8e art n°15

Page 1

été 2011

#15 MARSEILLE-PROVENCE

ART & CULTURE FREEMAGAZINE

marseille 2013

Qui êtes-vous M. Chougnet ? performance

Mariage 2 filles 2013 Off

Mode d’emploi

20 Festivals Expos, sorties...

Guide de survie pour un été culturel ! P. 39



Édito

été 2011

#15 MARSEILLE-PROVENCE

mARSEILLE 2013

Qui êtes-vous M. Chougnet ?

Printemps de l’art contemporain

20 FESTIVALS PERFoRmAncE

Mariage 2 filles 2013 oFF

P. 61 Mode d’emploi

20 Festivals Expos, sorties...

Guide de survie pour un été culturel ! P. 39

#15

été 2011

ART & CULTURE FREEMAGAZINE

Couverture : L’Orchestre National de Jazz (Charlie Jazz Festival) - Voir p 78 © Annabelle Tiaffay

AIX - MARSEILLE

ART & CULTURE FREEMAGAZINE

La reproduction même partielle des articles et illustrations sans autorisation est interdite. 8e art décline toute responsabilité pour les documents et articles remis par les annonceurs. Dépôt légal à parution.

Impression : Azur Offset - Acropolis - 171bis, chemin de la Madrague-Ville - 13015 Marseille - 04 91 52 53 54

Conception et réalisation graphique / Direction artistique : Dix-Ein - 06 76 54 05 88 - infos @ dix-ein.com - www.dix-ein.com

Des danseurs nus ; des films entre « souffrance et cruauté » ; Abd al Malik qui slame sur du Mahler ; des Autrichiens qui font de la musique avec des légumes ; un Russe qui cherche son nez ; un Marocain qui rappe en arabe classique ; deux centaures ; trois hommes chinois ; cinq continents… Vingt festivals. Et des centaines de spectacles, réunis dans notre « guide de survie pour un été culturel ». C’est à dire, un été pas bête. Car la période incite à l’oisiveté. On se couche tard, on se lève tard, on agonise sur la plage… Et on termine devant la télé. Pour se donner bonne conscience, on se convainc que « de toute façon, à Marseille, il n’y a rien à faire ». Et pourtant, ils sont là. Les artistes, les musiciens, les chanteurs, les acteurs, les metteurs en scène, les chorégraphes, les chefs d’orchestre, et j’en passe… Sans attendre 2013, ils se démènent pour imaginer des créations inventives et stimulantes ; ils nous divertissent, nous émerveillent, nous ensorcellent. L’été, c’est l’occasion de multiples découvertes. En tongs, un cocktail à la main, « tranquille », on écume quelques-uns des vingt festivals qui nous auront séduit au fil de ces pages…

Edito

Service Commercial : 09 81 63 54 76 - contact@ le8art.fr

Rédacteur en chef : Sandro Piscopo-Reguieg - 06 71 62 49 81 - sandro.piscopo@ gmail.com

Directeur de la publication : Frédéric Guerini

8e art est une publication des Éditions Bagatelle - 19, avenue de Delphes - 13006 Marseille - 09 81 63 54 76

Directeur administratif et financier : Nicolas Martin

www.8e-art-magazine.fr

Sandro Piscopo-Reguieg

été 2011

8e art magazine

3



sommaire

Actu

p.

p.

16

p.

25

p.

29

p.

34

Festival de marseille

p.

40

mimi

p.

44

FID

p.

48

Jazz des cinq continents

p.

53

Festival d’aix

p.

63

Festival d’avignon

p.

70

expo

p.

86

p.

92

p.

96

mp2013 9 jean-françois chougnet

fou 9 Un mariage créatif

Sortir 9 Plein air de culture

Portrait 9 Sandro della noce

9 l’orientalisme en Europe

expo 9 Collection planque

portfolio 9 rencontres d’arles

abonnement

Retrouvez-nous sur coup dE

#11

p.

111

agenda

p.

121

Abonnement

p.

138

2010

#12

ART & CUL TURE FRE AIX - MARSEILLE EMAGAZ INE

AIX - MARSEILLE

e

printemps 2011

P. 64

#14

ART & CULTU

MARSEILLE-PRO

hiver 2010

VENCE RE FREEMAGAZI NE

# 13

NCE

LE-PROVE

MARSEIL

ART &

MAgAziNe n

E CULTUR

E

AGAZIN

FREEM

marseille : QuELLE pLAcE pouR LA cuLtuRE ? p.36

et au

MARSEILLE-P

ROvENCE 2013 La possibilité ssi : d’une capita mARsAT le fiEsTA RENCO AC dEs sUd NTRES DU 9e smALL ART s AixUTi is bEA sous les bulles fUL ACToRA LUCIEN L CLERgUE ExposPortfolio

été 2011

...

MEs

ALIS l’ère x tistes deexposent à Ai Les ar e s’

FUTURÉ

15

# Printemps de l’art con ART & CULTUR MARSEILLE temporain E FREE -PROVENCE MAG

été 2011

et recevez

Fo

udRE po il va ART & CULTURE taFREEMAGAZINE uR zEvs vieille guer la charit é!

expos

automne

8 art abonnez-vous à

printemps/été 2010

www.8e-art-magazine.fr

7

8e art magazine

5



Actuactu

en attendant 2013

500

C’est (peu ou prou) le nombre de projets « non retenus » à ce jour par MP 2013. Ce premier écrémage concerne les dossiers jugés incomplets ou fantaisistes. Ils recevront chacun une lettre à la fin du mois de juin. Rappelons que l’association a reçu plus de 2 200 projets. Elle n’en retiendra que 600.

Cité ok Bien que située dans les quartiers Nord, la Cité des arts de la rue est très bien desservie par la RTM.

Silo bientôt

Après l’inauguration, le 17 juin, de la Maison des Cinématographies dans un Château de la Buzine réhabilité, JeanClaude Gaudin va ressortir l’écharpe et la paire de ciseaux pour la Cité des arts de la rue (en septembre) et le Silo (en automne).

La petite phrase

« C’est un mauvais choix pour Marseille, cela va créer un problème dans la ville. La municipalité souhaitait un festival du film méditerranéen en 2013. Un festival du film arabe stigmatise une communauté. » Éliane Zayan, adjointe au maire en charge du cinéma, déclarait publiquement le 4 mai son opposition au futur festival international du cinéma arabe (Fica) lors de la conférence de presse de l’association pour la diffusion des cinémas arabes, porteuse de ce projet soutenu par MP 2013.

Grogne des

agents municipaux

Le 27 mai, à l’occasion du vernissage en grande pompe de l’exposition L’Orientalisme en Europe, quelques dizaines de manifestants se sont invités à la Vieille Charité pour faire part de leurs griefs à Jean-Claude Gaudin. Réunis au sein du « Collectif Culture », ces agents de services culturels municipaux soutenus par l’intersyndicale ont distribué au public un document de quatre pages dans lequel ils dressent un sombre tableau de la politique culturelle de la Ville. Ils fustigent par ailleurs la « crise de direction » qui touche notamment les musées, les bibliothèques et l’Opéra.

Les deux tours ? Out !

Pas de permis de construire pour Franck Gehry. Les deux tours en aluminium alvéolé qu’il projette d’ériger à Arles pour la fondation Luma risquent bien de ne jamais voir le jour. La « faute » à de précieux voisins qui occupent le terrain depuis bien longtemps : un clocher médiéval et les vestiges d’une nécropole antique. La Commission nationale des monuments historiques a donc émis un avis défavorable. Le calendrier officiel, qui prévoyait l’ouverture progressive à partir de fin 2013 d’un bâtiment que les mauvaises langues arlésiennes surnomment la « canette de bière », n’est plus d’actualité. Gehry, lui, a la gueule de bois. La « canette de bière » de Franck Gehry… À la poubelle ?

Liste Le conseil d’administration de l’association MP 2013 s’est réuni le 9 juin à Aix. Selon un communiqué, le nouveau directeur général JeanFrançois Chougnet a présenté une liste « d’une quarantaine d’opérateurs avec lesquels les premières conventions de coproductions vont être engagées » (plus d’infos p.19). Le prochain CA se tiendra le 22 septembre à Arles.

9 été 2011

8e art magazine

7


ACTU

Ora-ïto, ce fada

arts

Fabrik Tout en poursuivant ses multiples activités liées à l’art contemporain et au design, la Fabrik 89 devient à partir de cet été l’antenne marseillaise de la LAG, galerie spécialisée dans les planches de BD originales. Pour célébrer l’événement, on remonte le temps avec Bulles temporelles, une expo qui, du 23 juin au 23 juillet,

nous fait parcourir l’Histoire en BD. Sont visibles (et dispos à la vente) des planches originales d’une vingtaine d’auteurs parmi lesquels Isabelle Dethan, Mazan, François MivilleDeschênes, Saverio Tenuta (photo)… Après cette expo, un espace sera réservé toute l’année à la BD. Fabrik 89 - 89, rue Sainte - Marseille 7e www.fabrik89.com www.lagmarseille.com

34 448 hiver 2010

C’est le nombre de visiteurs de l’exposition Futuréalismes d’Electronic Shadow, qui se tenait du 10 décembre 2010 au 24 avril 2011 au musée Granet. # 13

ROVENCE

MARSEILLE-P

ART & CULTURE

E

FREEMAGAZIN

Es

FUTURÉALISM

l’ère Les artistes de osent à Aix xp numérique s’e P. 15

et Aussi :

NEWS

vence 2013 Marseille-Pro DOSSIER eille Design 100% Mars

pORTFOLIO

mac Zineb Sedira au ...

8

8e art magazine

été 2011

© DR

à BD

L’enfant du pays, star du design, a acquis le toit terrasse de la Cité Radieuse. Il est en train de le transformer en centre d’art contemporain où seront produites « au moins trois monographies d’artistes exclusives par an ».

70 000 € pour cinq

« Plus de moyens, moins de projets. » C’est la feuille de route de Mécènes du Sud, qui dévoilait le 8 juin ses nouvelles ambitions. L’association créée en 2003 compte aujourd’hui 32 entreprises. Fin juin, un appel à projets devrait être lancé à l’attention des artistes locaux ou ayant un projet lié au territoire de MarseilleProvence. Les cinq lauréats devront se partager la dotation (70 000 euros) pour financer leurs idées. www.mecenesdusud.fr.

Lab.L

LN

LN Boul fait des origamis, pas seulement quand elle s’ennuie. Réalisée à partir d’une feuille de métal pliée, la lampe Ori (éditée par SCE) est la dernière création de la designer marseillaise. « Les motifs ajourés favorisent la mise en pli », tient à préciser LN qui a conçu

cette pièce dans l’atelier « Lab.L » qu’elle partage depuis peu avec la décoratrice Sarah K à la Belle de Mai. Tiens, les filles vous invitent d’ailleurs à leur soirée du 30 juin. Une petite fête conjuguant performances musicales et dansées et installations barrées (18h-22h, entrée libre). Lab.L - 20, bd Leccia - Marseille 3e 04 84 26 79 39 - www.lnboul.com Ori, par LN Boul.


actu

sons

Marsatac :

Entre émeute et bonbons Cédric Malo alias Tabas, graphiste et directeur artistique de Marsatac, a joué les entremetteurs pour le festival et la marque de fringues Kulte : « Nous sommes deux structures marseillaises… Autant nous rapprocher ! » Le résultat ? Une collection de cinq tee-shirts sur le thème de l’émeute : « Riot ». Et comme une émeute, ça ne se fait pas seul, Tabas a confié le design de quatre d’entre eux à des graphistes du coin (Seb Jarnot, Geneviève Gauckler, Mothi Limbu, Kimi Kimoki). La collection Riot sera disponible en shops au début de l’été ainsi que sur le festival en septembre. Mais pourquoi l’émeute ? « Marsatac est rebelle, c’est inclus dans le nom ! s’amuse Tabas. Mais au-delà de l’émeute, c’est aussi le rassemblement autour d’une idée commune. » Nous voilà rassurés. De l’émeute, Marsatac va passer aux friandises : « Cette année, les flyers du festival seront des sachets de bonbons… C’est moins dangereux que de distribuer des lance-pierres ! » L’équipe de Marsatac est en ce moment à la recherche d’un fournisseur capable de lui livrer 50 000 sachets de flyers sucrés.

L’émeute selon Tabas.

www.kulte.fr - www.tabas.fr - www.marsatac.com

Ils seront à Marsatac #13 Les Marseillais Chinese Man, Oh ! Tiger Mountain et Kid Francescoli seront à l’affiche de la 13e édition de Marsatac (du 29 septembre au 1er octobre à la Friche). Mais on aura aussi droit à quelques pointures internationales comme Black Lips, The Shoes, Modeselektor et bien d’autres (la prog’ n’est pas terminée).

Lyrinx, Sonate n°35 Fondée à Marseille en 1976 par Suzanne et René Gambini sous l’impulsion de Pierre Barbizet, la maison de disques Lyrinx, dédiée à la musique classique, a fêté ses 35 ans au théâtre de La Criée les 15 et 16 juin en réunissant sept pianistes « de renommée internationale » pour deux soirées mémorables. Des concerts bientôt immortalisés sur CD, et peut-être même sur DVD. Aussi, d’ici noël, un coffret réunira les meilleurs enregistrements de la maison de disques, retraçant 35 ans d’histoire. Parallèlement, Lyrinx va multiplier les sorties (Schumann par Vittorio Forte, Beethoven par Marie-Josèphe Jude, Rachmaninov par Katia Skanavi et le Brussels Philharmonic Orchestra, etc.). À surveiller sur : www.lyrinx.com René Gambini et Pierre Barbizet, en1982

Dub Akom a la foi Hyperactif. À la fois label et backing band, Dub Akom récidive avec un nouvel opus réunissant la crème des artistes reggae du moment. Konshens, Jah Mason, Lutan Fyah, Jah Marnyah et bien d’autres posent leurs voix sur le Bonafide Riddim. Le tout est composé, joué et produit par les Marseillais. Une compilation déjà disponible dans les bacs (Virgin, Fnac, etc.) ainsi qu’en téléchargement légal. www.myspace.com/dubakom

lire Jeunesse Le Prix littéraire des lycéens et apprentis de la région PACA récompense chaque année un roman et une bande dessinée. Ont été primés le 26 mai dernier le roman Zen City de Grégoire Hervier et la BD d’Alfred Je mourrai pas gibier. Ils ont été choisis parmi douze ouvrages par mille jurés.

Méditerranée Depuis 1984, le Prix Méditerranée a pour ambition de « valoriser l'espace culturel entre les différents pays dont la Méditerranée est le creuset, et de reconstruire le récit épique des diversités fondatrices de son identité ». Le 7 juin, Renaud Muselier, en sa qualité de Président du Conseil Culturel de l’Union pour la Méditerranée, a remis le prix « français » à Pierre Assouline pour Vies de Job et le prix « étranger » à Dimitris Stefanakis pour Jours d’Alexandrie.

été 2011

8e art magazine

9


médias

Marseille sur web

2013 approche et les sites web marseillais pullulent. 8e art en a repéré trois qui, loin de se concurrencer, se complètent. Agenda culturel ? Bonnes adresses ? Tout ça à la fois ? Trois bonnes raisons de cliquer sur Marseille.

