même ou langue catholique, la langue française, inhérente à son ordre unique parmi toutes les autres langues en ce monde: sujet-verbe-régime. L’éthique totalitaire de la dette et la séparation des pouvoirs, toutes deux émanant de la STOA sémite, font leur entrée à Rome principalement à travers le cercle intellectuel de Scipion Émilien (785-729 av. JC), le vainqueur de Carthage. Cicéron et Polybe sont nos sources les plus importantes ici. Le devoir ou la dette est le KATHEKON de la STOA. Il constitue la judiciarisation et donc une rationalisation supplémentaire de la doctrine socratique de la vertu-science. C’est évidement ce scientisme ou rationalisme –alors que l’éthos est en réalité un irrationnel devenu civilisé– qui fonde l’idéologie communiste. (Je vous indique au passage les deux répliques ou solutions qu’Aristote opposa dans La Politique à la question socratique: Contre la communauté des biens: la propriété privée mais son usage rendu public [Pol. II,5] Contre la communauté des femmes et enfants: établir la réelle égalité des sexes
par un écart d’âge de 21 ans entre hommes et femmes [Pol. VII, 16, in extenso].) Quant à la STOA socratique, il ressort qu’il s’agit exclusivement, et ceci déjà aux dires des Anciens eux-mêmes, d’une entreprise verbale ou verbaliste des «racines» des systèmes linguistiques sémitiques sont donc les perdants verbaux des «Idées» socratiques ou platoniciennes. Ces systèmes radicaux dépendent à leur tour entièrement de l’articulation œsophagienne –les langues humaines ou civilisées étant au contraire articulées dans la trachée. La solution définitive à la question sémitique ou question juive (les juifs réclament absurdement pour eux seuls le titre de sémites) est donc toute tracée: la mondialisation ou internationalisation du Décret-Loi du 3 novembre 1928, par Mustapha Kemal Atatürk, proscrivant l’usage des systèmes radicaux sémitiques. Pour ce qui est des répliques modernes à la séparation des pouvoirs, voici les deux références célèbres: «Parliament is not a congress of ambassadors, etc. » in Adresse aux électeurs de Bristol., le 3 novembre 1774, par Edmund Burke. «The efficient secret of the English Constitution may be described as the close union, the nearly complete fusion, of the executive and legislative, […] The connecting link is THE CABINET.» in The English Constitution, I «The Cabinet», 1867, par Walter Bagehot. Mes Salutations, Alan Boudreau
xle délit · le mardi 2 novembre 2010 · delitfrancais.com
Éditorial
Volume 100 Numéro 8
rec@delitfrancais.com
le délit
Le seul journal francophone de l’Université McGill
Frontenac contre Goliath
Mai Anh Tran-Ho Le Délit
V
ous êtes-vous amusés cette fin de semaine d’Halloween? De mon côté, après une courte soirée costumée sous le thème des clowns où le scotch a remplacé les bons vieux jujubes récoltés chez les voisins, et deux heures perdues à m’offusquer devant les dialogues insipides de Iron Man 2, l’apogée de ma fin de semaine a été de m’asseoir avec la toute nouvelle édition gratuite de Rue Frontenac. Jeudi dernier, les employés en lockout du Journal de Montréal ont donc lancé cette première publication papier, un poing de plus dans cette lutte qui dure maintenant depuis plus de vingt mois. La grande compagnie Quebecor, qui publie le «plus grand quotidien francophone en Amérique du Nord», avait décidé qu’il n’avait pas besoin d’autant de journalistes ou de photographes pour publier le Journal de Montréal. La plume de ces locked-out n’est pas restée longtemps au chômage: ils créèrent rapidement le site Internet ruefrontenac. com. Comme l’a écrit Michel David du Devoir dans un commentaire en réponse à un lecteur: «il est désolant de voir [qu’on veut nous] faire croire qu’on peut faire un “grand journal” avec les maigres effectifs que Quebecor voudrait maintenir. S’il faut absolument comparer avec la restauration, même un McDo a besoin d’un minimum de personnel pour fonctionner» (20 octobre 2010).
Cependant, ne nous martèle-t-on pas sans cesse que le journal papier est voué à sa perte, que l’avenir est dans le 2.0? Pourquoi Rue Frontenac a-t-il décidé de faire ce pas que certains pourraient dire contre le sens de la marche? JeanPhilippe Décarie, ancien rédacteur en chef du Journal de Montréal et rédacteur à Rue Frontenac, nous rappelle que les employés en lock-out sont des «gens issus du papier», que cet univers solide a été «leur quotidien pendant quinze, vingt, trente ans». C’était donc un «retour aux sources». Monsieur Décarie explique que les responsables leur reprochaient leur «peu de flexibilité à aller vers le mode numérique», mais ce qui rebutait ces rédacteurs, c’était surtout de voir leurs textes «intégrés à Canoë, dans un tout commercial». Une simple visite sur ruefrontenac.com démontre bien que le web et le multimédia ne sont pas un réel obstacle à ces lockedout. Enfin, Jean-Philippe Décarie précise que la version papier était aussi, bien sûr, un moyen de rentabiliser l’opération de Rue Frontenac. Les publicités web, c’est bien, mais ça ne nourrit pas toute une «salle d’une quarantaine de rédacteurs». Avec son tirage à 75 000 exemplaires, Rue Frontenac fait maintenant partie des plus importants concurrents du Journal de Montréal. Quebecor, qui aurait «épargné 50 M$ en suspendant la rémunération de ses 253 employés durant deux ans, [et qui aurait réalisé] au bout du compte un profit net de 30 M$», n’a qu’à bien se tenir.
En trois vitesses en hausse
au neutre
David contre Goliath, la lutte n’est pas terminée. Et heureusement. Lorsqu’un conglomérat médiatique tel que Quebecor décide qu’une information de «qualité» du «plus grand quotidien francophone» nécessite moins de mains que le 24 heures, que «les étudiants bon marché», ce bétail «plus docile et plus malléable», comme le dit Monsieur Décarie sans aucun cynisme, le journalisme est en voie d’extinction. Heureusement, il existe encore des médias indépendants qui jugent nécessaire de marcher caillou dans le soulier et de refuser d’être des pantins. Vous pouvez trouver des exemplaires de Rue Frontenac à ces différents points proches du campus: - Basha, coin Université et Sherbrooke, - le dépanneur sur Milton entre Aylmer et Lorne, - le Presse Café au coin de Milton et du Parc, - le supermarché Metro sur avenue du Parc. *** Ne manquez pas les nombreuses activités organisées pour vous dans le cadre de la Semaine du journalisme étudiant. Notamment la table ronde « Percer dans le journalisme 2.0 » avec Florent Daudens, Gabrielle Duchaine, Anne-Marie Lecomte, Tristan Péloquin et Jozef Siroka. La programmation complète en page 10.
en baisse
Une bougie de plus pour l’Assurance Maladie
Au neutre... encore au neutre
Dernier Sondage en baisse POUR LES DÉMOCRATES
Cette semaine, la société de l’assurance maladie du Québec fête son anniversaire ajoutant une quarantième bougie sur son gateau sans sucre. Cette fête lancera aussi un chantier de réflexion sur l’avenir de l’assurance maladie au Québec. La CSQ, la FSQCSQ et la F4S-CSQ (les principaux syndicats de santé) feront connaître leurs propositions pour améliorer l’accès aux services de santé. La plupart des solutions qui sont envisagées par les centrales syndicales touchent la prévention, les services de première ligne, les services de diagnostic et les services de chirurgie.
