le délit le seul journal francophone de l’Université McGill
delitfrancais.com Publié par la société des publications du Daily, une association étudiante de l’Université McGill
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Le mardi 20 mars 2012 | Volume 101 Numéro 21
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Hors de l’Histoire depuis 1977
Éditorial
Volume 101 Numéro 21
le délit
Le seul journal francophone de l’Université McGill
rec@delitfrancais.com
L’Ouganda sans Kony Anabel Cossette Civitella Le Délit
L
e phénomène créé il y a deux semaines par l’organisation étatsunienne Invisible Children a créé une véritable commotion à travers le monde. La vidéo Kony 2012 se concentre uniquement sur la capture du chef des rebelles de la Lord’s Resistance Army (LRA) de 1988 à 2006 et simplifie atrocement la situation de l’Ouganda et le rôle de la communauté internationale. L’Ouganda est un petit pays d’Afrique de l’est dont la population est comparable à celle du Canada. Parce que chaque parcelle du pays est occupée par l’homme, la plupart des terres sont destinées à l’agriculture et les forêts doivent être protégées, ou disparaître. Les parcs nationaux pullulent pour mettre à profit les richesses naturelles. Dans ce pays situé à l’équateur, la jungle équatoriale côtoie la savane et les merveilles naturelles attirent chaque année plus de touristes. Mais l’histoire de la «perle d’Afrique» , comme l’appelait Churchill, n’est pas rose et c’est ce que veut montrer la vidéo Kony 2012. Après la dictature d’Idi Amin Dada, voilà que le XXIe siècle a choisi son combat en Ouganda: l’opposition entre le gouvernement ougandais et les rebelles de la LRA, la terrible réalité des enfants-soldats. La vidéo, qui appelle à la capture du leader de la LRA Joseph Kony, présente cet homme comme l’ennemi numéro un de l’humanité. Pourtant, la LRA a été active en Ouganda de 1988 à 2006. C’est maintenant en République démocratique du Congo et en République centrafricaine que le groupe rebelle attaque et détruit des vies. Ce n’est pas que le sujet est périmé, je n’oserais jamais dire que le mauvais traitement d’enfants ne doit pas être abordé, mais on se demande pourquoi l’enjeu des enfants-soldats est mis sur la table en 2012, alors qu’Invisible Children ne l’a pas fait entre 1988 et 2006. À l’heure actuelle, Joseph Kony se terre probablement en RDC, dans un buisson de la frontière, démuni et défait. Aujourd’hui, c’est plutôt la LRA qu’il faut viser, et il faut l’attaquer en RDC. Le film d’Invisible Children est donc sorti de nulle part. Ou peut-être pas? L’appel de l’organisation est peut-être fondé sur un désir intrinsèque d’aider les jeunes Ougandais de la vidéo, mais il faut demeurer prudent puisqu’une mine d’or commence tout juste à être exploité en Ouganda: le pétrole. En créant une vidéo d’une trentaine de minutes pour relancer l’intérêt pour un conflit qui commence à s’éteindre, Kony 2012 détourne l’attention de ce qui est fait ou pourrait être fait
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comme développement en Ouganda, comme si rien n’avait été fait jusqu’à présent. En fait, la vidéo oublie qu’un nombre impressionnant d’organisations de partout et de tous genres se sont mobilisés dans le Nord du pays où se déroulaient les conflits entre rebelles, citoyens et armée ougandaise. D’ailleurs, la plupart sont sur place pour de longues années encore. L’histoire des enfants-soldats en Ouganda est contée depuis très récement. D’ailleurs, il n’y a pas plus que deux ans que le Nord du pays est sécuritaire. Gulu, la métropole des organismes de coopération internationale, vit encore des «touristes humanitaires», même après la fin des conflits. Quoique ce n’ait pas toujours été le cas, la ville de Gulu est maintenant accueillante. L’Université Concordia, par exemple, envoie chaque année des étudiants par le biais de leur Concordia Volunteer Abroad Program pour «développer des maisons durables» dans Gulu. D’ailleurs, c’est dans Gulu que se retrouve le joyau national de l’Ouganda en termes de solidarité internationale, de résistance aux rebelles, de don de soi et de toutes les qualités requises pour apprécier Kony 2012. St. Mary’s Hospital Lacor, hôpital créé par Lucille Teasdale et Piero Corti, est probablement l’établissement de santé le mieux géré de l’Ouganda et d’Afrique de l’Est. Les deux Canadiens qui ont fondé l’hôpital au début des années 1960 en ont fait un établissement de renommée mondiale. Durant les années d’Idi Amin Dada, et lors des frappes de la LRA, les Ougandais se servaient de l’hôpital comme d’une forteresse. Ce qui est particulièrement impressionnant avec St. Mary’s c’est qu’il n’a rien à voir avec l’aide humanitaire donnée par des organisations non-gouvernementales internationales qui tâchent de se donner bonne conscience. Même si le siège social de la fondation Lucille Teasdale est basé à Montréal et dépend de donateurs, les administrateurs et tout le personnel de l’hôpital sont Ougandais. Il faut peut-être trouver Kony, mais il faut aussi admettre que la vidéo oublie à peu près tout de l’Ouganda, de la Lord’s Resistance Army et des enjeux politiques actuels dans la région. De plus, au-delà du simplisme du film, il y a des erreurs factuelles évidentes qui me chicotent et remettent en question la crédibilité du lot: l’Ouganda est en Afrique de l’Est, pas en Afrique centrale. Finalement, bien pensant, mauvais pensant, l’important c’est qu’on y pense? Non, je crois que s’attaquer à l’organe malade, Joseph Kony, ne génère pas la réflexion nécessaire chez les «gens développés», soit le questionnement de notre implication à corps perdus, les yeux fermés, dans des causes qui nous semblent nobles parce qu’elles sont ailleurs. x
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xle délit · le mardi 20 mars 2012 · delitfrancais.com
Actualités
HAUSSE
Manifester a un prix
actualites@delitfrancais.com
«1625 $ de hausse ça ne passe pas!» génère des coûts supplémentaires pour la ville et le SPVM Anabel Cossette Civitella Le Délit
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a Ville de Montréal et la Service de police de la ville de Montréal (SPVM) ne peuvent pas donner de chiffres précis, mais les manifestations étudiantes des derniers mois ont utilisé des moyens additionnels qui apparaîtront dans le prochain budget. En entrevue avec La Presse le 15 mars dernier, Michael Applebaum, président du comité exécutif à la Ville de Montréal, soutenait que la ville a relancé, à plusieurs reprises, le gouvernement provincial pour recevoir une «prime à la métropole» de 35 millions de dollars. «Montréal est la métropole du Québec et toutes les manifestations y sont tenues. Et il y a un coût. Quand nous dépensons de l’argent pour gérer ces manifestations, ça fait mal à nos finances et ça veut dire que des services de base
vont être mis à mal.» Dans le contexte où le gouvernement provincial se ferme à toute négociation avec les étudiants, le coût des manifestations ira en s’amplifiant après le 22 mars. La mairie d’arrondissement Ville-Marie, qui regroupe les quartiers chauds en temps de manifestations, explique qu’«à cette période-ci de l’année, le remplissage de nids-depoule et le nettoyage manuel de la neige en d’autres endroits que la manifestation, sont des tâches mises en bas des priorités des employés de la ville lorsqu’arrive une manifestation». Ainsi, lorsque les cols bleus sont appelés à nettoyer les lieux d’une manifestation, c’est d’autres tâches qui en souffrent. Durant l’hiver, la Ville de Montréal a des cols bleus prêts jour et nuit à cause de la possibilité de neige, il n’y a donc pas de ressources supplémentaires mobilisées.