Télérama Sortir L’agenda ultime Le concept : « Nos lecteurs consomment beaucoup de culture… Et nous les incitons à bien consommer. ’’Sortir’’, c’est lire l’article et avoir envie de bouger ! » Le 24 mai, Frédéric Péguillan présentait le nouveau supplément local de Télérama, en kiosques le lendemain. Le rédacteur en chef de Télérama Sortir en a profité pour officialiser la mise en ligne du site web éponyme, ayant l’ambition de devenir l’agenda culturel préféré des Marseillais. La conception de « cette machine extrêmement sophistiquée » aurait d’ailleurs nécessité plusieurs mois. Aujourd’hui, le site est alimenté par une agence de communication recensant le maximum de « sorties » à Marseille, Lille, Lyon et Paris. Un moteur de recherche très intuitif « permet de trouver chaque jour l’expo, le concert, le resto, le film, le truc à faire » décrit le rédac’ chef. Pour certains événements, il est possible de réserver ses billets en ligne : un clic, et on peut sortir ! On aime : Plus qu’un agenda. Les événements (mais pas tous) sont agrémentés de critiques rédigées par les journalistes de Télérama, où l’on retrouve le système de notation du magazine (un T, deux T, trois T). sortir.telerama.fr

Le concept : Une « géographie affective de la ville » selon la formule d’Éric Foucher. Le journaliste (papa de Coming’Up) a lancé Love-spots en novembre 2010 avec la volonté assumée d’être subjectif : « Les gens sont noyés d’infos. Nous

8e art magazine

On aime : Ici, pas d’ambition encyclopédique mais une sélection qualitative. Et pour ça, on peut faire confiance à la rédaction. Les articles privilégient l’ambiance et le feeling à une rébarbative description détaillée. Grâce aux présentations vidéo, on peut savoir si on a le coup de cœur pour un lieu sans avoir à y mettre les pieds. www.love-spots.com

Waaw Je veux ? Le concept : Depuis juillet 2010, on va au Waaw (17, rue Pastoret, au cours Ju’) pour boire un coup dans un bistrot design et sympa ainsi que pour dénicher des infos culturelles et touristiques : flyers, programmes, agendas, etc. Isabelle Richomme, cogérante, résume le Waaw en trois mots : « Bistrot, culture, infos ». Logiquement, le site web lancé en avril poursuit dans la même voie. Il fonctionne à partir d’un moteur de recherche original : « Je veux. » En trois clics, cette « recherche sensible » aboutit (ou pas) sur une sélection de bonnes adresses et événements… Pour ceux qui ne savent pas ce qu’ils veulent, il y a toujours l’agenda quotidien. Enfin, waaw. fr est doté d’un réseau social rassemblant plus de 400 « waamis » qui profitent de cadeaux et bons plans… Tout ce petit monde se retrouve ensuite dans la vraie vie, au Waaw. On aime : Les « parcours » thématiques proposés par l’équipe du Waaw ; et ceux de « l’invité du mois » (un acteur culturel local), qui fait ainsi partager ses bonnes adresses. Le Waaw a la volonté de développer l’aspect « rédactionnel » (articles, portraits, chroniques, etc.). On les encourage. Quant au design du site, on attend qu’il devienne aussi classe que le lieu.

Love-spots Aime ça

10

proposons donc une sélection de lieux pour faire le tri entre l’attrape gogo et l’établissement hautement fréquentable. » Restos, boutiques, galeries, cafés… Les adresses « coup de cœur » de la rédaction nous sont présentées de façon claire, dynamique et non sans humour. Qu’on se le dise : Love-spots est un « média global ». Le site web en constitue le noyau central ; les Love Maps en sont le prolongement « papier » : sur ces plans de poche édités tous les deux mois (20 000 exemplaires), on trouve un choix de bonnes adresses (Love Spots) et de sorties (Love Dates). Ils sont munis de « flashcodes » donnant accès à de multiples infos et avantages. À condition d’avoir un smartphone.

été 2011

www.waaw.fr



: é G

Canebière, novembre 2010 (nettoyé)

décoratrice d’extérieur

Depuis 2004, Gé colle ses petits bonhommes rigolos sur les murs des rues de Marseille. Aujourd’hui, Géraldine Petit, 30 ans, tombe le masque. Et expose en galerie. Par SPR

« Quand les gens voient un dessin sympa à la place d’un commerce fermé, ils nous remercient », assure Gé, devenue street artist pour le fun : « Une expo gratuite à grande échelle et à ciel ouvert, c’est quand même génial ! »

Elle est peut-être l’une des artistes les plus populaires de Marseille… Vous êtes d’ailleurs certainement fans. Sans le savoir. Les petits personnages et animaux rigolos qu’elle dissémine dans la ville sont autant de petites notes de couleur émergeant de la grisaille urbaine. Des œuvres éphémères qui disparaissent puis réapparaissent ça et là, sans prévenir. Tiens, depuis le début du mois de juin, treize nouveaux collages ont fleuri entre la rue de Rome et le cours Lieutaud, autour de la boutique-galerie Il y a de l’eau sur Mars. Elle est comme ça, Gé. On lui propose une expo ? Pour fêter ça, elle repeint les murs du quartier.

Bon, génial ou pas, le street art, c’est illégal. « Mais ce n’est pas du vandalisme », nuance t-elle, pas plus inquiète que ça. Gé fait d’ailleurs ses collages en plein jour et assure n’avoir jamais eu

C’est en 2004 qu’elle fait ses premiers collages « sauvages ». Gé n’opérait pas seule mais en trio avec ses acolytes Pom et Joos. « Nous faisions ça par jeu, explique-t-elle. On repérait un super spot, et ça nous donnait des idées ! » Une vieille boulangerie fermée ? Pom, Gé et Joos la font revivre, collant sur son rideau baissé une peinture représentant un petit boulanger servant des croissants fraichement dessinés. Une banque ? Elle devient le théâtre d’un faux braquage dont les seules armes sont des pistolets à eau…

12

8e art magazine

été 2011

« Quand les gens voient un dessin sympa à la place d’un commerce fermé, ils nous remercient » d’ennui avec la police. Si la conception de ses peintures sur papier peut prendre une journée, cinq minutes suffisent pour les coller dans la rue. Ce qui réduit les risques. « Et puis ils s’enlèvent facilement. » Justement. Des 200 collages réalisés depuis 2004 ne subsisteraient aujourd’hui que cinq ou six « survivants ». Dont un « vestige » de la monumentale pieuvre du Monoprix Canebière. « Même si Marseille n’est pas une ville hyper propre, elle est nettoyée de temps en temps, analyse t-elle. Et les magasins ne restent pas fermés éternellement ». Quoique... Ici, les choses vont à leur rythme : les délirantes affiches de films imaginaires collées sur


VOIR Gé 8

Cinéma UGC Canebière, (Pom, Gé, Joos), novembre 2008 (nettoyé en janvier 2010)

le fronton du cinéma UGC Canebière sont restées en place plus de deux ans. Le temps que le chantier démarre… Le trio est longtemps resté anonyme. Si Pom et Joos tiennent à le rester, Gé est quant à elle bien obligée de sortir de l’ombre pour répondre aux sollicitations. Elle est en effet aujourd’hui graphiste et illustratrice. Et c’est grâce à Gé que Géraldine Petit a décroché ses premiers « contrats » : « Des gens voyaient mes collages dans la rue et voulaient me proposer du boulot. Mes peintures n’étant pas signées, il est difficile de me retrouver… Mais certains y sont parvenus par le bouche à oreille ! » C’est d’ailleurs comme ça que Julie Locher, la gérante de Il y a de l’eau sur Mars, a pu joindre Géraldine pour lui proposer d’exposer dans sa boutique-galerie. Depuis le 10 juin, les photos de ses collages urbains « disparus » sont visibles aux côtés de peintures sur bois, où l’on reconnaît ses personnages caractéristiques. Aujourd’hui, elle rêve de réaliser un livre pour enfants, « un abécédaire dans lequel mes dessins entreraient en résonnance avec le vrai paysage ». En attendant, elle collabore à la communication visuelle de quelques structures culturelles locales, réalise des illustrations pour la presse, des collages en décoration intérieure… Ce qui ne l’empêche pas de poursuivre ses travaux en « déco extérieure ». Seule, souvent. Avec Pom et Joos, parfois. n

.

Expo Jusqu’au 29 août Il y a de l’eau sur Mars - 14, boulevard Salvator - 13006 Marseille 04 91 41 10 37 www.deleausurmars.com - www.atelierdupetitbonhomme.com

Rue Lafon, juin 2011 (toujours visible)

été 2011

8e art magazine

13



pk page 8

3 grâces + 3 graphistes + 4 écolos =10 créatifs

On rappelle le concept : dix créatifs se succèdent sur scène. Chacun d’entre eux dispose de 6 minutes 40 pour présenter son projet, sa création ou son idée. Au programme de cette PKN # 16 : Pour l’apéro (19h-21h), les films artistiques de Videospread ainsi qu’une performance de la compagnie Eclectik’Art : le remix electro d’un opéra de Rameau avec piano, violon, DJ et duo de danseuses... Place ensuite aux dix créatifs de la PKN sélectionnés et présentés par la maîtresse de cérémonie, Sarah Carrière-Chardon (21h30-23h). On enchaîne ensuite jusqu’à 2h du mat’ avec la beach party de Virgo Music (DJ Paul et Did aux platines). Et bien sûr, quelques surprises, comme il se doit pour tout anniversaire…

ans ha Kucha Night fête ses quatre de Marseille. Le 25 juin, la Pec hue pêc s plu la rée soi ue la r Lévêq sic. Par Alexandre Programme chargé pou ch party electro avec Virgo Mu et squatte la plage pour une bea

Les 3 grâces Artisanat high-tech

Motif-Design : Fraîchement diplômée de l’ESBAM, Salomée Gentil conçoit des objets d’ameublement et d’aménagement d’espace, et crée un univers de formes imbriquées à combiner… Motif-Design, ou le crossover entre artisanat et recherche et innovation.

No cagole

Bird Song : Jeune styliste marseillaise, My-Linh Mary vient de monter sa propre marque, Bird Song. Ses collections « rétrobohèmes » se caractérisent par l’utilisation de matières naturelles raffinées. Des petites séries agrémentées de broderies simples et sans fioritures. Anti bling-bling.

Traqueuse d’instants

La brouillonneuse : Photographe autodidacte, Angélique Rollier nous entraine dans son monde poétique, féminin et disons le, assez rock ’n’ roll. Traqueuse d’instants insolites, elle mitraille ses copines à la plage, ses amis en soirée, et « brouillonne » les gens, les sensations, les ambiances… Faites gaffe ou vous serez son prochain sujet.

Pôle écolo Écolo philo

Wildproject : Fondée en 2008 par Baptiste Lanaspeze, cette maison d’édition indépendante se consacre à la « philosophie de l’écologie » et à « l’écologie culturelle ». Les prochaines publications seront consacrées aux écrits de Kinji Imanishi et J. Baird Callicott, textes fondamentaux de la pensée écolo.

Generation Upcycle

Troisième élément : Le recyclage ? À la poubelle, démodé. Désormais, on « upcycle », comprenez « recycle par le haut ». Voilà donc une nouvelle génération de designers qui conçoivent des produits design, esthétiques, aux belles lignes, à partir de matériaux recyclés ou détournés.

Végétation virtuelle

La Canopée : À la Rouvière, on rêve de ce vaste projet mêlant arts, culture et nature, porté par une équipe d’architectes et designers : La Canopée. Ici, les bureaux côtoieraient les espaces verts, les commerces seraient munis de surfaces d’exposition dédiées aux arts numériques... Une végétation virtuelle qui, peut-être, deviendra réalité.

Le sein c’est sain

Femmes d’ici et d’ailleurs : La rencontre entre un photographe, Michel Eisenlohr et un pédiatre, Patrick de Boisse. Ils nous parleront des bienfaits de l’allaitement maternel, des femmes d’ailleurs, celles du Burkina Faso, et puis des femmes d’ici. Le tout, en photo.

Graphisme Avé Seize arts

Galerie Seize : La galerie montante à Marseille revient sur un an de programmation. Design, peinture, graphisme, vidéo, wall drawing, paper design, installations combinant tout ça à la fois... Seize se veut à la pointe de la jeune création émergente. À la PKN, vous comprendrez pourquoi.

Chercheur d’images

Jérôme Bourgeix : Basé à Marseille, ce graphiste indépendant a roulé sa bosse d’Abu Dhabi à Sarajevo en passant par Lyon et Paris. Il présentera ses projets d’édition et nous parlera de ses recherches à mi-chemin entre photo et vidéo.

Photoshop Master

Sopra Vento : Chirurgien plastique de l’image et graphiste à Paris, Rodolphe Sellin aka. Sopra Vento vient du graffiti. Il nous amènera dans son univers acide constitué de collages et d’images photoshopées dans tous les sens. n

.

Pecha Kucha Night #16 Le 25 juin de (19h-2h) Entrée libre La Cabane du Roucas, plage Prado Nord - 13008 Marseille www.pechakuchanight.fr - www.virgomusic

été 2011

8e art magazine

15


Interview 9 MP2013

Jean-François Chougnet

« J’ai une obligation de résultat » Le 18 avril, Bernard Latarjet quittait officiellement ses fonctions de directeur général de MarseilleProvence 2013. Jean-François Chougnet lui a succédé dans la foulée. Nous l’avons rencontré. Par Sandro Piscopo-Reguieg - Photo : Joël Assuied

La nouvelle est tombée dans la soirée du dimanche 20 mars : « Latarjet jette l’éponge », pouvait-on lire sur le site internet de Libération. Coup de tonnerre. Observateurs, opérateurs culturels, membres du conseil d’administration de MP 2013 : pour tous, la surprise est totale. Sonnée, l’association réagit le lendemain. Dans l’urgence. Un communiqué intitulé « MP 2013 renforce sa direction générale » (on notera le glissement sémantique) confirme le retrait de Bernard Latarjet, mais pas son départ. Il devient conseiller du nouveau directeur général qu’il a lui-même choisi : un certain M. Chougnet… Les élus du territoire sont à ce titre membres du conseil d’administration de l’association Marseille-Provence 2013, structure pilote du projet. En cas d’évolution de l’organigramme de MP 2013, ils doivent être les premiers informés. Ils n’ont donc pas du tout apprécié d’apprendre la nouvelle par la presse. « Le protocole n’a pas été respecté, admet-on du côté de MP 2013. Nous aurions dû prévenir les élus mais nous avons été grillés par une fuite venue de Paris. » Le mal est fait. Les élus sont vexés, et

16

8e art magazine

été 2011

le bal des déclarations assassines commence. Alors que Maryse Joissains-Masini, la bouillante député-maire (UMP) d’Aix-enProvence, exprimait maladroitement ses réserves sur le nom de Jean-François Chougnet : « Vous le connaissez vous, monsieur Choin ? »* ; le président (PS) du conseil général, Jean-Noël Guérini, se faisait menaçant : « Je risque de prendre des décisions importantes... » Des petites phrases qui au final font pschitt. En effet, les élus se réunissaient le 18 avril à la CCI pour un conseil d’administration extraordinaire. Jean-François Chougnet fut officiellement nommé directeur général de l’association MarseilleProvence 2013 sur proposition de Bernard Latarjet. Ce dernier fut désigné « conseiller du président et du directeur général ». Durant quatre ans et demi, Latarjet était parvenu, tant bien que mal, à faire face aux critiques et aux difficultés. Si bien que nul n’imaginait plus voir le grand architecte de 2013 se retirer. « Depuis quelques mois il souhaitait prendre du recul », explique t-on toutefois chez MP 2013 où l’on évoque une certaine « fatigue » de l’ancien directeur général : « Il y a une centaine de manifestations à produire, détaille Michel Cerdan, directeur de la communication. À bientôt 70 ans, Bernard Latarjet ne peut plus crapahuter à droite et à gauche ! » Jean-François Chougnet, 54 ans, pourra assumer ce rôle. Gage de « continuité et de compatibilité », les deux hommes se connaissent bien. Ils ont travaillé ensemble durant six ans à la direction du parc de la Villette (2001-2006). Commissaire général de l’année du Brésil en France en 2005, Chougnet fut par la suite directeur du musée Berardo de Lisbonne. Poste qu’il vient de quitter pour rejoindre Marseille. Le 30 mai, il nous recevait à la Maison diamantée. Pour un entretien en toute décontraction… * La Provence du 23 mars 2011


Comment avez-vous vécu votre arrivée, dans un contexte pour le moins agité ? Je n’ai jamais été mis en cause personnellement. Seulement, il y a eu un petit malentendu en termes de calendrier. Comme tout le monde, j’ai lu la manière dont certains élus ont réagi. Il y a eu, en effet, une certaine vivacité dans les comportements. Maintenant, ce qui compte, c’est le travail que nous allons construire ensemble. Je n’ai aucune raison d’en vouloir à qui que ce soit. Nous n’allons pas ressasser ça pendant des années… On n’a pas le temps ! Vous avez rencontré les élus ? C’est la moindre des choses ! Quand on est amené à diriger une association dont le conseil d’administration est composé d’élus, cela ne me paraît pas illégitime. Bon, il est vrai que « Les gens ne j’aurais préféré les rencontrer avant se lèvent pas ma nomination, plutôt qu’après… tous les matins Quand vous a-t-on proposé en pensant à de devenir directeur général de 2013 ! » MP 2013 ? Au début de l’année 2011. Cela s’est fait en très peu de temps. Je ne sais pas quand Bernard Latarjet a décidé de prendre un peu plus de recul, je ne lui ai d’ailleurs jamais posé la question. Il m’en a parlé au mois de février. J’étais très surpris. Avez-vous hésité ? Quand on a une belle proposition, on en mesure les risques et les avantages. Mais je réagis toujours très vite quand on me propose quelque chose de très intéressant !

