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the Library of
Frank S^pson
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2016
https ://arch ve o rg/detai Is/degasOI af o_0 i
.
I
«
I
DEGAS
ÉDITION DE LUXE
II
a été imprimé de cet ouvrage
une édition de luxe sur papier du Japon à
60 exemplaires numérotés.
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n
BUSTE DE DEGAS.
P. Paulin
SC.
PAUL LAFOND
H.
PARIS FLOURY, Ã&#x2030;DITEUR 1
,
Boulevard des Capucines
1918
/
INTRODUCTION
Notre époque, quoi qu’on en être mise
en parallèle avec
les
plus brillantes, les plus favorisées
grands
produit des maîtres aussi
peut, au point de vue des arts,
ait dit,
que ceux des
Delacroix, Corot, Millet, Puvls de Chavannes,
honoré tous leurs pairs
les
d
siècles passés.
Manet
;
elle a
Ingres,
n’auralent-ils pas
temps, n’auralent-ils pas brillé au premier rang à côté de
Italie,
d Espagne, des Pays-Bas Titien, Velâzquez, Rembrandt, :
Rubens, etc.? Différents de
tels devanciers, ils
ne leur sont point inférieurs.
D’autres artistes contemporains seraient à placer à côté de ceux que nous
venons de nommer, un peu après eux peut-être, sauf un, qui leur égal école,
:
Edgar Degas. Celui-là
en n’importe quel
est
au moins
dans n’importe quelle
est sans équivalent
un maître
siècle. Il est lui, c est-à'dire
qui,
au
premier abord, étonne, trouble, mais bientôt après éblouit d’un éclat sans pareil. C’est
un de
ces phares destinés à éclairer
à indiquer des voies nouvelles, particulier les distinguant « «
un de
ces
»,
plus ou moins vite, aurait-il
hommes quand
ils
monde
des arts,
qui ont reçu
un don
de leurs semblables.
L’humanité, quoi qu’elle fasse et qu
marche
hommes
le
dû
écrit
G. Planche,
la suite
de quelques
elle veuille »
ajouter,
«
à
,
découvrent un pays nouveau, une vérité nouvelle, une
face nouvelle de la vérité... »
Degas
est
même; mais
un de
ces
hommes. Longtemps
l’impopularité n‘est-elle pas
—5—
le
lot
il
fut
méconnu, conspué
des esprits supérieurs?
L’originalité est toujours honnie rité se plaisent
dans
les redites
manière nouvelle d’exprimer
Devant une œuvre où abandonnés ou
pour commencer. L’ignorance
et la vulga-
Une
où, sans effort, elles se retrouvent.
choses produit une sorte de
les
scandale.
méthodes, procédés ou errements antérieurs sont
les
délaissés,
qui
ne se rattache pas, remarque
Gourmont, à quelque chose de connu et déjà compris, se sentent menacés. Et non seulement les gardiens de
les
Remy
gardiens de
l’art, m.ais
de l’art
aussi la
généralité des esprits.
Photo Durand-Ruel.
SALLE D'EXERCICES DE DANSE
On
n’entre pas de plain-pied dans l’œuvre de Degas.
soi-même pour en éprouver
rentrer en
A en
la vérité,
la
Il
faut d’abord
séduction.
quelques-uns, dès ses premières productions, reconnurent
lui le véritable
dépositaire des grandes traditions de l’Ecole française
;
mais ceux-ci étaient étrangement peu nombreux. Degas,
le
peintre de la vie moderne, s’affirme
un pur
classique qui,
—
quelque étonnante que la constatation en puisse paraître s’apparente beaucoup plus aux anciens qu’aux modernes, aux primitifs qu’aux contemporains. Il forme le chaînon qui rattache le passé, la bonne et solide tradition,
M.
prolonge
à l’avenir;
il
la
Jacques Blanche,
il
relie
magnifiquement.
Comme
l’a
noté
ce passé au plus immédiat présent. Avec
Manet, à un autre point de vue,
il
libère la peinture
—6—
du
XIX® siècle des
Collection
X
l'hoto DufAnd-Ruel.
CHANTEUSE VERTE (Pailel)
contraintes pédantes et routinières, des entraves de l’enseignement acadé-
mique, des formules ressassées à
A
songer.
eux deux,
ils
la
satiété,
du convenu, du
ramènent à
1
du men-
faux,
observation directe.
L’art de Degas est tout de composition.
Il
est fait
de réflexion, de
volonté, d’accent incisif, qui cherche dans les gestes et les attitudes des
dans
êtres,
dégageant;
apparence des choses,
1
il
est toujours
1
accord et
la
ligne définitive s en
absolument classique, toujours dans
la
donnée des
maîtres. «
La beauté
des courbes,
le
style des lignes
Puvis de Chavannes —
se retrouvent
fresques des primitifs
observe à son tour
»,
Quels que soient
d’un Degas
au flanc des vases grecs
M. Maurice
— et
et
d’un
dans
les
Denis.
motifs choisis par Degas, sa façon singulière,
les
personnelle, ironique de les comprendre, de les traduire, pleine de sous-
entendus, de puissance, de sincérité, en
On
a voulu classer
Degas parmi
les
fait
des œuvres hors de pair.
impressionnistes
quelle erreur
;
!
Cette confusion tient au modernisme particulier de ses motifs de composition, à sa façon
monde
de
comprendre, tous, ou presque tous, empruntés au
les
des danseuses, jockeys, modistes, repasseuses,
ou de café-concert.
C est
filles
de brasserie
seulement dans ses sujets que Degas se montre
révolutionnaire, dans leurs perspectives, leurs coupes. Ses compositions
à mesure
qu
moderne.
Il
M. Arsène
il
avance en âge
n’y a pas d’art nouveau.
Alexandre,
davantage que chez
d
— expriment à l’extrême Comme
l’a
très
le
—
sens de la vie
justement observé
il y a de l’art ou il n’y en a pas. Où en trouver Degas? Son œuvre est toujours de « haut style,
de supérieure ironie ». Degas restera une des plus hautes et des plus subtiles intelligences de notre temps disons mieux, de tous les temps, spontanée, personnelle, d une étonnante acuité, élargie par l’observation toujours en éveil. Il offre un originale aisance et
;
des exemples
les
ment aux exigences de dessins,
nous
sans
Degas
lui.
fait-il
trer, excellant
du développement d’un
plus typiques
est
artiste
conformé-
sa nature. Aussi, par ses compositions, ses moindres
éprouver des sensations que nous n’aurions jamais eues
un des
esprits les plus suggestifs qui se puissent rencon-
en boutades fines au possible, en mots à
Laissons l’homme pour
le
moment
au peintre longtemps méconnu
et
— nous y
que
les
1
reviendrons
emporte-pièce.
— retournons
années, plus justes que les
hommes
remettront à sa véritable place, au tout premier rang. Aussi bien, n’est-ce pas déjà
fait,
en grande partie? 8
—
En
1874, dans son Journal,
qu’il ait
vu
cette vie
».
« le
mieux
attraper,
J.
de Concourt note que Degas est l’homme la copie de la vie moderne, l’âme de
dans
Six ans plus tard, en 1880,
Huysmans demande quand
place que ce peintre devrait occuper dans
reconnue
:
1
art
la
haute
contemporain sera enfin
cet artiste est le plus grand
quand comprendra-t-on que
que
nous possédions aujourd hui en France?
Photo Durand-Ruel.
Collrction Knoëdler.
LA RÉPÉTITION DE DANSE
«
Artiste puissant et isolé
mainte
et
M. Degas SI
juste
»
— a encore
dit
Huysmans, auquel nous aurons
— sans précédents avérés, sans lignée qui
mainte fois recours' suscite dans
chacun de ses tableaux
la
sensation de l’exact étrange,
qu’on se surprend d’être étonné, qu on s’en veut presque
renferme une énergie expansive,
qu’il
vaille,
».
Son
art
exprime par une sorte d’abrégé
d’âme, dans des corps vivants en parfait accord avec leurs alentours. Dessinateur impeccable, Degas est peut-être
—
9
l’artiste
—
chez lequel
la
forme
atteint
le
plus haut caractère.
Ingres
Degas, beau.
;
y a un dessin beau ou
il
est le
Il
sentiment de
la
pour
l’enveloppement
stupéfier.
Il
Le
dessin, prononce
place,
particulière,
si
sa
des personnages qu’il met en
n’est pas
a compris, rompant avec
laid, voilà tout. »
forme. Celui de Degas est souverainement
Sa précision de mise en
raccourcis, faits
n’y a pas de dessin correct ou incorrect, déclare
« Il
les
moins puissant préjugés, les
science
des
scène,
sont
coloriste, délicat harmoniste.
modes
et les pratiques,
que
le
cycle de l’art n’est jamais fermé, qu’il y a toujours à chercher ce qui n’a pas
encore été découvert, à dire ce qui n’a pas encore été exprimé doit se transformer
sans
trêve,
comme
les
que l’art mœurs, changer comme les
Photo Durand-Ruel.
LES REPASSEUSES
Durand-Ruel.
MODISTES
LES
Rouart.
A.
collection
Ancienne
Collection de Sir William Eden.
Photo Durand-Ruel.
BLANCHISSEUSES (Peinture)
habitudes, suivre l’évolution des esprits et des goûts, ce qui ne veut pas dire
—
—
de là se mettre à la remorque de la mode. de Degas est inattendu, déconcertant, suprêmement
loin
L art
et raffiné à la fois.
Il
n’est qu’à lui,
formes inédites, dérangeant sa vision,
il
Jamais nalité
l’a il
les
uniquement à
lui.
Il
osé, simple
s’exprime par des
habitudes invétérées. L’artiste n’a pas altéré
subie et la rend. n’y eut chez lui recherche de parti-pris, inquiétudes d’origi-
quand même,
désir
d étonner, de
forcer l’attention
;
Degas n’a qu un un
but, celui de rendre ce qu’il voit, d’interpréter ce qu’il rencontre, en
mot de
traduire la vie dans ses manifestations journalières et multiples.
Aussi son complet oubli des modes d’expression traditionnels empruntés à
la
routine apparaît-il
simplement
d une
comme une
le véritable
attitude,
de
de ses primordiales qualités.
caractère d’une physionomie moderne,
la silhouette
de l’homme
—
12
—
et
de
la
femme
Il
découvre
d un
geste,
contemporains.
L’accord dans ses compositions est intime entre Il
n’est plus nécessaire aujourd’hui
pour employer
les
termes d’un vieux
reproduction du beau de vision de
qu’à
un
1
artiste.
Il
ne
la
nature
s’agit
;
il
les
personnages et
de démontrer que cliché,
n
les lieux.
beau de
l’art,
est pas essentiellement la
procède surtout de
pas de chercher à élever
soi-disant idéal. Voilà longtemps déjà
le
que
la
pensée et de
la
les sujets traités jus-
cette constatation est
acquise.
Degas demeurera anglaise, froide, pleine
plus éloquent des peintres, mais de cette éloquence d’humour. Toute recherche de voie nouvelle, c’est-
un
progrès, car rendre la vie, la vie qui s’agite, bruit,
à-dire actuelle, est s
le
exprime alentour, doit être
Dans son
le
but de tout véritable
artiste.
Essai sur la peinture, Diderot écrit, à propos des tableaux
exposés dans les Salons de son temps
:
«
On
regarde,
on tourne
la tête, et
Atelier de l’Arliite.
JEUNES FILLES SPARTIATES PROVOQUANT DES GARÇONS A LA LUTTE (Peinture)
1
on
ne se rappelle rien de ce qu’on a vu. Nul fantôme qui vous obsède vous suive.
Degas
A Il
Que
»
vécu à notre époque,
n’a-t-11
production d’un
!
moment de
n’importe quel
son existence, Degas a poursuivi
un
r a poursuivie sans trêve ni repos. Jamais
tation.
et noté la
et qui
Il
va imperturbablement droit devant
d’audace, de volonté inflexible ?
que Degas dans mieux interpréter les loin
De
physionomies.
1
lui.
Où
—
semble, certes, impossible d’aller plus
Il
observation des caractères, des tempéraments, de
gestes, les
mouvements,
les poses, les attitudes, les
dessin plus vrai, plus serré, plus caractéristique de
n’y en a pas dans toute
il
la vie.
d’hési-
trouver plus d’énergie,
dissemblance prise entre une attitude et une autre, estime Sizeranne,
ou
instant de faiblesse
main
trant est servi par la
plus sûre.
la
1
Il
M. Robert de
Ecole française. L’œil
n y a pas deux
le
la la
plus péné-
teintes interchangea-
bles.
De
ces divers sujets de danse, de café-concert, de cirque, de courses,
de brasserie, de modistes, de repasseuses, qu tout ce qu’ils renfermaient
;
d’être plus simple, plus vrai
des grands sentiments faux
;
il
;
a,
il
il
a tour à tour traités,
en un mot, épuisé
a horreur
la
il
a tiré
matière. Impossible
du mensonge, des grands mots
impossible en
même
et
temps, répétons-le, d’être
plus audacieux.
Jamais Degas n’a varié, tergiversé, et
que dans chacune de ses œuvres, s affirme fermement sa volonté de dire ce qu’il entend dire. Son caractère, c est d’être lui, unique, non pas dans ses sujets, car ils n ont rien de particulièrement nouveau, mais dans sa façon de les comprendre et de les interpréter.
semble dure étonne et
qu
il
et
Exempte de toute convention,
effraie les esprits timorés. Est-elle
se permet, les stigmates
la vérité.
secret
J’oserais
du beau par
de
l’être
observant, en les
ironique?
humain
presque dire que,
le vrai.
dans cette recherche, les
sa vision, qui à force d’acuité
mordante, n’est qu’impartiale, impassible; par cela même,
plus les atténuer que les mettre en relief.
que
c’est ainsi
Il
Non
qu’il découvre,
n’a cherché
comme
il
que
Ingres,
il
Qu’il ait trouvé une certaine joie,
Que, dans l’étude de poursuivant jusqu’au tréfonds de leur c’est possible.
elle
pas. Les témérités
n’entend pas
la vérité, rien
a cherché
même
le
amère,
ses modèles, en
être et les mal-
menant jusqu’à une apparente cruauté, l’artiste oublie la pitié, c être encore vrai mais au point de vue pictural il est impossible de ;
est peut-
s’intéres-
ser davantage à eux. Il
a compris
que
l’art
ne consiste pas à rendre des êtres
~
14
—
et
des choses
ÉTUDE DE NU POUR LES MALHEURS DE LA VILLE D’ORLÉANS
Atelier de l'Artiste.
D’ORLÉANS
VILLE
LA DE
MALHEURS
LES
sous leur rapport purement matériel, mais surtout et avant tout suivant
A
sens de la vie. naturelle,
il
ya
côté de
la partie
1
arrangement
local, extérieur,
lesquels
la
le
disposition
humaine, dramatique, passionnée. Degas y a toujours
tendu, mais d’une façon contenue, insaisissable pour ficiels,
de
les
esprits
ne savent point voir ; car voir ne consiste pas à tout
super-
recueillir,
mais au contraire à ne voir que ce qui compte, a une valeur, une importance.
Degas possède comme pas un primer ce qu
Ce
il
cette faculté
si
rare, et,
en plus,
le
don d’ex-
sent.
n’est pas lui, esclave
de
la vérité qui,
teuse de café-concert, une acrobate, une
fille
pour une danseuse, une chande brasserie, une habituée de
bouibouis de Montmartre, une modiste, une repasseuse, fera poser un
modèle quelconque. S’il travaille constamment d après nature et ne laisse rien à l’imprévu, c’est que, comme Ingres, sachant que le modèle ne donne jamais complète-
on veut exprimer, ni comme caractère, ni comme dessin, ni comme couleur, ce modèle néanmoins reste indispensable au point que l’on
ment ce que
1
ne peut rien
faire sans lui.
Ce
qu’il savait aussi à merveille, c’est qu’il n’est
pas moins indispensable de ne point servitude.
L étude
Degas 1
na
expresssion
d après nature
pas tenté,
comme Gros
du mouvement
C’est dans
la vie
le copier,
car alors l’œuvre sentirait
n’a jamais été pour et Delacroix,
lui
d’adapter l’Histoire à
violent, à la passion portée
contemporaine, dans
la vie
la
qu’une indication. au paroxysme.
des gens qu’il rencontre,
Photo Durand-Ruel.
AVANT LE DÉPART
JEPHTÃ&#x2030;
DE
FILLE
LA
(Peinture)
coudoie, que Degas a cKercHé les motifs de ses principales compositions,
que on n’aille pas croire que ses fréquentations avec Manet, Alph. Legros, Fantm-Latour, Bazille tué pendant la guerre de 1870, Cals, qui se rattachent incontestablement à la tradition, comme lui, y soient pour quelque chose. Encore une fols, Degas ne subit l’influence de personne. C’est bien plutôt lui qui influença ses amis et son entourage. S il a, à maintes et maintes reprises, exposé avec le groupe de ses tranches de
pourrait-on dire
vie,
;
et
1
—
—
des Impressionnistes
— d’abord à
leur première exposition, en 1874, boule-
vard des Capucines, salle Nadar, où
montra jusqu’à dix ouvrages,
il
de danse, de courses, de blanchisseuses, de nu, ce
n’est pas par
mais par sympathie personnelle, par camaraderie, par similitude de
d’idées,
goûts, par besoin de protester contre les tendances à
jurys
sujets
communauté
du Salon
Tout au plus
officiel.
avec
eut-il,
les
la
mode, contre
Impressionnistes,
les
l’atti-
rance des sujets modernes et contemporains. Mais c’est une erreur de
comme un de
considérer il
en guida
L art
le
groupe.
de Degas
leurs chefs et d’écrire qu’après la
La technique
est
au-dessus de
vateurs, lesquels ne regardent
au contraire,
triste,
que
impressionniste n’était pas 1
ironie.
la vie,
en témoins subtils
ne pas dire d un misanthrope. Chez Degas, directe s’exprime par le
maximum
un
de ses
pastels,
sent par
sûreté
du
Ce
amer, parfois
geste,
et avisés,
les
il
est,
apparences, tout au moins,
même
presque cruel. Sa vision
un mouvement volontairement
d’expression avec
ses dessins, la
sienne.
la
celui des vrais obser-
grave, sévère, c’est celui d’un moraliste austère, pour
sont celles d’un sceptique
obtient
Comme
le
mort de Manet,
le
brutal.
Il
minimum de moyens. Nombre de
ne sont que des abrégés, mais ces abrégés s’impode la conception, de la mise en feuille.
trait, l’inédit
sont des résumés, des généralisations, des interprétations de la vénté
absolue, expressifs au possible, d’une précision incroyable.
On
y trouve avec le caractère de sa personnalité, la constante inquiétude de la vie, de la vie passionnée, vibrante, suraiguë. Il suggère dans les moindres de ses crayonnages,
la réflexion,
douloureusement.
est pessimiste.
ne
Il
sont-ils pas frères?
chantement.
—
Comme lui,
Il
il
le
retour sur soi-même.
De
Pascal
—
les
Il
impressionne
génies en tous les arts
a la concision, la profondeur, l’austérité,
emprunte
le
moins possible au monde
le
désen-
extérieur
—
peu qu’il est permis à un peintre de le faire. Il n’enjclive ni n’ajoute. Il abrège, au contraire. Inutile de souligner et de répéter. Son tour d esprit fin, ironique, d’un grand bon sens, qui n’a rien de sentimental, lui interdit l’amplification. Il est vrai avant tout. Son art a une sorte de rigueur scienaussi
18
—
ESQUISSE SUR TOILE POUR SÃ&#x160;MIRAMIS.
Atelier Je F Artiste.
i
kf'-
m fe
.
BABYLONE
DE
MURS
LES
ÉLEVANT
SÉM1RAM13
mathématique que le public, assoiffé de convention, de mensonge et d’exagération, n’admet pas volontiers. Son œuvre, rationnelle, réfléchie, méthodique, expressive au suprême degré, nous ne le répéterons jamais assez, n a rien à voir avec les notations tlfique et
superficielles, les croquis pris
en courant. Ses dessins, qui semblent l’expres-
sion de la spontanéité, sont étudiés avec
vingt fois le
même
trait,
bras, d’une jambe, sur
un
une
attitude,
une
position.
ses crayonnages, dans ceux qui paraissent
charges sont toujours nombreuses. poursuivie, assez étudiée.
