SOMMAIRE NUMÉRO 81
Belgique – Belgïe P.P. 4099 LIEGE X BC 1620
Bureau de dépot : Liège X P201031
N° 81 Périodique Trimestriel 1/2009 Janvier - Février - Mars 2009
Éditorial Pierre DE VISSCHER
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THÈMES
Les sportifs et les interactions stratégiques sous l’angle de la théorie des jeux expérimentale Éric DUGAS et Luc COLLARD
Exercer un métier du sexe opposé : quelles différences entre les hommes et les femmes ? Marie SUQUET et Pascal MOLINER
L’immigration et les droits de l’Homme dans les médias : une analyse représentationnelle en réseau Aline VALENCE et Nicolas ROUSSIAU
Représentations sociales de l’eau dans un contexte de conflits d’usage : le cas de la Sierra Nevada de Santa Marta, Colombie Oscar NAVARRO CARRASCAL
Approche normative de la motivation intrinsèque dans une situation intergroupe d’asymétrie de statut hiérarchique Andréa ADAM et Claude LOUCHE
Identification au lieu et aux pairs : quels effets sur la réussite scolaire ? Ghozlane FLEURY-BAHI, André NDOBO, Emmanuèle GARDAIR, Christine JEOFFRION et Aurore MARCOUYEUX
Mieux comprendre l’engagement psychologique : revue théorique et proposition d’un modèle intégratif Anne BRAULT-LABBÉ et Lise DUBÉ
TECHNIQUES D’ANIMATION
Une situation de formation au diagnostic et à l’intervention en organisation dans le cadre d’un (hyper)conflit : le cas de Jérémy (1) Daniel FAULX et Sophie DELVAUX
Une situation de formation à la conduite d’une négociation en contexte conflictuel : le cas de Jérémy (2) Sophie DELVAUX et Daniel FAULX
Notes de lecture
Les Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale
C.I.P.S. 1/2009
Les Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale
Les Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale
CIPS – N.09/1 ISSN : 0777-0707 ISBN : 9-782874-560842
Les Editions de l’Université de Liège
Cover CIPS 81.indd 1
9 782874 560842
Les Editions de l’Université de Liège 27/03/09 11:46
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Éditorial Pierre De Visscher Thèmes
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Les sportifs et les interactions stratégiques sous l’angle de la théorie des jeux expérimentale Éric DUGAS et Luc COLLARD
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Exercer un métier du sexe opposé : quelles différences entre les hommes et les femmes ? Marie Suquet et Pascal Moliner
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L’immigration et les droits de l’Homme dans les médias : une analyse représentationnelle en réseau Aline VALENCE et Nicolas ROUSSIAU
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Représentations sociales de l’eau dans un contexte de conflits d’usage : le cas de la Sierra Nevada de Santa Marta, Colombie Oscar NAVARRO CARRASCAL
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Approche normative de la motivation intrinsèque dans une situation intergroupe d’asymétrie de statut hiérarchique Andréa ADAM et Claude LOUCHE
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Identification au lieu et aux pairs : quels effets sur la réussite scolaire ? Ghozlane Fleury-Bahi, André Ndobo, Emmanuèle Gardair, Christine Jeoffrion et Aurore MARCOUYEUX
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Mieux comprendre l’engagement psychologique : revue théorique et proposition d’un modèle intégratif Anne Brault-Labbé et Lise Dubé Techniques d’animation
133
Une situation de formation au diagnostic et à l’intervention en organisation dans le cadre d’un (hyper)conflit : le cas de Jérémy (1) Daniel Faulx et Sophie Delvaux
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Une situation de formation à la conduite d’une négociation en contexte conflictuel : le cas de Jérémy (2) Sophie Delvaux et Daniel Faulx
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Notes de lecture
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Résumés
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Bulletin d’abonnement 2009
COMITÉ ÉDITORIAL Jean-Claude ABRIC, Université de Provence Guglielmo BELLELI, Université de Bari Jean-Claude DESCHAMPS, Université de Lausanne Jean MORVAL, Université de Montréal Serge MOSCOVICI, Laboratoire Européen de Psychologie Sociale, Paris Félix NETO, Université de Porto Juan Antonio PÉREZ, Université de Valencia Paul SCHMITZ, Université de Bonn
DIRECTEUR DE PUBLICATION Pierre DE VISSCHER, Université de Liège
DIRECTEURS ASSOCIÉS (2008-2010) Dominique ANSEL, Université de Besançon, France Thierry DEVOS, Université d’Etat de San Diego, EtatsUnis Daniel FAULX, Université de Liège, Belgique Catherine GARNIER, Université du Québec à Montréal, Canada
INDEXATION Les articles publiés dans les Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale, ainsi que les résumés, sont actuellement indexés par : - l’American Psychological Association (PsycINFO, PsycLIT, Psychological Abstracts) - Cambridge Scientific Abstracts (Sociological Abstracts) - l’Institut de l’Information Scientifique et Technique – CNRS (Pascal, Francis) - psychologie-sociale.org
ABONNEMENT ET ANCIENS NUMÉROS
Bernard GAFFIÉ, Université de Toulouse Kamel GANA, Université de Nancy Pilar GONZALEZ, Université de Barcelone Robert-Vincent JOULE, Université de Provence Sylvie JUTRAS, Université du Québec à Montréal René KAËS, Université Lumière, Lyon II Simone LANDRY, Université du Québec à Montréal Stéphane LAURENS, Université Rennes 2 Giovanna LEONE, Universités de Bari et de Rome Jean-François LEROY, Université de Liège Jacques-Philippe LEYENS, Université Louvain-la-Neuve Edmond Marc LIPIANSKY, Université Paris X Monique LUSSIER, Université d’Ottawa Jean MAISONNEUVE, Université Paris X Jean-Michel MASSE, Hautes Etudes Commerciales, Montréal Michel MORIN, Université de Provence Gabriel MOSER,Université Paris Descartes Gabriel MUGNY, Université de Genève Adrian NECULAU, Université de Iasi Jacques NEYRINCK, Ecole Polytechnique, Lausanne Dominique OBERLE, Université Paris X Dario PAEZ, Université de San Sebastian François RIC, Université de Poitiers Michel-Louis ROUQUETTE, Université Paris Descartes Eric TAFANI, Université de Provence Pierre TAP, Université de Toulouse Hubert TOUZARD, Université Paris Descartes Sabine VANHULLE, Université de Genève Yves WINKIN, École Normale Supérieure, Lyon
APPEL AUX AUTEURS La revue est ouverte à toutes les personnes concernées par les pratiques, phénomènes, processus qui participent à la fois du psychologique et du social.
Éditions de l’Université de Liège – Céfal Diffusion 31 boulevard Frère-Orban 4000 Liège, Belgique
On y accueille :
Tél. +32(0)4 254 25 20 Fax. +32(0)4 254 24 40 Courriel : < editulg.cefal@ulg.ac.be>
2. des notes de travail, préludes à des investigations ultérieures plus fouillées ou apportant des résultats négatifs ayant une portée heuristique effective ;
Les anciens numéros, jusqu’en 2002, sont disponibles auprès de <Pierre.DeVisscher@ulg.ac.be>. Plus d’informations sur notre site internet (http://www.cips. be). Pour les numéros suivants, à partir de 2002, contacter directement Céfal Diffusion. Les Cahiers de Psychologie Sociale (1979-1988) sont aussi l’objet de conditions avantageuses. S’adresser à Pierre De Visscher.
3. les résultats d’enquête ou de recherches-action, des études de cas ;
CONSEIL SCIENTIFIQUE – COMITÉ DE LECTURE Jeanine BAIWIR, Conservatoire de Liège Jean-Léon BEAUVOIS, Université de Nice Laurent BEGUE, Université de Grenoble Herbert BLUMBERG, Goldsmith’s College, Université de Londres Marcel BOLLE DE BAL, Université de Bruxelles Christine BONARDI, Université de Nice Jean-Paul BROONEN, Université de Liège Fabrice BUSCHINI, Université de Genève Olivier CORNEILLE, Université Louvain-la-Neuve Michaël DAMBRUN, Université de Clermont-Ferrand Benoît DARDENNE, Université de Liège Bernard DE HENNIN, Facultés Catholiques de Lille Sylvain DELOUVÉE, Université Rennes 2 Willem DOISE, Université de Genève Marcel FRYDMAN, Université de Mons
1. des articles de recherche notamment expérimentale ;
4. des articles critiques, méthodologiques ou épistémologiques ; 5. des synthèses de points ou domaines particuliers, des exposés ou analyses théoriques ou historiques ; 6. la description d’instruments d’investigation, d’animation ou d’intervention ; 7. la recension d’ouvrages et de notes de lectures ; 8. des informations, notes d’actualité, billets d’humeur ou débats concernant le psycho-social.
Correspondance scientifique Les Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale c/o Professeur Pierre De Visscher 75, Route de Liège 4141 Louveigné Belgique Tél. : +32 (0)4 360 83 70 Fax : +32 (0)4 360 95 03 Courriel : <Pierre.DeVisscher@ulg.ac.be>
ÉDITORIAL
Pierre De Visscher
Avec ce premier numéro de l’année 2009, notre périodique entre dans sa trente deuxième année. C’est en effet en 1978 que furent fondés les Cahiers de Psychologie Sociale (C.P.S.), lesquels furent à notre connaissance le premier périodique en langue française consacré à la psychologie sociale. Quarante numéros parurent, édités par le service de psychologie sociale de l’Université de Liège. En 1989 les Cahiers changèrent d’intitulé en devenant Les Cahiers Internationaux de Psychologie sociale (C.I.P.S.). Ils furent alors édités par De Boeck – Université sous un autre format : de 1989 à 2001, 52 numéros parurent. Depuis 2002 les Cahiers Internationaux de Psychologie sociale sont confiés aux Éditions de l’Université de Liège et paraissent sous une autre forme : les 32 numéros parus l’ont été en format A4 avec deux colonnes par page. En cette année 2009, après avoir longuement hésité, en choisissant le format A5, une colonne par page, nous avons pris l’option de la maniabilité. Nous espérons que les lecteurs en seront satisfaits. C’est depuis 2002 que Sylvain Delouvée (qui nous a apporté depuis 2000 une collaboration enthousiaste) exerce les fonctions de secrétaire de rédaction. Sa compétence informatique (doublée d’une grande patience) m’a amené, alors que je me définis comme l’un des derniers dinosaures survivants de l’ère préinformatique, à faire le saut du courrier postal au courriel, des versions papier à la version électronique. Ces dernières années Sylvain a investi un temps considérable dans le développement des C.I.P.S. en réalisant personnellement, notamment, la mise en page de chaque numéro. C’est également grâce à son action vigilante qu’à partir de cette année les C.I.P.S. disposent d’une version électronique via cairn. D’ici peu d’ailleurs nos abonnés seront en mesure de prendre connaissance, en ligne, de l’ensemble des articles parus non seulement dans les Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale mais aussi des anciens numéros, certains épuisés, des Cahiers de Psychologie Sociale. Hélas, le caractère chronophage de son actuel travail de jeune enseignantchercheur dans le cadre de l’Université française ne lui permet plus de mener de front les deux tâches : carrière universitaire et secrétariat des Cahiers. Il s’intègrera dorénavant au sein des membres de notre Conseil scientifique et du Comité de lecture, lesquels nous apportent compétence et précieuse collaboration.
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Je tiens à le remercier de la façon la plus chaleureuse qui soit, pour son long et désintéressé investissement de toutes ces années. Nous lui devons beaucoup. Je remercie aussi vivement les quatre directeurs associés Catherine Garnier, Dominique Ansel, Thierry Devos et Daniel Faulx, qui depuis l’an passé gèrent le processus des expertises assurant la quête des lecteurs d’articles et permettant par leur analyse de faire les choix si délicats d’acceptation, de report ou de refus des articles soumis pour publication. Outre les membres de notre Conseil scientifique et Comité de lecture, d’autres enseignants-chercheurs ou chercheurs ont accepté d’apporter leur expertise à évaluer les articles soumis. Eux aussi, sans lesquels via le processus évaluatif un périodique international ne peut fonctionner valablement, méritent de vifs remerciements. Bien entendu, le dit processus ne change pas. Grâce à l’action des directeurs associés il devrait même être fluidifié et plus rapide. Il s’agit toujours d’une expertise en double aveugle réalisée par deux ou trois lecteurs. Les manuscrits sont toujours à envoyer à la même adresse : <Pierre.DeVisscher@ulg.ac.be>, adresse à partir de laquelle les manuscrits sont répartis entre les directeurs associés qui les confient aux évaluateurs de leur choix. Un énorme merci surtout à nos infatigables traducteurs Giovanna Leone, Juan Antonio Pérez, Félix Neto et Paul Schmitz, qui, certains depuis quinze ans, assurent bénévolement, quatre fois l’an, et avec la même amicale conscience, la traduction des résumés de chaque article respectivement en italien, espagnol, portugais, allemand. Et alors que chaque année, je les interroge pour savoir s’ils n’entrevoient pas d’abandonner cette charge somme toute lourde, je reste impressionné de ce qu’ils m’assurent chaque fois de leur amicale volonté de poursuivre cette tâche délicate. Cependant cette année Juan Antonio Perez a demandé grâce, lui qui assurait les resumenes depuis décembre 1994 : qu’il soit chaleureusement remercié pour toutes ces années de bienveillante, compétente et amicale collaboration. Un vif merci à Oscar Navarro Carrascal qui nous a aimablement dépanné pour le présent numéro. Bien entendu nous exigeons de chaque auteur un résumé de leur article en langue anglaise. Nous ne contestons aucunement la priorité actuelle de l’apport scientifique anglo-saxon principalement américain. La langue anglaise s’affirme pour l’heure comme « la » langue scientifique internationale, comme l’étaient jadis l’allemand et le français, comme le seront peut-être un jour le chinois voire l’arabe. Et si sa prédominance est effective dans bien des secteurs, son emploi est surtout aisé tant que la méthodologie est quantitative. Le récent débat européen sur la classification des périodiques a amené contestations, perplexité et interrogations. Est-il indiqué de privilégier ce qui est quantitatif et / ou expérimental, de sous-évaluer les articles de synthèse et les études de cas ? Faut-il mépriser les revues qui, hier, ne disposaient pas d’une indexation « dans les bases de données internationales » et, demain, dont le « facteur d’impact » serait insuffisant ce qui est automatique pour tout article écrit dans une langue autre que l’anglaise ? Et quel que soit leur intérêt prospectif, faut-il se rallier aux seuls indices scientométriques (indice h et consorts) ? D’ailleurs dans bien
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des secteurs des sciences humaines traduire c’est trahir ! Une langue est-elle autre chose qu’un mode spécifique de représenter la réalité ? La carte serait-elle devenue le territoire ? J’ai fait un relevé rapide, dans une liste d’un millier des périodiques en sciences humaines, des périodiques classés « A ». Je n’en ai trouvé que deux qui ne soient pas en langue anglaise : une revue d’épidémiologie en espagnol et une revue de psychosomatique en allemand. Une telle supériorité anglo-saxonne estelle crédible ? Cette supériorité ne serait-elle pas largement autoproclamée ? La commission française qui a examiné le classement des périodiques a du se résoudre à relever au niveau B’ les périodiques dans lesquels nos scientifiques psychologues sociaux écrivent lorsqu’ils ne peuvent ou qu’ils se refusent à écrire en anglais. Pour certains, écrire en anglais est un obstacle irréductible, d’autres refusent de se plier à ce qu’ils considèrent comme un processus de colonisation culturelle. Quoiqu’il en soit, si notre périodique a une vocation internationale explicite, il vise à atteindre avant tout le monde de la francophonie où j’ai la faiblesse de croire que la recherche psychosociale est d’excellente qualité. Par ailleurs, nous gardons un souci d’européanisation : aussi les résumés de chaque article continueront-ils à être traduits en italien, espagnol, portugais et allemand. Nous envisageons à l’avenir de consacrer un numéro sur quatre à un thème spécifique. C’est avec plaisir que nous accueillerons la proposition de collègues de prendre sur eux la responsabilité d’un numéro à thème et, en tant que directeur des Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale, je tiens à leur exprimer une reconnaissance anticipative pour le travail qui sera le leur. Nous continuerons bien entendu à publier des notes de lecture, à prévoir une rubrique « Opinions et points de vue » et à réserver une place aux techniques d’animation. Restant ouverts à toute suggestion et critique, nous serions particulièrement intéressés d’entendre vos réactions à l’égard de notre nouveau format « de poche » ? À vous lire en toute amitié. Le directeur de la publication, Pierre De Visscher Professeur émérite, Université de Liège.