Pour ce qui est des montants totaux des manifestations de novembre et de mars, ni la Ville ni le SPVM ne peuvent chiffrer l’ampleur des coûts. Le SPVM ne fait pas de bilan à miparcours des manifestations. Il précise que «les coût supplémentaires surviennent avec l’implication de la cavalerie, les unités d’intervention, mais tout cela reste difficile à calculer et des bilans ne sont pas fait automatiquement après chaque événement ». Les étudiants qui s’opposent à la hausse de frais de scolarité sont non seulement dans les rues, ils boycottent aussi les bâtiments universitaires. L’Université du Québec à Montréal (UQAM) doit elle aussi pallier aux activités des manifestants. Les coûts engendrés par les manifestations sont de natures diverses et ceux de prévention, de sécurité et de nettoyage des pavillons vandalisés laisseront
Photo: Nicolas Quiazua
leur marque dans la nouvelle année budgétaire. «L’université devra aussi pallier aux coûts de la prolongation de la session, notamment les salaire des chargés de cours», prévoit l’UQAM. Malgré le boycott d’une majorité de ses étudiants, l’UQAM fonctionne à plein
régime, que ce soit au niveau du personnel d’entretien, du chauffage ou de l’éclairage. D’ailleurs, tous les pavillons continuent à être occupés, par le personnel administratif et par certains étudiants (dont ceux de l’ESG UQAM) qui ne sont pas en boycott. x
CAMPUS
Libre expression à McGill Le deuxième forum sur la liberté d’expression organisé par Christopher Manfredi, doyen de la Faculté des arts, n’a pas rameuté les foules. Camille Gris Roy Le Délit
À
l’image du premier de la série, l’Open Forum qui s’est tenu dans la petite salle du deuxième étage de l’édifice de l’AÉUM comptait à peine une quarantaine de personnes, et parmi elles, même pas une dizaine d’étudiants étaient présents. Pourtant Josh Redel, membre du groupe consultatif, s’est dit satisfait. «Cette rencontre a été beaucoup plus productive que le précédente, on a eu de bonnes conversations», a-t-il déclaré après l’événement. «Le plus important, ce n’est pas le nombre de personnes qui prennent la parole, mais la diversité des points de vue», soutient Christopher Manfredi. En ce sens, l’objectif premier de ce forum, à savoir le «rassemblement de la diversité de l’université», aurait été rempli. «Cette assemblée est unique», fait remarquer Josh Redel, expliquant
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qu’il est rare de voir des professeurs, membres du personnel, et étudiants rassemblés dans une même salle. Rappelons également que la principale Heather Munroe-Blum, bien qu’elle ne soit pas intervenue dans le débat, était présente. La discussion a essentiellement tourné autour des grandes questions soulevées dans le rapport Jutras. En particulier, la question d’un espace spécialement dédié à la libre expression a été largement explorée. Lorenz Lüthi, professeur au département d’Histoire, a rappelé que l’université est l’endroit où les jeunes apprennent à devenir des citoyens responsables et critiques. Pour lui, «un espace spécifique pour manifester va à l’encontre de l’esprit de l’université.». Un étudiant a, au contraire, suggéré de déterminer un lieu où la libre expression serait interdite. Cela reviendrait, au final, à définir le reste de l’espace comme libre. Mais plusieurs
personnes ont soutenu qu’une telle initiative ne serait pas bien accueillie. Puisque le forum devait traiter de la «libre expression» et de «l’assemblée pacifique», il a également été question de la définition de ces termes. Par ailleurs, la discussion a traité, plus généralement, des problèmes liés à la réaction de McGill suite aux récents événements. Selon Lorenz Lüthi, il faut repenser la façon dont doit réagir l’université: «Le problème, c’est que chaque événement de ce campus qui n’est pas prévisible est considéré comme une menace. Mais une petite manifestation n’est pas une menace.» D’autre part, pour Haley Dinel, étudiante membre du groupe consultatif, on discute trop de la manière dont les gens expriment leur mécontentement, mais pas assez des raisons pour lesquelles la communauté est aujourd’hui mécontente. En ce qui concerne l’absence d’étudiants au forum, plu-
Photo: Nicolas Quiazua
sieurs pistes ont été étudiées. On a suggéré que si l’administration prenait quelque mesure concrète avant la prochaine rencontre, cela prouverait l’utilité de ce forum, et inciterait la communauté à le considérer plus sérieusement. Selon une étudiante, tout ceci relève principalement d’une question de «confiance». Mais déjà, le fait que ce deuxième forum se soit tenu dans l’édifi-
ce de l’association étudiante de McGill est un élément rassurant. Reste à voir si les étudiants auront préféré le « really, really open forum on freedom of speech and the right to protest», lancé par MUNACA le 15 mars, ou s’ils assisteront en plus grand nombre au prochain rendez-vous donné par Christopher Manfredi le 27 mars au bar du campus Macdonald. x
x le délit · le mardi 20 mars 2012 · delitfrancais.com
CAMPUS
Au diable les prophètes de malheur Qu’arrivera-t-il lorsque les propositions émanant du corps étudiant deviendront de plus en plus séduisantes et nécessaires? Louis-Philippe Tessier Le Délit
L
a semaine passée, juste avant l’assemblée générale de la faculté d’Art, l’administration de l’Université McGill a publié un communiqué dans lequel on pouvait lire que l’administration ne respecterait pas le résultat du vote dans l’éventualité que celui-ci soit en faveur de la grève générale illimité. Pour plusieurs, cette démarche est un exemple parfait de l’arrogance des administrateurs de l’université, ainsi que du fossé séparant le corps étudiant à la structure administrative. Nombreux sont ceux à avoir pensé que l’administration ne changerait pas d’attitude dans le futur proche et éloigné. L’administration est généralement vue comme un frein aux aspirations étudiantes déviant trop de la ligne conductrice établie par les hauts dirigeants de l’université. Mais qu’arrivera-t-il lorsque les propositions émanant du corps étudiant deviendront de plus en plus séduisantes et nécessaires? En ce 16 mars 2012, un groupe très important composé d’étudiants, de professeurs, d’employés, et même de membre
venant d’ailleurs au pays et dans le monde, s’est réuni à la cafétéria du Royal Victoria College (RVC) dans le but de démarrer le projet «Vision 2020». Celui-ci se déroulera durant une année complète, sera composé de plusieurs conférences participatives ayant un format de «World-café», c’est-à-dire regroupant des participants de diverses origines et disciplines dans un environnement ouvert et participatif, et aura pour but de créer un agenda pour les années à venir dans le but d’améliorer et d’embellir l’image de McGill en temps que leader dans le développement durable. Selon George McCort, une célébrité dans le département d’environnement à McGill, l’idée serait soit de «rendre McGill un modèle pour les autres universités montréalaises, ou de rendre ses étudiants de réels ambassadeurs du développement durable dans la ville et dans le monde». C’est dans cette optique que tous les gens rassemblés, assis à des tables par petits groupes, ont commencé à partager leurs idées sur différents thèmes reliés à l’état du développement durable à McGill en ce moment, ou les dé-
marches qu’ils aimeraient accomplir jusqu’à 2020. C’est dans des moments comme ceux-là que l’on peut voir clairement ce qui fait la force des campus: les idées fusent de partout, les gens se questionnent entre eux, ajoutent des détails aux idées des autres, partagent leurs expériences personnelles avec telle ou telle organisation. Mais ce qui est important de retenir dans ces échanges sont les façons «de connecter les différents membres d’une communauté», selon Lilith Wyatt. En fait, plusieurs des idées exposées gravitaient autour de ce thème en particulier. Par exemple, comment prévenir que les étudiants s’enferment dans leur discipline respective, comme ont tendance à le faire les étudiants en droit, économie, ou génie civil? L’une des solutions pourrait être d’introduire un pré requis dans le curriculum des classes qui serait de réunir des étudiants de diverse discipline dans le but de collaborer sur un projet semestriel. Mais «Vision 2020» n’est pas que le fruit des efforts de professeurs ou administrateurs. Le Délit a rencontré Susanna Klassen, étudiante en environnement et bénévole avec le bureau du déve-
Photo: Nicolas Quiazua
loppement durable à McGill. La semaine passée, Susanna et ses collègues avaient pour mission de non seulement promouvoir le dit événement, mais aussi de penser aux possibles répercussions qu’aurait cette rencontre. Comme elle nous l’a dit en riant, «on a eu beaucoup de mal à comprendre l’étendue de ce projet puisqu’il est non seulement multidisciplinaire, mais est aussi étalé sur une très longue période de temps!» Elle nous a expliqué qu’a la fin de cet exercice consultatif, un document sera rédigé
regroupant les idées des membres de la communauté. Celuici pourra ensuite être consulté par les élèves, professeurs, ou administrateurs de l’université, et pourra ainsi servir de modèle pour de futurs projets de développement durable. Si, selon Susanna, plusieurs étudiants semblent être pessimistes quant à la réussite de ce grand projet, mademoiselle Klassen croit que «l’université a besoin de changement, de renouveau», ce qui clorait le bec des prophètes de malheur. x
BILLET
La révolte du dominé La tension était palpable entre le SPVM et les manifestants lors de la manifestation annuelle contre la brutalité policière.
Photo: Nicolas Quiazua
Laurence Secours Le Délit
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a présence médiatique dans une manifestation représente la seule estafette entre le spectateur et la «réali-
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té», on ne peut ressentir une peur fondée et étalée sur trois heures dans une vidéo de deux minutes réalisée par des journalistes prémunis par le SPVM. Ces journalistes sont enclins à jeter la première pierre aux «va-t-en-guerre» belliqueux et sans cervelle, profitant supposément de la manifestation pour s’adonner à une casse aléatoire dans un geste de brutalité sociale sans borne. Ces fervents du quatrième pouvoir s’arment d’arguments fallacieux et s’adonnent à la dépolitisation de ces manifestants masqués. Les Black Bloc sont soi-disant une «menace pour la société». Ils ne sont rien d’autre que des individus participant à des groupes éphémères de démocratie directe. Parallèlement, les victimes de la répression policière et leurs défenseurs s’étonnent de l’utilisation de la matraque qui ne
semble appartenir à personne alors que la pierre lancée dans la vitrine du BCBG elle, appartient à 2 000 personnes. D’où l’importance de comprendre l’action
«Les Black bloc ne
sont rien d’autre que des individues participant à des groupes éphémères de démocratie directe.»
politique d’un Black Bloc à travers une manifestation, pour la sécurité des autres manifestants. La police justifie son pouvoir coercitif et sa répression particulièrement oppressante du 15 mars par les actions des quelques manifestants s’étant adonnés au vandalisme anticapitaliste. C’est après vingt minutes de marche que des policiers à cheval ont décidé de se ruer sur
les manifestants en signe d’intimidation, déclarant la manifestation illégale à cause d’un projectile lancé. De nombreux étudiants ne voulant se faire associer au Black Bloc étaient donc contraints de subir les tactiques du SPVM qui, ce soir-là, semblait «occuper» Montréal en entier. Les étudiants, confrontés à la myriade ahurissante de policiers présents, n’étaient plus libres de marcher pour faire la critique de la répression policière dont ils sont souvent victimes. L’ambiance sonore suffisait à se sentir dans un autre pays; des bombes à quelques secondes d’intervalles, le bruit étouffant des hélicoptères, les cris des manifestants enragés, des gyrophares, et le tout dans un périmètre encerclé infranchissable à moins de piétiner un mur de policiers s’adonnant à du profilage.
Photo: Nicolas Quiazua
C’est cela l’impuissance du révolté, la stérilisation de la mobilisation. x
x le délit · le mardi 20 mars 2012 · delitfrancais.com
CONFÉRENCE
Inuktitusuunguvit? ArcticRealities, une discussion sur la langue inuktitut et la vie des étudiants Inuit à Montréal Camille Gris Roy Le Délit
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eudi dernier, le 15 mars, KANATA, le «Undergraduate Journal of the Indigenous Studies Community of McGill», organisait une discussion sur la langue inuktitut et sur la vie des étudiants Inuits à Montréal. Cette conférence s’inscrivait dans le cadre d’ArcticRealities, une semaine d’événements consacrés aux Inuit. Étaient invités à témoigner Jason Annahatak Timmons, professeur d’inuktitut au cégep John Abbott, et plusieurs de ses élèves Inuits. Jason Annahataka a tout d’abord donné une introduction à l’inuktitut. Cela a permis à l’assemblée de se rendre compte des difficultés que pose l’apprentissage de cette langue. La prononciation, la longueur des mots
(qui constituent en réalité des phrases), et la grammaire peuvent en effet en décourager plus d’un. «Je dis à mes étudiants au cours d’introduction que l’inuktitut est comme un casse-tête complexe», commente Jason Annahatak, «mais c’est un casse-tête qui vaut la peine d’être tenté». La langue compte également de nombreux dialectes, selon que l’on se trouve dans les régions du Nunavut, Nunavik (nord du Québec), Nunatsiavut, ou Inuvialuit. Le problème est qu’aujourd’hui cette langue est de moins en moins étudiée. Avant de commencer sa présentation, Jason Annahatak a demandé si quelqu’un dans l’assemblée parlait l’inuktitut. Parmi la quarantaine de personnes présentes –et mis à part les étudiants Inuit–
une seule en avait quelques notions. Pourtant, dans les années 1970-80, il était beaucoup plus fréquent pour les «gens du sud» d’apprendre cette langue.
«La langue risque
de se perdre. Il est primordial pour les membres de la communauté de prendre conscience du fait qu’elle utilise de plus en plus de mots anglais pour s’exprimer.»
