Le Délit

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le délit Le lys autour du monde

delitfrancais.com

le seul journal francophone de l’Université McGill

Publié par la société des publications du Daily, une association étudiante de l’Université McGill

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Le mardi 22 novembre 2011 | Volume 101 Numéro 11

Remplit les trous depuis 1977


Volume 101 Numéro 11

Éditorial

le délit

Le seul journal francophone de l’Université McGill

rec@delitfrancais.com

Le Nouvel Empire Anabel Cossette Civitella Le Délit

L

e sujet de la concentration de l’information est venu brasser des affaires du côté de la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ), la semaine passée. Suite à la consultation publique sur l’avenir de l’information, la FECQ présentait ses recommandations, notamment de créer un statut de journaliste professionnel. «Ce statut serait accompagné d’un code de déontologie contraignant. Les étudiants recommandent que ce statut de journaliste soit géré par les journalistes eux-mêmes via la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ)» dit le rapport. Il faut savoir que dans le cas présent la FECQ propose le statut de journaliste professionnel dans le but d’assurer le respect du devoir journalistique tout en contrecarrant la concentration de l’information, chose qui n’est aucunement régulée en ce moment. L’ordre professionnel pour les journalistes est quelque chose de débattu depuis longtemps, notamment parce que les journalistes eux-mêmes refusent de se délester de la moindre parcelle d’indépendance. Un des arguments avancés au sein du Groupe de travail sur le journalisme et l’avenir de l’information au Québec est qu’un Ordre serait nécessairement sous la tutelle de l’État: «la méfiance contre toute intervention de l’État dans le domaine du journalisme et de l’information a toujours prévalu et clos le débat». Cette peur de l’ingérence de l’État est typiquement néolibérale: on craint que le gouvernement interfère dans la propriété individuelle ou, dans ce cas-ci, dans le droit à la libre expression.

À l’opposé, ce qui est à craindre est un État totalement déconnecté de l’information et qui laisse le soin aux compagnies privées de s’occuper des médias. Et c’est le cas qui nous préoccupe. L’empire Quebecor est évidemment l’exemple le plus frappant. Si vous êtes un fervent lecteur du Journal de Montréal, vous savez à quoi vous en tenir: Julie Snyder a de bonnes chances de se retrouver en couverture ou en page centrale, et ses intérêts risquent de devenir les vôtres du même coup. Pourtant, si vous feuilletez le magazine Cool ou Décoration chez soi, si vous lisez des romans édités par Libre Expression ou CEC, ou si vous achetez chez Archambault, vous encouragez aussi la famille Péladeau. Peut-être à vos dépens, puisque le lien n’est pas si évident, mais vous encouragez aussi la concentration de l’information. En fait, ce qu’il faut éviter, ce sont les extrêmes. Un gouvernement en contrôle des médias, comme c’est le cas dans les régimes totalitaires, n’est certainement pas à souhaiter. Pourtant, lorsque l’État est complètement à l’écart des médias et laisse les journaux se privatiser à outrance, ce sont les Quebecor de ce monde qui prennent le contrôle et mettent les politiciens dans leur poche, éclipsant du même coup tout accès objectif à l’information. Là où l’État s’ingère Le Printemps arabe n’est pas terminé. Les affrontements meurtriers dans la capitale égyptienne continuent alors que le gouvernement militaire de transition soulève la hargne. Durant la fin de semaine, trente morts, sinon plus, et environ 1750 blessés, selon la BBC. Les protestataires refusent le gouvernement militaire qui abuse de sa force selon le Secrétaire général de la Ligue arabe

qui est aussi candidat à l’élection présidentielle en Égypte: «La manière dont la police réagit aux protestataires… nous sommes tous contre cette forme de violence et ce traitement du peuple.» Maintenant que les élections seront peut-être repoussées à la fin de 2012 ou début 2013, la population est d’autant plus en colère. Au printemps 2011, les nouvelles technologies avaient été en vedette lors de la révolution en domino du côté des pays arabes. On parlait d’Internet et des téléphones mobiles comme la voix du peuple, puisqu’ils avaient permis la libre expression dans des pays autoritaires. De ce côté-ci du globe, on parle souvent des nouvelles technologies comme étant ce qui fera disparaître le papier: les blogues, les sites web, Twitter, Facebook, les e-journaux, les e-livres, les e-publicités, etc., tous y passent et sont démonisés par les fervents amateurs de ce qui est imprimé. Pourtant, à mon sens, la concentration de l’information semble un enjeu bien plus important que les «nouveaux médias» et la «disparition des journaux papiers». Les réseaux sociaux comme Facebook et Twitter offrent-ils une plate-forme qui permettrait l’accès et la diffusion d’une information moins biaisée? Les nouveaux médias sont-ils hors d’atteinte de l’empire de l’information qui régit nos vies et influence notre pensée au quotidien, de manière détournée? Le Délit de cette semaine est le dernier numéro régulier qui paraît avant la fin de la session d’automne. Lundi prochain, The McGill Daily et Le Délit s’allieront dans un numéro spécial «À boire!». Par contre, dès janvier nous travaillerons sur un dossier tâchant de faire une mise au point sur l’arnaque tentaculaire de Quebecor. x

ERRATUM Dans le numéro du 15 novembre, dans l’article «Chroniques de grève» à la page 4, il est écrit que «le soutien financier demandé pour le matériel promotionnel de grève et de manifestation faite au VP finances de l’AÉFA n’a pas été accordé.» Ceci est une erreur, le MobSquad n’a jamais demandé de soutien financier à l’AÉFA.

2 Éditorial

rédaction 3480 rue McTavish, bureau B•24 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : +1 514 398-6784 Télécopieur : +1 514 398-8318 Rédactrice en chef rec@delitfrancais.com Anabel Cossette Civitella Actualités actualites@delitfrancais.com Chef de section Emma Ailinn Hautecœur Secrétaire de rédaction Florent Conti Rédacteur campus campus@delitfrancais.com Anthony Lecossois Arts&Culture artsculture@delitfrancais.com Chef de section Raphaël D. Ferland Secrétaire de rédaction Alexis Chemblette Société societe@delitfrancais.com Francis L.-Racine Coordonnateur de la production production@delitfrancais.com Xavier Plamondon Coordonnateur visuel visuel@delitfrancais.com Nicolas Quiazua Infographie infographie@delitfrancais.com Samuel Sigere Coordonnateur de la correction correction@delitfrancais.com Anselme Le Texier Coordonnateur Web reso@delitfrancais.com Nicolas Quiazua Webmestre web@delitfrancais.com Mathieu Ménard Collaboration

Sabrina Ait-Akil, Emilie Blanchard, Audrey Champagne, Bernard D’Arche, Julie d’Auteuil, Alexie Labelle, Annie Lagueux, Vincent Laliberté, John Lévesque, Annie Li, Élise Maciol, Luba Marvoskaia, Raphaëlle Ochietti, Thomas Simmoneau, Miruna Tarcau, LouisPhilippe Tessier, Mai Anh Tran-Ho.

Couverture Image: Nicolas Quiazua Montage: Xavier Plamondon bureau publicitaire 3480 rue McTavish, bureau B•26 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : +1 514 398-6790 Télécopieur : +1 514 398-8318 ads@dailypublications.org Publicité et Gérance Boris Shedov Photocomposition Mathieu Ménard et Geneviève Robert The McGill Daily coordinating@mcgilldaily.com Joan Moses Conseil d’administration de la Société des publications du Daily (SPD) Anabel Cossette Civitella, Marie Catherine Ducharme, Alyssa Favreau, Joseph Henry, Tyler Lawson, Joan Moses, Mai Anh Tran-Ho, Aaron Vansintjan, Debbie Wang

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Actualités

CAMPUS

actualites@delitfrancais.com

Les occupants publient leurs vidéos La qualité n’est pas claire, mais la scène est violente.

Capture d’écean de la vidéo des 14 occupants

Anthony Lecossois Le Délit

L

es 14 occupants du 5e étage ont décidé de donner à la presse deux des vidéos qu’ils ont prises durant l’occupation du bureau de la principale. La qualité est exécrable et il est difficile de distinguer les personnes, certains éléments ressortent cependant.

La scène commence dans le bureau de la principale. Une employée de la sécurité s’adresse à la personne tenant la caméra: «You need to leave. You need to leave because I’m gonna be calling the police.» L’occupant répond «OK, call the police but please do it peace…» Il n’a pas le temps de terminer sa phrase. Un autre agent arrive de derrière la première employée et la caméra commence à trembler violemment. Quelqu’un s’écrie «Guys!». L’occupant se retrouve en une fraction de seconde à genoux, à l’extérieur du bureau. «Get up!», l’étudiant répond «I have osteoporosis», une autre personne, qui semble être celle qui est à terre s’écrie «He has osteoporosis, don’t fucking touch him.» Puis on entend avec insistence: «Walk with me, walk with me!» Une analyse image par image montre une personne habillée en bleu traînant au sol

une autre personne. Les occupants expliquent: «Il s’agit des manteaux bleus de la sécurité. Un employé est en train de traîner l’un d’entre nous au sol.» Une autre vidéo montre Susan Aberman, chef de cabinet de Heather Munroe-Blum en pourparlers avec les occupants. Elle interroge: «You think occupying is going to do something?» Elle propose aux occupants de s’asseoir et de discuter. Dans leur lettre au Délit, les occupants contestaient le fait que les employées présentes étaient effrayées. En réponse, huit employées de l’administration ont écrit une lettre intitulée «McGill c’est nous aussi» (voir page 4). En réaction à la publication des vidéos, Susan Aberman explique: «Il y a eu des cris avant [le moment que l’on voit sur la vidéo]. Mon but était à ce moment-là d’essayer de désamorcer la situation et d’initier un

Susan Aberman et Olivier Marcil, vice-principal affaire extérieures. Photo: extrait vidéo des 14 occupants

dialogue pour mettre fin à cette occupation. La personne avec qui je parlais portait un bonnet et un bandana masquant son visage. Je paraissais peut-être

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»

calme mais j’étais vraiment inquiète.» Vous pouvez consulter les vidéos sur notre site delitfrancais. com x


LETTRE OUVERTE

McGill, c’est nous aussi Lettre de membres du personnel des bureaux de la principale et du vice-principal exécutif