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Les sportifs et les interactions stratégiques sous l’angle de la théorie des jeux expérimentale
Sportsmen and strategic interaction from the point of view of experimental games theory
Éric DUGAS* et Luc COLLARD** * Groupe d’Études pour une Europe de la Culture et de la Solidarité – GEPECS, ea 3625, Université Paris Descartes, Paris, France ** Laboratoire « Information, Organisation et Action » – IOA, ea 4260, Université de Caen Basse-Normandie, Caen, France
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Des sportifs jouant à un jeu stratégique du type «dilemme des prisonniers», vont-il choisir la coopération ou bien l’opposition pour fructifier leurs gains ? Deux protocoles expérimentaux sont mis en place. Dans le premier, l’obtention du score annoncé s’obtient par l’accomplissement moteur. Dans le second, la variable provoquée « interaction motrice » est absente ; les scores obtenus à l’issue de l’annonce simultanée des stratégies initiales sont acquis. Les résultats révèlent que les sportifs privilégient significativement le duel et la méfiance plutôt que la coopération et l’altruisme alors que le but du jeu n’était pas fondé sur la compétition. Ces constats sont plus marqués au cours des réalisations motrices. Ces décisions inadaptées sont symptomatiques de la reproduction des stratégies sportives. Théorie des jeux – Dilemme des prisonniers – Décision motrice – Sportifs – Stratégie mixte.
Are sportsmen playing a strategic game like “prisoner dilemma” going to choose cooperation or opposition in order to make their money work for them? Two experimental protocols are set up. In the first one, obtaining the score announced is achieved through a motor action. In the second one, the “motor interaction” variable does not exist; scores obtained after the simultaneous declaration of the initial strategies are acquired. Results show that although the game isn’t based on competition, sportsmen significantly favour duels and suspicion instead of cooperation and altruism. These statements of fact are more pronounced while motor actions are achieved. These unsuitable decisions are symptomatic of the reproduction of sport strategies. Theory of the games – Prisoners’dilemma – Motor decision – Athletes, mixed strategy.
Adresses de correspondance : Éric Dugas, 36 rue Théophile Gautier, 91310 Leuville-sur-Orge, France. Courriel : <eric. dugas@free.fr>. Luc Collard, 42 rue écuyère, 14000 Caen, France. Courriel <luc.collard@orange.fr>.
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Les sportifs et les interactions stratégiques
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La théorie des jeux appelée aussi théorie de la décision permet d’explorer les comportements rationnels des individus face à des situations dans lesquelles des choix stratégiques s’imposent. Comme le soumet Gaël Giraud, la théorie des jeux peut se préoccuper de types de problématiques comme suit : « comment un semblant d’« ordre » peut-il émerger d’une situation apparemment chaotique sans qu’une intention directrice extérieure aux préférences particulières de chaque individu ne puisse être tenue pur responsable de ladite émergence ? » (2000, p. 10). Dans l’univers de la théorie des jeux, le jeu se définit par « tout jeu comporte (au moins) une liste de joueurs, un ensemble de choix possibles pour chacun d’entre eux et une fonction qui donne leurs gains dans toutes les éventualités possibles (les issues qui résultent des divers choix que peuvent faire les joueurs » (Guerrien, 2002, p. 7).
Par sa matrice de gains (cf. tableau 1), le célèbre jeu du « dilemme des prisonniers » est à ce titre en tout point exemplaire. En effet, ce jeu à deux joueurs – appelé jeu à « somme non nulle » ou jeu semi-coopératif (le gain des vainqueurs n’est pas égale à la perte des battus) – permet de mettre au jour le dualisme entre l’intérêt particulier (l’égoïsme) et l’intérêt collectif (la coopération). Ce conflit d’intérêts est chose commune dans bon nombre de situations sociales (Boudon, 1977). Certaines pratiques sportives font état de ces situations « d’interactions stratégiques » (Eber, 2004). C’est le cas notamment d’une échappée au cours d’une course cycliste, de deux pilotes de Formule 1 lors d’un grand prix. Généralement, le sport privilégie les « duels », « jeux à 2 joueurs et à somme nulle » ou strictement compétitif dans les oppositions entre deux adversaires (les gains des vainqueurs et les pertes des battus s’annulent ; +1 – 1 = 0) : par exemple, les duels interindividuels (jeux de combat et jeux raquettes) ou inter-équipes (sports collectifs sur un match, etc.). Ce contexte compétitif, dans lequel des sportifs recherchent la victoire, la domination de l’un sur l’autre pour vaincre, va-t-il favoriser la coopération ou bien l’intérêt personnel ? Le questionnement est d’importance quand il est banal d’entendre certains pédagogues, éducateurs ou politiques prôner les vertus éducatives déployées dans le sport (dont particulièrement celles du lien social et de la solidarité). Autrement dit, devant une situation dans laquelle deux joueurs rationnels doivent maximiser leurs gains selon le rapport1 du jeu donné (le dilemme des prisonniers), comment peuvent se comporter des sportifs (pratiquants compétiteurs) ? Vont-ils opter pour l’altruisme ou pour la méfiance ? Leur choix sera-t-il rationnel et judicieux ? Peut-on suggérer qu’un habitus sportif puisse influencer les décisions dans un tel jeu ? Les expériences présentées ici ne se contentent pas d’utiliser la théorie des jeux in vitro (en laboratoire), mais plutôt in vivo, c’est-à-dire en situation expérimentale au plus près des comportements réels. Car si les décisions prises varient parfois des prédictions théoriques en fonction des caractéristiques des individus tels que le sexe, l’âge, le niveau socio-culturel, la personnalité, etc. (Eber, 2006), elles varient aussi selon le contexte d’accomplissement ; les premiers pas dans la théorie des jeux expérimentale font état d’expériences dont les paiements des gains sont réels (Giraud, ibid.). Les comportements sont-ils conformes aux prévisions d’équilibre de
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CIPS N°81 – 2009 – pp. 7-24
la théorie des jeux ? En tout cas, fort est de constater que ces « expériences de terrain » font récemment des émules chez les chercheurs d’outre-atlantique (Camerer, 2003). Pour notre part, nous étudions plus particulièrement les comportements des sportifs dans le feu de l’action motrice (Bordes, Collard et Dugas, 2007). 1. Présentation du dilemme des prisonniers Expliquons rapidement avant toute chose le jeu du dilemme des prisonniers. La police interpelle deux suspects soupçonnés d’un délit commis ensemble, mais les preuves flagrantes manquent. Pour les faire condamner, le juge offre un marché ; si vous avouez votre délit, vous n’aurez pas la même peine que si vous le niez. Les termes du marché sont présentés aux prisonniers (P1 et P2) de manière séparée : si tu avoues alors que l’autre nie, tu auras une remise de peine pour avoir aidé la justice (1 an de prison) et lui sera emprisonné pour 10 ans. La réciproque est vraie. Si vous niez tous les deux, vous aurez chacun 3 ans de prison, du fait du manque de preuves. Enfin, si vous avouez tous les deux, vous écopez de 6 ans de prison. Tout dépend du comportement de l’autre. Comment le prisonnier P1 va anticiper ce que fait l’autre sachant que P2 va faire de même ? Vont-il choisir la coopération et la confiance (en niant tous les deux, ils écopent de 3 ans), ou vont-ils poursuivre leur stratégie dominante (ils cherchent à maximiser leur gain) et avouer, quitte à prendre respectivement 6 ans de prison ? Le jeu ainsi décrit conduit les deux prisonniers à choisir entre l’intérêt personnel et l’intérêt collectif. Mais l’issue du jeu est courue d’avance, même si le juge les laissait se mettre d’accord avant de divulguer leur décision séparément. En effet, si P1 et P2 décident de coopérer et donc de nier, rien ne dit qu’au dernier moment l’un des deux va préférer avouer pour n’écoper que d’1 an de prison et laisser emprisonner le second prévenu pour 10 ans ? À leur place seriez-vous prêt à courir ce risque ? En fait, le dilemme des prisonniers « attire l’attention sur le fait que le choix – apparemment rationnel – par chaque joueur de sa stratégie dominante se traduit par des gains sous-optimaux pour eux (inférieurs à ceux qu’ils pourraient être si d’autres choix avaient été faits) » (Guerrien, ibid., p. 22). Le conflit est porté à son paroxysme ; ils cherchent à gagner (à croupir le moins possible en prison) et paradoxalement, ils vont perdre car quoi que fasse l’autre, chacun a intérêt à avouer ! Tableau 1 : Matrice des gains proposés aux deux prisonniers sur le modèle du «dilemme des prisonniers». Dans chacune des quatre cases, le premier chiffre entre parenthèses correspond au prix (ce que l’on peut «gagner» en nombre d’années de prison) du prisonnier P1 (joueur de ligne) et le second chiffre au prix de P2 (joueur de colonne). On voit très vite que paradoxalement, leur stratégie dominée (nier le délit) est une issue du jeu plus favorable car la stratégie dominante conjointe conduit à une situation sous-optimale (6 ans de prison). Le dilemme se situe donc entre les logiques personnelle et collective.
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Avoue
Nie
Avoue
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Nie
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Exercer un métier du sexe opposé : quelles différences entre les hommes et les femmes ?
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To have a job of the opposite sex : Which differences between men and women ?
Marie Suquet et Pascal Moliner Laboratoire de Psychologie : Psychopathologie et Société, ea 4210, Université Paul Valéry – Montpellier III, Montpellier, France
Il existe des traits consensuellement attribués à chacun des sexes. Dans cette recherche, nous nous sommes intéressés à l’attribution de ces traits stéréotypiquement sexués à des cibles masculines et féminines présentées dans des contextes professionnels contre-stéréotypés. Nous avons aussi mesuré la perception de la normalité des situations et la perception de la compétence des cibles. Les principaux résultats montrent que l’attribution des traits stéréotypés dépend plus du contexte que du sexe de la cible. Ils montrent aussi que les situations contre-stéréotypées sont sujettes à un fort biais de désirabilité sociale notamment celles à propos de la cible féminine. En outre, cette dernière est la seule dont la perception des compétences soit corrélée à l’attribution des traits. Représentations intergroupes – Sexe – Contexte contre-stéréotypé – Désirabilité sociale – Attribution.
There are traits which are consensually ascribed to each sex. In this research, we work on the attribution of these stereotypical traits of sex to masculine and feminine target in counter-stereotypic contexts. We value the perception of the normality of the situation and the perception of the competence of the target too. The main results show that the attribution of stereotypical traits is more linked by the context than by the sex of the target. And that the counter-stereotypical situations are influenced by the social desirability, in particular, these about the feminine target. The perception of the competence is correlated to the attribution of traits only for the feminine target. Intergroup representations – Sex – Counter-stereotypical context – Social desirability – Attribution.
Adresses de correspondance : Marie Suquet, Laboratoire de Psychologie : Psychopathologie et Société, Université Paul Valéry - Montpellier III, Route de Mende, 34199 Montpellier cedex 5, France. Courriel : <marie.suquet@free.fr>. Pascal Moliner, Laboratoire de Psychologie : Psychopathologie et Société, Université Paul Valéry - Montpellier III, Route de Mende, 34199 Montpellier cedex 5, France. Courriel : <pascal.moliner@univ-montp3.fr>.