Ce problème se ressent surtout chez les Inuit. La langue risque de se perdre. Pour Jason Annahatak, il est primordial que sa communauté prenne conscience du fait qu’elle utilise de plus en plus de mots
anglais pour s’exprimer. «Je n’ai jamais une conversation entière en inuktitut ou en anglais; c’est toujours un mélange des deux», a avoué une des étudiantes de John Abbott. De plus, avec l’invention de nouvelles technologies, la langue doit sans cesse évoluer et s’adapter à la modernité pour ne pas devenir obsolète, et les diverses institutions culturelles qui tentent de préserver la langue ne travaillent pas toujours main dans la main. Le fait qu’on ne puisse pas, à l’heure actuelle, offrir une éducation supérieure dans les communautés inuit est problématique. Pour la deuxième partie de la conférence, l’assemblée s’est réunie autour d’un grand cercle, et les étudiants Inuit ont alors pu s’exprimer librement sur la question. Venir à Montréal a été, pour plusieurs d’entre eux, assez
difficile. Même s’ils se disent contents d’avoir eu cette chance d’étudier au sud, leur région natale leur manque. Certains sont déterminés à retourner au Nunavik après leurs études. «La vie est trop rapide ici[…]et il faut payer pour tout», a déclaré une jeune Inuit. D’autres se voient bien rester ici. Un des étudiants, spécialisé en sciences politiques, pense s’installer à Ottawa. Il aimerait alors peut-être contribuer à la préservation de sa langue et des traditions de sa communauté auprès des autorités fédérales. La préservation de la l’inuktitut passe aussi par le respect de la langue et de ses locuteurs. Lorsque le Premier ministre du Canada, dit «Iqualuit» plutôt que «Iqaluit», le risque est fort qu’il perde la confiance des inuktitutophones. x
MANIFESTATION
Syrie: les Montréalais manifestent Près de 1700 personnes se sont réunies à la Place Norman Bethune pour la Marche de Commémoration du 1er anniversaire de la Révolution syrienne . Amélie Lamarche Le Délit
P
lusieurs groupes de solidarité envers les Syriens, Collectif pour la Syrie à Montréal, Coordination syrienne à Montréal et Association étudiante syrienn étaient au rendez-vous le 17 mars dernier pour manifester leur solidarité au mouvement populaire syrien. Les revendications des groupes et des Montréalais réunis se
voulaient sans aucune appartenance politique. Les différents slogans exigeaient que le peuple syrien retrouve la liberté, la justice, la démocratie et que l’état de sécurité soit démantelé. Depuis le début de la révolte populaire le 15 mars 2011, opposants et régime s’affrontent violemment aux quatre coins de la Syrie. Entre détentions arbitraires, meurtres, viols, enlèvements et tortures, la réponse du régime Bachar el-Assad contre
Photo: Amélie Lamarche
x le délit · le mardi 20 mars 2012 · delitfrancais.com
les mouvements de contestation qu’il qualifie de «bandes terroristes armées» est puissante. Le Collectif pour la Syrie à Montréal dénonce: « […]la brutalité du gouvernement de par la méthode qu’il utilise afin de bloquer la circulation d’effectifs médicaux, des docteurs, de la nourriture et du gaz. Cela enferme la population affrontant la mort, le froid, le manque de nourriture et l’eau, ou fuyant les tueries systématiques et les massacres.» Un rapport d’Amnistie internationale publié le mercredi 14 mars recense « 31 méthodes de torture et d’autres formes de mauvais traitements attribuées aux forces de sécurité, à l’armée et aux bandes armées progouvernementales connues sous le nom de shabiha selon les témoignage de victimes.» «Ce qu’ont traversé les nombreuses personnes visées par la vague d’arrestations qui a marqué l’année écoulée est très similaire à ce que les détenus enduraient sous l’ancien président Hafez el-Assad », a déclaré
Photo: Amélie Lamarche
Ann Harrison, directrice adjointe par intérim du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnistie internationale. L’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH) basé en Syrie comptabilise plus de 9 000 morts depuis le début de la révolte populaire. Au niveau diplomatique,
Ahmed Fawki, porte-parole de monsieur Annan a déclaré que Kofi Annan et d’autres membres de l’ONU et de la Ligue arabe arriveront en Syrie au début de la semaine. Leur mandat est de négocier la possibilité d’une éventuelle mission d’observation ayant comme but de mettre un terme à cette situation. x
Actualités
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POLITIQUE FÉDÉRALE
Adoption de la loi C-10 La justice criminelle au Canada sera plus répressive que jamais. Geneviève Payette Le Délit
N
’en déplaise au Québec, le 12 mars dernier le projet de loi C-10 a été voté et approuvé par 154 voix contre 129 à la Chambre des communes. Ce nouveau système législatif intitulé «Loi sur la sécurité des rues et des communautés» prévoit notamment des peines plus sévères pour les crimes liés à la production et la distribution de drogue, ainsi que pour les crimes sexuels commis envers des mineurs. De plus, cette loi modifie le système de pardon et rend certains anciens détenus inéligibles à vie, en plus de doubler le temps d’attente pour y être admissible. L’adoption de la loi modifie par le fait même les peines pour les jeunes contrevenants, les rendant encore plus rigoureuses qu’auparavant. La criminalité est présentée par les Conservateurs comme étant de plus en plus présente, d’où ces mesures draconiennes. Or, le taux de criminalité est à la baisse, et ce, depuis les dix dernières années. Selon Statistique Canada, en 2000, le nombre de crimes violents s’élevait à 458 559 tandis qu’en 2010 ce nombre totalisait 437 316. Le gouvernement fédéral dit vouloir «serrer la vis» sur les
délinquants et contribuer à rendre le Canada plus sécuritaire. Si les citoyens désirent se sentir en sécurité dans les rues , ils veulent aussi savoir qui paiera pour garder les criminels en prison aussi longtemps et pour bâtir de nouveaux édifices afin de les accueillir. Le Québec évalue que l’application de cette nouvelle loi
engendrerait des coûts de 40 à 80 millions de dollars par an, sans considérer les 750 millions de dollars que risquerait de coûter la construction de nouvelles prisons. Le fédéral n’a toujours pas signifié son désir d’équilibrer les budgets pour ces récents changements. Qui endossera donc ces dépenses astronomi-
Photo: CTV
gouvernement du Québec avait soumises avec l’appui de plusieurs organismes», a souligné par communiqué le ministre de la Justice, Jean-Marc Fournier. En effet, «le Québec continuera de miser sur la prévention de la récidive et la réadaptation, plutôt que sur les durcissements de peines», a confirmé monsieur Fournier. Les plaintes faites à l’égard de cette nouvelle loi jaillissent de toute part. Les adolescents en détention dans les Centres de jeunesse sont effrayés. Julien, un jeune contrevenant, s’y oppose car, selon lui, «la prison pour un jeune délinquant ressemblerait plus à une école du crime». Les Centres de jeunesse déborderont d’ici peu et la qualité de vie des jeunes en pâtira. Certaines universités ont également exprimé leur mécontentement quant à cette loi. Des étudiants en droit de l’Université McGill ont récemment approché les membres de l’association étudiante et discuteront prochainement d’idées pour adoucir les exigences du gouvernement. Selon Joël Pedneault, Vice-président aux affaires externes de l’association étudiante de McGill, «ça s’est déjà vu auparavant qu’un mouvement social fasse changer les choses.» x
Cependant, contrairement à ce qu’avance Machiavel, je ne crois pas que la fin puisse justifier les moyens. Du moins, pas lorsqu’il est question de pouvoir démocratique, de transparence électorale et d’intérêt public. C’est-à-dire que le gouvernement a beau passer des projets de loi à la Chambre des communes, qui seront votés et dans certains cas implantés dans la société, mais quand la légitimité du gouvernement est remise en cause, tout peut passer du blanc au noir en un seul coup. Voilà l’ampleur des appels frauduleux. Si le Parti conservateur est bel et bien au premier plan de cette affaire, ils auront porté atteinte à la démocratie, abusé du pouvoir et ainsi affecté la confiance des électeurs auprès des institutions politiques canadiennes. Voilà pourquoi la fin ne justifie pas les moyens.
Plus encore, le refus d’ouverture face à ces présomptions de culpabilité surplombant Ottawa et le Parti conservateur ne fait que tourner le fer dans la plaie. L’arrogance dont fait preuve Stephen Harper dans cette affaire ajoute au cynisme populaire, laissant place à un réel mépris des institutions politiques, en plus d’un dégoût profond du bien partisan. Mais si personne ne réussit à faire comprendre au Premier ministre que la démocratie canadienne est en jeu, que les citoyens de ce pays ont perdu confiance en leur système politique et que sa légitimité est plus d’une fois questionnée, à quoi ressemblera l’avenir politique du Canada? Pourrons-nous alors crier fièrement que la fin a justifié les moyens? x
ques? Une question de plus sans réponse de la part du gouvernement Harper. Le Québec quant à lui désire des mesures moins drastiques et concentre sa bataille sur la question des jeunes contrevenants. «Nous aurions préféré que le Parlement accepte les demandes d’amendements que le
«Nous aurions préféré que le Parlement accepte les demandes d’amendements que le gouvernement du Québec avait soumises,» souligne Jean-Marc Fournier.
CHRONIQUE
Un déni perpétuel Alexie Labelle | Au-delà du présent
Nier. Blâmer. Dévier. Accuser. Il semble que ces quatre verbes forment le véritable slogan du Parti conservateur. Nions les appels frauduleux. Blâmons l’opposition. Soyons les victimes: accusons le Parti libéral. Pour plusieurs, cette affirmation peut paraître excessivement simpliste, soit. Mais à
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voir comment le gouvernement actuel gère les allégations de fraude électorale, il n’est pas étonnant de développer une certaine amertume quant à leurs tactiques nébuleuses. Sans pour autant revenir en profondeur sur le sujet des appels trompeurs, j’aimerais plutôt aborder le choix existentiel de Stephen Harper d’opter pour le déni. Tel un enfant avare de pouvoir sur ses camarades, il refuse de grandir, de prendre ses responsabilités et de préserver toute forme de dignité. Car voyez-vous Monsieur Harper, le déni et le mensonge ne font pas bon ménage; souvent, la transparence vaut beaucoup mieux qu’un silence interminable. De son côté, bien qu’encore affaibli par le scandale des commandites, le Parti libéral a jugé plus favorable de jouer la carte
de la transparence. À mon avis, afin de sauver la confiance des électeurs, il est primordial d’être honnête et d’avouer ses torts. Le contraire ne fait qu’alimenter le cynisme et, par le fait même, risque d’engendrer un taux de participation électoral désolant. Naturellement, la question se pose: pourquoi Stephen Harper demeure-t-il incapable d’agir en bonne et due forme, de prendre les rênes du pays en bon Canadien plutôt qu’en «bon Conservateur»? Nul besoin de tourner autour du pot, la réponse est claire: la partisannerie. Certes, on ne peut guère reprocher à notre Premier ministre de refuser de mettre cartes sur table. Depuis le 2 mai dernier, le chef Conservateur étale son jeu sans provoquer de surprise scandaleuse. Chose promise, chose due, comme on dit.
x le délit · le mardi 20 mars 2012 · delitfrancais.com
SPÉCIAL SPORT Frénésie sur glace molle
Énergie, sueur et excitation se sont mêlées aux 105 000 spectateurs venus assister au championnat du monde Red Bull Crashed Ice à Québec le 17 mars.