N

ous sommes sept employées et nous étions au 5e étage du Pavillon de l’administration James le jeudi 10 novembre, lorsque quatorze manifestants sont entrés de force et ont occupé notre espace de travail. Nous souhaitons ajouter notre voix et rendre notre expérience publique afin de brosser un portrait plus complet des événements qui se sont produits lors de cette journée. Nous tenons également à ce que l’on sache que nous sommes en désaccord avec la version des faits présentés dans la lettre –signée par les quatorze individus qui ont occupé notre bureau– publiée dans l’édition du 13 novembre du McGill Daily. Cette manifestation n’était pas pacifique; ce que nous avons subi était de l’intimidation, et une violation et une restriction de notre liberté. Sur la bannière qu’ont suspendue les manifestants à partir d’une fenêtre de nos bureaux, on pouvait lire «Occupons McGill», le terme qu’ont utilisé les médias étudiants pour décrire les événements qui ont eu lieu. Nous jugeons inacceptable qu’une occupation agressive de notre espace de travail soit associée à un mouvement pacifique mondial. Nous ne sommes pas des barons du pétrole, ni des banquiers de Wall Street. Nous faisons ce travail parce que nous croyons en McGill et que nous accordons une grande importance à l’enseignement supérieur. Par notre travail, nous soutenons la communauté mcgilloise –étudiants, professeurs,

administration– et nous en sommes fiers. Les personnes qui se sont introduites dans nos bureaux n’ont pas agi comme de véritables mcgillois. Ils n’étaient pas pacifiques. Ils ont bloqué l’accès à notre réception pour ensuite bousculer une employée et forcer une porte verrouillée menant aux bureaux de la principale et du vice-principal exécutif. Ils ont pris d’assaut notre espace de travail et ont tenté de se barricader derrière des meubles de bureau, à l’intérieur d’espaces où se trouvaient des documents confidentiels. Ils ont refusé de s’identifier. Certains d’entre eux étaient cagoulés et avaient masqué leur visage d’un foulard. On les a invités à discuter de leurs préoccupations ou à expliquer les raisons pour lesquelles ils occupaient nos bureaux, ce qu’ils ont refusé de faire. Ils ont de nouveau repoussé une employée et sont entrés dans le bureau de la principale. Lorsque la sécurité est arrivée et leur a demandé de quitter les lieux, certains ont refusé. Ils ont insulté les employés de la sécurité, et les ont traités de […] cochons. En fin de journée le 10 novembre, dans un lieu que nous croyions sécuritaire, nous avons été menacés et intimidés. Lorsque le personnel de sécurité a tenté de nous accompagner à l’extérieur, de nombreux manifestants ont entouré le pavillon et nous ont bloqué la voie. De la fenêtre de notre bureau, nous avons été témoins de l’affrontement entre les mani-

festants et les policiers, et avons alors compris le sentiment que pouvaient ressentir bon nombre de passants et de manifestants véritablement pacifiques. La rage et le comportement irrationnel de quelques-uns ont entièrement pris d’assaut une journée de manifestation soigneusement planifiée. La sécurité de ceux qui se trouvaient à l’intérieur et à l’extérieur du pavillon James a été compromise par les gestes de certains; on peut se demander si ces derniers ne sont pas le 1%. L’espace qui a été occupé de force le 10 novembre est l’espace où nous travaillons chaque jour. Et même si les manifestants n’ont pas tenu compte de nous, il n’en reste pas moins que McGill, c’est nous aussi. Les quatorze individus qui ont fait irruption dans nos bureaux ont publié un compterendu de leurs soi-disant actes héroïques; un compte-rendu qu’ils n’ont pourtant pas signé. McGill, c’est nous aussi, et en apposant notre nom au bas de cette lettre, nous espérons leur rappeler ce que cela veut dire. Susan Aberman Liisa Stephenson Caroline Baril Deidre McCabe Laura D’Angelo Katherine Wong Djénane Andre La lettre des occupant était publiée dans l’édition du 15 novembre du Délit. Huit d’entre eux ont décidé de signer cette lettre qu’ils ont publiée sur Rabble.ca

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CAMPUS

UC Davis – McGill: en perspective Lundi, une semaine jour pour jour après McGill, 3000 étudiants de l’Université de Californie à Davis (#UCDavis) ont tenu un événement similaire: une assemblée générale pour commémorer la violence policière sur leur campus. Depuis, les images ont fait le tour du monde: on y voit un officier de la police du campus aspergeant calmement de piment de Cayenne des étudiants assis en cercle. On apprenait lundi que Heather Munroe-Blum est membre du Board of Advisors de la chancelière de UC Davis. Les ressemblances entre les deux événements sont frappantes, analyser et comparer la réponse des deux administrations en est d’autant plus intéressant. Dossier compilé par Anthony Lecossois pour Le Délit

UC Davis Où

McGill

Quad, l’équivalent de notre lower field

5e étage du bâtiment James, bureau de la principale

Place de la Communauté

Sit-in - Occupation du Quad

Occupation

Chaîne humaine et manifestation

Protéger le campement de Occupy UC Davis

Occuper le lieu symbole de la prise de décision en l’absence des étudiants

Protéger les occupants du bureau de la principale

Gel des frais de scolarité, arrêt du processus de privatisation des universités publiques de Californie (UC system)

Prolongement de la manifestation contre la hausse des frais

Protestation contre l’utilisation de la force par la sécurité de McGill contre les occupants

Aucune, 2 cas de «résistance active» selon l’administration

Violence verbale, bousculade

Jets de pancartes sur la police en réponse à leur intervention

Motifs d’intervention de la police/sécurité

Interdiction de camper sur le campus pour des raisons sanitaires

Élèves à l’apparence et au comportement menaçants selon l’administration Présence de documents confidentiels

Appelée par sécurité Puis, après début de l’intervention: jets de pancartes

Professionnels accusés d’usage abusif de la force

University of California Campus Police

Sécurité de McGill et Olivier Marcil, VP relations externes

SPVM: brigade de quartier puis escouade anti-émeute

Utilisation de piment de Cayenne sur des manifestants pacifiques (assis en chaîne humaine)

Sécurité: Jeter un étudiant à terre, le trainer au sol par la cheville, coups de genoux Olivier Marcil: avoir arraché le bandana qu’un étudiant utilisait pour se couvrir le visage

Utilisation excessive et injustifiée de vélos, matraques, gaz lacrymogènes, piment de Cayenne sur les manifestants, pacifiques ou non

10 (pour rassemblement illégal et refus de se disperser)

Non (cela faisait partie de l’accord passé entre la direction et les occupants)

2 étudiants: (voie de fait sur agent et obstruction au travail de la police)

Les services d’urgence médicale du campus sur place dans l’heure soignent onze étudiants Deux hospitalisés

Aucun, l’accord passé avec les occupants comprenait leur engagement à quitter le campus sur le champ

Aucun venant des services de l’université L’AÉUM et le GRIP-McGill ont pallié au manque d’assistance

Profuse: photos, vidéos qui ont fait le tour du monde. Visionnées par plus de deux millions d’internautes

Deux vidéos ont été diffusées à la presse par les manifestants La direction aurait filmé des vidéos qui n’ont pas été rendues publiques

Nombreuses vidéos diffusées sur YouTube mais de mauvaise qualité (de nuit)

Deux officiers du service de police ont d’abord été suspendus de leurs fonctions, puis la responsable du service

Aucune, Jim Nicell, VP services universitaires, refuse de commenter tant que l’enquête du doyen Jutras n’est pas terminée.

Aucune à ce jour

D’abord l’administration déclare l’utilisation de la force justifiée Sous la pression médiatique, reconnaît l’utilisation abusive du piment de Cayenne

Aucun. HMB: «Je n’ai aucune preuve et donc aucune raison de lancer de procédure disciplinaire.»

Aucun par le SPVM L’administration a reconnu que la sécurité a appelé la Police

Action étudiante Motivation Revendications Violence de la part des étudiants

Faits reprochés aux professionnels

Arrestations Soutien apporté aux étudiants après la manif

Documentation

Sanctions contre les professionnels à ce jour Faits reconnus avant les conclusions de l’enquête

Responsables de l’enquête Rallye de commémoration Pétition exigeant la démission de la principale/chancelière Taille de l’université

Une task force comprenant membres de la direction, professeurs et étudiants

Doyen de la Faculté de Droit, Daniel Jutras

5000 personnes

1000 personnes

75 000 signatures

350 signatures

31 400 étudiants

37 800 étudiants

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Actualités

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URBANISME

Carottes, pommes et poulets dans un 3½ Projet Montréal est en avant-plan en termes d’agriculture urbaine. Louis-Philippe Tessier et Annie Li Le Délit

U

n coup d’œil rapide sur leur programme électoral suffit pour comprendre que la métropole serait bien différente sous la direction de Richard Bergeron, chef du parti. Le 15 novembre, c’est une victoire que célébrait Projet Montréal ainsi que ses énergiques collaborateurs: une consultation publique sur l’agriculture urbaine sera lancée d’ici un ou deux mois. Si la motion que présentera la deuxième opposition le 21 novembre est acceptée, l’Office de consultation publi-

que de Montréal se chargera de l’affaire, ce qui permettrait entre autres de rejoindre un plus grand nombre de citoyens et de s’assurer de l’objectivité des commissaires lors de leur examen de l’état de ladite agriculture de ville. Bien que beaucoup s’inquiètent du fait d’avoir de la volaille en ville, par peur de propagation de maladies par exemple, l’agriculture urbaine offre bien plus que des cocoricos assourdissants. C’est en fait une opportunité pour diminuer la charge de travail et le stress des agriculteurs en périphérie de la métropole. C’est aussi une façon de regrouper les gens d’un

Photo: Camille Chabrol

quartier dans des aires communes, ou de promouvoir le partage de ressources alimentaires, et ce, tout en (re)créant des liens humains entre les résidents. L’agriculture urbaine c’est aussi reconnaître la participation et l’initiative citoyenne, l’ingéniosité, et surtout, la présence de citoyens, et non de simples individus. Enfin, l’agriculture urbaine peut ré-ouvrir l’espace public où les idéaux se rencontrent et s’affrontent entre habitants de différents horizons.

«

L’agriculture offre bien plus que des cocoricos assourdissants.»

Photo: Louis-Philippe Tessier

Un exemple serait le projet de ruelles vertes du quartier Parc-Extension. Ismael Hautecoeur, architecte paysagiste et consultant en agriculture urbaine, explore le côté multidimensionnel de ce type d’agriculture. D’après lui, les ruelles vertes ont une portée «multiculturelle, multisensorielle, et surtout intergénérationnelle». Une consultation publique sur le sujet permettrait donc de convaincre plus de citoyens des bienfaits de cette initiative et leur donnerait la chance d’exprimer leurs inquiétudes.

En d’autres termes, une consultation leur donnerait une voix dans l’élaboration de recommandations qui affecteront très certainement leur niveau de vie. Le fait que Projet Montréal s’implique dans la création de ce comité de consultation démontre un réel leadership et une responsabilité sociale et environnementale. Catherine Maurice, attachée de presse de la deuxième opposition, explique que «les militants et les élus du parti vont participer à des séances de travail et décider démocratiquement des initiatives qui seront avancées. De plus, une consultation publique

est en bonne partie consacrée aux aspects techniques, comme l’encadrement des projets, le rôle des arrondissements versus la ville-centre, etc., et cela devra aussi être débattu». Montréal a bien avancé au fil des années pour ce qui est des jardins collectifs. De leur côté, les citoyens ont pris les initiatives nécessaires pour verdir leur balcon et leur cour arrière. Le succès d’une consultation publique serait de reconnaître tous ces efforts et d’accentuer le développement agricole en ville. Par son soutien, Projet Montréal démontre que cette entreprise est réalisable dans un futur proche. x

de plus. Or, j’avais soulevé qu’il serait rafraîchissant de voir un parti niant cette réalité politique, afin que nous nous concentrions sur les vrais enjeux de société, tels l’éducation, l’économie, la santé, la culture et l’environnement. Comprenez-moi bien; loin de moi l’envie d’endosser à part entière les propositions de François Legault. Cependant, je crois dur comme fer que la résolution de celui-ci à demeurer neutre constitue un pas en avant pour le Québec. Avec la récente présence de François Legault, je ne peux m’empêcher de clamer avec joie qu’enfin un parti comprend le vrai malaise politique québécois, qu’enfin nous aurons droit à de vrais débats constructifs plutôt que régressifs!