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Exercer un métier du sexe opposé
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Il est de sens commun d’attribuer des traits personnologiques particuliers pour les hommes et pour les femmes. En psychologie sociale, que ce soit dans le domaine des représentations intergroupes ou de la catégorisation sociale des personnes, des recherches ont mis à jour ces traits consensuellement attribués à chacun des sexes. C’est ainsi, par exemple, que les femmes sont généralement décrites avec des adjectifs dits expressifs comme « chaleureuses » ou « sensibles », tandis que les hommes sont décrits en des termes instrumentaux comme « décidés » ou « indépendants ». L’attribution de ces traits sous-tend des rôles différenciés pour chacun des sexes dans notre société, en effet, nous n’attendons pas le même comportement d’une personne qualifiée de douce que d’une personne qualifiée de dominatrice. Il convient cependant de comprendre pourquoi tel trait de personnalité est associé à tel groupe en fonction de son statut social. Ici, plusieurs auteurs (Jost et Banaji, 1994 ; Sidanius et Pratto, 1999) suggèrent l’existence d’un processus de maintien du statu quo social. Les traits généralement associés à un groupe donné permettraient aux membres de ce groupe de rationaliser ou de justifier leur position sociale. Toutefois, il arrive que pour des raisons diverses, un individu déroge au rôle qui lui est traditionnellement dévolu. C’est par exemple le cas d’une femme ou d’un homme qui exerce un métier traditionnellement associé à l’autre sexe. C’est aussi le cas, des femmes qui occupent des positions hiérarchiques élevées. Dans tous ces cas, on peut supposer que les associations entre statut et traits de personnalité se trouvent prises en défaut. Pouvons-nous continuer à décrire avec des traits typiquement masculins un homme qui exerce un métier traditionnellement féminin ? Allons nous attribuer des traits féminins à une femme qui occupe une position de pouvoir ? Les variations que l’on pourra observer dans ces différents cas sont-elles les mêmes pour les hommes et pour les femmes ? Ont-elles les mêmes répercussions sur les compétences perçues des uns et des autres ? C’est pour tenter de répondre à ces questions que nous avons réalisé cette recherche. 1. Représentations intergroupes hommes/femmes
Les représentations intergroupes sont des ensembles de connaissances élaborées par des groupes sociaux en interaction (Deschamps, 1973 ; Doise, 1973). Dans le cas des représentations intergroupes homme-femme, les hommes ainsi que les femmes attribuent consensuellement des traits personnologiques au groupe des hommes et au groupe des femmes. Plusieurs études sur ces représentations mettent en évidence ces traits stéréotypiquement attribués aux femmes (ex : douceur, compréhension etc.) et aux hommes (ex : domination, ambitieux etc.) (Bem, 1974 ; Vinet et Moliner, 2006). Parsons et Bales (1956) parlent de traits instrumentaux pour les hommes, c’est-à-dire des traits qui se rapportent à la direction des autres ; et expressifs pour les femmes, c’est-à-dire des traits à orientation interpersonnelle. Ces représentations intergroupes ont une fonction de « system justification », elles servent à justifier la position sociale des groupes (Jost et Banaji, 1994). Dans notre cas, les hommes justifieraient leur position de dominants dans notre société et les femmes rationaliseraient leur position dominée. De la même façon que les repré-
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CIPS n°81 – 2009 – pp. 25-39
sentations intergroupes légitiment les positions asymétriques des hommes et des femmes dans notre société, celles-ci sont aussi à l’origine de la division sexuée du travail (Cejka et Eagly, 1999). Lorenzi-Cioldi (1988) propose une typologie des groupes suivant leurs positions asymétriques dominante ou dominée dans la société. C’est-à-dire que la représentation que nous nous faisons des femmes (groupe dominé dit « agrégat ») est plus homogène que celle que nous nous faisons des hommes (groupe dominant dit « collection »), que nous soyons de sexe masculin ou féminin. Là encore, cette asymétrie serait la conséquence des disparités de statut entre hommes et femmes. Une des explications de ce phénomène serait que les membres des groupes dominants, ayant moins de réticences à enfreindre les normes de leur propre groupe, feraient preuve de plus de variabilité dans leurs opinions et leurs conduites. Au contraire, les membres des groupes dominés feraient preuve de plus de conformisme parce qu’ils seraient plus sensibles au contrôle social (Chappe, Brauer et Castano, 2004). 2. Contextes stéréotypés et contre-stéréotypés De fait, les hommes occupent dans nos sociétés occidentales une position supérieure à celle des femmes. Plusieurs indicateurs socio-économiques le confirment (écarts de salaire, accès aux postes d’encadrement, représentation politique, etc.). Il résulte de cette situation que le pouvoir est généralement associé au « masculin ». Mais il en résulte aussi que, quel que soit son sexe, un individu qui occupe une position de pouvoir se voit souvent attribuer des caractères masculins. Par ailleurs, certains métiers, on le sait, sont plutôt exercés par des hommes ou par des femmes, c’est par exemple le cas du métier d’infirmière ou de celui de pompier et lorsqu’il s’agit d’indiquer les traits nécessaires pour exercer ces métiers, les individus choisissent des traits congruents du point de vue de leur marquage sexué. Plusieurs recherches illustrent ces phénomènes. Par exemple, dans une étude de terrain, Durand-Delvigne (1997), demande à des femmes travaillant dans des secteurs masculins ou féminins et de haut ou de bas statut de s’auto-décrire à l’aide de l’échelle de Bem (1974). Elle observe que les femmes de haut statut obtiennent un score de féminité plus faible et un score de masculinité plus fort que celles de bas statut. Par la suite, elle interroge des ouvriers et des ouvrières travaillant dans des secteurs soit masculins soit féminins. Elle leur demande de décrire leur endogroupe, c’est-à-dire le groupe des ouvriers (sans précision du sexe) grâce à l’échelle de Bem mais aussi de décrire le groupe dominant c’est-à-dire le groupe des cadres. Les résultats montrent un effet du type de métier. Les hommes en milieu masculin ont un score de masculinité supérieur aux trois autres groupes, les hommes travaillant en secteur féminin ont un score moyen équivalent à celui des groupes de femmes et inversement pour le score de féminité. Mais on observe aussi un effet du statut. Les sujets décrivent les cadres en termes plus masculins et moins féminins que les ouvriers.
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L’immigration et les droits de l’Homme dans les médias : une analyse représentationnelle en réseau
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The immigration and the human rights in the media : An analysis of the social representations in network
Aline VALENCE et Nicolas ROUSSIAU Laboratoire de Psychologie : éducation, cognition, développement – LABÉCD, ea 3259, Université de Nantes, Nantes, France
Cette recherche a pour objectif de tester la validité d’une approche systémique des représentations sociales. Avec l’idée que celles-ci fonctionnent en réseau dans l’organisation des connaissances, nous analysons dans cette recherche les représentations médiatiques des droits de l’Homme et de l’immigration dans les quotidiens Libération et Le Figaro sur une période de six ans. Un traitement effectué par ALCESTE sur le corpus total (1075 articles) fait ressortir une structuration du discours en 8 classes lexicales stables ; cette organisation traduit le positionnement idéologique des quotidiens qui se pose comme lieu d’ancrage pour les deux représentations et met à jour des réseaux de signification pour ces mêmes représentations.
The aim of this research is to test the validity of a systematic approach of the social representations. We hypothesize that knowledge is organized like a network of social representations. And according to this, we analyse in this research the media representations of human rights and immigration in daily papers Libération and Le Figaro over a period of six years. A treatment made by ALCESTE on the complete corpus (1075 articles) highlights a structuralization of the speech in eight stable lexical classes. This organization corresponds to the ideological location of the daily papers which arises as place of anchoring for both representations and updates networks of meaning for these same representations.
Représentations sociales – Réseau – Droits de l’Homme – Immigration – Idéologie.
Social representations – Network – Human rights – Immigration – Ideology.
Adresses de correspondance : Aline Valence, Université de Nantes, UFR de Psychologie, Chemin de la Censive du Tertre, 44312 Nantes cedex 3, France. Courriel : <aline.valence@univ-nantes.fr>. Nicolas Roussiau, Université de Nantes, UFR de Psychologie, Chemin de la Censive du Tertre, 44312 Nantes cedex 3, France. Courriel : <nicolas.roussiau@univ-nantes.fr>.
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L’immigration et les droits de l’Homme dans les médias
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1. L’analyse systémique des représentations sociales Même si encore minoritaires, depuis plusieurs années des travaux de psychologie sociale s’attachent à déceler des structures inter-représentationnelles au sein de la pensée sociale et développent alors une perspective d’analyse systémique des représentations sociales (Brandin, Choulot et Gaffié, 1998 ; Larrue, Bonardi et Roussiau, 2000 ; Milland, 2001). Ces dynamiques de recherche se basent sur le constat des limites théoriques atteintes dans les courants traditionnels d’analyse des représentations sociales. En effet, cette tradition faisait apparaître ces dernières comme des totalités organisées ayant un fonctionnement autonome les unes des autres. Or, au vu de la complexité de la pensée sociale et de la socialité des éléments qui la composent, il est difficilement envisageable de penser que les représentations se juxtaposent, se différencient et évoluent de manière indépendante dans l’organisation des connaissances. Il y a là l’idée que dans un champ social donné, les représentations se soutiennent, ne sont pas atomisées ; cela parce qu’elles n’ont pas (toutes) des frontières hermétiques, que leurs contours peuvent apparaître flous (Fraïssé, 2000) et qu’elles peuvent partager des centres communs.
On retrouve ici la question de l’interdépendance des champs représentationnels, pour laquelle des auteurs ont déjà mis en exergue – tant au niveau descriptif que fonctionnel – l’existence de liens spécifiques pouvant relier plusieurs représentations et en conséquence de structures particulières : par exemple, Vergès (1992) évoque des relations d’ « emboitement » qui alimentent un rapport de normativité pour les représentations de l’argent et de la banque qui vont de la sorte se hiérarchiser ; Milland (id.) parle lui de relation de « réciprocité » entre les représentations du travail et du chômage qui s’influencent alors mutuellement ; Brandin et al. (id.), d’avantage axés sur la dynamique représentationnelle, évoquent pour leur part une « transformation par diffusion » de la représentation de la chasse quand la représentation de l’écologie se trouve mise en cause, montrant ainsi que la transformation d’une représentation peut se répercuter sur d’autres représentations connexes dans un même champ social. Enfin, nous pouvons citer les travaux de Bonardi, De Piccoli, Soubiale et Larrue (1994) sur les représentations de l’Europe et de la politique qui montrent, au-delà de la nature des liens qui unissent ces deux objets, que ceux-ci sont appréhendés par les sujets de leur enquête sur un même registre sociocognitif : précisément, lorsque les personnes associent à la politique une représentation chargée évaluativement (registre connotatif), ils mobilisent une représentation de même nature s’agissant de l’Europe. Il y a donc des objets qui tiennent ensemble, qui sont liées dans des mêmes réseaux de sens parce qu’ils rendent justement compatibles un ensemble de croyances, d’attitudes, de prises de positions et finalement de représentations sociales. Or, cet agencement ne se fait pas au hasard. Comme l’ont fait les auteurs des travaux précités, il est alors indispensable de convoquer ici l’idéologie pour saisir ce processus de mise en lien en ce qu’elle intervient comme facteur de détermination de ce processus (Rouquette, 1996).
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CIPS n°81 – 2009 – pp. 41-63
L’idéologie très usitée en science sociale, présente une grande pluralité de sens avec une ampleur compréhensive telle, qu’elle n’a qu’une très faible valeur heuristique. On l’étudie soit comme « totalité » spécifiée en des contenus, soit comme « particularité » exprimant les différents groupes d’intérêt ou de pouvoir dans la polémique politique (Jodelet, 1991). Elle est également souvent abordée comme idéologie dominante, mais les termes dans lesquels elle s’exprime alors restent souvent très vagues. Pour ne pas glisser dans une mise en perspective des différentes acceptations de l’idéologie – qui ne saurait-être notre propos ici – nous retiendrons simplement la définition développée par ceux qui ont choisi d’aborder son implication dans la dynamique représentationnelle : « l’idéologie tendrait à se présenter comme une construction intellectuelle et historique, soutenu par un système quasi-logique, un « savoir systématique et organisé sur la société » (Doise, 1990, p. 147), tandis que les représentations sociales sont des blocs divers constituant des savoirs de sens commun attachés au langage courant » (Bonardi, Larrue et Marchand, 1995, p. 108). L’idéologie serait à concevoir de cette manière comme « […] un ensemble de condition et de contraintes cognitives présidant à l’élaboration d’une famille de représentations sociales. Elle se situe conceptuellement à un niveau de généralité plus grand que ces dernières […]. En d’autres termes, les conceptions génératrices communes et le système de valeurs en amont de ces contenus thématiques particuliers sont précisément d’ordre idéologique » (Rouquette, 1996, p. 170). Cette entrée de l’idéologie au sein des processus représentationnels pourra alors être perceptible au chercheur dès lors qu’il la relativisera face aux évaluations quotidiennes que font les acteurs sociaux des objets de leur environnement. C’est ce qu’ont entreprit de cerner Bonardi et al. (1995) dans une recherche portant sur les représentations de l’Europe que ces auteurs ont étudiées conjointement aux pratiques sociales (relatives à l’Europe) des sujets de l’enquête. Leurs résultats révèlent l’existence de deux dimensions distinctes pour cet objet, l’une liée à la représentation elle-même, l’autre à l’idéologie. La représentation sociale de l’Europe serait déterminée par une idéologie européenne, elle-même sous l’emprise des pratiques sociales et de l’idéologie politique des sujets. Pour cette dynamique représentationnelle, les auteurs concluent à une action directe des pratiques sur l’idéologie européenne mais non pas sur la représentation de l’Europe en elle-même, ou alors de manière indirecte, c’est-à-dire médiatisée par l’idéologie européenne : on constate ainsi que la conduite est passée au tamis de l’idéologie avant d’être reparticularisée au travers d’une représentation (id.). Ce type d’étude, montre que l’idéologie présente donc aussi un niveau pratique et qu’elle ne saurait rester à une simple acceptation de savoir générique dont l’expression ne pourrait être opérationnalisable. Nous estimons essentiel de poursuivre ces perspectives ouvertes et, de l’avis de Beauvois et Joule (1981), d’aller chercher pour cela l’expression pratique de l’idéologie dans l’organisation des discours où se jouent les rapports symboliques et conflits entre groupes sociaux.
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Représentations sociales de l’eau dans un contexte de conflits d’usage : le cas de la Sierra Nevada de Santa Marta, Colombie
Social representation of water
Oscar NAVARRO CARRASCAL Groupe de Recherches en Sciences Sociales sur l’Amérique latine – GRESAL, MSH-Alpes, Grenoble, France
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L’eau occupe aujourd’hui la scène politique mondiale. L’objectif de ce travail a été donc de mettre en évidence les différentes conceptions attachées à l’eau. Le terrain d’étude est une région théâtre de conflits permanents liés à l’eau : la Sierra Nevada de Santa Marta, le massif montagneux de littoral le plus haut au monde, situé au nord de la Colombie. Dans ce site cohabitent des groupes culturellement divers : les peuples indiens, des paysans locaux et les habitants des villes alentour. Sacrée pour les uns, marchandise pour les autres, l’eau se situe au cœur des conflits. Nous avons mis en évidence deux représentations sociales différentes : écologique et utilitariste, expliquées fondamentalement par la distinction de valeurs culturelles, mais aussi par la différence de cadres de vie et de pratiques liées à la source.
