Le Délit

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delitfrancais.com Publié par la société des publications du Daily, une association étudiante de l’Université McGill

Le nouveau visage de l’administration p 5,12 Le mardi 12 mars 2013 | Volume 102 Numéro 18

Suzie in the sky with diamonds depuis 1977


Éditorial rec@delitfrancais.com

«Oui» à la SACOMSS Conseil de Rédaction Le Délit

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e Délit donne son appui inconditionnel à un vote du «oui» lors du référendum de renouvellement des frais afférents du Centre d’Agressions Sexuelles de l'Association étudiante de l’Université McGill (SACOMSS). L’Université McGill force tous les services de l’AÉUM à tenir un référendum afin de renouveler leurs frais afférents. Les frais de 75 cents par étudiant(e) par semestre pour SACOMSS sont donc passés au vote tous les trois ans; le vote se tiendra cette année durant la période référendaire d’hiver, du 18 au 22 mars. Fondé en 1991, le centre contre l'agression sexuelle, entièrement géré par des étudiant(e)s, est le premier en son genre au Canada et en Amérique du Nord. SACOMSS offre depuis un service essentiel aux étudiant(e)s de l’Université McGill, et est dirigé par des bénévoles engagé(e)s à soutenir les survivants d'agression sexuelle et leurs allié(e)s «à travers un appui direct, la défense et la sensibilisation». SACOMSS propose un service d’écoute sans jugement, confidentiel, par téléphone (514-3988500) - disponible 12 heures par jour - ou en personne, ainsi que des groupes de soutien. De plus, SACOMSS travaille avec l'administration de McGill pour améliorer la procédure de plainte de harcèlement et accompagne les membres de la communauté mcgilloise lors du dépôt d'une plainte au niveau universitaire. Enfin, l’organisation fournit un centre d'aide à la communauté, un service d'accompagne-

ment, un local accessible aux membres de différentes communautés et différentes identifications ouvert 6 heures par jour, ainsi que des ateliers de sensibilisation dans les écoles secondaires au sujet des questions entourant les agressions sexuelles. Tous ces services, requérant plus de 1500 heures de bénévolat par session, sont offerts au grand public. Il peut être difficile pour les survivant(e)s d’aller de l’avant sans l’accompagnement de services qualifiés et solidaires. Les services offerts par SACOMSS sont tout à fait uniques à McGill. Le Centre d’Agressions Sexuelles de l’Université McGill n'offre pas des services d'écoute active ou des programmes de soutien, malgré avoir promis la création d’un tel programme, et le service de santé mentale de McGill est quant à lui toujours débordé. Le risque de ne plus recevoir de soutien financier de la part des étudiant(e)s met en péril l’institution et de ce fait le droit à l’écoute et au soutien des survivant(e)s d'agression sexuelle à McGill et à Montréal. De facto, un tel groupe ne devrait pas voir son existence mise en péril alors qu’il fait partie des services essentiels au maintien des droits de la personne sur le campus. Alors que l'organisation dépend de frais afférents étudiants, le fait de devoir faire face à des référendums dans lesquels les étudiant(e)s votent pour continuer ou non de financer le soutien des survivant(e)s d’agressions et de harcèlement sexuel met en péril les services de SACOMSS. Sans une meilleure option pour le moment, nous appelons les étudiant(e)s de McGill à voter «oui» lors du référendum de SACOMSS. x

Volume 102 Numéro 18

Le seul journal francophone de l’Université McGill rédaction 3480 rue McTavish, bureau B•24 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : +1 514 398-6784 Télécopieur : +1 514 398-8318 Rédacteur en chef rec@delitfrancais.com Nicolas Quiazua Actualités actualites@delitfrancais.com Chef de section Mathilde Michaud Secrétaire de rédaction Théo Bourgery Arts&Culture articlesculture@delitfrancais.com Chef de section Anselme Le Texier Secrétaire de rédaction Anne Pouzargues Société societe@delitfrancais.com Fanny Devaux Coordonnateur de la production production@delitfrancais.com Samuel Sigere Coordonnatrice visuel visuel@delitfrancais.com Camille Chabrol Infographie infographie@delitfrancais.com Vacant Coordonnatrices de la correction correction@delitfrancais.com Myriam Lahmidi Claire Launay Coordonnateur Web web@delitfrancais.com Mathieu Ménard Coordonnateur des réseaux sociaux réso@delitfrancais.com Louis Soulard Collaboration Lindsay P. Cameron, Margot Fortin, Léa Gruyelle, Laurianne Giroux, Thomas Simonneau Couverture Camille Chabrol bureau publicitaire 3480 rue McTavish, bureau B•26 Montréal (Québec) H3A 1X9 Téléphone : +1 514 398-6790 Télécopieur : +1 514 398-8318 ads@dailypublications.org Publicité et direction générale Boris Shedov Photocomposition Mathieu Ménard et Geneviève Robert The McGill Daily coordinating@mcgilldaily.com Queen Arsem-O’Malley Conseil d’administration de la Société des publications du Daily (SPD) Nicolas Quiazua, Sheehan Moore, Erin Hudson, Mike Lee-Murphy, Matthew Milne, Joan Moses, Farid Muttalib, Shannon Pauls, Boris Shedov, Queen ArsemO’Malley, Rebecca Katzman, Anselme Le Texier

L’usage du masculin dans les pages du Délit vise à alléger le texte et ne se veut nullement discriminatoire.

Les opinions exprimées dans ces pages ne reflètent pas nécessairement celles de l’Université McGill.

Le Délit (ISSN 1192-4609) est publié la plupart des mardis par la Société des publications du Daily (SPD). Il encourage la reproduction de ses articles originaux à condition d’en mentionner la source (sauf dans le cas d’articles et d’illustrations dont les droits avant été auparavent réservés, incluant les articles de la CUP). L’équipe du Délit n’endosse pas nécessairement les produits dont la publicité paraît dans ce journal.Imprimé sur du papier recyclé format tabloïde par Imprimeries Transcontinental Transmag, Anjou (Québec). Le Délit est membre fondateur de la Canadian University Press (CUP) et du Carrefour international de la presse universitaire francophone (CIPUF).

2 Éditorial

x le délit · le mardi 18 mars 2013· delitfrancais.com


Actualités

actualites@delitfrancais.com

ASSEMBLÉE GÉNÉRALE L’assemblée générale annuelle de la Société des publications du Daily (SPD), éditeur du McGill Daily et du Délit, se tiendra

mercredi le 4 avril au Leacock 26 à 18h. Les membres de la SPD sont cordialement invités. La présence des candidats au conseil d’administration est obligatoire.

Pour plus d’informations, contactez-nous:

chair@dailypublications.org

Accréditation de PSA Le scrutin s’ouvre pour la semaine. Théo Bourgery Le Délit

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undi 11 mars 2013 a marqué le début de la période des élections pour définir le sort de l’Association des étudiants en Philosophie (Philosophy Student Association, PSA) quant à une possible accréditation. Une telle décision, première dans son genre, permettrait à l’association de devenir indépendante de l’université au niveau financier et légal. De plus, tout comme l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM), l’Association Étudiante de la Faculté des Arts (AÉFA) et l’Association des Étudiants de Cycles Supérieurs de l’Université McGill (AÉCSUM), la PSA se verrait alors capable de «négocier son propre protocole d’accord» (Memoranda of Agreement, MOA) et ainsi de «s’affilier avec de larges coalitions ou fédérations [d’étudiants] à travers le Québec», selon le site web créé pour l’occasion. Un tel projet ne date pas d’hier. Déjà Jonathan Wald, président de l’association, indiquait au Délit le 18 septembre dernier qu’il pensait «incorporer [les] finances [de la PSA] afin de devenir une association indépendante» (Centralisation à l’AÉFA, Volume 101, numéro 2). La décision s’était ensuite officialisée le 2 octobre 2012, car comme Wald l’expliquait : «il y a un désir général d’avoir plus d’autonomie, de contrôler nos frais» (Autonomie pour la PSA, Volume 101, numéro 4). En vertu de la Partie III de la Loi sur les Compagnies du Québec (C-38), la PSA a franchi le premier pas vers l’accréditation en s’incorporant à McGill le 12 février, lors d’un vote unanime. En entrevue avec le Délit, Devon LaBuik, président de l’AÉFA, annonçait qu’ «il ne savai[t] pas que des démarches avaient été entreprises» (Une première association départementale à McGill s’incorpore, Volume 101, numéro 16). Appelé le lundi 11 mars, il a refusé de commenter, indiquant qu’en ce moment, «l’AÉFA rassemble toutes les informations». Il est important de rappeler que le projet de la PSA a été rendu public en octobre 2012. Positions divergentes dans l’administration L’administration semble divisée sur le sujet. D’un côté, Morton J. Mendelson, Vice-principal adjoint à la vie étudiante, avait, lors de la campagne d’incorporation, fait sentir son désaccord en expliquant que «permettre aux associations départementales de s’incorporer n’est ni une option ni une solution». Alors que la période de vote s’entame, le Vice-principal exprime maintenant son refus de reconnaître la PSA comme une association accréditée, si une majorité de «oui» venait à passer. Il exx le délit · le mardi 12 mars 2012 · delitfrancais.com

plique dans un courriel envoyé au Délit que des protocoles d’accord ne peuvent être signés qu’avec des associations au niveau universitaire et facultaire. Il n’est pas question pour lui de signer un protocole avec une association départementale, citant la section 2.1 de la Loi sur l’accréditation et le financement des associations d’élèves et d’étudiants : «les étudiants en Licence, […] Master et Doctorats […] sont des groupes étudiants distincts», et seule «une association par groupe d’étudiants peut être accréditée». Au courant de cette prise de position, Wald a indiqué au Délit que «les commentaires du professeur Mendelson ne changeront pas les actions entreprises par la PSA». Il assure avoir discuté du problème avec le Ministère de l’Éducation, qui a confirmé que «les bacheliers de philosophie […] constituent un groupe d’étudiants indépendant, en vertu de l’Acte sur l’Accréditation [cité plus haut]». En effet, il est noté dans le paragraphe 2, sousparagraphe 6, que «[peuvent être accrédités] dans les établissements d’enseignement de niveau universitaire, chaque faculté, chaque école, chaque département». Défendant une autre position au sein de l’administration, André Costopoulos, Doyen à la vie étudiante de l’Université McGill, accueille avec ouverture l’éventuel futur groupe étudiant : «c’est une bonne chose que les étudiants décident de s’organiser» et de devenir indépendants, «il y aura plus de voix et d’opinions sur le campus». Il s’est aussi dit ouvert à des discussions avec une PSA accréditée si elle le souhaitait, insistant cependant qu’il n’aura aucun pouvoir de décision. «Heureusement», lance-t-il, «je préfère m’attaquer aux problèmes plutôt qu’à la paperasse». Le vote commence Wald a expliqué, lors d’une entrevue téléphonique avec Le Délit cet après-midi que «tout marchait comme prévu»: alors que le scrutin vient de s’ouvrir, plusieurs étudiants se sont déjà présentés dans le bâtiment Leacock, salle 931, pour voter et discuter avec les exécutifs autour de café et de nourriture gratuits. Selon lui, la publicité a été une réussite et «beaucoup d’étudiants sont au courant du vote». Les résultats, qui seront annoncés vendredi après la fin du scrutin à 17 heures, ne seront officialisés et validés qu’une fois la vérification du Gouvernement du Québec. Une majorité de «oui» sera nécessaire, avec quorum minimal de 25% des «inscrits dans l’établissement d’enseignement concerné», soit 92 des 365 membres, selon le dernier recensement. x