Malheureusement, mon enthousiasme se voit vite estompé suite aux déclarations de notre grand maître libéral: «On ne peut pas vouloir être premier ministre du Québec et ne pas être, ou fédéraliste, ou souverainiste». Entre vous et moi, il serait temps que monsieur Charest réagisse aux réactions du peuple. Avant, il doit comprendre ce que son peuple veut. Et ce que peuple veut n’est pas synonyme de ce que Jean Charest veut. Avec la stagnation du mouvement souverainiste au sein de la population, le premier ministre compte sans aucun doute s’appuyer sur le fédéralisme ambiant du Parti libéral afin de remporter les prochaines élections. Pouvons-nous lui en vouloir? Pas tellement, considérant la santé publique de son parti.

Ceci étant dit, puisqu’au Québec on ne peut s’empêcher de se rappeler notre devise, «Je me souviens» dictera probablement les résultats des prochaines élections. Tout compte fait, malgré les efforts de François Legault pour modifier les règles du jeu, les élections prochaines reposeront sans doute sur cette dichotomie «passée-date», où nul autre que Jean Charest pourra en bénéficier. D’une part, on tente de progresser, de s’éloigner des pensées expirées; d’autre part, on nous ramène à cette réalité hautement dépassée. Entre deux fronts, le peuple québécois se voit bâillonné entre les vieilles guerres de politiciens, telles d’interminables parties de bras de fer. x

CHRONIQUE

Entre deux fronts Alexie Labelle | Au-delà du présent

Dichotomisons. Pour ou contre la hausse des frais de scolarité? Pour ou contre la souveraineté? Il semble que ces temps-ci chacun s’efforce de tirer vers les extrêmes, omettant toute forme de zone grise où nuance rime avec manque de crédibilité. Pendant que François

6 Actualités

Legault tente de s’éloigner de cette division politique désuète, le premier ministre Charest fait tout pour le ramener au centre de ce débat. Le Québec a besoin de changement, certes. Et ce dernier réside possiblement dans le réalignement des partis politiques. Ceci dit, il est grand temps de prendre conscience qu’un changement politique québécois nécessite que de nouveaux partis se prêtent au jeu politique habituel tout en osant prêcher une nouvelle formule. Si vous n’avez pas lu mes chroniques précédentes, je suis une partisane de la non-partisannerie traditionnelle québécoise qui oblige tout bon citoyen à voter selon sa vision concernant la souveraineté du Québec. Une vision dichotomique, rien

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POLITIQUE PROVINCIALE

Le logo de Legault Le 14 novembre, la Coalition Avenir Québec devenait un véritable parti politique et dévoilait son nouveau logo. Xavier Plamondon Le Délit

S

ur les médias sociaux, nombreux sont ceux qui n’ont pas mâché leurs mots à l’endroit du nouveau logo de la Coalition Avenir Québec, bien différent des lettres calligraphiées qui avaient parcouru le Québec au cours des derniers mois. Certains ont signalé sa forte ressemblance à celui du Parti Québécois puisqu’il reprend la forme d’un Q. De plus, parce que François Legault est un ancien ténor du PQ, la symbolique derrière cette similitude pourrait avoir des répercussions sur sa propre crédibilité et sa volonté de changement auprès de l’électorat. En plus de noter cette ressemblance, d’autres ont remarqué son look inusité. Infoman a qualifié le logo de «toucan de Froot Loops qui rencontre un lifesaver», une comparaison colorée, à l’image du logo. Sur Twitter, le mot-clic #logodelegault était devenu un trend. Quelques-uns se sont même demandé si Sico, Prismacolor ou Crayola avaient contribué au financement de la

CAQ, expliquant ainsi l’explosion de couleur. Sur Facebook, un membre de la communauté LGBT de Montréal a affirmé, en plaisantant, que «le village gai n’est pas caquiste et qu’il avait choisi ses couleurs de drapeau bien avant la sortie du logo de la CAQ»! Le plus triste dans l’histoire c’est que Simon Boulanger, associé de l’agence Réservoir et graphiste-designer du logo, a dû intervenir à plusieurs reprises pour expliquer en quoi consistait le logo: «Le logo devait refléter le rassemblement. Celui de différents courants et opinions présents dans la société québécoise et qui ont choisi de se rejoindre dans une coalition. Les formes réunies et formant un cercle (le C de Coalition) sont volontairement de couleurs différentes pour souligner la diversité» démystifie-t-il. Ainsi, la similitude à un diagramme en tarte est totalement assumée. D’autres en ont profité pour spéculer sur les pourcentages et la composition de cette Coalition. Sur Facebook circulait le logo-graphique montrant que

«Le logo devait refléter le rassemblement. Celui de différents courants et opinions présents dans la société québécoise.» Photo: coalitionavenir.org

4,99% du «magma caquiste» sont des «enseignants qui attendent depuis 30 ans des augmentations de salaire substantielles», 2% sont «des lucides déçus», et que 19% sont des «souverainistes semimous de centre-droit modérés». Malgré le divertissement que procurent ces commentaires humoristiques, il est dommage que si peu d’attention médiatique soit

portée sur les idées et le programme du parti. Pour de nombreux citoyens, l’ambidextrie politique dont souffre la CAQ ainsi que son silence sur la question constitutionnelle posent problème. De plus, Monsieur Legault a laissé échapper un nombre effarent de «on verra» lorsque les médias lui ont demandé des précisions sur son programme. Or, des

raisons bien évidentes expliquent ce mutisme. En ne s’étiquetant pas et en demeurant évasive, la CAQ peut aller chercher la majorité des votes libres et espérer remporter une majorité aux prochaines élections. Mais cela reste à voir. Une telle victoire dépend de plusieurs facteurs. Notamment, il faudra voir si (ou plutôt quand) l’ADQ acceptera de se fusionner avec la CAQ. De plus, si Pauline Marois est éjectée de la tête son parti et que Gilles Duceppe se risque à prendre le contrôle du navire en détresse, les effets pourraient être dissipés. Selon des études et sondages, une importante proportion des supporters de la CAQ serait composée d’anciens péquistes désillusionnés par la direction du parti. Dans le cas d’une arrivée de Gilles Duceppe sur la scène politique provinciale, le vote pseudonationaliste serait séparé entre la CAQ et le PQ. Le Parti libéral pourrait ainsi espérer remporter un quatrième mandat consécutif. Comme quoi l’énoncé «diviser pour mieux régner» est encore un concept d’actualité. x

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CHRONIQUE

Un peu de bon sens

Bernard D’Arche | Politique française

RAPPEL! La France, comme une grande partie des pays développés, a la tête sous l’eau. Le pays est submergé par la crise. François Hollande, candidat socialiste à l’élection présidentielle ne semble pas saisir l’importance de cette situation. La semaine passée, il a signé un accord avec les Verts, principal

parti écologiste en France, pour réduire la part du nucléaire dans l’économie française et ce dans l’espoir d’unifier les Français. Est-ce vraiment la direction à prendre? François Hollande s’est engagé auprès des électeurs des Verts à réduire de 75% à 50% la part du nucléaire dans la production d’électricité d’ici 2030 et d’arrêter vingt-quatre centrales sur les cinquante-huit en fonctionnement aujourd’hui d’ici 2025. Selon l’Institut Montaigne, le surcoût pour l’État s’approcherait de 125 milliards d’euros. La cerise sur le gâteau? Suppression de 160 000 postes d’ici 2030. Je ne sais pas si François Hollande est en train d’essayer de perfectionner un New Deal à la française, mais cela, me semble-til, risque d’accroître le chômage. Environ 10% de la population

x le délit · le mardi 22 novembre 2011 · delitfrancais.com

active est déjà sans emploi. Bien entendu, la suppression de postes entraînera une restructuration de l’économie de l’Hexagone, et par conséquent une mise en péril des emplois à long terme. Le seul hic est que la France ne peut tout simplement pas se permettre de penser au long terme; car sa santé économique reste fragile. Créer des emplois, oui. En supprimer, surtout pas. La crise des subprimes de 2008 et la crise de la dette ont affaibli la performance de la France, et sont toujours d’actualité. Il ne sert à rien de se tirer une balle dans le pied. Les Français doivent déjà vivre avec un taux de chômage monstrueux, et une dette qui commence à être difficile à évaluer; n’en rajoutez pas s’il vous plaît. Il semblerait que François Hollande dévoile subtilement son idée directrice: améliorer

l’aspect «social» de la France. Quelle bonne idée cela aurait été quand la France se portait bien! Pour sortir de la crise, il est pourtant indispensable de sauver l’économie en premier lieu. Ensuite il sera possible de penser au «social». Cela fait des années que le monde affronte une crise colossale. Cela fait des années que le monde la combat de la même façon. Peut-être y a-t-il une leçon à en tirer. Pensez-vous qu’il soit normal que l’aéroport le moins apprécié au monde –RoissyCharles-de-Gaule– soit le septième aéroport le plus fréquenté du monde, accueillant plus de cinquante-huit millions de passagers chaque année? Avec un service lamentable et une infrastructure qui n’enchante pas, cet aéroport symbolise en quelque sorte la situation actuelle. La

France doit sortir de cette crise moderne. Moderne dans le sens qu’elle doit être plus créative. Nicolas Sarkozy, à mon sens, manque de cet esprit créateur. Pour pouvoir aller plus loin dans ses réformes, dans son travail, il doit innover. En étant constructeur d’une France plus ouverte au changement il permettrait à la cinquième puissance économique mondiale de se renforcer et de maintenir cette position face aux nouvelles puissance, comme le Brésil, la Russie, l’Inde ou la Chine. Le statu quo n’a jamais permis un développement durable. C’est le chemin le plus direct pour aller au gouffre. Ce qui manque à la France c’est un esprit visionnaire. Malheureusement, aucun candidat ne semble avoir une image de la France dans cinquante ans. Et cela est le véritable problème. x

Actualités

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Société societe@delitfrancais.com

L Le monde du Québec De la doctrine Gérin-Lajoie aux politiques du ministère des Relations internationales, le Québec se positionne avec dynamisme dans la Francophonie et sur la scène internationale. Annie Lagueux Le Délit