Charlotte Paré-Cova Le Délit
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our une septième année consécutive, les rues du Vieux-Québec se sont transformées en une longue et sinueuse piste glacée en vue du championnat du monde d’ice cross downhill, samedi soir dernier. La grande finale regroupait les 64 meilleurs athlètes provenant de 12 nations différentes. À quelques minutes du début de la course, la foule était déjà compacte et festive. Elle regroupait des fans du monde entier, venus encourager les athlètes provenant d’aussi loin que le Japon, la Finlande, la Slovaquie, la Russie, l’Allemagne et l’Italie. Peu importe leur origine, les membres de l’assistance chantaient en chœur sur les extraits de chansons de Glee et de Flo-Rida diffusées sur le système de son géant. La chanson Good Feeling a donné le ton au début de la compétition, et elle s’est vérifiée.
Photos par Charlotte Paré-Cova
Une compétition réussie L’événement rassembleur qu’est le Red Bull Crashed Ice de Québec a rempli toutes les attentes: la foule était dense et énergique et l’ambiance festive. L’éclairage dynamique colorait la piste pour la rendre impressionnante et presque irréelle. Les écrans géants aménagés autour de la piste permettaient à tous les spectateurs présents de suivre la course, peu importe leur emplacement.
«Parmi les 64 fina-
listes de de la compétition, on comptait 35 Canadiens dont 15 Québécois.»
L’animation de la soirée, exclusivement en français, était habilement assurée par Pierre-Yves Lord et Vincent Cauchon. Ils ont su conserver l’engouement de la foule pendant plus de 3 heures de compétition. Des prestations, telles que celle de Ryan Leech, un cascadeur extrême sur son vélo, ont agréablement divertit l’audience durant les pauses entre les descentes. Si la température très douce de samedi soir était la bienvenue chez les spectateurs, elle a joué quelques tours aux finalistes du championnat. La glace était si molle que même la descente des drapeaux, habituellement lente et contrôlée, s’est ponctuée de chutes impromptues et de déviations de tous les côtés. Cet avant-goût a permis aux athlètes d’aiguiser leurs patins en conséquence, sans toutefois éviter de nombreuses chutes et pertes de contrôle, sans compter les obstacles et les collisions avec
les autres participants – des incontournables dans cette compétition de sport extrême. Une finale majoritairement canadienne Parmi les 64 finalistes de la compétition, on comptait 35 Canadiens dont 15 Québécois; un record au niveau de la présence québécoise au championnat du monde Red Bull Crashed Ice. Les compétitrices étaient également majoritairement canadiennes. C’est l’Ontarienne Fanny Desforges qui a triomphé en finale, provoquant l’euphorie générale au sein d’une foule extrêmement patriotique. Du côté des hommes, les amateurs de cette compétition suivaient de près les résultats de l’Ontarien Kyle Croxall, qui menait le classement général après les manches qui s’étaient déroulées à Saint Paul (US), Valkenburg (Pays-Bas) et Are (Suède). Son plus dangereux rival était assurément le Finlandais Arttu Pihlainen, champion du monde en 2011, et quatre fois gagnant de la course de la ville de Québec. Après plusieurs descentes extrêmement serrées, parsemées de chocs et de culbutes, c’est Kyle Croxall qui s’est mérité le titre de champion du monde, grâce à un deuxième rang dans la course et un total de 3000 points comme pointage final cette saison. Arttu Pihlainen est arrivé premier dans la course, pour décrocher le deuxième rang mondial avec un pointage final de 2960. Le jeune frère de Kyle, Scott Croxall s’est classé en 3e place, ce qui constitue un podium majoritairement canadien… et majoritairement Croxall! x
Le 3 avril paraîtra notre Cahier Création. Voilà l’occasion de faire un Beaudelaire ou un Picasso de toi! rec@delitfrancais.com x le délit · le mardi 20 mars 2012 · delitfrancais.com
Sport
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SPORT
Une équipe qui rayonne Le Délit s’entretient avec Adrien Dupont, entraîneur de l’équipe de tennis de McGill. Le Délit: En tant qu’entraîneur de l’équipe de tennis de McGill, dont vous avez également été le capitaine et joueur, résumez votre parcours. Adrien Dupont: Je suis entré dans l’équipe de tennis de McGill en automne 2006. À l’époque, l’équipe féminine était membre de l’OUA (Ontario University Athletics) alors que l’équipe masculine, qui avait le statut de Varsity II, était en train de terminer une suspension de cinq ans pour avoir refusé de participer à une compétition officielle. Dès l’année suivante, l’équipe masculine a repris la compétition, et produit, depuis lors, des résultats très convaincants. LD: Parlez-moi de la composition de l’équipe ainsi que des méthodes de sélections. AD: L ‘équipe de tennis de McGill comporte 13 joueurs masculins et féminins. Des try-outs ont lieu une fois par an, en septembre. Tous ceux qui désirent y participer sont les bienvenus. La formule de sélection s’étend sur deux journées. La première journée, nous effectuons un filtrage qui repose uniquement sur la technique et la deuxième journée nous mettons en place des systèmes de matchs qui nous permettent de distinguer les meilleurs joueurs. LD: Que parvenez-vous à réaliser comme entraînements, comment organisez-vous les déplacements avec le budget dont vous disposez ? AD: C’est très simple, notre équipe ne reçoit désormais plus aucune contribution monétaire de la part de l’Université McGill. Il y a eu un plan de restructuration des équipes sportives et d’austérité quant aux budgets qui a rétrogradé l’équipe de tennis à la division «compétitive club». Par conséquent, nous devons nous-mêmes assurer certains frais administratifs. Ce sont les joueurs de l’équipe qui financent eux-mêmes les déplacements.
L’Université McGill nous garantit néanmoins des accommodements très raisonnables en nous fournissant des terrains tout au long de la saison. Depuis quelques années, lors de la session d’hiver, nous bénéficions d’une collaboration avec le stade Uniprix qui nous fournit également des terrains. LD: Quelle est votre réaction face aux résultats de l’équipe de football américain et que pensez-vous de la répartition des budgets entre les équipes sportives ? AD: Étant donnée notre situation, il est évident que l’on souhaite une répartie plus équitable des fonds alloués au sport. Un des problèmes majeurs est la mauvaise estimation des coûts nécessaires pour subventionner certaines équipes. En effet, un programme comme celui de l’équipe de tennis ne requiert guère un budget aussi élevé qu’une équipe de football ou de hockey. Par ailleurs, nous revendiquons un système plus méritocratique où les contributions financières de la part de l’université iraient de pair avec les résultats de ses équipes respectives. Nous avons le sentiment d’évoluer dans une université à l’ancienne où les fonds disponibles pour les équipes sont prédisposés par rapport aux traditions et à l’histoire de l’université. Or, en réalité, l’Université McGill ne propose pas une équipe de football américain compétitive, par exemple. Nous ne sommes pas les seuls dans cette situation. Je peux citer l’équipe de squash qui rivalise avec les champions nationaux, alors qu’elle se trouve dans la même situation financière que nous. Si l’administration de McGill acceptait d’être plus généreuse à notre égard, je peux vous garantir que l’on ferait rayonner le nom de McGill à travers le Canada. LD: Comment évaluez-vous les performances de votre équipe? AD: Je vais principalement évoquer l’équipe masculine étant donné que l’équipe féminine a disparu le temps d’une saison il y
a deux ans. Pour vous donner un exemple, en saison régulière, nous avons battu l’Université de Montréal, lauréate des championnats canadiens par trois fois. Nous évoluons dans une ligue avec 8 autres équipes (toutes universitaires sauf celle de McGill), et nous figurons perpétuellement en haut du tableau à la fin de la saison. Nos victoires contre l’Université de Montréal sont notoires, car cette dernière dispose d’un budget annuel avoisinant les 15 000 dollars par an, ainsi que d’un coach rémunéré à temps plein. Il ne fait aucun doute que notre équipe masculine est parmi les plus compétitives du circuit. Je tiens à souligner qu’en 2010 nous avions été défaits en demifinale des championnats qualificatifs par l’Université de Toronto, l’équipe vainqueur de cette compétition. LD : Si vous disposez de budgets beaucoup plus restreints, quelle est la clef de votre réussite ? AD : Nous avons un recrutement efficace grâce à la réputation de l’Université McGill qui attire des gens des quatre coins du monde. Par conséquent, nous sélectionnons nos joueurs sur une base plus éclectique et plus intéressante étant donné la popularité
du tennis dans le monde. Au-delà du recrutement, on remarque un sentiment d’appartenance à l’équipe très émouvant de la part des joueurs. Ces derniers sont conscients de nos timides moyens et sont fiers de rivaliser avec des équipes qui disposent de trois ou quatre employés. Nous avons le statut de petit poucet et cela créé un esprit d’équipe unique. LD : Est-ce que l’Université McGill vous est reconnaissante pour vos résultats? AD : McGill a toujours été attentive à nos résultats. Depuis notre rétrogradation, notre présence sur le site de McGill est limitée. J’assure ainsi la couverture sur internet grâce à notre site officiel, ainsi que notre page Facebook. Notre but aujourd’hui est de créer une ligue au Québec afin de ne plus être dépendant de la ligue d’Ontario. Pour cela, il nous faut un minimum de quatre équipes. J’ai par ailleurs le plaisir d’annoncer qu’une équipe se crée à l’Université Sherbrooke et qu’une autre s’amorce à l’Université Laval. x Plus de détails au www.mcgilltennisteam.ca. Propos recueillis par Alexis Chemblette
Photo: Équipe de tennis de McGill
CHRONIQUE
JO: L’expulsion tranquille avant la tempête
Henry Gass | Chronique Sport
La ville de Londres, c’est une entreprise –en anglais «the City of London Corporation»– et ces Jeux Olympiques, ce sont les propriétaires qui veulent en profiter. À Londres, en ce moment, le silence avant la tempête n’est pas si calme. Mon frère, Matt, est étudiant en droit et habite Londres. Il
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ne s’inquiète pas. «La chose principale aujourd’hui est que les gens s’inquiètent que le métro ne fonctionne pas», dit-il. Il avait cependant une inquiétude lui-même: qu’au début des Jeux (le 27 juillet), nous verrions un exode depuis Londres. Avec des millions de touristes qui viennent à Londres pour deux semaines, les gens veulent sous-louer leurs appartements pour cinq ou dix fois la somme régulière. Dans une ville avec des loyers élevés –j’ai habité dans le nord-est de Londres l’été passé, dans une chambre avec mon frère, et nous avons payé 160 livres sterling (250 dollars) chaque semaine– la hausse de loyer avait deux effets: des résidents vont sous-louer des propriétés pour des profits immenses, et des résidents vont être expulsés. «Des touristes riches vont entrer pour les Jeux Olympiques et
x le délit · le mardi 20 mars 2012 · delitfrancais.com
les gens sous-louent ces propriétés à tarif plus élevés que ce qu’ils payent chaque semaine pour profiter», me dit Matt. En général, ce sont les riches qui sous-louent aux riches. Des exemples: un appartement penthouse aux environs de Hyde Park (l’autre côté de Londres du parc Olympique) est à louer pour 75 000 livres sterling par semaine (118 000 dollars); le joueur de football retraité Sol Campbell loue sa maison dans Chelsea au même tarif; mais la gagnante c’est une maison de sept chambres dans Mayfair à 100 000 livres sterling par semaine (157 000 dollars), un record pour la ville. Matt habite dans un logement temporaire dans l’est de Londres à dix minutes du parc Olympique. Il a expliqué que son loyer va augmenter (mais il ne sait pas de combien) et il va déménager.