Aux
donner des
avis,
voulait bien
soin extrême.
revient à maintes reprises sur le
recommencez-le, calquez-le
;
Jamais
le il
Dans
fait et refait
Il
mouvement d’un
les
plus simples de
plus primesautiers, les
ne trouvait
sur-
forme assez
la
quelques rares jeunes peintres auxquels il
répétait sans cesse
recommencez-le,
:
«
Faites
un
il
dessin,
et calquez-le encore. »
Toute œuvre sortie des mains de Degas est raisonnée. Il n’improvise point. Quoique souvent Inachevés, d’apparence parfois lâchée, ses moindres dessins, pris, repris, étudiés dans la solitude de l’atelier, sont, on peut dire, indicatifs, complets. Ils n ont rien du croquis terre à terre, de l’à peu près, surtout du croquis spirituel. Tous, quels qu’ils soient, dénotent le maître, portent sa griffe indélébile. Il suffit pour s’en convaincre, de feuilleter la série d’entre eux, reproduite et publiée chez l’éditeur Manzi. « Aucun art n’est moins spontané que le mien”, avoue Degas. «Ce que je fais est le résultat de la réflexion, de l’étude des maîtres, que sais-je? Affaire d’inspiration, de caractère, d’observation patiente
Une et
».
des primordiales qualités de Degas, c’est de montrer ce qui existe
que cependant personne n’a soupçonné avant
lui, et cela,
grâce à cette
observation tenace et profonde qui l’incite à ne laisser de côté aucun caractère typique et définitif.
Ne
considérât-on son œuvre qu’au point de vue psychologique et docu-
mentaire, elle conserverait une importance considérable.
George Moore, en son étude sur Degas
raconte, à propos de ses
de blanchisseuses, dont nous parlerons plus « Les artistes sont si pressés que nous loin, que le maître dit un jour faisons notre affaire des choses qu’ils ont oubliées ». Soit, mais il faut du compositions de modistes
et
:
(I)
Publiée d’abord dans
une revue
d’art
anglaise
et
Opinions
20
—
réimprimée dans
le
volume
:
Impressions ar
ÉTUDE DE NU POUR SÉMIRAMIS.
Atelier Je l’Artiste.
iS>-CV-4'-ïf'A
*.
Collection de
M**
Chaujmon.
FEMME NUE
ASSISE
RELEVANT SES CFIEVEUX
comme
génie pour tirer parti,
l’a
il
de sujets que personne avant
fait,
lui
n’avait découverts.
Degas
est
certainement
le
maître qui a
vie à la peinture contemporaine.
le
plus contribué à Infuser
humain avec une
a épié l’être
Il
la
acuité
suraiguë et constante.
La
delaire, est la vérité
du dessin des artistes suprêmes, selon CK. Baudu mouvement. Degas possède au plus haut degré ce
du mouvement
juste, précis, inattendu, indicateur, vrai, sans exagéra-
sens
plus grande qualité
résume d’un coup de crayon. Jamais il ne substitue subjugué par la palpitation de la vie. Il sait, mieux que personne, qu’il ne s’agit pas, pour rendre la modernité, d être un habile couturier, qu’il ne suffit pas de revêtir un trottm d une
tion ni atténuation, qu’il
l’attitude à l’action, restant toujours
toilette
Inutile d’ajouter
et
de
faire
toilette, restera la fille, et la
gardera l’allure de
les haillons,
redites,
une grande dame. La fille, grande dame, même sous grande dame.
de Worth ou de Doucet pour en
sous n importe quelle
la niaiserie,
la
que Degas a horreur des compositions banales, des des sujets anecdotiques et pittoresques.
Son intelligence aisée, son esprit mordant, l’éloignent du conventionnel du pathétique, presque toujours mélodramatique. Degas ne s’est heureusement jamais piqué d’impartialité il a le cou;
rage de ses antipathies
tempérament,
et
;
mais
elles
ne vont qu’à ce qui
est veule, froid, sans
dénué de caractère.
Degas a le sens des sacrifices, il n’hésite pas à éliminer ce qui est superflu, à subordonner le détail à l’ensemble. Il recherche expression par harmonie des formas et des couleurs, qu’il préfère par
le
Les lignes
sujet.
que
1
très
justement
—à
1
l’harmonie
d’une figure occupent avec
essentielles
véritable place, ainsi d’ailleurs
—
accents. Par
les
une
telle
lui leur
synthèse,
il
mais
le
atteint le style.
Y
quelque chose de mystérieux dans son art? Peut-être
a-t-il
mystère ne consiste pas dans l’élimination de diverses formes, la
il
ment de tion telle
la
mise en page du
que
la
sujet,
Degas,
le
premier sans doute, a osé peindre
conçoit une esthétique vieillotte et surannée.
personnages coupés par
le
réside dans
suggestion de ce qui n’est pas exprimé. Avec son extraordinaire raffine-
des tableaux en dehors des errements traditionnels, bouleversant
d
;
ordinaire,
il
moyen de
le
S
il
la
composi-
montre des
cadre, des perspectives inusitées avant lui
—
si
que c est développer en groupes tandis que la
regarde ses modèles de haut en bas, les voir se disperser, se
—
;
22
—
il
est vrai
Ancienne
collection
Ro^er Marx.
Photo DurandÂŤRuel.
LA TOILETTE
plupart des peintres
les
longues réflexions sur
la
Le
observent de bas en haut
conception et
1
—
c’est à la suite
équilibre de la ccmposition.
Lavedan apostrophait ainsi, en 1845, es artistes Tout est à faire. Vous avez devant vous des mondes à
critique Désiré
de son temps
:
«
1
découvrir, dont personne n’a encore essayé côté, plus tard.
de
la
route mystérieuse.
»
De
son
« La vie parisienne est féconde en Le merveilleux nous enveloppe comme voyons pas. » Degas a découvert ces mondes
Ch. Baudelaire
écrit
:
poétiques et merveilleux.
sujets
l’atmosphère, mais nous ne
le
dont parlait Désiré Lavedan, par Ch. Baudelaire.
Il
merveilleux de
le
a compris
que
dans un angle
êtres et les choses
d’un appartement, à travers
parisienne soupçonné
existence contemporaine
1
du milieu de
spécial,
la rue,
fait
voir les
des fenêtres
d’un coupé, d’un tramway, des por-
les vitres
d’un compartiment de chemin de
la vie
Degas a su adapter son art à l’heure qui passe. Ses interprétations furent d’abord considérées comme une audace sans pareille. Aujourd’hui il n’en serait plus de même néanmoins la compréhension de son œuvre reste ardue il y faut le temps et la réflexion. tières
fer.
;
;
Quand nous déciderons-nous
à ne plus juger de la peinture d’après
d’autres tableaux, surtout des tableaux anciens
—
c’est-à-dire d’après des
conventions, des règles établies par des peintres, mais seulement et unique-
ment d’après dans
la
la
peinture
l’anecdote et
le
nature? l
Quand donc
consentirons-nous à ne plus chercher
imitation d’autres peintures? à ne plus nous perdre dans
pittoresque, choses qui sont à l’antipode de l’art?
Degas
note, sans plus, ce qu’il faut voir, afin qu’à notre tour, dans notre colla-
boration spirituelle, nous ne voyions que ce qu’il a voulu montrer.
Certains critiques pensent qu’il est allé sans cesse à de nouvelles audaces, à des tours de force de plus en plus osés
en plus sommaire,
et
que
plus qu’une débauche de tons. le
;
que
sa facture est
devenue de plus
sa coloration, dans les dernières années, n est
Ce
sont
là,
des erreurs manifestes. Toujours
maître reste sincère, aujourd’hui libre, demain scrupuleux.
A
un moment donné, de bonne heure, presque au commencement de sa carrière, sa conception prend une forme abstraite, elle remplace la copie servile de la nature il choisit ce qui lui est nécessaire et abandonne mais, en même temps qu’il précise le dessin, il généralise la le reste forme. Il se soumet toujours à la régularité des mouvements et au classement des valeurs. Tout cela, chez lui, est volontaire et profondément réfléchi. ;
,*
Que
dire de sa manière, à la fois indépendante et classique,
—
24
—
si
éloignée
Collection Alcxii Rounrt.
POR IRAIT DE Pastel.
Mnii.'
D,
M.
Il
I lili
IWB
Ml
IIMIII
-
.
Collection Ernest Rouart.
PORTRAIT DE FEMME ÂGÉE
proche à
et SI
la fois
de renseignement des maîtres,
et qu’il
a scrupuleuse-
ment adaptée aux nécessités de l’heure présente? La puissance d’originalité d’un artiste, quand il s’agit d’un maître, n’est jamais diminuée ni entravée par la discipline. Si Degas a profité, comme c’était son devoir, des conquêtes de ses devanciers, il a élargi le domaine de la peinture, tout en suivant 1
ancienne orthographe des maîtres
et tout
en se rattachant à leur tradition,
mais sans pour cela avoir tenté de s’assimiler leurs procédés de facture ou
de composition. Et
c’est,
de
montré
la
leur qu’il s’est
précisément, en agissant d’une façon différente le
plus fidèle à leur égard
;
qu’il a
su être, à
son tour, original.
Degas a créé une composition nouvelle, il a aussi découvert les rapports des personnages qu il interprète avec les lignes immobiles du heu. En ceci, doit-il quelque chose aux Japonais? Peut-être; en tout cas, cette transposition savante est déjà du génie. L’art de Degas, fait de probité, de science et de simplicité, a toujours méprisé la virtuosité. Qu’est-ce d’ailleurs que la virtuosité, sinon une singerie du goût et du style, remplaçant la sincérité par l’habileté, l’aisance, par le procédé une sorte de paraphe trop affiné, trop élégant, trop superficiel ? Chez Degas, nulle manière chacune de ses œuvres est une suite de corrections, de retouches, de reprises, de suppressions surtout. « Toutes les belles choses, a-t-il dit, ne sont-elles pas faites de renoncement ? » Réduire art à l’adresse, en chercher, en représenter la sensation d un moment, n est-ce pas l’amoindrir? Il ne s’agit pas, en un tableau, d imaginer une anecdote et de l’agencer finement il ne s’agit pas davantage du plaisir des yeux et de l’esprit, mais bien d’une chose beaucoup plus importante, beaucoup plus haute, d’émotion humaine. Aussi, dans l’œuvre du maître, ne rencontre-t-on aucune subtilité sentimentale, nulle mièvrerie, nulle fadeur, nulle recherche littéraire ou philosophique il n’y a que de la peinture, rien que de la peinture. Cette œuvre satisfait pleinement à la définition d Ingres Si
;
;
1
;
;
—
le secret
du beau dans
le vrai
— peut-être encore plus particulièrement
dans ses dernières manifestations,
les
nus, dont nous aurons longuement
que de la peinture, sans plus, dénuée d agréou anecdotique. L’importance du sujet ne réside-t-elle pas beaucoup plus dans la sensibilité picturale de artiste, que dans ce sujet lui-même, dans V invention du ton et de la forme, dans la disà parler, lesquels ne sont bien
ment
pittoresque, épisodique
1
tribution calculée de l’ombre et de la lumière?
—
28
—
Divers écrivains se sont demandé
où
semble ne rien
il
livrer
Degas
si
de lui-même.
absent de son œuvre,
était
Etait-il
de l’opinion de Flaubert,
soutenant que toute œuvre d art est condamnable quand l’auteur se laisse deviner ou révèle quelque chose de lui-même?
Degas, de son
Tout au
ccmme
ne sache rien de
l’on
l’écrit
M.
Camille Mauclair,
contraire, à notre avis,
s’il
trouble, inquiète,
de son émotion,
plaisir,
est-ce bien exact?
Que
perturbe, c est que lui-même a été troublé, inquiété, perturbé. la
fine élégance des
des danseuses,
la
chevaux de pur sang,
Il
le
misère
Il
a senti
et la gracilité
mièvre
puissance nerveuse des blanchisseuses,
populacière des chanteuses de café-concert,
de cirque,
la
vée soi-même. L’émotion de celle
turale
et
béate et
charme évaporé des modistes.
semble impossible de procurer une émotion vraie
ment
la bêtise
musculaire des acrobates
la force
l’artiste,
du
l’on
si
ne
l’a
éprou-
provoque automatique-
créateur,
Emotion toute picd’observation sans doute, mais qui n’en demeure pas moins
du
spectateur, qui devient son collaborateur.
de l’émotion. Dans ses
effigies
de malandrins
et
de fous de Cour, Velâz-
quez ne nous impressionne-t-il pas jusqu’au tréfonds de notre être? Pourquoi
1
œuvre de Degas
n’agirait-elle pas
sations, chez l’artiste, s’accumulent
de
même
ce sont de véritables cristallisations. Et c est similaires,
dues à une
M. Maurice
même
à notre égard? Les sen-
pour déterminer des
états durables
du groupement de
:
sensations
une grande justesse séries de courses, de
inspiration, suggère avec
Denis, que sont sorties, chez Degas, ses
modistes, de blanchisseuses, de cafés-concerts, de nus, etc.
On
peut appliquer à Degas cette pensée de Bonald
:
«
Un homme
ne
peut comprendre et produire d’art que celui qui interprète sa propre nature.
L art,
en tant qu expression du sentiment de
se transformer aussi souvent
que
la société
la société, doit
«
par conséquent
même.
Degas a toujours reconnu le talent là où il se trouve; il n a prétendu, ni renverser une ancienne peinture, ni en créer une nouvelle. Au demeurant, nul ne sait mieux, ni aussi bien que lui, l’histoire de l’art, des chefs-d œuvre des musées de France et d’Italie. Il
avec
a visité les Pays-Bas, l’Angleterre, l’Espagne.
un
Il
apprécie
les
maîtres
sens critique des plus subtils et des plus affinés, sachant dire sur
chacun d’eux
le
mot
un culte pour une Bacchanale
définitif. Il professe
a copié,
comme nous
Salines,
du Musée du Louvre. Mais
verrons plus loin,
cette admiration
—
30
—
pour
le
Poussin, dont
et
VEnlèvement des
le
il
grand normand.
ÉTUDE DE TÊTE.
Atelier Je V Artiste.
pl us
le
français des
du
peintres
XVII® siècle, le plus national à cette
époque où 1 on ne jurait que par 1 Italie, où les Bolonais étaient dieux, n est-elle pas à peu près générale chez les véritables artis-
Gustave Moreau lui-même
tes?
n’a-t-il
pas reproduit
Mort de
la
Germanicus? Degas voit dans maîtres
d
suivre,
mais non à copier.
autrefois des
les
modèles à
y
Il
trouve «des enseignements à l’aide desquels on pourra se diriger vers
un
complet
art plus
».
appar-
Il
tient incontestablement à la
pure
tradition nationale qui a produit
Chardin,
La Tour, Watteau, Lan-
Photo Durand-Ruel.
Boucher, Fragonard
cret.
PORTRAIT D’ALTÈS Professeur
la
mesure,
discipline,
la
a
qu’on
— nombre
cesse avec
un
de dessins, d’études de portraits, qu
respect
sortait peu,
de voir une
toile d’Ingres,
1897,
il
superbe collection de peintures ville
natale.
Quelqu’un
entier
ignorée de
lui,
de dessins que
et
Il
de
la
il
était
ques-
prêt à se
au musée de Montauban admirer
alla
arrlvalt-11
informait Degas tout d’abord.
;
consultait sans
toujours
était
la
maître avait laissée à
le
de Montauban, d’Aix, de Nantes,
fallait
:
«
Eh
bien, et Ingres?
»,
l’entendre parler de l’écartement
des yeux de certaines têtes peintes par Ingres, pour
de
le
Dans
de l’auteur du Plafond d'Homère.
de Montpellier, deToulouse, de Perpignan, de Rouen
du musée d’Aix
il
ne quittant pas volontiers son atelier, lorsqu
En
mettre en route.
s
supérieures,
ému.
Degas connaît l’œuvre presque Lui qui
sa
qualités
reconnaisse ou non.
—
son culte.
tion
les
le
moderne, l’École contemporaine, Ingres est sa grande admiration, nous en parlerons en heu et De ce maître vénéré, il a réuni
l’École
place,
est
Conservatoire
au
il
jugement,
il
;
tout proche de ces maîtres, dont
le
Jupiter de
longueur du cou de Thétys de ce
même
la toile
tableau,
du SainUSymphorien de la cathédrale d’Autun. C’est avec attendrissement qu’il racontait comment, un jour de sa jeula
largeur de
la
face
—
31
Collection Ernest Rouart.
PORTRAIT D’EUGÈNE MANET (Peinture)
nesse, se trouvant fortuitement dans la rue, alors
renverser Ingres,
du
lieu
de
journée
il
il
l’avait aidé à se relever,
l’accident, quai Voltaire.
qu’une voiture venait de
reconduit chez
Jamais plus
il
ne
le revit,
lui,
tout près
mais de cette
garda un souvenir impérissable. Dans l’introduction écrite par
J.-J. Raffaelli,
pour
le
catalogue de ses œuvres, exposées en 1884 dans une
boutique de l’avenue de l’Opéra, celui-ci exprime une opinion quelque peu
Dans des temps plus ou moins éloignés », Degas à Raffaelli, « quand de notre peinture il ne sera plus guère question, que nous serons plus ou moins oubliés, quand votre nom sera cité, on dira mais oui, Raffaelli qui n’a pas compris Ingres ». Degas, surtout dans sa jeunesse, a exécuté de nombreux dessins et diverses copies d’après les peintures des maîtres, particulièrement d après irrespectueuse à l’égard d Ingres.
«
riposte
:
des primitifs, Mantegna, Ghirlandajo, Botticelli, Fra Angelico, Holbein
—
32
—
FAMILLE
DE
PORTRAITS
Il
d’une façon
sentait et appréciait
particulière «
l’ardente naïveté des
vieux maîtres
selon l’expression
»
de Ch. Baudelaire,
quoique ce
ne fût pas alors
moment de
leur
culte
le
l’admiration
;
allait
Degas suivit à la lettre la recommandation d’Ingres de copier les maîtres, non pas pour devenir un habile copiste mais pour en
ailleurs.
prendre
« le
suc de
plante
la
Nous savons un de
».
ces dessins
de Degas, d une délicatesse d’une finesse d’après
un
Portrait
rare,
crayonné
exquise,
d'homme de
Clouet ou de son école, du musée
du Louvre. Personne ne connais-
Collection de IVI“' Chausson.
sait
PORTRAIT D’HOMME EN CHAPEAU
La
notre grande galerie nationale
mieux que
lui.
puissance d’originalité de Degas, loin d’être entravée par
que
discipline de l’étude des grands classiques, n’en a été
étude n’a rien du servilisme, ne gêne en rien
telle
Mais
de Degas d’après
laissons les copies
de Poussin,
—
dont
il
la
les
sévère
la
fortifiée.
primitifs. Plus
admirait tout particulièrement
la clarté,
grâce austère, sérieuse et mélancolique, les profondes harmonies,
1
tard,
ordre, la
les
formes
expressives, revanches de l’esprit français sur les tendances italiennes,
copia d abord, en ébauche,
Une
personnalité.
—
il
est vrai, la
Bacchanale dont nous avons déjà
parlé, séduit qu’il était par le merveilleux
accord des figures et du paysage.
11
le
il
reproduisit ensuite, en grandes proportions, l'Enlèvement des Sabines,
peintre des Andelys témoigne
hautement de son intelligence
si
où
saine,
mesurée, fine et puissante à l’extrême. Cette dernière copie est admirable.
Lui demander d’être exclusivement Poussin maîtres, n’est-ce pas se découvrir soi-même à
Elle est Poussin, elle est Degas. serait
chimérique. Aimer
les
travers leurs propres découvertes, et ajouter
un anneau à
chefs-d œuvre qui, d’âge en âge, perpétue et affirme L’originalité, la personnalité
du -
copiste
35 --
la
la
chaîne des
tradition?
ne pouvait
l’initier
qu’à une
large Interprétation de l’artiste
non pas à
XVII® siècle,
servilement.
circonstance, d’une lutte égal.
en
d
la
égal à
du maître un chef-d’œuvre, tout chef-d’œuvre du maître
L’interprétation
moderne
comme
est
le
d’autrefois
;
à
s’ajoute celle cela, se
la vision
pas
de Poussin
de Degas
qui,
en
conforme à l’exemple de
ses devanciers. t-il
traduire
le
s’agissait,
Il
du
VAdam
Velâzquez,
le
Puisque
Rubens ne copiaEve, du Titien
et
;
Parnasse de Raphaël?
nous
parlons
des
copies exécutées par Degas, signalons
une interprétation du
portrait
de Lady Gower, son jeune enfant sur les genoux,
du
peintre anglais
Lawrence, puis une pochade, brossée de souvenir, de VEntrée des Croisés à Constantinople d’Eug. Delacroix, «
restituant
avec
fidélité
les
harmonies
subtiles,
en
même
grandiose arabesque décorative de ce morceau épique
M.
»,
temps que
ainsi
que
1
la
écrit
E. Moreau-Nélaton.
d ajouter que si Degas a exécuté les copies en question', ce n était point pour emprunter aux maîtres leur technique, mais au contraire pour leur demander une méthode de travail différente et supérieure. Puvis de Chavannes agissait différemment il avait le souci de secouer Inutile
:
1
obsession des
influences,
nous ont précédés.
Trop personnel
Il
était
d’échapper aux
réminiscences de ceux qui
s’en tenait éloigné, redoutant la persistance
Degas pour
qu’il eût à éviter
un
tel
du souvenir.
danger.