L’Action démocratique du Québec (ADQ) tiendra son IXème congrès les 13 et 14 novembre à Granby. Durant ces deux jours, les quelques militants adéquistes disucteront de questions liées à l’éthique, et à la gouvernance. Lors de ce congrès, les militants tenteront de renouveler l’exécutif du parti après un départ important; les postes à pourvoir sont celui de président, de quatre vice-présidents et un vice-président jeune; presque l’entièreté… Ainsi, l’ADQ essaiera d’avancer, mais la pente à remonter est très haute pour retrouver le niveau d’il y a trois ans… déjà.
Les élections américaines auront lieu dans quelques heures; le compte à rebours est déjà lancé. Un sondage américain paru dans de grands quotidiens confirmait que l’opposition républicaine devrait, si la tendance se maintient dans les sondages, gagner la majorité à la Chambre des Représentants et pourrait s’emparer du Sénat dont seulement 37 des 100 sièges sont en jeu cette année. Ce renversement de situation pourrait compliquer la tâche du Président Obama dans l’avancement de ses réformes.
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Les opinions exprimées dans ces pages ne reflètent pas nécessairement celles de l’Université McGill.
Le Délit (ISSN 1192-4609) est publié la plupart des mardis par la Société des publications du Daily (SPD). Il encourage la reproduction de ses articles originaux à condition d’en mentionner la source (sauf dans le cas d’articles et d’illustrations dont les droits avant été auparavent réservés, incluant les articles de la CUP). L’équipe du Délit n’endosse pas nécessairement les produits dont la publicité paraît dans ce journal.Imprimé sur du papier recyclé format tabloïde par Imprimeries Transcontinental Transmag, Anjou (Québec). Le Délit est membre fondateur de la Canadian University Press (CUP) et du Carrefour international de la presse universitaire francophone (CIPUF).
Éditorial
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Société societe@delitfrancais.com
Secrètes ou discrètes?
Des rumeurs ont circulé, l’encre sont tombées pour les «frères la veuve». Qui sont-ils? Des explique cette société, non
a coulé et beaucoup de têtes trois points» ou les «fils de Francs-Maçons. Le Délit vous secrète, mais bien discrète.
Yéraldyn Rousseau Le Délit
«C
’est une vraie secte!», s’exclame Gaëlle, une jeune étudiante, quand on lui demande son avis à propos de la Franc-Maçonnerie. «C’est un rassemblement de grands politiciens, de gens haut placés qui nous manipulent depuis une pièce sombre, où ils décident de ce qu’ils vont faire de nos vies, de notre avenir.» Les opinions sur la Franc-Maçonnerie sont plurielles. De «secret» à «semi-secret» ou «discret», les termes utilisés par les noninitiés montrent qu’ils ne réussissent pas à en cerner réellement les buts et à en appréhender l’histoire sans que le mythique ne s’en mêle.
une société discrète. «On peut se montrer à visage découvert, affirmer que l’on est Franc-Maçon, mais on ne dévoile jamais l’identité des autres membres», expliquet-il. Il ajoute qu’on a longtemps prêté de nombreux faits et méfaits à la FrancMaçonnerie. À certaines époques, on allait même jusqu’à lui faire porter la responsabilité de problèmes de société, mettant ainsi en danger les Francs-Maçons. Pendant la Deuxième Guerre mondiale notamment, le gouvernement français de Vichy s’est fait livrer les archives des Obédiences Maçonniques et a persécuté les Francs-Maçons, en envoyant un certain nombre en camp de concentration. Il en était de même sous l’Espagne franquiste et en URSS, où les «Frères» étaient envoyés au Goulag. Et la persécu-
Le mystère entourant le secret
En effet, comment ne pas s’étonner face à un mouvement aux pratiques si mystérieuses? Les privilégiés se réunissent dans une Loge, portent un tablier et des gants blancs -les «outils»- qui pratiquent des rituels datant du XVIIIème siècle, qui se saluent par des gestes- les «attouchements»et des mots de passe connus d’eux seuls. La Franc-Maçonnerie peut paraître obscure à plusieurs, et les médias ne se privent pas, par des publications périodiques, de souligner le mystère qui plane autour de ce groupe. D’après le sociologue Jean Duhaime de l’Université de Montréal, «l’un des facteurs qui attire le profane vers le recrutement réside dans le secret qui entoure tout le processus». Le Délit a rencontré un Franc-Maçon français, «Le Frère», qui a accepté pour un instant d’ôter son masque ou, plus exactement, de se départir de ses habitudes de discrétion: «Mon activité professionnelle publique exige de moi une certaine réserve et, en outre, il n’est pas dans les pratiques des Francs-Maçons de s’afficher publiquement s’il n’est pas nécessaire». Il explique sa vision de la FrancMaçonnerie en saluant, selon l’usage et dans la forme appropriée déterminée,
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George Washington et Benjamin Franklin, par exemple, étaient respectivement membre de la Loge de Fredericksburg, et Grand Maître de la Loge Les Neuf Sœurs de Paris. Et ils ne s’en cachaient pas!»
Le compas et l’équerre; les symboles maçonniques. Illustration: Jimmy Lu
soit en donnant l’accolade. Selon lui, la Franc-Maçonnerie n’est pas universelle. Au contraire, à l’heure actuelle, la FrancMaçonnerie doit se conjuguer au pluriel. En effet, différentes branches, nommées «Obédiences», se sont formées au cours des
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siècles, en fonction de l’histoire, des lieux («Orients») et des cultures.
La discrétion dans la persécution
D’après le Frère, la Franc-Maçonnerie n’est pas une société secrète, mais plutôt
tion continue aujourd’hui, surtout dans des pays comme la Chine, par exemple, où les cercles de pensée hors des cadres déterminés par l’État ne sont pas vus du meilleur œil. Le sociologue Duhaime est bien d’accord avec le Frère: «Les organisations initiatiques ne cherchent nullement à dissimuler leur existence, sauf quand elles sont persécutées et si elles appartiennent à un type authentiquement traditionnel se fondant sur un mystère intérieur, central et profond […] incommunicable au profane».
L’origine symbolique de la franc-maçonnerie remonterait aux bâtisseurs des cathédrales européennes du Moyen-Âge ou, selon le mythe, aux ouvriers qui construisirent le Temple de Salomon, ce qui justifie l’utilisation des symboles comme le compas, l’équerre, le maillet, la truelle, le fil à plomb, la brique, etc. Les «Fils de la Veuve» sont même parfois associés avec des factions telles que l’Ordre du Temple. De quoi faire rêver les lecteurs du Da Vinci Code ou du Pendule de Foucault! Évidemment, tout ceci n’est pas facilement vérifiable…
toire, que signifie la franc-maçonnerie aujourd’hui, et comment y adhère-t-on si on le souhaite? Comment est-on recruté, initié, identifié?
Du recrutement au serment
De nos jours, la majeure partie des initiations sont faites à la demande de l’initié,
du recrutement, il est très important de démontrer une envie, un enthousiasme pour apprendre, comprendre et agir pour le bien commun. Car c’est cela que fait le Maçon aux côtés de ses Frères; il apprend, réfléchit et tente d’agir en trouvant des solutions». Duhaime ajoute que «l’objectif n’est pas de recruter le plus de monde possible
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Mon activité professionnelle publique exige de moi une certaine réserve et, en outre, il n’est pas dans les pratiques des Francs-Maçons de s’afficher publiquement»
L’histoire certaine de cette société semble débuter en Europe, plus particulièrement en Angleterre au XVIIIème siècle. Ce mouvement s’étend alors à travers l’Europe, puis vers l’Amérique du Nord et du Sud. Quels sont ses objectifs? «La construction des valeurs Franc-Maçonnes, soit la sagesse, la justice, la bonté et la fraternité universelle, de ce qui doit être, répond le Frère. Mais aussi, pour cela, l’exigence morale de se construire soi-même, en «polissant sa propre pierre», c’est-à-dire en s’améliorant, afin que le mur commun soit droit et solide» soutient le Frère en faisant référence au vocabulaire des tailleurs de pierre médiévaux.