Water became today one of the main concern on the international political scene. The objective of our research is to underline the different conceptions related to water. The field of this research is a continuous water conflicting region: the Sierra Nevada of Santa Marta, the highest coastal mountain in the world, located at the north of Colombia. The Sierra Nevada suffers the interests and water needs’ confrontations between Indians, local farmers and the surrounding cities. Sacred for some, merchandise for others, water is located at the center of the conflicts. We underlined two different social representations: environmental and utilitarian. These two representations can basically be explained by the distinction of cultural values, but also by the different environmental and practices related to the source.
Représentations sociales – Eau – Analyse prototypique – Analyse catégorielle.
Social representations – Water – Prototypical analyze – Categorical analyze.
Adresse de correspondance : Oscar Navarro Carrascal, enseignant-chercheur à l’Université d’Antioquia (Colombie), chercheur associé au GRESAL MSH-Alpes (Grenoble France). 4 chemin des Gaveaux, 38180 Seyssins, France. Courriel <osedna2001@yahoo.com>.
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Représentations sociales de l’eau
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L’eau constitue une question politique et géostratégique majeure. Les pénuries, les pollutions et les sur-utilisations des ressources aquatiques attisent de multiples conflits (Bouguerra, 2003). En effet, l’eau a toujours été un objet d’enjeux de par son rôle central dans l’organisation du territoire mais également de par son importance pour le bien-être et le développement économique des sociétés. Selon les spécialistes, le problème de l’eau n’est pas tant son insuffisance, mais plutôt son inégale répartition dans le temps et dans l’espace. Par ailleurs, sa mauvaise gestion, notamment dans les pays en voie de développement, entraîne divers conflits d’usages de la source ayant des conséquences néfastes pour les écosystèmes ainsi que sur la qualité de celle-ci. L’eau est actuellement au centre de discussions permanentes faisant suite aux nombreux appels réalisés par les spécialistes s’agissant de la crise de l’eau et les pronostiques négatifs quant à la réalisation des objectifs de développement du millénaire proposés par l’onu. En effet, s’agissant par exemple de la réalisation du premier objectif, la réduction de la moitié du nombre de mal-nourris dans le monde, va entraîner une augmentation d’environ 50% de la consommation d’eau douce par l’agriculture (Petrella, 2005), entrainant de ce fait une pression plus importante sur les écosystèmes aquatiques. Les rencontres et conférences de toutes sortes ainsi que les appels et accords politiques se succèdent. L’eau fait la Une tant des médias que des discussions quotidiennes. Ainsi, le défi pour l’humanité se fonde autour de trois questions : l’accès, la gestion et la préservation des ressources en eau (Navarro, 2008). En effet, le problème semble plutôt lié aux inégalités dans l’accès à la source entre pays et à l’intérieur même des frontières. Par exemple, la consommation de certains pays dépasse les 50.000 m3 d’eau par personne et par an, alors que d’autres montrent des quantités inférieures à 1 000 m3 (indicateur de stress hydrique). En outre, 20% de la population mondiale ne dispose d’aucun accès à l’eau potable (Bouguerra, 2003). Le gaspillage est l’une des causes majeures de la pénurie d’eau : entre la quantité d’eau prélevée dans le monde (4 430 km3 chaque année par personne) et celle consommée (2 300 km3), il y a une grande différence (Diop et Rekacewicz, 2003). Cette perte de presque la moitié du prélèvement total n’est pas seulement due à l’évaporation, mais également aux méthodes d’acheminement. D’autre part, la coexistence sur un même territoire de différentes catégories d’usagers en compétition pour les mêmes ressources en eau, créé des tentions et entrave un développement social harmonieux. Désormais, l’eau devient un objet de polémique, voire de conflit, notamment autour de son utilisation, des responsabilités à son égard et des actions de conservation à mettre en œuvre. À ce propos, nous sommes face à une diversité des « conceptions » de l’eau, de ses usages et de sa gestion (Navarro, 2006). Certains considèrent l’eau comme un « bien commun » de l’humanité (l’Unesco, par exemple) alors que d’autres pensent qu’il faut la traiter en tant que « bien économique » afin d’être plus efficace dans sa gestion (le cas de la Banque Mondiale, par exemple). Cette différence sémantique montre que certains parlent de l’eau comme d’un « besoin » humain et d’autres comme d’un « droit » humain, différence qui liée à l’univers idéologique des agents concernés et qui ont un effet sur leurs actions institutionnelles. D’aucuns voient l’eau comme
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CIPS n°81 – 2009 – pp. 65-86
une « marchandise » et d’autres la perçoivent comme un « don du ciel », il y a là une vision « économique » et une vision « sacrée » de la source. Ces problèmes liés à l’eau ainsi que les enjeux politiques, économiques et sociaux qui en découlent font de la source un objet « social » par excellence et constitue de ce fait un objet de représentation sociale. 1. La Sierra Nevada de Santa Marta, Colombie, un contexte sociopolitique complexe pour la gestion de l’eau La Colombie, située à l’extrême nord de l’Amérique du Sud, est un pays jouissant d’une ressource en eau très importante ainsi que d’une diversité biologique et culturelle grâce à sa localisation tropicale et à son histoire faite de mélanges culturels. Elle possède 10% de la diversité biologique mondiale alors que son territoire de 1,14 millions de km² ne représente que 0,75% de la surface de la planète. La Colombie jouit d’une ressource en eau sans égale représentée par un débit superficiel trois fois supérieur à la moyenne sud-américaine et six fois supérieur à la moyenne mondiale (ideam, 2003). Cependant la Colombie présente de très graves problèmes liés à la gestion de l’eau. Par exemple, le Ministère de l’environnement annonce que 65% des communes connaîtront des pénuries en eau d’ici à 2015 si la gestion actuelle de la source ne change pas (ideam, op. cit.). Ces problèmes sont dus à une gestion institutionnelle inefficace dont on doit chercher les racines dans les problèmes sociaux et politiques du pays marqué par la violence, l’anarchie et la corruption institutionnelle. Des conflits permanents autour de l’eau sont présents dans tout le pays et notamment dans la Sierra Nevada de Santa Marta (snsm), le massif montagneux du littoral le plus élevé au monde (qui culmine à 5.775 m d’altitude), déclaré réserve de la biosphère par l’unesco en 1989. La snsm dispose de l’une des plus importantes réserves naturelles du pays. Partagé entre trois départements, il s’agit d’un territoire conflictuel qui se situe au bord de la côte caraïbe, au nord de la Colombie. Dans ce massif montagneux naissent les fleuves alimentant en eau une population d’environ 2 millions d’habitants. La Sierra Nevada est un exemple de la complexité sociale de la Colombie. Dans ce massif montagneux se confrontent les intérêts économiques et de subsistance des différentes catégories d’habitants et d’usagers : les peuples indiens habitant cette région depuis l’époque précolombienne, les petites et grandes exploitations agricoles, les cultures liées à la production de drogues, l’approvisionnement en eau des villes alentour, l’exploitation minière du charbon, l’industrie touristique, le port maritime, etc. Se confrontent ainsi les besoins en eau pour la consommation domestique, mais aussi pour les usages agricoles et industriels. En outre, les moyens d’accès et la localisation géographique (aval versus amont) des catégories d’usagers engendrent des tensions notamment autour de la question de la maîtrise et de la pollution de la ressource. Il existe ainsi au moins trois grandes catégories d’usagers des ressources aquatiques de la snsm : Tout d’abord les indiens des ethnies Kogi, Wiwa, Arhuaca et Kankuama (héritiers des ancien Tayronas), chacun parlant sa propre langue (différente de la langue officielle du pays, l’espagnol) ; le nombre estimé d’indiens
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Approche normative de la motivation intrinsèque dans une situation intergroupe d’asymétrie de statut hiérarchique
Normative approach of the intrinsic motivation in an intergroup situation with asymetry of statute
Andréa ADAM et Claude LOUCHE Laboratoire de Psychologie (EA), équipe « adaptation à la complexité », Université Montpellier Sud de France, Montpellier, France
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La motivation constitue dans les champs éducatif et organisationnel un facteur permettant de prédire la performance. Des travaux récents ont mis en évidence, à partir des paradigmes de recherche développés dans le cadre de la théorie de la norme d’internalité, qu’il existe une valorisation sociale d’une forme de motivation, la motivation intrinsèque. L’objet de cette recherche est de vérifier si cette normativité se manifeste dans le cadre des relations intergroupes par une plus forte attribution à l’endogroupe qu’à l’exogroupe de motivation intrinsèque. La valorisation de l’endogroupe s’exercerait en lui attribuant des jugements normatifs. Ce phénomène sera plus fort dans les groupes dominants que dans les groupes dominés. Une étude réalisée dans une compagnie aérienne auprès de 120 salariés (60 responsables et 60 exécutants) vérifie ces hypothèses et renforce l’approche normative de la motivation. Norme sociale de jugement – Internalité – Motivation intrinsèque – Relations intergroupes.
In education and organisation, motivation constitutes a factor permitting to predict the performance. From research paradigms developped in intrinsic motivation theory, recent researches reveal that exists a social valorisation of a kind of motivation, the intrinsic motivation. The aim of this research is to check whether this normativity occurs concerning intergroups relations by using a higher attribution of intrinsic motivation for ingroup than for exogroup. The outgroup valorisation would occur by beeing attributed to normativ judgments. This phenomenon will be stonger in dominant groups than in dominated groups. A study realized in a flight company among 120 employees (60 managers and 60 subordinates) check those assumptions and reinforces the normativ approach of motivation. Social judgment norm – Internality – Intrinsic motivation – Intergroups relation.
Adresses de correspondance : André Adam, courriel : <andreaadam80@yahoo.fr>. Claude Louche, Laboratoire de Psychologie, Université Paul-Valéry, Route de Mende, 34199 Montpellier cedex 5, France. Courriel <claude.louche@univ-montp3.fr>. Cette recherche a été menée dans le cadre d’un contrat « approche socionormative de la motivation intrinsèque » coordonné par P.-H. François et associant différentes équipes de psychologie sociale ou du travail (Bordeaux, Caen, Dijon, Toulouse, Montpellier, Nice, Poitiers, Rennes).
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Approche normative de la motivation intrinsèque
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Les définitions de la motivation et les modèles théoriques relatifs à son développement sont extrêmement nombreux. Ils ont fait l’objet de plusieurs articles de synthèse (voir Kleinginna et Kleinginna, 1981 pour les définitions et Ambrose et Kulik, 1999 pour les modèles). On peut considérer que la motivation constitue la force interne ou externe qui déclenche le comportement, l’oriente, lui donne son intensité et enfin amène sa persistance dans le temps (Vallerand et Thill, 1993). La distinction entre une motivation intrinsèque et extrinsèque est au cœur de la théorie de l’autodétermination de Deci et Ryan (1985) ou Ryan et Deci (2000) et était déjà contenue dans les recherches anciennes de Herzberg. On parlera de motivation intrinsèque quand une activité est réalisée pour le plaisir qu’elle procure et de motivation extrinsèque quand une activité est réalisée pour des raisons instrumentales (obtention de récompenses ou évitement d’une punition). Ainsi, si un étudiant va en cours parce que l’enseignant fait l’appel et pénalise les absents, on parlera de motivation extrinsèque. Si l’enrichissement intellectuel et le développement personnel le motivent à assister aux enseignements, on sera dans une situation de motivation intrinsèque. Cette dernière motivation comporte trois formes : – une motivation intrinsèque aux stimulations dans laquelle le salarié est motivé grâce aux sensations fortes qu’il éprouve dans ses activités professionnelles (cascadeur, chirurgien). – une motivation intrinsèque à la connaissance dans laquelle le salarié éprouve du plaisir à apprendre de nouvelles choses (chercheur) et est ainsi motivé. – Enfin une motivation intrinsèque à l’accomplissement dans laquelle l’individu a le sentiment de relever des défis. Les différents types de motivation peuvent être rangées sur un continuum d’autodétermination, sachant que la motivation intrinsèque, qui correspond à des comportements réalisés librement et par plaisir, est positionnée au niveau le plus élevé d’autodétermination. Ryan et Deci (2000) considèrent que la motivation intrinsèque repose sur deux besoins (les besoins de compétence et d’autodétermination) et que tous les facteurs qui affectent ces besoins influencent le développement de la motivation intrinsèque. Par exemple, un contrôle hiérarchique très étroit affaiblit le sentiment d’autodétermination et donc la motivation intrinsèque. Pelletier et Vallerand (1993) montrent que la motivation intrinsèque est significativement liée aux performances, à la satisfaction au travail, à la faible intention de quitter l’organisation... Dans ces derniers travaux, la motivation intrinsèque est utilisée pour prévoir les performances et l’ajustement à l’entreprise. Il appartiendra à François de poser en 2004 la question de sa normativité dans le champ des organisations en se positionnant d’ailleurs, tant au niveau théorique qu’au niveau méthodologique, dans une approche sociocognitive proche de la théorie de la norme d’internalité. Mais déjà un travail de Pelletier et Vallerand (1996) préfigure cette orientation. Il établit en effet que les performances des subordonnés motivés intrinsèquement sont jugées supérieures à celles des subordonnés motivés extrinsèquement, même si elles sont
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CIPS n°81 – 2009 – pp. 87-96
rigoureusement équivalentes. On a donc une valorisation de la motivation intrinsèque indépendamment de la performance objective. Par la suite, François (2004) demandera à des étudiants de remplir le questionnaire de motivation intrinsèque de Blais, Brière, Lachance, Riddle et Vallerand (1993) pour se faire bien voir ou mal voir d’un employeur (paradigme d’autoprésentation). Cet outil, qui bénéficie d’excellentes qualités métriques, permet de repérer l’orientation motivationnelle intrinsèque ou extrinsèque des répondants. François constate que les scores de motivation intrinsèque sont significativement plus forts lorsqu’il s’agit de se faire bien voir. De manière complémentaire, CassignolBertrand, Baldet, Louche et Papet (2006) ont montré que, dans le champ organisationnel, les évaluateurs professionnels donnent la préférence, tant au niveau du recrutement que de l’évaluation de projets, aux salariés motivés intrinsèquement. En milieu universitaire, Cassignol-Bertrand et Constant (2007) constatent que les enseignants établissent un pronostic plus favorable de réussite pour les étudiants motivés intrinsèquement. Cette appréciation positive intervient même si leurs performances objectives sont de niveau très moyen. Ces travaux soutiennent une interprétation normative de la valorisation de la motivation intrinsèque. Il restait, pour étayer l’approche normative de la motivation intrinsèque, à vérifier si cette valorisation s’exerce également dans le cadre des relations intergroupes. C’est l’objet de la recherche suivante. 1. Problématique Les travaux de psychologie sociale attestent d’une tendance à favoriser son propre groupe et à défavoriser l’exogroupe (Tajfel, 1981). Ce biais pro-endogroupe se manifeste dans les processus attributifs (Hewstone, 1990 ; Deschamps et Beauvois, 1994). On constate en effet que la valorisation de l’endogroupe se traduit par l’attribution à ce dernier de comportements désirables (effets de complaisance) alors que les comportements indésirables sont attribués à l’exogroupe. C’est autour du caractère désirable ou indésirable des événements que se construit la tonalité favorable ou défavorable des relations intergroupes. La théorie de la norme d’internalité appliquée aux relations intergroupes va considérer que la valorisation de l’endogroupe ne passe pas seulement par l’affectation de comportements désirables aux membres de sa catégorie. Elle considère qu’elle se manifeste par l’attribution à l’endogroupe d’explications internes qui sont en elles-mêmes porteuses de valeur et socialement désirables. Cette valorisation de son groupe par l’attribution d’un jugement normatif a été observée dans des situations minimales (Dubois, Beauvois, Gilibert et Zentner, 2000) ainsi que dans des situations plus chargées socialement (Beauvois, Gilibert, Pansu et Abdelhaoui, 1998 ; Pansu, Tarquinio et Gilibert, 2005). Toutefois l’attribution d’internalité à l’endogroupe pour le valoriser intervient plus particulièrement dans les situations marquées par une symétrie de statut au niveau des groupes engagés dans l’étude. Par contre dans les situations caractérisées par une asymétrie de statut il apparaît que les dominés intègrent le discours des dominants et les favorisent (Guimond et Simard, 1979 ; Deschamps, 1982 ; Hewstone et Ward, 1985 ; Deschamps et Beauvois, 1994 ; Pansu et al,. 2005). Par exemple,
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Identification au lieu et aux pairs : quels effets sur la réussite scolaire ?