Degas avec Ph. Burty, J. Tissot, Cernuschi, le céramiste Solon-Milès, Whlstler, Bracquemond, fut un des premiers, qu’impressionna le japonisme. Cette intervention de l’art d’Extrême-Orient en France date de 1856. En cette année, Bracquemond découvrit un petit cahier de la Mangewa d’Hokusaï, qui fit sur lui une très vive impression, et qu’il se hâta de montrer à ses amis, Degas et autres. Plus tard, en 1862, un certain Soye, qui avait
—
36
—
ÉTUDE DE CHEVAL POUR SÉMIRAMIS.
Atelier Je F Artiste.
séjourné au japonais,
Japon, ouvrit, rue de Rivoli
qui captiva ces
mêmes
«
La Porte Chinoise Degas ne
artistes.
»,
fut pas
magasin
le
moins
A cette époque lointaine, gardons-nous de l’oublier, le japoune nouveauté. Il s’agissait de le comprendre, ou mieux, de le
enthousiasmé.
nisme
était
déchiffrer.
Au total, Son œuvre
Degas est resté fidèle à lui-même. poursuit avec une absolue logique, depuis ses
d’un bout à l’autre de sa
s’enchaîne, se
vie,
premiers dessins jusqu’à ses derniers pastels. Elle est continue, ininterrompue. Elle embrasse une période de plus de soixante années et n’accuse pas
un moment classicisme
il
façon dont
ils
d’hésitation.
C’est une profonde erreur de
évolua au modernisme. Les sujets ne signifient
sont compris et traités. Toutes les productions de Degas, sans
exception, appartiennent à la Il
que du que par la
croire
a réagi contre
le
même
aux mêmes préoccupations.
idée,
romantisme, déjà,
il
est vrai, à
son déclin, contre
le
théâtral, l’enthousiasme factice, la fausse et puérile couleur locale, le con-
ventionnel, l’arbitraire, l’amour
du décor,
la
rhétorique
II
n’a pas
moins
Photo Durand-Ruel.
BOUDERIE
été l’irréductible adversaire
néo - classicisme
du
,
du
pseudo -
renouveau de l’antique, de peinture
de Degas
etc. L’art
tout,
la
symbolique,
littéraire,
reste,
avant
psychologique, nullement
ornemental, car toujours
l’effet
il
subordonne
décoratif à l’ex-
pression réaliste de la vie.
La
peinture, pour Degas, n’est point
de
la littérature,
comme
elle le
fut peur tant d’autres, pour Gustave Moreau, pour Odilon
Redon. Elle n’a rien de théorique, de systématique, elle ne va jamais à à-dire à
1
la stylisation, c’est-
abandon de
la
nature.
Quel regret ne ressent-on pas en songeant que Degas, à
d assez grandes dimensions, datant que des tableaux de chevalet! Il est
part quelques réunions de portraits
surtout de sa vrai
n’a peint
jeunesse,
que l’œuvre
d’art ne se
mesure pas à
l’aune.
Que
eu l’occasion
n’a-t-il
d’affirmer sa maîtrise dans la fresque et la décoration murale?
un foyer de théâtre peint par lui, un décoré par un tel peintre Des commandes eût été
!
ce genre,
il
Quel rêve
un hôtel privé des commandes de
édifice public, officielles,
n’en reçut jamais. Quel chef-d œuvre neuf, imprévu, n’eût-il
pas créé, en dehors de toutes
les
habitudes moutonnières
!
Là,
comme
partout, ses idées personnelles eussent peut-être régénéré des genres qui se
meurent dans Les membres de l’Institut,
traînent, languissent et
Arts,
les dirigeants,
comme
les
patentés et récompensés de
d’ignorer
l’art
vermoulues
»,
du dehors,
la routine.
les
professeurs de l’Ecole des Beaux-
appelle Gustave Geffroy, les représentants
la
la vie
peinture
officielle,
qui
«
font profession
qui assaille et renverse leurs constructions
eurent grand soin de paraître ignorer Degas. Seul Gustave
Geffroy, que nous venons de citer, devenu directeur des Gobehns, tenta
d obtenir des cartons de
lui
pour
les faire tisser à la
~
38
manufacture nationale
;
NOUVELLE-ORLÃ&#x2030;ANS
LA
A COTONS
DE
COMPTOIR
LE
(Peinture).
Musée du Louvre.
— Collection
I.de Camondo.
Photo Druet.
CLASSE DE DANSE (Peinture)
mais sa requête ne fut point accueillie.
Il
était
trop tard.
Ajoutons, pour nous consoler,
que Degas a travaillé « pour les musées sans qu’on en ait rien su. » Quoi qu’en eût dit le vicomte Sosthène de La Rochefoucauld à
Eug. Delacroix, à propos de sa
Mort de Sardanapale,ce quefois
pas folie d’espérer avoir
raison contre tout le
La jadis,
blique 1
n’est quel-
monde.
révision des jugements de
alors
que admiration puaux compositions, à 1
allait
exécution sèche de Melssonier,
au dessin méticuleux de Gérôme, Musée de Bayonne.
aux mythologies en baudruche de Bouguereau, au plafond imper-
Photo Aubert.
PORTRAIT DE LEON BONNAT
du
sonnel Peinture)
de l’Opéra
foyer
Baudry,
Paul
depuis
a
de
long-
temps commencé pour Degas. Son admirable savoir, sa parfaite maîtrise ne sont plus discutés. Plus un seul critique n’oserait aujourd’hui qualifier son dessin de « lâché », ni ses compositions, de « caricatures prétentieuses ». Déjà, au surplus, il occupe sa place dans nos grandes galeries. Ne brille-t-il pas au Louvre, au milieu de ses égaux, les maîtres d’autrefois, grâce à ses chefs-d’œuvre du legs I. de Camondo, au Kensington Muséum à Londres, avec le Ballet de Robert le Diable, au musée de Pau avec le Comptoir de cotons à la Nouvelle-Orléans, à celui de Bayonne, avec les deux portraits de Léon Bonnat et d'Albert Melida, au musée du Luxembourg, avec
les toiles et les pastels laissés
Nous ne sommes pas encore legs,
—
il
par Calllebotte? si
loin
de l’entrée au Luxembourg de ce
conviendrait mieux de dire d’une partie de ce legs,
—
:
puisque,
des soixante-six toiles et dessins qui le composaient, trente-huit seulement furent acceptés.
M. Hervé
Il
n’est pas mutile
de rappeler
la
violente phihppique
que
de Soisy, sénateur inamovible, porte-parole de l’Académie des
Beaux-Arts, à l’approbation et aux applaudissements de collègues, osa alors, en
mars 1897, prononcera 42
—
la
la
tribune de
plupart de ses
la
haute Assem-
DANSEUSES SALUANT.
Collection Je
M.M. Bernheim
Jeune.
Muice du Louvre* ~~
Collection
1.
Photo Druel.
do Camondo.
Lâ&#x20AC;&#x2122;ABSINTHE (Peinture)
SCÈNE
LA
SUR grisaille)
BALLET
en
(Peinture
D’UN
RÉPÉTITION
blée. Contentons-nous d’en extraire
quelques passages. L’orateur n’était que
membres de
prète des
nous venons de convient d’y «
mais
il
insister.
Les grands
mença-t-il, dont statues
l’Institut,
dire,
le
l’inter-
artistes,
com-
toiles et les
les
peuplent ce précieux et
intéressant musée, jusqu’ici vierge
de toute compromission, ont
mulé
for-
leurs légitimes condoléances
dans
termes
des
une véritable
qui
dénotent
indignation... Cette
exhibition reflète, sous les aspects les
moins
lument
attractifs,
en
un
décadence,
art absoet
dans
lequel nos jeunes élèves ne peu-
vent trouver aucune étincelle feu sacré qui
doit
éclairer
du
Musée de Bayonne.
Photo Aubert.
PORTRAIT D'ALBERT MÉLIDA
leur (Peinture)
carrière,
aucune sorte d’inspira-
tion digne
d
eux...
Les modèles
—
c’est-à-dire les ouvrages qui
— sont d’une nature tellement
composent
ou présend aucun élève d y chercher un sujet d’étude ou d’imitation... Je vous demande, messieurs, en quoi, à côté des œuvres de ce musée, qui portent empreinte et comme le rayonnement de l’art, cette misérable collection peut servir à l’enseignement de quoi que ce soit qui y ressemble. Quelle la
donation Caillebotte,
tent de tels indices de médiocrité, qu’il
ignoble,
ne peut venir à
1
idée
1
leçon nos jeunes gens peuvent-ils y prendre, si ce n’est peut-être celle qui résulte de la vue des contraires, de l’admiration plus vive du beau, par l’horreur et le dégoût
Et dire aussi
de
du
laid... »
non seulement de productions de Degas, mais de Manet, Renoir, Pissarro, Berthe Morizot, etc.
qu’il s’agissait
celles
!
Ces divers ouvrages étaient encore hier, avant la guerre avec l’Allemagne, exposés dans des conditions défavorables, en une salle exiguë, mal éclairée, ne permettant pas le recul nécessaire pour pouvoir examiner la plupart d’entre eux comme il conviendrait. Plaudite et nunc erudimini cives. -- 46
Matée du Luxembourg.
~
Cliché
Collection Caillebotte.
LÉTOILE (Pd8tcl)
Braun
et
C
L’ostracisme
dans
lequel
Etat a tenu systématiquement
1
à
œuvres de Degas
écart les
1
n a servi de rien
geants de
la
maison
la
Malaquais et
Mais
place.
mauvais vouloir
ce
maître a
le
;
conquis sa vraie
des diri-
rue de Valois et de
du
du Quai
coin
n’est-il
pas toujours
obstinément exercé à l’égard
des artistes dégagés de
formule
sainte
ne
la
sacro-
officielle?
S’il
trouvé de généreux
s était
que posséderait le Louvre d’œuvres de Corot, Millet, Rousseau, Decamps, Daubigny, Diaz, Manet, etc., donateurs,
etc. ?
De-
Si les productions de
ont
gas
nombre
d’esprits
cela
incertains, l’a
écrit
désorienté
troublé,
timides
vient,
Castagnary
et
comme dans
sa
Collection Gobiliard.
PORTRAIT DE Mme
du catalogue de l’expoavenue de de Manet
préface G...
sition (Pastel),
l’Alma, en
d’un
sincérité
« la
artiste
donne à
ses
Il
lui.
ne
s’agit
L’heure de
La grandeur et
de ce que
œuvres un caractère qui
ressembler à une protestation, alors que
son impression.
— 1867, —
le
les
fait
peintre n’a songé qu’à rendre
»
donc plus de défendre Degas, de la justice
et le
faire le
coup de feu pour
a sonné, le jour des verdicts équitables est venu.
beau de son œuvre sont presque universellement reconnus
proclamés. L’entrée d’une vingtaine de ses ouvrages au musée
du Louvre,
à
la
T. de Camondo, en 1908, a eu l’immense avantage de faire connaître le maître à la masse du public, qui, malgré ses peintures et dessins du Luxembourg, l’ignorait pour ainsi dire. Elle a eu, en outre, celui d introsuite
du
legs
—
49
—
Collection
Durand-Ruel
Photo Durand-Ruel.
BALLET DE ROBERT-LE-DIABLE duire dans notre grande galerie nationale, inévitablement trop tournée
d une modernité absolue. Génie quasi solitaire, Degas aura passé comme un météore, illuminant ciel de l’art, sans, pour ainsi dire, laisser de disciples, de disciples
vers
le
le
passé, des ouvrages
—
—
50
—
FIGURANTS
(Pastel)
LES
directs tout
au moins.
dessinateurs, 1
Qu
importe
grands
des
!
Il
coloristes,
aura rénové
réapprenant
la
tradition des parfaits
dessin
le
à ceux
qui
avaient oublié, enseignant la couleur à ceux qui l’ignoraient.
Degas a eu succès,
comme
le il
rare courage et
Musée du Louvre,
inébranlable fermeté de résister aux
a résisté aux sarcasmes et aux injures. Sans hésitation,
sans atermoiements,
chemin, celui de
1
il
l’art et
— Collection
1.
a,
toute sa vie, imperturbablement poursuivi son
de
la vérité.
de Camondo.
Photo Druet.
FEMME S'ESSUYANT LE COU APRÈS LE BAIN (Pastel)
Impeccable la faire valoir.
est l’exécution
Jamais, chez
de Degas.
lui, les
Il
morceaux
ne cherche cependant jamais à accessoires
n appellent
l’atten-
tion hors de propos. L’accord entre les diverses parties de sa toile
son dessin est absolu. Son œuvre reste supérieure parce qu’elle des rares où
il
entre
le
plus de nature, où
la
science
du
ou de une
est
dessin atteint le
plus haut degré d’expression et de réflexion. Les plus grands maîtres furent
de parfaits ouvriers peintres,
et
Degas a été un de
ceux-ci.
Quand même vous
posséderiez pour cent mille francs de métier, a dit Ingres,
—
52
si
vous trouvez
C et
Braun
Cliché
CAFÉ
LE
Caiilebolte.
Colleclion
—
Luxembourg.
du
Musée
l’occasion d’en acheter encore
Degas a eu
pour un sou, ne
cette occasion et ne
1
la laissez
pas échapper.
a point laissé échapper. Quoiqu’il
ait
figuré à la plupart des expositions des Impressionnistes, quoiqu’il semble
avoir eu partie liée avec eux, quoique tous, Pissarro, Sisley, Renoir, Monet,
Lebourg, Guillaumin,
etc., aient été ses
technique n a rien de
commun
hachées, morcelées
; il
tage l’éblouissement de
avec
amis,
la leur. Il
n a jamais poursuivi la
il
la
ne leur a rien emprunté. Sa
n a jamais peint en touches division des tons, pas davan-
lumière, les fonds éclatants.
Au
lieu d’appartenir
du cycle de Manet, Whistler, FantmLatour, avec lesquels il avait de nombreux points de contact. Contrairement aux impressionnistes, Degas avait l’horreur du petit coin de nature. Il n’a jamais ouvert un pliant ni dressé un chevalet dans la campagne. Ses paysages mêmes, comme nous verrons plus loin, ont été peints à atelier. Nous ne connaissons qu’un seul portrait de lui brossé sur un fond de plein à ce clan, Degas se rapproche bien plus
1
Musée du Louvre.
—
Collection l.^de
Photo Druet.
Camondo.
LE TUB (Pastel)
Mutée du
I^uvre. *“ Collection
I.
de Cnmondo.
DANSEUSE AU BOUQUET
PORTRAIT DE MADEMOISELLE SALLE.
Quoique
—
remarque en puisse sembler étrange nous ne saurions il s’apparente beaucoup plus aux anciens qu’aux assez le répéter contemporains. Si les sujets qu’il traite sont modernes, ultra-modernes, son procédé reste purement classique, ce qui ne signifie pas académique, et froid. Beaucoup de gens ne séparent pas l’idée de classique de l’idée de air.
froideur.
Il
la
—
que certains peintres
est vrai
se figurent qu’ils sont classiques
parce qu’ils sont froids.
Au
point de vue des colorations, des valeurs, Degas émettait parfois
Mutée du Louvre.
— Collection
I.
Photo Druet.
de Camondo.
LA DANSEUSE AU BOUQUET (Pastel)
Musee du Louvre.
— Collection
I.
de Camondo.
Photo Druet.
FEMME DANS UNE BAIGNOIRE (Pastel)
de curieux téristiques
et Instructifs
aphorismes. Citons-en un ou deux des plus carac-
:
«
Le
relief doit être plat. »
«
A
peu d’exceptions
près,
on peut
ombre.
colore, le vert neutralise, le violet
Nous venons de que
lui le
souci de
la
établir
comme
du procédé de Degas. Peu
parler
que l’orangé
règle
»
d’artistes eurent plus
technique du métier, ont poussé plus loin
les
recherches
de ce genre. Rappelons en passant, que, fervent du contre-jour, qu’il pratiqua beaucoup plus qu’on ne avait fait avant lui, il en tira un merveilleux parti, 1
en obtenant des
Comme
effets
pour
ainsi dire
de l’alchimie des couleurs
.
A
à ce sujet. C’était un curieux,
ou leurs
entretiens avec
en savait
des plus heureux.
diverses reprises,
il
s’est
il
épris
a tenté des recherches le
peintre italien
questions de couleurs, sur
leur
soli-
altérations, sur le grain et la texture des toiles, sur leur prépa-
ou à l’encaustique,
ration à l’huile
Il
et
un savant même. Son ami,
Chiahva, très documenté sur ces dité
inconnus
Turner, Gustave Moreau, Ricard, Whistler,
lui. 11
les
avait sur ces sujets
de longs
et fréquents
se défiait, à juste raison, des couleurs à l’huile
inconvénients.
Il
craignait leur instabilité.
—
58
Sa
modernes.
palette était
des plus simples. nant
Il
essaya de
la
peinture à
détrempe, à l’œuf, se souve-
la
des tableaux des primitifs flamands et
— témoin ceux de Fra Angelico — que Le
fixage des pastels,
aussi Degas, mais, pas plus
Musée du Louvre,
—
Collection
I.
s’ils
le
restés aussi
frais
avaient été exécutés hier.
qui avait tant
que
italiens,
préoccupé La Tour, inquiéta
maître de Saint-Quentin,
il
n’est
parvenu
Photo Druct.
de Camondo,
APRÈS LE BAIN (Pastel)
à résoudre la question d’une manière satisfaisante. Jusqu’à présent, tous les
procédés employés n’ont eu pour résultat que d’enlever au pastel sa
fraîcheur et son velouté.
Le
pastel, entre les
mains de Degas, devint un
souple et merveilleux instrument, tantôt aux éclatantes vibrations de lumière, tantôt
aux
de
teintes atténuées et assourdies. Impossible
tage à ce crayon
menu
et friable. Ici,
puissantes et volontaires,
là,
il
1
il
faire dire
davan-
en sabre son carton de hachures
étale tendre et moelleux.
On peut, comme pastelliste, mettre Degas presque sur le même rang que La Tour dont il a la science, la largeur d exécution, la puissance de rendu. Son observation pénétrante trouve dans le pastel un superbe moyen de rendre rapidement et franchement sa pensée dans toute sa fraîcheur et sa spontanéité. Qui a dit de lui, avec une vérité très relative, il est vrai, qu’il est un La Tour canaille? Degas n’a jamais essayé de substituer le pastel à la peinture à 1 huile, ce qui eût été une grave erreur. II savait trop bien que les deux procédés ne peuvent être employés indifféremment. Chez lui, les modes d expression restent toujours subordonnés à ce
Tout Conté, à
est ainsi raisonné
dans
qu
l’art
il
de Degas. Dans ses dessins au crayon
mine de plomb, au crayon
la
de blanc, de
pastel,
veut rendre.
de gouache, parfois
même
pas indifféremment n’importe quel papier
avec intention. à
tour à
la
Le
ou non de touches à l’huile, il n emploie
noir, rehaussés
;
relevés
force, grain, teinte, sont choisis
clinquant des bordures dorées aux divers motifs, tour
mode,
le
rebutait.
ne se
Il
le
laissait
pas imposer, mais
recherchait des cadres à moulures particulières, vermicellées, en spirales,
diversement appropriés, dans des
ors,
des blancs, des
gris,
des verts, des
bleus tendres et variés.
On
que Degas n’avait pas le goût d’être un chef d école c est possible. Cela dépend de la façon dont on entend la chose. Il n en reste pas moins vrai qu’il en est un, le seul de la fin du XIX® siècle, celui sur lequel s’appuie la peinture contemporaine. Tout l’art de ces cinquante dernières a dit
années, qu’on
;
le
reconnaisse ou non, a été à
1
école de Degas,
il
lui doit sa
nouvelle orientation, sa manière plus franche et plus sincère de scruter
la
nature.
Qui Rivière,
que Ph. Burty, Duranty, Duret, Castagnary, Huysmans, Félix Fénéon, bataillaient pour lui, alors que les plus aurait cru cela, alors
basses railleries faisaient rage contre ses œuvres,
—
60
—
quA. W.
exerçait à son
Muice
(lu
(.ouvre.
Collection
I.
de Camondo.
FEMME A LA POTICHE
Cliché Druet.
Photo Durnnd-Kucl.
Collection Durand-Ruel.
LES DANSEUSES
AU PIANO
(Peinture)
endroit, dans le Figaro, sa verve
à la suite de celui-ci,
la critique, Il
Ten
est vrai
Cate,
Moore,
le
Ne
le
qu’en
de mauvais
que les ânes bâtés de couraient à qui mieux mieux à ses trousses?
même temps, dans la
conservateur de
aloi et
presse d’outre-Manche, les anglais
Wallace Collection,
la
le
romancier George
défendaient.
soyons pas trop durs pour
la critique
:
par parti pris d hostilité que par ignorance,
même par prudence, timidité, crainte sabilité, firent le silence
autour de
nombre
d’écrivains,
incompréhension,
moins parfois
de se tromper, d’engager leur respon-
Nous nous
Est-ce plus honorable?
lui.
garderons de répondre.
Aux
injustices,
qu une dédaigneuse
aux cabales, nous
le
savons,
Degas n’opposa jamais
indifférence, le silence le plus complet, poursuivant
imperturbablement son chemin.