Un lieu de discussions
Des Lumières à l’Église
Dans certaines Obédiences, on se réfère à la Bible, dans d’autres, aux Lumières et à la Révolution française, qui clamaient la devise qui est encore aujourd’hui la devise de la France: «Liberté, Égalité, Fraternité». Cette devise, tout comme la constitution des États-Unis, puise en effet sa source en partie dans la réflexion Maçonnique, les Maçons croyant profondément que leur société est imparfaite et qu’elle demeure à parfaire «en polissant ces trois pierres». Après le succès du troisième tome de Dan Brown, Le symbole perdu, l’implication Maçonnique au sein de la fondation des États-Unis a intéressé plus d’un lecteur. Les informations contenues dans le roman sont toutefois à prendre avec précaution. Il faut souligner que la Franc-Maçonnerie est beaucoup moins cachée aux États-Unis que dans d’autres pays. En effet, une partie des Pères fondateurs des États-Unis étaient Francs-Maçons. George Washington et Benjamin Franklin, par exemple, étaient respectivement membre de la Loge de Fredericksburg, et Grand Maître de la Loge Les Neuf Sœurs de Paris. Et ils ne s’en cachaient pas! Par exemple, selon le site du Nouvel Ordre Mondial, le Delta rayonnant (l’œil entouré de rayons) sur les billets d’un dollar, au sommet de la pyramide, observerait le détenteur du billet. Il a d’ailleurs été considéré par beaucoup de théoriciens du complot comme un symbole diabolique païen. L’Œil de la Providence, symbole chrétien hérité du Moyen-Âge, permet d’aborder la question de la vision des Francs-Maçons sur la religion. La Franc-Maçonnerie était, à la base, théiste, c’est-à-dire qu’elle affirmait et imposait la présence d’un être, d’une force supérieure que certains nomment toujours le Grand Architecte De L’Univers. C’est entre autres pour cette raison que l’Église catholique persécuta longuement les Francs-Maçons. Mais, loin du passé et des cours d’his-
personnes ayant un code moral irréprochable. Malgré tout, ceci convainc-t-il Gaëlle, l’étudiante sceptique? «Je ne connais pas beaucoup le milieu des Francs-Maçons, mais j’ai entendu dire qu’ils faisaient des choses pas très nettes… On leur bande les yeux, on leur fait tenir une bougie, on leur met des gants et un tablier, on les amène dans une pièce sombre où d’autres maçons se trouvent et là, on fusille de questions en tout genre le futur initié…» Et les dires de Duhaime concordent avec les rumeurs populaires: «En effet, au premier rite d’initiation qu’est le serment d’admission, l’initié a les yeux bandés et se voit engagé à garder le secret, à ne pas révéler les rituels initiatiques et autres expériences qu’il lui a été donné de connaître, sous peine d’avoir la gorge tranchée.» Le sociologue cite d’ailleurs Simmel: «Plus intéressante [que le rite] est la technique […] qui consiste à apprendre au néophyte à se taire systématiquement dès le début.» Le Frère reconnaît le «caractère un peu obsolète» de tels rituels, et l’aspect «vaguement ridicule pour le profane» des outils comme l’habit ou le rituel. Il invite toutefois à les comprendre au regard de l’Histoire, des traditions, et du sens de chaque objet, rituel ou symbole pour avancer dans la connaissance.
«Car, même si l’histoire ne révèle que peu à peu ses secrets, il ne faut pas oublier que c’est grâce à quelques-uns de ses membres occasionnellement puissants que nombre de choses importantes ont pu voir le jour.»
Mozart, un adepte célèbre parmi tant d‘autres qui a gonflé les rangs des Maçons. Illustration: Jimmy Lu
qui peut contacter l’Obédience ou l’Atelier qui lui convient. Cependant, on était à l’origine recruté, ou coopté, c’est à dire choisi par des Maçons désireux de vous voir à leurs côtés. C’est d’ailleurs ce qui est arrivé au Frère: «Quelqu’un sondait autour de moi, en posant des questions à mon sujet aux gens que je fréquentais. Au cours
mais de trouver des personnes qui ont des affinités pour les valeurs et un réel intérêt pour le groupe». Il reconnait aussi que les Francs-Maçons peuvent chercher à rassembler des personnes qui peuvent avoir une certaine influence dans la société (des intellectuels, journalistes ou membres de professions libérales), mais surtout des
Mais pourquoi tant d’étapes, de secret et de silence ? Que font vraiment les Francs-Maçons? «La Loge est un lieu de parole ouverte et respectée», explique le Frère. À l’image des salons mondains du siècle des Lumières en France, comme celui de Madame Geoffrin ou le Cercle d’Auteuil, les «Vénérables Loges» sont des lieux de pensée, de discussion et de proposition. Les sujets traités au cours des Tenues sont divers et variés, symboliques ou sociaux, culturels parfois. Par exemple, des sujets de discussion qui ont fait avancer des causes comptent parmi eux l’abolition de l’esclavage au XIXème siècle, l’avortement et les droits des femmes, l’abolition de la peine de mort, etc. Si les Loges sont composées de personnes de toutes distinctions sociales, de toutes cultures et de toutes allégations politiques, un FrancMaçon ne devrait pas être réellement conservateur pour le fond, étant données ses motivations d’aller de l’avant et de réfléchir au progrès de sujets en marge de la société. Et que répondre aux critiques de la Franc-Maçonnerie? Passe-droits économiques, corruption politique et question de l’initiation des femmes, notamment, demeurent de majeures entraves à la popularité de la société. Le Frère admet que tout n’est pas clair comme du cristal, mais qu’il est important de ne pas juger trop promptement. Car, même si l’histoire ne révèle que peu à peu ses secrets, il ne faut pas oublier que c’est grâce à quelques-uns de ses membres occasionnellement puissants que nombre de choses importantes ont pu voir le jour: Pensons, pour ne parler que des morts, à Washington, à Mozart, Simón Bolívar, Goethe, Voltaire, et tant d’autres… Finalement, est-ce une secte? «Non!», répondent Monsieur Duhaime et le Frère. Tous deux expliquent de la même manière: «Il est facile de rentrer dans une secte, mais difficile d’en sortir, tandis qu’il est assez compliqué de rejoindre la Franc-Maçonnerie, mais très facile de s’en détacher». Malgré le secret et l’ésotérisme pratiqué, la Franc-Maçonnerie n’est pas considérée comme une secte, mais plutôt comme une «société discrète». x
Société
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Student Journalism Week
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Du 1 au 5 novembre
La Semaine du journalisme étudiant Il n’y pas de programme de journalisme à McGill. Afin de combler ce manque, la Société des publications du Daily, avec la participation des journaux Le Délit, The McGill Daily, Journalists for Human Rights, Media@McGill et le Service de planification de carrière de McGill, a invité des journalistes, des professeurs et des spécialistes pour que les étudiants puissent tremper le pied dans ce domaine. Cette année, nous avons organisé diverses activités pour marquer cet événement. Visitez le delitfrancais.com pour les dernières nouvelles.
Lundi
Nouveau média (en anglais) 18h-19h. Leacock 219
Lisa Lynch (professeur à l’Université Concordia), Alanah Heffez (spacingmontreal. ca) et Andrew Princz (ontheglobe.com) discutent du changement de structure du journalisme: les reportages multimédia, sites Internet de nouvelles spécialisées, les nouvelles façons de trouver des preuves, seront parmi les sujets abordés.