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ça fait mal. ǀĞĐ ƵŶ ƌĞŵďŽƵƌƐĞŵĞŶƚ ŵŽLJĞŶ ĂƵdž ĠƚƵĚŝĂŶƚƐ ĚĞ ϭ ϬϬϬഭΨ͕ ů͛ŝŵƉƀƚ ĨĂŝƚ ŵŽŝŶƐ ŵĂů͘*

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Actualités

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CAMPUS

Une AG de chaises vides Malgré une forte campagne de publicité, les chaises restent vides à l’AÉUM. Théo Bourgery Le Délit

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algré les mesures prises par les exécutants de l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUM), peu d’étudiants se sont présentés à la porte de la salle de bal du bâtiment Shatner, mercredi le 27 février 2013, pour l’Assemblée Générale (AG) de l’AÉUM. Elle avait été annoncée il y a plusieurs semaines, et avait pour but d’avoir un regard nouveau sur le rôle et les buts de l’Association en invitant les étudiants à participer. Josh Redel, président de l’Association étudiante, avait annoncé lors du Conseil législatif du 21 février dernier son objectif de faire une campagne de pub hors normes. En tout, 85 groupes ont été créés sur les réseaux sociaux, tandis que des représentants de l’Association ont passé en tout 89 heures dans les salles de classe, à attiser l’intérêt des élèves. De plus, l’AG pouvait être suivi en direct sur le site de l’AÉUM; un forum de discussion avait aussi été créé pour l’occasion. Redel, en entrevue avec Le Délit, s’est donc dit «déçu» que si peu de monde se soit présenté, expliquant avec lassitude que, de ce fait, le quorum n’avait pas été atteint. De plus, les quelques 75 personnes présentes étaient la plupart soit directement impliqués dans l’AÉUM, soit des journalistes. En revanche, Redel a insisté sur la réus-

site des ateliers interactifs proposés aux étudiants avant l’AG: «Il y a eu peu de monde, mais cela a permis que des discussions informelles et intéressantes soient entamées». Il considère avoir reçu une bonne perspective de ce que les étudiants attendaient de l’AÉUM, et plus particulièrement du bâtiment Shatner. En effet, beaucoup de commentaires ont été faits quant à l’usage de l’espace et des locaux, commentaires «à retenir», affirme-t-il. L’AG a débuté, trois-quarts d’heure en retard, eavec la présentation des six exécutifs de l’Association. Haley Dinel, vice-président aux Affaires Universitaires à l’AÉUM, s’est penchée sur la question d’un nouveau cursus, qui devrait voir le jour au retour des vacances d’été: «Études des indigènes Nord-Américains». Elle s’est aussi exprimée sur un problème récurrent à McGill: l’environnement de travail. Quelles sont les meilleures conditions de travail; et sont-elles accessibles sur le campus? Enfin, en tant que représentante des étudiants de premier cycle au Conseil des gouverneurs, elle a confirmé qu’une nouvelle principale avait été élue ce jour-là. On connaît aujourd’hui son identité. Puis est venu le temps des motions et des votes. L’AÉUM a, cette session, modernisé son mode de scrutin en distribuant à chaque votant une télécommande, ce qui évitait le comptage de votes à main levée. Après une tribune silencieuse lors des

Crédit photo: Camille Chabrol

premiers votes, concernant en particulier le soutien officiel de l’AÉUM au mouvement indigène «Idle No More», elle s’est ensuite animée alors qu’était présentée une motion sur les minéraux jugés conflictuels. Les parrains appelaient le Financial Ethics Research Committee (FERC) à s’assurer qu’aucun minéral sujet au trafic dans les pays d’Afrique Centrale, telle que la République Démocratique du Congo, ne soit utilisé lors de recherches à McGill. Après un rapide débat, la motion est passée avec une grande majorité. En dernier lieu, une motion de dernière minute sur les problèmes de frais «illégaux»

demandés par McGill à certains étudiants a été présentée. En effet, certains cours requièrent des frais supplémentaires pour y assister – par exemple pour permettre l’accès aux salles informatiques pour les étudiants en sciences. Tous les membres de l’AG ont accepté la motion, après plusieurs changements pour clarifier les concepts et idées. L’AG s’est close une heure et demie plus tard, avec une salle que les élèves avaient déjà à moitié désertée. Redel a invité les participants toujours présents dans la salle à se retrouver pour un nouvel atelier sur l’usage de l’espace dans le bâtiment Shatner. Peu se sont présentés. x

Discussion sur le désinvestissement La communauté invitée à discuter Camille Chabrol Le Délit

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e mercredi 27 février, des membres de l’organisme Divest McGill ont invité les étudiants de l’Université McGill à venir discuter des projets du groupe. L’organisme étudiant a pour but d’encourager l’université à mettre fin à tout investissement lié à l’industrie d’exploitation de combustibles fossiles, notamment dans les compagnies qui sont impliquées dans l’extraction des sables bitumineux et dans le Plan Nord. L’existence de mouvements contre les combustibles fossiles marque les campus universitaires de l’Amérique du Nord depuis octobre 2012. Aujourd’hui, 250 universités en Amérique du Nord recensent un organisme de ce genre sur leurs cam-

pus. Leurs travaux ne sont pas sans succès: trois universités aux États-Unis ont déjà mis fin à des recherches et, selon Chris Bangs, membre de Divest McGill, «plusieurs universités se sont dites prêtes à faire le premier pas si elles voient que d’autres se lancent». Divest McGill voit l’arrêt des recherches de ce type à McGill comme étant important, non seulement parce qu’il souhaite que l’université ne soit pas liéee à des désastres environnementaux, mais aussi pour l’exemple qui serait donné aux autres institutions canadiennes. Divest McGill a commencé ses activités sur le campus en octobre 2012. En ce moment, leur campagne se fait par le biais de l’administration: en effet, deux pétitions ont été soumises, le 5 février dernier, à Stephen Strople, Secrétaire Général de l’université. Strople les a ensuite faites parvenir au

Comité chargé de formuler des recommandations en matière de responsabilité sociale (CAMSR). Une des pétitions demande l’arrêt immédiat de toute recherche liée aux compagnies de combustibles fossiles; la deuxième se concentre sur le travail de McGill quant au Plan Nord. Chaque pétition a réuni plus de mille signatures. Chris Bangs raconte au Délit que la réaction des membres de la communauté mcgilloise envers la pétition a été «extrêmement positive». Divest McGill attend toujours une réponse de CAMSR et continue à organiser des campagnes de sensibilisation sur le campus. Parmi les étudiants présents ce mercredi, un étudiant en génie minier, souhaitant rester anonyme, a raconté que beaucoup de ses connaissances en génie minier voient les compagnies de combustibles fossiles com-

me de bons employeurs qui pourraient leur offrir des salaires élevés une fois diplômés. «Nos cours ignorent les enjeux environnementaux qui pourraient être liés à nos futurs emplois», explique-t-il. Étonnamment, beaucoup d’étudiants en génie semblent enthousiastes devant le projet Divest McGill. «Mes amis ingénieurs s’enthousiasment pour les projets innovateurs proposés. De plus, encourager des nouvelles formes d’énergie propre donne l’opportunité aux ingénieurs de faire preuve d’innovation». Pourtant les opinions des membres de Divest divergent au sujet de possibles investissements dans des énergies plus propres. Lily Shwartzbaum, membre de Divest McGill, a expliqué au Délit que de tels «alliés» permettraient au groupe «de forger de nouveaux contacts avec la Faculté de Génie». x

BRÈVE

Négociations difficiles pour le bail du Shatner

Nicolas Quiazua Le Délit

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ans une lettre ouverte, les six exécutants de l’Association Étudiante de l’Université McGill dénoncent un processus «long et ardu» dans les négociations du bail du bâtiment Shatner avec McGill. Les négociations sont en cours depuis maintenant près de trois ans sans débouché en vue. Avec la lettre rendue publique lundi soir, l’exécutif 2012-2013 de l’AÉUM visait à «réaffirmer ses buts» en rapport avec le bâtiment Shatner dans l’optique d’aller de l’avant dans les négotiations.