Ah!
temps sont bien changés, depuis que les rares critiques que nous venons de nommer plus haut et un groupe clairsemé, mais fidèle les
d’amateurs,
Degas
rendaient seuls pleine et
lui
est le point
les
bien entendu,
réduisant à leur
pas, mais tous
Salons annuels l’ont
imitent,
l
justice!
Aujourd’hui,
de mire général. Qu’ils en conviennent ou non,
qui encombrent le
entière
1
taille.
pillé
sans vergogne,
Ses confrères à
ont imité, ont plus
vertes, qu’ils exploitent maladroitement.
ou moins
la
les peintres
le
diminuant
mode ne
profité
l’avouent
de ses décou-
Tous
sentent très bien qu’il y a quelque chose de nouveau dans son œuvre, de tout à fait supérieur, qu’ils
discernent ma', mais qu’ils ont plus que soupçonné, qu’ils aperçoivent
sommairement la
:
par exemple, l’aptitude à rendre
le
caractère essentiel de
vie contemporaine, tout en s attachant à en exprimer le particularisme.
Aucun de ceux
qui pillent
maître, ne possède sa science, son talent
le
;
œuvres ne sont-elles qu’un pâle reflet de la sienne. Donnons la parole à M. Camille Mauclair « Quelqu’un qui tient de près à M. Degas, me racontait qu’un jour, dans un salon où se trouvait un membre de InsEh quoi! vous le connaissez? titut, celui-ci se récria au nom de Degas concédait courtoisement Je n eusse Parlez-m’en. Et comme l’ami, surpris, Et comment, point cru, monsieur, que ce nom et cette œuvre vous... répondit le peintre académique, serais-je assez sot pour Ignorer que Degas aussi leurs
:
1
:
—
:
est le
premier dessinateur du siècle?
—
seriez,
vous
oui, se récusa l’illustre officiel, avec
et
vos collègues...
quelque gêne, mais autre chose.
— Oui,
Mais... aux Salons, vous le refu-
les Salons, le jury, cela n’a
»
—
64
—
pas de rapport... c’est tout
DANSEUSES SUR LA SCÃ&#x2C6;NE.
Collection de
M.
Olioier Sains^re.
Collection de
Mâ&#x20AC;&#x153;* Mon(somery*Seart.
Photo Durand'Ruel.
LA FAMILLE MANTE (Pailcl)
k'
k
Que
ou non, Degas conduit l’École française dans la voie de l’objective observation, par une sorte de développement scientifique, de recherche absolue de la vérité. Il faut reconnaître que les ces messieurs le veuillent
jeunes générations l’écoutent bien plus volontiers et avec autrement de profit
de la maison du coin du quai Malaquais. ne fut pas naturellement sans se rendre compte Degas
qu’elles n’écoutent les pontifes
Laissons cela.
Collection T. Sardnal,
Photo Durand-Ruel.
LA LEÇON DE DANSE (Paalel)
de ce que
lui
lui, le laisser «
On
poches
»
;
devaient ceux qui remblaient l’ignorer, ne pas compter avec
même
nous et
fusille
un autre
Eug. Delacroix
que ceux qui ses œuvres?
D’un
tel
complètement de »,
dit-il
jour
:
un
« Ils
n’avalt-il
le sort
mais on
volent de nos propres ailes.
fouille
nos
»
Degas
de sa substance, criaient haro devant
se vengeait, sans plus, par des aphorismes
ou moins
dernier mot. Seralt-il encore de ce
n Ignorait pas que
«
pas écrit, plus d’un demi-siècle auparavant,
sanglants, sachant qu’un jour plus le
jour, à leur sujet,
le pillaient et vivaient
ostracisme,
côté.
lointain se lèverait,
monde? Peu
mportait.
où
il
Le
ordinaire des prophètes est d’être lapidés
—
67
—
aurait
maître ;
mais
de la veille devient la vérité du lendemain. La nouveauté froisse masses dans leurs habitudes moutonnières. L’imitation devient ainsi la
l’erreur les
règle. Il
que quelques artistes, non des moindres, surtout compteront Toulouse-Lautrec, Forain,
faut cependant reconnaître
de ceux qui comptent
et
:
Photo Durand-Ruel.
LA CONVERSATION CHEZ LA MODISTE
miss
Mary
Deihomas
Cassatt, Ernest Rouart, Louis et autres
ont reconnu ce
de Monet, de M"*® Morisot
«Ce que
l’État
et
Legrand, Steinlen, Renouard,
qu’ils devaient à
de Manet lui-même.
encourage languit, ce qu’il protège, meurt
risme de P.-L. Courier
n’est-il
tutelle. Il
ne
».
Cet apho-
pas surtout vrai pour l’art?
Personne plus que Degas n’a été l’ennemi d’un d’un art en
Degas, sans parler
s’agit
art d’État, c’est-à-dire
pas d’imiter un maître, certains maîtres,
d’adopter un style, certain style, mais d’être
—
68
—
soi,
de dire ce qui n a pas encore
I^hoto Durand-Ruel.
DANSEUSES A LEUR TOILETIE
du moins de le dire d’une façon nouvelle. « L’art, a mond, qui ne vit qu à 1 aide de formules traditionnelles,
été dit,
malgré
habileté déployée par la facture.
1
est
monotone,
»
La
n’y a pas de beauté canonique.
Il
Ramener
Bracque-
écrit
valeur des formules est nulle.
contemporains aux formes des statues grecques
une absurdité. Que signifie cette anthropométrie appliquée aux gens que nous coudoyons,que nos peintres interprètent ? Dénaturaliser l’art grec,a écrit H. Taine avec grande justesse, c est le trahir. Volontiers, comme Ingres, Degas eût proclamé que l’École des Beaux-Arts est un lieu de perdition. L’État, prenant parti en art, est une monstruosité l’art même ne représente plus alors qu’un rouage administratif, une affaire de bureaux. A un ministre qui lui demandait son avis sur la Direction des Beaux-Arts, Degas répondit qu il conviendrait de la rattacher à l’Assistance publique. Selon lui, r enseignement pratiqué à l’École des Beaux-Arts est pernicieux, établi sur des règles malsaines. Les professeurs ne voient dans leurs élèves que des électeurs futurs pour les jurys des Salons. Les élèves intelligents sentent, les
est
;
d’instinct, Ils
que ce
n’est pas à l’École qu’ils deviendront réellement peintres.
ont beau ambilionner
souvent à
la
le
Rcme donné
prix de
au
médiocrité docile — objet d’exportaticn,
ceux qui ont
la
chance de
encore Degas
dit
peu qu
cherchent, pour
l’obtenir,
une voie
perspicaces, aussitôt après,
travail, à l’assiduité,
ils
—
soient
différente.
L’enseignement de l’École des Beaux-Arts a été basé, affirme-t-on, sur
la tradition
sur
le
;
mais quelle tradition?
dessin de Raphaël ou
l’autre,
aucun rapport?
Au
Au
point de vue
du
dessin, est-ce
dessin de Michel-Ange, qui n ont,
le
point de vue de
1
un avec
la coloration, s’appule-t-il
sur
celle des Vénitiens, des Hollandais ou des Flamands, toutes profondément
originales? L’École n’est pas encore
du raisonnement — énoncé par
«
Les écoles modernes,
doctrines grecques.
De officiel lité,
la
l’élève
n’existent,
si
éloignée qu’on pourrait
de Louis David, Delécluze, en 1808
ne fleurissent que par
façon dont
il
est préconisé et établi
:
des
chez nous, l’enseignement
La personna-
peut produire des artistes habiles, mais rien de plus.
ne serait-ce pas de concilier
l’originalité, «
la tradition
»
l’émotion, l’audace, l’originalité leur sont interdites.
contraire,
le croire
la tradition
Ce
avec
qui la
siérait,
au
personnalité,
en un mot de favoriser l’innovation?
L’École, a écrit avec beaucoup de vérité
plus qu’enseigner
le
succès
du
M. Maurice
Denis, ne
fait
dernier Salon. Je cherche en vain, ajoute-t-il,
—
70
—
Collection Ernest Rouart.
DANSEUSES TRES D'UN PORTANT
dans
les conseils
que
j’ai
reçus d’un Lefebvre, d’un Bouguereau, l’appa-
rence d une doctrine, quelque chose de systématique
».
Photo Durand-Ruel.
LA CONFIDENCE «
L’École des Beaux-Arts, soutenait Degas,
ne produisant que des
artistes timorés,
ginalité indispensable, devrait être
telle qu’elle est établie,
manquant totalement de
cette ori-
supprimée. Elle est nuisible au premier
—
72
—
DANSEUSES PRÈS D’UN PORTANT.
Collection de
M.M. Bernheim
Jeune.
l
lâ&#x20AC;&#x2122;holo Durond-Ruel.
DANSEUSE DANS SA LOGE (PaBlel)
i**
où les élèves auraient la faculté modèle vivant. Tout artiste pourrait être autorisé à y enseigner avec l’assentiment des élèves. Rien de plus. Les musées sont là pour apprendre l’histoire de l’art et quelque chose en plus ; car, s’ils suscitent, chez les faibles, des désirs d’imitation, ils donnent, aux forts, des moyens d’émancipation. Quand donc l’État se décidera-t-il à ne point s’occuper de l’enseignement de 1 art? » « Si le gouvernement voulait une bonne fols se désintéresser de toutes ces questions d’art qui ne le regardent pas, écrivait Amaury Duval, il n’y a qu’un moyen à sa disposition, renoncer absolument à l’entretien d’écoles des Beaux-Arts, sous quelque forme qu’elles se présentent. » Ce malheureux état de choses, dont notre art contemporain souffre tant, chef, et serait
remplacée par des
ateliers
de
travailler gratuitement d’après le
est
en grande partie dû à Louis David, dont l’influence sur
Louis David
la
peinture fut
beaucoup moins le continuateur de l’antiquité et obtus Wlnckelmann, lequel se pâmait devant une insignifiante production de Raphaël Mengs, qu’il prenait pour la rénovation, la continuation de la peinture antique. L’enseignement des professeurs officiels, imbus des idées de Louis David, ne veut voir que l’Individu, l’être humain, en dehors des contingences. Par cela même, il conduit au rétrécissement du champ d’investigations de l’élève et se traduit par une désolante uniformité. D’après ce principe, l’art, au Heu de se retremper à sa vraie source, la nature universelle, s’en néfaste.
que
était
l’élève trop docile
éloigne,
manque de
d’ambiance
du lourd
plus en plus d’indépendance, de caractère, de grandeur,
et se dépouille
de toute
vie.
David qui a Inauguré les ateliers d’élèves où le trois mouvements, corrige le travail de plune s’est pas contenté de cela. Ne voyant rien au delà
C’est encore Louis maître, en sieurs jours.
du
deux temps, Il
dessin pseudo-antique,
ture aux
il
ombres légèrement
a laissé ses disciples se contenter d’une pein-
aux
frottées,
non moins légèrement
clairs
empâtés, donnant à leurs ouvrages, au bout d’un certain temps, une coloration jaunâtre, «
un
aspect creux et vide.
Louis David, déclarait Degas, a supprimé l’apprentissage qui se
pratiquait jusqu’alors,
où
les élèves n’étalent
que de
vrais et simples ouvriers,
apprenant soigneusement et à fond leur métier, broyant parant les
les toiles et les
panneaux du patron,
l’aidant
les couleurs, pré-
dans sa tâche, peignant
fonds, les accessoires et les détails secondaires de ses compositions qu’ils
ébauchaient d après ses propres esquisses
—
75
—
».
A
ce propos,
commun. Quand un à
le salaire
1
élève avait
atelier, le
fait
œuvre d’un de
le
quelque
travail dehors,
il
était
en
en rapportait
mettant dans un panier suspendu au plafond, où
que lorsque Rembrandt trouvait bien retouchait, la signait, et que c’était pour
chacun puisait selon ses besoins I
que chez Donatello, tout
rappelait volontiers
il
ses élèves,
il
la
;
mieux. L’apprentissage était, au suprême degré,
de ces
vrais peintres qui,
Aujourd
hui,
aux
moyen de former des peintres,
le
belles époques, créaient des chefs-d’œuvre.
pour devenir un peintre,
il
faut
commencer par désapprendre
ce qu’ense’gnent les professeurs de l’École, voir autrement qu’eux, c’est-àdire, librement,
en dehors des arrangements
ou moins banales préconisées par eux,
Le
fictifs,
et aussi
véritable respect de la tradition n est
que
des conceptions plus
d’une tradition apocryphe.
le
sans lesquelles aucune tradition ne serait durable,
du
goût,
l’a dit fort
juste-
respect des lois
comme
ment Eug. Delacroix. Or, de nos jours, ces déplorables errements sont généraux. John Ruskin
que Turner eut le malheur d avoir subi enseignement Royal Academy, et qu’il fut plus de trente ans à s’en remettre que ce que dans la révolte qu’il réussit à bien travailler, qu’en oubliant ce
a écrit quelque part
de
la
n’est
qui
;
lui avait été Il
1
enseigné, qu’il put apprendre quelque chose. ;
vous étiez grand ou vous n étiez pas du tout
;
aux beaux âges de
l’art,
aujourd’hui, tout
monde
le
comme
vieux maîtres, a dit Degas
est très difficile d’être
grand
les
conspire à soutenir
les faibles.
une barrière dressée contre tout ce qui est neuf, et vivant. n’en était point ainsi de l’ancienne Académie Royale. Très libérale, très large, elle admettait tous les artistes de talent sur la présentation d une de leurs œuvres en se plaçant au point de vue du seul mérite elle ne trouvait L’Institut est
II
;
rien à redire à leur hardiesse, à leurs tendances originales. Aussi, pas véritable artiste des XVII® et XVIII® siècles qui n’en ait fait partie.
contraste
un
Amer
!
Pour Degas, secondaire,
il
l’art n’est l’art
que
est inutile, malfaisant
véritable rôle. «
Il
s’il
est tout à fait supérieur
même, parce qu
n’y a pas d’art d’agrément
»,
il
;
s’il
est
ne remplit plus son
déclarait-il.
Il arrivait en effet, à Degas, dans ses rares moments d’abandon, de développer ses idées en matière d’enseignement. Elles sont curieuses et
instructives
:
« J’ai
parfois rêvé, disait-il alors,
—
76
—
d avoir un
atelier
d
élèves.
SCÈNE
EN
L’ENTRÉE
ATTENDANT
EN
une maison à plusieurs étages. Au rez-de-chaussée j’aurais installé le modèle vivant, autour duquel se seraient groupés les commenmais sans modèle, comme aux étages supérieurs, les çants au premier élèves déjà un peu dégrossis au second, d’autres plus experts, plus habiles, et ainsi de suite, en montant. » Tous seraient descendus, selon le besoin qu’ils en auraient éprouvé, revoir et consulter le modèle du rez-de-chaussée, bien entendu, les élèves des étages supérieurs, les plus haut logés, le moins souvent, le moins long-
j’aurais loué
—
;
—
;
temps.
A
peu de chose
près, c est le procédé
de Leccq de Bolsbaudran,
« le
plus intelligent et le plus persécuté des professeurs d’art de notre époque a écrit Ph. Burty, de
l’atelier
Latour, G. Regamey, Ribot, Cazln, etc. qui a dit
:
«
»,
duquel sortirent Alph. Legros, Bonvin, Fantin-
C était
déjà l’opinion de Poussin,
C’est en observant les choses que le peintre devient habile,
plutôt qu’en se fatiguant à les copier
».
Degas était, on le peut dire, l’adversaire des Salons officiels, qu il ne fréquenta que pendant sa jeunesse, comprenant vite leur danger. « Songer à exposer et mendier ainsi le succès, disait-il, c’est faire comme le chasseur qui quitterait la libre vie de la campagne pour aller dans un tir, tirer sur des œufs au bout d’un jet d’eau ». Toujours, Degas fut l’adversaire de la théorie de l’art associé à Idée d utilité qu il considérait, à juste raison, comme une utopie nocive. L art ne s adresse qu au sens esthétique, et au sens esthétique seul. « Quelle absurdité, disait-il un jour, en regardant une devanture de magasin de cordonnerie, d exposer des chaussures, comme s’il s’agissait de diadèmes de diamants et de colliers de perles! » C’était, selon Degas, du faux et du plus exaspérant esthétisme que de vouloir mener vers la beauté les objets utilitaires impossible, d’autre part, de revenir aux méthodes de jadis, qui se sont si merveilleusement manifestées jusqu’à la fin de l’ancien régime, par la discipline. Notre époque est devenue non seulement trop pratique, trop indus1
;
trielle,
mais encore
et surtout
trop individualiste. Elle
a,
en plus, bien
d autres préoccupations. Degas n’entrevoyait point le moment rêvé par M. Arsène Alexandre, où tout un personnel de manufacture se mettrait en grève, parce que le patron voudrait lui faire fabriquer des objets mal dessinés.
Et puis, à quoi bon s’inquiéter? D’abord,
—
79
—
il
n’y a pas de remède, car
le
remède préconisé,
L œuvre
la
du
culture
nouvelle produite par
dessin par l’ouvrier, est pire que
lui serait
mesquine, fausse
le
mal.
et prétentieuse,
surtout prétentieuse. Les ingénieurs, les architectes, les industriels, les fabricants, incapables
de concevqir une belle chose, de
la
combiner, élèvent
des monuments, créent des objets qui, sous un certain aspect, ont cependant caractère, et, quel
leur
que
soit ce caractère, le véritable artiste
en saura
toujours tirer parti.
L art suivi
pour
l’art, la
beauté pour
la
beauté, ce rêve à la
mode pour-
par tant de théoriciens bien intentionnés, à notre époque
utilitaire
avant tout, semblait à Degas, entièrement chimérique. Ecarter de nos
yeux
les
objets
tenir tout ce qui
vulgaires
comme
portant atteinte à notre beauté
ne mène pas vers cette beauté pour une
un amoindrissement de notre
être,
vitale,
flétrissure et
bref, chercher la beauté coutumière, ce
sont là des considérations étrangères à
1
art
de Degas.
Collection de IV1““ Chausson.
1
L’HOMME Edgar Hilaire Germain Degas naquit à Pans, rue Saint-Georges, le Son père, de vieille race française, probablement bretonne,
19 juin 1834.
né à Naples
était
de
la
et sa
Le mariage de dans
mère, née Musson, de famille créole,
était originaire
Nouvelle-Orléans.
le
bas de
la
ses parents fut
rue de
une
quelque temps en France,
habitait, rue
avec jardin sur lequel s’ouvraient
d
sorte
La Rochefoucauld de
;
la
idylle.
M. Degas
demeurait
Musson, venue pour Tour-d’Auvergne, une maison la famille
M.
de
les fenêtres
Degas. Celui-ci
vit
Mlle Musson, s’en éprit at first sight, se fit présenter à ses voisins par des connaisscinces, et le mariage eut heu peu de temps après.
M. Degas succursale de
la
s’établit
banquier rue Saint-Georges, ou plutôt, y ouvrit une sa famille possédait à Naples. M. et Mme Degas
banque que
eurent cinq enfants, trois
fils,
dont Edgar,
l’aîné
;
le
second,
Achille,
qui fut officier de marine, le troisième, René, lequel, après avoir un certain temps résidé aux Etats-Unis, revint vivre en France puis deux filles une épousa un architecte de valeur, M. Fèvre, autre, son cousin, banquier ;
;
1
1
à Naples,
M.
Morbilli.
Les antécédents héréditaires de Degas sont pour surprendre au premier abord. Son atavisme familial devenir et
le
le
destinait assez mal,
parisien par excellence qu’il fût, bien
d une américaine. Tous deux n’en
étaient pas
semble-t-il, à
que né d’un napolitain moins de pure origine
française, de familles des plus affinées, restées très attachées à la mère-patrie. Les de Gas car le nom s’écrivait en deux mots, c’est le peintre qui, à partir de 1870, en signant ses œuvres, supprima la particule sont de vieille souche. Edgar Degas fit de sérieuses études au Lycée Louls-le-Grand, où il eut pour condisciples les frères Rouart, qu’il retrouva plus tard, ainsi que
—
nous
le
—
verrons.
—
81
,
Ses
selon
le
l’Ecole
son
terminées,
classes
baccalauréat
passé,
de ses parents, à mais son goût et
désir
de
son
s’inscrivit,
il
droit,
pour
dessin
ne
tardèrent pas à se manifester.
Son
père
attrait
le
suivre son penchant,
le laissa
Degas entra en 1855 à
l’Ecole
des Beaux-Arts, où, cette
même
et
année,
il
pour
est inscrit
con-
le
cours des places de semestre.
11
ne semble guère y avoir été assidu. 11
fut
plus
fidèle
peintre
Louis
travailla
aux
à
Lamothe, côtés
du
l’atelier
où
il
De-
d’Elie
launay.