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e Québec est un état fédéré qui a le pouvoir d’exercer exclusivement les compétences qui lui ont été dévolues par la Loi constitutionnelle de 1867. Pensons notamment à la gestion des ressources naturelles, la santé, l’éducation et la culture. Toutefois, aucune mention des relations internationales ne figure dans cet acte constitutif et la conduite des relations internationales a été laissée à l’appréciation des tribunaux au cours des années. C’est ainsi que depuis le XIXe siècle, les jugements successifs des tribunaux ont affirmé que «l’état fédéré n’est pas subordonné à l’État fédéral». De plus, la doctrine Gérin-Lajoie vient, dès les années 1960, mettre de l’avant l’idée selon laquelle les compétences des provinces canadiennes s’étendent tant au sein de la fédération qu’à l’international. En 1967, l’Assemblée législative du Québec a adopté à l’unanimité un projet de loi créant un ministère des affaires intergouvernementales. Paul Gérin-Lajoie l’affirme le 12 avril 1965: «les rapports interétatiques concernent tous les aspects de la vie sociale. C’est pourquoi, dans une fédération comme le Canada, il est maintenant nécessaire que les collectivités membres qui le désirent participent activement et personnellement à l’élaboration des conventions internationales qui les intéressent directement». En résumé, la doctrine Gérin-Lajoie se veut une extension externe des responsabilités internes et dévolues au Québec. La création d’un ministère responsable pour les relations internationales a définitivement consacré le développement des relations internationales du Québec et la création de son réseau de représentations qui fait exception auprès des états fédérés du monde. «De plus en plus, les décisions qui sont prises au niveau international et les normes qui y sont façonnées s’articulent, au quotidien, dans des domaines diversifiés dont de moins en moins relèvent des compétences législatives et réglementai-

res des gouvernements centraux. Non seulement les entités fédérées comme le Québec, la Flandre ou la Wallonie doiventelles être en mesure de répondre à cette nouvelle donne, mais elles ont tout intérêt à intervenir en amont afin que dès l’élaboration de ces nouvelles conditions leurs intérêts soient pris en considération.» Ces paroles sont celles du Directeur de l’enseignement et de la recherche de l’École nationale d’administration publique lors du Déjeuner conférence à la résidence du Délégué général du Québec à Bruxelles, en février 2007. Ces propos sont révélateurs; ils contiennent en effet l’essence et l’importance des relations internationales que doit développer le gouvernement du Québec, en tant que province, dans le cadre de la mondialisation. Dans un monde où l’intégration internationale et régionale, il importe pour le Québec d’assurer une position de tête dans les états fédérés. Par contre, le Québec n’a pas les attributs légaux de la souveraineté pour assurer des relations internationales conventionnelles.

«Nous ne sommes pas égaux, nous ne sommes pas les gouvernements juniors du gouvernement national.»

Un exemple pertinent de la politique internationale du Québec est sa présence au Sommet de Copenhague de 2009. En effet, le Premier ministre Jean Charest a expliqué la présence du Québec à ce sommet sur l’environnement en affirmant que le gouvernement fédéral peut avoir le pouvoir de signer des traités internationaux, mais il n’a pas le pouvoir de contraindre les gouvernements provinciaux dans leurs champs de compétence: «Nous sommes égaux, nous ne sommes pas les gouvernements juniors du gouvernement national». Une rhétorique empreinte de pragmatisme et surtout reconnaissant la compétence du Québec à l’étranger.

Divers mécanismes et institutions ont été mis en place par la province aux cours des années afin d’assurer la «dimension internationale de ses responsabilités» dans les champs où elle a compétence. C’est ainsi que nous avons aujourd’hui un ministère des Relations internationales. Notre système politique confère cependant des compétences réservées au gouvernement fédéral –pensons notamment à la défense, à l’octroi du statut diplomatique, à la reconnaissance des États étrangers et aux douanes. Dans certaines situations ponctuelles, des ententes interviennent entre les gouvernements québécois et canadien. C’est ainsi que le Québec a le pouvoir de définir ses critères de sélection quant au choix des immigrants indépendants qu’il accueille sur son territoire. Le Québec s’est doté en 2006 d’une Politique internationale du Québec. Ce document est non équivoque et met en avant-plan certains objectifs cruciaux pour le Québec. Ils s’articulent ainsi: renforcer la capacité d’action et d’influence de l’État québécois, favoriser la croissance et la prospérité du Québec, contribuer à la sécurité du Québec et du continent nord-américain, promouvoir l’identité et la culture du Québec et contribuer à l’effort de solidarité internationale. L’action internationale du Québec s’est donc vue insuffler un vent de fraicheur, et les actions développées dans les prochaines années seront donc élaborées avec ces buts en tête. Le réseau de représentations du Québec à l’étranger comporte plusieurs organismes ayant des missions spécifiques. Dans l’ensemble, le réseau du ministère offre aux entreprises, aux créateurs, aux chercheurs et aux institutions québécoises des services, des conseils et des activités adaptés aux caractéristiques divers de pays Dans un premier temps, le Québec compte sept délégations générales qui sont le plus important des postes du Québec à l’étranger. Le délégué général

Le Québec a une délégation générale à Munich…

… ainsi qu’à Mexico

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du Québec est nommé par le gouvernement du Québec afin d’administrer des services pour les québécois à l’étranger et pour les résidants du pays au niveau de l’économie, de l’éducation, de la culture, de l’immigration et des affaires publiques. Les délégations générales sont situées à Bruxelles, Londres, Mexico, Munich, New York, Paris, Tokyo.

«La

doctrine GérinLajoie vient, dès les années 1960, mettre de l’avant l’idée selon laquelle les compétences des provinces canadiennes s’étendent tant au sein de la fédération qu’à l’international.»

Le Québec a aussi cinq délégations qui sont responsables pour les mêmes services qu’une délégation générale. Cependant, elles sont plus restreintes en nombres d’employés. Le délégué du Québec est lui aussi nommé par le gouvernement du Québec. Les délégations sont situées à Atlanta, Boston, Chicago, Los Angeles, Rome. Le Québec compte aussi dix Bureaux qui sont responsables d’administrer des services spécifiques dans certains pays et d’assurer une présence dans des pays particuliers. Le chef de bureau est nommé par le ministère des relations internationales.

À la différence d’une délégation générale et d’une délégation, le bureau du Québec ne compte aucun conseiller ni employé du ministère mis à part le chef de bureau. L’entièreté des employés du bureau de représentations est composée d’attachés et du personnel de soutien recruté sur place. Les bureaux de Hong Kong et de Vienne sont principalement des bureaux d’immigration tandis que le bureau de Stockholm est un bureau d’Investissement Québec. Ces bureaux sont situés à Barcelone, Pékin, Berlin, Hong Kong, Mumbai, Sao Paulo, Shanghai, Stockholm, Vienne, Washington. Enfin, le Québec compte quatre antennes qui sont dirigées par un citoyen du pays d’accueil. Il s’agit en fait d’un citoyen du pays, qui a un lien d’attachement avec le Québec, qui offre des services dans un champ d’activité déterminés. Les antennes du gouvernement du Québec sont situées à Milan, Santiago du Chili, Séoul, Taipei. Il est important de comprendre que les représentations du Québec à l’étranger ne détiennent pas le statut diplomatique sauf pour la délégation générale du Québec à Paris créée en 1961 sous le gouvernement de Jean Lesage. Le Québec est un acteur important des états fédérés du monde et il a beaucoup plus de prérogatives que n’importe quel autre acteur fédéré. Le Québec à une voix bien à lui dans l’Organisation internationale de la Francophonie et une représentation particulière au sein de la délégation de son pays à l’UNESCO.

Un exemple concret pour approfondir le sujet est la délégation générale de New York. La ville de New York est la destination par excellence des touristes québécois en quête d’un séjour à court terme aux États-Unis. Elle est aussi une plaque tournante des opportunités culturelles et d’affaires pour le Québec.

7 délégations générales: Bruxelles, Londres, Mexico, Munich, New York, Paris, Tokyo 5 délégations: Atlanta, Boston, Chicago, Los Angeles, Rome 10 bureaux: Barcelone, Pékin, Berlin, Hong Kong, Mumbai, Sao Paulo, Shanghai, Stockholm,Vienne, Washington 4 antennes: Milan, Santiago, Séoul, Taipei

La délégation générale de New York est représentée par John Parisella, délégué général. Depuis le 16 novembre 2009, monsieur Parisella agit au poste le plus important du Québec aux États-Unis. À ce titre, il représente le Québec dans l’état de New York et la région du Mid-Atlantic, ainsi qu’à Washington, D.C. Inaugurée en 1940 et principale représentation du Québec aux États-Unis, la délégation générale du Québec à New York fait la promotion des intérêts du Québec dans le secteur des affaires, de l’investissement, de l’éducation, de la culture et des affaires publiques. Au niveau des services aux affaires économiques, la délégation informe les Américains et promeut les produits et les secteurs d’excellence du Québec; elle fait connaître les avantages du Québec comme place d’affaires et elle aide les exportateurs québécois dans leur recherche de distribution. Au niveau des communications et des affaires éducatives, la délégation générale fournit au public américain des informations et de la documentation sur le Québec et elle assure, notamment, le suivi des relations bilatérales avec les États du Mid-Atlantic. Au niveau de la culture, la délégation générale promeut et favorise le rayonnement de la culture québécoise aux États-Unis, elle supporte les artistes québécois à New York, et elle conseille notamment le ministère de la Culture et les milieux culturels afin d’accroître la circulation des artistes québécois aux États-Unis. x

Le Délit appelle New-York… Entretient avec le directeur des services culturels de la délégation générale du Québec à New York, Jean-François Hould

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LD: Quel est le rôle du service culturel de la délégation générale du Québec à New York? JFH: Le service culturel entretient des liens avec les organismes culturels américains en vue d’accroître la circulation des artistes québécois aux États-Unis et répond aux demandes des milieux culturels québécois en leur fournissant un appui conseil, financier ou logistique. En collaboration avec le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine (MCCCF) pour la réaliser d’activités de promotion de la culture québécoise aux États-Unis. LD: Quels sont les opportunités pour le service culturel, mais aussi pour la DGQNY? JFH: Le contenu culturel québécois n’a jamais été autant présent sur la scène internationale qu’au cours de ces dernières années. La qualité de la production culturelle et le talent des artistes québécois sont re-

connus dans nos politiques internationales comme étant notre meilleure carte de visite. Alors que de nombreux gouvernements désinvestissent en culture (The National Endowement for the Art est passé de 167,5 million de dollars en 2010 à 154 en 2011, soit une coupe de 13,5 millions), le gouvernement du Québec a protégé ses programmes et a ajouté 4 millions de dollars récurrents à ses programmes visant le rayonnement culturel à l’international (Budget du MCCCF avoisinant les 666 millions dont 87,5 au Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ)). La DGQNY, en partenariat avec le MCCCF, le CALQ et la Société des dévélopement des entreprises culturels qui offrent des programmes pour nos artistes et pour nos industries culturelles, consolide donc cette présence. LD: Quels sont les défis auxque la DGQNY devra faire face au niveau culturel?