«Parce que c’est temporaire, [les propriétaires] peuvent l’augmenter quand ils veulent. Ils ont besoin de me donner deux semaines de préavis seulement. Un propriétaire normal ne peut pas le faire», m’a dit mon frère. Mais les propriétaires n’augmentent pas seulement les loyers. Certains commençaient à expulser leurs locataires dès février. Antonia Bance, de l’ONG de logement britannique «Shelter» a dit à msnbc.com que «des agents immobiliers écrivent des clauses dans les contrats disant qu’il est possible d’habiter là à l’exception de cette période [pendant les Jeux Olympiques].» David Brown a décrit son contrat, qu’il a signé en octobre, à msncbc.com. L’agent immobilier disait à Brown que, s’il ne déménageait pas avant le 15 juillet, le loyer augmenterait de 3 000 livres sterling (4 700 dollars) cha-
que semaine, un tarif «pénalité». «Actuellement, je suis en train de décider de prendre un travail au Japon» pour enseigner l’Anglais, at-il dit à msnbc.com. Les autres crises La crise de logement n’est pas la seule crise des Jeux Olympiques. Voici, une courte liste: des patients et la livraison de matériel sanguin bloqueraient la circulation, le matériel de vaccination contre l’anthrax et la variole est bas et a besoin d’être refourni pour parer à une éventuelle attaque biologique. Londres a peur d’une urgence de santé publique parce que les touristes et athlètes apporteraient des maladies et le médecin de l’équipe Olympique de Grande-Bretagne a dit à l’équipe de ne pas serrer de mains. Finalement, le sud-est de l’Angleterre serait déclaré zone de sécheresse. x
SPORTS
Technologie au service de la nage Du 27 mars au 1er avril, plus de 800 nageurs du Canada et d’ailleurs seront en compétition au stade olympique de Montréal. Myriam Landhi Le Délit
L
es Jeux Olympiques de Londres auront lieu du 27 juillet au 12 août 2012. La semaine prochaine, les meilleurs nageurs canadiens s’affronteront pour obtenir une place au sein de l’équipe olympique canadienne. Pour leur part, les nageurs paralympiques de haut niveau tenteront de se qualifier pour les Jeux Paralympiques, qui se tiendront trois semaines après les Jeux Olympiques. Les Essais Canadiens de Natation Olympique et Paralympique, en plus de déterminer les athlètes qui représenteront le Canada lors de la 30e Olympiade, seront de calibre international. Aux quelques 700 nageurs Canadiens s’ajoute une centaine d’athlètes d’environ 11 pays. Ils nageront au stade olympique afin d’améliorer leur classement mondial. Cette épreuve de qualification est de loin la compétition canadienne la plus importante de l’année olympique. Elle réunit la crème des nageurs canadiens, dont beaucoup ont déjà participé aux Jeux Olympiques, et un public fidèle et passionné. Plus de 3 000 personnes sont attendues pour chacun des six jours de la compétition. Deux cents bénévoles veilleront au bon déroulement de l’évènement.
La plupart des sports ont vu de récentes avancées technologiques modifier la façon dont une épreuve se pratique et se gagne. La natation ne fait pas exception et a vécu bon nombre de changements ces dernières années. Trente-six ans après les Jeux Olympiques de Montréal de 1976, les nageurs d’aujourd’hui concourront la semaine prochaine dans la même piscine, mais ils s’élanceront de blocs de départ bien différents. Vingt nouveaux blocs viennent d’être installés à la piscine du stade. Ils permettent un départ semblable à celui des coureurs sur une piste d’athlétisme : le pied à l’arrière effectuant une poussée sur une plaque afin d’arriver de manière plus efficace dans l’eau. De plus, ce sont les mêmes blocs que les athlètes devront utiliser à Londres. Ainsi, Natation Canada espère préparer ses athlètes pour qu’ils performent le mieux possible cet été. Toujours du point de vue technologique, l’arrivée de nouvelles combinaisons de compétition a transformé la scène mondiale de la natation. Les nouveaux maillots, visant à réduire le frottement et à rendre les nageurs plus hydrodynamiques, ont causé une polémique particulièrement importante de 2008 à 2010 et ont forcé la Fédération Internationale de
Natation (FINA) à règlementer de façon plus stricte les combinaisons autorisées lors de compétitions officielles. Durant les deux premiers mois de 2008, trente-six records du monde sur un total de trenteneuf ont été établis avec la combinaison LZR Racer de Speedo. En 2009, la combinaison italienne Jaked, recouverte de polyuréthane, a fait son apparition près des piscines et de nombreux records du monde en plus des records nationaux de nombreux pays, notamment en France, ont été battus. Ces deux combinaisons favoriseraient la flottabilité des athlètes ce qui améliorerait de façon importante leurs performances. Après cette vague de nouvelles combinaisons et de nouveaux records, la FINA a décidé qu’à compter de 2010, les combinaisons devront être faites de tissu à 100%. De plus, elles s’arrêtent maintenant aux genoux, et les hommes doivent avoir le haut du corps à découvert. Ce retour à la peau va-t-il affecter les sélections canadiennes de la semaine prochaine et les Jeux Olympiques de Londres ? Avec ce barrage aux nouvelles combinaisons considérées trop performantes, on peut se demander si les records du monde établis de 2008 à 2010 qui n’ont pas été annulés seront un jour battus par des nageurs sans maillot mira-
cle. Peter Carpenter, entraîneur-chef de l’équipe de natation de McGill affirme que de nouveaux records pourront être réalisés. «Ce n’est pas un secret que les combinaisons favorisaient certains nageurs plus que d’autres, entraînant la possibilité d’avantages injustes», ajoute-t-il. Michel Tremblay, entraîneur-chef adjoint du Club de Natation des Piscines du Parc Olympique (CNPPO), partage ce point de vue. «Maintenant, ce sont les athlètes qu’on va voir nager, et non les maillots», estime-t-il. Reste à voir si les Canadiens profiteront du retour du tissu pour s’illustrer sur la scène internationale cet été. Quand? Du 27 mars au 1er avril 2012 Où? Centre Sportif du Parc Olympique Des étudiants de McGill à surveiller : Steven Bielby, Valerie De Broux, Myriam Donato, Pierre-Alexandre Renaud, MarcAndre Benoit, Michael Luck, Matthew Khatchadourian, Valerie Grand’Maison. x Pour plus d’informations et pour l’achat de billets: Site officiel des Essais de Natation Olympiques et Paralympiques 2012: www.swimtrials.ca Site du CNPPO, partenaire dans l’organisation des Essais: www.cnppo.net
Essai-photo par Victor Tangermann
Sport
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CHRONIQUE
D’une crosse à l’autre Marek Ahnee | Carnets métèques
«À Montréal, le hockey est l’opium du people», pourrait lancer un sombre moraliste. Le voltairien, quant à lui, remettrait en cause le hockey montréalais car, comme tout sport organisé, il est violent, diviseur, anti-intellectuel, prônant le grégarisme tribal. Le
fidèle du Centre Bell peut se lasser de la corruption des décideurs du hockey mais, quelles que soient les critiques et les scandales, la Foi demeure intacte et vibrante. Au-delà du lieu commun, le Hockey est bien la religion officielle de Montréal, malgré le libre-exercice des autres sports. Élevé sur une île africaine, j’ai été bercé depuis l’enfance par la sempiternelle rivalité entre Manchester et Liverpool, assez forte pour diviser tout un pays, à l’exception de quelques esprits forts qui optent pour Arsenal ou le Real Madrid. Étant moi-même un footballistique spirituel mais non pratiquant, je découvrais le hockey sur glace comme un ethnologue des années 20 se heurtant aux fétiches d’une contrée lointaine. C’est grâce aux
Habs que le Sacré demeure dans Montréal. Maillots et posters ont remplacé scapulaires et ostensoirs. Et pourtant, on raconte que Montréal fut, à une époque pas si lointaine, la Rome des Amériques. Au néophyte urbain de se plonger dans les archives pour comprendre. D’abord, il y a l’image d’Épinal: le bon curé aux joues roses qui bénit les filles du Roi, ou même Céline Dion chantant pour Jean-Paul II. Et puis la descente aux enfers, une histoire coup de poing dont on ne sort pas indemne. Une série de perfidies en soutane, sous couvert de paternalisme, une violence symbolique et manipulatrice au son de l’angélus et au rythme des processions. Le Montréal de Monseigneur Bourget ressemble à une théocra-
tie shiite, le Québec de Duplessis à un film de Coppola. Tractations frauduleuses, sanctification d’alliances douteuses, abus en tout genre, enchaînement des esprits et des corps, la liste est longue. Le livre d’histoire se referme sur un haut-le-cœur. Encore une fois, au bout de mon voyage à travers deux océans, le gris et le noir s’effacent. Même pour un esprit mécréant, le souvenir du catholicisme mauricien a le goût d’une Madeleine de Proust et des couleurs de réalisme magique. Alors qu’encore aujourd’hui, Ouellet et Turcotte sont les aboyeurs de la dictature vaticane, face à une métropole sourde. Les églises semblent vides lorsqu’elles ne sont pas transformées en immeubles. C’est en gentils que les quêteurs d’absolu peuvent aller chercher
refuge dans les synagogues et les Mandirs. Mais le catholicisme n’a pas disparu de la jungle citadine où il semble avoir laissé quelques signatures taguées sur les murs. Si Montréal reste Rome face à Toronto, c’est aussi par la force d’une langue que les braves curés préservèrent à coups de goupillon et de bâtons de craie. Enfin, pour celui habitué à la gifle parisienne, une ville conviviale où le sourire tient bon, ou un système social fort règne. À force d’avoir entendu si souvent que les hommes sont frères, le message a dû finir par passer. Peut-être est-ce l’Éternel lui-même, avec le sentiment du devoir accompli, qui décida un jour de s’envoler vers d’autres cieux, tandis que son Esprit-Saint souffle encore sur les patinoires de hockey. x
Ta plume est toujours pleine? Vide-la dans nos pages Société! societe@delitfrancais.com CHRONIQUE
Une cure pour le cancer Sofia El Mouderrib | Science ça! l’obésité et l’ostéoporose. Encore plus étonnant, l’influence positif du sport sur une maladie extrêmement invasive et meurtrière, le cancer, est démontrée.