Identification to place and to peers: What effects on academic success ?
Ghozlane Fleury-Bahi, André Ndobo, Emmanuèle Gardair, Christine Jeoffrion et Aurore MARCOUYEUX Laboratoire de Psychologie : éducation, cognition, développement – LABÉCD, ea 3259, Université de Nantes, Nantes, France
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L’école peut être envisagée comme un lieu pour lequel l’élève est susceptible de développer des liens d’attachement et d’identification. Cette recherche a deux objectifs complémentaires : examiner les effets de l’image perçue de l’établissement sur les niveaux de l’identification au lieu et aux pairs chez des élèves de l’enseignement secondaire, et tester le pouvoir explicatif des différents niveaux d’identification sur la réussite scolaire. Deux cent trente neuf élèves issus d’établissements contrastés (différenciés sur la base de leur positionnement géographique et du niveau socioéconomique des parents) ont participé à la recherche en répondant à un questionnaire constitué d’une série d’échelles (11 items d’identification au lieu ; 7 items d’identification aux pairs). Les résultats mettent en évidence un effet du type d’établissement sur l’identification au lieu et montrent également que l’attachement à l’établissement est en partie explicatif de la réussite scolaire. L’ensemble de ces données sont discutées en termes d’effet de l’appropriation/identification au lieu sur la réussite scolaire.
School can be seen as a place where a student is likely to develop bonds of attachment and identification. This research has two complementary aims : the first one is to examine the effects of the perception of the school on the levels of identification to place and to peers as far as students are concerned. The second one is to evaluate the explanatory power of the various levels of identification on school success.Two hundred and thirty-nine students from different schools - whose differences are based on their location and on parents’ socio-economic status - took part in this research and answered a questionnaire based on a series of scales (11 place identification items ; 7 peers identification items).The results highlight an influence of the type of school on the identification to place and also show that the attachment to the school explains school success. The whole data is discussed in terms of effects of appropriation and identification to place on school career. Place identity – Identification to peers – High school – Academic-success.
Identité de lieu – Identification aux pairs – Enseignement secondaire – Réussite scolaire.
Adresses de correspondance : Ghozlane Fleury-Bahi, Université de Nantes, UFR de Psychologie, Chemin de la Censive du Tertre, 44312 Nantes cedex 3, France. Courriel : <Ghozlane.Fleury-Bahi@univ-nantes.fr>. Les deux premiers auteurs sont les contributeurs principaux de cet article.
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Identification au lieu et aux pairs
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L’une des préoccupations des chercheurs en éducation concerne l’explication et la compréhension des mécanismes à l’œuvre dans le déroulement de la carrière scolaire des élèves. Un examen sommaire des productions pionnières amène à constater le rôle que joue la question des inégalités sociales dans ce domaine (Bourdieu et Passeron, 1964 ; Baudelot et Establet, 1971 ; Boudon, 1973). Ces travaux privilégient l’étude des relations entre le système scolaire et la société au détriment de la structure scolaire en soi (c’est-à-dire de son fonctionnement, de ses moyens et des relations entre les différents acteurs en son sein). Dans leur prolongement, des études monographiques vont se développer en permettant l’émergence d’explications alternatives ou complémentaires sur la carrière scolaire. À partir du rapport pionnier de Coleman, Campbell, Hobson, McPartland, Mood, Weinfield et York (1966), les chercheurs en éducation commencent à s’intéresser aux effets du contexte scolaire (Cousin, 1998 ; Durut-Bellat, 2001). Ils tiennent alors de plus en plus compte des facteurs externes (tels que la composition sociale de l’école) et des facteurs liés au fonctionnement de l’école (tels que sa politique, ses moyens, son offre et l’orientation qu’elle propose). La présente recherche s’inscrit dans cette dernière perspective. Elle considère les aspects socio-économiques (composition socio-économique de l’école) et instrumentaux (organisation interne de l’école) du contexte, ainsi que sa dimension socio-spatiale (la localisation spatiale, le cadre bâti et les rapports que les usagers entretiennent avec l’espace scolaire). Ce faisant, elle s’interroge sur les mécanismes sociopsychologiques qui sous-tendent la relation élève/établissement (l’attachement, l’identification au lieu et l’évaluation du lieu) ainsi que sur leur contribution à l’explication de la carrière scolaire. 1. Le paradigme du contexte scolaire L’un des buts poursuivis par les spécialistes de l’éducation est de favoriser la compréhension et l’explication du déroulement de la carrière scolaire à différents niveaux. Les recherches classiques disponibles se caractérisent par deux orientations principales (pour une présentation exhaustive, voir Duru-Bellat et Mingat, 1988 ; Bressoux, 1995) : 1) une orientation macrosociologique qui privilégie l’étude des rapports entre le système éducatif et la société. Cette orientation se nourrit à la fois du courant conflictualiste qui envisage l’école comme une structure de reproduction des inégalités (Bourdieu et Passeron, 1964 ; 1970 ; Baudelot et Establet, 1971) et du courant individualiste (Boudon, 1973) qui considère l’individu comme l’acteur du maintien ou de l’amélioration de sa position sociale. Mais dans les deux cas, l’école apparaît comme un objet d’étude secondaire ; 2) une orientation microsociologique qui s’attache aux relations entre les acteurs au sein de l’école. Cette dernière se distingue par une analyse portant sur des établissements particuliers (leur mode de fonctionnement, leur identité, leurs exigences, etc.). C’est cette orientation qui est à la source de travaux portant sur les effets du contexte scolaire. Les travaux sur le contexte scolaire sont complémentaires des précédents car ils proposent de considérer la multiplicité des facteurs à l’œuvre dans l’explication de
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l’inégalité des carrières scolaires, c’est-à-dire à la fois les facteurs individuels (tels que la valeur scolaire, le niveau d’aspiration des élèves) et contextuels. Si on considère la composition sociale de l’école, l’offre et les moyens d’enseignement et les pratiques de regroupement et d’orientation comme des variables de différenciation des établissements (Duru-Bellat et Mingat, 1988 ; Trancart 1998), on perçoit bien que le contexte des établissements ne peut être uniforme. C’est dans cette perspective qu’il faut comprendre ce qu’on appelle l’effet établissement. Selon Cousin (1993), cet effet consacre une modification de la perception de l’établissement qui est dorénavant abordé « comme une organisation qui possède un style particulier, des modes de relations sociales spécifiques et une capacité de mobilisation de ses acteurs et de ses ressources qui lui sont propres » (p. 395). Cette approche tend ainsi à distinguer les « contraintes extérieures » (comme par exemple leur recrutement social, la zone d’implantation) qui s’imposent à l’établissement, et les facteurs résultant de sa politique (son organisation interne, son « climat » et la cohérence de la politique mise en place) (Cousin, 1998). Mais la différence interétablissements n’est qu’un aspect des inégalités constatées. La question de l’hétérogénéité inter-classes émerge dès lors qu’on considère les pratiques pédagogiques spécifiques, les attentes et les représentations propres à tel enseignant. Cela amène à envisager l’effet établissement, non pas comme un facteur causal propre, mais comme le résultat de l’agrégation des différents effets classes (Bressoux, 1995). Le paradigme de l’effet du contexte impose donc l’idée d’une école qui n’est pas seulement victime de la société, mais qui est aussi, par son recrutement et par son fonctionnement, génératrice des inégalités (Duru-Bellat, 2001). Dans la lignée des travaux sur le contexte scolaire, d’autres recherches s’intéressent aux déterminants de l’estime de soi, à la motivation, aux performances des élèves et aux risques d’abandon scolaire. Ces recherches font référence à différents processus d’ordre psychologique (lien à l’école, attachement à l’école, appartenance à l’école, identification à l’école) qui s’étayent sur la valeur attribuée à l’école et au système scolaire, sur la participation aux activités scolaires (Finn, 1989), sur l’attachement aux professeurs et l’engagement envers les valeurs scolaires (Eggert, Thompson, Herting, Nicholas et Dicker, 1994), sur l’identification au groupe de pairs ou encore sur la relation de l’élève avec ses enseignants (Goodnow, 1993). La recherche présentée s’inscrit dans ce dernier champ. Elle se propose d’élargir et de compléter la perspective courante des travaux relatifs aux effets de contexte. Elle envisage le contexte non pas seulement en termes de structure sociale ayant une composition particulière mais comme une variable conative générale, liée à la manière dont la localisation géographique de l’école est intériorisée, et contribue à la structuration de l’identité sociale des élèves. On observe que la dimension géographique du contexte n’est pas une question neuve. L’étude de Leloup (1999), par exemple, sur les modes d’implantation des immigrés dans une commune de l’agglomération bruxelloise, amène à considérer les relations entre ségrégation résidentielle et ségrégation socio-économique. Au niveau scolaire, Van Zanten (2001) examine les liens entre l’école et les quartiers défavorisés, et propose de ne pas
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Mieux comprendre l’engagement psychologique : revue théorique et proposition d’un modèle intégratif
Towards a better understanding of psychological commitment: theoretical review and proposal of an integrative model
Anne Brault-Labbé* et Lise Dubé** * Université de Sherbrooke, Sherbrooke (Québec), Canada ** Université de Montréal, Montréal (Québec), Canada
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L’objectif général de cet article est de présenter une approche qui vise à mieux comprendre les mécanismes inhérents au processus d’engagement psychologique et, par conséquent, de proposer des pistes pour en améliorer l’étude scientifique. Il tente de faire le point sur la façon dont est présentement conceptualisée la notion d’engagement psychologique dans l’univers scientifique ainsi que sur certaines lacunes qui rendent difficile l’étude de ce concept. Il présente également un modèle qui tente de remédier à ces lacunes, modèle selon lequel l’engagement constitue un processus multidimensionnel fortement relié au bien-être personnel des individus et reflétant leurs choix personnels. Des applications possibles de l’étude de l’engagement à différents domaines de la psychologie sont également présentées. Engagement psychologique – Choix personnels – Bien-être personnel – Motivation.
The main goal of this article is to present an approach which aims to better understand the mechanisms inherent to psychological commitment and, consequently, to propose avenues to improve its scientific study. It attempts to take stock of the way psychological commitment is presently conceptualized in the scientific area and of some deficiencies which render the study of this concept difficult. It also presents a model which attempts to remedy such deficiencies, model according to which commitment represents a multidimensional process strongly related to individuals’ personal well-being and reflecting their personal choices. Possible applications of the study of commitment in various areas of psychology are also discussed. Psychological commitment – Personal choices – Personal well-being – Motivation.
Anne Brault-Labbé, Département de psychologie, Faculté des lettres et sciences humaines, Université de Sherbrooke, 2500 boulevard de l’Université, Sherbrooke (Québec), Canada J1K 2R1. Courriel : <anne.brault-labbe@usherbrooke.ca>. Cette recherche a été réalisée grâce à l’appui financier du Fonds Québécois de Recherche sur la Société et la Culture (FQRSC), du Conseil de Recherche en Sciences Humaines du Canada (CRSH) et du département de psychologie de l’Université de Montréal accordé à la première auteure dans le cadre de sa thèse de doctorat. Les auteures tiennent à remercier Michel Fournier pour son soutien au niveau des analyses statistiques.
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Mieux comprendre l’engagement psychologique
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1. L’engagement : témoin des choix majeurs de la vie Plusieurs des décisions majeures que nous prenons au cours de notre vie impliquent des choix difficiles dont nous tentons de mesurer les avantages, les coûts et les compromis associés. De tels choix surviennent autant dans les sphères académique et professionnelle de la vie que dans les sphères amoureuse ou personnelle : les gens se trouvent fréquemment confrontés à une question qui provoque parfois de la confusion, de la crainte ou de l’incertitude, mais à laquelle personne n’échappe en bout de ligne : va-t-on s’engager ou non ? Et peu importe la réponse qui ressort des délibérations intérieures évoquées par cette question, les décisions qui en découlent ont généralement un impact important sur l’ensemble du fonctionnement personnel qui s’ensuit. Bien que la notion d’engagement soit étudiée depuis déjà quelques décennies, ce n’est que récemment que l’étude spécifique des composantes et des mécanismes psychologiques sous-jacents à l’engagement représente un intérêt grandissant de recherche dans le domaine de la psychologie. Cet intérêt est marqué par le désir de comprendre par quels moyens, pour quelles raisons et dans quelles circonstances un individu parvient à développer et à maintenir une ligne persistante de conduite envers une personne, un groupe, une activité ou un projet.