JFH: le processus de rémunération, d’imposition et d’obtention de visa rebute certains partenaires québécois à exporter la culture québécoise aux États-Unis. Il faut aussi comprendre que les États-Unis projettent souvent l’image du marché culturel autosuffisant. De plus, la crise financière a grandement affecté l’ensemble du milieu culturel américain. L’argent se fait rare et certains partenaires de la DGQNY se sont retrouvés dans une situation plus précaire. LD: Quel est le plan d’action pour promovoir la culture québécoise? JFH: Notre vision conjugue exportation culturelle et échanges culturels en favorisant le maillage, tout en continuant d’informer les professionnels américains de l’offre culturelle. Premièrement, il faut favoriser le maillage pour favoriser l’adéquation entre l’offre québécoise et le marché américain. La création de liens à long terme entre

les intervenants culturels états-uniens et québécois est primordiale. Deuxièmement, il faut favoriser la présence de créateurs québécois dans une perspective de développement du marché américain sur l’ensemble du territoire. En fait, il faut soutenir le service culturel à développer une vision stratégique pour diffuser le contenu culturel québécois sur l’ensemble du territoire de la DGQNY et ce pour toutes les disciplines culturelles. Finalement, il faut favoriser le rayonnement du Québec en complémentarité avec les autres secteurs d’activité de la Délégation. Si la culture est ce que nous sommes, elle s’incarne certainement dans notre façon de faire. Elle se reflète dans toutes nos sphères d’activité. Je suis profondément convaincu que le rayonnement culturel passe par des actions multilatérales. x Propos recueillis par Francis L.-Racine

Société

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PSYCHIATRIE

Où sont passés les mauvais esprits? Réflexions d’un stagiaire en psychiatrie transculturelle Vincent Laliberté Le Délit

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rthur Kleinman explique dans Rethinking psychiatry qu’une des découvertes les plus impressionnantes des études psychiatriques et anthropologiques transculturelles reste en ce que les phénomènes de transe et de possession par des esprits maléfiques sont présents dans toutes les sociétés non occidentales alors qu’ils ne le sont plus à l’Occident depuis l’âge moderne. En termes simples, ce qui a changé dans la modernité correspond à la conscience simultanée que nous sommes un corps et que nous avons un corps. Une conscience qui est aussi caractérisée par une réflexivité sur elle-même (en plus d’être laïque et capable d’ironie, ce qui définit un discours marqué par un décalage entre celui-ci et la réalité). C’est cette métaconscience, autrement dit cet observateur critique, qui nous empêche de nous retrouver entièrement absorbés par l’expérience

vécue, nécessaire pour vivre une transe. Mais c’est aussi cet observateur critique qui rendrait impossible le vécu dramatique des émotions, par exemple d’être paralysé par la peur ou de perdre connaissance en raison d’une mauvaise nouvelle. Toutefois, Arthur Kleinman nous invite à considérer que l’entrée de l’Homme dans la modernité, plutôt que d’être une évolution, l’a privé d’une dimension universelle. Autrement dit les phénomènes de transe et de possession ne constituent pas une forme archaïque de pathologie, mais possiblement un authentique mode d’existence non duel. Même si ces états peuvent certes être très souffrants, ils représentent en même temps en quelque sorte un paradis dont l’Homme moderne a été chassé et où il tente maladroitement de retourner en ayant parfois recours à diverses substances. D’ailleurs l’attrait pour le cinéma ou le théâtre pourrait bien s’expliquer par la fascination de voir d’autres personnes vivre des émotions qui ne nous sont en quelque sorte plus permises.

On a remarqué que les enfants s’expriment souvent en faisant référence à un monde imaginaire. Cet univers symbolique pouvant parfois être construit pour échapper à une réalité très difficile, comme le montre admirablement le film Le Labyrinthe de Pan de Guillermo del Toro, illustre l’étape développementale où les enfants naviguent entre la réalité et la fantaisie. D’une certaine manière, les enfants parviennent encore à s’immerger entièrement dans l’expérience vécue, alors que chez les adultes, un même discours aux frontières floues entre le réel et l’imaginaire pourrait être considéré comme psychotique. C’est seulement en devenant adulte et en développant une conscience critique que les enfants perdront la capacité d’avoir un ami imaginaire ou de vivre une intense crise émotionnelle. En psychiatrie transculturelle on nomme souvent «troubles dissociatifs» les états de modification de la conscience

où les limites claires de l’identité semblent être perdues. Mais la question demeure: n’est-ce pas celui qui a perdu la capacité de vivre dramatiquement les émotions en raison d’une conscience critique qui est le plus dissocié? Transposez-vous maintenant au Honduras, face à une scène tragique où une mère a vu son jeune fils se faire frapper par une voiture. Celle-ci pleure à l’extérieur de sa maison pendant des heures et des heures, alors que chaque villageois lui offre un peu de soutien. Une telle manifestation de sa peine est certainement une manière «non duelle» de vivre son deuil, peut-être même la plus naturelle et thérapeutique de toutes, mais en même temps un mode d’expression de la peine totalement inhabituel par ici. La passion amoureuse, un phénomène magique hautement dissociatif, représente peut-être le dernier bastion encore autorisé par notre groupe. Mais qui sait pour combien de temps encore? x

Vos examens vous soûlent?

Écrivez pour le dernier numéro «À boire» du Délit! Soirée grisante assurée. societe@delitfrancais.com CHRONIQUE

Retour à la case départ Élise Maciol | Plume en vadrouille

Dur, dur, de devoir repartir de zéro! Voilà longtemps que je ne m’étais plus trouvée seule en terrain inconnu.

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Certaines angoisses qui remontent à la surface me rappellent étrangement les rentrées scolaires de mon enfance: que faisje ici? qui sont tous ces gens autour de moi que je ne reconnais pas? comment les aborder sans avoir l’air trop pathétique? Je n’avais pas vraiment pensé à cela avant d’atterrir dans cette nouvelle ville; étant donné que je ne suis à Amsterdam ni dans le cadre d’un échange universitaire ni pour le travail, il est tout à fait possible que je passe une journée entière sans rencontrer personne. Déterminée à me faire de nouvelles connaissances, quand

bien même je devrais y laisser ma dignité –Dis, tu veux bien être mon ami?–, j’enfourche donc mon beau vélo d’occasion et participe à tout un éventail d’activités sociales: visite guidée d’Amsterdam, soirée sushi, après-midi conversations en langue étrangère, pub crawl, etc. Voici le résultat de ces quelques expériences. La visite guidée était intéressante et riche en rencontres, mais de nombreux participants n’étaient malheureusement que de passage à Amsterdam. La soirée sushi, beaucoup trop mondaine à mon goût, aurait très bien pu être tirée d’un épisode

de Sex and the City… Pas du tout mon genre! Les cours de langues sont évidemment très instructifs, mais il peut s’avérer difficile de faire comprendre à son locuteur qu’on aimerait bien le revoir quand on ne sait dire que «Salut» et «À tes souhaits» dans sa langue maternelle… Finalement, c’est peut-être pendant les pub crawls qu’on a le moins de problèmes de communication: la musique dans les bars est souvent beaucoup trop forte pour qu’on entende quoi que ce soit, alors il suffit de sourire et de hocher la tête de temps en temps pour que le tour soit joué! Au bout de quelques ver-

res, n’importe quel étranger un tant soit peu sympathique aura échangé votre numéro de téléphone contre le sien et vous aura proposé une activité entre amis la semaine suivante. Quelques verres de plus, et vous serez tous les deux à quatre pattes, vous jurant l’un l’autre l’amitié la plus fidèle –enfin, c’est ce que vous pensez comprendre du baragouinage de votre nouvelle connaissance ivre. Une fois la soirée finie, vous consoliderez votre amitié en vous sauvant tour à tour la vie, sans cesse menacée par les cyclistes enragés et les trams impitoyables. Bienvenue à Amsterdam! x

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Arts&Culture

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MUSIQUE

Cuivres cubains et guitares islandaises Philémon chante et For a Minor Reflection au Quai des brumes Annie Li Le Délit

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a sixième édition de M pour Montréal est une vitrine montrant les showcases de 40 artistes émergeants en quatre jours afin de les faire connaître à des représentants de l’industrie de la musique provenant d’une quinzaine de pays. Philémon chante Philémon chante, le nom de scène de Philémon Bergeron-Langlois, avait lancé de façon indépendante en 2010 un joli album enregistré au vieux studio l’Egrem à la Havane, rempli de douce nostalgie et de sonorités folk et cuivrées. Le disque intitulé Les Sessions cubaines avait été enregistré en deux jours sur une machine à ruban, grâce à des musiciens cubains trouvés à l’improviste. Si Philémon chante s’était fait discret l’année dernière, il a multiplié les concerts depuis l’été 2011. Au Quai des brumes, Philémon a offert une belle performance, lui-même au chant et à la guitare, avec deux comparses apportant de la chaleur avec leurs instruments, l’un à la contrebasse et l’autre à la trompette, reprenant ensemble des ballades comme «Vaincre l’Automne» et «Dors Poupée dors». Alors que les pièces sont des quasi-berceuses sur disque, le chanteur réussit à les rendre entraînantes sur scène. Il a aussi chanté deux nouvelles

Le groupe islandais For a Minor Reflection en spectacle au Quai des brumes Gracieuseté de M pour Montréal

pièces qui laissent présager la sortie d’une nouvelle œuvre. Son expressivité faciale appuyée, l’homme n’ayant pas peur de dévoiler ses émotions montre une implication totale envers ses textes sensibles, et on croit même entendre un pleur par là. Philémon donne dans les arrangements à fleur de peau et a une voix un peu brouillonne qu’on peut trouver charmante… ou pas.

For a Minor Reflection For a Minor Reflection est un groupe encore méconnu de post-rock instrumental formé de quatre Islandais dans la jeune vingtaine: deux guitaristes-pianistes, un bassiste et un batteur. À leurs débuts en 2006, ils jouaient du hard rock dans un garage, puis après quelques égarements se sont vite tournés vers le

post-rock, puisque personne parmi eux ne savait chanter. Ils ont lancé un EP, tourné en Europe avec leurs concitoyens de Sigur Rós, puis ont enregistré l’album Höldum í átt að óreiðu (En allant vers le Chaos) et ont récemment joué au festival South by Southwest à Austin. Leur biographie mentionne que Sigur Rós considère le potentiel de For a Minor Reflection comme étant «supérieur à celui de Mogwai». L’anecdote est amusante; chauvins les Sigur Rós? Peut-être pas! La prestation du groupe de Reykjavik au Quai des brumes, dans le cadre de leur 5e participation au Iceland Airwaves Festival, est un vrai coup de cœur. Voir les quatre musiciens prendre autant de plaisir à jouer, concentrés sur la petite scène, comme une boule d’énergie et de fureur, amène un vent de fraîcheur dans le monde du post-rock. On ne s’ennuie pas une seconde, le sentiment d’urgence découlant des mélodies nous tenant toujours en haleine. Le piano à quatre mains en jette tout simplement. Les montées en puissance des motifs musicaux, timbres et textures font de For a Minor Reflection le digne successeur des Explosions in the Sky et Red Sparowes de ce monde. For a Minor Reflection a averti le public au début de son concert: «We play very loud music». Ils nous en ont mis plein les tympans et nos cils auditifs en redemandent! x

Philémon à la plage... à moins quarante degrés Celcius! Gracieuseté de Philémon chante

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Arts & Culture

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LITTÉRATURE

Salon du livre de Montréal Une célébration de l’héritage linguistique et littéraire des Québecois Julie d’Auteuil Le Délit