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L’éxécutif rappelle que le bâtiment a été construit avec les frais étudiants de 1963 à 1965 avec «pour seul but de fournir l’espace aux clubs étudiants et aux activités de l’Association». De fait, les frais étudiants «ne devraient pas être consacrés, en majorité à payer pour le bâtiment». Le bâtiment, «symbole de vie étudiante», abrite plus de 300 clubs, 21 services et 12 groupes indépendants et, de telle façon, attirerait «les étudiants inspirés et motivés à fréquenter cette institution», tout en «formant les leaders qui feront des gradués de McGill une telle force inspirante». La lettre demande «que McGill reconnaisse [la valeur d’une vie étudiante] de

façon plus tangible que des accords philosophiques». L’exécutif dénonce par le fait même que les détails des négociations soient gardés confidentiels malgré le fait que le résultat pourrait être d’un grand impact sur le corps étudiant en imposant une hausse importante des frais de base de l’AÉUM: «Il n’est guère approprié pour six exécutants ou même pour un Conseil législatif plus représentatif de prendre de telles décisions, avec un tel impact financier pour le compte de 22.000 étudiants avec de tels obstacles à la consultation». De son côté, le Vice principal adjoint Morton J. Mendelson affirme par

courriel que l’université trouve elle aussi les négociations «frustrantes». Le Vice principal adjoint se tourne vers les coût élevés de l’entretient, les coupures dans les budgets universitaires, l’incertitude face aux frais de scolarité pour expliquer que «McGill ne peut plus se permettre de soutenir le [bâtiment] de la même façon qu’elle l’a fait dans le passé». Mendelson conclut en affirmant que McGill pensait que les négociations allaient de bon train cette année, mais récemment le tout semble ralentir et «prendre place dans un contexte radicalement différent par rapport à celui d’il y a quelques mois». x

x le délit · le mardi 12 mars 2013 · delitfrancais.com


CAMPUS

Une nouvelle Principale Suzanne Fortier, une femme bilingue à la tête de l’Université Nicolas Quiazua Le Délit

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e Conseil des gouverneurs de McGill a choisi Mme Suzanne Fortier en tant que 17e principale et rectrice de l’Université McGill. Mme Fortier assumera son rôle à partir de septembre 2013 et pour un terme de cinq ans. Suzanne Fortier était présidente du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) depuis janvier 2006 et son mandat a été renouvelé en novembre 2010 pour une période de cinq ans. En entrevue avec Le Délit, MichèleJamali Paquette, directrice des communications au ministère d’État (Sciences et Technologie), explique que Mme Fortier a quitté, depuis hier, ses fonctions au CRSNG. Fortier est diplômée de l’Université McGill, où elle a obtenu un baccalauréat en sciences et un doctorat. Elle a également servi en tant que doyenne adjointe des études supérieures et de la recherche, vice-rectrice à la recherche et vice-rectrice à l’enseignement à l’Université Queen’s, où elle a également été professeure de chimie. Le Conseil a pris une décision unanime, suite à la recommandation formulée par le comité consultatif auprès du président du Conseil. Le comité consultatif était formé d’étudiants, de membres de l’administration et du personnel de soutien, des professeurs et des anciens élèves. Haley Dinel, vice-président aux Affaires Universitaires à l’AÉUM et membre du comité consultatif, se dit contente de la décision. «Elle est la meilleure sur tous les points; que ce soit par rapport au Québec, à la recherche ou aux relations avec les étudiants», affirme Dinel, en anglais, lors d’une entrevue avec Le Délit. Les coûts liés à la recherche de la nouvelle rectrice de McGill s’élevaient aux alentours de 180 000 dollars en septembre 2012. En entrevue avec Le Délit, Kip Cobbett n’était pas en mesure de donner un estimé de la somme totale dépensée à ce jour, mais tient à rappeler, en anglais, qu’il est «important de comprendre que nous cherchions nos candidats à l’échelle internationale». En

effet, McGill utilisait les services du cabinet de recrutement international Odgers Berndtson. M. Cobbett ne peut toutefois pas confirmer que la candidature de Mme Fortier ait été suggérée par le cabinet. La principale depuis 2003, Heather Munroe-Blum, terminera son second mandat le 30 juin 2013. Un principal par intérim sera nommé pour assurer la direction de juillet à septembre. Munroe-Blum ne quitterait pas nécessairement l’Université McGill une fois son mandat terminé. Dans une entrevue avec les médias étudiants, l’année dernière, elle mentionnait ne pas écarter un retour à l’enseignement de la médecine au sein de l’Université McGill. Le Délit vous présente un premier entretien avec la future rectrice sur les enjeux du moment: Le Délit (LD): Sachant que les cours de français langue seconde sont très contingentés à McGill, que seulement 17,5% de la population de McGill est francophone, que 80% des étudiants internationaux quittent le Québec une fois leurs études terminées… Que comptez-vous faire pour rendre le français plus accessible à McGill et McGill plus accessible aux francophones? Suzanne Fortier (SF): Écoutez, moi, c’est un de mes objectifs: que la population en général au Québec, que ce soit les anglophones, francophones ou allophones, voient en McGill une institution qui est la leur, qu’ils ont bâti eux-mêmes, un endroit qui est là pour les accueillir. Il va falloir faire du travail dans les deux sens [...]. [Cette question] me touche profondément car je fais partie de la population francophone qui ne parlait pas un mot d’anglais et est allée à McGill et a eu toutes sortes de portes qui se sont ouvertes à cause de cette expérience là. [...] LD: Plus concrètement; quelles mesures avez vous en tête? SF: J’en ai plusieurs [...] la première chose

Caricature par Romain Hainaut

à faire pour moi c’est d’apprendre et d’écouter la communauté étudiante de McGill: «Quelles sont les idées, quels sont les objectifs?» [...]. J’arrive d’Ottawa, ça fait longtemps que je n’ai pas vécu au Québec. Arriver avec mes opinions à moi n’est pas vraiment ce que je veux faire, mais plutôt de bien comprendre la communauté [...]. LD: Il y a un fossé qui semble s’être créé entre l’administration et les étudiants au cours des dernières années… Quelles mesures allez-vous prendre de ce côté-là et comment comptez-vous aborder le sujet? SF: Je peux parler un peu de ce que j’ai fait par le passé. Vous savez que j’ai été viceprincipale à l’enseignement [...], qui est un peu comme un Provost, quand j’étais à l’Université Queens. Et puis, j’étais aussi dans l’École des études supérieures. On a travaillé très bien et de très près avec le leadership étudiant, avec les étudiants, [...] c’est leur avenir qui est le centre de l’action de l’université. Alors j’espère que je vais pouvoir créer ce même type de liens que j’avais créés dans le passé [...] beaucoup d’ouverture d’un côté, et de l’autre, un environnement où on peut avoir des bonnes discussions en profondeur. LD: J’aimerais maintenant toucher aux frais de scolarité. SF: Oui. LD: J’aimerais premièrement savoir quelle est votre opinion de ce côté-là. Aussi, sachant que vous avez été présidente du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), qui favorise une collaboration industrie-université, est-ce que ce genre de collaboration est quelque chose que vous préconisez? SF: Je vais commencer par la première question. Alors écoutez, moi, la façon dont j’aimerais aborder le sujet, ce n’est pas de commencer par la question des frais de scolarité, mais plutôt de commencer par les questions qui sont beaucoup plus importantes [...]:

des questions sur la qualité de l’éducation, le type d’éducation dont les étudiants ont besoin durant leur formation dont les priorités seraient l’entrée sur le marché du travail ou le développement personnel et puis aussi l’accessibilité [...]. De là, on ira savoir comment on va payer pour ça; c’est une question secondaire [...]. La deuxième question que vous m’avez posée, par rapport au partenariat avec l’industrie; effectivement, au NSERC, on a trois priorités qui sont le talent, la découverte, et l’innovation [...]. Comment peut-on mettre au profit de la société ces connaissances est une question importante. Ce que j’ai beaucoup remarqué avec les partenariats avec l’industrie [...] – dans la majorité des cas surtout quand il s’agit de la grande entreprise – ce qu’on veut, ce sont en priorité des partenariats qui vont encourager la recherche fondamentale pour que l’industrie puisse voir ce qui peut être fait dans le futur avancé [...]. Pouvoir travailler très tôt avec les étudiants [et] étudiantes [...] à leur formation [...], il y a des bénéfices des deux côtés [...] LD: Au risque de se retrouver avec des controverses comme c’est le cas avec la recherche sur l’amiante du professeur MacDonald? SF: Il y a des principes fondamentaux établis dès le début [...] pour un bon développement des partenariats. Ça c’est très important de le faire [...]. LD: Quelle est votre réaction face au Sommet sur l’éducation. Entre autres face à l’indexation? SF: Le sommet était un premier pas [...] et il y a encore beaucoup de discussions qui vont se passer dans l’avenir. On a essayé de faire un premier pas rassembleur pour que les gens puissent continuer la discussion et s’engager ensemble pour discuter des sujets importants. Mais ce n’est pas avec une journée et demie… On a défini beaucoup de questions, mais on n’a pas eu le temps d’y répondre [...] LD: L’indexation, elle-même, est-ce un pas vers l’avant? SF: Oui, je crois que oui. Écoutez, moi, je le vois comme une réflexion, une discussion qui doit avoir lieu [...]. Par la force des circonstances, on a provoqué cette discussion plus rapidement au Québec et ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose [...]. Je n’ai pas assez participé pour avoir des réponses. La question essentielle revient au rôle de l’université. [...] La société en bénéficie, donc la société devrait participer au coût de l’éducation à l’université. Par contre, l’étudiant lui aussi en bénéficie. Donc, «comment on partage?» Ça, c’est une question qui se pose partout: on s’est posé la question au Sommet et on est arrivé avec un compromis pour continuer dans la discussion qui est déjà, en soi, un bon coup. LD: Par rapport aux coupes dans le budget universitaire, comment pallie-t-on à ces coupes-là? SF: Les coupures, j’en ai vécu autrefois quand j’étais a l’Université Queen’s et quand j’étais au sein du CRSNG [...]. On a travaillé très fort pour établir les priorités, les valeurs, les principes qu’il fallait préserver et où on pouvait se serrer la ceinture sans créer un impact négatif à long terme [...] J’entre en fonction seulement au mois de septembre, donc je ne peux pas me prononcer sur ce qui se passe à ce niveau-là immédiatement. x

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Actualités

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POLITIQUE QUÉBÉCOISE

Longtemps, c’est long

Une centaine de manifestants dénoncent la lenteur de la Régie du logement. Léa Gruyelle Le Délit