Le fait de connaître et de bien saisir le construit d’engagement peut éclairer à plusieurs égards la compréhension que nous avons du fonctionnement humain, d’autant plus qu’un nombre croissant de travaux en psychologie démontre que l’engagement et/ou la capacité de s’engager sont positivement associés au bienêtre personnel (Brault-Labbé, 2006 ; Brault-Labbé et Dubé, 2008 ; Brault-Labbé, Lavarenne, et Dubé, 2005 ; Dubé, Jodoin, et Kairouz, 1997 ; Emmons, 1986 ; Jodoin, 2000 ; Riipinen, 1997 ; Weiner, Muczyc, et Gable, 1987). Ainsi, le fait de connaître et de comprendre les mécanismes qui sous-tendent l’engagement de l’être humain permettrait d’intervenir plus aisément pour favoriser des niveaux d’engagement optimaux chez les individus et, par le fait même, augmenter la probabilité qu’ils atteignent des niveaux de bien-être plus élevés. Afin d’étudier adéquatement le phénomène de l’engagement, il apparaît primordial de tenter de préciser clairement, de façon conceptuelle et opérationnelle, la structure psychologique qui lui est sous-jacente, c’est-à-dire les dimensions affectives, cognitives, comportementales et/ou motivationnelles qui le composent. Bien que certaines avancées aient été faites à cet égard dans les dernières décennies (Adams et Jones, 1997 ; Brickman, 1987 ; Dubé et al., 1997 ; Fredricks, Blumenfeld, et Paris, 2004 ; Jodoin, 2000 ; Novacek et Lazarus, 1990 ; Rusbult et Farrell, 1983 ; Rusbult, Martz, et Agnew 1998), le concept d’engagement demande encore à être clarifié. 2. De la difficulté de définir l’engagement À l’heure actuelle, il semble que l’étude rigoureuse des mécanismes psychologiques associés à l’engagement soit compromise par une nette absence de consensus dans la littérature scientifique quant à une définition opérationnelle de ce construit
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et des différentes composantes qui le constituent. Outre le simple fait que l’engagement soit un concept dont la complexité est reconnue (Burke et Reitzes, 1991 ; Dubé et al., 1997 ; Jodoin, 2000 ; Novacek et Lazarus, 1990), nous croyons que deux raisons majeures peuvent être à l’origine de cette confusion définitionnelle : d’une part, le fait que l’on considère qu’il existe plusieurs façons de s’engager (types d’engagement), et d’autre part, le fait que le concept d’engagement soit étudié de façon isolée en fonction de différentes sphères de la vie dans lesquelles l’on s’investit (domaines possibles d’engagement). 2.1. Différents types d’engagement Certaines distinctions ont déjà été faites dans la littérature entre plusieurs types d’engagement, impliquant chacun des mécanismes psychologiques différents. Par exemple, certains auteurs ont par le passé valorisé une approche liée aux théories de la dissonance cognitive selon laquelle l’engagement consiste en une persistance comportementale associée à une nécessité ressentie par l’individu d’être ou de paraître cohérent avec ses croyances et ses choix passés (Becker, 1960 ; Kiesler, 1971). Des auteurs plus contemporains valorisent pour leur part une approche affective selon laquelle l’engagement est avant tout l’expression d’un intérêt ou d’une attirance marquée envers une activité, une personne ou un quelconque objet social (Antonovsky, 1987 ; Csikszentmihalyi, 1990 ; Kobasa, 1982). Récupérant partiellement ces idées, certains auteurs ont soulevé des distinctions entre d’autres sous-types d’engagement, soit l’engagement personnel, découlant des attirances et des choix propres de l’individu et généralement associé à une grande satisfaction ; l’engagement moral (ou social), qui découle des valeurs morales ainsi que du sens du devoir et des responsabilités de l’individu ; finalement, l’engagement structurel, qui relève du sentiment de contrainte et d’obligation de persister à cause des coûts ou des conséquences anticipées s’il y a interruption de l’engagement (Adams et Jones, 1997 ; Johnson, 1973). Un autre type d’engagement proposé par certains auteurs est l’engagement identitaire (Burke et Reitzes, 1991). Cette dernière approche réfère à l’ensemble des forces qui permettent à l’individu de choisir des interactions avec son environnement qui reflètent fidèlement son identité, et cela dans toutes les sphères majeures de sa vie. Ce type d’engagement permettrait de maintenir un sentiment de cohérence élevé entre qui l’individu considère être (son identité) et sa façon d’agir dans son fonctionnement quotidien. Dans un autre ordre d’idées, certains auteurs mettent en lumière l’importance de définir l’engagement de type excessif, caractérisé par une tendance à se surinvestir compulsivement dans un domaine quelconque d’activité. Ce type d’engagement mettrait en péril l’équilibre de fonctionnement global de l’individu (Brault-Labbé et Dubé, 2008 ; Jodoin, 2000 ; Vallerand et al., 2003 ; Weiner et al., 1987) et, en ce sens, devrait être différencié de l’engagement personnel associé au bien-être.
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Exercice structuré de dynamique des groupes Une situation de formation au diagnostic et à l’intervention en organisation dans le cadre d’un (hyper)conflit : le cas de Jérémy (1) Daniel Faulx* et Sophie Delvaux** * Université de Liège, Liège, Belgique ** Centre de Dynamique des Groupes et d’Analyse Institutionnelle, Liège, Belgique
Intentions L’exercice vise à permettre aux participants d’expérimenter la conduite d’une négociation dans une situation conflictuelle. L’exercice vise à sensibiliser à une lecture systémique et stratégique des situations conflictuelles en organisation. L’exercice vise à sensibiliser les participants à la problématique de l’intervention en situation conflictuelle. L’exercice vise à sensibiliser les participants à la communication au sein d’une équipe et entre différentes équipes de travail. Objectifs Au terme de l’exercice les participants seront davantage capable de : a.1. Distinguer les différents stades de la négociation. a.2. Identifier les différents facteurs qui entravent la négociation dans une situation conflictuelle. a.3. Identifier les différents facteurs qui facilitent la négociation dans une situation conflictuelle. a.3. Identifier les influences interpersonnelles qui interviennent dans la négociation. a.4. Mettre en lumière les influences liées aux caractéristiques personnelles dans le traitement de la situation conflictuelle. b.1.Distinguer les différentes lectures possibles d’une même situation. b.2 Développer sa capacité a appréhender différents niveaux d’intelligibilité (intrapersonnel, interpersonnel, groupal, organisationnel, institutionnel) d’une situation conflictuelle en organisation. b.3 Distinguer les acteurs principaux et périphériques qui interviennent dans une situation conflictuelle. b.4. Découvrir les notions d’enjeux, d’alliances, d’intérêt, de valeurs, de ressources, de contraintes et de stratégies dans le cadre d’une situation conflictuelle.
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c.1.Identifier les difficultés à trouver les solutions adéquates intervenir dans une situation conflictuelle de façon satisfaisante pour l’ensemble des acteurs concernés. c.2. S’entraîner à proposer une analyse et des solutions qui tiennent compte de l’ensemble des enjeux des différents acteurs. c.3. Découvrir la notion de recadrage en situation conflictuelle. d1. Identifier ce qui est un frein à la communication au sein d’une équipe. d.2. Identifier ce qui peut faciliter la communication au sein d’une équipe. d.3. Identifier ce qui facilite la communication entre différentes équipes. d.4. Identifier ce qui freine la communication entre différentes équipe.
Nature de la tâche Négociation lors d’une situation de conflit pour parvenir à un accord. Forme de la tâche Jeu de rôle. La situation Jérémy, employé dans un grand magasin, a été interviewé dans le cadre d’une mission d’Envoyé Spécial consacrée à la problématique du harcèlement moral au travail. L’émission enregistrée trois mois auparavant a été diffusée la veille au soir et a connu un succès médiatique important. Nombre possible de participants Le nombre possible de participants est variable. Dans le cadre de cet exercice, 30 rôles ont été créés de la façon suivante : 3 membres de la délégation syndicale 3 consultants 5 directeurs régionaux 6 membres de la direction du site d’ Ognioulle 3 représentantes des caissières 6 employés aux rayons 1 Jérémy Cellule chargée de communication (2 personnes : 1 rédacteur+1facteur) Le matériel DVD Agir sur les souffrances relationnelles au travail (disponible au SPF Emploi Travail et Concertation Sociale) : vignette de Jérémy Matériel de projection de film (écran+beamer) Une description des rôles pour chacun des participants Des locaux pour chacun des groupes de participants soit 8 locaux 1 ordinateur, 1 imprimante, 1 photocopieuse
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Exercice structuré de dynamique des groupes Une situation de formation à la conduite d’une négociation en contexte conflictuel : le cas de Jérémy (2) Sophie DelvauX* et Daniel Faulx** * Centre de Dynamique des Groupes et d’Analyse Institutionnelle, Liège, Belgique ** Université de Liège, Liège, Belgique
Intentions L’exercice vise à permettre aux participants d’expérimenter la conduite d’une négociation dans une situation conflictuelle. L’exercice veut donner une occasion aux participants d’être sensibilisé à la complexité des situations conflictuelles et aux difficultés qu’on peu trouver pour les résoudre. L’exercice vise l’entraînement au jeu de rôles Objectifs Au terme de l’exercice les participants seront davantage capable de : a.1. Distinguer les différents stades de la négociation a.2. Identifier les différents facteurs qui entravent la négociation dans une situation conflictuelle a.3. Identifier les différents facteurs qui facilitent la négociation dans une situation conflictuelle a.3. Identifier les influences interpersonnelles qui interviennent dans la négociation a.4. Mettre en lumière les influences liées aux caractéristiques personnelles dans le traitement de la situation conflictuelle b.1. Distinguer les différentes lectures possibles d’une même situation b.2. Distinguer les acteurs principaux et périphériques qui interviennent dans une situation conflictuelle b.3. Prendre consciences des enjeux manifestes et latents pour chacun des acteurs b.4. Identifier les difficultés à trouver les solutions adéquates pour résoudre une telle situation de façon satisfaisante pour l’ensemble des acteurs concernés c.1. Jouer un rôle différent de ceux dont on a l’habitude
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Nature de la tâche Négociation lors d’une situation de conflit pour parvenir à un accord. Forme de la tâche Jeu de rôle Nombre possible de participants 8 rôles ont été définis pour cette version du cas de Jérémy. Néanmoins, la conduite de cet exercice peut également être menée sur des groupes plus importants (cf. Le Cas de Jérémy-version 2). Le matériel DVD Agir sur les souffrances relationnelles au travail (disponible au SPF Emploi Travail et Concertation Social) : vignette de Jérémy Matériel de projection de film (écran+beamer) Une description des rôles pour chacun des participants Un local suffisamment spacieux pour la réunion entre les 8 participants La procédure et les durées Lancement de l’exercice : 25 min Nous allons procéder à un exercice de négociation sous la forme d’un jeu de rôle. Il est nécessaire pour cet exercice d’avoir 8 participants. Voici pour chacun d’entre vous, les consignes relatives au rôle qu’il jouera dans le cadre de cet exercice. La situation est la suivante : Jérémy, employé dans un grand magasin, a été interviewé dans le cadre d’une mission d’Envoyé Spécial consacrée à la problématique du harcèlement moral au travail. L’émission enregistrée trois mois auparavant a été diffusée la veille au soir et a connu un succès médiatique important. Vous allez dans un premier temps visionner ce témoignage d’une dizaine de minute, nous vous demandons de ne faire aucun commentaire sur ce témoignage. < Projection de la vignette > Il est 9h00, le magasin ouvre ses portes dans une demi-heure. Le témoignage de Jérémy a un impact considérable sur l’ensemble du personnel du grand magasin. La direction du magasin a souhaité une réunion d’urgence avec les personnes concernées par cette histoire. Cette réunion durera 40 min. Un temps de préparation de 10 min va être laissé à chaque participant pour lui permettre de prendre connaissance de son rôle. Pendant ce temps, les observateurs recevront leurs consignes de travail. Exécution de la tâche : 50 min
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Notes de lecture
Christian Staerklé, Christophe Delay, Lavinia Gianettoni et Patricia Roux (2007). Qui a droit à quoi ? Représentations et légitimation de l’ordre social. Grenoble, Presses Universitaires de Grenoble. par Régis Scheidegger, Université de Lausanne.
L’ouvrage de Christian Staerklé, Christophe Delay, Lavinia Gianettoni et Patricia Roux porte sur les attitudes envers les politiques de régulation du contrôle social. À travers dix chapitres présentés de manière abordable pour les non-initié-e-s aux concepts de la psychologie sociale, cet ouvrage à pour objectif de cerner les processus de construction de la « légitimation populaire » ou profane de l’ordre social. Les conceptions de l’ordre social (ou du vivre ensemble) sont abordées comme des représentations sociales de la justice, qui sont partagées dans des groupes. Dans ces groupes, liés entre eux par des rapports de pouvoir asymétriques, les représentations sociales agissent comme des principes générateurs de prises de position stratégiques qui visent la défense de modèles spécifiques de l’ordre social, à travers l’octroi ou le déni de droits sociaux en tant que mode d’application du contrôle social. Ces attitudes s’inscrivent ainsi dans des rapports de pouvoir inégalitaires et visent la défense d’arrangements sociaux spécifiques entre groupes dominants et dominés. L’originalité des références théoriques confrontées aux données d’une enquête récoltées dans quatre villes de Suisse (projet du Fond national de la recherche suisse : PNR45 « Problèmes de l’État social »), font de cet ouvrage une contribution des plus stimulantes pour qui s’intéresse à la construction sociale des attitudes politiques. L’approche des auteur-trice-s emprunte ainsi une majeure partie de ses références à la psychologie sociale : représentations sociales (Doise, Hewstone, Moscovici), identité sociale (Abrams, Hogg, Tajfel, Turner), attitudes (Allport), dominance sociale (Sidanius, Pratto), justification du système (Jost et Banaji) rationalisation (Beauvois), privation relative (Walker et Smith) et groupes dominants et dominés (Deschamps, Lorenzi-Cioldi). Mais ils/elles empruntent aussi leurs références à un très large spectre des sciences sociales - sociologie (Boltanski et Chiapello, Bourdieu, Castel, Jackman, Wacquant), science politique et criminologie (Foucault, Garland, Young) ou encore études genre (Delphy, Mathieu, Roux). Il est ainsi montré que si dans l’ensemble des ordres sociaux inégalitaires tendent à se reproduire, certains processus de remise en cause des systèmes inégalitaires sont possibles. Les stratégies n’assurent pas forcément la reproduction des rapports de domination à l’avantage des groupes dominants dans la hiérarchie sociale.