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ue ce soit pour passer quelques heures à flâner dans les (trop) nombreuses allées projetant quelques effluves de bouquins neufs, pour écouter vos auteurs préférés en conférence ou pour attendre dans la filée une dédicace personnalisée, toutes les raisons sont bonnes pour délaisser un peu les obligations universitaires et

retrouver la nouvelle édition du Salon du livre. Cette année, la 34e édition du Salon du livre de Montréal – du 16 au 21 novembre à la Place Bonaventure– était sous la présidence d’honneur de GeorgesHébert Germain, un Québécois «touche-à-tout», actif autant dans le milieu de l’information pour ses chroniques et critiques que dans les milieux littéraires avec Souvenir de Monica (1997), Les Coureurs des bois: La Saga des

Indiens blancs (2003) ou La Fureur et l’Enchantement (2010). Pour l’occasion, monsieur Germain invite les visiteurs pour une juste et noble cause: célébrer la langue française et en faire son hommage. Pour cette édition, le salon avait à son agenda une gamme d’événements étonnamment hétérogène allant de l’atelier de lecture numérique qui nous apprend à apprivoiser la lecture sur votre Kindle, Booken et iPad, à l’atelier

sur les bienfaits des pierres pour les enfants qui guide les parents dans leur choix de solutions naturelles aux divers maux de leurs petits. «Le plus gros salon en Amérique du Nord!» comme se plaisent à dire les montréalais, est immense tant en superficie qu’en termes de contenu. Quant à la naissance de cet événement, la mise à l’honneur du livre sous forme de salle d’exposition ne date pas d’hier. Le Salon du livre, qui à l’origine

n’était qu’une journée du livre, est apparu en 1950 à l’Hôtel Windsor. Depuis, cette première formule n’a jamais cessé de croître. D’année en année, des partenaires se joignent à l’événement pour la remise de prix et récompenses aux auteurs et artisans du milieu tels que le prix du Grand public Salon du livre de Montréal (1983), le prix Fleury-Mesplet (1987) le prix Brive-Montréal (1990-1997) et enfin le prix Marcel-Couture (2000). x

Photo: Lindsay P. Cameron

CHRONIQUE LITTÉRAIRE

Des écrivains dans la salle de rédaction

Luba Markovskaia | Réflexions parasites

Pour la deuxième année consécutive, une trentaine d’écrivains québécois prenaient d’assaut mercredi dernier la salle de rédaction du Devoir dans le cadre du Salon du livre, pour présenter leur vision de l’actualité.

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Arts & Culture

Cette initiative du journal indépendant a tout pour réjouir ceux qui se désolent de ne pas voir les littéraires prendre part au débat public, d’autant plus que le titre même de cette édition spéciale amène à réfléchir: «Le Devoir des écrivains». Catherin Mavrikakis, Alain Farah, Marie Laberge, Bernard Émond, Perrine Leblanc, Dominique Fortier, Victor-Lévy Beaulieu et j’en passe prennent donc la place des journalistes le temps d’une journée de rédaction. Chacun se prête visiblement entièrement à l’exercice et adopte pour l’occasion tous les mots d’ordre du journalisme sans chercher à mettre indûment de l’avant son style d’écriture, mais sans l’annihi-

ler bien sûr, puisque des tendances ressortent fort heureusement. Dominique Fortier révèle encore une fois, après Les Larmes de Saint-Laurent, son amour des sciences et l’inspiration que son imagination fertile en tire dans un article sur la découverte d’un gêne de l’empathie. Patrick Sénécal doit couvrir le procès d’un homme coupable de viol et ressort bouleversé de son expérience, lui qui est le prolifique auteur de tant de romans noirs, voire d’horreur, comme Les Sept Jours du talion. Jean Dion trouve un digne remplaçant chez Alain Farah qui partage sa passion du sport avec sa verve et son pince-sans-rire inimitables. Régine Robin se rend «Place du Peuple» et constate avec un brin

de tristesse et de nostalgie l’état de la révolte de la génération actuelle… Et la liste continue. L’édition regorge de petits trésors comme une nouvelle inédite de Michel Tremblay, écrite dans le ton drolatique et émouvant de ses récits sur l’enfance, une BD de Guy Delisle, en plus des éditoriaux lucides sur des faits politiques et économiques comme ceux de Bernard Émond et de Jean Désy. Bref, une édition qui peut contribuer à détruire le mythe tenace de l’écrivain qui ne vit que dans un monde de fiction, que la réalité ne touche que comme un sourd bourdonnement lointain. Au point où le directeur des éditions Leméac invite une brochette d’écrivains à aller lire des

textes aux indignés de SquareVictoria. C’est sans doute louable, mais là je ne peux m’empêcher d’imaginer des scènes légèrement absurdes, comme des écrivains québécois déclamant des textes inspirés à une foule en grande partie anglophone qui se demande ce qu’ils viennent faire là, et de me demander s’il n’y a pas dans cette entreprise quelque chose d’un brin opportuniste. Mais que sais-je, moi, qui n’ai écrit, dans la dernière année, que ces réflexions parasites en guise de tentative de contact avec le monde extérieur? Cet article signe la fin de cette chronique un peu soliloque. Si jamais vous étiez au bout du fil sans que je le sache, merci. x

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THÉÂTRE

HA ha!..., ou le rire jaune Ducharme navigue entre sado-masochisme et humour loufoque. Audrey Champagne Le Délit

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éjean Ducharme, cet auteur fantôme du Québec, n’aurait lui-même pu rester de glace devant cette représentation de sa pièce HA ha!... On s’abandonne et on «tombe» dans l’histoire à cent milles à l’heure. On rit, on pleure, on souhaite se révolter, on ne comprend pas toujours, on se tortille sur son siège lorsqu’on ressent, avec un certain malaise, le désarroi ou la cruauté des personnages; cependant, l’essentiel est accompli, car HA ha!... est un divertissement inégalé qui transperce le spectateur jusqu’au cœur. Cette pièce est une telle effervescence de folie, de mots et d’éruption de rires ou de colère que s’y perdre est sûrement le meilleur moyen de la comprendre. On y retrouve Mimi (Sophie Cadieux) et Bernard (Marc Béland), Sophie (Anne-Marie Cadieux) et Roger (François Papineau), deux couples qui vont s’amuser perversement à s’entredétruire en jouant à un jeu malsain, celui de se faire mal, de se porter coup après coup par la parole et les actes. C’est un peu, beaucoup et même excessivement troublant de voir interagir des gens qui ne croient plus en rien, qui sont cruels l’un envers l’autre simplement pour le plaisir de jouer à souffrir et à faire souffrir. Par ailleurs, la pièce se termine par la mort d’un des personnages. Le jeu des acteurs est à saluer, en particulier celui des deux interprètes féminines qui semblent animées par une énergie toute particulière et donnent un éclat réel et profond à leur personnage respectif. Sophie Cadieux est touchante dans son rôle de Mimi à la voix plaintive, une âme naïve qui ne supporte pas qu’on la touche «parce que ça fait trop mal».

Anne-Marie Cadieux surprend agréablement dans une interprétation puissante, en jouant un personnage démoniaque très loin de ses rôles habituels. François Papineau en poète dépravé et Marc Béland en ivrogne un brin clownesque ne laissent pas leur place non plus, sans toutefois nous subjuguer complètement. Dominic Champagne signe une mise en scène énergique qui fait usage de tout l’espace mis à sa disposition et qui demeure efficace tout en laissant place aux débordements des personnages et où le langage éclaté, propre à Réjean Ducharme, peut s’épanouir complètement. Le décor est à l’image des personnages: corrompu et souillé. Toute la scène est transformée en un appartement partagé par les deux couples, envahi de déchets, de bouteilles de vodka vides et de vieux journaux roulés en boule. C’est un lieu qui transpire parfaitement le vice et la décadence humaine. Les jeux d’éclairage sont aussi très intéressants et participent fortement à l’atmosphère du moment. Et on rit! On rit souvent et ce même aux éclats, mais pourtant la pièce nous laisse un certain goût amer à la bouche. On est troublé de la première réplique jusqu’à la dernière, et très rapidement notre rire se teinte de jaune devant de telles manifestations d’égoïsme et de cruauté humaine. HA ha!..., une pièce qui met en scène l’absurdité et l’inhumanité de nos rapports sociaux, est présentée au Théâtre du Nouveau Monde jusqu’au 10 décembre. x HA ha!... Où: Théâtre du Nouveau Monde 84 rue Sainte-Catherine Ouest Quand: du 22 novembre au 10 décembre

Photo: Jean-François Gratton

THÉÂTRE

La civilité à l’état sauvage

The God of Carnage: la guerre des parents est déclarée. John Lévesque Le Délit

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Crédit photo: Centaur Theater

e Dieu du carnage est une pièce française, écrite par la scénariste et romancière Yasmina Reza. En ce début d’hiver, la Centaur Theater Company de Montréal présente une adaptation de la pièce en anglais (The God of Carnage, traduite par Christopher Hampton) mise en scène par Roy Surette. La pièce met en scène deux couples qui se rencontrent pour discuter d’une rixe ayant eu lieu entre leurs enfants. Si le sujet de la rencontre est ordinaire, les bienséances sont vites remplacées par la barbarie. The God of Carnage met le doigt sur la question existentielle qui hante tout géniteur: suis-je un bon parent? Si une bagarre entre deux enfants se transforme en un véritable pugilat entre adultes, c’est parce qu’on a tendance à supposer que le comportement d’un enfant est le reflet des valeurs qui lui ont été inculquées à la maison, ou même le résultat de tensions familiales. Au début, les Raleigh et les Novak se rencontrent pour analyser l’incident afin de permettre aux enfants de se réconcilier. Or très vite

x le délit · le mardi 22 novembre 2011 · delitfrancais.com

les parents se rejettent la faute à travers des accusations implicites. Après vingt minutes de conversation courtoise, la tension monte, et les adultes ne parviennent plus à dissimuler leur colère. Le spectateur peut dès lors s’installer confortablement et attendre que la situation dégénère, le sourire aux lèvres. Alan Raleigh est un avocat d’affaires odieux qui interrompt constamment la conversation pour recevoir des appels téléphoniques. Sa femme, Annette, est névrosée jusqu’au bout des ongles: on attend la crise de nerfs avec impatience (et on n’est pas déçu!). Les défauts de la famille Novak sont moins flagrants mais on découvre au final que l’épouse est écrasante et que le mari est un homme rustre, aux préjugés nombreux. L’humour de la pièce se concentre sur les archétypes personnels et familiaux qui s’affrontent de façon grotesque. En effet le spectateur est témoin de toutes sortes d’insultes, pleurs, attaques physiques, destruction de mobilier et de haut-le-cœur soudains. La grande force de cette pièce est de montrer l’attachement acharné que portent les parents à leur fierté familiale. Les couples ne sont pourtant pas des extrêmes

diamétralement opposés. Ils sont en effet tout aussi éduqués, fortunés et concernés par la réussite de leurs enfants. Les parents sont égocentriques et ont le malheur de n’être qu’attachés à leur vision partiale de la famille idéale. Ainsi la confrontation des points de vue les renvoie à leurs incohérences. Une fois que les couples faiblissent, la pièce s’accélère, rythmée par les alliances qui se forment et se déforment: les femmes s’allient contre les hommes mais se séparent lorsque le camps de la morale attaque celui du laisser-faire, que les réalistes moquent les optimistes. Personne n’est à l’abri du reproche et chacun cherche un allié. Le résultat est pathétique, ils n’y pas de héro, mais quatre parents humiliés, enragés, frustrés. Les enfants sont devenus spectateurs. L’audience est prévenue: parler des enfants des autres n’est pas une tendre affaire. x The God of Carnage Où: Centaur Theatre Company 453 rue Saint-François-Xavier Quand: du 8 novembre au 4 décembre