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eudi 28 février à 13 heures, à l’angle de la rue Crescent et du boulevard RenéLevesque, démarrait une marche au ralenti pour dénoncer les délais de traitement des plaintes de la Régie du logement. La Régie du Logement est un tribunal spécialisé dans les baux résidentiels. Son rôle premier est de veiller à ce que les droits et devoirs du propriétaire et du locataire soient respectés. Selon elle, le principal devoir du locataire consiste à payer son loyer dans les délais impartis; quant au propriétaire, il se doit de délivrer un logement en «bon état […] et de le maintenir dans cet état». Aux dires des manifestants, ce sont ces points précis qui ne sont plus respectés. Lorsqu’un locataire ne paie pas son loyer, la Régie du logement fixe une audience pour son éviction dans un délai moyen de six semaines. En revanche, lors d’un problème de réparation majeure, comme des moisissures ou un dégât d’eau, la victime doit attendre en moyenne vingt mois avant d’obtenir une audience, soit une durée plus longue que celle d’un bail. Pendant ce temps, les locataires doivent continuer à vivre dans des conditions parfois insalubres, ou entamer des travaux à leurs frais. Pour le Comité Logement et le Projet Genèse, organisateurs de cette marche «slomo», cette situation est inacceptable. Une membre du projet Genèse explique que «les

délais sont de plus en plus longs; ils atteindront bientôt 24 mois». Un manifestant ajoute que tout cela va bien au delà d’un simple problème de logement: une personne vivant dans un appartement insalubre pendant des dizaines de mois, en attente d’une audience, peut tomber malade, ce qui aura des répercussions sur sa vie personnelle et professionnelle. À voir ces marcheurs de tous types et âges, le problème concerne tout le monde. Des membres de comités et d’associations de protection des locataires, mais aussi, et ils sont nombreux, des gens simplement fatigués d’attendre, disent qu’ils «ne peuvent plus attendre». Devant cette inaction de la part de la Régie du logement, nombre d’associations et de victimes se sont alliées pour mettre en avant trois requêtes. Elles souhaitent donc que toutes les demandes soient entendues dans un délai de trois mois sur la base du premier arrivé, premier servi. S’il en va de la santé ou sécurité du locataire, elle doit être entendue dans les 72 heures. Enfin, elles réclament un budget additionnel pour la Régie du logement, de la part du gouvernement du Québec, pour l’embauche de régisseurs afin de réduire les délais. Cette manifestation est une première pour cette femme, qui raconte au Délit que les méthodes actuelles lui font «mal au cœur». Le mot de la fin lui appartient: elle se dit «choquée» de constater les conditions dans lesquelles certains locataires sont forcés à vivre. x

Crédit photo: Camille Chabrol

CAMPUS

75 cents pour SACOMSS Les étudiant(e)s invités à se positionner sur le renouvellement des frais. Mathilde Michaud Le Délit

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e Centre d’Agressions Sexuelles de l’Association Étudiante de McGill (SACOMSS) entrait hier en période référendaire. En effet, comme la majorité des groupes affiliés à l’Association Étudiante de l’Université McGill (AÉUMs, SACOMSS doit renouveler ses frais provenant de la population étudiante tous les trois ans, qui s’élèvent à ce jour à 75 cents par semestre pour tous les étudiants, à temps plein ou partiel, incrits à l’Université. SACOMSS est un organisme étudiant qui a pour mission d’apporter un soutien aux victimes d’agressions sexuelles et à leurs proches. Il est composé de quatre services: une ligne téléphonique ainsi qu’un centre d’aide permettant d’avoir accès à une aide confidentielle et gratuite, des groupes de soutien, des groupes de pression pour soutenir les intérêts des victimes et de leurs allié(e)s, et finalement, des intervenants qui se rendent dans les écoles secondaires et organisent des ateliers afin d’éduquer les jeunes aux enjeux reliés aux agressions sexuelles. Lily Hoffman, coordonnatrice du comité du «Oui», explique au Délit qu’une victoire du «Non» entrainerait la perte de la plupart de ses services. «SACOMSS fournit un soutien institutionnel aux survivants d’agressions sexuelles et à leurs alliés et les fonds qu’il reçoit des étudiants est fondamental à sa continuité». Elle insiste sur la

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singularité de l’organisme. Effectivement, dit-elle, la majorité des universités au Canada n’ont pas accès à ce genre de services qui sont, selon elle, «cruciaux pour un campus universitaire tolérant, vibrant et solidaire». La disparition du financement signifierait la perte d’un «espace libre de jugement où il est possible de parler de ses expériences». Comme l’explique Allison Cooper, vice-président des clubs et service à l’AÉUM, dans une entrevue avec Le Délit, il ne s’agit pas d’un référendum d’existence, mais bien du renouvellement du financement. Cela implique que même si le référendum est perdu, SACOMSS existera toujours. Ses services en seront néanmoins fortement affectés. Son financement reposera alors sur les disponibilités du budget interne de l’AÉUM qui change chaque année selon les projets et besoins de l’Association. Cependant, selon Cooper, un tel référendum ne devrait pas avoir lieu. «L’existence de SACOMSS devrait être obligatoire, il devrait déjà y avoir une sorte de frais étudiant alloué à l’organisme. Le fait que son existence soit même remise en question, c’est le patriarcat». Les associations telles que l’AÉUM se positionneront dans le courant de la semaine à savoir s’ils soutiennent ou non le comité du «Oui». Il n’existe pour le moment pas de comité du «Non». Le vote se déroulera du 18 au 22 mars. x

Illustration: Romain Hainaut

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Crédit photo: Romain Hainaut

POLITIQUE QUÉBÉCOISE

Soyez Maîtres Chez Vous La jeunesse s’empare des affaires publiques le temps d’une journée. Mathilde Michaud Le Délit

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rès de 300 jeunes se sont retrouvés au Cœur des sciences de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) le 9 mars dernier afin de participer à l’édition 2013 de Maître Chez Vous (MCV) organisé par Force Jeunesse (FJ). Au menu, neuf conférences, de nombreuses discussions et un «cocktail-réseautage». FJ, un regroupement de jeunes travailleurs œuvrant «à la défense et à l’amélioration de [leurs] conditions de travail, des perspectives d’emploi de la relève et de l’équité intergénérationnelle dans les politiques publiques», organise depuis trois ans cet événement afin de faire la promotion de ses valeurs, principes et revendications. Stéfanie Tougas, responsable des relations publiques de FJ, explique au Délit qu’«avoir un événement comme ça, qui couvre tous les spectres de la gauche à la droite en politique jeunesse, permet de positionner les enjeux d[’un tel thème] et d’avoir un peu d’attention médiatique pour passer notre message, qui est de réduire les iniquités entre les générations et de mettre de l’avant la jeunesse». Cette année, l’événement traitait du financement politique, de l’immigration, de l’économie, de l’innovation, de la santé, des inégalités économiques et de la question linguistique. «Les panels et les conférenciers», explique Tougas, «sont sélectionnés en fonction de ce qui se passe dans l’actualité […]; ce sont des enjeux auxquels les jeunes devraient plus s’attarder». Chaque panel avait son lot d’experts et c’est même le ministre de la Santé, le docteur Réjean Hébert, qui a lancé le bal lors de la conférence d’ouverture en parlant du plan d’action en santé développé par le Parti Québécois (PQ). Une démocratie pour cent dollars Le panel sur le financement politique qui rassemblait Bernard Drainville, ministre des Institutions démocratiques et de la Participation citoyenne, Sylvie Roy, députée de la Coalition Avenir Québec (CAQ), Jocelyn Caron du Cabinet Intangible Gouvernance et Frédéric Lapointe, prési-

dent de la Ligue d’Action Civique, a traité majoritairement des mesures mises en place par le PQ afin de diminuer de mille à cent dollars le plafond des dons aux partis politiques et d’augmenter la proportion de financement public. Le ministre Drainville explique au Délit que ces mesures sont mises en place entre autres afin de favoriser une démocratie plus directe que celle qu’on exerce seulement tous les quatre ans. «En abaissant les dons à cent dollars, on les rend accessibles à la majorité des personnes alors qu’à mille, seuls les plus riches pouvaient se permettre de donner une telle somme. On donnait alors un pouvoir plus grand à ceux qui avaient de l’argent […] sur les élus, sur les partis. […] En ce sens-là, on permet au citoyen de se réapproprier son parti politique.» Il explique aussi que plusieurs autres mesures seront mises en place par le PQ afin de donner un plus grand pouvoir aux citoyens sur leur politique. «Des élections à date fixe ça serait une très bonne idée. On a d’ailleurs déposé un projet à ce sujet. […] L’autre chose qu’on veut faire, et on a déposé un projet de loi, c’est le vote sur les campus. […] C’est une manière de rapprocher la démocratie des citoyens, en particulier des jeunes». Le panel a aussi longuement traité du financement public par rapport au privé et de nombreuses dissensions à ce sujet se sont faites sentir, entre autres lors de la période de questions. Langue française: Statu Quo ou guerre linguistique? Un panel bien diversifié était présenté en après-midi. Formé de quatre panelistes et d’une parité anglo-française, il en est ressorti des débats hauts en couleurs. Mathieu Bock-Côté, sociologue et chroniqueur au Journal de Montréal s’est fait, comme à son habitude, grand défenseur de la langue française et a insisté sur les dangers qu’elle court présentement. «Il faut cesser d’avoir honte d’être inquiet pour la langue», dit-il au Délit. «Il va falloir reconnaître que la situation du français au Québec est inquiétante et qu’il est nécessaire aujourd’hui de revaloriser le politique, le rôle de l’État dans la défense et la

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promotion du français.» Éric Duhaime, lui aussi chroniqueur au Journal de Montréal, n’était pas du même avis. «Moi, je pense qu’on a eu une grande victoire au niveau linguistique et aujourd’hui il faudrait peut-être se soucier que Montréal redevienne un pôle d’attraction économique, pas linguistique», explique-t-il au Délit. On a aussi découvert chez les deux autres panelistes, tout deux anglophones, de grands défenseurs de la langue de Molière. Charles Castonguay, professeur de Mathématiques à l’Université d’Ottawa et auteur du livre Le français dégringole! Relancer notre politique linguistique a présenté à l’assistance des statistiques montrant une réelle diminution de la proportion francophone au Canada de même qu’au Québec, et plus spécifiquement à Montréal. Il a expliqué au Délit que, selon lui, le français devrait tout naturellement être la langue dans laquelle se font les échanges entre les différents groupes linguistiques, non l’anglais. Il s’est cependant insurgé contre le principe d’immigration linguistique qui fait du Québec une des seules nations où les immigrants rapportent moins économiquement que les Québécois de souche. La «grande conférence» de Diane De Courcy, ministre de l’Immigration et des Communautés Culturelles et ministre de la Charte de la Langue Française, a elle aussi porté sur la place du français au Québec. De nombreuses questions ont porté abordé la nouvelle loi 14 qui fera dès cette semaine l’objet d’une commission parlementaire. Prendre le pouls de la relève MCV, qui se veut «un espace de dialogue et d’échanges pour la relève en affaires publiques», exerce un attrait autant pour les jeunes que pour les conférenciers y participant. Catherine Collerette, étudiante de McGill qui assistait pour la première fois à l’événement, dit être venue surtout pour «entendre parler de plein de sujets d’actualité». Ayant assisté au panel sur l’innovation, elle exprime au Délit son appréciation. «Les conférenciers donnaient vraiment des perspectives intéressantes sur ce qui devrait être le développement de Montréal», ajoute-t-elle.