Comment coordonnez-vous votre action avec M. Latarjet, devenu « conseiller » ? La coordination est facilitée par le fait que nous avons travaillé ensemble pendant six ans à La Villette. Cela permet de gagner du temps ! Nous essayons d’être complémentaires. Bernard Latarjet passe la moitié de la semaine à Paris car il doit y assumer des rendez-vous. Làbas, il représente MP 2013. Et je crois qu’il est légitime dans ce rôle, personne n’oserait le contester ! Nous avons un principe en commun, c’est de ne pas doublonner pour le plaisir de doublonner. Les interlocuteurs qui ont l’habitude de rencontrer Bernard Latarjet continuent et continueront de le faire. Il a aussi ses sujets de prédilection : il a mis énormément d’énergie dans le montage de grandes expositions comme Navigateurs en Méditerranée, qui ouvrira la saison au J1. Il est donc bien placé pour continuer d’en enrichir le contenu. Aussi, il est beaucoup plus compétent que moi en matière de cinéma, de photo… Moi, je suis plutôt dans la galaxie spectacle vivant, littérature, arts plastiques… Nous avons chacun nos affinités. C’est donc globalement un travail d’équipe. Quel est votre rôle exact ? J’ai une obligation de résultat. Plus qu’une obligation de moyens ! Une obligation de résultat, ça veut dire une obligation de coordination. L’association est faite d’une équipe de chargés et de directeurs de projets qui sont sur le terrain de la programmation et de la production. Chacun détient sa petite part de vérité. La direction générale a donc une tâche très clairement définie qui consiste à

9 été 2011

8e art magazine

17


Interview 9 MP2013

Portrait culturel

Si vous étiez…

Un livre ? En ce moment, je lis Les oncles de Sicile de Lonardo Sciascia. Un film ? Les Mystères de Lisbonne de Raoul Ruiz. Une œuvre d’art ? L’une des dernières expositions qui m’ait passionné : Jean-Michel Othoniel à Beaubourg. Une pièce de théâtre ? Je viens d’assister à Singularités Ordinaires du GdRA, au Merlan. Un magnifique travail. Un CD ? J’adore le fado ! Alors je citerai le dernier album de Carlos Do Carmo. Un bâtiment ? La nouvelle Cité de la Culture à Saint-Jacques-de-Compostelle.

faire avancer tout ce monde ensemble. Ça, c’est pour l’interne. En externe, c’est un projet gigantesque en termes d’ambitions, mais aussi en termes de champ géographique. Là aussi, il faut parvenir à faire travailler ensemble toutes ces collectivités. Ce qui représente une partie importante de notre temps !

genre : « On ne compte pas sur eux ! » Je n’ai pas entendu cela. De toute façon, un projet comme celui-ci aura toujours ses ennemis. Bernard Latarjet disait d’ailleurs que MP 2013 était « une machine à faire des mécontents » ! Il exagérait un peu, mais il est vrai que ce n’est pas une machine à ne faire que des heureux.

Le climat général est au scepticisme, voire à la défiance, à l’égard de MP 2013. Comment relancer l’enthousiasme ? La balle est dans notre camp ! Nous avons eu une phase nécessaire à l’incubation des projets qui s’est sans doute traduite par une sorte d’isolement… Mais je crois aussi qu’il y a des cycles. Le délai des capitales européennes de la culture est trop court pour faire une restructuration urbaine en profondeur, mais trop long pour faire de la programmation culturelle. L’enthousiasme est donc naturellement retombé. Cela dit, je rencontre beaucoup de gens. Certains sont grognons, certains « Nous ne estiment qu’on ne leur donne pas sommes pas assez d’argent, d’autres qu’on ne en avance... » leur répond pas assez vite… En revanche, on ne peut pas dire que chez eux, l’enthousiasme n’existe pas. En même temps, la posture critique est toujours plus facile à tenir. Les professionnels de la culture aiment bien montrer leur indépendance. Ils disent rarement : « C’est formidable ! » Je préfère voir le côté positif. S’il n’y avait rien à attendre de nous, il n’y aurait pas de critiques, mais du dédain et du mépris du

Selon vous, qu’en pense le grand public ? Il est assez vierge sur le sujet. Au début, il a été fier, content, incrédule… Aujourd’hui, il n’est pas forcément sceptique. Les gens ne se lèvent pas tous les matins en pensant à 2013 !

18

8e art magazine

été 2011

Dans les médias, on parle rarement de MP 2013 en termes positifs. La presse a par exemple beaucoup plus évoqué le retrait de Latarjet que les grands projets de l’année capitale dévoilés le 24 février… Les deux se sont un peu télescopés, c’est vrai. Mais le contenu de la conférence de presse du 24 février est toujours là. À nous maintenant de savoir réexpliquer, projet par projet. Avant qu’un événement ait lieu, dans le secteur culturel comme ailleurs, la presse est beaucoup plus concentrée sur le « making of » que sur le contenu. C’est normal. Les journalistes font un travail d’analyse, ils décrivent comment les choses se préparent. Ils ne vont pas parler en détail d’un projet qui aura lieu dans deux ans. Mais le public sait faire la part des choses. Je ne crois pas que les soubresauts du montage d’un projet altèrent la confiance et l’espoir que les gens peuvent avoir. MP 2013, c’est un événement pour tous. Il y a des éléments


interview mp2013 8

fondamentaux qui ont été mis en œuvre par Bernard Latarjet et son équipe dans le dossier de candidature. C’est pour ça qu’ils ont gagné ! Quels sont ces « éléments fondamentaux » ? Il n’y a pas d’un côté un projet populaire pour la base, et de l’autre, des événements de prestige pour se faire bien voir à l’échelle nationale. Il y a un seul projet. MP 2013, c’est tout pour tout le monde. Je trouve ça exaltant. Mais rassembler, c’est faire des concessions… Je ne crois pas. Je fais partie d’une génération archaïque qui pense qu’il n’y a pas une « culture pour tous » et une « culture pour chacun », pour reprendre une récente polémique ! Je crois qu’il y a du bon et du mauvais. Mais ça, on ne le sait qu’après ! Une capitale culturelle, ce n’est pas seulement de la production d’événements. C’est aussi un projet de diffusion. Nous voulons être ouverts au plus grand nombre, à l’intérieur comme à l’extérieur… Il faut réfléchir à la manière dont les gens peuvent participer, directement comme indirectement. À ce titre, vous misez beaucoup sur les ateliers de l’EuroMéditerranée, ainsi que sur les « actions de participation citoyenne »… Les actions de participation citoyenne, c’est un vaste ensemble de programmes qui consiste à faire de la culture de haut niveau dans les quartiers. Avec les écoles, les associations, et tous les secteurs qui sont en contact direct avec la population. Les ateliers de l’EuroMéditerranée vont « Si je disais “venez dans le même sens. Il s’agit de donc, tout le monde faire venir l’artiste au cœur de aura sa piécette”, ça l’entreprise ou de l’institution. serait ridicule et de Il y a aussi « les nouveaux mauvais goût » commanditaires », qui consiste à rendre les citoyens actifs dans la commande artistique… Je crois beaucoup à ces dispositifs. Ils permettent, entre autres, de montrer concrètement que la Capitale n’est pas un feu d’artifice qui s’allume et qui s’éteint très vite. Une politique culturelle peut s’effectuer avec des processus. Pas seulement avec des projets « offerts », que le public prend ou ne prend pas. C’est une idée qui n’est pas si évidente que ça, ni dans la plupart des festivals, ni dans les politiques culturelles existantes. Et ces dispositifs ne sont pas anecdotiques : il y a quand même 100 ateliers de l’EuroMéditerranée ! Je crois beaucoup à cela, au delà même de MP 2013. Les opérateurs culturels jugent le calendrier trop tardif. Dans l’attente de la labellisation, ils n’auraient pas le temps de pouvoir organiser des événements ambitieux pour 2013… Je suis d’accord, nous ne sommes pas en avance. Il aurait été plus confortable pour eux d’avoir des informations plus détaillées, plus chiffrées, quatre ou cinq mois plus tôt. Nous allons donc présenter au conseil d’administration du 9 juin (interview réalisée le 30 mai, ndlr) une série de « mandats de négociation » à l’attention de ces opérateurs culturels. En français dans le texte, ça veut dire que nous

allons mettre à profit la période estivale pour bâtir des partenariats avec ces grands opérateurs (festivals, musées, etc.). Nous aurons ainsi l’ossature de la programmation de 2013. C’est notre feuille de route. Et les petits ? La labellisation, ils n’y croient plus… Répondre globalement n’aurait aucun sens. Si je disais « venez donc, tout le monde aura sa piécette », ça serait ridicule et de mauvais goût. Je voudrais revenir sur un certain nombre de choses qui ont été dites - et peut-être pas entendues complètement - lors du lancement de l’appel à projets. Les projets les plus recevables sont ceux qui ont tendance à se fédérer. Je sais bien que les temps sont durs, mais nous ne sommes pas un nouveau guichet de subventions. 2013 a pour but de faire des événements différents d’une programmation culturelle habituelle. Les « petits » projets ont donc vocation à se fédérer autour des temps forts. En 2013, il y aura par exemple un moment destiné au jeune public. Je n’ai pas fait le compte dans l’appel à projets, mais ça concerne, je crois, une centaine de propositions ! C’est l’une des thématiques, et il y en aura d’autres : le GR 13, Métamorphoses, Transhumances… L’idée, c’est « fédérez-vous ! » Vous avez surpris tout le monde par votre présence au match de foot organisé par Marseille 2013 Off… C’était d’ailleurs votre première apparition « publique » ! Ce n’était pas calculé ! Je ne vois rien d’antipathique dans leur initiative, au contraire. Je n’y vois que des bons côtés. Je me suis donc dit « prenons le bâton de pèlerin, essayons de trouver l’endroit et allons-y ! » J’ai eu l’occasion de rencontrer les organisateurs après le match. Le Off, c’est une initiative qui d’abord, n’est pas hostile. Aussi, je la juge intelligente et talentueuse dans la manière de ne pas trop se prendre au sérieux… Et j’aime bien ça ! Quelles seront les prochaines échéances avant 2013 ? Nous avons cette feuille de route estivale avec les partenaires culturels. Il y a aussi le passage de la partie programmation (qui ne va pas s’arrêter mais qui deviendra moins centrale dans l’activité de l’association) à une logique de production d’événements. Je pense à des choses concrètes comme les fêtes d’ouvertures (la première de l’année mais aussi celles des différentes saisons) ; ainsi que les principaux projets comme Transhumances, La Folle histoire des arts de la rue, Métamorphoses, les grandes expositions… Notre année 2011, jusqu’au mois de novembre, sera consacrée à la concrétisation organisationnelle de ces projets. C’est la priorité des priorités. L’annonce de l’avant-programme sera effectuée en décembre 2011 ou janvier 2012. Le but étant d’avoir un programme détaillé au mois de juin 2012. Enfin, le coup d’envoi de l’année Capitale devrait être donné le 12 janvier 2013… Pour pouvoir passer la nuit du 13 ensemble… C’est un beau chiffre ! Si le 13 ne porte pas bonheur à Marseille, on est très mal ! n

été 2011

8e art magazine

19



MP2013 DOCU 8

Envoyé spécial à la Maison diamantée

Au début de l’été 2011, 500 projets seront officiellement déclarés « non retenus » par MP 2013. Dans cette perspective, ce film est particulièrement instructif. Au fur et à mesure que l’équipe se constitue, on progresse avec elle dans sa réflexion sur la façon de trier les 2 200 propositions reçues par l’association dans le cadre de son appel à projets. Doit-on relire systématiquement les projets rejetés ? Comment se résoudre à les éliminer ? Tout est mûrement discuté. La tâche est immense. Si bien que l’on comprend aujourd’hui pourquoi l’association a pris un tel retard…

Le 21 mai, France 3 diffusait le premier volet d’une trilogie documentaire consacrée à Marseille-Provence 2013. Une immersion totale dans les coulisses de la Maison diamantée... Instructif. Par SPR

« Je voudrais insister auprès de vous sur le retard et les très lourdes contraintes de temps qui sont désormais les nôtres. Les semaines défilent et nous ne sommes pas en avance. Nous sommes même carrément en retard sur certains projets. (…) On annonce le Grand atelier du midi et trois mois après, on découvre qu’on a des impossibilités pour négocier les prêts et les accords avec les grands musées internationaux, c’est la catastrophe ! Y a-t-il des observations ? » Le rappel à l’ordre est signé Bernard Latarjet. Dans l’assistance, l’équipe de MP 2013 fait la moue. Nous sommes à la rentrée 2010. Le temps presse, la pression monte… Une scène piochée dans l’excellent documentaire réalisé par Shu Aiello (pour Tita Productions), et diffusé le samedi 21 mai (15h) sur France 3. Intitulé Marseille, Capitale européenne, Acte I, il nous invite à suivre le quotidien de l’équipe de MP 2013. « Je voulais savoir qu’est ce qu’une capitale européenne de la culture ? Comment la fabrique t-on ? Avec qui ?, Un documentaire explique la réalisatrice. Pour donner nous invite à suivre le des éléments de réponse, il fallait quotidien de l’équipe aller au cœur du dispositif, être dans l’équipe, la voir se constituer, hésiter, de MP 2013 recevoir les critiques et y résister… Ce fut passionnant. » Elle précise : « Ce n’est pas un projet MP 2013, on ne voulait en aucun cas qu’ils participent financièrement au film. » Enfin, dans le montage final, « rien n’a été censuré et personne n’est venu nous voir pour cela ». C’est dit. Le film s’ouvre sur l’aménagement, en mai 2010, de l’équipe dans les locaux de la Maison diamantée et se conclut sur l’annonce du « changement de poste » de Bernard Latarjet en mars 2011. Entre temps, les petites scénettes s’enchaînent, entre réunions techniques, apartés et conciliabules. Le tout autour de trois « personnages principaux » : l’allemand Ulrich Fuchs (directeur adjoint), Michel Cerdan (directeur de la communication) et surtout, Bernard Latarjet. Il apparaît ici en vrai leader, tour à tour prévenant, quand il veille à la cohésion de son équipe, tranchant (voir l’exemple ci-dessus), et même capable d’humour (si, si). Shu Aiello nous avoue d’ailleurs s’être attachée au personnage, « un homme éminemment respectable ».