Le lien entre le sport et la santé est indestructible dans nos esprits. Depuis notre plus jeune âge, on ne cesse de nous répéter que le sport, c’est la santé. Nous avons développé une perception très cardio-vasculaire de la chose et, en entendant ce mot, nous imaginons un gros cœur musclé pompant vigoureusement le sang dans nos artères. La prévention des maladies cardiovasculaires grâce au sport a été prouvée il y a longtemps. Encore plus important, depuis les années 90, les scientifiques réussissent à démontrer le lien entre l’activité physique et la prévention de plusieurs autres types de maladies chroniques graves très présentes dans la société occidentale, comme le diabète de type 2,
Prévention Plusieurs études épidémiologiques démontrent que le sport joue un rôle important dans la prévention de différents types de cancers. Le lien est surtout évident dans le cas des cancers du sein, de la prostate, de l’utérus et du cancer du colon, qui sont parmi les plus meurtriers au Canada. Les mécanismes entourant le phénomène ne sont toutefois pas élucidés complètement. Des hypothèses formulées, il ressort que le sport a des propriétés antiinflammatoires et anti-stress sur le corps alors qu’il est démontré que le cancer a une composante inflammatoire et que le stress en serait un facteur notoire. Intervention Une fois atteint d’un cancer ou dans une période de rémission, le sport sous toutes ses formes est tout aussi important. Premièrement, il stimule l’appétit qui est atténué par les différents traitements en oncologie (chimio, radio, etc.). Or, il est établit qu’une alimentation suffisante et
complète durant la maladie augmente les chances de guérison. Deuxièmement, il réduit certains effets secondaires majeurs tels que la constipation et la fatigue générale. Troisièmement, le sport assure une bonne santé mentale en améliorant le temps et la qualité du sommeil et en diminuant le niveau de stress. Ce sont trois enjeux qui pèsent lourd dans la balance de la rémission et c’est pourquoi, dans plusieurs hôpitaux du Québec, on offre désormais de l’activité physique et des sports variés aux malades atteints de cancer. Le tout est encadré par des kinésiologues qui s’assurent de la sécurité et de l’évolution physique et physiologique des patients. Dans une vision plus globale de l’incidence du cancer au Canada, faire du sport est un élément crucial dans la diminution du nombre de cas et de la mortalité. La Société canadienne du cancer estime que si la population faisait de l’exercice régulièrement, se nourrissait bien et cessait de fumer, il y aurait une diminution de 30% des cas. Sachant qu’en ce moment deux personnes sur trois seront atteintes d’un cancer, un mode de vie sain épargnerait la vie de beaucoup de gens. x
En 2011, 75 000 personnes sont décédées des suites d’un cancer au Canada. Alors que les gens craignent une attaque de requin à la plage ou une maladie infectieuse, le cancer et les autres maladies chroniques déciment la population année après année. C’est davantage notre propre mode de vie qu’il faut craindre. Statistique Canada
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ASSEMBLÉE GÉNÉRALE L’assemblée générale annuelle de la Société des publications du Daily (SPD), éditeur du McGill Daily et du Délit, se tiendra
mercredi le 4 avril au Leacock 26 à 18h. Les membres de la SPD sont cordialement invités. La présence des candidats au conseil d’administration est obligatoire. Pour plus d’informations, contactez-nous:
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PRÉSIDENTIELLES FRANÇAISES
Dix candidats pour une présidence Entrevue du Délit avec deux jeunes impliqués dans la campagne du Parti Socialiste (PS) et de l’Union pour un Mouvement Populaire (UMP). Francis L. Racine Le Délit
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ier, la liste officielle des candidats pour les élections à la présidence de la République française a été rendue publique. Dix candidats de la gauche à la droite feront campagne afin d’avoir l’honneur de servir la France pour le quinquennat présidentiel. Nicolas Sarkozy (UMP) cherche un second mandat alors que François Hollande (PS), Marine Le Pen (FN – Front National), François Bayrou (Modem – Mouvement Démocrate), Jean-Luc Mélenchon (Parti du Gauche), Eva Joly (EELV – Europe Écologie Les Verts), Nicolas Dupont-Aignan (DLR – Debout La République), Nathalie Arthaud (Lutte Ouvrière), Philippe Poutou (NPA – Nouveau Parti Anticapitaliste), et Jacques Cheminade (Solidarité et Progrès) cherche un premier mandat. Le premier tour de l’élection présidentielle aura lieu le 22 avril et les deux candidats ayant eu le plus
grand nombre de votes, passeront au deuxième tour qui se tiendra le 6 mai. Les campagnes électorales utilisent énormément de ressources financières et matérielles, mais surtout des ressources humaines, soit les militants. Ce sont ces hommes et ces femmes qui, prenant le temps de militer pour leur parti politique, donnent un côté humain aux élections présidentielles. Olivier Thomas, conseiller national UMP et Antoine Dallet, représentant du Mouvement des Jeunes Socialistes (MJS) pour la région de Bordeaux sont des jeunes impliqués aussi bien dans les campagnes électorales sur le terrain ou sur la toile que dans la rédaction de propositions politiques. Olivier Thomas souligne l’importance de l’implication des jeunes dans la campagne du président-candidat Nicolas Sarkozy: «Localement, dans chaque fédération départementale (l’équivalent de votre découpage en régions),
le responsable des jeunes est chargé d’animer la campagne en collaboration avec le secrétaire (sénior). Plus que jamais pour les élections présidentielles, le maître mot est mobilisation et implication des jeunes». À cet effet, Monsieur Thomas nous a indiqué que, pour l’UMP, la nouveauté est la campagne en ligne ou la «e-campagne». En effet, d’après Olivier Thomas, les jeunes ont pleinement leur place dans ce nouveau domaine. «Au QG de campagne de Nicolas Sarkozy, une équipe d’une vingtaine de jeunes sous l’égide de Nicolas Princen (à peine 28 ans et ancien conseiller internet du Président) pilote la campagne internet du candidat Sarkozy.» Ces jeunes «e-militants», spécialistes de la communication internet et des nouveaux médias, développent le site de campagne: http://www.lafranceforte.fr/. Ils ont refait la désormais célèbre timeline de Nicolas Sarkozy sur Facebook et animent le compte twitter du Président. De plus, monsieur Thomas
se réjouit du renversement en faveur du président-candidat: au dernier sondage, Nicolas Sarkozy recueillerait 28,5% des intentions de vote contre 27% pour le candidat socialiste. Il conclut en mentionnant que depuis le rassemblement du 11 mars dernier à Villepinte, auquel ont assisté plus de 70 000 personnes, les jeunes troupes sont plus que jamais motivées pour faire gagner Nicolas Sarkozy le 6 mai 2012. Du côté du PS, Antoine Dallet est fier des propositions faites par les Jeunes Socialistes pour l’actuelle campagne électorale de François Hollande. Sur les 21 propositions présentées, huit propositions font partie du Pacte pour les jeunes présenté à l’ensemble des candidats socialistes lors des primaires de novembre dernier. Lors de sa nomination, monsieur Hollande s’est engagé à les inclure dans sa plateforme électorale. Les huits engagements du MJS sont à l’image des douze travaux d’Astérix tant la tâche
est grande. Selon les Jeunes Socialistes, il faudrait fusionner les grandes écoles et les universités pour mutualiser leurs moyens et donner la meilleure formation à tous les étudiants; encadrer les loyers pour empêcher les hausses excessives et diminuer le coût du logement sur 5 ans; créer et valoriser l’emploi en augmentant les salaires de 200 euros; refaire de la santé un droit accessible à tous en remboursant les soins dentaires et optiques; introduire une attestation du contrôle d’identité; empêcher le cumul des mandats et garantir un financement transparent des politiques; mettre en place un parcours autonome de la réussite pour tous; et, finalement, établir l’égalité des salaires entre les femmes et les hommes en 5 ans. Monsieur Dallet aussi affirme que les jeunes seront présents dans la campagne à travers l’organisation de nombreux événements comme des cafés-débats sur différents thèmes avec des personnalités du monde politique et leur présence dans tous les meetings nationaux. x
Résultats du référendum d’hiver 2012 Pour plus d’informations, visitez http://ssmu.mcgill.ca/elections/fr/
Arrêt sur image
REPRÉSENTANTS
MOTIONS
Président: Josh Redel
Régime de l’ASEQ: Oui
VP Affaires internes: Michael Szpejda
Représentant des Arts et Sciences au Conseil: Oui
EXÉCUTIFS
VP Affaires externes: Robin Reid-Fraser VP Clubs et services: Allison Cooper VP Affaires universitaires: Haley Dinel VP Finance et opérations: JP Briggs
Présence policière en face du RVC
RÉFÉRENDAIRES
Composition du Conseil: Oui Composition du Conseil judiciaire: Oui Responsabilité procédurale du Conseil judiciaire: Oui Réforme légale du Conseil judiciaire: Oui Frais de CKUT: Non