Louis Lamothe, né à Lyon
le
avril 1822, mort à Paris le décembre 1869, avant d’avoir atteint ses quarante-huit ans, après une vie de labeur et de privations, est aujourd’hui bien injustement oublié. Quoiqu il passe pour un disciple d Ingres, il ne le fut pas en réalité, tout au moins directement. D’abord
23 15
élève d’Auguste Flandrin, à Lyon, 1
atelier
de son
Paris en 1839,
entra dans
il
Hippolyte Flandrin. L’atelier d’Ingres avait été
frère,
fermé cinq ans plus
arrivé à
tôt,
en 1834. Mais, quand l’auteur du Plafond d'Homère
Lamothe Louis Lamothe
comme
revint à Paris, en 1841, Louis
subit,
son influence exclusive.
a laissé des travaux dignes
plus sérieuse attention.
rue de Sèvres,
la
11
des Prophètes et peint tilde
;
il
le
de
la
a décoré à Pans, dans l’église des Jésuites de la
chapelle de Saint-François-Xavier, où
compositions consacrées à
ses propres élèves,
de l’anôtre des Indes retable de Saint-Valère, de la
vie
;
il
il
a placé
deux
a dessiné
l’église
les
vastes
vitraux
de Sainte-Clo-
a exécuté les figures de Saint Christophe et de Sainte Pélagie de la
théorie d’Hippolyte Flandrin, à l’église Saint-Vincent-de-Paul
dessins de lui sont admirables, au dire de
MM.
.
Maurice Denis
Quelques et
Henry
Lerolle, son dernier élève.
Peut-être, probablement
où Ingres
était considéré
même,
comme
le
—
est-ce dans l’atelier
de Louis Lamothe,
maître par excellence, que Degas 82
—
s
en-
Colleclion de
M**
Chtutton.
DANSEUSE AU REPOS
thousiasma, une fois pour toutes, de ce génie superbe qui donaine
la
première
du XIX® siècle. Dès 856, Degas se rend en Italie. Il venait d atteindre ses vingt-trois ans, nous savons qu il avait une partie de sa famille à Naples. Il connaissait
moitié
1
et
déjà son métier de peintre.
On
son métier de peintre à fond, ou une grande justesse, Eug. Delacroix. Degas séjourne quelque temps à Naples auprès des siens, puis va s’établir à Rome, où il retrouva son camarade de l’atelier Louis Lamothe, Elle
on ne
le
sait
jamais
Delaunay. Dans
Tourny
»,
«
sait vite
a dit avec
la Ville
Éternelle,
il
se
lie
avec
graveur aquarelliste
le
femme, qui faisait aussi de la peinture avec Léon Bonnat, Gustave Moreau, le musicien Bizet il y rencontre les sculpteurs Paul Dubois et Chapu, comme Bizet, pensionnaires de Académie de France. Degas travaille avec un rare discernement. Attiré par les primitifs. et sa
;
;
1
Photo Durand-Ruel.
SALLE D'EXERCICES DE DANSE
subjugué par eux, son goût
et
il
les étudie,
avec une attention soutenue et sagace, avec
son instinct délicats, leur empruntant leur fermeté, leur sobriété
d’exécution, leur Impeccabilité de dessin.
ment du
naïf archaïsme et
du
Il
s’enthousiasme particulière-
dilettantisme raffiné de Mantegna.
Il
brosse
aussi quelques figures italiennes, plusieurs portraits d’amis et camarades,
crayonne de plus nombreux dessins, qui
—
sont des merveilles
—
hélas!
beaucoup d entre eux ont disparu grave même plusieurs eaux-fortes. De retour à Paris, Degas vit d abord sur la rive gauche, rue Madame,
—
,
05
—
puis revient sur la rive droite, dans plus. la la
Il
le
quartier Montmartre, qu’il ne quitte
habite tour à tour, lui qui détestait le changement,
la
rue Blanche,
rue Notre- Dame-de-Lorette,
la
rue Fontaine,
rue de Laval,
la
rue Lepic,
la
rue Ballu, précédemment, rue de Boulogne, où
il
occupe
le
logement
que venait d abandonner le ménage Zola, la rue Victor-Massé, ancienne en face du bal Tabarin rue de Laval où, pour la première fois, il eut son appartement et son atelier dans la même maison. Il y resta plus de vingt ans, et n en partit que chassé par la pioche des démolisseurs, pour aller se réfugier à un cinquième étage du boulevard de Clichy, à deux pas de la place Pigalle. En 870, lors du siège de Pans, Degas fait partie d une batterie d artillerie, et c est là qu II retrouve son condisciple de Louls-Ie-Grand, 1 Ingénieur Henri Rouart, qui, en qualité d’ancien polytechnicien, y servait comme capitaine. Leur ancienne camaraderie se transforma dès lors en une profonde amitié, qui ne se démentit pas un instant. En 1873, Degas s’embarque pour l’Amérique il va visiter sa famille
—
—
1
;
Nouvelle-Orléans, et y reste plusieurs mois. Il en rapporte son célèbre tableau du Bureau de cotons et plusieurs autres toiles de moindre maternelle à
la
importance.
Voyager à merveille
de sa
n’était pas
dans
farrille paternelle et
frères et sœurs,
une
villa
en Angleterre, parcourut
habitudes de Degas, mais
les
de temps en temps à Naples, où
Italie et allait
1
où
il
possédait
même,
la
Belgique,
la
Il
ils
;
il
est
se quittèrent à la gare d’Austerlitz, puis,
alla plusieurs
le
connaissait
une
partie
Pausihppe, avec ses
Il fit
différents séjours
Hollande, passa deux mois en Es-
pagne, poussa jusqu’à Tanger, avec Boldini Paris,
sur
qui leur venait d’un oncle.
il
résidait
vrai
qu’au retour à
oncques ne se revirent.
années de suite en Auvergne, au Mont-Dore, dans
les
Pyrénées, à Cauterets, plutôt pour changer d’air et se reposer, que pour
prendre
eaux.
les
Degas ne se trouvait bien qu’à Paris, dont, comme Montaigne, il aimait jusqu aux verrues. Il était passionné des longues courses à pied, des randonnées sur
les
impériales d’omnibus, les plates-formes de tramways. Certains
même,
il montait dans un train de banlieue, mais s arrêtait bien vite au bout de quelques heures. Ses Infidélités à Pans, c était, de temps en temps, en été, les journées qu’il allait passer chez son ami Henri
jours
et revenait
Rouart, à et
où
il
la
Queue-en-Brie, où ce dernier possédait une résidence d été
parvenait à
l’attirer et
à
le retenir.
—
86
—
"
SOURCE
LA â&#x20AC;&#x153;
DE
BALLET
LE
DANS
FIOCRE
MADEMOISELLE
PORTRAITS DE MANET.
Collection de
M.
Ernest Rouart.
V.
,
,
'
.•
'•
;
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•Y-';,
•••;•
• .
Degas l’époque
son
se
plus chaude de
la
frère,
René Degas
A Paris,
il
l’été,
et le peintre
1898
vers
parfois
rendait aussi,
années suivantes, à
et
à Saint-Valéry, où se trouvaient alors
Braquaval.
déjeuna longtemps dans un restaurant aujourd’hui disparu,
de La Rochefoucauld, presque à 1 angle de la rue Notre-Dame-deLorette, en face d’un petit marché couvert qui existe encore. Là venaient Gervex, Cormon, Humbert, H. Pille, Michel Lévy, les fils Carrier-Belleuse, Ch. Jacque et ses fils, Boldini, le graveur Le Coûteux, Gaghardini, parfois situé rue
Gérôme, Forain, se plantait
dans une
Danse, dont
il
stalle,
la
rendait à l’Opéra,
en avoir
et là, sans
l’air,
saisis
et
enregistrés.
mouve-
fréquentait
Il
Butte, les cirques
;
c’étaient
pour
la
d’un œil détaché,
Champs-Elysées, l’Élysée-Montmartre,
des
cafés-concerts
beuglants de
se
se documentait, à l’affût d’un geste, d’un
il
ment, d’une mimique aussitôt
les
un peu
restait toujours il
dans un coin des coulisses, au foyer de
un habitué,
fut
qui semblait absent,
les
Degas y
Poli avec tous,
etc...
hautain. Souvent, après son dîner,
et
solitaire
lui
aussi
l’Alcazar,
autant de lieux
d’étude.
Vous voulez me décorer, c est donc que vous voulez me faire eh bien donnez-moi mes libres entrées à Opéra, ma vie durant parle Degas au ministre d alors, qui avait voulu le connaître, «
1
!
s’empresse d’accéder à
SouvenI,
le
soir,
la
!
Ainsi
et
qui
boulevard
des
requête.
vers
huit
heures,
il
montait
Batignolles, tout près de la place Clichy, au café
au
Guerbois
;
il
y retrouvait
amis Manet, Zacharie Astruc, Marcellin Desboutins, Fantin-Latour,
ses
Ph. Burty, Duranty, Hippolyte Babou, fut
plaisir, »
etc.
Plus tard,
le
café Guerbois
abandonné pour celui de la Nouvelle-Athènes, situé quelque peu plus au fond de la place Pigalle. Là apparaissaient encore, de temps à autre,
loin,
Manet, Marcellin Desboutins, l’anglais George Moore, quand il était à Pans puis, presque quotidiennement, Zandomeneghi, Ary Renan, Forain, Toulouse-Lautrec, etc. Que de mots incisifs, devenus historiques dans le monde des arts, que d aphorismes, que de boutades à l’emporte-pièce, furent émis par Degas, Manet et autres, dans ces deux cafés Guerbois et ;
de
la
Nouvelle-Athènes! amis délaissaient
le café pour aller entendre un acte ou deux d un mélo bien larmoyant qui les mettait en joie, aux théâtres de Montmartre et des Batignolles, et y admirer moins, sans doute, le jeu des
Entre temps,
acteurs
que
1
les
enthousiasme du public
;
89
d’autres soirs,
ils
entraient au cirque
Fernando, où Degas fournit le
miss Lola, suspendue par
vit
motif d’une de ses plus surprenantes
Au nombre à part Ed.
des fréquentations de Degas parmi
Manet
et
Monet,
l’italien Cbialiva,
séduction de Degas était extrême, mais
de tous. Elle n avait rien de banal.
ne se
Il
cachait soigneusement sa sensibilité sous
pas aisément son amitié
;
mettant
les peintres,
la
ricain Whistler, Jeanniot, Pissarro,
Il
ce qui lui
— devenue belle-sœur de Manet par Eugène — nommons Napoléon Lepic, l’amé-
Mlle Morisot
son mariage avec son frère
La
les dents,
toiles.
il
ne
livrait
point au premier venu.
masque de
le
Mlle Breslau.
l’exerçait pas à l’égard
en revanche, son affection
l’ironie.
Il
ne donnait
profonde, sûre,
était
dévouée. Avec ceux qu’il affectionnait, sa taciturnité disparaissait, sa
froi-
deur s’échauffait, son visage, quelque peu absent, se transformait
avait
il
;
des mots de tendresse qui touchaient et ravissaient.
Très
fidèle
n’avait garde
comme
dans ses amitiés,
d oublier ceux que
tence avaient éloignés de
De
lui.
temps à
le dire,
Degas
hasards de
l’exis-
nous venons de
les circonstances,
autre,
il
les
quittait
Pans, se rendait
en Provence, pour rendre visite à un ancien camarade de jeunesse, de Valerne
— élève d’Eug. Delacroix, dans
à
Carpentras, où
que
atelier
l’auteur
de YEntrée des Croisés
professeur de dessin au collège.
était
il
1
en 1842, rue Neuve-Guillemin
Constantinople avait ouvert
— échoué à
Quand
celui-ci
mourut, en 1896, Degas n’hésita pas à se rendre à Carpentras assister
à ses obsèques.
Jusqu’à ce que vint tardivement
ment.
Il
tholomé
;
s’appesantît sur lui
un mondain,
quoiqu’il ne fût pas
avait des maisons amies
D’abord chez
il
—
la vieillesse
les frères
Henri
où
il
il
—
et
pour
pour Degas
sortait assez
elle
fréquem-
dînait à des intervalles assez réguliers.
Rouart
et Alexis
;
puis chez le sculpteur Bar-
chez Mlle d’Anethan, sœur du ministre de Belgique à Paris, où
retrouvait Puvis de Chavannes, avec lequel
il
s
oubliait
en longues cause-
chez une américaine, Mme Holland, où il rencontrait encore Puvis ries de Chavannes, Maupassant, Alexandre Dumas fils, parfois Meissonier chez Manzi, avec Carrière, Bartholomé, en hiver, dans son appartement de la rue de Londres, en été dans une villa de Chatou chez son ami d en;
;
fance
Valpmçon
;
chez Ludovic Halévy
—
;
il
avait
de tout temps connu
horlogers Bréguet — en compagnie
la
Mme Halévy, les de George Moore, ordinairement de Cavé-Boulanger, Taschereau, etc.; chez miss Mary Cassatt que l’on peut appeler son élève, où fréquentaient le poète Stéphane Mallarmé, Clémenceau, le peintre Jacques Blanche, qui famille de
—
90
—
parfois
Collection
Cawther Mulock.
Photo Durand Rucl.
MISS
LOLA AU
Clf^QUE
(Pcinlure)
FERNANDO
PORTRAIT DE HENRI ROUART.
Collection de
M.
Alexis Rouart.
brossa son portrait,
— cause, plus
tard,
d’une brouille entre
les
deux
artistes.
Chez Alexis Rouart, où Degas dînait tous les quinze jours, le mardi, Descouts, médecinle frère du maître de la maison, Henri Rouart, le légiste de la Ville de Paris, un professeur de dessin d un établissement
avec
universitaire et l’abbé de Kergariou, prêtre breton des plus distingués, fut
un jour question de
de Kergariou, qui
s était
la
il
décoration des services de table. L’abbé
quelque peu occupé de céramique, proposa incon-
tinent à Degas, Henri Rouart et au professeur de dessiner chacun sa douzaine
Henri Rouart peignit sur les siennes une des assiettes décorées par le professeur, montre Degas en train de raser Cabanel portant en sautoir le grand cordon de la Légion d’honneur une autre, dans un angle, la carte de Degas, cornée, avec deux rasoirs en exergue. Pour Degas, il peignit sur ses assiettes des sujets de courses, des scènes de danse, de café-concert, etc. Toutes ont été d’assiettes, ce qui fut aussitôt accepté.
des paysages
;
;
cultes et se trouvent aujourd hui chez le
Rouart, qui
Un
les
fils
d Alexis Rouart, M. Henri
conserve précieusement.
venu et l’obligeant à quitter l’atelier, Degas Henri et Alexis Rouart chez un petit antiquaire de la rue Laffitte, Meyer. Parfois, après déjeuner, avec un des Rouart et le peintre Tillot, aux environs de 1895, il allait faire exécuter des agrandissements photographiques chez un marchand de couleurs de la rue Fontaine, Tasset, où Degas eut un moment un kodak, s’intéressant aux aspects de mouvements de l’être humain que déroulait l’objectif. Ses rapports avec les marchands de tableapx, à part EKirand Ruel, un ami pour lui, furent plutôt restreints et espacés. Dans ses commencements, il vendit quelques toiles au père Martin, le paradoxal marchand, au cœur d or sous une enveloppe un peu fruste, qui tint successivement une petite boutique rue Mogador, puis rue Laffitte à quelques pas de la place Notre-Dame-de-Lorette, et émigra ensuite dans un entresol de la rue Saint-Georges. Parmi ses acheteurs d’alors, il faut aussi compter le doux et humble Portier, autre marchand de cette race, certain temps, le soir
descendait rejoindre
les frères
aujourd’hui disparue, qui aimait avant tout
la
peinture. Portier lui prenait
quelques-unes de ses productions pour ne
les
céder qu’avec regret à cer-
tains
amateurs intelligents
et avisés. Plus tard,
Degas eut
affaire,
occasion-
nellement, avec Beugnet, Brame, Tempelaere, en dernier heu avec Vollard.
Dans un ménage de vieux garçon,
—
93
la
—
domesticité a toujours de l’impor-
Photo Durand-Ruel.
Atelier de TArlisle.
SABINE NEYT Dessin
tance.
Degas
n’a jamais eu qu’une bonne, invariablement d’âge mûr.
environs de 1875, avait procurée
ne
le quitta,
Des
il
était servi
Mme Fèvre,
d’ailleurs,
Aux
par une hollandaise, Sabine Neyt, que
sa sœur.
que pour
Il la
lui
garda une douzaine d’années. Elle
se retirer, vieille et usée, chez
une
nièce.
discussions futiles et cocasses éclataient cependant, à tout Instant,
entre
la
servante et
nellement congé.
le
maître, qui, à bout d’arguments, lui donnait jour-
Le lendemain
matin, Sabine,
comme
si
rien
ne
s était
chambre de Degas pour prendre ses vêtements à chaussures à cirer. A demi réveillé, celui-ci se dressait sur
passé, entrait dans la
brosser, ses
son
ht, lui criant
au hasard, veston, sait
qu’elle n’était plus à gilet,
son service,
pantalon, pantoufles,
etc...
lui
La
jetant à la tête,
servante disparais-
sous cette avalanche, puis rapportait, dix minutes après,
—
94
—
les
effets
Mutée du [.uxembourv-
~
Cliché Braun
Colleclion Cailleboile.
DANSLUSi-:
AU BRODEQUIN
cl
Cie.
Photo Durand-Ruel.
Atelier de l’Artiste.
PORTRAIT DE DURANTY nettoyés et demandait alors à monsieur ce qu’il prendrait pour son déjeuner, SI
toutefois
une
déjeunait à
il
côtelette,
comme
la
maison,
toujours
»,
«
et la
Mais, vous
le
savez,
Sabine, en partant, avait présenté à son maître, pour
une certaine en
Clotilde, qui
fiacre, cette
de santé.
Il
devint
folle.
démente, avant de pouvoir
n’oublia
deux œufs
et
scène se renouvelait deux jours après. lui
succéder,
Degas
traîna toute
la faire
admettre dans une maison
une journée,
jamais cette odyssée.
Clotilde fut remplacée par
Zoé
—
Closler, d’une 97
—
éducation moins élé-
mentalre que celle de ses précédentes domestiques, qui, durant plus d’un quart de
siècle,
soigna
plutôt qu’une domestique, elle lui lisait les
de
prendre
avec une inlassable sollicitude. Zoé fut
l’artiste
une gouvernante pour Degas. Pendant
journaux dont ses mauvais yeux ne
connaissance
lui-même.
Elle tint
maison
sa
ses repas,
permettaient pas
lui
savait
et
à
merveille qui éconduire ou recevoir.
Pendant plus de vingt ans
une
fois
bruyant
y
vivait
il
ne vint à
l’idée
demeura en
qu’il
face le bal Tabarin, pas
de Degas d’y entrer. Cet habitant du Montmartre
et fêtard, cet interprète
du Pans faisandé
qu’il connaissait à fond,
en reclus, en ermite, dans sa tour d’ivoire, uniquement absorbé
par son labeur.
Ce du
soi-disant habitué des lieux de plaisir, ce peintre des coulisses,
foyer de
bule.
la
teur de
femme,
la
concert, des était
soin et
Danse, des lumières
factices, était le contraire
filles
cet
interprète des danseuses, des chanteuses de café-
de brasserie, des
de modistes, de repasseuses,
ateliers
un homme du monde accompli, d’une tenue
— en
cela très proche d’Eug. Delacroix
des délicatesses
Degas
— bref
parfaite, habillé avec 1
gens
communs
le
répugnaient, tout contact avec eux
mettait hors de
1
attrait
qui eût,
le
débraillé
des conversations élevées, fines
comme
Courbet, hurlé
:
La
«
un
triste,
comme
solitaire,
tous
Ce
moi.
Degas a
observateurs qui regardent faisait,
des expositions,
lui
goût
n’est pas lui
un
été,
jusqu’à
art.
Nerveux, Inquiet, dont
ils
certain
portent
se dérobait à la curio-
Ennemi du des courses aux commandes, il s est
des journalistes, des critiques et du public.
ries,
élevés,
»
la vie il
mal
et
lui. Il avait le
et délicates.
occupé exclusivement de son les
témoignage, toujours mécontent de ce qu’il sité
des nuances
êtres grossiers
les
;
vérité, c’est
Si ce n’est peut-être dans sa jeunesse, point,
homme
plus subtiles.
les
avait l’horreur instinctive des
un éloignement insurmontable pour et
d’un noctam-
Ce serait une profonde erreur de le juger d’après son œuvre. Ce contemp-
bruit, des cote-
gardé, selon
le
mot de Forain, d’exposer dans les kiosques. Il a constamment suivi la voie qu il s’était tracée, la plus haute et la plus noble qui fut, dans un isolement superbe, protestation contre destinée mélancolique, car les
chemins
la
réclame et
la vie est hostile
tracés, et l’apanage des
de ne pas être compris, de ne
l’être
le
cabotinage, indifférent à sa
à tous ceux qui ne suivent pas
grands esprits,
le sort
des novateurs est
du moins, que de quelques
—
98
—
êtres
d
élite.
M. Desboutins
Collection P. Lafond.
DEGAS alors
que
la
De
lui,
;
Desboutins
BUSTE DE DEGAS
médiocrité vole à
nous prononcer
M.