« On a beaucoup rigolé », assure Michel Cerdan après la diffusion du film. Sceptique sur l’idée de départ (« Qui ça peut intéresser de voir des gens en réunion ? »), il loue « la qualité du document », malgré quelques réserves. « On ne le voit pas dans le film, mais au final, chaque projet non retenu a été systématiquement relu trois fois », tient-il absolument à préciser. Chez MP 2013, les retours sont globalement positifs. Chez France 3 aussi. Tita Prod négocie donc le tournage de deux suites, qui devraient nous amener jusqu’en 2013. n

Morceau choisi

« Un spectacle à la Timone, c’est pea nuts ! » 8 juillet 2010, un

« séminaire de travail » de l’équipe de direction :

Jacques Pfister (président de la CCI et de MP 2013) : « Nous avons besoin de savoir ce qui va être mont ré, ne serait-ce que pour commencer à parler à nos agences de voyag e, à nos politiques… (…) On a besoin que ça fasse rêver. » Ulrich Fuchs (directeur général adjoint de MP 2013) : « Il y a encore trois ans à venir… Ça veut dire trois fois les vacances d’été, trois fois l’anniversaire des enfants, le Mond ial, l’Euro… C’est très difficile de nous demander ’’faites-nous rêver ’’. Il faut nous protéger, nous laisser travailler en toute tranquillité. Car les médias attendent cet événement en disant ’’ça va être un échec’’. » Pfister : « On est déjà pas mal à ce nivea u là ! (…) Ce territoire a passé son temps à ne rien faire, en termes de projets conquérants, innovateurs… Mais il y a du public, il y a des clients, il y a des consommateurs, des politiques ; qui ne sont pas intéressés - d’une certaine manière - par le niveau culturel que vous allez mettre, mais plutôt par le monde que ça va faire boug er, les médias, les investisseurs que ça va faire venir, etc. Ceuxlà vont nous mettre de plus en plus la pression. » Bernard Latarjet (directeur général de MP 2013) : « Ce n’est pas la fréquentation touristique, ce n’est pas le nombre de bocks de bières vendus, ce n’est pas le nombre de nuits d’hôt el ! (…) C’est : ’’Qu’est ce qui reste après la capitale ? Qu’est ce qui dure ? Est-ce que les gens sont fiers ?’’ » Pfister : « Si j’ai un spectacle formidable dans les locaux de l’hôpital de la Timone, moi franchement, pour la notor iété de la capitale de la culture, c’est peanuts ! Alors que si je mets 200 000 Marseillais sur le Vieux-Port, je fais un survol en hélicoptère et on va en parler pendant deux mois ! » Latarjet : « Depuis le début, je dis qu’il faut arriver à concilier cette dimension populaire - les 200 000 personnes, l’hélicoptère et les parachutistes - avec la qualité exemplaire de l’atelier artistique à la Timone. Il faut les deux ! »

été 2011

8e art magazine

21


Marseille 2013 Off Le premier Off de l’histoire des capitales européennes de la culture sera forcément marseillais. Amateurs ou professionnels, tous les créatifs du coin sont appelés à participer. Un projet initié par Eric Pringels et son association M2K13. Il nous donne le mode d’emploi. Par Alexandre Lévêque

Qui êtes-vous ? Marseille2013.com a été créé en 2004 par Martin Carrese, Antonin Doussot et moi-même. Nous sommes trois artistes marseillais et nous avions parié que Marseille serait capitale européenne de la culture en 2013. Depuis, nous avons été rejoints par d’autres personnes qui sont venues apporter leurs compétences et leurs passions. Pourquoi organisez-vous ce Off de la capitale européenne de la culture ? Nous souhaitons replacer l’artiste au centre de l’événement. L’équipe de Marseille-Provence 2013 poursuit manifestement d’autres objectifs, plus économiques et

22

8e art magazine

été 2011

touristiques. Nous ne sommes pas en opposition avec eux. Nous sommes juste différents. Dans cette perspective, le Off de Marseille 2013 sera une première dans l’histoire des capitales européennes de la culture ! Comment préparez-vous ce off ? Nous avons lancé un appel à projet aux artistes, voici trois mois. Nous avons déjà reçu une trentaine de propositions dont les premières ont été publiées sur notre site marseille2013.com. Nous ne pouvons pas aller plus vite car jusqu’à présent, nous sommes tous bénévoles. Le Off, pour nous, c’est donc notre troisième journée (après le travail et la famille). Comment aidez-vous les artistes ? Nous publions leur projet sur notre site, ce qui leur donne déjà une visibilité. Ensuite, si l’artiste le désire, nous le mettons en contact avec le site kisskissbankbank.com (KKBB), notre partenaire financier, pour organiser sa levée de fonds. KKBB fonctionne comme MyMajorCompany : il aide les artistes à réaliser des micro levées de fonds (de l’ordre de 5 000 euros) pour réaliser un projet. Comment cela fonctionne ? L’artiste travaille avec KKBB pour produire du texte, des visuels et tout autre matériel permettant de faire connaître


fou Marseille 2013 OFF 8

son projet. Il a ensuite 90 jours pour motiver son cercle intime puis les amis des amis des amis, pour les inciter à miser sur son projet. Chaque versement donne droit à une contrepartie que l’artiste s’engage à donner à ses financeurs. Si au bout de 90 jours la somme est atteinte, l’argent est versé à l’artiste. Si la somme n’est pas atteinte, rien n’est débité des comptes des donateurs. Que faites-vous pour aider l’artiste pour sa levée de fonds ? Nous donnons un maximum de visibilité au projet sur notre site (dont la fréquentation a doublé), sur nos réseaux sociaux (qui sont en plein boom), et nous proposons également à nos partenaires de le valoriser. Bref, nous mettons toute notre machine en action pour soutenir la levée de fonds. Mais celle-ci est avant tout réalisée par l’artiste.

« Nous ne sommes pas en opposition avec MP 2013. Nous sommes juste différents » Et ça marche ? En France, KKBB constate que 30 % des levées de fonds se concrétisent. Mais ils n’avaient jamais travaillé dans une configuration où l’artiste était soutenu par une équipe et porté par un projet placé sous les feux des projecteurs. Nous comptons bien faire exploser le taux de réussite. Comment comptez-vous vous développer ? À partir de la rentrée 2011, nous allons organiser des séances de présentation des levées de fonds aux artistes présents sur notre site pour les inciter à se lancer. Nous espérons qu’un maximum d’entre eux se lancera et nous les soutiendrons. Notamment en organisant de nouvelles manifestations à Marseille. Pendant ce temps, une autre partie de l’équipe recherche des financements et surtout, un lieu dans le centre-ville de Marseille où nous pourrons installer nos bureaux, un shop et un espace d’expo. L’idée, c’est qu’en 2013 nous puissions programmer les artistes dans ce lieu. Mais nous souhaitons aussi trouver d’autres lieux partenaires. À quoi ressemblera votre 2013 à vous ? Ce qui nous intéresse, ce n’est pas la Méditerranée (on peut aller s’y baigner, c’est déjà pas mal), mais les paradoxes de la ville. Ville cosmopolite mais esprit villageois, ville urbaine mais verte, ville portuaire mais tournée vers l’intérieur, ville morte la nuit mais prochaine capitale européenne de la culture, ville qui désigne des élus mais qui est gouvernée par d’autres, ville de chaos urbain mais qui tend à la normalisation, ville incontrôlable mais prévisible, ville monde mais qui ne pense qu’à Paris, ville raciste mais solidaire, ville repoussante mais attachante… Marseille nous séduit et nous révulse par ses multiples paradoxes. C’est ce qui fait sa particularité. Mais c’est souvent ce qui ne plait pas aux pouvoirs qui voudraient bien que Marseille ressemble à une autre ville. Nous, c’est comme cela qu’elle nous plait. En 2013, tous les artistes du Off viendront offrir leur vision de ces paradoxes aux visiteurs. n www.marseille2013.com

Projet

Le festival international du film chiant Bon, on a déjà le FID… Mais le festival international du film chiant, ça sera bien pire ! Le FIFC est le premier projet du Off à faire l’objet d’une levée de fonds. Objectif : 3 999 euros. Donnez ! Pour Emmanuel Germond, un festival international du film chiant aurait la vertu « d’inciter le public à tenter une nouvelle expérience à travers des films qui prennent le temps ». Le temps de regarder, de sentir, de s’approcher, de scotcher, de bailler… En 2013, la première édition de son festival serait resserrée, pour sa programmation principale, autour de quatre « sublimes films » de Todd Solondz, Sharunas Bartas et Bela Tarr. Ennui mortel garanti. Le FIFC s’éterniserait sur toute une semaine aux cinémas Les Variétés et César (spécialistes en matière de films chiants). Mais les plus vaillants se laisseront tenter par le pack « chiant intégral » qui permet d’assister à des projections et événements dans plusieurs lieux (Vidéodrome, Daki Ling, L’Embobineuse, Polygone, Montévidéo). Pour « la nuit la plus chiante » de clôture, on agonisera devant le redoutable documentaire chinois À l’ouest des rails, d’une durée de… neuf heures. Le cinéma Les Variétés fournira bien sûr couvertures, oreillers et petits déjeuners. Aussi, avec le FIFC, il est permis de partager son ennui. Les spectateurs seraient donc invités à proposer des films chiants pour l’édition suivante, et même se pointer avec leurs films sous le bras avant une projection pour une séance improvisée. Enfin, Emmanuel Germond réfléchit à un « prix du film le plus chiant » à l’attention des créateurs locaux. Ils pourraient peut-être même bénéficier d’un accompagnement pour parvenir à réaliser un premier (trop) long métrage.

Pour soutenir le festival international du film chiant, participez à sa levée de fonds sur :

www.kisskissbankbank.com/projects/festivalinternational-du-film-chiant-fific

été 2011

8e art magazine

23


LC4 de Le Corbusier, Jeanneret, Perriand et Cassina. by Le Corbusier, Jeanneret, Perriand and Cassina. Design first. Le design d’abord.

www.cassina.com NOPOLIS Km 38 Cairo – Alex Desert Road – Egypt Tel. +2 02 385 71 779 fgdesigncenter-eg.com www.lccollection.cassina.com Ameublement

décoration

17 3 , r u e Pa r a d i s - 13 0 0 6 M a r s e i l l e • T é l . 0 4 91 37 6 8 2 5 • FA X 0 4 91 5 3 2 0 00 23-11-2010

0x300.indd 1

www.danand.com

9:19:1


fou Deux fois oui 8

Caroline Hanny

&

Olgajeanne

Un mariage créatif

L’une est rousse, l’autre brune. Toutes les deux sont créatrices… Et un peu barrées. Le 29 juin, Caroline Hanny et Olgajeanne se diront « Deux fois oui » à la galerie Saffir. Tenue de cérémonie obligatoire. Par Marianne Van Willigen

Les yeux dans les yeux En février, elles échangeaient leurs regards. Le 29 juin, elles se diront « Deux fois oui ».

9 été 2011

8e art magazine

25


fou 9 deux fois oui

Deux fois oui Et hop, vous êtes invités. N’ayez pas peur d’être plus belles que les mariées…

Ça commence par un coup de foudre. C’était à l’hiver 2010, à la galerie Saffir. Olgajeanne, la brune, croise le regard de Caroline Hanny, la rousse. Elles ne se quitteront plus. « Je connaissais déjà son travail, avoue Olgajeanne à propos de celle qui deviendra sa complice. J’appréciais ses photos, son univers… Elle était la seule artiste dont je me sente proche, à Marseille. » Créatrice protéiforme, Caroline Hanny s’est en effet déjà fait un nom. Artisan d’art, photographe, poète, la jeune femme est reconnue pour ses créations oscillant entre mode et art contemporain. De quoi faire naître le désir chez Olgajeanne, elle-même styliste et designer textile. Elle a su se rapprocher de Caroline, se faire remarquer. Si bien que la rousse découvre les broderies, bijoux et autres délicats accessoires de la brune. « Le travail d’Olgajeanne n’a rien à envier à celui des créateurs parisiens les plus pointus, affirme-t-elle. Avec une personnalité aussi marquée, ce n’est pas étonnant ! »

Échangisme On l’aura compris, leur admiration respective devient rapidement flirt… Un flirt créatif. « Nous voulions faire quelque chose ensemble. Mais dans un cadre plutôt intimiste », se souvient Olgajeanne. Elle était alors un peu timide. Vierge d’expériences artistiques en duo. Alors pour sa première fois, elle a voulu y aller doucement. Ça s’est passé dans l’atelier de Caroline, un mardi de février. « Nous avons organisé une petite expo-vente privée, ’’Two girls, Chassé Croisé’’, raconte Olgajeanne. Je n’avais pas l’habitude de montrer mon travail, mais j’ai vendu la moitié de mes pièces et reçu énormément d’encouragements. » Un atelier-photo « échangiste » complétait l’événement : « Nous invitions des binômes de filles à venir se faire photographier, et nous échangions leurs yeux sur les portraits ! »

26

8e art magazine

été 2011

Du flirt au mariage Caroline Hanny et Olgajeanne échangent leurs regards, leurs idées, leurs envies. Leur passion se nourrit d’une émulation créative ; et les deux jeunes femmes décident d’officialiser leur union. Le 29 juin, elles célèbreront leur « mariage créatif » en public, à la galerie Saffir, le lieu de leur rencontre. Elles se diront Deux fois oui lors d’un événement décalé associant performance et expo. « Nous allons envoyer de vrais faire-part », indique Olgajeanne. Qu’on se le dise, « les invités devront venir en tenue de cérémonie, comme si ils allaient à un vrai mariage ! » Caroline surenchérit : « Beaucoup de filles se plaignent de ne pouvoir s’habiller à Marseille. Ce soir, elles pourront se lâcher, sans être prises aux sérieux ! N’ayez pas peur d’être plus belles que les mariées ! » D’autant plus qu’il faudra faire bonne figure sur l’inévitable photo de groupe qui suivra l’entrée de ces mariées délirantes dans la galerie. « L’une aura une robe très simple, l’autre une robe très sophistiquée, décrit Caroline. Elles seront composées d’éléments détachables… On pourra donc les échanger, comme on s’échange les consentements. Car les mariés n’ont jamais la même vision des consentements, même s’ils disent tous les deux ’’oui’’ ! »

Des surprises croustillantes Durant ces réjouissances, entre « dragées et limonade », on pourra découvrir quelques objets insolites imaginés par le duo. « Cinq pièces autour du oui, autour du mariage dont nous allons


fou Deux fois oui 8

« Nous allons détourner les attributs traditionnels du mariage comme le voile, la jarretière ou le drap blanc »

détourner les attributs traditionnels, comme le voile de la mariée, la jarretière ou le drap blanc. » On verra par exemple un coussin d’alliance grand format qui « au lieu de réunir les alliances, réunit les corps ». Intéressant… « Il y aura d’autres surprises très croustillantes ! », promet Caroline. Enfin, une vidéo présentera sa nouvelle collection de robes de mariées. Plutôt iconoclaste. « Se marier n’a plus rien d’exceptionnel, explique la créatrice. Ça ne change pas la vie, on continue d’aller chercher son pain, de faire la vaisselle… » Tiens, tiens… Elle pense déjà au divorce ? n

La mariée était en noir L’une des robes de la nouvelle collection de Caroline Hanny. « Pour celles qui veulent se marier, tout en sortant des clichés. » Et les invités ? Ils seront en blanc ?

.

deux fois oui Performance le 29 juin à 20h Expo jusqu’au 2 juillet Saffir, galerie nomade - 32, rue Saint Jacques - 13006 Marseille 06 03 40 76 92 www.saffirgalerienomade.com www.carolinehanny.com - olgajeanne.ultra-book.com

été 2011

8e art magazine

27



sortir plein air de culture 8

Faites le plein (air) de culture !

Cinéma et concerts au théâtre Silvain, bibliothèques de plages, musiques dans la rue… L’été, l’art prend l’air, et on fait le plein de culture !

© FID

© FID

Par Bertrand Ors

9 été 2011

8e art magazine

29


Ciné plein air

Le ciné fait tilt ! © FID

Écrans et bobines se promènent dans la ville pour une vingtaine de projections. Ça commence à la tombée de la nuit… Et c’est gratuit.

Théâtre Silvain

intermittent du spectacle Musique classique, concerts acoustiques et cinéma (souvent « muet ») seront les seules formes tolérées par les riverains du théâtre Silvain, particulièrement vigilants sur les « nuisances » potentielles que peut entrainer la réouverture de ce superbe amphithéâtre de plein air. Situé sur la Corniche, au-dessus de l’anse de la Fausse-Monnaie, il a été inauguré le 14 juillet 1923 grâce à l’action d’Eugène Silvain et de sa femme Madeleine, tous deux sociétaires de la Comédie-Française. Ses exceptionnelles qualités acoustiques ont fait sa réputation. Seulement, elles gênaient le voisinage. Les Marseillais n’ont donc pu en profiter longtemps. À l’abandon malgré sa rénovation en 1999, le théâtre Silvain ouvre ses portes épisodiquement en été. Mais depuis 2009, la mairie du 1er secteur insiste. Elle voudrait faire renaître le bel écrin et en faire un lieu phare en 2013. Du coup, c’est une vraie « saison estivale » qui nous est proposée cette année. Même si la programmation reste « concertée » avec le voisinage. Entendez par là que théâtre, danse, opéra, et musiques amplifiées sont systématiquement bannis.