Sam Reynolds
12 Société
x le délit · le mardi 20 mars 2012 · delitfrancais.com
Arts&Culture
PATRIMOINE
artsculture@delitfrancais.com
La gare d’Haydarpasa en danger Entrevue avec Michael Werbowski, journaliste et coopérant pour Watch 2012 Thomas Simmoneau Le Délit
C
ette histoire se déroule en Turquie et a commencée en 2007 lorsque Michael Werbowski s’est rendu à Istanbul pour couvrir les élections présidentielles. Le hasard a fait qu’il est tombé sous le charme de la gare de Haydarpasa, alors soumise à la privatisation du réseau ferroviaire national lorsque le premier ministre Recep Tayyip Erdogan a été reconduit au pouvoir. Quelques années plus tard, la transformation ambitieuse de la gare en un «centre culturel et commercial» a été annoncée, ce qui laissait sous-entendre un arrêt du trafic ferroviaire pendant au moins deux ans. En plus de cette déclaration floue qui laissait entrevoir une métamorphose totale d’un lieu culturellement et historiquement riche, le ministère de la Privatisation, et non celui de la Culture, est désormais en charge de cette gare inaugurée en 1908 par Atatürk. Monsieur Werbowski se considère donc comme un activiste, ou plus précisément un défenseur du patrimoine mondial. En effet, ses expériences passées, notamment au Casino de la Selva et au barrage au Belize qui présentaient ce même genre de problème, c’est à dire celui de la préservation du patrimoine, lui confèrent une certaine légitimité et expertise dans ce domaine. En
La gare d’Haydarpasa à Istanbul Gracieusité de World Monuments Fund
ce qui concerne la gare d’Haydarpasa, il estime que la privatisation du bâtiment et tout d’abord sa potentielle fermeture serait «unilatérale et tout sauf transparente». Autrement dit, ce serait porter atteinte à l’espace public et au bon fonctionnement d’un «moyen de transport fiable et économiquement soutenable» que de détruire cette bâtisse qu’il compare à un «bijou architectural». Médiatiquement peu couvert, le cas Haydarpasa a pris de l’ampleur lorsqu’un incendie soudain a brûlé le quatrième étage et le toit de l’édifice le 28 novembre 2010. Les causes, encore mal définies, viendraient d’un court-circuit au
sein de la gare. Cependant, l’hypothèse d’un incendie volontaire qui viserait à détruire le bâtiment pour pouvoir ensuite le détruire ne peut être écartée lorsque l’on sait que beaucoup d’argent est en jeu dans cette affaire. Selon monsieur Werbowski, il est primordial de restaurer le toit le plus vite possible pour éviter une dégradation progressive de l’édifice et donner aux autorités un argument valide concernant la construction de tout autre bâtisse à la place d’une gare pleine d’histoire. Tout ceci nous amène donc en 2012, année critique pour monsieur Werbowski et les personnes qui le soutiennent, car
la gare vient être placée sur la «Watchlist» de l’organisation non gouvernementale World Monuments Fund qui s’est intéressée au cas suite à l’incendie de 2010. Leur rôle serait principalement de financer la restauration du toit car il est difficile de faire confiance aux autorités turques dans une histoire potentiellement exposée à des conflits d’intérêts et à la corruption. Cependant, il est certain que la WMF ne pourra imposer quoique ce soit au gouvernement. Il revient au peuple turc de décider du sort de son patrimoine historique. Dans les mois à venir, une conférence sera donc organisée à
Istanbul avec des représentants de la WMF, Michael Werbowski, ses collaborateurs et les autorités turques. Pour monsieur Werbowski, l’idéal serait que le bâtiment soit réparé et qu’il puisse poursuivre sa fonction historique, c’est à dire servir le peuple turc et notamment les nombreux étudiants qui transitent par cette gare. Cela dit, rien n’est moins sûr. Le risque que la gare soit définitivement fermée puis transformée en un «centre commercial et culturel» onéreux et donc visant à faire du profit, reste omniprésent. Sur un plan plus large, Haydarpasa soulève le problème de la préservation de l’espace public et du patrimoine mondial. Ce n’est pas un hasard si des journalistes tels que Michael Werbowski ou une ONG américaine s’intéressent à ce cas. C’est simplement car de tels bijoux architecturaux définissent et donnent une identité à une nation toute entière. Leur disparition entraîne non seulement une externalité négative pour tout un peuple qui ne peut plus en profiter, mais remplit aussi souvent les poches de compagnies cherchant simplement à faire du profit. Haydarpasa est donc un cas parmi tant d’autres mais le négliger serait porter atteinte à ce que nos ancêtres nous ont légué et de manière plus pragmatique, à une gare qui rend quotidiennement service à des millions de personnes telles que vous et moi. x
MUSIQUE
McGill: un état d’esprit
Le jeune artiste Trippy Yang rappe la vie à McGill dans une vidéo qui sera diffusée mercredi prochain. Anabel Cossette-Civitella Le Délit
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00 giga-octets d’enregistrement vidéo, 10 mois de travail, le tout pour produire un remix d’Empire State of Mind de Jay-Z qui donne bonne mine à l’Université McGill. Le concept, utilisé par de nombreuses universités aux États-Unis, consiste à produire une performance musicale censée exprimer toutes les facettes de la vie étudiante. À McGill, l’idée a été reprise par Trippy Yang, un ancien étudiant d’ici. Ce sont plus de 300 collaborateurs qui se sont joints au projet pour danser sur la chanson remixée et interprétée par Trippy Yang et ses musiciens. Les professeurs, les
groupes étudiants, l’administration et les alumni figurent dans plus de 30 lieux différents, sur et en dehors du campus, afin de montrer leur fierté d’appartenir à l’Université. Hector Hernandez, directeur artistique et photographe, est très enthousiaste par rapport au résultat. Sa contribution: la majorité des prises de vue et le montage de la vidéo. Il considère qu’il a vécu une expérience d’équipe hors de l’ordinaire. «Je ne savais pas du tout à quoi m’attendre, mais je n’ai pas été déçu.» Avec seulement un petit budget, le résultat de la vidéo relève le défi initial: montrer l’état d’esprit du campus et exhiber les talents des étudiants. Par exemple, la performance live improvisée d’Urban
x le délit · le mardi 20 mars 2012 · delitfrancais.com
Groove Dance Project a beaucoup impressionné les instigateurs du projet. Dans une atmosphère de manifestations et de protestations sur le campus, la vidéo McGill State of Mind pourrait sembler impertinente puisqu’on n’y retrouve aucune évocation des troubles de l’année. «Ce qu’on entend dans les médias, c’est la polarisation des étudiants et de l’administration sur le campus, donc les futurs étudiants verront autre chose dans notre vidéo», explique Trippy Yang. «C’est vrai que c’était une année chaotique, mais vu le climat, notre musique résonne encore plus fort», continue Trippy. Avec leur vidéo apolitique, l’équipe de McGill State of Mind espère que les gens
Photo: Nicolas Quiazua
passeront par-dessus leurs différends pour s’offrir cinq minutes de pure nostalgie. x
La vidéo McGill State of Mind sera diffusée sur YouTube dès mercredi le 21 mars.
Arts & Culture
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ART VISUEL
L’art conceptuel: un art de contre culture
Malgré une articulation quelque peu décousue, l’exposition Trafic, intéractive et pluridisciplinaire, reste à découvrir jusqu’au 28 avril 2012. Camille Paly Le Délit
U
n mur, un film en noir et blanc, deux hommes nus debout au milieu d’une rivière. Ils se font face et s’observent. La vidéo porte une attention toute particulière au langage de ces deux corps et au lieu dans lequel ils se trouvent et interagissent. Voici les premières images qui s’offrent au spectateur lorsqu’il franchit les portes de l’exposition Trafic proposée par la Galerie Leonard & Bina Ellen. Cette galerie, fondée en 1966 et située sur le campus de l’Université de Concordia, se fait l’agent de l’art contemporain canadien et international. La galerie promeut l’art conceptuel par six expositions majeures annuelles, des conférences d’artistes et de commissaires, des projections de films et des tables rondes. La galerie, dont la ligne directrice est incontestablement l›art contemporain, ne délaisse pas pour autant les pratiques et les questions artistiques du passé. Ces pratiques restent, néanmoins, toujours analysées et présentées dans une perspective moderne. L’exposition Trafic découle d’un parti pris: l›art conceptuel
au Canada 1965-1980, Volet 2. Cette exposition, qui regroupe le travail de plus de soixantedix artistes canadiens et internationaux, cherche à cerner la nature de l’art conceptuel, son idéologie, ses pratiques et ses enjeux. La tentative de définition s’applique aussi à mettre en contexte spécifiquement le développement de ces pratiques conceptuelles au Canada.
«Les artistes s’atta-
chent à produire de l’art en ne tenant plus compte des catégories et des distinctions traditionnelles.»