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Ainsi quatre conceptions ou principes organisateurs de l’ordre social ont été étudiés en tant que mythes de légitimation de l’ordre établi, issus des idéologies néolibérales et néo conservatrices qui se sont renforcées dans les sociétés occidentales au crépuscule des « trente glorieuses » et à l’aube d’un néolibéralisme triomphant. Les conceptions s’organisent principalement sur deux axes : selon qu’elles s’attachent à définir des principes de justice individuelle ou des principes de justice collective. Une première conception qui s’appuie sur un principe de justice individuelle est la conception de l’ordre moral. Elle est basée sur le conformisme avec les normes sociales d’un groupe de référence ou supra-ordonné (comme la nation avec ses « bon-ne-s » citoyen-ne-s). Le principe de régulation préconisé en serait la sanction des déviants (« mauvais-es » citoyen-ne-s) à travers les outils répressifs d’un État disciplinaire (police et surveillance). La seconde conception fondée sur le principe de justice individuelle est celle du libre marché. Elle est basée sur un principe de justice distributive découlant d’une règle d’équité, de responsabilité individuelle et de la mobilité sociale : soit un principe méritocratique. Construite sur la base de l’idéologie (néo)libérale, selon laquelle les gens agissent selon leur intérêt personnel dans un marché de libre échange, cette conception génère des régulations institutionnelles en quelque sorte en faux : à travers un État minimal. Dans ce cadre, les normes et valeurs auxquels se soumettent les « individus libéraux » sont celles de la doctrine néolibérale et permettent de caractériser les « gagnants », autrement dit les plus méritant-e-s de cet ordre social. Une première conception fondée sur un principe de justice collective est la conception de la diversité sociale. Elle se constitue sur la base du processus psychosocial de la différenciation catégorielle (accentuation de la similitude intragroupe et accentuation de la distinction entre les groupes). L’appartenance au groupe se définit donc par l’identification aux normes du groupe et la menace que le groupe encoure (notamment de l’« étranger »). Au niveau de la régulation, cette conception favorise la défense de droits collectifs, ou communautaires, d’un groupe face à d’autres groupes. C’est notamment le cas face au groupe de référence supraordonné ou face à d’autres sous-groupes. Ainsi, les auteur-trice-s indiquent le potentiel de changement social à la fois progressiste (élargissement des droits d’un groupe stigmatisé) ou au contraire réactionnaire (rejet d’un groupe stigmatisé) que sous-tend ce type de conception de l’ordre social. Elle s’oppose aux deux conceptions de la justice du marché et de la morale en ce sens qu’elle met en avant des revendications de changement collectives et minoritaires. La seconde conception collective est la conception des inégalités structurelles. Elle est basée sur les rapports de domination qui traversent la société (classes sociales, genre, citoyenneté nationale) et la gestion des inégalités sous-tendues par ces rapports. C’est donc la perception des inégalités de statut entre groupes dominants (qui définissent et représentent en première instance les normes dominantes d’accès aux ressources) et groupes dominés qui façonnent cette conception. La légitimation d’un ordre inégalitaire passe par le déni des inégalités, qui peut être conscient (et donc voulu et justifié) ou inconscient (en ce sens que la distinction de statut n’est pas perçue comme illégitime). L’illégitimité perçue des rapports entre groupes serait alors à
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même de générer un conflit (de normes). La régulation institutionnelle se manifeste dès lors à travers des stratégies de domination, notamment par la redistribution de ressources par l’État social aux groupes dominés (gestion des inégalités sociales), permettant un changement, mais aussi la perpétuation d’un ordre social en fin de compte à l’avantage des groupes dominants. Dans ce cadre, les résultats indiquent que les prises de position sur les droits sociaux ou disciplinaires, liés à la régulation institutionnelle, dépendent de l’ancrage des principes normatifs sous-jacents à ces quatre conceptions du vivre ensemble (dans des groupes hiérarchisés qui composent la société basé sur le sexe, les générations, l’origine nationale et les classes sociales). Les groupes sociaux étant porteurs de revendications politiques parfois conflictuelles, les prises de position sont abordées sous l’angle des stratégies qu’elles permettent de mettre en œuvre ; soit des stratégies de légitimation de l’ordre établi ou, au contraire, des stratégies de contestation visant un changement des rapports sociaux. Deux types de stratégies visant le maintien d’un statu quo sont proposés. Elles dépendent de l’aspect individuel ou collectif des principes de justice. Dans le cas de l’ordre moral et du libre marché, ce sont les normes et valeurs sous-jacentes à ces ordres qui sont justifiées par la « stigmatisation des personnes dont les comportements sont jugés inacceptables et normativement déviants » (p. 51). Ce processus de maintien d’une identité sociale positive permettrait ainsi une comparaison vers le bas avec des personnes appartenant à des groupes menaçant l’ordre social dominant (bénéficiaire de l’aide sociale, étrangers, communauté homosexuelle,…). En revanche, concernant les conceptions collectives, c’est la défense des privilèges et des normes d’un groupe particulier qui est justifiée. Une stratégie générale consiste à essentialiser et à naturaliser les différences de statut (ex. : droit de garde des enfants aux mères, droit de vote aux nationaux ou « nationalisés », …), ce qui permet la légitimation des hiérarchies de statut au profit de certains groupes dominants dans la comparaison (comme les citoyen-ne-s nationaux). Pour ce qui est des stratégies de contestation et de changement, il va sans dire, selon les chercheur-euse-s, que les principes de justice mobilisables sont exclusivement collectifs et sont générés cette fois par une comparaison vers le haut. Le changement nécessite une confrontation entre systèmes normatifs (majoritaireminoritaire, dominant-dominé), lorsque le système dominant n’est plus perçu de manière légitime par des groupes dominés. Du côté de la majorité (ou des dominants) il arrive qu’elle accepte le changement, mais souvent pour mieux préserver sa position dominante (insouciance). Pour terminer la partie empirique de l’ouvrage, et après une analyse spécifique des systèmes de domination de sexe, de classe et de nationalité, une interprétation des différentes stratégies est formulée selon l’hypothèse de l’asymétrie idéologique de la construction des attitudes. En effet, l’ensemble des résultats indique que si les membres des groupes dominants présentent une pensée « cohérente » entre leur position, leur représentation de la justice et les modes de régulation institutionnelle auxquels ils adhèrent (en faveur ou en défaveur de l’ordre établi), les membres
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de groupes dominés semblent plus ambivalents. Aux yeux des dominants, un État répressif ne peut aller de pair avec un État social (redistributif) : selon les conceptions de l’ordre adoptées on ne soutient que l’un des deux systèmes de régulation. Chez les membres des groupes dominés, en revanche, il est possible d’adopter ce que les auteur-trice-s nomment une attitude « sociorépressive » qui dépend du mode de comparaison adopté : vers le haut ou vers le bas. État social et État disciplinaire peuvent cohabiter en ce sens que l’État se doit de redistribuer des richesses indûment monopolisées par les dominants (comparaison vers le haut), mais il se doit également de veiller à la perpétuation des valeurs nationales dominantes de la morale et du mérite individuel (dans une comparaison vers le bas). Ainsi, la position occupée compte d’une part pour la légitimation des valeurs dominantes (justification idéologique), et d’autre part pour l’adoption de politiques de redistribution d’une partie des ressources aux groupes dominés (défense de l’intérêt du groupe). Des limites sont toutefois à mentionner. Premièrement, et il s’agit plus d’un avertissement aux lecteur-trice-s que d’une critique de l’ouvrage, la description des légendes dans les analyses de l’ancrage positionnel des modes de régulation ne correspond pas aux commentaires du texte (cf. pp. 131, 132, 135 et 160). Ensuite, même si on parvient à s’en passer grâce à la clarté des interprétations des résultats, on ne trouve aucun coefficient ou valeur de test statistique, et même si un certain nombre de figures et de tableaux illustrent les analyses. Ainsi, la volonté d’en faire un ouvrage accessible risque de laisser les spécialistes avides de résultats sur leur faim. Une annexe aurait été la bienvenue. Pour ce qui est de l’absence d’expérimentation, il est à rappeler que cet ouvrage se veut la retranscription des résultats d’une enquête, guidées par des hypothèses qui empruntent aussi leur contenu à d’autres disciplines que la psychologie sociale. Elle ne vise donc pas à cerner des processus cognitifs en tant que tels, mais à comprendre comment la pensée profane s’articule autour d’un ancrage positionnel et idéologique. Finalement, et il s’agit selon l’auteur de cette recension de la limite la plus importante, il manque peut-être l’intégration de plusieurs travaux qui auraient permis d’enrichir l’interprétation. Tout d’abord, même si la thématique de la perméabilité entre groupes est abordée à travers les propositions de Tajfel ou de Turner (cf. pp. 100, 231, 249, 267 et 284), on aurait pu parler plus abondamment des travaux sur le tokenism de Wright (qui ramène à la dimension de la méritocratie et du marché) ou de ceux de Ellemers sur le « Queen Bee Syndrom ». Ainsi, il aurait été possible d’aborder l’illusion d’une mobilité sociale (idéologie de l’« American dream » ou du « quand on veut, on peut ! ») comme principe de désamorçage du changement et de légitimation des inégalités entre les groupes. Dans le même ordre d’idées, une autre référence absente est sans doute celle des travaux de Duckitt et Fisher ou de Duckitt et Sibley (pour autant que cette dernière référence soit antérieure à la soumission de l’ouvrage), sur la perception des groupes dangereux ou dissidents. Il aurait ainsi été possible de faire un lien avec les prises de position envers des groupes marginalisés, fournissant un complément intéressant à l’explication en termes de privation relative.
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En conclusion, et au-delà des limites mentionnées, cet ouvrage représente une excellente synthèse des travaux qui s’intéressent aux processus de légitimation et de contestation de l’ordre social au niveau attitudinal. D’un point de vue empirique, les analyses proposées sont une véritable mine d’or et ouvrent quantités de pistes qui seraient à explorer. Outre les grandes lignes qui ont été présentées ici, chaque partie a fait l’objet d’analyses supplémentaires sur des points plus précis, qui étayent parfaitement les analyses principales. Les analyses présentées fournissent aussi des pistes intéressantes dans les applications politiques, car la pensée politique profane n’est pas la seule à adopter le type de raisonnement analysé dans l’ouvrage. En effet, les auteur-trice-s soulignent l’émergence de ces nouvelles politiques d’accès aux prestations sociales de plus en plus basées sur les conceptions de l’ordre social moral et méritocratique (contrôles et conditionnalité). Ainsi, en adoptant un point de vue définitivement critique, en s’acharnant à déconstruire les frontières entre théories qui souvent s’ignorent ou font semblant de s’ignorer, Christian Staerklé, Christophe Delay, Lavinia Gianettoni et Patricia Roux démontrent la pertinence de leur modèle dans l’analyse de leur problématique et la richesse d’une approche qui sort du strict cadre expérimental ou d’un cadre théorique unique.
Nicolas Roussiau (Dir.)(2008). Psychologie sociale de la religion. Rennes, Presses Universitaires de Rennes. par Christine Bonardi, Université de Nice Sophia-Antipolis.
Cet ouvrage collectif présente un tour d’horizon des ressources dont dispose la psychologie sociale pour aborder le phénomène religieux. Soulignons d’emblée l’originalité et le caractère novateur d’un tel projet compte tenu du peu d’ouvrages proposé par la psychologie francophone sur cette thématique de la religion. Ici, le fait religieux se présente autour de cinq parties distinctes et de 13 chapitres, qui examinent différentes notions en lien avec la socialisation, la personnalité, les rapports et fonctionnements des groupes, l’environnement et la santé. En une quinzaine d’années, l’intérêt de la psychologie sociale pour la religion présente une rapide montée en puissance, ses avantages tenant notamment en ce que son approche, d’une part, contourne à la fois l’écueil psychologique d’une démultiplication de l’objet religieux et celui, sociétal, d’une dilution de l’objet ; d’autre part, évite le réductionnisme d’une définition univoque comme le choix d’une seule des facettes de l’objet. La religion, phénomène diversifié et de grande ampleur, vu au travers de la réflexion psychosociale – qu’elle s’enracine dans un regard ternaire (Moscovici, 1984) liant les sujets sociaux à l’objet ou s’enrichisse d’analyses à plusieurs niveaux (Doise, 1982) allant de la dimension personnelle jusqu’à celle des idéologies – apparaît ici d’une grande richesse.