Place du refuge (Le Panier)

Cet été au Silvain © FID

Les spectacles débuteront à la tombée de la nuit (Quand les prix ne sont pas indiqués, c’est gratuit). Au programme : un ciné concert en partenariat avec le FID (Le Cameraman, de Buster Keaton, le 8 juillet) ; un solo de l’accordéoniste Richard Galliano (le 11 juillet, 15-20 euros) ; la retransmission sur écran géant en direct du festival d’Aixen-Provence de l’opéra La Traviata (le 16 juillet), un concert de l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée (le 27 juillet), une « nuit de la guitare » avec le virtuose Biréli Lagrène (le 4 août, 10-20 euros) et un concert du prodige du violon Ivry Gitlis (le 10 août, 10 euros). Sans oublier les films proposés par l’association Tilt (Séraphine le 4 juillet, Volver le 18 et Se souvenir des belles choses, le 25). 04 91 31 40 17 - www.capsur2013.fr

30

8e art magazine

été 2011

30 juin : La Parade (Notre histoire) - Palais Longchamp 2 juillet : Nanny Mc Phee et le Big Bang - Centre social Bois Lemaître 5 juillet : Million Dollar Baby - Place Cadenat (Belle de Mai) 15 juillet : Alice au pays des merveilles - Place du refuge (Le Panier) 16 juillet : Welcome - Place du refuge (Le Panier) 20 juillet : Princesse Mononoke - Jardin Guy Azais (La Capelette) 21 juillet : Madagascar 2 - Parc de font obscure (Mairie 13/14) 22 juillet : Un été avec Coo - Place du refuge (Le Panier) 27 juillet : Billy Elliot - Jardin Guy Azais (La Capelette) 28 juillet : Le Concert - Parc de font obscure (Mairie 13/14) 29 juillet : Fantastic Mr. Fox - Place du refuge (Le Panier) 30 juillet : The Ghost Writer - Place du refuge (Le Panier) 4 août : Azur et Asmar - Parc de font obscure (Mairie 13/14) 5 août : Tarzan, l’homme singe - Place du refuge (Le Panier) 6 août : Bliss - Place du refuge (Le Panier) 11 août : Hairspray - Parc de font obscure (Mairie 13/14) 12 août : Kerity, la maison des contes - Place du refuge (Le Panier) 13 août : Kuch Kuch Hota Hai Tilt 04 91 91 07 99 - www.cinetilt.org


sortir plein air de culture 8 La bibliothèque dessinée par Simon Krol (We Punk Design)

+ de Plein air à

Marseille Musiques à Bagatelle Quatre soirées musicales à la belle étoile sur la pelouse du parc Bagatelle. Au menu : classique et jazz. Comme d’hab. Les 23, 24, 30 juin et 1er juillet (21h) Parc Bagatelle - 13008 Marseille 04 91 55 15 84

Les nuits musicales de Carli

Bibliothèques de plage

On bronze intello

Durant tout l’été, de drôles de bibliothèques vont venir se poser près des plages à Istres et Marseille (Le Prado et Le Prophète). Imaginées par des designers locaux (Pierre Charmoy et Simon Krol) sur proposition du centre du design, ces bibliothèques mobiles mettront à disposition du public plus de 350 ouvrages. Un service gratuit : pour en profiter, il faudra simplement être muni d’une carte d’identité. Exit Closer, fini le bronzage idiot. Désormais on bronze avec Camus et Platon. Bon, il y aura certainement du Marc Levy… Plages d’Istres et Marseille (Le Prado, Le Prophète) Tous les jours (10h - 18h) 04 91 54 08 88 06 72 43 19 55 www.designmarseille.org

Une série de concerts assurés par les profs du Conservatoire de musique… Autant dire que ça va jouer. Rendez-vous dans la cour d’honneur du majestueux palais Carli. Au programme : opérette en folies (le 2 juillet), un solo de mandoline (le 4), une soirée jazz (le 6), une soirée classique (le 8), un solo d’accordéon (le 10), et un hommage à Mozart avec le pianiste d’Aznavour Erik Berchot, accompagnant Philippe Bride, le directeur du conservatoire, qui démontrera qu’il est aussi un violoniste accompli (le 12). Les 2, 4, 6, 8, 10 et 12 juillet (21h) Conservatoire P. Barbizet - 13001 Marseille 04 91 55 35 74

Concert sous les étoiles Séances de planétarium, lectures de contes et concert de l’Orchestre philharmonique de Provence… Sur fond d’images astronomiques. Si la météo le permet, une observation du ciel sera également au programme. Chouette. Le 9 juillet (18h) Mairie des 13e et 14e arrondissements andromede13.free.fr

© DR

Sur la plage, les pavés...

été 2011

8e art magazine

31


sortir 9 plein air de culture

Musiques dans la rue

Aix, Grand Théâtre à ciel ouvert

En trio, en quatuor, en big band, en solo… Le jazz et la musique classique vont résonner à travers les rues d’Aix-en-Provence avec au total plus de 100 artistes pour 80 concerts dans 12 lieux, de la place de l’Hôtel de Ville à l’Archevêché en passant par la place Albertas. Amateurs ou artistes professionnels, de la région ou du bout du monde, ils assurent des concerts gratuits d’une trentaine de minutes. Le 3 septembre, lors de la journée Pianos Libres, une dizaine de pianos seront disséminés dans toute la ville, et mis librement à la disposition des Aixois. À vous de prouver que vous êtes un petit Mozart… Au risque de vous faire lyncher par le voisinage si votre talent n’est pas si évident. Le même jour, les festivités se terminent sur la terrasse du Grand Théâtre de Provence pour un bal tango « festif et participatif ». Pianos Libres le 3 septembre À vous de prouver que vous êtes un petit Mozart… Au risque de vous faire lyncher par le voisinage !

+ de Plein air

à Aix

Concert d’été de l’académie du Tambourin Ah, le galoubet-tambourin… Un instrument populaire provençal dont on ne parle pas assez. On lui rend donc un hommage appuyé en juillet. Les 1er et 15 juillet Cour de la Mairie 04 42 26 12 62 www.academiedutambourin.com

Festival Georges Valère Avec de bonnes vieilles chansons populaires. Les 26 juin et 3 juillet Cour de la Mairie 04 42 59 19 73 www.csc-laprovence.com

Les calades provençales Les artistes et artisans aixois vous attendent sur le Cours Mirabeau : peintres et sculpteurs (4 et 5 juillet), bijoux (25 juillet) et métiers d’art (21 et 22 août). Aussi, du 19 juillet au 28 août, on flâne sur le Cours en nocturne avec les Nuitées d’Aix. © Agnès Mellon

Du 25 août au 3 septembre 08 2013 2013 www.grandtheatre.fr

© Agnès Mellon

La rentrée approche, mais à Aix, la musique fait de la résistance. Elle sort dans la rue !

Jusqu’au 28 août Cours Mirabeau 04 42 91 90 00 www.mairie-aixenprovence



Sandro Della Noce

objectif

Art-O-Rama

À la rentrée, Sandro Della Noce exposera ses sculptures au salon Art-O-Rama. Le jeune plasticien marseillais est en effet « l’artiste invité » de la cinquième édition de la foire internationale d’art contemporain. Dans cette perspective, il va passer l’été dans son atelier… C’est là que nous l’avons rencontré. Par Alexandre Lévêque

34

8e art magazine

été 2011


portrait sandro della noce 8

« Il va falloir que je m’y mette. La pression commence à monter… » Et l’échéance approche. Au mois de septembre, Sandro Della Noce participera à la plus cotée des foires d’art contemporain marseillaises. Le jeune plasticien (29 ans) sera en effet « l’artiste invité » de la cinquième édition d’Art-O-Rama (du 2 au 18 septembre). Sa première expo personnelle d’envergure. Un tournant dans la trajectoire d’un artiste (diplômé de l’École des Beaux-Arts de Marseille en 2008) qui assure vouloir prendre son temps : « Faire le tour des galeries et leur dire, ’’prenez-moi’’, ce n’est pas mon truc. Ma priorité, c’est l’atelier. Je préfère mûrir et approfondir mon travail. » Mais bon, Art-O-Rama, ça ne se refuse pas.

placés en lui. Alors il promet : « cet été, je bloque tout. Je me donne deux mois et demi pour réaliser les pièces de cette expo. » Il en a déjà imaginé la scénographie : « Une installation avec un ensemble de cinq ou six sculptures qui se tiennent les unes aux autres. Elles seront intégrées au dispositif scénique. Le public sera obligé de déambuler entre les pièces ! »

« Des formes coriaces qui survivent dans des paysages désertiques »

Il nous reçoit dans le vaste espace qu’il occupe aux ateliers Boisson (4e arr.). Sommes-nous dans un garage ? Un entrepôt ? L’atelier d’un charpentier ? Ça et là sont stockés plusieurs dizaines de pièces métalliques, planches en bois, Il était déjà là l’année dernière. Dans le « showroom », et autres objets non identifiés. « Ce que tu vois là, ce sont un espace dédié à la jeune création locale, où quatre mes sculptures… En pièces détachées. artistes émergents présentent une expo Une fois les expos terminées, je les collective. Selon la règle du jeu, l’un Assemblages d’éléments démonte. À partir de là, il est très d’entre eux est choisi par les galeristes bruts et industriels, fusion rare qu’elles reprennent leur forme participants à la foire pour être du bois et du métal, ces initiale, mais elles ressuscitent : je les « l’artiste invité » de la saison suivante. lourdes structures paraissent recombine entre elles pour faire de Celui-ci se voit accorder une expo sorties d’un chantier ou d’une nouvelles pièces. » Sandro pratique en personnelle, une aide à la production autoroute… effet une sculpture « de l’assemblage de ses œuvres, et la publication d’un et de la fusion ». Assemblages catalogue monographique. Un joli coup d’éléments bruts et industriels, fusion du bois et du métal, de pouce pour booster une carrière. Et Sandro se rassure. ces lourdes structures paraissent sorties d’un chantier Pour une première confrontation avec les galeristes « du ou d’une autoroute. « Des formes coriaces qui survivent marché », il s’en est plutôt bien sorti. Dans quelques dans des paysages désertiques », décrit-il, pour évoquer semaines, il va pourtant falloir répondre aux espoirs

© Joël Assuied

Amiante sur table 2008 CP de coffrage, OSB quadri, médium, sac plastique, tube inox

9 été 2011

8e art magazine

35


Tour à Tour, variation B 2009 Topan, métal, cordes d’escalades Vue d’atelier Produit par Buy-Sellf / Zebra 3 à Bordeaux en 2009.

ses œuvres. Comme une moissonneuse batteuse dans un champ, ou une tour de forage pétrolier dans le désert, « paysages neutres, sans parasite », les monumentales chimères de Sandro surgissent brutalement, du « white cube », l’espace d’exposition des galeries. Elles cassent le décor. Et demeurent mystérieuses, impossible à identifier. On peut certes définir les différents éléments dont elles sont composées : matériaux, couleurs, formes… « Mais il semble manquer quelque chose, poursuit l’artiste. C’est un moment flottant durant lequel le spectateur doit faire un travail de reconstruction. » Un dialogue s’instaure, un « duel », car la sculpture elle-même « se retrouve dans la situation du malade d’Alzheimer qui cherche dans notre regard à comprendre sa propre existence ».

3 B, 22 plaisirs Pour définir son champ plastique, Sandro Della Noce a imaginé un concept : « le Triple B. Pour Burlesque, Brut et Bauhaus. » Il illustre son propos en désignant l’une de ses dernières créations, opportunément nommée Ex-Voto, Triple B. Un assemblage de registres différents : des matériaux « industrialisés », lisses, sans aspérité (ici, les tubulaires métalliques Pour définir son et le volume en contreplaqué) ; associés champ plastique, à des matériaux bruts, non peints, ni Sandro a imaginé modifiés (la bûche). Le tout est relié par un concept : un système de tensions. Et résume bien le Triple B. Pour l’idée de « Triple B » : « Le “brut”, c’est la Burlesque, Brut partie primitive. Une référence aux arts et Bauhaus dits « premiers », la sculpture d’Océanie plus particulièrement. Le “burlesque”, c’est le bancal, la maladresse calculée, comme dans le film One Week de

36

8e art magazine

été 2011

Ex-Voto/ Triple B 2011 Bois d’eucalyptus, structure en métal, volume en contreplaqué


portrait sandro della noce 8

Art-O-Rama pousse au risque artistique

public se balade d’un stand à l’autre. « Le format volontairement réduit permet à chacun (artistes, galeristes, collectionneurs, institutionnels) de prendre le temps de se rencontrer », ajoute notre interlocuteur. En septembre prochain, on verra un savant Le salon international d’art contemporain aura lieu mélange de galeries émergentes et d’autres, plus reconnues, du 2 au 18 septembre. Ici, place à l’audace. issues du monde entier : Nogueras Blanchard (Barcelone), Art-O-Rama, c’est une foire d’art contemporain atypique Dépendance (Bruxelles), Monitor (Rome), Hoet Bekaert (Gand), au fort propos éditorial et artistique. Un événement qui, en Skuc (Ljubljana)… quatre éditions, jouit déjà d’un certain prestige. Un gage de Très porté sur l’international, Art-O-Rama n’en oublie pas moins la création locale qui bénéficie d’un espace qualité. Car ici, les galeries sont invitées. Et ça change tout. « Elles ne payent pas leur Chaque année, Art-O-Rama dédié, le « showroom ». Quatre jeunes artistes de la région sont choisis pour exposer dans stand et peuvent donc se permettre de prendre sélectionne une dizaine de un vrai risque artistique en limitant le risque galeries sur la base du projet ce qu’on pourrait appeler la section « junior » économique », explique Jérôme Pantalacci, artistique qu’elles développent de la foire. Cette année, les heureux élus sont pour la foire. Caroline Duchatelet, Colin Champsaur, Sandra co-directeur d’Art-O-Rama. Logique. Un stand Lorenzi, et Nicolas Pincemin. Leur travail sera chez Art Brussel, c’est 8 ou 9 000 euros. Que les galeries comptent bien récupérer en exposant des artistes soumis au regard des galeristes présents qui devront choisir peut-être moins intéressants mais plus vendeurs. Chez Art-O- parmi eux « l’artiste invité » de la saison suivante. « Une façon Rama, le stand est gratuit. Place donc à l’audace. Et aux jeunes d’inciter les galeristes internationaux à s’intéresser aux artistes galeries. Chaque année, Art-O-Rama sélectionne une dizaine de locaux ! », explique Pantalacci. Malin. structures sur la base du projet artistique qu’elles développent Art-O-Rama #5 pour la foire. Pendant deux semaines, elles bénéficient chacune Du 2 au 18 septembre d’un espace à la Cartonnerie (La Friche Belle de Mai), et le La Cartonnerie (La Friche Belle de Mai) - art-o-rama.fr Cérémonie du sel Démontage d’une œuvre de Motoi Yamamoto par le public. Art-O-Rama 2010

Buster Keaton. Ce côté un peu ridicule, tu le retrouves dans la configuration de mes sculptures : il y a toujours une idée de mouvement, de déséquilibre. Quant au “Bauhaus”, c’est un clin d’œil, car mes créations peuvent parfois être apparentées à du mobilier. Mais au-delà de l’aspect esthétique, le Bauhaus, c’est une école. Qui rassemblait art, architecture, design… Profs et étudiants

vivaient ensemble. Cette notion de groupe, de collectivité est très importante pour moi. » Pour cette raison, il est l’initiateur du site 22-plaisir.com, rassemblant sur le web une quinzaine d’artistes. Des anciens de l’ESBAM, comme lui, pour la plupart. 22 plaisirs, c’était le nom de leur atelier, aux Beaux-Arts. « Et le plaisir ça doit être le point de départ ! » n

été 2011

8e art magazine

37




Festival de Marseille

Ailey II La compagnie américaine interprètera plusieurs spectacles, dont Splendid Isolation II, de Jessica Lang : un solo dansé sur des chants médiévaux. © Eduardo Patino NYC

Beautés

du différent

Le festival de danse et des arts multiples de Marseille (FDAmM) place cette année l’Afrique et l’histoire afro-américaine au cœur de sa programmation. Par Alexandre Lévêque

40

8e art magazine

été 2011


dossier festivals FDAmM 8

« Cette seizième édition danse sur les lignes de faille de l’art et de la politique, mais aussi de l’amour et de la vie, de la honte et de l’espoir. » Comme à son habitude, la directrice du festival de Marseille (FDAmM) s’évertue à « créer du sens » autour de sa programmation. Cette fois, il sera donc question des « beautés du différent », de l’Afrique et de l’identité afro-américaine. « L’identité tout court ! » résume Apolline Quintrand, fière d’inviter au festival de Marseille, « lui-même enfant métissé né d’une terre et d’arts pluriels », des artistes new yorkais, haïtiens, maliens, sud-africains, congolais, bangladeshis… Ensemble, ils vont fêter cette « polis universelle et métisse » que Léopold Sédar Senghor appelait de ses vœux. Du 16 juin au 9 juillet, grâce au FDAmM, elle pourrait bien devenir réalité.