Les conférenciers, eux aussi, semblent considérer que l’événement est d’une grande valeur. «Ça donne une image très positive de ce mouvement de jeunes. Souvent on présente les jeunes dans une perspective de critique, là c’est dans une perspective d’aller plus loin. Et ça c’est agréable. Ça crée de l’espoir», explique au Délit Pierre Maisonneuve, ex-journaliste à Radio-Canada. «Ici, au fond, on rencontre des gens intéressés par les affaires publiques peu importe leur allégeance politique», ajoute Bock-Côté. Bernard Drainville apporte un point de vue plus politique: «On vient prendre le pouls de la jeunesse. Pour nous qui sommes au gouvernement, c’est important de garder ce lien-là, notamment avec les jeunes parce qu’ils sont l’avenir de notre société. […] On a besoin de jeunes qui nous poussent dans le dos, qui demandent des réformes, des changements». Éric Duhaime a, quant à lui, une vision un peu plus cynique de la situation: «Je crois que la jeune génération québécoise va avoir à porter un lourd fardeau et a intérêt à s’intéresser à la politique parce que la politique va beaucoup s’intéresser à son portefeuille dans les prochaines années». Les organisateurs pour leur part constatent une certaine réussite au niveau de l’organisation. «Il y a une popularité pour MCV qui est grandissante», s’enthousiasme Stéfanie Tougas. «On voit d’année en année qu’il y a de plus en plus de jeunes, de groupes de jeunes ou même d’associations qui désirent s’affilier». L’an passé, dans le cadre de la lutte contre la hausse des frais de scolarité, l’événement avait largement été boycotté par les associations étudiantes, entre autres en raison de la présence de Raymond Bachand, alors ministre des Finances, en tant que conférencier. Cette année il en a été différemment et il était possible d’y voir plusieurs représentants de la Fédération Étudiante Collégiale (FECQ) et Universitaire (FEUQ) dont Éliane Laberge, présidente actuelle de la FECQ. L’événement avait aussi sa plateforme de discussion en ligne et c’est l’interface Twitter qui a été la plus populaire avec le #MCV2013 par lequel panelistes et participants ont échangé tout au long de la journée. x

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Société societe@delitfrancais.com

Crédit photo: Fanny Devaux

Mon pays,

les coûts

Théo Bourgery et Fanny Devaux Le Délit

T

out élève international s’est déjà demandé au moins une fois pourquoi Montréal avait été sa destination d’études. Si la ville est connue pour sa vie nocturne horspair, ses alentours magnifiques et un fin mélange d’Europe et d’Amérique, si McGill est une université de renommée mondiale, une chose semble toujours faire râler: l’hiver. La Ville de Montréal (VM), qui gère tous les services offerts aux citoyens de la ville, n’en est pas à ses premières intempéries. Concernant la neige, son site web indique qu’une moyenne de 137 000 tonnes de fondants et abrasifs sont versées sur les routes et trottoirs de Montréal chaque année. 172 appareils spéciaux sont utilisables de jour comme de nuit. 3000 employés sont nécessaires pour les opérations de déblaiement, qui ont lieu cinq fois par hiver. Au total, 145 millions de dollars sont dépensés en moyenne chaque année pour faire en sorte que la ville reste «en marche» et que tout habitant puisse se rendre sans difficulté à son lieu de travail. En effet, un service rapide et efficace est vital pour Montréal, dont l’économie souffrirait si les routes n’étaient pas déblayées plusieurs fois par jour, et si les piétons étaient incapables de s’engager sur les trottoirs.

Crédit photo: Creative Commons

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Pas qu’une question de déneigement La neige est cependant loin d’être le seul problème que rencontre la VM durant les périodes de grand froid. De vrais problèmes sociaux sont en jeu, comme celui des sans-abris, les dégâts dus à la neige et à la glace, ou encore les accidents qui varient d’une simple glissade

sur le trottoir à des collisions mortelles entre voitures. Le journal Métro annonçait le 22 janvier dernier la mort d’un itinérant due au froid. L’année précédente, c’était un homme de 55 ans qui perdait sa vie, trop mal couvert par son sac de couchage, malgré les nombreuses ressources mises en avant pour offrir un toit à tout sans-abris. L’article semble apparaître tous les ans, après la première vague de froid de Janvier. Devant de telles conditions, plusieurs associations ont vu le jour, pour donner aux sans-abris une chance de voir un nouvel été. Le Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (R APSIM) regroupe, par exemple, plusieurs organismes et se focalise principalement sur «l’information, la formation, la sensibilité [et] l’action communautaire», selon leur site web, pour travailler de façon efficace avec les itinérants, jour après jour. Jointe au téléphone, l’association a expliqué au Délit que son rôle était de «mettre les itinérants en relation avec les services de la ville, comme les Centres d’hébergement d’urgence», ouverts seulement pendant la période de grand froid, de décembre à avril. Pas tous un toit D’autres associations sont présentes tout autour de Montréal, et McGill n’est pas une exception. Des étudiants sont effectivement membres de l’association caritative Dans La Rue, qui vise à «aider les jeunes à survivre dans la rue et à se remettre sur pied», selon le site officiel. Quelques étudiants ont d’ailleurs décidé de montrer leur soutien aux jeunes sans-abris en dormant pendant cinq jours devant la bibliothèque du bâtiment McLennan. Malgré l’environnement sécuritaire qu’est le campus, et la possibilité de retourner dans leurs chez-soi en cas de très basses températures, une


’ c est

’ l Hiver

insouspÇonnés manifestante dit «avoir une idée de ce que les jeunes itinérants endurent tous les jours». Ces associations sont par centaines, nécessaires pour des personnes souvent délaissées et oubliées par ceux qui ont un toit où se réfugier. Si leurs services sont «les mêmes tout au long de l’année», les pompiers doivent aussi faire face à des problèmes propres à l’hiver. En entrevue avec Le Délit, Martin Farmer, chef des opérations du Service de sécurité Incendie de Montréal (SIM), explique que le centre d’appel répond à «120 000 appels durant l’hiver», bien que cela soit pour toute sorte d’incidents. En revanche, il précise que les équipes doivent faire face à un, voire deux feux domestiques chaque jour. Spécialisé dans des interventions à haut risque, Farmer indique que «les feux d’hiver sont beaucoup plus spectaculaires» et sont responsables de plusieurs victimes tous les ans. Habitués à ces accidents, le système d’intervention du SIM est «très rapide; il ne suffit parfois que de deux ou trois minutes pour qu’un camion ne soit sur le terrain». La logistique est cependant très différente des feux de forêts dont est victime le Québec; à cause du froid, les combinaisons sont rapidement inutilisables, sans mettre la vie des pompiers en péril. Il faut donc remplacer les équipes régulièrement et des stocks d’équipements doivent toujours être prêts à être utilisés. Rien qu’une glissade La glissade occasionnelle, lors de l’ascension de la rue Peel vers le bâtiment McIntyre, est devenue si normale que les gens autour n’y font même plus attention. Des accidents plus graves ont cependant lieu chaque année sur les routes du Québec, à cause de la neige et du verglas. Selon la Société de l’assurance automobile du Québec, 28 personnes

ont trouvé la mort en janvier 2012 sur les routes, contre 24 dans le même mois l’année d’avant. Si les nombres semblent plutôt bas par rapport au reste de l’année (43 morts en juillet 2012), c’est parce que le gouvernement est catégorique sur les mesures de prévention. Tout véhicule a en effet l’obligation d’avoir des pneus neiges pendant la période hivernale, sous peine d’une amende qui varie de 200 à 300 dollars. Malgré ça, les services d’urgence sont souvent visibles sur les bords de routes, pour intervenir dans les conditions les plus difficiles. Pour beaucoup d’étudiants, l’hiver rime avec mitaines, manteaux de duvet et pas chancelants sur le verglas qui recouvre les trottoirs. Cependant, la ville de Montréal doit faire face à des problèmes de plus grande envergure que peu de villes de cette taille à travers le monde connaissent. Avec les années, les services se perfectionnent, mais les refuges pour sans-abris seront toujours bondés, et les pompiers feront toujours plusieurs interventions dues à des accidents causés par la neige et le froid. L’hiver à Montréal, c’est clair, ce n’est pas que du déneigement. Pour les étudiants McGillois La vie de l’hiver peut être un véritable défi pour certains, notamment pour les étudiants qui immigrent au Canada. L’hiver provoque d’importantes dépenses personnelles et certains n’ont pas la possibilité d’intégrer ces coûts à un étroit budget étudiant. L’organisation de l’Université en général est modifiée, mais McGill propose des services qui s’adaptent aux conditions météorologiques, parfois rigoureuses. Tous les jours, l’aumônerie de McGill accueille des étudiants pour partager des boissons chaudes et combattre l’hiver. Madame Disano, la coordonnatrice de l’Aumônerie, rappelle qu’il y a

plus de 8000 étudiants internationaux à McGill et que certains d’entre eux n’ont jamais «connu de vrai hiver avant de venir à Montréal». L’aumônerie a mis en place un programme spécialement créé pour les étudiants internationaux qui viennent au Canada pour la première fois et qui ne sont pas prêts a faire face au froid. Ce programme propose des manteaux peu ou pas portés gratuitement pour les étudiants internationaux. Il permet de donner jusqu’à 500 manteaux chaque année. Le service aux étudiants étrangers (SEE) propose des sessions d’informations sur la façon de gérer l’hiver. Des conseils et astuces qui peuvent paraître futiles pour les canadiens sont parfois vitaux pour les étrangers. Par exemple, limiter le temps dehors. Voyages Campus” souligne que durant l’hiver les étudiants partent plus, pour combattre le blues de l’hiver. Que ce soit au ski ou dans le sud, ils partent pour faire le plein en vitamine D. L’hiver a en effet des conséquences psychologiques dues entre autres au manque de cette vitamine. Cela peut se manifester à travers des troubles du sommeil, du stress supplémentaire, des difficultés pour se concentrer – ce que le site des services de Santé Mentale de McGill appelle le «winter blues». On pourrait minimiser les effets d’un environnement qui, l’espace de quelques mois, devient plus rude et moins agréable, et participe à la création d’une forme de malaise chez certains étudiants. Il est possible de prendre des rendez-vous, du lundi au vendredi, dans le bâtiment Brown, aux services de Santé Mentale. La flexibilité des services de McGill à l'hiver et la mise en place d'une politique de ville différente selon les saisons fait de l'hiver montréalais bien plus qu'une différence de température. Si le coût de l'hiver est impossible à chiffrer précisemment, il est sûrement conséquent. x