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En matière de fait religieux et de croyances, tout débute d’ordinaire dans l’enfance. La première partie du livre aborde donc le problème de la socialisation par le biais de la dimension religieuse, de son rôle dans l’acquisition de certaines normes et valeurs, ainsi que de sa nature. Qu’il s’agisse d’évoquer la logique intergénérationnelle, en soulignant l’évolution nette de la transmission des normes, croyances et pratiques religieuses, ou bien de traiter la problématique des enfants de migrants de confession musulmane, la religion présente/absente, surinvestie/sous investie, apparaît néanmoins comme fondamentale dans la logique des pertes et gains identitaires inhérents à la construction de la personne. Parfois pivot de la délimitation du soi et des rapports à l’autre, du social et de la culture, parfois lieu d’interférence avec des problématiques plus intimes déplaçant ainsi l’analyse et la focale, elle souligne l’importance de la confrontation entre groupes culturels porteurs de modèles et de valeurs distincts. Vient ensuite la dimension de la personne, examinée à partir de possibles corrélations entre d’une part, la religion en tant que phénomène intrinsèque versus instrumentalisé, et, d’autre part, des variables de personnalité telles que le LOC, l’estime de soi, l’autoritarisme, la suggestibilité ou encore le leadership. Si les rapports de cause à effet sont encore loin d’être établis, les corrélations existantes donnent un bon aperçu de l’impact de la religiosité sur la personne. Sur un autre plan, les travaux sur les changements d’attitudes ou de comportements en postulant l’unité de la personne et en consacrant l’approche de micro changements freinent l’étude de phénomènes plus amples. En effet, la conversion religieuse de type instantané constitue un bouleversement majeur qui signe à la fois pour la personne un changement d’identité et du cadre social dans lequel cette identité prenait place, une rupture radicale avec un modèle de vie et l’adoption concomitante d’un autre. Cette réorganisation du monde personnel implique sa reconceptualisation et une modification des pratiques de type religieux. Outre que les conversions à processus lent (cas par exemple des immigrés plongés dans une nouvelle culture prônant des valeurs religieuses différentes) ont été peu étudiées en psychologie sociale, on propose ici d’aborder le phénomène de la conversion par une approche de type dialogique considérant la croyance non comme un acquis pour la personne mais comme une construction dynamique, en constante élaboration au contact d’autres croyances. Du côté des groupes, pôle relationnel et « dysfonctionnements » collectifs servent de base à l’examen du poids des croyances sur le social. La discrimination religieuse, moins étudiée que les discriminations ethniques ou sexistes, présente pourtant de grandes similitudes avec ces dernières. Au cœur des débats politiques et philosophiques, source de nombreuses tensions entre groupes, la religion peut, comme les autres discriminations être étudiée à partir d’une théorie générale des préjugés et sous l’angle des formes modernes du racisme, utilisant des justifications de type culturel (violations par les minorités de certaines valeurs de la société d’accueil, problèmes suscités par la mixité culturelle…) qui constituent autant d’assises pour le refus d’une cohabitation entre groupes aux croyances différentes. La discrimination dessine en arrière plan la problématique de la place des groupes minoritaires
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au sein de la société et participe ainsi aux dynamiques sociales, identitaires ou catégorielles. Elle est aussi au cœur des débats médiatiques et sert à l’identification et à l’analyse officielle des conflits. Ainsi, pour le cas de l’Irlande du Nord, l’élément de conflit le plus aisément identifiable de l’extérieur est bien l’élément religieux qui, pourtant, n’est pas le seul ressort du problème irlandais. La dynamique intergroupe passe aussi par l’examen de la fonction sociale de certaines rumeurs et légendes urbaines qui, lorsqu’elles sont réactivées, peuvent servir à défendre appartenances religieuses, convictions, valeurs et croyances, c’est-à-dire en fin de compte l’histoire particulière des groupes religieux. À un niveau plus globalisant, les biais cognitifs de type « heuristiques » ou besoin de contrôle, largement étudiés par la psychologie sociale mais redéfinis en tant que dynamiques adaptatives de la pensée à la réalité quotidienne, peuvent permettre une analyse des croyances magico religieuses qui évite la partition religion/magie mais souligne leur capacité en tant que systèmes de représentations et d’explication du monde. Outre la plus grande facilité cognitive de la pensée et de l’adoption de certitudes magico religieuses par rapport au travail de rationalité scientifique, le recours à ces corpus de connaissances et de pratiques constitue une réponse adaptée et pragmatique aux incertitudes et angoisses existentielles, aux situations de pertes de repères ou de frustration sociale (précarité ou perte d’emploi, inquiétudes liées à l’évolution du monde…) parce qu’elle satisfait correctement au besoin de contrôle personnel. Par ailleurs, les mécanismes de fonctionnement des groupes relevant notamment de l’influence sociale telle que classiquement étudiée (soumission à l’autorité, conformisme…) trouvent un terrain fertile dans le fait religieux. L’organisation, le fonctionnement et l’impact des mouvements sectaires sur la psychologie des individus donne accès à une autre lecture de certains phénomènes religieux ou pseudo religieux qualifiés d’« excessifs ». Plus largement enfin, la croyance religieuse, étendue à la compréhension du mouvement « New Age » né dans les années 80, permet de faire le lien entre autres avec les dimensions de l’écologie, de la protection de la terre ou de la critique de la technologie. Ainsi peut-on envisager les liens entre la sensibilité perceptive à différentes catégories de risques inhérents à nos sociétés et l’adhésion à une structure de croyances cohérente mais non exclusivement centrée sur le registre du divin. Une nouvelle forme donnée au fait religieux et à la croyance peut être ? La santé et l’environnement sont aussi des domaines où le religieux transparaît et s’enracine. Aux États-Unis, on rend compte de l’accroissement de la spiritualité ou de la religion avec l’âge et l’approche de la mort. Ces éléments aident au bien être et facilitent la confrontation aux aléas de l’avancée en âge des personnes. Mais, en France, ce cadre d’étude fait cruellement défaut. Les pratiques à risque constituent en revanche un domaine plus étudié, bien que ce soit encore surtout aux États-Unis que l’on fasse le lien avec l’adhésion religieuse des personnes. Or, il semblerait que la force et la conviction de la croyance religieuse, renforcées par des pratiques quelles qu’elles soient constituent des facteurs déterminants de l’éveil de la sexualité à l’adolescence ou de la protection face au VIH. Ici encore, les études orientées vers les croyances manquent alors qu’il s’agit d’un problème aux
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implications sociales diverses (santé publique, enjeux financiers…), qui soulève de nombreuses questions, théoriques comme méthodologiques. La psychologie sociale de l’environnement témoigne, par sa seule existence, de l’importance de la prise de conscience des problèmes et du développement nécessaire de pratiques écologiques diverses. Pour étudier la responsabilisation écologique et les comportements pro environnementaux, attitudes, valeurs et croyances restent de bons prédicteurs. Néanmoins, les recherches basées sur les valeurs et croyances religieuses ne se sont véritablement développées qu’à partir des années 90. Or, dans la religion chrétienne par exemple, si l’on adhère avec force et conviction à l’idée que la nature a été mise par dieu au service de l’humain, ce dernier est légitimement fondé à la dominer et l’exploiter. Une telle croyance semble aller de pair avec une attitude anthropocentrique à l’égard de la nature et une faible adhésion aux pratiques écologiques. L’attitude écocentrique quant à elle pourrait faire cause commune avec une plus grande ouverture religieuse au monde qui nous entoure. Quoi qu’il en soit, c’est moins la nature des croyances religieuses elles-mêmes que la soumission aux pressions sociales du groupe d’appartenance qui régirait le degré d’intérêt porté à l’environnement. On notera ainsi le rôle prépondérant de la dimension sociale de la religion, levier puissant pour l’évolution des pratiques environnementales des personnes. À travers de cet ouvrage, on acquiert la conviction qu’il est possible, souhaitable voire indispensable que la psychologie sociale développe encore davantage son approche des phénomènes de religion, comme elle le fit antérieurement pour l’environnement, la politique ou la santé. Cet objet si particulier et si riche d’affects, de cognitions et de pratiques gagne à un examen qui dépasse les contenus doctrinaux et l’étude de la seule diversité des pratiques. Il contient en lui (comme les phénomènes de maladie, de politique, de risque ou de discrimination) toute la matière nécessaire à la mise en œuvre conceptuelle et méthodologique de l’approche psychosociale.
Consignes aux auteurs
Tout manuscrit ne respectant pas scrupuleusement les présentes consignes sera renvoyé à son auteur. Nous sommes à votre disposition pour toute question relative à ce document. LONGUEUR Entre 15 et 30 pages, dûment numérotées, dactylographiées en A4, en double ou 1,5 interligne, avec marges, comptant une moyenne de 2 000 signes par page, soit un total de 30 000 à 60 000 signes, sauf exception qui requiert l’accord du Comité éditorial. Les notes de recherche sont acceptées mais ne dépasseront pas 10 pages (environ 20 000 signes). FORME ET NOMBRE DE COPIES Deux exemplaires papier ainsi qu’une version électronique seront envoyés. Les documents électroniques (format RTF ou DOC uniquement) seront transmis en attaché par courriel à l’adresse <Pierre. DeVisscher@ulg.ac.be>. Il reviendra aux auteurs de s’assurer de la bonne réception des documents. Les nom et prénom de l’auteur, ses titres, affiliations, coordonnées postales, de fax et de courriel, les remerciements, les subsidiations et sponsorings éventuels sont mentionnés sur une page à part, de façon à garder la confidentialité de l’expertise du texte. Les pages suivantes ont un titre d’article en tête ou en pied de page mais ne portent aucune indication d’auteur(s). Pour conserver l’anonymat des expertises on évitera toute auto-citation du genre « dans notre précédent article »… DEUXIÈME MOUTURE Dans l’hypothèse où une version remaniée est demandée, l’auteur accompagne cette seconde version d’un justificatif détaillé explicitant les modifications effectuées et, le cas échéant, justifiant pour quelle raison il reste en désaccord avec les lecteurs. AUTEURS S’il y a plus de deux auteurs, le rôle respectif de chacun sera précisé en bas de page. RÉSUMÉ Les textes d’articles seront accompagnés, sur feuilles séparées, d’un résumé de 120 mots au maximum, en français et en anglais, axé sur les intentions, les objectifs, les résultats et conclusions, en évitant d’alourdir le texte par des références d’auteurs. Y sont joints un maximum de cinq mots-clés. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES EN COURS DE TEXTE Limitées au nom de l’auteur et à la date de publication, elles sont citées entre parenthèses. Elles sont réduites au strict minimum pour ne pas entraver la continuité du discours. S’il y a deux auteurs, les citer tous deux ; s’il y en a trois ou plus, les citer tous lors d’une première référence, ne reprendre que le premier auteur « et coll. » dans les références ultérieures. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES HORS TEXTE La liste est établie par ordre alphabétique. L’auteur est invité à en vérifier scrupuleusement l’exactitude. Les références suivent les normes de l’American Psychological Association (5ème édition). TABLEAUX, PHOTOGRAPHIES, GRAPHIQUES, FIGURES Présentés chacun, dans les dimensions adéquates, sur une feuille distincte de façon nette, précise et effectivement reproductible, évitant lignages, pattern de fond ou ombrage superflus, ils doivent être numérotés, précédés d’un titre et dotés d’une légende autosuffisante. L’auteur en vérifiera minutieusement l’exactitude et précisera l’endroit d’insertion dans le texte. Toutes instructions à leur sujet figureront sur une feuille distincte. Le coût d’éventuelles photos ou illustrations couleurs est à charge de l’auteur.
166 RECOMMANDATIONS MÉTHODOLOGIQUES Les présentes recommandations reprennent des remarques maintes fois émises, au cours de ces dix dernières années, par les experts d’articles proposés. 1. Définir avec précision le sens des concepts et vocables utilisés, en se référant aux dictionnaires étymologiques ou aux études taxinomiques appropriés ; préciser le sens des abréviations éventuelles. 2. Rendre justice aux sources : ne pas s’en tenir aux publications les plus récentes des seuls périodiques anglo-saxons ou non ; privilégier les ouvrages fondamentaux originaux. 3. Préciser les objets ou plans de focalisation et formuler avec rigueur les modes d’approche envisagés. 4. Élaguer l’information en la dépouillant du superflu ostentatoire. Les données statistiques seront exclusivement en rapport avec l’objet de l’article, évitant les précisions excessives (ex. : limiter les résultats statistiques à deux décimales). 5. Traiter avec clairvoyance les modalités quantitatives : • privilégier l’analyse quantitative factuelle des données, évitant tout étalage de formules superfétatoires et une sophistication mathématique ne concernant pas le psychologue social ; pour ce faire, le choix des outils statistiques utilisés se doit d’être dûment justifié par son appropriation au problème posé ; • circonscrire avec précision la population étudiée, préciser le mode d’élaboration probabiliste ou non de l’échantillonnage, décrire avec exactitude la composition de l’échantillon ; • éviter (entre autres) : de tirer des inférences de données quantitatives insuffisantes (ex. : un r de .30 n’exprime que 9% de la variance commune entre les variables) ; de recopier de façon automatique certains listings informatique (ex. : si .0001 exprime une probabilité, .000 est une certitude), d’utiliser des statistiques incorrectes (ex. : les c2 calculés au départ de cellules dont les fréquences théoriques sont inférieures à cinq) ; etc. 6. Le détail des travaux statistiques ou des programmes informatiques, les protocoles des études de cas, les attendus des observations et entretiens, de façon générale l’ensemble des données de base ne seront pas publiés mais doivent pouvoir être communiqués sur demande des évaluateurs, éventuellement par attaché. CONSIDÉRATIONS DÉONTOLOGIQUES 1. Les données susceptibles d’être combinées et présentées conjointement devraient autant que possible faire l’objet d’une publication unique. Leur fragmentation en plusieurs rapports, par petits paquets, n’est pas désirable ; sera notamment évitée toute découpe arbitraire de l’échantillon à seule fin de multiplication de publications. 2. Par souci de transparence et d’équité, la contribution effective de chacun gagne à être mise en évidence, proscrivant les listes d’auteurs cités de façon indifférenciée alors que leur rôle respectif est variable, parfois dérisoire. On diminue de ce fait la reconnaissance des mérites de l’auteur effectif tout en élargissant, parfois à bon compte, le dossier scientifique d’aucuns. Il y a lieu de ne mentionner comme tels que le ou les auteurs effectifs, quitte à préciser « sous la direction de », « avec l’aide technique de », « bénéficiant de l’expertise statistique ou informatique de », voire « avec l’approbation de » lorsque plusieurs collègues se rallient au texte d’un auteur initial.
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SOMMAIRE NUMÉRO 81
Belgique – Belgïe P.P. 4099 LIEGE X BC 1620
Bureau de dépot : Liège X P201031
N° 81 Périodique Trimestriel 1/2009 Janvier - Février - Mars 2009
Éditorial Pierre DE VISSCHER
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THÈMES
Les sportifs et les interactions stratégiques sous l’angle de la théorie des jeux expérimentale Éric DUGAS et Luc COLLARD
Exercer un métier du sexe opposé : quelles différences entre les hommes et les femmes ? Marie SUQUET et Pascal MOLINER
L’immigration et les droits de l’Homme dans les médias : une analyse représentationnelle en réseau Aline VALENCE et Nicolas ROUSSIAU
Représentations sociales de l’eau dans un contexte de conflits d’usage : le cas de la Sierra Nevada de Santa Marta, Colombie Oscar NAVARRO CARRASCAL
Approche normative de la motivation intrinsèque dans une situation intergroupe d’asymétrie de statut hiérarchique Andréa ADAM et Claude LOUCHE
Identification au lieu et aux pairs : quels effets sur la réussite scolaire ? Ghozlane FLEURY-BAHI, André NDOBO, Emmanuèle GARDAIR, Christine JEOFFRION et Aurore MARCOUYEUX
Mieux comprendre l’engagement psychologique : revue théorique et proposition d’un modèle intégratif Anne BRAULT-LABBÉ et Lise DUBÉ
TECHNIQUES D’ANIMATION
Une situation de formation au diagnostic et à l’intervention en organisation dans le cadre d’un (hyper)conflit : le cas de Jérémy (1) Daniel FAULX et Sophie DELVAUX
Une situation de formation à la conduite d’une négociation en contexte conflictuel : le cas de Jérémy (2) Sophie DELVAUX et Daniel FAULX
Notes de lecture
Les Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale
C.I.P.S. 1/2009
Les Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale
Les Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale
CIPS – N.09/1 ISSN : 0777-0707 ISBN : 9-782874-560842
Les Editions de l’Université de Liège
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Les Editions de l’Université de Liège 27/03/09 11:46