Ailey II et Merce Cunningham : les légendes

Flux de Marseille Flux de Marseille, c’est sept structures de la scène contemporaine marseillaise ayant fait le choix de « se mutualiser au lieu de se concurrencer » : le Festival de Marseille, le GMEM, Objectif Danse, le Ballet National de Marseille, le théâtre des Bernardines, le festival MIMI et le FID. Avec la carte Flux, en vente au prix de 45 euros, on a accès à sept manifestations à choisir au sein de chaque structure partenaire. Six euros la représentation et sept bonnes raisons de sortir. www.fluxdemarseille.com

C’est sur un « acte politique et artistique fort » que va s’effectuer l’ouverture du festival : la venue de la mythique et très rare compagnie américaine Ailey II. Douze « très jeunes et beaux danseurs » (dixit Apolline Quintrand), assurant la transmission du répertoire d’Alvin Ailey (1931-1989), chorégraphe afro-américain engagé dans la lutte pour les droits civiques durant les années 1960. La « Pour transcender cette question de l'identité, le compagnie interprétera notamment la légendaire pièce Révélations, syncrétisme des danses afrofestival va se conclure par un face à face avec nous américaines et contemporaines sur fond de négro mêmes, quand on a plus qu’une peau... » spirituals (du 16 au 18 juin à la Salle Vallier). Un spectacle faisant écho à celui de la chorégraphe guadeloupéenne Chantal Loïal, On t’appelle Vénus (le 1er juillet aux Bernardines), évocation dansée de la Vénus hottentote ; et au « cabaret capillaire » de la franco-ivoirienne Éva Doumbia, Moi et mon cheveu (du 7 au 9 juillet au théâtre du Gymnase). L’américain Merce Cunningham était l’un des plus grands des jardins japonais et des arbres d’où pendent des potences… chorégraphes contemporains. Décédé en 2009 à l’âge de 90 ans, Parmi les autres bizarreries au programme, Révolution (le 6 juillet à il avait fait le vœu que sa compagnie lui survive pendant deux ans la salle Vallier) n’est pas la moindre. Apolline Quintrand déploie tout avant de s’arrêter définitivement. Cette seconde mort interviendra son sens commercial pour nous « vendre » le spectacle : « Pendant au mois de décembre 2011. On mesure donc à quel point la venue les trente premières minutes, il ne se passe rien. » Qu’on se rassure : de sa compagnie à Marseille constitue un événement : Nearly il s’agit d’une montée en puissance, calquée sur le Boléro de Ravel, 902, sa pièce testamentaire, sera présentée à la salle Vallier pour un « crescendo extraordinaire », nous promet-elle. Enfin, dans Amour, deux représentations (les 21 et 22 juin). « Les treize danseurs de acide et noix (les 8 et 9 juillet à la salle Vallier), les danseurs se la compagnie vont s’unir, s’appuyer les uns sur les autres, se faire mettent à nu. Au sens propre. Car dans cette pièce du Québécois confiance », décrit Apolline Quintrand, pour qui « l’héritage de Merce Daniel Léveillé, ils dansent en tenue d’Ève, du début à la fin, sur Les n’est pas qu’un répertoire, c’est une pensée ». Un spectacle à Quatre saisons de Vivaldi. « Ce spectacle ne choquera que ceux qui méditer, donc. ont perdu une forme d’innocence, et pour qui la nudité n’a qu’une Après l’Amérique et l’Afrique, place à d’autres horizons. Vertical Road connotation sexuelle, prévient Apolline Quintrand. On se surprend (les 24 et 25 juin à la salle Vallier) nous permettra de faire l’expérience très vite à ne plus percevoir que leur respiration, un cœur qui bat, de la danse virtuose d’Akram Khan, chef de file de la scène britannique des côtes qui se creusent… » La directrice du FDAmM explique avoir fusionnant tradition indienne et techniques contemporaines. Le volontairement choisi de conclure le festival par « un face à face avec festival aura aussi de forts accents latino avec Dolores, du brésilien nous mêmes, quand on a plus qu’une peau, pour transcender cette Jomar Mesquita, qui s’est ici inspiré de l’univers de Pedro Almodóvar question de l’identité ». Et puis quoi de plus normal : la danse n’est(le 29 juin à la place Bargemon) ; et Oro Viejo, un « opéra flamenco » elle pas la célébration des corps ? n interprété par la jeune Rocío Molina (le 30 juin à la salle Vallier). Ici, pas de considérations métaphysico-politiques, mais « le pur plaisir de se faire plaisir » nous indique Apolline.

La danse mise à nu Le FDAmM, c’est aussi des propositions pour le moins troublantes. Avec Flux 43°/05°, le Théâtre du Centaure nous proposera une expérience sensorielle mariant performances live et vidéos (voir pages suivantes). Citons aussi Southern Bound Comfort (les 2 et 3 juillet à la salle Vallier) : ici, les danseurs ont pour partenaires des cordes, qui s’enroulent autour d’eux, dessinent des maisons et même

.

Festival de marseille Du 16 juin au 9 juillet 04 91 99 02 50 www.festivaldemarseille.com

été 2011

8e art magazine

41


Théâtre du Centaure

« Être centaure, c’est tenter de ne faire qu’un à deux » Depuis une vingtaine d’années, Camille et Manolo imaginent des spectacles hybrides autour de la figure du centaure. Du 19 au 26 juin, ils joueront leur dernière création, Flux 43°/05°, dans le cadre du festival de Marseille. Rencontre. Par Sandro Piscopo-Reguieg Photos : Stéphane Kossmann

Pourquoi cette fascination pour le centaure, symbole de votre compagnie ? Manolo : Le centaure, c’est d’abord une relation. Il s’agit de créer des liens. Être centaure, c’est avoir la conviction qu’on n’existe pas pleinement quand on est seul. On existe dans une relation à l’altérité. Être centaure, c’est tenter de ne faire qu’un à deux. C’est comme ça qu’on définit l’amour. On n’a pas trouvé d’autre façon de créer la vie que 1+1 = 1. C’est notre équation. Vous restez mystérieux sur la genèse de la compagnie… Camille : Pour nous, dire « quand j’étais jeune j’ai fait du théâtre », ou « quand j’étais jeune j’ai fait du cheval », c’est séparer les choses. Séparer pour mieux comprendre, comme cela a été fait durant des siècles. Nous sommes centaures, point. Dans la compagnie, nous avons les uns et les autres des univers croisés, qu’on essaie de mettre en fusion.

42

8e art magazine

été 2011

Le centaure symbolise-t-il aussi votre projet artistique hybride, mêlant cirque, théâtre et cinéma ? C : On ne veut pas raconter des histoires de chevaux, ça ne nous intéresse pas du tout. C’est encore séparer : d’un côté l’humain, de l’autre l’animal. Nous préférons raconter des histoires de centaures. Pour cela, nous imaginons un espace qui viendrait en conflit avec l’idée du cavalier et du cheval : notre première création, Les Bonnes de Jean Genet, se tenait dans un salon bourgeois avec des meubles Louis XV… Pour notre précédent spectacle, Cargo, nous étions dans un port industriel. Aujourd’hui, Flux aborde des questions très contemporaines. Le centaure existe de manière beaucoup plus prégnante dans des espaces en décalage. M : Les Bonnes marque le vrai commencement de la compagnie. C’est le geste fondateur. Il s’agissait de nous confronter à un texte du répertoire, qui n’avait absolument pas été écrit pour des centaures : il n’y avait aucune bonne raison de jouer Les Bonnes à cheval… C’est justement pour ça que nous l’avons fait. Le sens profond de la chose, on allait le trouver ailleurs. Un spectacle qui a beaucoup marqué la profession… C : Côté cirque, nouveau cirque… Ce fut un choc. Nous avons ouvert une nouvelle voie, peut-être plus narrative. Personne n’attendait ça. M : À ce moment là, nous avons été assimilés à la famille du nouveau cirque. Mais nous appartenons aussi à la famille du théâtre ; nous sommes programmés dans un festival de danse ; pour Cargo et Flux nous avons effectué un gros travail sur l’image ; et nous avons d’autres projets de films ou de cinéma… Nous sommes dans toutes ces cases là et aucune à la fois. Le centaure n’existe pas. C’est une utopie. Il ne peut donc entrer dans aucune boîte.


dossier festivals FDAmM 8

À quoi peut s’attendre le public qui viendra sous votre chapiteau du centre équestre Pastré ? M : Flux, c’est une expérience intime à partager ensemble. À l’aide d’un système de diffusion sonore par radio et casque audio (distribué à chaque spectateur), nous allons murmurer dans l’oreille de chacun, tout doucement. Le public sera invité à arpenter l’espace avec nous, avec nos centaures. Ça ne va donc pas se jouer seulement sous le chapiteau, mais dans l’ensemble de notre village. Un conseil : évitez les talons aiguilles, prenez de bonnes chaussures de marche !

C : Pour Cargo, nous avons travaillé avec un scénariste. C’est un mélange entre l’image filmée et le plateau. Une forme atypique, hybride. Qui préfigure Flux, votre dernière création ? C : Exactement. Mais dans Cargo nous étions dans une pièce de théâtre, le film intervenait comme scénographie. Plus tard, nous nous sommes dit « au lieu d’avoir un décor filmé, allons directement dans le décor, et filmons ! » Pour Flux, nous avons donc amené nos centaures dans plusieurs ports d’Europe… Vous allez justement présenter Flux 43°/05° dans le cadre du festival de Marseille : un spectacle rassemblant films et performances live… M : Nous avons réalisé une dizaine de courts métrages dans sept pays différents au fil des tournées de notre précédent

Vous êtes installés à Marseille, au centre équestre Pastré, depuis 1995. Comment êtes-vous arrivés ici ? M : Nous étions à Paris. Et nous savions qu’à Marseille, se trouvait l’un des plus grands centres équestres en milieu urbain de France. Dans lequel il y aussi une salle de théâtre. Les locaux étaient vacants, Camille est originaire de la région... Et puis nous qui vivons dehors avions envie d’un climat et d’une lumière plus agréables… Nous sommes donc allés voir l’ancien directeur du centre équestre et lui avons dit : « il y a ici une salle de théâtre, des infrastructures équestres… Nous sommes le Théâtre du Centaure… Il y a peut être quelque chose à faire ? » C : Le nouveau directeur du centre équestre se demande pourquoi il y a un théâtre dans l’enceinte. Il y a donc un conflit entre les sports et la culture, car nous sommes une enclave « culture » dans un domaine sportif. Maintenant, ça se complique : le centre veut se développer, et nous avons aussi un grand projet, Transhumances, pour lequel nous avons besoin de place. Nous allons donc déménager.

« Le centaure, c’est un corps. Un corps qui bouge, un corps dans l’espace, un corps double, animal et humain. (…) D’où l’intérêt de jouer dans un grand festival de danse. » spectacle. Tout a commencé à Berlin. Camille était dans la rue… Nous avons vu ce qu’il se passait dans les yeux des gens. Cet être utopique, qui n’existe pas, qui n’est ni du cirque, ni de la danse, ni du théâtre, il devait sortir des espaces de représentation, aller dans la vraie vie. C’est ce que nous montrons dans les courts métrages de Flux. Nous avons aussi créé des performances live pour ce spectacle, que nous avons jouées dans plusieurs configurations différentes : en pleine forêt, dans une friche industrielle, dans un château en Italie, dans une carrière de sable blanc en Hollande… À quoi correspond la mention « 43°/05° », ajoutée à la suite du titre du spectacle ? C : C’est la longitude et la latitude du lieu de la représentation. Ici, le centre Pastré en l’occurrence. Ces nombres changent pour chaque représentation. C’est toujours un flux différent. M : C’est la première fois que nous présenterons Flux à Marseille. C’est très important pour nous car le cœur de la compagnie, notre lieu de vie, c’est ici. Après avoir beaucoup voyagé en tournée, nous avons voulu nous réinscrire fortement sur notre territoire. Aussi, nous sommes heureux de pouvoir participer au festival de Marseille. Le centaure, c’est un corps. Un corps qui bouge, un corps dans l’espace, un corps double, animal et humain. Un corps qui a une motricité particulière, une rythmicité particulière, une densité dans l’espace particulière. D’où l’intérêt de jouer dans un grand festival de danse.

M : La Ville a identifié un terrain, pas loin d’ici, qui nous va très bien. Il faudra bâtir un nouveau projet, mais cela ne nous fait pas peur. Les choses sont en cours. Nous serons installés avant 2013 pour pouvoir porter Transhumances. Transhumances sera l’un des grands événements de Marseille 2013, capitale européenne de la culture. Pouvez-vous nous parler de ce projet ? C : L’idée, c’est de faire venir des milliers d’animaux. Du Maghreb et du sud de la Méditerranée. Ils convergeront vers la région et traverseront la ville de Marseille. Une très grande transhumance de chevaux, de moutons, d’humains… Qui veut suivre, qui veut marcher avec nous, viendra rejoindre ces milliers d’hommes et d’animaux qui traverseront des chemins exceptionnels réouverts pour l’occasion. M : Transhumances, c’est inviter les gens à marcher ensemble. Et inviter la nature à célébrer la capitale européenne de la culture. n

.

Flux 43°/05° Du 19 au 21 juin et du 23 au 26 juin à 21h30 Théâtre du Centaure - 33, traverse de Carthage - 13008 Marseille 04 91 99 02 50 www.festivaldemarseille.com - www.theatreducentaure.com

été 2011

8e art magazine

43


dossier festivals 9 MIMI

Festival International

des musiques barrées ! Un festival de découvertes sonores, ça vous dit ? Le Mouvement International des Musiques Innovatrices (MIMI) vous attend à l’hôpital Caroline du 7 au 10 juillet. Bienvenue au plus barré des festivals de France.

© Mathieu Mangaretto

Par Sandro Piscopo-Reguieg

44

8e art magazine

été 2011


dossier festivals mimi 8

© Mathieu Mangaretto

Ferdinand Richard Directeur du MIMI.

Julia Kent Avec les Marseillaises Emilie Lesbros et Rafaëlle Rinaudo, la violoncelliste canadienne va imaginer une création en exclu pour le festival : Single Room (le 8 juillet).

Hip hop bizarroïde, jazz pas normal, rock farfelu… Le MIMI, c’est un OVNI. Un festival consacré aux… musiques barrées. « Oui, on peut dire ça ! », répond promptement Ferdinand Richard, directeur et fondateur du Mouvement International des Musiques Innovatrices (MIMI). « Je programme des artistes qui viennent de tous les styles musicaux à partir du moment où ils ne font pas comme les autres, tient-il à préciser. Ceux qui ne respectent pas le manuel, ceux qui tordent les choses : les moutons à cinq pattes ! » On pourra en croiser quelques-uns à l’hôpital Caroline, sur les îles du Frioul, du 7 au 10 juillet. Parmi les huit concerts au programme de ce MIMI 26e du nom, on verra par exemple un danseur congolais à la « punk attitude », des Autrichiens qui font swinguer leurs légumes, et un gang de Californiens mélangeant métal, surf rock et musiques orientales. « Des choses hors normes », résume Ferdinand Richard. « Il n’y a pas de création sans décalage. Et le MIMI, c’est un festival de création ! » C’est dit. n n À contre-courant Mais comment inciter le grand public à venir voir des groupes peu connus pratiquant de surcroît des musiques non conventionnelles ?

© DR

« Si vous préférez voir un artiste très connu qui joue en play-back les chansons que vous entendez 25 fois par jour à la radio, c’est sûr, vous ne serez pas très surpris ! »

Au MIMI, la jauge est à 800 personnes par soir. Il faut donc parvenir à draguer les Marseillais. En communiquant par exemple sur le cadre « extraordinaire » de l’hôpital Caroline. Ferdinand Richard a un discours rodé : « C’est le Frioul, il fait beau, on va se baigner l’après midi… Il faut tenter le coup ! » Bon, il est toutefois peu probable que ce festival

9 été 2011

8e art magazine

45


dossier festivals 9 MIMI

n n Du MIMI à l’A.M.I.