Crédit photo Lindsay P. Cameron

Société

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CHRONIQUE

Avancer vers l’arrière Portrait d’un papabile québécois qui fait reculer l’Église Margot Fortin | Chronique accidentelle

Alors que le Vatican s’ajuste péniblement au rythme effréné du conclave, plusieurs Québécois attendent fébrilement de voir émaner de la cheminée de la Chapelle Sixtine une fumée blanche annonçant l’élection d’un pape bien de chez nous. Comme en font foi les nombreux reportages complaisants présentés au sujet du controversé cardinal Marc Ouellet dans les médias québécois, celui-ci est récemment passé du statut de figure de proue obscure d’une institution démodée à celui d’étoile montante de notre modeste starsystème. À l’exception des retombées d’une offensive médiatique plus ou moins improvisée de la part de divers regroupements de victimes de prêtres pédophiles, le traitement accordé au cardinal Marc Ouellet dans la presse québécoise a été étrangement conciliant. Des quotidiens les plus sérieux aux magazines normalement consacrés au commérage, aucun média n’a pu résister à la tentation de passer outre les prises de position controversées du primat de l’Église canadienne pour mieux mettre de l’avant le récit de l’histoire charmante d’un «petit gars de l’Abitibi» qui s’apprête peut-être à ne rien changer du tout du Monde tel que nous le connaissons. Une jambe cassée Comme l’a très justement fait remarquer Patrick Lagacé, chroniqueur à La Presse, dans une chronique publiée la semaine dernière, l’unique entrevue télévisée accordée par notre papabile depuis l’intensification des spéculations le concernant a été consacrée à des questions à la fois légères et complaisantes. Plutôt que d’interroger le cardinal sur les controverses de fond qui ébranlent l’Église catholique, la chef d’antenne de Radio-Canada Céline Galipeau s’est contentée d’écouter docilement l’ancien évêque de Québec s’étendre en

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long et en large sur des banalités. Peu intéressés par l’approche de la théologie préconisée par notre aspirant pape, les médias d’ici se sont plutôt attardés à la découverte de son patelin d’origine de La Motte. Les uns après les autres, les tabloïdes québécois ont présenté des images du jeune Marc avec ses boucles blondes, prenant généralement soin d’accompagner le tout d’une longue entrevue avec sa maman. Toutefois, rien n’a fait couler plus d’encre que la fameuse patinoire «sacrée» sur laquelle le futur papabile s’est jadis cassé une jambe, emportant par le fait même son rêve d’intégrer un jour l’alignement des Bruins de Boston. C’est d’ailleurs ce premier «miracle» qui lui a permis de découvrir sa nouvelle vocation sacerdotale. Rares sont les médias qui prennent soin de souligner l’étrange chronologie des événements. Dans le Québec de la Révolution tranquille, au moment même où les jeunes de l’Amérique du Nord et de l’Europe luttaient contre la guerre au Vietnam, les dérives du capitalisme et la ségrégation, l’enfant prodige de La Motte, lui, entendait l’appel de Dieu pour la première fois. Théologie de la libération Tandis qu’un courant de fond emportait déjà la jeunesse québécoise loin des bancs d’église, le Vatican lui-même se trouvait en pleine ébullition. Le concile Vatican II, qui s’est déroulé entre 1962 et 1965, devait faire entrer l’Église catholique dans l’ère moderne en évoluant vers une pratique de la foi moins rigide et mieux ancrée dans les sociétés où elle s’implante. Paradoxalement, Marc Ouellet doit son ascension à son opposition farouche à cette infusion d’un certain idéal progressiste dans le catholicisme. En effet, celui que l’on félicite aujourd’hui pour son travail de missionnaire en Amérique du Sud a consacré sa carrière dans la région à la lutte contre la «théologie de la libération», un courant d’inspiration marxiste qui prônait une attention particulière de l’Église à l’égard des pauvres et un plus grand soutien pour les populations opprimées par le colonialisme et le pouvoir de l’argent. Dans un monde catholique dont le cœur ne bat désormais nulle part aussi fort qu’en Amérique Latine et en Afrique, Marc Ouellet continue de se montrer résolument hostile à tout ce qui est susceptible de briser le mur qui sépare aujourd’hui le croyant

des structures de l’Église. En d’autres mots, le cardinal québécois consacrerait probablement son pontificat à condamner les efforts de ceux qui cherchent à provoquer l’avènement d’une Église à hauteur d’homme. À l’échelle du conclave, le jeune cardinal Marc Ouellet est un véritable vieux de la vieille pour qui toute forme de progrès peut être assimilée à une perversion de la volonté de Dieu. Ainsi, il ne faut pas se surprendre que celui-ci ait su tisser sa toile jusqu’à en arriver à devenir l’homme de main de Benoît XVI, un pape conservateur dont le pontificat écourté a notamment été marqué par des déclarations incendiaires et franchement dangereuses concernant l’uti-

lisation de moyens de contraception en Afrique. De désordre spirituel Marc Ouellet lui-même ne se cache qu’il s’inscrit dans un courant d’opposition aux avancées de Vatican II et aux idéaux progressistes émanant de l’Amérique Latine et de l’Afrique. Par ailleurs, celuici tient aussi mordicus à une interprétation des textes religieux qui rejette l’avortement pour les femmes qui ont été violées et qui qualifie l’homosexualité de «désordre objectif». Finalement, à l’apogée du scandale des prêtres pédophiles, le même Marc Ouellet qui refuse systématiquement d’entendre les victimes qui cognent à sa porte pour obtenir réparation s’est déplacé en

Irlande pour demander pardon à Dieu au nom du pape Benoit XVI. Voilà qui complète le portrait d’un homme qui, obnubilé par son propre cheminement spirituel, a fait l’erreur d’en oublier les Hommes. Tandis que bon nombre de Québécois espèrent secrètement assister à la nomination d’un pape de chez nous, beaucoup ignorent encore tout de cet homme et des projets qu’il entretient pour l’Église catholique. Au delà de l’innovation que représenterait l’accession à la papauté d’un cardinal de la région des Amériques, le pontificat de Marc Ouellet marquerait certainement un grave retour en arrière et un lamentable déni des valeurs auxquelles les Québécois sont attachés. x

Illustration: Romain Hainaut

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LETTRE OUVERTE

Le clic: démocratique? Daria Khadir & Morganne Blais-Mcpherson

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e 27 février 2013, l’Assemblée Générale (AG) de l’AÉUM a introduit l’usage de clickers comme outil de vote, transformant astucieusement, sous le couvert d’économie de temps, le vote ouvert à main levée à un vote secret. Outre le fait de déterminer si cette mesure permet effectivement d’accélérer les processus décisionnels, la question demeure; l’économie de temps est-elle réellement un objectif à atteindre dans nos assemblées? Une solution technologique saura-t-elle raviver l’état accablant de nos instances décisionnelles? Nous pensons que non, et nous pensons que la manière dont cette mesure a été introduite participe au même phénomène. La décision de recourir à des télécommandes engage des conséquences importantes et ne peut être traitée banalement. Le problème n’est-il pas plutôt la rareté de nos AG? Le manque de participation? L’absence de sentiment de pouvoir collectif? En introduisant

les clickers on fait miroiter le «progrès», occultant les vrais enjeux et avançant d’un pas vers une aliénation lente. C’est la valorisation du vote secret qui pour nous est problématique, car elle émerge d’une culture de l’objectivité ou de l’apolitisme, où toutes les positions se valent et où tout ce qui importe, c’est de voter. La délégation de notre pouvoir dans ces petites machines est une mesure qui cherche à aplanir les tensions et à camoufler les divergences. Or, une démocratie saine repose avant tout sur le débat éclairé et la prise de position commune. À celles et ceux qui croient que cette mesure prévient l’«intimidation» à laquelle s’exposent les gens qui votent à contre-courant, nous rétorquons que les antagonismes enrichissent la réflexion, qu’il est important de les cultiver, mais, aussi, qu’il est important d’assumer ses position, de ne pas s’en déresponsabiliser. Si certain-e-s se sentent opprimée-s dans les AG, il est certes important d’y réfléchir et d’y remédier. Mais nous insistons que ce n’est pas en évacuant la responsabilité dans nos outils technologiques que nous aborderons judicieusement les jeux culturels.

Illustration: Romain Hainaut

Des postes dans l’équipe éditoriale du Délit 2013/2014 à pourvoir! On recherche : - un coordonnateur de production, qui établit une maquette standardisée, recrute et coordonne la participation des collaborateurs à la production, gère la séance de production, fait de la mise en page et coordonne la mise en page du journal.

- un secrétaire de rédaction Arts et Culture, qui assiste le chef de section dans l’édition, la correction des articles, la mise en page et écrit des articles régulièrement.

- un coordonnateur de réseaux sociaux, qui met à jour régulièrement les comptes Facebook et Twitter du Délit francais.

- un infographe, qui contribue au visuel du journal.

Avant de vous présenter : Afin de pouvoir présenter votre candidature à un poste de rédaction au Délit, vous devez avoir accumulé trois (3) ‘Points Collaboration’ au moment des élections: Les Points Collaboration sont distribués de la façon suivante: · 1 point par rédaction d’article o 2 points par article de plus de · · · · ·

1000 mots 1 point pour collecte d’informations 1 point par photo 1 point par illustration 1 point par infographie 1 point pour rester jusqu’à la fin d’une soirée de production o pour aider en correction o pour aider l’éditeur web avec la mise en ligne et le partage o pour aider en production avec la mise en page o pour aider avec les relecture

Comment vous présenter : 1. Envoyez une lettre de motivation (500 mots au plus) à rec@delitfrancais.com en incluant : 0. Une courte présentation de vous-mêmes a. Le poste auquel vous postulez b. Les motivations qui vous amènent à postuler et le degré d’engagement que vous êtes prêts à fournir c. Ce que vous apporterez au poste d. Vos disponibilités e. Ce que vous voudriez couvrir une fois élu f. Idées novatrices Trois échantillons de votre travail, dont au moins un publié au Délit et un dans la section pour laquelle vous vous présentez, à l’exception des postes de coordonnateur de la production, webmestre, et coordonnateur de la correction

Si vous avez participé d’une autre façon non incluse dans cette liste, faites-en part à l’un de nos éditeurs.