Arts & Culture

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ARTS VISUELS

Se soigner soi-même

«En imparfaite santé»: la médicalisation de l’architecture ou soigner son environnement mal en point Thomas Simmoneau Le Délit

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l’heure où la santé de chacun prend une place prépondérante dans notre société, le thème apparaît même dans le domaine, certes pratique, mais également artistique qu’est l’architecture. De simples preuves scientifiques, comme le fait que les patients d’hôpitaux guérissent plus rapidement lorsqu’ils ont vue sur végétation, apportent un argument rationnel à cette association. C’est donc en partie pour ces raisons que le Centre Canadien d’Architecture crée un lien fort entre création architecturale et bien-être, à travers son exposition «En imparfaite santé». Le concept récent de ville-santé apparaît dès le début de l’exposition lorsqu’une question simple et intéressante est lancée: «Qui doit être guéri: la ville ou ses habitants?». On aura probablement tendance à répondre «les deux», mais le vrai problème est surtout de savoir comment y parvenir. Tout au long de l’exposition, on découvre donc divers projets et œuvres achevées qui suivent cet objectif. Par exemple, la maquette de «L’immeuble qui pousse», réalisée par l’architecte Édouard François, met en perspective un immeuble en éternelle mutation grâce à la construction de cabanes sur pilotis qui «poussent» à par-

Topographie de la toxicité à Budapest (Hongrie), 2008. Nerea Calvillo architecte, en collaboration avec C+ arquitectos et In the Air.

tir de chaque appartement. Les façades de l’immeuble, dotées d’une végétation luxuriante, servent ainsi de membranes ou d’épiderme vivants. Cet édifice a été conçu dans le but d’associer nature, architecture et, de fait, santé dans la région de Montpellier, dans le Sud de la France. L’exposition met également en avant les diverses maladies et allergies liées à notre mode de vie moderne, notamment dans les grandes mégalopoles. La conférence de Rio (1992) sur la biodiversité a

reconnu officiellement l’urgence de maintenir et de favoriser la biodiversité dans les écosystèmes urbains pour la survie de l’homme, des animaux et de notre planète en général. La prise de conscience est donc relativement récente mais les projets architecturaux qui vont dans ce sens fleurissent, à l’exemple de la tour vivante (2006), projet mené par le groupe SOA Architects. Celleci serait une sorte de ville verticale et autosuffisante grâce à son système de culture hydroponique. La démarche consiste à

proposer un aménagement soutenable du territoire et de préserver les ressources naturelles et la biodiversité. Dans la même veine, Harmonia 57 (2008) est une maison unique située à Sao Paulo du fait qu’elle respire grâce à son système de récupération de l’eau de pluie, des pores sur ses façades qui laissent pousser des végétaux et de ses matériaux recyclables. Cette œuvre architecturale fonctionne plus ou moins comme un végétal quelconque. L’agence d’architectes Triptyque s’ancre ainsi dans un mouvement fondé sur le développement durable, certes coûteux mais vital à long terme pour le bien-être collectif. «En imparfaite santé» ne laisse pas de marbre. Chaque visiteur comprend facilement que la santé de notre planète est en danger et que l’architecture innovante peut mener à des solutions durables et efficaces. Certains y verront donc une lutte inutile et coûteuse, d’autres, le service que peut rendre un des six arts à notre santé, qui n’a d’ailleurs probablement pas de prix. x «En imparfaite santé» Où: Centre Canadien d’Architecture 1920 rue Baile Quand: du 25 octobre au 1er avril

GASTRONOMIE

L’affaire est dans le filet

Le Filet, un restaurant de fruits de mer au décor simple et à la carte rayonnante Audrey Champagne Le Délit

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ans un recoin sombre de l’avenue du Mont-Royal se cache le Filet, un restaurant ouvert depuis quelques mois à peine qui offre une vaste sélection de fruits de mer. Ce tout petit resto qui, dès 18 heures, se remplit et devient très vite cacophonique, propose un décor simple et même un peu trop modeste, avec quelques images de créatures marines bizarres affichées sur les murs. J’aime mieux vous prévenir tout de suite: pour un souper au Filet, sortez vos portefeuilles! La nourriture y est exquise mais pour manger à sa faim, la facture est assez salée: prévoyez au moins cent dollars par personne et ce sans compter les consommations. Mon cœur d’étudiante sans le sou s’est serré lorsqu’est venu le moment fatal de payer l’addition. La carte des vins est des plus élaborées, celle des digestifs également, mais malheureusement le choix des apéritifs est plutôt maigre. Du côté des bières, seule la StAmbroise était disponible et du côté des petits drinks, il n’y avait que le traditionnel cosmopolitan ainsi qu’un martini au melon: une sélection sans imagination et sans éclat qui contraste avec la richesse du menu. Je conseille aux appétits voraces de s’abstenir ou bien de prendre une collation avant d’y aller. Aussi absurde que cela puisse paraître, je suis certaine que vous serez tous

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surpris par la petitesse des portions présentées. Le concept du resto propose des plats à partager (il faut en prévoir au moins cinq ou six pour deux), mais les plats en questions, divisés à deux, se dévoraient en deux ou trois bouchées chacun. Je m’adresse ici plus spécifiquement aux gargantuas ou bien aux jeunes hommes à l’estomac élastique qui pourraient paniquer après le début du service. L’ambiance ordinaire, l’absence de musique, une carte de cocktails anorexique sont toutefois très vite oubliés lorsque les assiettes arrivent: délice, après délice, après délice… Une autre déception arrive au temps du dessert. Mon brownie était sec et fade, dissimulé sous une boule de crème banale, dont le caramel à la fleur de sel était très peu goûteux. Du côté de mon invité se trouvait un pavé au sirop d’érable, un peu plus appétissant mais toujours extrêmement loin de la qualité des plats principaux. Les amateurs de sucre préféreront, et de loin, sauter le dessert pour prendre quelques bouchées supplémentaires de risotto au crabe ou encore d’huîtres à l’huile de truffes! Malgré ses quelques lacunes le Filet mérite d’être découvert. Alors gâtez-vous avec une petite soirée qui peut s’étirer longuement et où vos papilles pourront s’émoustiller sous l’océan! x En haut: Carpaccio de morue avec olives, tomates et échallottes frites. En bas: Avocats, escalopes, oranges et salade Mont-Royal aux betteraves.

Photos: Sheep Sheep

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CINÉMA

Almodovar dans la peau

La Piel Que Habito, un film érotico-tragique qui explore le thème de l’obsession, fait l’effet d’un coup de poing esthétique. Sabrina Ait Akil Le Délit

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’est au son d’un violon écorché qu’on entre subitement dans le monde d’un cinéaste qui flirte avec la dramaturgie. Avec La Piel que Habito (La Peau que j’habite), Pedro Almodovar percute l’univers cinématographique avec une émouvante férocité. Avec cette adaptation du roman de l’écrivain français Thierry Jonquet Mygale, le sulfureux réalisateur espagnol reste fidèle à sa méthode lyrique et incisive. Sélectionné au dernier festival de Cannes, ce film regorge de tragédie, de volupté et de coups de théâtre assourdissants. C’est une histoire qui, de prime à bord, nous plonge dans l’univers psychédélique de la science. La Piel que Habito est une exploration du monde médical sous l’angle du sordide et de la romance douce-amère. C’est l’ambition d’un éminent chirurgien esthétique, Robert Ledgard (Antonio Banderas), qui donne le ton au film. Il travaille sur un projet particulier qui est de créer une peau synthétique aux qualités surhumaines. Une femme, nommée Vera (Elena Anaya), dans une combinaison rappelant la chair humaine, est emprisonnée et surveillée. Les images défilent dans une logique qu’on n’anticipe pas. Le comportement mystérieux du médecin et son admiration pathologique pour ce qui semble être son cobaye déclenche un processus de violence qui est exprimée par l’automuti-

De gauche à droite: le docteur Robert Ledgard (Antonio Banderas) et Vera (Elena Anaya) Photo de José Haro/ © El Deseo, Gracieuseté de Sony Pictures Classics

lation sensuelle de sa patiente. Le cycle du mensonge et de la trahison fait vite place à l’arrivée de la vengeance calculée. C’est typiquement almodovaresque: on y trouve des éléments clés qui font partie intégrante de l’écriture du réalisateur. Cette écriture surprend en éclaboussant la trame narrative du film avec des thématiques classiques. Ainsi, la colère, la rancune, la mort et l’exposition des corps

dans leur expression la plus pure donnent une force artistique et esthétique au film. On y retrouve l’exploitation des corps et leurs mouvements dans l’espace. La nudité dégage une forme de folie que maîtrise le cinéaste. Le meurtre y est décrit comme un acte de libération et la vengeance comme une rédemption. Les personnages sont complexes, faibles, lâches, mais gagnent en force. Ce

paradoxe qui encadre la faiblesse et la force de caractère des personnages est caractéristique des œuvres du réalisateur. La prestation d’Antonio Banderas est sans fantaisie et traduit avec simplicité les facettes multiples de son personnage. Quant à Elena Anaya, elle est sublime. Elle rayonne en tant que prisonnière qui devient malgré elle un objet sexuel convoité et abusé. L’actrice se donne complètement. Son interprétation dessine l’esquisse d’une jeunesse glaciale. La beauté est l’une des dynamiques essentielles qu’on a voulu exposer presque avec vulgarité. La trame du film ne se résume pas aux caprices d’un médecin quasi-fou ni même à une patiente ne jouissant d’aucune liberté. L’intrigue est pulsionnelle et révèle un coup de théâtre auquel on ne s’attend pas. La plus grande pulsion exposée demeure la sexualité que Pedro Almodovar nous présente sous différents angles. C’est une sorte de retour aux fondamentaux: la nudité esthétique et la vulnérabilité du corps dans un environnement hostile. Cette approche laisse croire que l’amour ambigu n’est qu’une corrida emplie de désir bestial qui pousse au crime passionnel et à la vengeance. x La piel que habito de Pedro Almodovar Où: CO Quartin Latin 350 rue Émery Quand: En salle le 18 novembre

BILLET

Ce que l’administration veut, McGill veut Retour sur le documentaire d’Alanis Obomsawin sur le renvoi du docteur Norman Cornett Miruna Tarcau Le Délit

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n 2007, après quinze ans de loyaux services à l’Université McGill, le professeur Norman Cornett a été renvoyé. Quelque temps avant son licenciement, il avait remis en question les méthodes d’enseignement traditionnelles. Suite à la crise nerveuse d’un de ses étudiants, il avait décidé d’élaborer sa propre approche. «Comment se fait-il que les étudiants soient soumis à un tel niveau de stress, depuis leur première jusqu’à leur dernière année dans l’enseignement supérieur?» s’était-il demandé. «Comment peuvent-ils s’épanouir en tant que citoyens, et en tant qu’êtres humains, s’ils en viennent à prendre la boulimie intellectuelle pour de l’enseignement véritable?» Ce sont ces questions qui l’ont poussé à développer une méthode d’apprentissage transgressant les limites non-écrites de l’académisme universitaire, en transformant la salle de cours en espace dialogique dans lequel chacun était invité à discuter d’égal à égal avec des politiciens, des artistes, ainsi que des experts dans divers domaines. Pour le professeur Cornett, ne pas agir face à la détresse mentale de la plupart de ses étudiants, c’est se soustraire à une responsabilité morale et civique. Norman Cornett exige plutôt que le système éducatif permette aux étudiants de développer une pensée autonome en stimulant sans cesse leur créativité.