Mardi Passer les portes closes: l’utilisation de requêtes d’accès à l’information (en anglais) 14:30h-16h. Brown 5001
Un atelier pour apprendre comment préparer et utiliser les requêtes d’accès à l’information pour enquêter sur les abus et les infractions du gouvernement. Une formation pas à pas, détaillant les obstacles et quelques astuces pour les contourner. Venez avec une idée de sujet sur lequel enquêter!
Pénétrer le monde du journalisme (en anglais) 18h-19h. Pavillon Chancellor-Day 100
Comment décrocher un stage? Comment obtenir un job? Un panel d’étudiants de deuxième cycle vous racontent comment ils ont fait. Raji Sohal (CBC radio), Braden Goyette (The Nation magazine), et Drew Nelles ( Associate Editor, Maisonneuve).
Mercredi Médias citoyens: 1ère présentation (bilingue) 18h. Leacock 219
Quels sont les effets des structures émergentes de média corporatifs sur le discours? Y a-t-il un fossé grandissant entre ce que croient les gens, et ce que couvrent les medias? Avec Craig Silverman (PBS Media Shift, OpenFile).
Vendredi Médias citoyens: 2e présentation (bilingue) 18h-19h. Leacock 219
Quels sont les effets des structures émergentes de media corporatifs sur le discours? Y a-t-il un fossé grandissant entre ce que croient les gens, et ce que couvrent les medias? Avec Tim McSorley (The Dominion, Media Cooperative).
Le journalisme au sevice de la justice sociale (en anglais) 19h20h. Leacock 219 Coorganisé avec des journalistes pour les droits de l’Homme à McGill, ce groupe d’intervenants, parmi lequel Amy Miller, Meg Hewings et Derek MacCuish, discuteront de la justice sociale et du journalisme à la lumière du G20.
Jeudi
Le journalisme radical sur les ondes (en anglais) 14:30h-16h. Brown 5001 Gretchen King (CKUT) discutera de la couverture des informations sur les ondes, des documentaires radio, et de la diffusion terrestre. Ce programme nationalement syndiqué est géré par L’Association nationale des radios étudiantes et communautaires.
Percer dans le journalisme 2.0 (en français) 18h-19h. Pavillon Chancellor-Day 101 Florent Daudens (rue89.com), Gabrielle Duchaine (ruefrontenac.com), Tristan Péloquin (cyberpresse.ca), Anne-Marie Lecomte (Radio-Canada) et Jozef Siroka (cyberpresse.ca), discutent du journalisme à l’ère 2.0 : comment trouver sa place, les outils et la participation croissante du public.
Le design pour les médias papier 18h-19h. Pavillon Chancellor-Day 202 Anna Minzhulina, éditrice design au Maisonneuve magazine et lauréate annuelle pour la seconde place du National Magazine Award pour le meilleur design discute du design et de la créativité.
Presse d’opinion: des difficultés de prendre parti de nos jours (en anglais) 18h-19h. Pavillon Chancellor-Day 102 Marcus Gee, chroniqueur pour Globe and Mail, discute du clivage politique nordaméricain. Les préoccupations des médias pour les dichotomies signifient que les grandes questions peuvent ne pas être politisées. Gee cherche un juste milieu.
Un stage en style (en anglais) 18h-19h. Pavillon Chancellor-Day 202 Des étudiants de McGill discutent de leur expérience dans le milieu de la mode, du divertissement, et des magazines d’édition: Todd Plummer (Vogue); Katie Amey (Nylon, Seventeen.com); Carolyn Gregoire (Blackbook, Seventeen); et Rachel Benjamin (Glamour).
À vendre: le journalisme culturel sur le marché du contrat (en anglais) 19h-20h. Pavillon Chancellor-Day 202 Des pigistes racontent comment écrire un article pour le marché d’aujourd’hui: Matthew Hays (Montreal Mirror et deux fois nominé pour le National Magazine Award). Patricia Bailey (Playback Magazine); Donna Nebenzahl, une journaliste indépendante qui écrit souvent pour The Gazette et pour The Toronto Star.
Arts&Culture artsculture@delitfrancais.com
Concerto pour aliénés Une chanson d’une heure pour souligner les 10 ans de sa compagnie l’Activité: voilà la gageure réussie du dramaturge et metteur en scène Olivier Choinière. Émilie Bombardier Le Délit
S
imple et brillante allégorie que cette nouvelle création d’Olivier Choinière. Présentée et coproduite par l’Espace Libre, elle souligne avec brio les dix ans de L’Activité, sa compagnie théâtrale qui ne fait rien comme tout le monde. Il y eut d’abord Agromorphobia, «du théâtre d’été urbain de série B» présenté en 2000 sur le toit du Théâtre d’Aujourd’hui, puis une «tragédie météorologique» intitulée Jocelyne est en dépression. S’en sont suivis une série de projets d’audioguides qui entrainaient le spectateur jusqu’au sommet du Mont-Royal, à la découverte de leur ville, dans le réseau souterrain de Montréal ou encore à la collection permanente du Musée des beaux-arts de Québec. La toute dernière pièce de l’Activité, ParadiXXX, mettait en scène un doublage de film pornographi-
que. Qui pouvait donc s’étonner devant la prochaine œuvre de son directeur artistique? Plusieurs appréhendaient une comédie musicale. Ce qu’on leur a servi était, encore une fois, bien fantasque et peu ordinaire. Alors que la pièce commence, un rythme simple se fait entendre dans la salle. Aucun comédien sur scène, un synthétiseur pour tout élément de décor. De longs instants s’écoulent. Un ver d’oreille s’installe. C’est à partir de l’anticipation que tout se construit. Un homme assis parmi le public se lève et se dirige avec hésitation vers le synthétiseur. Il pianote timidement puis trouve une mélodie qui accompagne le rythme. Il incite une spectatrice retardataire à se joindre à lui, puis un livreur de pizza qui frappait à la porte du théâtre. La scène se remplit peu à peu d»inconnus qui improvisent leur contribution à la musique. Quelques uns s’aventurent à ajouter refrains et couplets.
Une véritable chanson est créée, la même qui sera interprétée en chœur, à répétition, jusqu’à la fin de la pièce. Des choristes débarquent, puis quelques danseurs. Plus d’une cinquantaine de comédiens se retrouvent à exécuter une chorégraphie qui passera du spontané au très réglé. Une jam-session s’orchestre devant un public qui en redemande. C’est une véritable collectivité, voire une microsociété, qui se construit autour d’une chanson qui n’a pour refrain qu’un très simple «Je chante. Oui, je chante. Pour que tu chantes avec moi». Indéniablement comique, Chante avec moi d’Olivier Choinière évoque l’aspect hautement aliénant de ce qui nous rassemble, puis nous organise en société. Comme l’explique le dramaturge et metteur en scène, la chanson interprétée aurait pu se substituer à toute idée, utopie ou courant politique. Au côté tout à fait spontané et bon enfant de sa première
Justin Laramée
THÉÂTRE
interprétation succède une seconde, réglée au quart de tour par des personnages nerveux et affectés. La chorégraphie se répète, des corps tombent. Tout se renverse alors que le ver d’oreille a raison de toute réflexion. La fable de Choinière, bien que caricaturale, évite un côté dangereusement moralisateur par l’humour et l’inventivité qui s’en dégage. Le charme du théâtre, son pouvoir de surprendre le public tout en le prenant à parti, s’opère à merveille pour servir un thème inépuisable et universel. À la fin de la représentation, une partie du public reprenait la chanson. Étaitce par satisfaction ou autodérision? Rien n’est moins sûr. Il est toutefois certain que Chante avec moi vaut la peine d’être vu. On pourrait même se surprendre à y retourner, ne serait-ce qu’à cause de ce vers d’oreille qui ne nous quittera pas de sitôt. x
CHRONIQUE
Hurlement poétique lointain Coup de plume
Francis Lehoux
Je rêve d’un temps où la littérature soulevait les passions et semait encore la controverse. Je rêve de février 1857, où Gustave Flaubert et sa chère Madame Bovary étaient appelés au banc des accusés pour immoralité et obscénité. Je rêve également d’août 1857, quand Charles Baudelaire et ses Fleurs du mal faisaient l’objet d’un procès pour offense à la morale et aux bonnes mœurs. Et je rêve maintenant de 1957, où le gouvernement américain poursuivait l’éditeur du poème Howl d’Allen Ginsberg en justice, pour distribution de littérature obscène. Cet événement, indissociable de la vie, de l’œuvre et du succès du poète et membre fondateur de la Beat Generation, a récemment fait l’objet d’une fiction narrative hybride, Howl, poème cinématographique à la fois fascinant et ennuyeux des réalisateurs Rob Epstein et Jeffrey Friedman.