Collection Henri Rouart.
sc.
toujours
la notoriété.
de son œuvre,
En
ne parlait jamais.
il
Nous
souffrit-il?
n’oserions
n’en a jamais rien laissé paraître.
est-il qu’il
Comme
l’a écrit
Ary Renan,
à propos de Gustave Moreau, en une étude publiée naguère sur ce peintre dans la Gazette des Beaux-Arts, Degas était convaincu « que l’individualité
de à
1
ne
artiste
l’homme de
Un
doit,
en aucun
Plutôt petit que grand 1
produire en public
disparaître derrière son œuvre, tout entier
de l’homme ne
portrait physique
puissante,
cas, se
—
les
aspect narquois,
chevelure chataine, soyeuse,
penseurs sont le
les
yeux
vifs,
peut-être pas inutile.
Balzac
—
la tête
bombé, couronné d’une
malins, interrogateurs, enfoncés
en forme d’accent circonflexe,
quelque peu retroussé, aux narines ouvertes, le rasoir
convient
«.
petits, déclare
front haut, large,
sous une haute arcade sourcilière sous une barbe légère, que
serait
et qu’il
la
bouche
fine, à
n’a jamais touchée, tel fut
le
nez
demi cachée
Degas pen-
dant sa jeunesse et son âge mûr.
En
vieillissant, la
barbe blanchit normalement,
à leur tour, et s’espacèrent, mais les aigus, la
bouche
cheveux blanchirent
yeux restèrent longtemps
aussi narquoise.
—
les
99
—
aussi vifs et
sc.
un
existe
Il
certain
nombre
de portraits de Degas, peints et gravés. D’abord celui qu’il exécuta lui-même sur cuivre, alors qu’il avait
à peine
vingt-trois
ans,
à
Rome, en 1857, lequel le représente un peu plus qu’à mi-corps, un feutre sur la tête, lui ombfageant
yeux. Vient plus tard,
les
à Paris,
Michel effigies,
un
portrait
De
Lévy. il
brossé par ces
sera, plus loin,
deux
de nou-
veau question. Desboutlns égratigna trois pointes sèches d’après
Degas, aux environs de 1873. La première le montre en pied, debout, presque de profil, le
chapeau haut enfoncé sur la
main sur
la
le front,
hanche, dans une
attitude qui lui était familière
;
les
deux autres le figurent en buste, l’une, le visage penché, la joue appuyée sur une main l’autre n’est qu’un simple profil. Nittis grava, à l’eau forte, un autre profil du maître. Manzl, par des procédés particuliers, grava lui aussi plusieurs portraits de Degas, dont un en pied, debout, entre le sculpteur Bartholomé et lui, et un autre où Degas est seul, en buste, le chapeau de sole sur la tête posé en arrière. Signalons ensuite plusieurs portraits de artiste peints par lui-même, puis deux autres le représentant, dans un âge avancé, l’un brossé par M. Jacques Blanche, qui occasionna une brouille entre le modèle et le ;
1
peintre
;
l’autre,
par
M. Maurice
Denis.
Notons, pour être aussi complet que possible, un portrait-charge, en pied, debout, brossé par le napolitain Carlo Pellegrini, qui jouit
d’une grande vogue en Angleterre, où la
il
était
un moment
particulièrement apprécié à
Cour. Degas connut sans doute Carlo Pellegrlnl par Whlstler, avec lequel
celui-ci était lié.
Le
sculpteur Paul Paulin modela à deux reprises différentes le buste
de Degas. Ce sont ses deux plus Importantes 100
—
effigies.
Un
bronze d’un de
DEGAS PAR LUI-MÃ&#x160;ME EN (Eau-Forlej
1857
DEGAS EN
1857.
Atelier de lâ&#x20AC;&#x2122;Artiste.
::iK
M.
Collection P. Lafoncl.
PORTRAH DE DEGAS (Eau-Forte)
Deiboutint
ic.
MauncA Demi
pinxii.
Photo Druel
DFGAS
Carlo Pellcgrini, pinxit.
Collection P. Lafond.
PORTRAIT-CHARGE DE DEGAS (Peinture)
\n
-
\-i
;
musée du Luxembourg, un autre, au musée de Pau. Personne, plus que Degas, n’eut, nous ne dirons pas, le mépris, c’était mieux que cela, l’indifférence la plus absolue pour les distinctions de toute sorte médailles, décorations, titres honorifiques. Un jour, à un mariage où il assistait en qualité de témoin, celui d’un des fils de son ami Henri Rouart, ces bustes se trouve au
:
au moment de signer
le registre paroissial,
quant que, seul ou presque seul des
à sa boutonnière, lui dit en pointant « Il
vous manque quelque chose
jamais aperçu, monsieur
ManzI
le
curé
là,
»,
dans
assistants,
du
il
la sacristie, le
répllqua-t-il.
DEGAS Gravure en couleurt. (Album “Viniil-cinq Dettini et
ni rosette
doigt le revers de son vêtement
monsieur Degas.
te.
ManzI
curé remar-
ne portait ni ruban
Joyant. éditeurt
*)
— Je ne m en
:
suis
Ayant appris fortuitement par Desboutins, qu’on allait le nommer chevalier de la Légion d honneur en même temps que ce dernier, Degas se garda bien d’écrire et de lancer par la presse, aux quatre coins de Paris, une lettre de refus, comme l’avait fait Courbet. Il chargea simplement un ami qui connaissait le ministre de le prier de n en rien faire, car, autrement, il se trouverait dans obligation de ne pas accepter la croix, ce qui lui serait pénible. Les choses en restèrent là. Il ne faudrait pas croire que Degas refusa cette distinction parce qu’il jugeait qu’elle lui arrivait tardivement. La raison, nous l’avons dit, est qu’il avait un éloignement insurmontable pour tout hochet de vanité, pour tout signe extérieur distinguant un homme d un autre homme. Un ruban, une rosette à la boutonnière d’un vêtement, lui semblaient aussi étranges qu un chapeau à bords démesurés, 1
qu’un habillement
Degas
hétéroclite.
pas moins insensible à l’égard de
n’était
fort mal, d’ordinaire, le
ceux qui voulaient écrire sur
trouver dans ce but
:
«
Vous n
Que
armoire, dites?
pouvoir expliquer pas ?
son
le
voulez-vous écrire sur
mon
1
art? Croyez-vous
mérites d’une peinture à ceux qui ne
les
venaient
art, et
un de ceux-ci, compte des chemises que j’ai dans
êtes pas venu, dit-il à
raconte George Moore, pour faire
mon
la critique. Il recevait
lui et
la
comprennent
»
—
rapporte Octave donc tranquille », ronchonnait-11 Mirbeau, mettant dans son roman Le Calvaire^ ces paroles dans la bouche « est-ce que c’est fait pour être vu la peinture?... d’un artiste imaginaire «
Laissez-moi
—
la peinture, hein, dites!...
Comprenez-vous?
On
travaille
pour deux ou
trois
amis vivants, pour d’autres qu’on n a pas connus, ou qui sont morts... Est-ce que ça
chaussons de lisière?
Tout chages de
toiles.
Un
que de
lui
peinture, des bottes »
la littérature, et,
peinture.
Le
ou des
pour
lui, la litté-
public n’a que faire des rabâ-
souvent elle ne parvient même pas à nous faire amateur n’achète pas une peinture parce qu il a lu
de journal qui en
article
connaisseur et
de ce qu
la
la
vie privée, ça.
avis, n’était
que nuire à
de
je fasse
la critique, dit-11
vendre nos
un
son
cela, à
rature ne saurait
que C’est de la
regarde,
les
;
parle,
mais parce
qu’il a
un ami, qu
a assuré que dans dix ans cette peinture vaudra
le
il
croit
double
elle vaut.
Rapprochons de ce mot sa réponse à quelqu’un qui lui faisait observer combien Manet était déférent avec les critiques « Oui, oui, Manet est très :
parisien,
il
comprend
la
plaisanterie.
—
110
»
—
Rappelons encore cette opinion
Photo Durand -Huet.
Collection Durand-Ruel.
MUSICIENS
A L'ORCHESTRE
un peu « J
et
admire
Il
la
la
savait
les
aristarques des revues et journaux
force et je l’envie, ne fut-ce
jusqu’au
traîner
les
même
émit un jour sur
vive, qu’il
prochain
que trop rarement
que pour empoigner
les écrivains
ils
Mutée du Luxembourg. -
les journalistes
»
ruisseau.
aiment
y cherchent autre chose que ce qui couleur, des plans, des rapports, du dessin. ;
:
la
la
peinture pour
elle-
constitue, c’est-à-dire de
Collection Caillebotte.
Cliché Braun
et
Cie.
SORTIE DE BAIN
D’après ce qui précède, gens de
lettres.
Ceux avec
il
se
lesquels
comprend que Degas il
était
parce qu’ils écrivaient, mais quoiqu’ils
et
peu avec
en relations suivies ne
l’étaient
les
pas
le fissent.
L’étude sur Degas, de George Moore, déjà recours
fraya
à
laquelle
nous
avons eu
à laquelle nous aurons à nous reporter encore, quoique
des plus élogieuses, l’indisposa à ce point contre son auteur, qu’il se fâcha
avec
lui et
ne
le revit
jamais. 113
—
Le atelier
du maître
caractère
comprendre
fait
que
facilement
son
à aucune époque,
n’ait été,
mondain, pas davan-
ni élégant ni
tage hospitalier.
Y
pour
très
quelques
part
entrer, à
amis
rares
intimes, était presque impossible.
Degas
souvent
pour
journée.
Il
dans
dérangé
était
S’il
travail,
de
reste
le
avait besoin
de
femmes à
ni confrères, ni
hommes de
esthètes, ni
lettres,
mode. Dans
la
a vécu
il
l’ate-
amateurs, ni gens du monde,
ni étrangers,
où
la
solitude.
Aussi ne rencontrait-on dans lier ni
son
court,
s’arrêtait
le
ni
l’atelier
longtemps,
plus
Collection P. Paulin.
situé
DANSEUSE LES BRAS RELEVÉS
la
par Toulmouche, régnait
lui
d
être
de
un
effet
ou de
toiles
nées
le
de
des
On
art.
couvertes
forte,
des boîtes à grains à graver s’y
rencontraient
d’autres peintures, retour-
;
unes contre
les
ébauchées, déjà à demi écroulées
accessoires
indescriptible, qui était loin
y voyait des chevalets nombreux, surchargés
murailles,
tables
de
mottes
autres
les
de
terre
des selles de
;
de
glaise,
cires
;
des presses lithographiques ou à eau-
;
des objets ayant servi à
de côté
et d’autre
baignoires, tubs, jupes et souliers de danseuses,
pupitre de chef d’orchestre,
maison de
la
rue Victor-Massé et occupé avant
un désordre
en cours d exécution
pastels,
long des
sculpteur,
1
au cinquième de
un piano, jusqu’à un
:
1
artiste
comme
contrebasses, violons,
un moulage de femme, un escalier tournant
de théâtre.
Derechef, de toute part, c’étaient des boîtes de couleurs, des pastels, des cuivres et des zincs de graveur
;
des pierres lithographiques, des tabou-
des chaises dépaillées, de vieux fauteuils au velours arraché, des cartons
rets,
à moitié liés par des ficelles, pleins à en crever.
Arriver jusqu’à
de
où
lettres, il
la
de volumes
fallait
place où travaillait Degas, entre
et
de papiers épars
un bureau couvert un voyage
et le poêle, devenait tout
prendre maintes précautions pour ne rien renverser.
—
114
—
LE f^Ã&#x2C6;RE DE I/AFn iSTI-:
II
L
LE GUI ARlSTE PAGANS
(l^einture)
l
M'-
'
<
’
jM-v'-g .• S*'J
V t
,|Vk>"
:
r
l
De
passons à l’appartement situé à l’étage au-dessous.
l’atelier,
Degas
L’intérieur de
en
]
Comme
ai le faste et
antiques
que
;
Eug. Delacroix,
il
eût
pu
à
dire
:
J’aime
«
la
médiocrité,
étalage en horreur, j’aime les vieilles maisons, les
me dit rien. me parlent de
ce qui est neuf ne
les objets
Ancienne
1
d’un bon bourgeois, d’un magistrat
au milieu de meubles surannés, vestiges d’un mobilier
retraite, vivant
familial.
était celui
mon
usage
Je veux que
le lieu
que
meubles j’habite,
ce qu’ils ont vu, de ce qu’ils ont
collection Jacques Doucet.
DANSEUSES Dessin rehaussé
Dans Jeanniot,
à manger, sur
la salle
et dessins d’Ingres
;
Forain,
Daumier, Gavarni
les
murs, étaient accrochés quelques croquis
divers crayons, pastels et aquarelles d’amis, de Bartholomé,
Napoléon ;
Lepic, Henri Rouart
;
des eaux-fortes de Jeanniot. Sur
posés deux flambeaux
du
XVI
F
siècle qui lui 117
—
des lithographies de la
venaient
cheminée, étaient
de
famille.
Non
on remarquait
loin,
dans une
le
vitrine, divers
buste du maître du
doigts fuselés et retournés
d’Ingres en plâtre, tenant
bibliothèque pleine de
par son ami Paul Paulin
des albums d Outamaro et autres,
;
un crayon
quelques bronzes de Barye
vitrine,
logis,
;
moulages de mains de femmes javanaises aux longs
;
et
des poupées napolitaines
main
la ;
sur
la
de Bartholomé. Au-dessus d’une
se trouvaient des cartons contenant l’œuvre
livres,
presque complet de Manet, des lithographies des deux Devéria,
gravé
de Gavarni planches,
et
et
de Daumier, dont dont
D’autres cartons,
il
possédait
placés de
il
les
côté
et
appréciait tout principales,
en
particulièrement les
superbes
d’autre, débordaient
épreuves.
de nombreux
un meuble, on un jouet un gros éléphant en carton-pâte qui l’avait séduit et qu’il avait acheté dans un bazar. Dans la chambre à coucher, en face du ht, près de la cheminée, étaient placés d’un côté, le portrait du père de Degas, écoutant le guitariste Pagans, peint par le peintre lui-même, et une esquisse de la Bataille de Nancy, par Eug. Delacroix sur les murs, une Poire, par Manet, que Degas considérait comme un chef-d’œuvre; deux petites Vues d’Italie, par Corct, un petit portrait au pastel, par nous ne savons qui, de Degas luimême, dans sa prime jeunesse, etc... dessins d’Ingres et de Delacroix. Sur
distinguait
d’enfant,
;
Dans
mode de
du règne de Louis-Phihppe, les numéros du Figaro renfermant les dessins hebdomadaires de Forain, que Degas appréciait d une façon toute particulière. Sur les murs se trouvaient accrochées diverses toiles un Paysage d'Auvergne, par Corot un portrait au pastel de Mme Manet, en robe bleue, reposant sur un canapé, par Manet des Etudes de mains et deux Têtes de Jupiter, par Ingres. D’autres peintures meublé à
le salon,
sur une table, au milieu de
la
la fin
la pièce, étaient
;
empilés
;
;
simplement posées sur des meubles. Les parquets étaient partout recouverts de vieux tapis orientaux, dont Degas eut toujours le goût et l’attrait. Pendant des années, il courut étaient
les
magasins
à leur recherche.
Puis, c était encore
Il
en trouva d’ailleurs de fort remarquables.
— à un autre étage au-dessous — dans une vaste
pièce nue, sur des chevalets ou contre les murs, ce qu’il appelait sa collec-
deux compositions du Greco; par Ingres, les portraits à mi-corps le banquier de Florence, correspondant des artistes français M. de Mme Leblanc du Marquis de Pastoret, qui fut payé au peintre mille
tion
de et
:
Leblanc,
;
ENFANTS
SES
ET
LEPIC
VICOMTE
LE
francs en 1827, de
M.
Rome,
de Norvins, préfet de police à
qui, plus tard,
devint l’historien de Napoléon; une réduction de V Angélique; par Eug. Delacroix,
le portrait
en pied, debout, en habit
noir,
de son ami
le
Baron
Schwitzer, tableau jadis refusé au Salon de 1817; les portraits ovales, en buste, de
deux élèves de
1
institution
Goubeaux
(le
maître de pension
auteur dramatique) dont l’un est celui d'Amédée Berny d'Ourville, brossé
une Mise au Tombeau; 1 Intérieur de la tente du comte de Mornay de Gustave Courbet, un bon et solide lors de son ambassade au Maroc Portrait d’homme ; de Thomas Couture, un autre Portrait d’homme; divers Paysages de Corot; plusieurs toiles de Manet, un Portrait d’homme en pied et aussi une partie d’une de ses deux Exécution de l’Empereur Maximilien, reconstituée de pièces et de morceaux; une Tête de femme de Renoir; divers ouvrages de Cézanne, Gauguin, Van Gogh, etc. Dans les coins, des cannes de toutes sortes, de toutes formes, car parmi ses fantaisies, Degas eut un moment celle des cannes. A cette époque il devint un des habitués de la maison Verdier. Il courait le faubourg SaintDenis, à la recherche de vieux gainiers, possesseurs de poignées anciennes. Il demanda même à Gauguin de lui sculpter un bâton de Tahiti. Cela en 1830
;
;
dura bien six mois. Puis
il
n’en fut plus question.
Ses distractions n’étaient pas celles de tout à Rouen, avec
deux amis,
visitant les curiosités
le
monde. Dans un voyage
de l’ancienne capitale nor-
mande, sous la porte des vétustes halles, la Basse Vieux Tour, au fond d’une il aperçoit un vénérable marchand qui lui rappelle cer-
boutique obscure, toute
d’Holbein.
figures
taines
la
de nouveau
Il
le
détestait
Quand, dans lui
tombe en admiration,
parle
du bonhomme que d’aller
contempler.
les
hôtels modern-style, les caravansérails,
beaucoup
leur préférant de
qui
Il
soirée et n’a rien de plus pressé, le lendemain matin,
les
ses voyages, rares
rappelait
1
époque des
les
palaces,
simples et primitives auberges de jadis.
comme
nous savons,
diligences,
il
était
il
en rencontrait une
pleinement
satisfait.
Il
eut, par exemple, cette satisfaction en Avignon.
un goût prononcé pour la pantomime anglaise. Il trouvait un humour subtil et raffiné, allié à une sorte de sauvagerie particulière, dans les attitudes, mouvements et soubresauts de ses acteurs. Il appréciait Degas
avait
121
—
grandement
ses clowns, dont l’action semblait suivre
pensée, sans ambages, sans atténuations, sans attendre Il
immédiatement
la
la glaciale réflexion.
prisait leur ironie, leur cruauté, leurs plaisanteries nettes, bouffonnes,
profondes, coupantes
sinistres,
leur façon d’exprimer
points de
pas certains
comme
hardiment
le
la vérité
contact, certains
tranchant d’un couperet. Dans de leurs sensations, ne voyait-il sa propre
rapports avec
façon
d’interpréter la vie?
abhorrait la
Il
musique pendant
les repas,
comme on
en exécute dans
divers restaurants, les fleurs sur les tables des salles à manger.
de certaines odeurs
Mais
:
du
celle
café, des
marrons cuits
et
même
raffolait
Il
de
la
fumée.
laissons ses goûts et ses manies.
Degas dut abandonner
enfin l’appartement et l’atelier qu’il occupait
depuis très longtemps dans
la
maison située en face du bal Tabarin, rue
Victor-Massé. Elle
allait être livrée
vint alors s’établir
non
aux démolisseurs. Contraint,
forcé,
dans un immeuble du boulevard de Clicby,
loin,
au quatrième étage. Les principales pièces de son nouveau logement son atelier donnaient sur
de
retraite
de
la
les
tranquilles jardins d’une
Vider son ancien
atelier,
les
maison religieuse
transporter dans
le
nouveau, ses
toiles,
ses
modelages, ses collections, son mobilier, fut pour
au-dessus de ses forces.
Ce
terrible
Ses œuvres, celles d autres artistes qu et
et
rue des Martyrs prolongée.
pastels, ses dessins, ses ainsi dire
il
il
déménagement bâta
avait réunies avec tant
sa fin.
de soin
d’amour, furent déposées au hasard, en hâte, pêle-mêle, empilées contre
murs, placées sur des tables, des tréteaux, des chevalets, roulées dans
des caisses.
Depuis
même, ni
il
lors,
devenu taciturne,
ne toucha ni à une
à une terre glaise.
toile, ni
A peine allait-il
et
en quelque sorte
le spectre
de
lui-
un pastel, ni à un dessin, ni à une cire, de temps en temps jeter un regard furtif
à
à ces merveilles délaissées. Retiré au fond de son appartement, sa porte
défendue aux importuns
et
nante, qui veillait sur lui
comme
Il
ne quittait son
taires
logis
aux curieux par sa sur
un
enfant,
que pour de longues,
vieille et il
très
dévouée gouver-
sombre et morose. longues promenades solirestait
à travers les rues et les boulevards, soit à pied, soit en tramway, ne
reconnaissant ou ne voulant reconnaître personne.