«Car la créativité, affirme-t-il, c’est au fond ce qui nous distingue de toutes les autres espèces animales.» Or, comment l’administration de l’époque avait-elle réagi face à cette méthode d’éducation novatrice? Pas une seule discussion, pas un seul préavis. Seule une lettre lui demandant de vider son bureau – une réaction qui a incité Alanis Obomsawin,

anti-utopique de Ray Bradbury, Farenheit 451. Par ailleurs, une lettre ouverte publiée dans Le Devoir du 15 juin 2007 avait questionné publiquement la décision de McGill en exigeant une explication de la part de l’administration, qui conservait toujours le silence quant aux raisons de ce licenciement. Le vice-principal de l’époque avait

Le docteur Norman Cornett, ex-professeur de la Faculté d’Études religieuses de McGill Gracieuseté de National Geographic Live!

la réalisatrice du documentaire Depuis quand ressent-on l’obligation de répondre correctement au lieu de répondre honnêtement?, à établir une comparaison entre les méthodes de l’administration de McGill et celles de l’univers

xle délit · le mardi 22 novembre 2011 · delitfrancais.com

assuré les signataires de la lettre que le renvoi du professeur Cornett n’avait rien à voir avec les débats controversés qu’il avait l’habitude d’organiser dans ses cours sur les conflits au Moyen-Orient. D’après le vice-

principal, cette décision administrative avait été effectuée «sans irrégularité»; McGill continuait à honorer la liberté d’expression. Toutefois, monsieur Masi offrait-il une quelconque explication aux 747 signataires de la pétition en ligne exigeant davantage de transparence de la part de l’administration de McGill? Si les idées politiques du professeur Cornett ne constituaient pas la raison de son congédiement, alors qu’estce qui justifiait la décision de «le laisser partir»? Sur ce point, l’administration reste muette. Quatre ans après ces événements, , l’enquête interne du professeur Jutras révèlera sans doute que McGill continue à honorer la liberté d’expression, que ce soit dans leurs négociations avec les employés de MUNACA, dans leur façon de gérer l’accroissement de l’activisme étudiant et de répondre aux manifestations. Il faut se rendre à l’évidence: quel que soit le montant auquel les jeunes Québécois achèteront le droit d’avoir un avenir, on ne peut plus nier que les rapports d’autorité définissant les relations entre les citoyens et leur gouvernement, de même qu’entre les étudiants et leur université, sont en train de se redéfinir. Un refus d’accepter ces changements n’empêchera pas les étudiants de réclamer le droit de fréquenter un établissement qui honore véritablement la liberté d’expression, et qui n’établisse pas de distinction entre les réponses correctes et les réponses honnêtes. x

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DOCUMENTAIRE

Jamais à court de documentaire Retour sur les Rencontres internationales du documentaire de Montréal Mai Anh Tran-Ho Le Délit

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u 9 au 20 novembre se tenait la 14e édition des Rencontres internationales du documentaire de Montréal. Les centaines de films au programme ont une fois de plus démontré les différentes facettes du genre. Contemplations poétiques À la Librarie Le Port de Tête, Jorgen Leth nous lit ces quelques phrases de son recueil de poèmes: «The world is just herebeyond the wall and I am trying to pin down the perfect human in the space in which he moves. Is he free? Does he want something in particular? Where does he walk around what is he doing how exactly is he present?» Celui qui serait le mentor de Lars von Trier est sans aucun doute un réalisateur à découvrir. Il étudie l’activité humaine depuis plus de quarante ans. Coups de cœur de la rétrospective: 66 scenes from America et New Scenes from America sont des tableaux qui illustrent le mythe américain et A Sunday in Hell qui suit le parcours cycliste ParisRoubaix de plus de 200 mètres en 1976.

«Reality documentary» Paradise Lost 3: Purgatory a tout de l’intrigue d’un bon film policier: meurtres, un homme accusé à tort, un groupe de personnes qui luttent pour l’innocence de celui-ci, l’investigation bâclée de la police, de nouveaux coupables… Sauf que le film de Joe Berlinger et Bruce Sinofsky n’est pas de la fiction. C’est bel et bien un documentaire malgré ses airs de télé-réalité. En 1993, trois adolescents sont accusés du meurtre de trois enfants à West Memphis, en Arkansas. Les preuves? Aucune. Ils gribouillaient trop de pentagrammes, de têtes de mort et de serpents. Les meurtres horribles sont l’œuvre de Satan et ces trois adolescents sont clairement amis avec le diable. La trilogie Paradise Lost est une réalisation phénoménale sur une des enquêtes contemporaines les plus invraisemblables. Le dernier volet Purgatory résume l’aventure cauchemardesque et met en relief les concepts de justice et de liberté. À voir absolument. La première prise est souvent la bonne Les réalisateurs Jim Brown et Gary

Burns ont eux décidé de faire un remake du vieux film français La vie commence demain de Nicole Védrès. The Future is Now! est malheureusement une pâle copie du film de 1949 dans lequel le comédien JeanPierre Aumont incarnait «l’homme de la rue» et s’entretenait avec le peintre Picasso, l’existentialiste Sartre, l’architecte Le Corbusier, le biologiste Rostand, l’auteur Gide… La vie commence demain explorait l’avenir qui s’offrait à l’humanité suite aux deux guerres mondiales, la bombe atomique, Hiroshima et Nagasaki. The Future is Now! reprend le même fil conducteur, «la femme de demain» tente de changer l’attitude de «l’homme d’aujourd’hui» qui ne se contente que de ne pas faire de mal au monde et espérer qu’aucun malheur ne lui tombe dessus. Le film est dénué de toute émotion, pathos, le discours de Liane Balaban,«Il faut s’engager dans la collectivité, croire en l’humanité», sonne faux et assomme tellement il est moralisateur. Controverse Wiseman Le film d’ouverture Crazy Horse (lire l’article «Soldates de l’armée érotica» dans

l’édition du 15 novembre) a fait l’objet d’une pétition signée par 20 cinéastes, producteurs et cinéphiles et appuyée par neuf autres personnes n’ayant pas vu le film qui accusaient le dernier film du réputé réalisateur Frederick Wiseman d’être «complaisante et sexiste». L’œuvre n’avait pourtant pas choqué au Festival internationale du film de Toronto cette année. C’est se tromper que d’accuser hâtivement les RIDM d’avoir voulu gonfler les salles en choisissant ce film qui démontre une fois de plus la technique du cinéaste. Les sujets choisis par Wiseman sont ruminés longuement. Oui, sans narration on perçoit bien par le montage l’objectif de ses films: percer le mystère d’une institution –un hôpital psychiatrique dans Titicut Follies, une base militaire dans Basic Training, un centre de recherche zoologique dans Primate, une agence de mannequins dans Model – et Crazy Horse ne fait pas exception. Docville nous offre les meilleurs documentaires de l’année à partir de janvier, le dernier jeudi de chaque mois. En vente au cinéma Excentris. x

Image tirée du film La vie commence

Portrait de Frédérick Wiseman

Gracieuseté de RIDM

Gracieuseté de RIDM

Une vie qui vaut son pesant d’or

Endetté jusqu’au cou, un couple se questionne sur son avenir et la société dans laquelle il baigne. Emilie Blanchard Le Délit

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crit et réalisé par Cédric Kahn, Une Vie meilleure aborde le thème du surendettement et de comment le système capitaliste traite les plus faibles. Yann et Nadia sont encouragés à bâtir leur propre restaurant. Ils sont jeunes, amoureux et ambitieux. Ce n’est pas grave s’ils n’ont pas l’argent pour le faire parce que la banque est là pour les aider. Toutefois, les choses seront moins roses quand des décisions financières douteuses prises par Yann auront un impact considérable sur leur endettement. Comme l’explique le réalisateur, «on veut du surclassement social et cela produit du déclassement; ce sont de vrais tragédies humaines».

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Le film se veut étouffant et démontre d’un point de vue plus humain que factuel les impacts du surendettement. Yann fait de mauvais choix qui s’avèreront catastrophiques professionnellement, mais aussi personnellement. C’est un angle de la crise financière que Cédric Kahn voulait aborder. Il y a des tragédies humaines en lien avec la crise économique. Il ne s’agit pas seulement d’une question de chiffres. Pour employer les termes du film, si Yann et Nadia ne paient plus leurs dettes, les banques ne vont pas se gêner pour les égorger vivants. C’est un milieu sans pitié et sans compassion. L’interprétation de Yann par Guillaume Canet est très réussie. Yann a eu une enfance difficile et est légèrement immature. Il ne sait pas s’occuper de Slimane quand

on lui confie sa garde. Il fait du mieux qu’il peut selon ses connaissances, qui sont parfois limitées. Guillaume Canet a clairement étudié son personnage. Il le comprend et le maîtrise bien. Leïla Bekhti, sacrée meilleur espoir féminin aux Césars cette année, est une actrice montante du cinéma français. Ses apparitions sont moindres que celles de Guillaume Canet, mais restent bien maîtrisées. L’interprétation vient naturellement. La chimie entre les deux acteurs est palpable. Le couple, pourtant si amoureux au début, se voit aspiré dans un véritable enfer économique, mais les sentiments restent toujours là. Ils n’ont personne d’autre pour les aider sauf eux-mêmes. Ce qui mène à la question: serait-il meilleur de vivre avec

peu d’argent et ensemble, ou surendetté et séparé? Une vie meilleure, dont le titre se veut ironique, est un drame lourd. Il dénonce les failles du capitalisme pour les couches populaires, ceux qui seront laissés sur le trottoir car ils ne pourront plus payer. Il explore la situation d’un point de vue humain en examinant l’impact du surendettement sur un couple qui n’est pas fortuné autant au sens propre que figuré. Un film militant, à sa façon. x Une vie meilleure de Cédric Kahn Où: CO Quartin Latin, 350 rue Émery Quand: En salle dès le 18 novembre

x le délit · le mardi 22 novembre 2011 · delitfrancais.com


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