Le long métrage se veut d’emblée à l’image du poème: profond, léger, hallucinant et jazzé. Et résolument éclaté. Il comporte, à l’instar de l’œuvre source, quatre volets, quatre trames narratives entrelacées: la lecture publique incandescente du poème par son auteur (brillamment interprété par James Franco) au Six Gallery de San Francisco en 1955 (filmée en noir et blanc); l’entrevue de Ginsberg, réalisée dans le style documentaire, pendant laquelle il raconte sa vie et ses amours (avec Jack Kerouac, Neal Cassady et Peter Orlovski) et confie avec profondeur et désinvolture sa vision de l’écriture; le procès pendant lequel les avocats interrogent des critiques et des professeurs de littérature anglaise sur la valeur littéraire du poème; puis des séquences animées accompagnées de la voix de Ginsberg récitant son poème, véritable mise en image de Howl. D’emblée, la performance poétique inspirée de Ginsberg, la musique jazz en arrière-plan et la légèreté de ton facilitent l’entrée du spectateur dans l’univers de l’auteur, et les confessions du poète au journaliste invisible contribuent à démystifier l’écrivain et à le rendre autant fascinant qu’attachant. Le parti pris peu subtil des réalisateurs, qui caricaturent tous les détracteurs de la poésie franche et libre du poète (notamment l’avocat de la couronne ignare et ridicule) et qui glorifient sans trop de nuances le poète et son œuvre (voir le public unanimement médusé du Six Gallery) irrite et crée un déséquilibre dans la fiction qui ne bénéficie alors plus des tensions internes qui auraient pu la dynamiser. Également, la juxtaposition et
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l’omniprésence des séquences de lecture publique et de séquences d’animation sur fond de voix récitante, si elles démontrent une volonté de rapprocher le poème du public, échouent dans leur entreprise en ne causant qu’une surdose de poésie. Au final, le film s’avère un vibrant plaidoyer en faveur de la liberté d’expression et de l’adoption d’une langue (littéraire) exprimant avec franchise l’esprit moderne et libre; une ode, surtout, au poète Allen Ginsberg et à son œuvre, qui a su créer l’étincelle d’une révolution littéraire et ouvrir la voie aux autres écrivains de la Beat
Generation. Malgré ses quelques défauts, il n’en demeure pas moins que Howl (le film) réussit à nous rendre nostalgiques d’une époque où la littérature créait une onde de choc dans la société et contribuait encore au progrès politique et social. Une nostalgie qui nous fait rêver de nouvelles figures, des Flaubert, Baudelaire et Ginsberg de notre temps et de notre pays, dont le «hurlement» poétique fera avancer le nôtre. x Howl sera présenté en salle à compter du 5 novembre.
Arts & Culture
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CINÉMA
L’étourdissante Tournée
Gagnant du prix de la mise en scène à Cannes, Tournée, le plus récent film de Mathieu Amalric, est un spectacle enivrant. Sabrina Ait Akil Le Délit
D
es paillettes et des plumes, du champagne et des bulles, constituent l’ambiance de Tournée, le quatrième long métrage de Mathieu Amalric. Le film raconte les dessous d’un spectacle de striptease burlesque orchestré par Joaquim Zand (Mathieu Amalric), avec sa troupe de danseuses voluptueuses venues des États-Unis. Le cinéaste nous transporte au cœur de la France en un éclair de génie: un spectacle hors du commun mettant en vedette des femmes aux cambrures capiteuses et sans tabous. Zand veut reconquérir la France qu’il a laissée pour se ressourcer et
oublier son passé. Son spectacle n’a rien à voir avec Broadway ou encore les comédies musicales pour enfants; au programme de ce spectacle éblouissant et enivrant, c’est plutôt charme et coquetterie, légèreté et audace. Mathieu Amalric livre une performance où la discipline artistique domine. Son personnage tourmenté baigne dans la mélancolie, mais les élans de joie ne se font pourtant pas rares. Il s’est donc servi de la complexité de la vie pour interpréter un Joaquim Zand au bord de la crise de nerfs. La tension est palpable tandis qu’Amalric ressuscite avec succès un personnage qui semble avoir tout raté. Les cinq stripteaseuses américaines, dirigées par l’acteur et réalisateur, ont
créé ce spectacle qui nous est présenté avec originalité et sensualité. Le jeu est naturel et la sincérité qui s’en dégage donne un poids considérable au film. Le réalisateur sait aussi capter l’attention du spectateur en jouant avec les lumières et la musique. On se croirait à l’époque du charleston. Tournée évoque aussi la force des femmes dont les corps en mouvement se jouent des conventions et du conservatisme étouffant. Striptease oblige, la nudité fait partie intégrante du film sans jamais choquer pour autant. Le respect de la nature des corps voluptueux, musclés et gras est total. Les danseuses dégagent une joie de vivre à travers les mouvements de leur corps, et ce sans aucun complexe.
Gracieuseté de FUNFILM
C’est la célébration pure et simple des formes et des tailles. Ce qui se passe derrière les rideaux est tout aussi ntéressant. La colère qui est explorée avec profondeur dans le film rappelle que cette tournée devra rester périphérique, loin des lumières de Paris. Joaquim Zand ne réussit pas à se faire connaître avec sa troupe haute en couleurs dans la capitale. S’en dégage une frustration rageante qui finit par se dissiper dans l’ivresse de l’instant présent. Amoureux de son propre métier, Joaquim essaye d’atteindre le nirvana en contemplant ces femmes qui l’ont suivi dans une folle aventure alors, même loin de Paris, the show must go on.x
MUSIQUE
Intimement vôtre: Angus et Julia Stone
Harmonica, trompette et guitare sont au rendez-vous dans le dernier album d’Angus et Julia Stone, Down the Way. Anouk Manassen Le Délit
T
he White Buffalo, un grand gaillard Sud Californien dégageant une réelle chaleur humaine, entraîne la foule dans une ambiance country, la bière à la main, mélangeant paroles d’amour dans cette première partie du concert présenté le 29 octobre dernier au National. Toujours souriant, The White Buffalo séduit avec sa voix rauque et authentique. Le public, formé surtout de jeunes enthousiastes, acclame l’arrivée d’Angus et de Julia après une première prestation unanimement appréciée. Lorsque le duo tant attendu prend d’assaut la scène, celle-ci est soudainement plongée dans une lumière chaude et dorée, accompagnant les paroles de la chanson «And the Boys». Julia, vêtue d’une longue robe, décrit un monde magique: «and there’s gold, falling from the ceiling of this world». Le silence est profond d’étonnement et d’admiration. Seule la voix distincte et lucide de Julia, évoquant l’enfance, son émerveillement et son insouciance, fait trembler les murs et frissonner les spectateurs. Les instruments entrent dans la mélodie un par un, et la voix légère d’Angus s’harmonise à celle de sa sœur pour créer un fond musical doux et entraînant, les deux voix se complétant de manière tout à fait exceptionnelle. Au-delà du style musical unique propre au duo Stone, c’est la complicité entre
12 Arts & Culture
Gracieuseté de Nettwerck Music Group
les deux artistes et le reste du groupe qui rend le concert des plus agréables et permet au groupe d’offrir une performance généreuse et unique. La sincérité et la tendresse des musiciens font du concert une expérience intime. L’émerveillement
au monde de Julia mélangé à la rêverie d’Angus projettent un univers où les petits soucis de la vie s’effacent sans aucun effort. Le groupe parvient à assurer un spectacle divertissant tout en conservant leur
simplicité qui fait d’eux d’impressionnants artistes authentiques. Angus et Julia forment définitivement un groupe à surveiller, pour tous ceux dont le duo n’est pas encore un véritable coup de cœur.x
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ARTS VISUELS
L’icône de la mode montréalaise
Les fashionistas québécoises connaissent bien le designer Denis Gagnon, toutefois, il est presque inconnu du grand public. Le Musée des Beaux-Arts de Montréal le célèbre dans une exposition: choix audacieux ou coup de gueule?