Degas, étranger à tout,
même
—
aux prix fantastiques 122
—
atteints par ses
DANSE
DE
EXERCICES
UN DES DERNIERS PORTRAITS DE DEGAS
Communiqué par M. Barllwlomé.
tableaux, passa pour ainsi dire hors de la vie, ses dernières années, dans l’attente constante
réolant, la
de
la
mort. Ses cheveux longs entièrement blancs, l’au-
comme
barbe blanche
les
cheveux,
calmes
les traits
et reposés,
devenu d’une beauté impressionnante. Bientôt il ne quitta plus son appartement. Avec les rares intimes qu il consentait encore à recevoir, il ne répondait guère aux affectueuses quesétait
il
tions.
A
morts.
l’un d’eux, qui le pressait,
il
dit à voix basse
:
«
Je compte
mes
»
Puis,
il
ne
sortit plus
de sa chambre,
du matin,
à sept heures
une lampe à bout
s’éteignit
il
d’huile.
midi en
lit.
Le 26 septembre 1917
comme
avait quatre-vingt-trols ans.
Il
L’inhumation eut Heu fut célébré à
et prit le
doucement, sans souffrances,
trois jours après, le
29 septembre. Le service de Montmartre. Vu les
l’église Saint- Jean-Baptiste
circonstances, l’absence d’amis qui ne purent être prévenus à temps, la
présence d autres aux armées, l’assistance fut peu nombreuse aux obsèques. fit représenter pour rendre, au nom du un suprême hommage au grand artiste qui disparaissait. Degas a été Inhumé au cimetière Montmartre, dans le tombeau de famille, où reposent son père et sa mère. C’est un monument assez délabré
Le
président de la République s’y
pays,
sa
extérieurement.
au-dessus de
Il
se trouve dans la quatrième division
l’allée
de cette nécropole,
de Montebello, un peu en arrière du monument du
maréchal Lannes, tout proche des tombeaux de
la
d une
famille Potocki et
famille Tulpakln.
A
l’inverse
de
la
plupart des
hommes de
préoccupé de sa situation posthume. selon l’expression de
une minute, qui
lui
semble-t-il,
il
ne
parlé de
s’est ;
jamais jamais,
n’a fait la toilette de son ombre. Pas
demandé ce que penseraient de
lui
ceux
haute intelligence de Degas, ouverte à toutes
la
manifestations de l’esprit.
vain de tout premier ordre. naissait à il
s est
il
Degas ne
survivraient et, encore moins, la postérité.
Nous avons les
Léon Gozlan,
valeur,
n’a jamais songé à sa statue
Il
fond
débitait à
1
Il
aurait pu,
s’il
l’eût voulu,
possédait une grande culture littéraire, conSa mémoire aidant elle était excellente
Il
les classiques.
devenir un écri-
—
—
occasion, des tirades entières de Corneille, Racine et Molière,
—
123
—
citait
à propos des fables de
La
maximes de La Rochefoucauld.
Fontaine, des pensées de Pascal, des Il
peut
être
compté au nombre des
La Cigale, pièce en trois actes signée de Meilhac et Ludovic Halévy, véritable comédie de mœurs. Si Degas n’en a pas écrit des scènes et des dialogues, nombre de réparties et de mots entre les
collaborateurs de
plus fins dont
pour
la
pièce est semée, viennent de
la
première
6 octobre 1877,
fols
lui
au Vaudeville, où
elle
lui.
eut
La
Cigale représentée
un
éclatant succès, le
valut à ce théâtre ses entrées dont
il
n’usa jamais.
Degas s’amusa un moment à versifier. Les quelques rares pièces qu il composa sont des sonnets. Il les soumit à Stéphane Mallarmé, qui lui fit quelques
d
observations
et
corrections,
humblement écoutées
et
suivies
ailleurs.
Voici quelques-uns de ces sonnets. Rien n est indifférent d un maître tel
que Degas.
Collection Henri Rouart.
DANSEUSES Assiette peinte par Degas.
CHEVAUX DE COURSES.
Collection Je
M. Henry
Lcrolle.
'
'
1
:
1
PUR SANG On Le
l’entend approcher par saccade brisée.
Dès i aurore venu.
souffle fort et sain.
Dans
le
sévère train par son lad maintenu.
Le bon poulain galope
et
coupe la rosée.
Comme le jour qui naît, à l'Orient puisée, La force du sang donne au coureur ingénu. Si précoce
Le
et si
droit de
Nonchalant Il entre
dur au travail continu.
commander à
et caché,
la race croisée.
d’un pas qui semble
en sa maison où l’avoine l’attend.
Il est prêt. Aussitôt l’empoigne le
Et pour
On
le
lent.
les
joueur
;
coups divers où la cote l’emploie.
fait sur le pré débuter en voleur.
Tout nerveusement nu dans sa robe de
127
—
soie.
II
PERROQUET A Quand
Au Ou
Miss Cassatt, à propos de son Coco
cette voix criait, presque
long
commencement d’une même journée.
durant quil
Que
humaine, là-bas.
lisait
sur sa Bible fanée,
devait ressentir ce Robinson
si
las?
Cette voix de la bête, à lui accoutumée.
Le faisait-elle
rire?
Au moins,
S’il en pleurait, le pauvre.
Elle allait le
vôtre...
Ce
ne dit pas
cris
perçants et gras
île
fermée.
plaignez, non pas lui qui vous plaint
sachez,
comme un
tout petit saint,
se recueille et débite en sa fuite
qu’a dit votre cœur, au confident ouvert.
Avec
Un
le
Mais
Qu'un Coco
A
nommant dans son
C'est vous qui
Le
il
le
bout de
l’aile,
enlevez-lui de suite
bout de langue, alors,
il
est muet... et vert.
128
—
;
chéri.
»
Collection do
IVI.
Bariholomé.
MISS
CASSATT
Xi •»
4 u> rj
III
A
José -Maria de Heredia.
Vous n'écorcherez pas un Marsyas de peu; Lourdement de
jouer,
un
Avant de regagner son Il baise et
soir lui prit l'envie
;
ordinaire vie.
vous remet l'outil sacré du jeu.
Inoubliable outil de dure poésie
Que vous
pouvez, poète, à la forge d'un dieu
Marteler, ciseler et rougir dans
Pour que sa
Suez, avec
A
griffe
le
fume
poids d'une armure de fer,
suivre en ses détours une
Qui tremble moins que Vous entonnez
Le rude chant
le feu.
en la rime choisie.
femme
vous...
cachée
Au bruit froid de
alors, orgueilleux et vermeil.
qui plaît à l'Histoire, couchée
Sur Vos genoux, après
des courses
131
au
soleil.
la
mer.
IV
DANSEUSE Elle danse en mourant,
D'une flûte où
Le ruban de Son
le
ses
comme autour d'un
vent triste de
pas
corps s'affaisse et tombe en un geste d'oiseau.
Silvana vient,
Le bonheur de
Et
ses
seins,
sur tout l'être nouveau.
de satin brodent,
La
Use mes pauvres yeux, à
comme
capricante
l'aiguille. fille
la suivre peinant.
signe toujours cesse le beau mystère
Elle retire trop les jambes en sautant C'est
l'eau,
revivre et l'amour pur se joue
dessins de plaisir.
Mais d'un
du bleu de
et là, curieuse s'ébroue.
yeux, sur ses
ses pieds
Des
Weber joue ;
s'entortille et se noue.
Sifflent les violons. Fraîche,
Sur
roseau.
:
:
un saut de grenouille aux mares de Cythère.
—
132
Collection
Iâ&#x20AC;&#x2122;.
Paulin.
DANSEUSE AU BOUQUET (Pastel)
V
Il
semble qu autrefois la nature indolente.
Sûre de
Trop
la beauté
de son repos dormait.
lourde, si toujours la grâce ne venait
L'éveiller de sa voix heureuse et haletante.
Et
puis, en lui battant la
Avec
le
mouvement de
ses
mesure engageante. mains, qui parlaient.
Et
l’entrecroisement de ses pieds qui brûlaient,
La
forcer à sauter devant
Partez, sans
le
elle,
secours inutile
contente.
du beau.
Mignonnes, avec ce populacier museau.
Sautez effrontément, prêtresses de
En
grâce
!
vous la danse a mis quelque chose d’à part.
Héroïque
Que
la
et lointain.
les reines se
On sait de votre place
font de distance et de fard.
135
—
VI
A Tout ce que
Et tout
Du
le
beau mot de pantomime
dit
ce que la langue agile, mensongère.
ballet dit
à ceux qui percent
Des mouvements d'un corps
Qui
Mademoiselle
s'entêtent
à voir en
la
le
mystère
éloquent et sans bruit.
femme
qui fuit.
Incessante, fardée, arlequine, sévère. Glisser la trace de leur
âme
passagère.
Plus vive qu'une page admirable qu'on
Tout,
et le dessin plein
Une danseuse
Tradition Sous
Par
de la grâce savante.
lasse
comme Atalante
sereine, impénétrable
le bois
le
l'a,
lit.
méconnu, votre art
:
aux fous.
infini veille
:
doute ou l'oubli d'un pas, je songe à vous.
Et vous venez
tirer
d'un vieux faune
136
l'oreille.
Sanlaville.
vn
A Madame Ces bras nobles
et longs,
Lentement en humaine
lentement en fureur.
et cruelle tendresse.
âme de
Flèches que décochait une
Et qui
s'allaient fausser
Diadème dorant
De
cette
la reine, muette,
Caron (Brunehilde de Si§urd),
à
déesse
la terre d'erreur ;
rose pâleur
à son peuple en liesse;
Terrasses où descendait une
femme
en détresse.
Amoureuse,
volée, honteuse de douleur
Après avoir
jeté sa
;
menace parée.
Cette voix qui venait, divine de dwée,
Prendre Sigurd ainsi que son destin voulait
Tout ce beau va me suivre encore un bout de Si mes yeux
Au
se perdaient,
que
me
durât
137
vie...
l'ouïe.
son, je pourrais Voir le geste quelle fait.
;
Dans
M.
ses jours
de ferveur lyrique, n’écnvit-il pas à un jeune poète,
Christian Cherfils, qui venait de publier plusieurs volumes de vers,
mais qui
depuis,
surtout adonné à des travaux philosophiques
s est
:
Je vous attends, nous causerons vers, allez, quand vous voudrez. Je lis le traité de poésie de Banville. J’ai acheté un Ronsard et même un mau-
«
vais outil,
un
dictionnaire de rimes. Ci-joint
Petite danseuse.
:
Au
revoir.
Degas.
VIII
PETITE DANSEUSE Danse, gamin
N'aime
rien
ailé,
sur
les
gazons de
que ça, danseuse pour la
Ton bras mince placé dans
bois.
vie.
la ligne choisie.
Equilibre, balance et ton vol et ton poids.
Taglioni, venez, princesse d'Arcadie;
Nymphes, Grâces, venez des âmes Ennoblir
Le
et
former, souriant de
petit être neuf,
le
mon
choix.
à la mine hardie.
Si Montmartre a donné Roxelane
d'autrefois
l'esprit et les aïeux,
nez, et la Chine les yeux.
Attentif Ariel, donne à cette recrue
Tes pas légers de jour, Eais que, pour
mon
Et garde, au palais
tes
pas légers de nuit
plaisir, elle sente son fruit.
d'or, la race
—
138
—
de sa rue.
;
»
^
ÇtiîXiJi eù~ oc<i,' 'h*
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^
ch^
K.
dê^
^
^
AtC^
^
iv^
^
4
PETITE DANSEUSE.
Atelier Je lâ&#x20AC;&#x2122;Artiste.
Ce
sont jeux d’esprit, nous
Un moment Degas
s’éprit
mélancolie,
Degas
«
des
peut-être,
voulons bien, mais pas à
le
sous
l’influence
la
portée de tous.
Stéphane
de
Mallarmé,
mots pour eux-mêmes, pour leurs assonances, leur
leur sexe
».
et le sculpteur
Bartholomé, allant passer quelques jours chez
peintre Jeanniot, à Dieney, en Bourgogne, après une première étape à Montgirond (Seine-et-Marne) chez Ludovic Halévy, abandonnèrent un peu plus loin le chemin de fer, comme moyen de transport trop rapide et trop banal et louèrent, dans un village de l’Yonne, un vieux cheval et une le
carriole,
avec lesquels,
aller et retour, ils
exécutèrent
la
plus grande partie
de leur voyage. Faut-il ajouter qu un matin, Degas eut peindre leur cheval en zèbre.
La
Au
1
animal stupéfia
mémorable voyage, dont souvenir, Degas rima la plaisanterie que voici
il
garda
le
plus agréable
:
SUR UN CHEVAL VAILLANT, MAIS VIEUX, ET SUR DEUX VOYAGEURS. Ils sont
maintenant arrivés.
Les hommes aux
cols relevés.
s’en allaient sur la route ;
Ils retournaient
trouver Paris,
Les choses dont on Ils
y
les nourrit.
sont aujourd'hui sans doute.
Et Lui, qu
Pour
Du
les
les routes.
retour de ce
Qui
de
pluie, le soleil, la poussière firent vite leur
œuvre. Mais, un jour ou deux, ainsi transformé, paysans rencontrés sur
la fantaisie
est-il
devenu?
être allé et revenu
vallon où la bise est dure;
A-t-il succombé en chemin.
Et faudra-t-il, sur parchemin.
—
139
—
Célébrer sa noble aventure?
Ou
de dix ans,
bien, rajeuni
Cet étalon de paysans Va~t-il, ô comble de mystère
comme
Vouloir
Grâce à
Immédiatement Si
cet
les
deux
ses
grands
coursiers.
nourriciers.
être père?
évènement curieux
Devait vraiment avoir voudrais
Je
!
lieu.
aujourd'hui
m'inscrire
Pour avoir du noble animal
Qui
leur a servi de cheval.
Un petit,
Ces rares cultivé, rien
fantaisies
je le dis
sans
rire.
d’un esprit morose, sont passe-temps d’homme
de plus. Leur auteur lui-même, tout
le
premier, s’en moquait.
Degas fut un de ces esprits dont parle Rémy de Gourmont, qui ont reçu un don particulier et qui exigent de l’observateur une attention spéciale, un de ces hommes dont on ne peut savoir jamais ce qu’ils vont dire.
De
ceux-ci,
il
y en a peu.
Citons quelques-uns de ses aphorismes l’épouse pas légitimement, on est
malhonnête
et cruel. «
Cet
façade, revient souvent chez
un ami,
le
fallait,
note
danseuses qu’il a tel
par
ou la
lui. «
— Qui
pour
la
«
L’art, c’est le vice.
dit art, dit artifice.
J. si
était la
Vous rappelez-vous,
cruauté ?
On
ne
— L’art
cruauté, au moins apparent, de
un jour à que la pre-
disait-il
début du second Livre du Prince où Machiavel
mière vertu d’Annibal Il
le viole.
attrait
:
écrit
«
de Concourt, entendre Degas causer de son
art,
des
subtilement étudiées, commentant, de temps à autre,
de ses tableaux quand par hasard il consentait à en montrer, imitation, mimique d’un développement chorégraphique, par
tel
1
en langage de danseuse, d’une de leurs arabesques
MO
—
COURSES
AUX
VOITURE
LA
Reproduisons laquelle
il
la fin
d’une de ses
prenait congé de lui
amour constant pour
:
«
à
lettres
un ami,
la
formule par
Je vous renouvelle l’assurance de
le dessin. » N’est-elle
pas d’une
humour
mon
exquise ?
La justesse de l’observation de Degas est connue. En veut-on d’autres preuves? D’abord cette réflexion à propos de Puvis de Chavannes, qu’il « Personne comme lui, admirait fort n’a trouvé la place juste des :
personnages dans une composition. Cherchez à déplacer une de ses figures
d’une ligne, d’un point, vous n’y arriverez pas
Autre observation, à propos de Whistler baigne les
épaisseurs
»,
les êtres et les
1
choses
:
« Il
dessine par les distances, non par
voulant faire comprendre que
peint les êtres et les choses
que
1
c’est impossible. »
,*
atmosphère enveloppante dans laquelle l’artiste
atmosphère qui
par transparence et par transposition de
la
les
américain a moins
baigne, les interprétant
lumière.
Signalons cette réflexion au sujet des prix atteints par
Delacroix dans peintres
les
ventes publiques
:
«
œuvres d’Eug. Le meilleur marché des grands les
».
Devant un dessin de
M. Arsène Alexandre
Raffaelli, très poussé, relevé d’aplats
raconte que Degas s’écria
:
«
coloriés,
Raffaelli dessine sur
de la loi ». Notons encore ce mot au sujet de la musicalité des tons optiques, de la mysticité des maisons de béguines, de 1 humble expression des pavés, des rues et cours de Le Sldaner, où il voyait surtout des intentions « Ce n’est pas de la peinture, mais un état d’âme ». les tables
:
Degas a toujours tenu, ou plutôt a toujours paru tenir à sa réputation ah combien usurpée Personne, au contraire, d homme méchant ne fut meilleur, plus tendre que lui mais se défiant des grands sentiments et des grands mots, toujours en garde et prompt à la riposte, il savait, comme pas un, découvrir le ridicule et le stigmatiser impitoyablement par un trait d’une justesse inflexible et quasi féroce. Il fallait alors le voir, les yeux cli-
—
!
!
—
;
gnotant, la
un de
physionomie mobile,
les
gestes nerveux et saccadés, lancer
mots cinglent, ses plaisanteries claquent et sonnent comme des gifles. Peu nombreux sont ceux qui y échappent. N’est-ce pas le cas nous savons que son père était né à Naples et sa mère originaire de la Nouvelle-Orléans de rééditer l’aphorisme des Concourt l’esprit le plus parisien qu’ait eu la France est l’esprit des étrangers, des Galiani, du prince de Ligne, d’Henri Heine, ajoutons-y celui de ses traits. Ses
—
—
:
142
—
F^hoto Durând'Rucl.
LE CAFE-CONCERT DES AMBASSADEURS
MANET.
Collection de
M.
Ernest Rouart.
nsv=9<
Degas, mais n’oublions point que ses ascendants étaient de bonne
que nous 1 avons vu. Son appréciation de Zola, qu’il n’aimait guère
souche française,
ses plus grands succès
:
« Il
me
fait
1
d’ailleurs,
d’un géant qui
effet
ou d’Ed. Manet, on ne sait trop, de Meissonier « Tout est en zinc, moins les
Est-elle de lui
Cuirassiers
:
Les suivantes
Un
et vraie
ainsi
lui
au moment de
travaille le Bottin.
»
cette appréciation des cuirasses.
»
appartiennent sans conteste.
à l’exposition posthume des œuvres de Bastien-Lepage,
jour,
devant ses rusticités de contrebande empruntées à
la
formule de Manet,
exposition qui eut lieu en 1885 à l’École des Beaux-Arts, s’arrêtant devant le
tableau de l’artiste
:
La Barrière, où deux jeunes villageois aux
d’un réalisme sage à souhait pour
rées,
en se tenant gauchement
désavouée font
le
les doigts,
1
1
manié-
satisfaire le public, se font la
œuvre d’une facture que
maître de l’auteur, Cabanel
amour pendant absence de Le besoin de notoriété dont
allures
«
:
En
cour
n’aurait pas
voilà, s’exclama-t-il, qui
»
Pissarro.
possédé Manet, qui en convenait
était
lui attira de Degas quelques réflexions assez de l’expédition des Mille, à Naples, il lui dit malicieuse-
d’ailleurs assez facilement,
vives.
Au moment
Manet, le même genre de célébrité que Garibaldi. » Encore à propos de Manet. Alors que celui-ci avait entrepris un
ment
Vous
«
:
avez,
portrait d’Albert Wolff, qui ne fut jamais achevé d’ailleurs, et qu’il exprimait
sa vive contrariété des
manquements aux séances promises par
le journaliste,
Degas
De
un
lui
répliqua
:
«
quoi vous plaignez-vous
vous, c’est pour cela qu’il ne vient pas.
A
l’agaçait
la vanité, aussi
quelque peu, Degas
comme
grande que dit
un jour
Il
écrit
article sur
du
séjour de l’artiste américain à
celle
de Manet, mais moins ingénue,
Whistler, qu’il vit beaucoup lors
Pans, et dont
?
»
:
«
Mon
cher ami, vous vous condui-
George Moore, le subtil écrivain que Degas soutenait qu’il était impossible de parler à Whistler sans que celui-ci se drapât aussitôt dans son manteau et ne vous laissât bien vite, pour courir chez le photograj^he. C’est encore à propos de Whistler qu’il répondit à un camarade arrisez
si
vous n’aviez pas de
talent.
»
anglais qui rapporte ce mot, rappelle encore
vant chez
lui
au
moment où
questionnant sur ce que celui-ci avait
coups de mèche.
Lors d’une pagnait
:
«
Ah!
américain venait de
l’artiste
dit
:
«
Rien, rien,
il
le
a
quitter et
le
posé quelques
»
une exposition, il murmurait à un ami qui accomnous pouvions découvrir un peintre qui naît pas de
visite à si
1
143
—
talent! » Ingres n’avalt-il pas dit
mais
dégoûter du
à nous
c est
rencontrés dans
même
la
Le
«
:
talent »
talent.
de notre temps, court Les deux maîtres
les rues,
s’étaient
pensée.