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Société

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Arts&Culture

artsculture@delitfrancais.com

Sonate baroque Bach le temps d’une soirée Anne Pouzargues Le Délit

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a Salle Redpath a gardé tout son charme. L’ancienne chapelle, avec ses lumières tamisées, son orgue imposant et ses portraits des anciens doyens de l’université le long des murs, semble être le lieu idéal pour se replonger dans l’univers de Bach. Lundi 11 mars, Mark Fewer (violon), Matt Haimovitz (violoncelle) et Tom Beghin (pianoforte), ont fait découvrir au public mcgillois des œuvres moins connues de Jean-Sebastien Bach. Le concert débute par la Grande Sonate en la majeur pour violoncelle et pianoforte. Avec Matt Haimovitz au violon, deux trios sont ensuite interprétés: le n°1 en ré majeur et le n°2 en mi bémol majeur. L’interprétation ludique des trois morceaux ravit le public: le pianoforte enchaîne les moments de bravoure, les crins des archers se cassent sous l’agitation. Mais les musiciens savent alterner avec brio des moments de fulgurante insouciance et des moments plus sombres et plus graves, pendant lesquels l’atmosphère de la Salle Redpath se fait presque oppressante. En entrevue avec Le Délit, deux élèves de McGill étudiantes en violoncelle à la Faculté de Musique Schulich, se disent «enchantées» par ce concert: «le public étudiant et non-étudiant a répondu présent», continuent-elles. Les étudiants mcgillois présents au concert sont certes en grande majorité des étudiants en musique, et la plupart d’entre eux étudient avec l’un des trois musiciens à la Faculté de musique, mais il faut néan-

Crédit photo: Hossein Taheri

LETTRE OUVERTE

moins relever les efforts mis en œuvre par l’université pour promouvoir la musique classique à McGill. De très nombreux concerts sont organisés chaque semaine; il y en a pour tous les goûts et pour tous les âges, des récitals d’élèves aux concerts de professeurs, en passant par de nombreux invités canadiens et internationaux et des concerts à thèmes. Le concert de lundi permettait aux trois professeurs de faire découvrir un aspect particulier de l’écriture musicale de Bach, celui des trios. De plus, la présence d’un pianoforte, cousin du piano comportant seulement six octaves et demie, rend le concert encore plus original. Tom Beghin nous explique son fonctionnement, et les différentes techniques de jeu: «en appuyant sur l’une des pédale, on peut par exemple jouer sur une seule corde, et non sur les six cordes utilisées habituellement». Si le concert de lundi se concentrait sur Bach, les parcours des trois professeurs montrent l’éclectisme musical que tend à développer McGill. Tous sont compositeurs, et s’illustrent dans des styles musicaux divers. Le violoncelliste Matt Haimovitz a longtemps été «à l’avant-garde en comblant le fossé entre les tenants de la musique classique et ceux de la musique populaire, reprenant les succès de Jimi Hendrix et introduisant Bach dans les bars rock». Un concert de Bach, mais un concert vivant et dynamique. Une preuve de plus de l’atemporalité de la musique classique et des œuvres de Bach, qui trouvent des oreilles attentives aussi bien dans les bars que dans les églises. x

À vos stylos!

L’ADELFIES lance à nouveau son concours de nouvelles. Mathieu Simard pour l’ADELFIES

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haque année, l’Association des étudiant(e)s en langue et littérature françaises inscrit(e)s aux études supérieures (ADELFIES) organise un concours de nouvelles littéraires. La gagnante ou le gagnant se voit attribuer le Prix Yvon Rivard, ainsi nommé en l’honneur du professeur à la retraite du Département de langue et littérature françaises (DLLF). Lauréat du Prix du Gouverneur Général en 1986 pour son roman Le silence des corbeaux, Monsieur Rivard est également connu pour ses essais, dont le plus récent s’intitule Aimer, enseigner.
L’an dernier, les juges du Concours étaient Louis Hamelin et Dominique Fortier, deux romanciers québécois de renom. Ils ont couronné Francis Levasseur grand gagnant 2012 du Prix Yvon Rivard de la meilleure nouvelle. Étudiant de doctorat au DLLF, Francis avait repris, pour intituler son texte, le thème du concours: «Hors frontières». Ce thème faisait écho à celui du Colloque

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Arts & Culture

annuel de l’ADELFIES («Écrivain sans frontières»), tenu les 26 et 27 janvier 2012 à la salle de bal de la maison Thomson. La nouvelle de Francis Levasseur devrait d’ailleurs être publiée avec les Actes du Colloque, dont la date de parution n’a cependant pas encore été annoncée. Cette année, pour la première fois, l’ADELFIES ouvre son concours de nouvelles littéraires à l’ensemble des étudiants du campus. La lauréate ou le lauréat recevra le Prix Yvon Rivard, d’une valeur de 500$. Les textes reçus seront jugés cette année par Alain Farah (écrivain, professeur au DLLF et chroniqueur à Plus on est de fous, plus on lit! à la Première Chaîne de Radio-Canada) et Élise Turcotte (poète, romancière et nouvelliste québécoise, présentement écrivaine en résidence au DLLF). Les nouvelles doivent répondre au thème «Génération» (la thématique est encore une fois un écho à celle du Colloque annuel de l’ADELFIES) et compter un maximum de 2000 mots. Elles doivent être envoyées à l’adresse courriel adelfies. pgss@mail.mcgill.ca au plus tard le 22 mars 2013.

Illustration: Romain Hainaut

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OPINION

Madame Fortier La surprise de l’hiver: elle parle français! Anselme Le Texier Le Délit

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ous savions tous que la principale actuelle de l’Université McGill allait nous quitter, et nous parlions déjà du coût du recrutement d’un nouveau principal; mais ce que le conseil des gouverneurs nous a réservé pour l’année prochaine n’est rien d’autre qu’une francophone. On ne cesse de rebattre le cas particulier du français à McGill, qu’on ne saurait dissocier des questions linguistiques qui touchent Montréal, le Québec, le Canada et l’Amérique du Nord, mais là, McGill fait fort. Notre institution, qui se vante d’être la première université canadienne, cette institution qui enseigne et publie majoritairement en anglais, choisit au poste le plus important de son administration une femme qui parle l’autre langue. Avec près de 18% de francophones, McGill est une Université où on parle beaucoup français dans les couloirs. Le français reste pourtant la langue qu’on parle autour d’un café, et l’anglais domine à la fois les salles de classes et les publications académiques qui portent le nom de notre Université. Suite au mouvement McGill français de 1969 et aux transformations de la société québécoise des années 70, McGill est devenue de plus en plus bilingue, en s’ouvrant aux francophones, en traduisant la plupart de ses documents, en offrant des services et des cours en français et en

Illustration: Romain Hainaut

permettant depuis 2009 aux étudiants de premier cycle de rendre leurs devoirs en français comme en anglais. En 2013, nous aurons pour la première fois une principale et vice-chancelière francophone. Nous voilà déjà à crier victoire, à raviver nos espoirs, à voir dans Suzanne Fortier un messie, la principale qui va faire de McGill l’université bilingue dont nous rêvons tous secrètement. Des cours de français gratuits pour tout le monde! Des laboratoires dans lesquels on parle français! Des journaux académiques en français! Des conférences en français! Des cours en français! Des bibliothé-

caires qui disent «Bonjour» au lieu de «Hello»! Et pourquoi pas même un journal étudiant en français? Il semble cependant qu’on n’en soit pas encore là. En entrevue avec Le Délit, Suzanne Fortier, en répondant à une question sur sa vision de la langue française à McGill, n’a pas su nous convaincre de son engagement. La future principale se contente de répéter qu’elle souhaite avant tout faire le point sur les désirs des différents acteurs de la communauté mcgilloise. Il est difficile d’imaginer qu’une politique de consensus engendrera des réformes fondamentales quant à la politique et

au régime linguistiques de l’université. On peut toutefois espérer qu’une principale francophone saura éveiller les consciences aux difficultés qu’imposent les particularités linguistiques de McGill. Mais ce rêve que certains ont d’une université bilingue est-il réaliste? On ne peut évidemment pas imaginer offrir tous les cours en anglais et en français; une telle situation requerrait de tous les étudiants qu’ils parlent français. Vous me direz, ils font déjà comme ça à la Faculté de Droit. On ne peut ignorer l’histoire de notre institution non plus, fondée par un Écossais. Reste la question de l’utilité d’un tel régime linguistique. Si l’éventualité d’une université bilingue reste attirante, le bilinguisme est-il nécessaire? La particularité mcgilloise, qui fait du français une langue à statut spécial, ne devrait-elle pas rester cela: une particularité? Que gagnerait notre université à prendre la voie du bilinguisme? Ce qui est sûr, c’est qu’elle perdrait beaucoup d’argent et d’énergie, sans compter les craintes des anglophones qui se sentent malgré tout minoritaires à Montréal et au Québec. En outre, Montréal n’a que faire d’une autre université francophone sur l’île. Avec l’Université de Montréal et l’Université du Québec à Montréal, ceux qui souhaitent étudier en français ont l’embarras du choix, et les deux universités anglophones ne font qu’ajouter à la richesse linguistique du Québec. x

Graphe

Graffeur du dimanche Petites histoires de grands vandales Thomas Simonneau Le Délit