Christine Guest
Elizabeth-Ann Michel-Boulanger Le Délit
L
’exposition en elle-même ne présente ni une rétrospective de la carrière du designer qui célèbre sa dixième année de création, ni une explication de sa démarche artistique. C’est plutôt une immersion dans le milieu de Denis Gagnon. La majorité des créations sont inédites: quinze des vingt robes ont été créées pour la saison printempsété 2011 ou spécialement pour l’exposition. Dans une salle noire, vingt robes sont suspendues par des chaînettes. Au milieu
de la pièce, des images des défilés du créateur sont projetées en boucle. C’est dans un local épuré que Denis Gagnon expose des robes conçues avec ses matériaux préférés: franges, fermetures éclairs, chaînes. La palette de couleur est plutôt en reste, car on retrouve principalement du blanc et du noir. Les robes n’ont pourtant rien de morose, elles sont généralement très courtes avec un dos dégarni. Au premier coup d’œil, on remarque indéniablement ses anciens amours pour les costumes de théâtre. Denis Gagnon est un des designers les plus innovateurs et audacieux de la scène montréalaise. Il ne fait pas l’unanimité, mais
un artiste qui tente sans cesse de repousser les limites de la création peut-il vraiment obtenir un succès absolu? En entrevue, le designer originaire d’Alma explique que pendant longtemps, il ne réussissait pas à vendre ses créations à cause de leur esthétique trop théâtrale. L’excentricité du créateur est alors devenue sa marque de commerce. Un documentaire qui relate les débuts de Denis Gagnon a été présenté le 19 octobre dernier. Réalisé par Khoa Lê, une ancienne assistante du créateur, Je m’appelle Denis Gagnon expose le travail acharné de l’artiste, dans un atelier situé dans un sous-
sol miteux. Ses angoisses, qui vont souvent de paire avec ses succès, sont évoquées, ainsi que des éléments de son enfance où il dit s’être découvert «très gai, très tôt» et un parcours difficile où il multiplie les rejets et les opportunités dont celui d’être enseignant de mode au Maroc durant trois ans. Si Denis Gagnon doit composer avec une critique qui suggère qu’il n’a pas sa place au Musée des beaux-arts de Montréal, cela importe peu, car l’homme connaît la chanson. Fier soldat, il en a connu d’autres et mérite son exposition au MBAM entre Yves Saint Laurent et Jean Paul Gaultier.x
ARTS VISUELS
L’expression du coloré et du vivant
C’est avec simplicité, sérénité, couleurs et fraîcheur que Complètement Maroque marque le coup d’envoi du onzième Festival du monde arabe de Montréal.
Gracieuseté de Martine Michaud
Marion Provencher Langlois Le Délit
A
rabitudes est le thème de cette année pour le Festival du monde arabe de Montréal, qui s’amorçait le 29 octobre avec le vernissage de Complètement Maroque. Organisée en collaboration avec l’Office national marocain du tourisme, l’exposition se tient en marge du festival jusqu’au 30 novembre dans la galerie du Cinéma du Parc. À défaut d’une galerie plus grande ou plus traditionnelle, Complètement Maroque profite d’une grande visibilité puisqu’elle est offerte à la vue des nombreux passants du Cinéma du Parc. L’exposition, qui n’occupe que quelques murs, présente plusieurs photographies
de Martine Michaud et quelques tableaux de Raja Hammoud, l’artiste-peintre montréalaise d’origine libanaise. Les œuvres sont divisées en plusieurs catégories, représentant chacune une facette du Maroc: «Terre des couleurs», «Terre des ombres et lumières» ou encore «Terre des femmes», pour n’en nommer que quelques unes. Parmi sa collection de photographies, Martine Michaud a choisi de prendre et d’exposer celles illustrant autant les grandes villes que les régions retirées du paysage aride berbère. Plutôt que de produire des portraits figés, elle préfère les lieux colorés qui sortent de l’ordinaire. Grâce à son regard unique, elle réussit à immortaliser avec justesse la diversité des gens et des paysages d’un seul et même pays. Raja Hammoud, pour sa part, expose avec une
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unité de lumière et de couleurs son double héritage et ses racines multiculturelles. Le groupe algérien Djmawi Africa inaugurait également l’ouverture du festival à l’Astral. Plusieurs autres spectacles et activités suivront au cours des deux prochaines semaines. Parmi les tours de force du Festival du monde arabe cette année, la participation du Ballet national algérien est à souligner. Grâce à la collaboration de l’Ambassade algérienne au Canada et du Ministère algérien de la Culture, le Ballet national algérien donnera une représentation le 10 novembre prochain au Théâtre Maisonneuve à la Place des Arts. Les vingt six danseurs et musiciens feront virtuellement halte dans chaque région du pays et revêtiront costumes et bijoux
pour raconter la diversité de l’Algérie traditionnelle. Côté cinéma, une série de films arabes en provenance de plusieurs pays sera à l’affiche à l’ONF jusqu’au 7 novembre. Le Cinéma du Parc participe en ajoutant à sa programmation du 5 au 7 novembre plusieurs films arabes, dont le Littoral de Wajdi Mouawad. Outre le cinéma, les opéras arabes, les troupes de danse et plusieurs expositions sont à ne pas manquer. Grâce à la pluralité de sa programmation, le festival nous prouve que la culture arabe est toujours aussi colorée et vivante. x Le Festival du Monde Arabe se poursuit jusqu’au 14 novembre. Pour plus d’informations :www.festivalarabe.com
Arts & Culture
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CHRONIQUE
Cette honteuse vocation Tant qu’il y aura des livres
Rosalie Dion-Picard
Il y a des gens qui, lorsqu’ils posent une question, ont une idée assez précise de la réponse: c’est le cas des enseignants (de la garderie à l’université); des dentistes: «Vous passez-vous la soie dentaire tous les jours?»; et des parents qui ont lu des livres sur l’éducation des adolescents: «Crois-tu que tes cheveux bleus vont
t’aider à te trouver un emploi cet été?» Là où cette tactique rhétorique devient particulièrement fâcheuse, c’est lorsque qu’elle est utilisée pour sermonner l’individu questionné, mais sans vraiment assumer tout le côté «paternaliste», si j’ose dire, de la chose. La production d’une œuvre littéraire fait partie de ces projets qui, à l’instar d’un tatouage sur le nez ou d’un mariage à Las Vegas, déçoivent à tout coup celui avec qui on partage notre intention. Non seulement est-il déçu, ce qui pourrait heureusement terminer la conversation, mais il se sent généralement naître quelque chose comme une âme de missionnaire du bon sens. Ça n’est pas une question d’âge –la vie n’est pas si simple–, pas plus que ne le sont les autres déclinaisons de la connerie, bénigne comme généralisée. Les réponses qu’on peut opposer à ce prosélytisme du 9 à 5 et des avantages sociaux sont multiples. La variante la plus fréquente est sans l’ombre d’un doute celle du silence ou du changement de sujet. Ou alors, si l’auteur est d’humeur combattive, il peut se défendre.