© Agathe Poupeney

More More More… Future Détournement de Ndombolo par Faustin Linyekula (le 10 juillet).

ait pu perdurer vingt-six ans en se reposant sur cet argumentaire. « Les gens aiment la diversité, analyse Richard. Il faut qu’ils puissent aller à la Fiesta, à Marsatac, mais aussi à une ou deux soirées du MIMI. Il est très rare que des spectateurs repartent furieux parce que ça les a vraiment gonflé ! » Le directeur du festival mise donc sur la curiosité, la soif de découverte et de surprise : « Venir au MIMI, c’est prendre un risque. Si vous préférez voir un artiste très connu, qui vient avec tout son matos, et qui joue en play-back des morceaux que vous entendez 25 fois par jour à la radio, c’est sûr, vous ne serez pas très surpris ! C’est un autre choix. » Vu comme ça… À contre-courant. MIMI fait figure d’îlot de résistance face à la standardisation galopante. « Aujourd’hui, il y a très peu de création, déplore notre interlocuteur. Les petits groupes de rock branchés qu’on

Dans une autre vie, Ferdinand Richard était bassiste-chanteur d’Etron Fou Leloublan. Un groupe déjanté entre rock, punk et jazz délirant. Aujourd’hui, c’est culte. « Dans les années 70, comme tout le monde, je faisais du Led Zep’ et du Rolling Stones, se souvient le patriarche. Et puis j’ai compris qu’il fallait apporter quelque chose de différent. Faire ce choix, c’était renoncer au business, aux majors. Alors qui va faire ton album, qui va te faire tourner ? Petit à petit, je suis passé de l’autre côté de la barrière et de musicien, je suis devenu organisateur. » La première édition du festival MIMI a lieu aux arènes de Saint-Rémy-de-Provence en 1985. Ce fut aussi le dernier concert d’Etron Fou Leloublan. Depuis cette date, Ferdinand Richard se consacre pleinement au MIMI. Pour porter le festival, il a fondé une association, l’A.M.I. Qui a aujourd’hui largement diversifié ses activités. « Car il est douteux de présenter des groupes innovants sur scène le dimanche et de les renvoyer dans leur cave le lundi en leur disant ’’démerdez vous jusqu’à l’année prochaine’’ » L’A.M.I. est donc l’amie des musiciens. Labellisée « Centre national de développement pour les musiques actuelles », la structure basée à la Friche Belle de Mai (depuis 1992) leur propose un accompagnement complet : salles de répétition, formation des artistes et des managers, maîtrise du « circuit » (tourneurs, maisons de disque, administration, communication, etc.). Tout ce qui se fait « en amont du produit fini : le disque ou la tournée », résume le directeur. Il lance un appel : « Pros ou amateurs, musiques innovatrices ou pas, tout le monde peut venir à l’A.M.I. à condition d’avoir un projet concret en perspective… Même le plus blaireau des blaireaux ! » Le message est passé. n n Fuite des cerveaux créatifs L’A.M.I., c’est aussi une couveuse d’entreprises culturelles. En ce moment, on peut y croiser une douzaine de jeunes entrepreneurs souhaitant monter un label, une agence de com’, une boîte de tournées... Pendant un an, l’A.M.I. les aide « à devenir les plus forts possibles. Car nous savons que nous aurons besoin de ces professionnels pour accompagner les musiciens. Sans ce terreau d’associations et d’entreprises, les artistes sont seuls. Et ils s’en vont. » C’est la croisade de Ferdinand Richard : faire en sorte que les artistes puissent vivre de leur création. À Marseille. La couveuse répond à une politique très concrète : renforcer les opérateurs locaux, développer l’offre, afin de stopper la fuite des cerveaux créatifs vers le « triangle d’or » (ParisLondres-Amsterdam).

« 2013 doit aider la création locale. Si c’est pour faire les Beach Boys à David, ça ne sert à rien ! »

entend sur la FM font des trucs qui existaient déjà il y a 40 ans ! C’est toujours la même chose. » La faute au « business », aux « majors », coupables de « flinguer tout ce qui bouge, tout ce qui n’est pas à eux ». Heureusement, le web est en train de bousculer ce schéma. « Je trouve la période très intéressante, tempère Ferdinand Richard. On voit aujourd’hui émerger des innovateurs qu’on n’aurait jamais pu entendre auparavant. » Mais une autre menace guette. « Maintenant, c’est les tourneurs. Il n’en reste plus qu’un ou deux, ils monopolisent tout. Il suffit de regarder les festivals d’été : du nord au sud de la France, ce sont les mêmes. Ils achètent leurs programmes aux mêmes tourneurs… » Du coup, dans le paysage des festivals estivaux, le MIMI détonne. « Il y a au moins une chose dont vous pouvez être sûrs. Une programmation comme la nôtre, vous ne trouverez ça nulle part ailleurs ! » Parole de Loublan.

46

8e art magazine

été 2011

Selon lui, 2013 doit y contribuer. Mais le directeur de l’A.M.I. prévient : « J’ai participé à Copenhague, capitale européenne de la culture en 1996 : tous les jours, il y avait de super gros machins, ils ont fait venir les plus gros artistes du monde entier… Une pure catastrophe. Ils ont dépensé tellement d’argent qu’au 31 décembre il n’y avait plus un rond en caisse, alors qu’ils n’avaient rien fait pour le développement local. Pour 2013, Marseille a été choisie parce que c’était la candidature la plus ’’structurante’’, supposée aider la création locale. Si c’est ça le projet, c’est bien. Si c’est pour faire les Beach Boys à David, ça ne sert à rien ! » n


© DR

Secret Chiefs 3 Métal, surf rock et musiques orientales. La fusion ultime (le 10 juillet).

4 nuits au MIMI 7 juillet Nuit rouge et noire

8 juillet Nuit des belles plantes

9 juillet Nuit contre le truc bidon

10 juillet Nuit des Fondus

Sarangi Strings Soundsystem Autour des Belges de l’Ensemble Musiques Nouvelles s’agrègent l’Indien Dhruba Ghosh, le grand maître du sarangi (une sorte de petit violon), et Stephen Mathieu, l’un des DJ’s les plus créatifs d’Allemagne. Une dizaine de musiciens réunis pour une subtile expérimentation collective.

Single Room Mystère. Personne ne peut encore savoir ce qui sortira du projet des Marseillaises Emilie Lesbros (chanteuse, guitariste et bassiste) et Rafaëlle Rinaudo (harpiste). Le MIMI leur a proposé une résidence de création d’une semaine avec l’artiste de leur choix. Elles ont donc invité la violoncelliste canadienne Julia Kent. Ensemble, elles vont écrire un répertoire, et le joueront en première mondiale au festival MIMI.

Emmanuelle Parrenin + Flòp Il y a trente ans, Emmanuelle Parrenin était la passionaria de la musique folk en France. Elle avait disparu de la circulation quand Flòp, un parisien « branchouille », très actif dans les musiques électroniques (disques Bien) l’a retrouvée, et a produit son nouvel album. La rencontre de deux mondes.

« more more more… Future » Le Ndombolo, c’est la musique la plus populaire au Congo. Le danseur Faustin Linyekula a voulu détourner le genre. Et pour ce faire, il a débauché l’un des plus grands guitaristes de Ndombolo, Flamme Kampaya. Pour un spectacle dansé, musical, assez trash. « Dans l’esprit, c’est punk », annonce le directeur du MIMI.

© Zoefotografie

Last Poets Ceux qui ont assisté aux désolantes The Vegetable prestations de Grand Master Flash Orchestra et d’Afrika Bambaataa lors du Fondé en 1998 par une dizaine de dernier Tighten Up vont se méfier… musiciens de la scène expérimentale Ferdinand Richard rassure : « C’est autrichienne, The Vegetable un vrai groupe, avec de vrais Orchestra construit, pour chaque musiciens et de vrais instruments. concert, ses instruments à partir de Ça va vraiment jouer ! » Avec légumes frais achetés sur le marché Tacuma à la basse, on peut le croire. local. Flûtes faites de carottes, violons à base de poireaux… Un gag scénique rigolo cinq minutes ? « Absolument pas, répond Ferdinand Richard. La musique est vraiment bien écrite, et la sonorité des légumes est très étonnante ! » On ira donc tester la musicalité des légumes marseillais… Festival MIMI

Et aussi : Les 8 et 9 juillet, rendez-vous sur le Vieux-Port (18h) pour Même pas peur : deux concerts gratuits sur camions plateaux. Un aperçu du MIMI avant de prendre le bateau…

© V. Sannier

Chris & Cosey Dans les années 1980, ils ont choqué l’Angleterre avec leur groupe Throbbing Gristle, expérience extrême imprégnée de provocations sado-masochistes. En 2011, Ferdinand Richard les a retrouvés. « C’est musicalement très intéressant. Ils ont sorti un nouvel album plus lounge music, plus fin, mais très bien fait ». Bon, ça reste assez particulier…

Secret ChiefS 3 Né des cendres du légendaire Mr Bungle, Secret Chiefs 3 va encore plus loin dans la folie, l’expérimentation, le mélange des genres : surf music, jazz, métal, klezmer, B.O. de film d’horreur, messages cryptés… Il y a tout ça à la fois, et même plus. Perfection technique, énergie pure, ambiance survoltée, Secret Chiefs 3 en live, c’est la grosse claque. À ne pas manquer.

.

Du 7 au 10 juillet Hôpital Caroline mimifestival2011.amicentre.biz www.amicentre.biz

été 2011

8e art magazine

47


dossier festivals 9 FID

Depuis trois ans, les films de fiction sont présentés en sélection officielle au même titre que les documentaires. Cette année, on peut lire « Festival International de Cinéma » sur l’affiche de la 22e édition du FID. La séparation entre fiction et documentaire n’a selon vous plus lieu d’être ? Je veux défendre une certaine idée du cinéma. Les films appelés « documentaires » pour lesquels je me bats sont pour moi du cinéma à part entière. Du cinéma d’aujourd’hui, des formes vivantes. Je ne dis pas que fiction et documentaire, c’est la même chose. Mais c’est la même intensité, la même qualité : c’est pareillement du cinéma. Il faut ajouter qu’aujourd’hui, malgré l’emprise très forte des grosses compagnies, malgré la règle économique de rentabilité qu’impose une certaine diffusion ; beaucoup de gens continuent de faire des films avec très peu d’argent. Et des choses de qualité. Fictions ou documentaires, il y a une fraternité, un cousinage entre ces films faits dans l’urgence, mais avec une grande énergie. Aussi, dans les films de fiction tournés avec peu de moyens, il y a du réel qui transpire. L’argent ne fait plus écran. Même si ce sont des films de fiction, ils ont un aspect documentaire.

Jean-Pierre Rehm :

Quel regard portez-vous sur ce qu’on peut voir à la télévision en matière de documentaire ? Ce qui passe à la télé aujourd’hui est commandé par la peur de déplaire. On craint que les choses ne soient pas

Le Festival International du Documentaire devient cette année Festival International de Cinéma. La 22e édition du FID se déroulera du 4 au 11 juillet. Rencontre avec Jean-Pierre Rehm, délégué général.

comprises. Mais le monde est tellement compliqué ! Dire : « Il faut simplifier ce qui est compliqué », c’est prendre les gens pour des imbéciles. Ce qui est compliqué reste compliqué. Offrons la complexité aux gens sans se moquer d’eux !

« Offrons la complexité ! » Par Sandro Piscopo-Reguieg

Vous avez déclaré « rejeter le christianisme misérabiliste sur lequel est assis le documentaire ». Comment doit-on comprendre cette phrase ? Le documentaire, beaucoup plus que la fiction, est un genre qui produit du discours. Un discours de type moral : « On ne doit pas faire ceci ou cela. » De plus, c’est toujours « au nom de » l’amour, le respect… Je trouve cela pervers. C’est dire : « Reste dans ta misère, elle me permet de me pencher vers toi. » Quelquefois, dans le documentaire, on est rassurés parce que l’autre va plus mal que soi. C’est ce que j’appelle le « christianisme misérabiliste ». Vous fustigez aussi le « militantisme hérité des années 70 »… Je parle de militantisme dans le domaine du cinéma. C’est un discours qui consistait à dire que la forme importe

48

8e art magazine

été 2011


« Les films appelés “documentaires” pour lesquels je me bats sont pour moi du cinéma à part entière »

peu, que ce qui compte c’est le message de lutte, et donc, l’efficacité. Il fallait alors faire la publicité d’une cause. Durant les années 70, il y avait des luttes, des choses étaient cachées… En ce sens, ce cinéma militant était légitime. Mais une fois que les luttes ont cessé, dans les années 1974-1975, les gens qui avaient appris à faire des films sur le tas, dans cette logique là, n’avaient plus de boulot. Ils n’avaient plus de cause. Au final, ils ont été engagés par la télévision. Ce qui a introduit ensuite dans les formes documentaires l’idée qu’il ne fallait pas être ambigu, qu’il fallait être clair, qu’il fallait mettre une voix off pour expliquer ce que l’on voyait, qu’un film devait démontrer quelque chose… Je dis non. Les choses ont changé. Il n’y a pas le message et la forme. Il y a un film. C’est pour cette raison que vous expliquez que « les films doivent être des aventures artistiques » ? Exactement. Ce qui ne veut pas dire qu’il faut fuir les problèmes. Seulement, il faut les aborder sans la clé du

christianisme (donc la clé misérabiliste) : « Je te comprends parce que tu souffres », mensonge numéro un ; ou « je te traduis clairement parce que je sais ce que tu vis », mensonge numéro deux. Une aventure artistique, c’est une forme où tout est proposé dans un « brouillard précis ». Ce n’est pas le didactisme militant : « Toi pas comprendre, moi vouloir t’expliquer. » L’un des « écrans parallèles » de cette année sera consacré au thème « Souffrance et Cruauté ». Pourquoi ce choix ? Le critique de cinéma Serge Daney disait : « Au documentaire revient la cruauté, la souffrance appartient à la fiction. » Une phrase énigmatique qui m’a tout de suite interpellé : je la trouvais d’une justesse incroyable sans être tout à fait sûr de bien la comprendre. J’ai imaginé que l’une des traductions possibles de « souffrance et cruauté » pouvait être « sadisme et masochisme ». Analysés comme deux types de rapport au pouvoir. Le sadisme étant :

9 été 2011

8e art magazine

49


dossier festivals 9 FID

« J’incarne à moi seul le pouvoir » ; et le masochisme répondant : « Je vais te forcer à te montrer comme pouvoir. » Dans une relation, le masochiste est quelqu’un qui oblige, comme par un fait de blague, à mettre en œuvre chez l’autre la pulsion de maîtrise, de pouvoir. Le sadisme - cruauté, ça peut être l’observation : « Je te regarde. » Le masochisme - souffrance, serait plutôt : « Je crois pouvoir un peu partager ta douleur. » Pour la troisième année consécutive, les films présentés en compétition sont tous des premières mondiales ou internationales… Nous avons décidé d’être sur cette ligne pour plusieurs raisons. Premièrement, cela nous oblige à prendre des risques, à défricher, à affirmer des choix. En faisant cela, nous attirons beaucoup de professionnels nationaux et internationaux qui viennent voir des films qu’à très peu d’exceptions près, ils n’auront pas vus ailleurs. Du même coup, ces programmateurs vont les faire circuler dans d’autres festivals. Les réalisateurs nous confient donc volontiers leurs films. Ils savent qu’ainsi, il y a une probabilité plus importante que plusieurs festivals les relayent par la suite. Le FID est devenu un label.