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e jour du Seigneur est un jour bien particulier que le commun des mortels emploie généralement pour se reposer, lire, faire du sport ou encore se promener. Malgré cela, certains, poussés par un désir inavoué de destruction et de vandalisme, profitent de leur dimanche pour poser un graffiti dans un entrepôt abandonné, couvrir les murs des toilettes dans une boîte de nuit à coup de marqueurs, caler une fresque sur un wagon en stationnement ou même tagguer le mur du voisin d’à côté car il commence à être agaçant à force de tapages nocturnes répétés. Ce petit parasite au bon fonctionnement de la vie en société n’est autre que le «graffeur du Dimanche». Cela dit, le graffeur du Dimanche est avant tout un type lambda, généralement dans sa trentaine, qui porte des jeans, qui boit du café et qui part au boulot les autres jours de la semaine. En général, plus ce dernier est âgé, plus il essaie de dissimuler son entreprise secrète pour éviter les complications au bureau ou les réprimandes de sa compagne. Rien à voir avec les gourous du graffiti ou même les artistes professionnels qui vivent de ça et pour ça et qui n’ont rien à cacher à personne. Non, le graffeur du Dimanche est comparable à un toxicomane qui aurait besoin de sa dose, quelqu’un qui refoule le besoin de s’exprimer librement ou encore quelqu’un qui regrette le temps où il passait des nuits entières avec ses potes à

poser son blaze à droite à gauche lorsqu’il était encore adolescent. Il y a peu de temps, j’ai rencontré un graffeur du Dimanche à la sortie d’un bar qui me racontait qu’il faisait croire à sa femme qu’il faisait des heures sup pour pouvoir aller tagguer quelques murs avec un ami le soir. Bien évidemment, le type profitait des quelques bières qui lui avait échauffé les neurones et du fait qu’il ne me reverrait probablement jamais pour m’avouer son petit secret et se défaire de sa culpabilité le temps d’une soirée. Bien qu’au fond j’aie un peu de peine pour ce jeune cadre légèrement pathétique, je trouve ça plutôt cool et inoffensif. Au-delà de cette petite anecdote, j’aimerais souligner le fait que critiquer les réalisations de ces individus relève d’un profond cynisme et d’un manque de tact latent. Bien qu’il soit tentant de comparer nos amis les graffeurs du Dimanche aux maîtres en la matière qui s’adonnent à leur passion jour et nuit, cette tâche me semble grotesque et profondément discutable. En effet, personne n’a l’idée de comparer un père de famille qui joue au foot le weekend à quelqu’un comme Ronaldo. Enfin bref, le graffeur du Dimanche est un phénomène de société plutôt méconnu mais pourtant assez courant. La prochaine fois que vous verrez un graffiti dans votre quartier, je vous laisse donc la liberté d’imaginer si celui-ci à été fait par le banquier qui vient d’ouvrir votre nouveau compte bancaire ou par le médecin d’hier qui vous a prescrit une ordonnance. x

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Illustration: Romain Hainaut

Arts & Culture

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CINÉMA

Un amour, une folie

Jacques Audiard adapte les nouvelles de Craig Davidson.

Gracieuseté de Why Not Productions

Laurianne Giroux Le Délit

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acques Audiard est un réalisateur surprenant, et son dernier film, De rouille et de d’os, ne fait pas exception. Le scénario de ce long-métrage en laisse plusieurs perplexes. Cependant, lorsequr l’on s’y attarde un peu plus, on découvre une histoire déchirante qui nous amène à nous poser plusieurs questions sur la condition humaine et sur notre façon d’apprécier la vie. De rouille et d’os raconte l’histoire de Stéphanie (Marion Cotillard), une dresseuse d’orques, et d’Ali (Matthias Shoenaerts), un jeune père ne sachant plus trop quoi faire de sa

vie. Leur relation se complexifie à la suite d’un accident de travail qui priva Stéphanie de l’usage de ses jambes. Ali se découvre une passion pour le combat de rue et entraine le spectateur dans de sombres affaires. Le film présente une réflexion intéressante sur la guérison ainsi que sur les choix auxquels il est difficile de faire face. Le scénario est une adaptation libre du recueil de nouvelles Rust and Bone du canadien Craig Davidson. Ce long-métrage change de ce qu’on connaît d’Audiard qui joue beaucoup sur le suspense, l’anxiété et la violence. Le réalisateur amène ici ces thèmes avec une finesse et une délicatesse surprenante. On sent clairement une recherche ainsi qu’un

profond questionnement derrière les dialogues. Il est également impossible de ne pas faire mention de l’excellente performance des acteurs principaux, Marion Cotillard et Matthias Shoenaerts, qui nous permettent de croire à cette histoire et de sentir toute la douleur et la confusion éprouvées par les protagonistes. Pour couronner le tout, la direction photo nous propose des images et des cadrages bien réfléchis, très esthétiques et très suggestifs qui complètent l’expérience Malgré tous ces points positifs, le film est passé relativement inaperçu de public ainsi que de la critique lors du Festival de Cannes de 2012. Certaines séquences sont longues et ralen-

tissent le rythme du montage. Quelques éléments du scénario auraient également pu être retirés puisqu’ils ralentissent le cours de l’histoire, notamment certains passages de la vie d’Ali. Il faut aussi mentionner que si la différence de style avec les films antérieurs de Jacques Audiard a plu à plusieurs personnes, d’autres pourraient être légèrement déçues en voyant le changement de ton dans sa réalisation. De rouille et d’os est le sixième film réalisé par Jacques Audiard, qui a une très longue carrière de scénariste. Son film précédent, Un prophète, avait d’ailleurs remporté le grand prix du jury au Festival de Cannes en 2009. Audiard est un joueur très im-

portant du cinéma français depuis plusieurs années, mais c’est avec son film De battre mon cœur s’est arrêté qu’il a gagné ses lettres de noblesses en tant que réalisateur. Toutefois, son dernier film, semble être passé un peu plus sous les radars. Ce film présente malgré tout une histoire et un questionnement pertinent et il mérite amplement l’attention du public. De rouilles et d’os sortira en DVD au Québec le 19 mars. Jacques Audiard reste fidèle à luimême et n’a pas peur d’aller dans les tabous et de tout montrer du changement brutal que subissent les personnes amputées. Il prouve encore une fois son talent incontestable et l’on attend déjà son prochain film avec impatience. x

Calendrier Culturel

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Based on a True Story Théâtre TNC 13-16 et 20-23 mars à 20h 6$

Fokus Film Festival Présenté par TVM Au Cinéma du Parc 21 mars de 18h à 20h 6$ in advance

Alameda De Marcelo Arroyo MAI 5-9 et 12-16 mars à 20h 15$

Comédie Plan Nord De Benoît Vermeulen Théâtre UQAM Jusqu’au 15 mars 5$

So-Called Outcomes Musique, magie, film Concordia Salle La Sala Rossa 19 et 20 mars à 20h 2$

Concerts professionnels Schulich Année de la musique contemporaine Irvine Arditi, violon Pollack Hall 14 mars à 19h30 10$

Arts & Culture

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Gracieusité de Ernest Potters

DANSE

C’est T.r.a.s.h.

Ma machine à laver saurait mieux danser. Mathilde Michaud Le Délit

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.r.a.s.h.: ce n’est pas que le nom du collectif de danse qui montait sur scène du 5 au 9 mars à la Place des Arts, c’est aussi le mot qui décrit le mieux l’expérience que nous ont fait vivre les danseurs lorsqu’ils sont montés sur scène. La compagnie, qui se décrit comme un «carrefour de disciplines artistiques» qui «rompt avec les formes traditionnelles du théâtre et de la danse», présentait deux pièces d’une trentaine de minutes: Enchanted room et T†Bernadette. La première pièce, tel que l’explique la chorégraphe Kristen van Issum dans la discussion suivant la représentation, est inspirée d’une plus grande pièce qu’elle a composée il y a près d’un an: Disorderly Conduct. Les deux danseurs évoluent sur une scène presque vide à l’exception de trois pommiers aux branches dénudées. Alternant phrases incohérentes et mouvements de pantins disloqués, ils sont supposés exposer le paradoxe de la condition humaine. Il est cependant très difficile de suivre l’histoire de ceux qui incarnent un frère et une sœur à la recherche

de la terre promise. Joss Carter, l’interprète masculin, tend à exagérer tellement ses mouvements et à crier si fort ses répliques qu’il devient impossible de déterminer si une structure se tient vraiment derrière son interprétation. Oona Doherty semble pour sa part beaucoup plus en contrôle. Son jeu d’actrice, bien qu’exagéré, est beaucoup plus crédible et ses mouvements, quoi que désarticulés, démontrent une très grande maîtrise de son corps. Elle joint magnifiquement danse et théâtre à un chant enfantin et parfois troublant. Ce sont les deux même danseurs qui reviennent sur scène après l’entracte afin de présenter la seconde pièce. Celle-ci délaisse quelque peu le théâtre pour se concentrer sur la danse. Bien que l’ambiance semble changée, la gestuelle, quant à elle, n’est pas très différente. Kristen Van Issum explique que cette ressemblance vient du fait qu’elle appuie son travail majoritairement sur le background des danseurs et sur leur gestuelle naturelle. Cette fois-ci, les danseurs se lancent dans un travail de partenaire beaucoup plus élaboré et effectuent un travail remarquable dans l’utilisation

x le délit · le mardi 12 mars 2013 · delitfrancais.com

du seul élément de décors présent sur la scène: une machine à laver. Encore une fois, cependant, la compréhension laisse à désirer, mais avons-nous besoin de comprendre pour apprécier? Malgré tout, il ressort du spectacle une ambiance sonore impressionnante. En effet, dans les deux cas, les musiciens se trouvent directement sur scène et participent autant au spectacle que les danseurs. Dans Enchanted room, deux chanteurs, une soprano et un baryton nous enchantent avec une improvisation structurée. Cet a cappella, auquel se joignent rires et grincements de dents, y est pour beaucoup dans l’environnement mystérieux et inquiétant qui émane de la performance. C’est finalement l’utilisation des costumes qui est le plus impressionnant. Bien qu’il soit presque impossible de définir la signification de ces changements constants, les danseurs changent de costumes au fur et à mesure qu’ils se déplacent. Allant d’une nudité presque totale à une robe de bal, du maillot de corps à la robe de chambre, les danseurs utilisent leur accoutrement afin d’enrichir leur style d’une manière originale et surprenante. x

Gracieusité de Ernest Potters

Arts & Culture

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La Société des Publications du Daily présente la

SEMAINE DU JOURNALISME ÉTUDIANT 2013

S R A M 1 2 i d u e j U A S R A M 8 1 I D N U L DU Conférences

Ateliers

Carrière en journalisme Études en journalisme Pigiste Activisme et journalisme Journalisme dʼenquête

Édition et correction Photographie Design En coulisses

Restez à l’affût des prochaines nouvelles!

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