Soit en invoquant l’importance de la littérature dans la Société ou les Arts –un échec assuré–, soit en se reprenant: «Bien sûr, je sais que c’est impossible, ça n’est évidemment pas un travail, je ferai autre chose, par exemple prof… Si la question est qu’est-ce que je veux faire: écrivain. Ce que je vais faire: prof.» Un autre cas de figure: le vis-à-vis du créateur se montre d’abord étrangement compréhensif. «Ah, la littérature… C’est bien, la littérature… Moi-même, il y a longtemps… Mais c’est dur aussi, très dur d’écrire. Il ne suffit pas de vouloir écrire un roman pour en écrire un… Ça n’est pas si glamour qu’on le croit.» Si notre jeune auteur a un minimum de colonne vertébrale, il y a de fortes chances qu’il soit insulté de ce que son interlocuteur prenne pour acquis qu’il n’a jamais rien écrit et qu’il fonde sa connaissance du monde littéraire sur des films et des livres. Il suffoque d’indignation –intérieurement, les gens de lettres étant essentiellement introspectifs et un brin inadaptés à la vie en société– et il évite de nourrir la conver-
sation. Somme toute, l’écrivain en herbe apprendra bien vite à fermer sa gueule. Car enfin, il faut vivre: vivre, dans le sens de se donner les moyens matériels de satisfaire ses besoins plus ou moins fondamentaux. Vivre, dans son acception d’accomplir et réaliser des ambitions et des désirs personnels, constitue un excellent passe-temps. J’ai toujours eu cette idée, ô combien subversive ai-je récemment appris, que les choix qui guideront ma vie d’adulte tourneront autour de quelque chose d’un peu plus fondamental que payer des factures et faire les courses. Idée qui, est-il besoin de le préciser, suscite fatalement l’apparition d’un sourire fin, d’un petit haussement du menton et d’un regard en coin (pas nécessairement dans cet ordre), accompagnés le plus souvent d’un commentaire du type «on verra bien», ou encore «oui oui, ça, c’est du déjà vu, dans un autre pays, une autre époque, une autre langue…» Et il y a des jours, je me demande bien pourquoi il y a encore des gens qui écrivent des livres. x
Vous avez une âme d’écrivain et la plume au chômage? Collaborez au Délit. Écrivez à rec@delitfrancais.com
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L’ÉDITO CULTUREL
Don’t Bother Catherine Côté-Ostiguy Le Délit
C
’est drôle comme on n’hésite pas à crier haut et fort comme on l’aime notre langue, comme elle est belle notre langue, alors que lorsqu’il est temps de la défendre concrètement, peu répondent à l’appel. Rassurez-vous, je ne vous ferai pas endurer un autre discours sur les écoles-passerelles. Ce n’est pas mon département, et d’autres le feront mieux que moi. Non, ce qui m’intéresse, c’est l’apparente ferveur qui nous habite tous lorsqu’il est question de langue, mais qui se double d’un défaitisme implacable lorsqu’il est temps d’agir. Dans le dernier numéro du Devoir, Odile Tremblay soulignait que les Français se laissent davantage envahir par l’anglais que les Québécois. On l’a souvent remarqué, sans jamais comprendre tout à fait pourquoi. Le fait est que leur situation est très différente de la nôtre: l’anglais, en France, n’est pas perçu comme une menace. Il est vrai que
dans notre petit îlot francophone au cœur de l’Amérique, rien n’est acquis. C’est certainement cette position précaire qui nous fait tenir des discours agressifs contre le rest of Canada, voyant en lui la voix dominante qui veut faire taire notre chuchotement. Même ici, dans la métropole francophone d’une province francophone, ça ne va pas de soi. À l’intérieur de la bulle mcgilloise, plusieurs remettent en question l’existence d’un hebdomadaire en langue française. C’est, du moins, ce dont nous avons pu être témoins lors d’un certain référendum de la Daily Publication Society tenu au printemps dernier. On nous sert le discours du «c’est pas la peine», «don’t bother». On ne comprend pas l’utilité d’une telle publication, on nous dit qu’on ferait mieux de parler anglais, comme tout le monde. Pourtant, il me semble que c’est dans des situations comme celle-là, dans des environnements où l’anglais est majoritaire, qu’il est plus important de revendiquer la place de notre langue. Si on ne la défend
que lorsqu’elle est hors de danger, alors à quoi ça rime? Le réflexe qu’ont plusieurs, c’est de se révolter contre l’anglicisation plutôt que de s’assurer, à l’inverse, de la présence d’un français fort qui résisterait de lui-même à l’envahisseur, comme l’a déjà fait un certain village gaulois… Nous avons la chance de posséder une culture riche, indépendante, unique. Notre production cinématographique, musicale et littéraire est importante, notre univers médiatique, développé. Nous avons trop à perdre pour laisser le défaitisme nous gagner. La solution, toutefois, n’est pas de rager contre l’américanisation culturelle qui guette notre coin de pays, mais de faire en sorte que notre culture à nous, dans toute sa précarité, soit si fortement consolidée qu’elle en devienne inassimilable. Comme il n’y a rien qui ne se fasse sans effort, employonsnous donc à défendre la langue française de façon adéquate. En ce qui nous concerne, ça se fait un numéro à la fois. x
CINÉMA
Hommage à Claude Chabrol et Alain Corneau
D
u 3 au 28 novembre, la Cinémathèque québécoise souligne la disparition récente de deux cinéastes français, Claude Chabrol et Alain Corneau. Chabrol, réalisateur prolifique s’il en est, grande figure de la Nouvelle Vague, s’est éteint le 12 septembre dernier. Il avait récemment reçu la Caméra de la Berlinale 2009 pour sa carrière. Alain Corneau quant à lui, est décédé le 29 août dernier, quelques mois après avoir reçu le Prix Henri-Langlois. Une douzaine de films des deux réalisateurs sera projetée, tous dans leur version originale 35mm. La Cinémathèque présentera ainsi, de Claude Chabrol: Le Beau Serge (1958), Les Biches (1968), Violette Nozière (1978), Une affaire de femmes (1988),
Betty (1992), Rien ne va plus
films Série noire (1979), Nocturne
Nocturne indien (1989) d’Alain Corneau Gracieuseté de l’Union Générale Cinématographique (UGC)
(1997) et L’Ivresse du pouvoir (2006) et d’Alain Corneau, les
indien (1989) et Tous les matins du monde (1991). x
MUSIQUE
Le 24e Coup de cœur francophone
D
u 4 au 14 novembre aura lieu le 24e Coup de cœur francophone, qui présentera entre autres, le 5 novembre, Laurence Hélie au Club Soda, eXterio, Crash ton rock et Ripé au Cabaret Juste Pour Rire et Chinatown à la Maison de la Culture Maisonneuve. Le 6, c’est Jorane et Rendez-vous qui seront au Lion d’Or alors que Caloon
Saloon et Fred Fortin se produiront au Club Soda. Caiman Fu et Paul Carnello joueront quant à eux au Lion d’Or le 8 novembre. Le 10, Damien Robitaille sera au Cabaret Juste Pour Rire tandis que le 12, c’est Sunny Duval qui va conquérir la scène du Lion d’Or, suivi de Sunny Duval. De nombreux autres artistes seront présents dans ce festival
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qui ne se limite pas à Montréal. Événement «itinérant», le Coup de Coeur fera en effet escale dans trente villes canadiennes durant le mois de novembre, afin de contrer, entre autres, l’isolement des communautés et des artistes francophones. x Pour plus d’informations: www.coupdecoeur.qc.ca/2010