L’art conceptuel, courant artistique apparu dans les années 60, fut, sans doute, l’un des mouvements les plus transformateurs de la fin du XXe siècle. Le développement de ce courant fut très fortement influencé et marqué par les troubles politiques d’aprèsguerre tels que les mouvements étudiants et féministes. Le mouvement international dynamique, présent aussi bien en Amérique latine qu’en Europe, se caractérise par une forte réaction à la modernisation des institutions étatiques, à la démocratisa-
tion de la culture et au fleurissement d’une culture consumériste et marchande. Un foisonnement d’idées et d’expérimentations soutenu par l’émergence des nouveaux médias de communication et d’information ouvre aux artistes de nouvelles possibilités d’expression et qui permettent aussi l’inclusion des artistes ruraux. L’art conceptuel s’appuie directement sur les nouveaux médias pour redéfinir les composantes sociales et politiques qui s›opposent ainsi à la culture marchande. Les artistes s’attachent à produire de l’art en ne tenant plus compte des catégories et des distinctions traditionnelles. Il n’est plus nécessaire de créer l’œuvre pour qu’elle existe, l’art en tant qu’idée prime, éclipsant la conception de l’art en tant qu’expression individuelle et personnelle de l’artiste. L’objet est donc dématérialisé et perd son autonomie ainsi que son authenticité. Un second volet qui se concentre donc sur les pratiques artistiques conceptuelles de Vancouver, Calgary, Halifax et Winnipeg. Le premier volet, présenté en début d’année, explorait celles de Montréal et de Toronto. Un découpage géographique de lexposition en deux volets
pour ainsi mieux appréhender le contexte dans lequel ces pratiques se sont développées. Trafic est l’une des premières expositions majeures à explorer l’influence et
la diversité de cet art au Canada et à insister sur l’effervescence créatrice des échanges entre les centres urbains et les milieux ruraux. x
Bridine Scrub ( For General Surgey) Theodore Wan, 1977 Collection de la Vancouver Art Gallery
CINÉMA
L’artisto, le banlieusard et la France Intouchables, le film-phénomène d’Éric Toledano et Olivier Nakache, met du baume au cœur. Marie de Barthès Fanny Devaux Le Délit
I
&
ntouchables, le film-phénomène sorti en France en novembre 2011, présente une fraternité inattendue entre Philippe, un tétraplégique aristocrate et Driss, un Noir de la banlieue alternant prison et chômage. Le duo d’acteurs fonctionne à merveille grâce à Omar Sy, l’acteur du moment sur le petit écran et qui a décroché le César du meilleur acteur pour son interprétation de Driss, et François Cluzet, dont la réputation n’est plus à faire. Leur chimie s’opère sur une bande-son originale du pianiste italien Ludovico Einaudi et quelques tubes de Earth, Wind and Fire. Ce long-métrage revigorant qui bouscule les précon-
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Arts & Culture
ceptions n’est pas une simple comédie. Outre le sujet de la tétraplégie, il aborde de façon décomplexée des problématiques sociales telles que l’intégration des étrangers et le quotidien dans les quartiers défavorisés. Entre courses-poursuites, scènes de drague et sauts en parapente, les réalisateurs Olivier Nakache et Eric Toledano ont atteint un mélange innovateur de rire, émotion et action. En effet, ce film fait lumière sur des vérités difficiles, mais n’enferment pas les spectateurs dans la déprime. Le but n’est pas de pleurnicher sur la souffrance de Philippe mais au contraire, de retrouver une lueur d’espoir, dans ce temps assombri par la crise socio-économique. Comme avait confié François Cluzet au Délit du 13 mars der-
nier: «Normalement les comédies sont un peu superficielles, mais là on a une comédie profonde.» À croire que le public d’aujourd’hui ressent un besoin vital de se changer les idées, et qu’il est possible de le faire à travers une quête de sens et d’énergie! Dans ce contexte tendu de campagnes présidentielles dans lesquelles les débats sur l’identité nationale font rage et où le parti nationaliste stigmatise les divisions sociales, Intouchables rejoint avec humour les extrêmes fâchés de la société française. Dans quel autre film entendrait ton une «racaille» dire à l’aristo: «Vous allez pas acheter cette croûte à trente mille euros. Eh, le mec il a saigné du nez sur un fond blanc et il demande trente mille euros!». En enterrant la hache de guerre entre l’aristocrate et le
banlieusard, Intouchables fédère des publics différents. Avec l’invitation au débat qu’il crée, c’est sans surprise que presque un tiers des Français de la métropole se soient déplacés pour la projection. De plus, la comédie touche des problèmes qui dépassent
l’Hexagone: le manque de solidarité et d’altérité. C’est ce qui fait le succès de son exportation, comme le montre l’exemple allemand et ses quelque 6,5 millions d’entrées Dès le 13 avril, le duo idéal débarque à Montréal: joignez-vous à la ruée! x
Photo: Alliance film media
x le délit · le mardi 20 mars 2012 · delitfrancais.com
OPÉRA
Sur les genoux des dieux Regard sur L’incorazione di Poppea, présentée cette semaine à la salle Pollack. Miruna Tarcau Le Délit
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our ceux qui n’auraient pas gardé un bon souvenir de Don Giovanni déguisé en vampire, la mise en scène de L’incoronazione di Poppea étonne agréablement par sa capacité à représenter ce chef-d’œuvre dans un esprit fidèle à la Venise de Monteverdi. Le travail remarquable de Patrick Hansen démontre en effet qu’une conception traditionnelle ne dénue pas pour autant le spectacle de touches personnelles, et leur subtilité n’enlève rien à l’audace d’une référence à un épisode de Star Trek, par exemple. Ainsi, les mouvements des dieux sur scène s’inspirent des extraterrestres de Wink of an Eye (l’épisode en question), de sorte que les déesses Fortune et Vertu peuvent observer les drames des mortels à leur aise, invisibles, pendant que ces derniers occupent sans s’en douter un espace-temps différent. Mettant à part l’explication pseudo-scientifique, l’idée que le monde est gouverné par des forces irration-
nelles, dont les hommes ne seraient que des pantins, n’a certes rien de bien innovateur, comme en témoigne L’Iliade dans laquelle les héros remettent constamment leur sort «sur les genoux des dieux». Mais il reste que l’intervention continuelle de divinités infantiles, égocentriques et capricieuses, ajoute une touche presque surréaliste à une action qui demeure assez conventionnelle malgré le triomphe «amoral» des méchants de l’histoire. Chaque personnage de la pièce peut en conséquence être associé à une divinité sur les genoux de laquelle il place son sort, faute de pouvoir se rendre maître de soimême. Ainsi, la Vertu condamne son cher philosophe, Sénèque, au suicide dans un univers dépravé sur lequel elle n’exerce plus aucun contrôle. Et ce, pendant que la Fortune exile Octavie pour n’avoir pas su se mesurer aux intrigues de la cour. Tout ceci alors que l’Amour récompense l’ambition démesurée de Poppée en l’élevant au rang de déesse après avoir fait d’elle l’impératrice
de Rome. La scène 11 de l’acte I résume ironiquement cette conception du monde, dans la mesure où Poppée se déresponsabilise entièrement de ses actes vis-à-vis d’Othon, son amant délaissé. Elle lui explique que son malheur lui vient du fait qu’il n’a pas su attirer sur lui les faveurs de la déesse Fortune. La disposition du décor ellemême révèle brillamment cette vision profondément hiérarchique et inégalitaire du monde, commune aux empires romain et vénitien. Trois espaces principaux occupent la scène, divisée en plateaux sur lesquels chaque pièce de la villa ou du palais royal est disposée à des hauteurs différentes. À l’avant-scène, une piscine se présente d’abord comme un lieu de rencontres privilégié où des scènes de séduction, de meurtre ou de délibérations politiques dominent l’espace public. Plus haut, un lit représente l’enjeu principal du spectacle, à mi-chemin entre l’espace public dominé par les impulsions érotiques de Néron et, tout en-haut, par un autel
d’où les déesses observent les jeux de leurs pantins, et se disputent indirectement le trône de l’empire. Soulignons la qualité de l’interprétation (où des étudiants de chant de premier cycle avaient l’occasion de mêler leurs voix à celles des étudiants de deuxième cycle), l’originalité du livret de Busenello (auquel on a reproché un éloge du libertinisme qui a contribué à transformer l’opéra en divertissement
bourgeois), ainsi que l’extraordinaire qualité de la musique, dont la paternité est d’ailleurs disputée par les experts de musique ancienne. Somme toute, il s’agit là d’une opportunité excellente de découvrir un bijou de l’opéra baroque dans son intégralité, un défi que la troupe de l’École Schulich peut se targuer d’avoir remporté avec brio –malgré quelques longueurs difficiles à éviter dans un spectacle de trois heures et demie. x
Photo: Brent Calis
CHRONIQUE BD
Plût au ciel que le lecteur Annick Lavogiez | Déambullations
«Enhardi et devenu momentanément féroce comme ce qu’il lit, trouve, sans se désorienter, son chemin abrupt et sauvage, à travers les marécages désolés de ces pages sombres et pleines de poison; car, à moins qu’il n’apporte dans sa lecture une logique rigoureuse et une tension d’esprit égale au moins à sa défiance, les émanations mortelles de ce livre imbiberont son âme comme l’eau le sucre.» (Les Chants de Maldoror, Lautréamont) C’est avec cet avertissement que les Éditions Futuropolis ont choisi d’introduire, sur la quatrième de couverture, le récit La Chambre de Lautréamont. La
couverture prétend que ce roman graphique serait le premier à avoir existé, publié pour la première fois en 1874. La préface et la post-face annoncent quant à elles que cet album d’Édith (dessins) et Corcal (récit) cherchera à brouiller les frontières entre réalité et fiction dans le Paris des poètes du XIXe. Le mystère semble complet alors que l’on appréhende un peu, à première vue, la mise en scène, de surcroît en bande dessinée, de personnages historiques connus. Mais quelle agréable surprise de découvrir, dès les premières pages de cet incroyable récit, qu’Édith et Corcal ont habilement su déjouer tous les clichés et stéréotypes appréhendés pour nous offrir un petit chef d’oeuvre. Adapté de l’œuvre des personnages d’Auguste Bretagne et Eugène de Turcoing-Startrec, cet album met en scène Auguste Bretagne, feuilletoniste à la «Gazette de Paris», un personnage au manque d’ambition littéraire flagrant qui côtoie les cercles littéraires parisiens les plus intéressants. Ce bonhomme un peu banal qui écrit des récits fantastiques dans sa mansarde fait triste figure au milieu des écrivains et
x le délit · le mardi 20 mars 2012 · delitfrancais.com
poètes qu’il fréquente: Rimbaud, Verlaine, les frères Cros... Ceuxci, joyeux farceurs, lui envoient chaque lundi des têtes d’humains en cire, dans de «charmants» colis anonymes, afin de se moquer de son échec littéraire et de sa fascination pour des objets plus ou moins morbides. Car Auguste est passionné par l’étrange et vit dans une espèce de capharnaüm de hiboux empaillés, squelettes divers et autres corps conservés dans du formol. Plus qu’une simple chambre étrangement habitée, ce lieu est en fait extraordinaire. Isidore Ducasse, comte de Lautréamont, y a vécu avant d’y mourir à l’âge de 24 ans. Il y a laissé quelques traces, cachées çà et là. Auguste va découvrir ces dernières en compagnie notamment d’Émily, une jolie poétesse dont il est amoureux. La mise en dessin de la découverte des Chants de Maldoror, le juste équilibre entre un texte d’une grande qualité et des illustrations fascinantes, et le ton endeuillé, nostalgique et admiratif du récit et des coups de crayons font de La Chambre de Lautréamont un petit bijou. En tant que littéraire passionné, on y retrouve ou découvre
avec plaisir l’oeuvre tourmentée et passionnante de Lautréamont que les dessins de Corcal servent habilement. En tant qu’admirateur de bande dessinée, on se plaît à se perdre dans les planches d’une grande beauté. Pour rendre hommage au talent de Corcal et Édith, il faudrait également mentionner la scène psychédélique, l’ambiance nocturne, les couleurs poétiques, le scénario astucieux, etc. Notons que ce récit n’est pas une oeuvre sur Lautréamont, mais plutôt une exploration de la fascination qu’excerce le génie sur ses lecteurs. Vous n’en apprendrez pas beaucoup plus qu’à l’école sur
le poète, mais ce qui est sûr c’est que vous ressortirez de ce récit en ayant envie de lire et relire les écrits du fameux comte. Littéraires et curieux que vous êtes, vous savez bien qu’il est de ces livres qui donnent l’impression qu’on avait peut-être finalement rien lu de vraiment bien avant. Que peut-être on s’était laissé trop emballer par des récits moyens, des dessins brouillons, du déjà-lu. L’excellent La Chambre de Lautréamont pourrait bien vous faire reconsidérer tout ce que vous avez vu, et c’est à ce titre que sa lecture vous est fortement recommandée. x
Gracieuseté de FUTUROPOLIS
Arts & Culture
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