Parlant de la grande composition de Roll, Le Travail, raconte encore George Moore, auquel nous avons fait maints emprunts et en ferons encore, Degas s exclama « Il y a cinquante figures, mais je ne vols pas la foule. On fait la foule avec cinq, mais non avec cinquante personnages. » :
Au
de Besnard, dont
sujet
mais selon
réel,
n’appréciait point le talent, cependant
il
surtout d’emprunts
lui fait
rapporte encore cet aphorisme de Degas
avec des semelles de
ment
:
Le pompier
«
A un
admirait toutefois
d
de puissance dans vos
air
Mais
il
raisonnée.
mons,
Un il
Au
toiles
s’agit
il
»
que
!
moins, vous,
lui fit-il
peut-être moins
de
1
air
ambiant, bon à respirer, qui dilate
pour Degas,
la
il
main sur
les
pou-
la toile et, satisfait,
déclara
:
«
trouvait
bien
A la bonne heure,
»
Paris,
donné quelques conseils, ne travailla pour ainsi dire plus.
jadis,
il
lui dit
il
avait
il
Degas
alla voir
il
enseignements de
et lui
il
n’y reste plus
elle ferait
»
Ce
comme une
modiste
Lors du succès de
un autre
dire,
compliment dans
la délicate artiste
la
main. — Oui,
M. Degas,
oui, répliqua
poil. »
échappe-t-il
des chapeaux.
subtil
mots, entend que
lui
qu un
exprimant sa reconnaissance
Je n’oublierai jamais,
«
:
vous qui m’avez mis une brosse dans
au contraire, un instinct,
Mon-
celui qui convient à la peinture.
devant une œuvre d’Ignacio Zuloaga qu’il
Berthe Morisot,
comme
temps.
observer, vous ne mettez pas
passa
Degas, mais «
De mon
d’une pointe que d’une opinion
ici
autre peintre espagnol, auquel
c’est
«
lour,
Lors d’un voyage à les
:
espagnol Ignacio Zuloaga, dont
artiste
retourna plus tard dans son pays, où
pour
dit
il
»
L atmosphère
peint plat.
Un
1
Degas
fois,
compositions pleines de caractère, de tempérament
les «
:
A
»
G. Moore
un homme qui veut danser le lui définit mécham-
C’est
«
:
autre
qui a pris feu.
n’est pas précisément,
peinte,
Une
».
jeune peintre assoiffé de notoriété,
on n’arnvalt pas.
sieur,
et
plomb
d’adaptations,
et
la
au
jour, peint des tableaux
lieu d’être
une
critique, est,
bouche de Degas, qui, par ces
peint naturellement ses toiles par pur
attife ses
chapeaux.
l’insipide tableau
de
l’italien
Tofani, représentant
deux jeunes mariés en tenue de soirée, l’homme en habit, la femme en robe eux dans leur chambre, après un dîner d appa-
décolletée, se retrouvant chez
-
146
—
Mutrc du Louvre.
Collection
I.
lâ&#x20AC;&#x2122;hoto Druel.
de Camondo.
LE PEDICURE. (
Peinture)
ou un
rat,
bal, et
tombant dans
les
bras l’un de l’autre
:
Enfin seuls! tableau
popularisé par d’innombrables reproductions, Degas va au Salon qui venait d’ouvrir, avec
«
Quel
est le titre
catalogue
le «
un de
Tous deux
ses amis.
Sphinx de Gérôme, accroché sur
le
?»
passent devant
est
Il
Une
«
:
Bonaparte
Gérôme
c’est
certainement
:
Enfin seul!
qu’un jour, dans son
atelier,
après-midi,
:
les
»
celui-ci critiquant le
murs de Babylone, Degas
Je suppose que ce n’est pas assez turc pour vous.
vrai
et
—
—
tableau de sa jeunesse de Sémiramis élevant répliqua
le
cimaise, au milieu d’un panneau
de ce tableau, demande Degas à son compagnon qui tenait Soldats, quarante siècles vous contemplent...
Vous vous trompez, C’est à
la
que 1
compréhension des deux
la
auteur du Duel de Pierrot
et
»
artistes était différente!
Degas
Henri Rouart. La conversation étant tombée sur Corot
se rencontrent chez :
«
Corot, proclame
— Non seulement
il dessine Gérôme, ne sait même pas dessiner un arbre. les arbres mieux que personne, rétorqua Degas, mais aussi les figures mieux Voilà encore un paradoxe de Degas », conclut Gérôme. que nous. Arrêté en compagnie d’un ami, à une exposition, devant un tableau représentant un épisode d’une légende celtique Galzwinthe quittant le son l’ami, familier l’histoire palais de père, peu avec de Galzwinthe, demande « C’est qu’elle n’est pas d accord avec le à Degas la raison de ce départ
—
:
:
fond!
fut la réponse.
»
Le
peintre Tillot, déjà âgé, qui avait
ventes d’objets d’art réunis par
lui,
fait
à l’hôtel
Drouot plusieurs
Degas d’une
parlant devant
adjugée après décès, ce dernier ronchonna entre ses dents
y a des ventes après décès, d’autres avant. A propos d’un Japonais venu à Pans étudier
:
«
collection
Oui, oui,
il
»
Beaux-Arts, Degas s’exclama qu’a-t-on à faire titut
«
Quand on
de venir se mettre sous
du coin du quai?
Nous avons
:
la
peinture à
1
École des
a la chance d’être né au Japon,
la férule
des professeurs de
1
ins-
»
dit l’éloignement
de Degas pour
les distinctions
honori-
deux mots de lui à ce propos. Lors de l’Exposition universelle un de ses anciens camarades fut décoré, et sa nomination de cheva-
fiques. Voici
de
1
lier liste le
889,
de
du
la
Légion d’honneur parut au Moniteur Universel dans
14 juillet. Degas,
le
complimenter, puis tout de suite après
fait
décorer dans une rafle?
la
longue
rencontrant quelques jours après, crut devoir
»
148
—
:
«
Mais pourquoi vous êtes-vous
Druet.
Photo
Camondo.
de
1 Collection
Louvre.
du
Mui^e
Le
peintre G., au café
de La Rochefoucauld, où
quelques amis, parlait en plaisantant de
C était
en 1882;
auquel
allait
contraindre
le
voisine, lui souffla
«
:
la
et se
du ruban
port
le
Bah dans quelques !
déjeunait avec
croix qu’il venait de recevoir.
encore très jeune
était
il
il
du décorum
plaignait
rouge. Degas, de
jours,
table
la
vous pourrez replonger.
«
Comme un ami lui montrait d’énormes toiles décoratives d’un peintre mode, destinées à l’Amérique, et s’effrayait des difficultés de transport « Ne craignez rien, lui dit tranquillement de machines si encombrantes à
la
:
Degas, ça se dégonfle.
On
»
Gustave Moreau,
vantait devant lui
qu’il avait fréquenté
sa vie
;
approuva Degas, d’un ermite qui connaît l’heure des
Moreau
à propos de Gustave
Pharaon deux montres
:
«
Carrière, c’est
noir
»,
un cerveau.
»
il
»
Et, toujours
»
sentencieusement
lui
Degas répliqua
:
«
aphorisme
cet
:
Plutôt une cervelle au beurre
ce qui ne l’empêchait pas d’apprécier l’œuvre
Carrière, avec lequel
trains.
—
Quelle nécessité trouve-t-il de donner à
doubles breloques?
et
Quelqu’un émettait devant «
dans sa
Rome, et dont il reconnaissait d’ailleurs le talent on célébrait Oui, retirée, loin du bruit, « une vraie vie d’ermite, dit quelqu’un.
jeunesse, à
du grand
artiste
qu
est
eut les meilleures relations.
A propos des Fleurs vraiment belles de son am Fantm-Latour, auxquelles il
reprochait des fonds toujours sombres,
vu sur un corsage de femme?
Au
sujet
cette observation
manchettes de Carolus d’un pouls vénitien?
Absolument à
un jour
et les veines
de Degas
:
«
:
«
indifférent
:
n’en a donc jamais
J.
de les
de ses mains, pleines des vibrations
aux questions d’argent,
Je SUIS
comme les bons cracks, :
«
je
lors il
du
que ma pitance ordinaire... » marchand de tableaux de la
mon
(le
prix. »
Il
ajoutait encore, en sou-
Aujourd’hui, vu ce que se vendent mes productions,
qu’un pauvre à
chiffre atteint
se contenta de mur-
n’aurai
Dites à Vollard
rue Laffitte) que, maintenant, c’est riant
« Il
»
Et puis, sans transition «
:
Avez-vous remarqué
vente Henri Rouart par ses Danseuses à la barre,
murer
être
dit
d’un portrait de Carolus Duran, par un de ses élèves,
Concourt rapporte
la
il
»
je
ne puis plus
l’aise. »
N’msmua-t-il pas aussi toujours à propos de ce tableau que celui qui l’a fait soit un sot, mais celui qui 1 a acheté
crois pas
mettons
«
imbécile
».
150
—
:
«
Je ne
est un... »
DANSEUSES A LA BARRE.
DANSE
DE
RÉPÉTITION
LA
Mais
laissons ces boutades.
Les prix ne
dire, Il
atteints par certaines
troublaient guère.
le
que
savait bien
comme
de ses œuvres,
nous venons de
n’y attachait qu’une importance secondaire.
Il
ses plus sûrs, ses plus convaincus admirateurs n’étaient
pas ceux qui se disputaient ses toiles et ses dessins à coups de
billets de banque, mais de plus humbles, qui cherchaient à en obtenir à force d’inves-
de recherches, de patience, pour de modestes
tigations,
M. Robert de
leurs ressources leur permissent.
tement
«
:
un amateur paie une œuvre
Si
qu’elle lui plaît
A
Oh
de
frère.
mes
:
d’art quatre cents francs, c’est
tableaux.
>>
vente d’Henri Rouart, Degas, abordé par un célèbre
la collection
— Mais
que
très jus-
l’a écrit
paie quatre cent mille, c’est qu’elle plaît à d’autres.
réplique Degas,
!
prix, les seuls
Sizeranne
passée par
les
enchères quelque peu plus
un chiffre respectable de millions, semble ne pas « Vous ne me reconnaissez donc pas, M. Degas,
avait atteint
tel.
;
la
il
même
cette
amateur, dont
l’interpelle
s
la
si,
beaucoup connu votre
j’ai
vous aviez un frère
et
est
il
frère.
tôt,
savoir qui je suis
— Je
un
n’ai pas
mort, puisqu’on a vendu
»
Franc avec ses amis
— d’une
franchise doublée de finesse
—
il
les
troublait et les désarçonnait peut-être plus qu’il ne l’aurait voulu, témoin
ce dire de Bonnat
:
«
J’évite
au moins huit jours de graveur qui
lui
venu
peinture
».
Témoin
soumettait une de ses planches
vous pourrez lutter avec à Forain,
Degas, car causer avec
ma la
photographie
»
;
lui
me
dégoûte pendant
cette réflexion â ‘
«
Encore un
effort, et
témoin encore cet autre mot
voir quelques jours après la déclaration de
le
un ami
guerre de
l’Allemagne, en uniforme flambant neuf :«Que vous étiez plus vous-même, jadis,
costume que vous portiez pendant la Commune » parlait devant Degas d’un personnage présent, déjà âgé, dont
avec
On
le
!
cheveux étaient d’un noir d’ébène
«Ça viendra quand
leur
Degas
n’était
avait
offerts.
avec lequel
de Degas
il
voudra», répliqua Degas.
L’homme
les »
;
âgé avait disparu.
pas tendre pour ceux qui trafiquaient des ouvrages qu’il
Un
jour,
il
était hé, et le lui
et lui
bons procédés,
il
;
pas un cheveu blanc, disait-on
«
en alla
fit
cadeau.
brossa
donna.
Un
un
portrait
A
son tour,
du peintre M.
M.
L.,
L. peignit celui
marchand, ayant appris cet échange de
proposer un bon prix de
qui ne refusa point l’aubaine. Degas l’apprit. 152
—
la toile
A
de Degas à
M.
quelque temps de
là,
L., les
deux
M.
artistes
rencontrèrent
se
alléguant sa position modeste
que
rendre
il
:
«Vous avez mal
demandât
le
;
agi en vendant le portrait
Degas, d autant plus que
absolument
1
ne pourrais vous
je
au moins en tant qu’acheteurs.
entrée de son atelier, n’admettant pas qu’on
Il
De
ce côté,
ne consentait à se défaire de ses ouvrages qu’en faveur
de quelques rares marchands, dont
principal est Durand-Ruel.
le
jour cependant, dans les toutes dernières années de sa vie, par
exception, sur la recommandation riche
froid
des excuses,
prix de ses tableaux et se refusant à tout débat.
était inflexible.
Un
plutôt
fut
balbutia
»
la pareille.
leur interdisait
lui
dit alors
raison,
la
avait horreur des amateurs, tout
Il Il
de vous,
j’ai fait
de Degas
l’accueil
;
en comprenant immédiatement
L,,
Américain, lequel
d un ami,
ne voulait
il
consentit
une de
acquérir
à
ses
un que
recevoir
œuvres
directement.
montra d’abord une petite toile dont il demanda cent mille puis une seconde, beaucoup plus importante cent mille francs ;
Degas francs
un
lui
:
;
pastel
:
cent mille francs
;
un dessin sur papier reporté sur
mille francs, toujours cent mille francs. « Je n’ai qu’un prix
doucement, entre
les dents,
Inutile d’ajouter
tèrent
cent
murmura-t-il
finir.
que l’Américain
était d’avis
se retira, et
que
les
choses en res-
que
Degas parfaitement froid. que peinture, n’avait rien à voir avec
sociales ont toujours laissé
la peinture, en tant
les revendications, les conflits, les
soulèvements d’une caste ou d’une autre.
L’égalité des droits ne l’mquiétait guère dans
du point de vue purement humanitaire,
le
domaine de
l’art.
En dehors quand on
émettait cependant,
il
poussait dans ses derniers retranchements, quelques théories particu-
le
lières,
entre autres, celle-ci
:
« Il
traindre les jeunes gens à se créer
sur
la
faut abolir l’héritage
eux-mêmes une
»,
et cela
pour con-
position, à ne pas
compter
fortune de leurs parents, à ne pas escompter leur décès. Les grands
mots de n
»,
:
là.
Les questions Il
pour
toile
était
jusqu à
justice et
de
liberté l’ont toujours trouvé sceptique.
point faite pour 1
époque de
le
passionner.
l’affaire
nationaliste et
s’en tint
politique
complètement éloigné
Dreyfus, mais depuis, fidèle lecteur de
Libre Parole et de VIntransigeant, tion de
Il
La
il
demeura inébranlable dans
La
sa convic-
refusa obstinément de revoir d’anciens amis qui
avaient pris parti pour ce qu’il considérait 133
—
comme une
monstruosité.
Degas, pendant quelques années, particulièrement de 1895 à 1900, fut poursuivi par l’idée
renfermées dans son
de fonder un musée composé de ses propres œuvres
atelier,
des toiles et dessins d’Ingres, Eug. Delacroix,
Corot, Courbet, Manet, Couture
Daumier, Gavarni,
un
soin passionné.
les frères
on
est
Henri
etc., etc., Il
des gravures et lithographies de Manet,
eut, à ce propos,
et Alexis
la collection
formée par
de longues entrevues avec
lui
avec
ses amis,
Rouart, Bartholomé, E. Moreau-Nélaton (auquel
de cette
redevable
;
composant
merveilleuse
donation
de chefs-d œuvre au
Louvre, mais encore aujourd hui abritée au musée des Arts Décoratifs), avec l’amateur Groult, dont les collections sont pieusement conservées par sa
veuve dans son hôtel de
De
1
avenue Malakoff.
ce musée, auquel s’intéressait
le local, etc.,
qui
rendu compte, créer
ministre Baudin, l’emplacement,
furent minutieusement cherchés, médités, discutés. Rien de
tout cela, néanmoins, ne prit difficultés
le
lui il
un tour pratique
et réalisable. Effrayé
parurent insurmontables, Degas y renonça. Il revenir, que léguer des œuvres d’art à
faut y
par des s’était
l’Etat,
ou enrichir des musées n’est pas aisé. Les bureaux, les comités là pour accumuler les obstacles et décourager les meilleures
sont toujours volontés. S’il n’a
jour viendra
une
pas réussi à fonder
—
et ce
salle à part,
le
musée
ne sera que justice
au Louvre. Là nos
vengeront Degas de l’indifférence de
— où
fils
la
154
qu’il rêvait, 1
il
faut espérer qu’un
œuvre de Degas obtiendra
et petits-fils,
par leur admiration,
plupart de ses contemporains.
—
0
TABLE DES GRAVURES
Paget
—
Couverture.
Danseuse. (Collection de
M. Henry
Lerolle).
Buste de Degas, par P. Paulin. Salle
d’exercices
La
6
de danse
Verte
Chanteuse
7
9
Répétition de danse
Les Repasseuses
10
Les Modistes
Il
•
12
Blanchisseuses
Jeunes
Spartiates
filles
Etude de nu pour Les Malheurs de
Avant
La
le
Fille
les
provoquant des garçons
Malheurs de
la ville
la
ville
13
à la lutte
d’Orléans (Fac-simile hors
texte).
15
d’Orléans
Départ
16
de Jephté
17
Esquisse pour Sémiramis (Hors texte).
Sémiramis élevant
les
19
murs de Babylone
Etude de nu pour Sémiramis (Fac-similé hors
Femme La
nue
assise relevant ses
texte).
21
cheveux
23
Toilette
Portrait
M.
25
femme âgée
27
de M-"' D.
Portrait de
29
L’Fnlevcment des Sabines
Etude de
tête (Fac-simile hors texte).
—
155
—
Pages
d’Altès
Portrait
31
d’Eugène Manet
Portrait
32
Portraits de famille
33
d’homme en chapeau
Portrait
‘ •
Buste de jeune femme
•
35
36
Etude de cheval pour Sémiramis (Fac-similé hors
texte).
Bouderie
37
Tête de femme
38
Le Comptoir de Cotons
a la
39
Nouvelle-Orléans
Classe de danse
41
de Leon Bonnat
Portrait
•
42
Danseuses saluant (Hors texte en couleurs). L’Absinthe
43
Répétition d’un Ballet sur
la
45
scène
Portrait d’Albert Mélida
46
L’Etoile
47 de M""® G.
Portrait Ballet
49
50
de Roberl-le-Diable
Les Figurants
51
Femme
52
s’essuyant le cou après le bain
Le Café
53
Le Tub
54 55
Danseuse au bouquet Portrait de M"® Salle (Hors
texte).
Danseuse au bouquet
57
Femme
58
Après
dans une baignoire
le
Femme
59
bain
61
à la potiche
63
Les Danseuses au piano Danseuses sur
La
Famille
la
scene (Hors texte en couleurs).
65
Mante
67
La Leçon de danse La Conversation chez Danseuses à leur
la
68
Modiste
69
toilette
Danseuses près d’un portant
71
La Confidence
72
—
156
—
1
Pages
Danseuses (Hors texte en couleurs)
73
Danseuse dans sa loge
En
77
attendant l’entrée en scene
80
Danseuse de Levert
82
Danseuse au repos
83
Portrait
Salle d’exercices
M"'
Fiocre dans
Manet
85
de danse de
le ballet
la
Source
.
.
•
87
.
(Fac-similé hors texte).
Miss Lola au cirque Fernando
91
Henri Rouart (Fac-simile hors
Portrait de
texte).
94
Neyt
Portrait de Sabine
95
Danseuse au brodequin Portrait
97
de Duranty
99
Degas, par Desboutins Buste de Degas, Profil
99
par Desboutins
de Degas, par de
100
Nittis
Degas par lui-même en 1857 Portrait
de Degas (Hors
101
texte).
Portrait de Degas, par Desboutins
•
.
.
103
.
.
Degas, par Maurice Denis
105
Degas, par Carlo Pellegrini
107
109
Degas, par Manzi Musiciens a l’orchestre Sortie de
Danseuse
113
bam les
Le père de
bras relevés
1
l’artiste et le guitariste
Le Vicomte Lepic
14
115
Pagans
Danseuses
Un
1
I
et ses enfants
1
17
1
19
des derniers portraits de Degas (Hors texte).
123
Exercices de danse Assiette peinte par
126
Degas
Chevaux de course (Hors
texte en couleurs).
Miss Cassatt
129
Danseuse au bouquet
133
Petite danseuse (h ac-simile hors texte).
137
—
Pages
La Voiture aux Courses Portrait
de Manet (Fac-simile hors
Le Café-Concert
)4I texte).
des Ambassadeurs
Le Pédicure Les Danseuses à
143 ‘
la
147
barre (Hors texte héliogravure).
Exercices de danse
151
La
153
répétition
.
^ '.
r
.
.-VÆvvV
îK<?r 'V
•>
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•
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4
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.
* .1
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