COUP DE CŒUR
Hereafter
Gracieuseté de Warner Bros Entertainement
Annick Lavogiez Le Délit
L
es films de Clint Eastwood, on les attend longtemps. On les imagine, on les invente, on regarde la bande annonce dix-huit fois et finalement, on n’est jamais déçu. Hereafter, son dernier long métrage, fait partie de ceux-là. Sans être le chef d’œuvre du réalisateur dont la réputation n’est plus à faire, il remplira sans aucun doute les espérances des inconditionnels de son cinéma comme de ses néophytes. Trois personnages expérimentent, de manière personnelle et intime, la mort. Marie (Cécile de France), une brillante journaliste parisienne, frôle la mort lors d’un tsunami. À Londres, Marcus (Frankie McLaren), jeune collégien, doit affronter la disparition de son frère jumeau, renversé par une voiture. À San Francisco, Georges (Matt Damon), ouvrier américain, semble avoir le don de communiquer avec les morts. Ces trois personnages sont enfermés dans une grande solitude qui les pousse à se poser des questions sur la mort. Ce qu’ils perçoivent ou veulent croire de l’au-delà bouleverse leur vie et leur permet, d’une façon ou d’une autre, de briser leur propre isolement. Alors que rien ne présume qu’ils doivent un jour se rencontrer, leurs chemins se croisent dans un final d’une classique et touchante simplicité. La réussite du film tient notamment à la qualité du jeu des acteurs qui ne laissent jamais la caméra (et le spectateur) juger les personnages. Grâce à un jeu toujours sobre et efficace, les comédiens offrent des protagonistes simples et transparents qui ne
sombrent ni dans le ridicule, ni dans le fantasmatique, ce qui est pourtant si courant quand un film aborde la thématique de l’au-delà. Évitant les traditionnels clichés cinématographiques dont on nous bombarde lorsqu’on traite de la mort et de cet après mystérieux, Clint Eastwood se limite à quelques images efficaces qui ressemblent aux nombreux témoignages des gens qui sortent du coma (présence d’une lumière, sensation de légèreté et de paix). Il n’apporte pas de réponse à la sempiternelle question «Qu’y a-t-il après la mort?», ce qui enrichit considérablement son film, qui gagne en sincérité. Eastwood réussit plutôt à capter, à travers ses personnages endeuillés et mélancoliques, le besoin de croire en l’existence d’un possible ailleurs, sans jamais affirmer sa réalité. Avec tendresse et tact, il filme des acteurs talentueux loin de tout larmoiement ou pathétisme excessif. Ce qu’on aime dans cette histoire, c’est le temps que prend Eastwood pour faire entrer son public dans l’univers si différent de ses personnages. C’est aussi la rapide efficacité de la rencontre finale entre les protagonistes, sur laquelle le réalisateur ne s’attarde pas outre mesure, laissant le public rêver la suite. La touche onirique finale permet en effet au spectateur de quitter la salle de cinéma sur une impression positive, sans pour autant offrir un classique happy end. Sensible et intelligent, Hereafter ne satisfera peut-être pas les amateurs de blockbusters ni de thrillers paranormaux en quête de questionnement mystique. Avec un rythme lent et intimiste, il saura plutôt conquérir les amateurs de drames intelligents et humains. x
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LE DÉLIT AIME...
Le Théâtre de l’Esquisse Mai Anh Tran-Ho Le Délit
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(il faut noter aussi que les lieux qui proposent des coproductions avec les compagnies demandent souvent un dépôt de projet, ce qui retarde parfois le processus créatif). De surcroît, les spectateurs profitent bien de cette proximité avec les acteurs. Par exemple, jusqu’au 8 novembre, le Théâtre de la Marine Britannique présente sa première production, Délire à deux. YvesAntoine Rivest, co-fondateur de la compagnie et comédien, explique que cette pièce d’Eugène Ionesco s’est un peu imposée d’elle-même. Aux côtés d’Anne-Hélène Prévost, une amie qu’il a perdue de vue -elle a fréquenté le cégep de St-Hyacinthe alors qu’il était au Conservatoire d’art dramatique- puis retrouvé dans le milieu, la pièce semble être un choix, du
moins, cohérent: un couple est enfermé depuis dix-sept ans, alors qu’à l’extérieur les bruits d’une guerre inconnue se fait entendre. Leurs échanges se limitent à une dispute autour de la question: Estce que le colimaçon et la tortue sont le même animal? «Ils sont pris ensemble, ils s’aiment dans cette chicane», explique YvesAntoine Rivest. La pièce exprime la difficulté de communication et le mélange entre les disputes internes et externes. La façon dont Gilbert Turp, le metteur en scène, et les membres de la compagnie traitent du sujet est bien plus intéressante. Déjà, s’attaquer à ce grand auteur est un défi qui mérite d’être souligné, mais ils ont surtout décidé de jouer l’histoire sur deux époques: la jeunesse et le début de la guerre. Aussi les comé-
diens portent-ils des masques qui marquent le passage du temps. Ils explorent ainsi l’évolution du couple, tentent de retrouver l’énergie des débuts pour accéder aux termes de l’âge mur. Yves-Antoine Rivest avance qu’un des plaisirs d’un théâtre émergent est de pouvoir monter des coups de cœur, de pouvoir faire des expérimentations -ce qui retombe bien dans les débuts du Théâtre de l’Esquisse. Bien sûr, ils n’ont pas toujours «les moyens de [leurs] ambitions», mais les feux du début sont bien là et le public est au rendez-vous et généreux, affirme-t-il. Ce qui est certain, c’est que Le Délit y sera, mardi, pour assister à ce Délire à deux. Une critique que vous pourrez retrouver en exclusif web cette semaine sur delitfrancais.com. x
par Martine Chapuis
La bd de la semaine
ontréal regorge de petits lieux de diffusion où il est possible de découvrir de vraies perles culturelles. Toutefois, la recherche peut s’avérer être une réelle chasse au trésor. C’est alors qu’on se surprend à fréquenter les maisons de la culture et à aimer, par exemple, le Théâtre de l’Esquisse. Fondé en 1982, le Théâtre de l’Esquisse était un espace dédié aux différentes formes artistiques selon les cultures. Son mandat premier était de favoriser les échanges interculturels (dans un Québec submergé par la morosité post-référendaire), surtout avec l’Orient, et la diffusion de textes peu connus.
Avec les années, l’Esquisse a évolué de pair avec la communauté du Plateau et a développé un important volet jeune public, en collaboration avec Sylvie Belleau, directrice artistique du Théâtre de la Source. Depuis 1991, le conte est un genre privilégié du Théâtre de l’Esquisse qui offre chaque semaine, Abraconte, un spectacle pour les petits et les grands. La salle, qui peut accueillir tout au plus une centaine de spectateurs, permet la création d’un monde intime et unique propice au genre. Mis à part cette vocation, le Théâtre de l’Esquisse est également un lieu idéal pour découvrir de jeunes compagnies de théâtre. La salle louée, l’espace permet aux artistes émergents de présenter leurs premières créations tout en conservant leurs inspirations
Samuel Lalonde
16 Arts & Culture
xle délit · le mardi 2 novembre 2010 · delitfrancais.com