« Le FID est devenu un label » Comment êtes-vous arrivés à ce statut ? La manifestation n’est pas toute neuve. C’est la 22e édition. Un gage de pérennité et de sérieux. Avant ma

50

8e art magazine

été 2011

nomination en 2001, j’ai défendu un projet devant le conseil d’administration. Il s’agissait d’essayer de devenir un événement international. Qui ne se contente pas de montrer des films déjà vus. Ceux-là, nous les projetons dans les « écrans parallèles ». Dans la compétition, qui est la colonne vertébrale de la manifestation, j’ai décidé de faire un travail de défrichage. Dans l’équipe du FID, vous êtes seulement quatre pour visionner plus de 3 000 films chaque année. Combien en retenez-vous au final pour les différentes compétitions du festival ? Il y a une compétition internationale avec une vingtaine de films sélectionnés ; une compétition française avec une dizaine de films ; ainsi que la compétition « premier » qui, comme son nom l’indique, ne concerne que des premiers films. Nous en recevons beaucoup, mais nous allons aussi les chercher. Toute l’année, je suis invité à faire partie de jurys à l’étranger. Quand je trouve un film intéressant, je propose au réalisateur de le placer en compétition au FID. Nous avons enfin tout un réseau à l’étranger : des réalisateurs, des amis, que nous sollicitons en permanence. Nous essayons d’avoir des yeux partout. Avec toutes ces premières mondiales et internationales, on vient de loin pour assister au FID ? Le public est régional à 40 %. Il y a aussi une forte présence nationale et internationale. Cette dernière est surtout le fait de professionnels (directeurs de festivals, programmateurs, acheteurs et diffuseurs potentiels, etc.).


dossier festivals FID 8

D’où l’idée du FIDLab ? Nous avons fait le souhait de participer de façon concrète à la défense des films. Non plus seulement en les montrant, mais aussi en profitant du temps du festival – où il y a beaucoup de professionnels – pour faire en sorte que des projets en cours d’écriture, de production, ou de postproduction, puissent trouver des coproducteurs pour finaliser l’aventure. Le FIDLab, c’est une incitation à la rencontre et à la coproduction. Cette année, nous avons reçu 320 projets. Nous en avons sélectionné dix. Ils seront présentés pendant deux jours à des coproducteurs potentiels. Sur les deux dernières années, 80 % des projets ont pu être finalisés grâce à ces rencontres. Par exemple, Clément Cogitore a tout récemment été sélectionné à Cannes, à la Quinzaine des réalisateurs, avec un film qui était au FIDLab l’année dernière !

Quels sont vos projets pour 2013 ? Nous avons un projet autour de Pasolini en partenariat avec d’autres structures. Ce n’est pas encore acté par 2013 mais c’est notre souhait. Depuis l’année dernière, nous développons aussi Fest Med. Il s’agit de réunir des festivals méditerranéens proches du FID. Cette année, nous allons initier un volet pédagogique en faisant venir une dizaine d’étudiants en cinéma du pourtour méditerranéen. L’idée de transmission est d’ailleurs l’un des axes de 2013.

Les choix du FID sont d’ailleurs souvent confirmés à Cannes… On peut citer Vimukthi Jayasundara, dont le premier film avait été montré pour la première fois au FID en 2001. Il a ensuite eu la Caméra d’or à Cannes, décernée par Abbas Kiarostami ! Cette année, il était à la Quinzaine. Il y a aussi Raya Martin, un jeune philippin de 21 ans montré au FID en 2006, 2007 et 2008. Lui aussi est allé à la Quinzaine, mais aussi en compétition officielle, avec deux films.

Quel est votre point de vue sur le projet de festival international du cinéma arabe, prévu pour 2013 ? Eliane Zayan, adjointe au maire de Marseille en charge du cinéma, s’y oppose, évoquant un « festival communautaire » et « discriminatoire »… C’est délicat. La même question peut se poser pour les festivals consacrés aux cinémas espagnol, sud-américain, israélien… Je comprends le souhait des spécificités, de marquer des communautés. En même temps, j’entends des cinéastes arabes me dire qu’ils n’iraient dans un festival arabe qu’une fois que leur film aura été montré comme étant un film en soi. Ils veulent être pris à la hauteur de leurs travaux et disent, en somme : « Je ne suis pas qu’un cinéaste arabe. » Mais je ne suis pas en train de souscrire à l’attaque communautariste. Il y a des différences, et il est important de les signaler. Il faut toutefois faire attention à ce que l’affirmation de ces différences ne se fasse pas au détriment de ce qui est en train de se passer aujourd’hui. Quelqu’un comme Elia Suleiman déclare un jour qu’il n’est pas un cinéaste palestinien, mais un cinéaste israélien. Et il va affirmer l’inverse dans un autre festival ! Par jeu, par provocation… Pour finir, il dit : « Je ne veux pas être dans un festival de film palestinien, ni dans un festival de film israélien : je fais du cinéma. » Plus largement, il serait dommage de négliger la vivacité du cinéma arabe comme tel. Il y a aussi le lien entre Marseille et le Maghreb. C’est un enjeu politique. Sans abandonner cette idée, il faut réfléchir à son titre et à sa définition, de façon à ce que les choses soient ouvertes et dynamiques. n

Sans parler de la Palme d’or de l’année dernière, Apichatpong Weerasethakul… La première fois qu’il a été montré en France, c’était au FID. Très vite, je lui ai témoigné ma profonde admiration et lui ai proposé de présider le jury de la compétition internationale. Ce qu’il a fait en 2007. Plus tard, il nous a donné un court métrage en compétition. C’était un extrait d’Oncle Boonmee. En première internationale... Une belle marque de confiance.

« À Marseille, il y a une effervescence. Qui ne concerne pas seulement les tournages télé ! » Quelles sont les répercussions du FID sur la filière cinéma à Marseille ? Je ne suis pas sûr que le FID en soit la cause, mais on peut remarquer qu’un certain nombre de maisons de production ont décidé de s’installer dans la région avec des ambitions clairement internationales. C’est un phénomène récent. Peut-on parler d’un effet de levier du FID ? Il serait présomptueux de dire ça. Je pense qu’il y a une synergie. Dès lors qu’on est moins seul, on est mieux. À Marseille, il y a une effervescence. Qui ne concerne pas seulement les tournages télé ! Nous allons d’ailleurs organiser une rencontre destinée aux producteurs locaux pour les informer du FIDLab.

La Méditerranée sera présente dès cette année dans le programme « En chantier », projeté dans le cadre des « écrans parallèles »… Nous allons montrer des films sur les révolutions tunisienne, égyptienne, syrienne… Des films et surtout, des documents.

.

FID Du 6 au 11 juillet 04 95 04 44 90 www.fidmarseille.org

été 2011

8e art magazine

51



dossier FESTIVALS JAZZ DES CINQ CONTINENTS 8

Ahmad Compaoré :

« Au Jazz des Cinq Continents,

Je vais faire trembler la terre ! » Batteur, compositeur, Ahmad Compaoré est avant tout un improvisateur surdoué. « Musicien en liberté », le Marseillais marie les styles musicaux et les disciplines artistiques, notamment au sein des jam sessions Musique Rebelle. Le 23 juillet, il sera sur la scène du festival Jazz des Cinq Continents avec le guitariste Marc Ribot et le bassiste Jamaaladeen Tacuma. Nous sommes donc allés le rencontrer dans son studio, à la Friche. Pour nous, il évoque son parcours, ses projets, et commente la programmation du festival. En totale impro’, bien-sûr… Par Sandro Piscopo-Reguieg

© Kenzo Ferrara

Tu as été découvert à l’âge de 17 ans par le guitariste comorien Ali Afandi. Mais tu avais commencé la batterie relativement tard… Oui, vers 14 ou 15 ans. J’ai eu le coup de foudre pour la batterie en allant voir répéter un groupe. Pendant leur pause, j’ai demandé au batteur si je pouvais jouer un peu… J’ai frappé la caisse claire… Boom ! Deux ans après, je lui donnais des cours ! Les premières années, tu jouais en autodidacte… Le problème avec la batterie, c’est qu’il faut vraiment maîtriser l’instrument avant de pouvoir jouer avec les autres. Je passais donc six heures par jour à m’exercer sur du Police ou du Phil Collins… Ma mère devenait folle !

9 été 2011

8e art magazine

53


dossier festivals 9 jazz des cinq continents

J’ai appris comme ça, à l’écoute. Quand tu ne connais pas la musique, tu fais à l’émotion. Je faisais aussi un peu de basse, un peu de guitare… Plus tard, j’ai intégré une école à Nancy, où j’ai pu apprendre à lire et écrire la musique. Avant ça, ta rencontre avec Fred Frith, en 1990, fut déterminante… Je fréquentais un espace culturel dans mon quartier, où je faisais de la danse, des arts martiaux… C’est là que je rencontre Fred Frith en 1990. Un guitariste britannique, un musicien de grande envergure, aussi bassiste, violoniste, compositeur… Il joue avec John Zorn ! Il était venu à Marseille pour la création d’un opéra-rock, Helter Skelter, avec le metteur en scène François-Michel Pesenti. Une résidence de huit mois. Pour ce projet, ils ont sélectionné une quinzaine de jeunes musiciens amateurs. J’ai eu la chance d’être choisi. Et c’était parti pour des mois de répétitions intensives avec Fred Frith, tous les jours, du matin au soir ; ainsi qu’une tournée européenne sur trois ans… C’est lui qui t’a familiarisé aux musiques improvisées ? Fred Frith m’a ouvert les yeux et les oreilles ! La première fois que je l’ai entendu jouer, je me suis dit « mais qu’est ce que c’est que ce malade ? Dans quoi suis-je tombé ? » À cette époque, j’étais fermé, formaté. J’écoutais James Brown, Mickael Jackson, Phil Collins… Je n’avais jamais rien entendu qui ressemble à la musique de Fred Frith ! L’improvisation, pour moi, ce n’était pas de la musique. Mais au bout de quelques mois, j’étais à fond dedans !

Ma rencontre avec lui fut une vraie chance. Il avait une exigence totale. Que t’a t-il enseigné de plus important ? Le silence. Tout ce qu’il y a entre les lignes... Dans la musique, le silence est primordial. Par la suite, j’ai collaboré avec lui sur plusieurs projets. Nous avons enregistré deux ou trois CD et fait plein de concerts. La dernière fois, c’était à Tokyo en 2009. Aujourd’hui, ta musique laisse une grande place à l’improvisation… Exactement. C’est ce qu’il y a de plus difficile dans la musique. Mais tu ne peux pas faire ça avec n’importe qui. Il doit y avoir des affinités entre les musiciens, ils doivent bien se connaître. Improviser, c’est composer directement en live. Il faut que ça soit très bon, tout de suite ! « Improviser, c’est composer directement en live. Il faut que ça soit très bon, tout de suite ! » Tu portes le concept Musique Rebelle depuis 2007. Un événement pluridisciplinaire réunissant deux fois par an plusieurs dizaines d’artistes et musiciens autour de soirées jam sessions placées sous le signe de la création collective… Une façon de mettre en pratique ton approche artistique ? Il s’agit de rassembler des artistes de différentes disciplines, confronter, mélanger les styles. Autour d’un noyau de musiciens avec lesquels j’ai l’habitude de travailler

© BAM Productions

Trio Ahmad Compaoré (à droite) avec ses potes Marc Ribot (à gauche) et Jamaaladeen Tacuma (au milieu). Le 23 juillet, ils seront réunis sur la scène des jardins du Palais Longchamp.


dossier FESTIVALS JAZZ DES CINQ CONTINENTS 8

viennent se greffer des artistes d’horizons différents, mais d’une sensibilité proche de la notre. Pour chaque édition de Musique Rebelle, il y a un thème, un fil conducteur. Je raconte une histoire pour créer un lien entre les différentes musiques : flamenco, occitan, jazz… Mais aussi entre les différentes formes artistiques comme la danse, la vidéo, la photo, et même le sport… Je prépare actuellement le prochain Musique Rebelle qui aura lieu le 18 juin au Cabaret Aléatoire. Le thème de ce « round 10 » sera « la femme, la voix, l’expérimentation ». Je vais réunir plus de 50 musiciens. Ils se succèderont au fil des morceaux… Ça bouge, il n’y a pas de temps mort. Mais pour comprendre, il faut venir !

à 6h30, il devait prendre son avion ! Nous en avons fait un disque, Unsolved Mysteries, qui n’est sorti qu’aux ÉtatsUnis. Après ça, nos routes se sont régulièrement croisées, et nous avons continué à jouer ensemble, à faire quelques concerts. Ribot, Tacuma, et moi, sommes très liés. Nous avons les mêmes influences : tous les trois, on s’éclate en jouant de la musique libre. Tu vis à Marseille, Ribot à New York, Tacuma à Philadelphie… Comment faites-vous pour préparer votre concert ? La dernière fois que nous nous sommes vus tous les trois, nous avons enregistré pendant une semaine. Ribot et

Musique Rebelle, c’est aussi une façon d’exprimer des revendications sociales et politiques ? « Dès le premier morceau, on va ouvrir avec un funk... Un truc chaotique ! »

Quels sont tes projets pour Musique Rebelle ? Musique Rebelle a lieu deux fois par an au Cabaret Aléatoire. Au printemps et en automne. En 2013, j’aimerais en faire un « marseillais », local, et un autre international, où viendraient les grands musiciens avec lesquels j’ai envie d’improviser. On retrouverait évidemment Fred Frith, mais aussi John Zorn, Marc Ribot, Jun Miyake, Tacuma… Avec eux, pourquoi pas imaginer un opéra-jazz ? Plus près de nous, il y a ton concert au festival Jazz des Cinq Continents. Peux-tu nous parler des membres de ton trio, Marc Ribot et Jamaaladeen Tacuma ? Avec Marc Ribot, ça peut être très fort comme très doux. Il a été le guitariste de Tom Waits, il joue beaucoup avec John Zorn… C’est un musicien très éclectique. Quant à Tacuma, c’est l’un des bassistes les plus groovy de la planète. Il joue comme personne : il suffit de voir sa technique de slap ! Il slappe avec les doigts… Personne ne fait ça, les autres bassistes utilisent le pouce ! Ça donne un son plus chaleureux, plus rond. Et du coup, Fred Frith a appris à slapper comme ça, mais sur sa guitare ! Tacuma, c’est un grand. Il a été découvert par Ornette Coleman, a fait plusieurs albums avec The Roots… Tu vas jouer avec des monstres ! Comment est né ce trio ? Nous nous sommes rencontrés au début des années 90, lors de ma tournée avec Fred Frith. Plus tard, en 2000, Tacuma était venu jouer au Jazz des Cinq Continents avec James Carter. À peine son concert terminé, nous sommes partis en studio. On a joué toute la nuit, on n’a pas dormi :

Peaux Ahmad Compaoré martèle ses fûts à l’aide de ses baguettes… Et puis selon le feeling, il peut lui arriver d’utiliser ses poings, ses mains, et même ses pieds. Pour se sentir plus proche des peaux de sa batterie ?

© BAM Productions

J’ai parfois l’impression qu’à Marseille, la politique culturelle ne va pas dans le bon sens. Si tu n’as pas de connexion, t’es mort. Même si tu es un bon musicien. C’est injuste. Musique Rebelle est ouvert aux pros mais aussi aux amateurs, aux inconnus. Nous n’avons pas de budget, il n’y a donc rien à gagner ! Les artistes viennent pour créer collectivement, pour le partage. Musique Rebelle, c’est un mouvement de résistance ! Nous n’avons pas besoin de subventions pour mener à bien un projet. Musique Rebelle, c’est mettre le musicien au centre du projet artistique. La force, c’est la musique. Les artistes doivent retrouver leur liberté. Je les pousse à se lâcher, à ne plus avoir de frontière. Mélanger une chanteuse lyrique avec du flamenco, c’est la mixité !

Tacuma ont joué sur des morceaux que j’ai composé. Nous allons d’ailleurs en faire un album, mais je préfère prendre mon temps pour le finaliser. Nous avons donc tous les morceaux pour le concert. Mais ce sont plutôt des bases, des repères. Car à partir de ça, nous allons improviser… C’est le plus important ! C’est une fierté, pour toi, d’être programmé dans un grand festival marseillais ? Nous nous sommes battus pendant trois ans pour y arriver, avec l’aide de La Boîte à Musique, la structure qui me soutient. J’avais déjà joué au Jazz des Cinq Continents en 2000 avec mon groupe de l’époque, Oriental Fusion. Revenir cette année est un honneur ! Surtout avec un tel plateau. Je vais faire trembler la terre ! On aura besoin de ça ! Car le public de ce festival a l’habitude d’assister aux concerts confortablement assis sur la pelouse… Je peux les faire bouger ! J’ai aussi des morceaux groovy. Nous ne sommes qu’un trio, sans cuivres… Mais même à trois, on peut être dix ! Avec peu, tu peux faire beaucoup. Dès le premier morceau, on va ouvrir avec un funk… Un truc chaotique ! n

.

Trio Compaoré - Ribot - Tacuma Festival Jazz des Cinq Continents Le 23 juillet Palais Longchamp www.festival-jazz-cinq-continents.com www.musiquerebelle.com

9 été 2011

8e art magazine

55


dossier festivals 9 jazz des cinq continents

Et la prog’, t’en20penses quoi ? juillet

On avait un spécialiste sous la main. Nous avons donc demandé à Ahmad Compaoré de nous parler des artistes qui partagent l’affiche avec lui au festival Jazz des Cinq Continents. Alors Ahmad, cette prog’, t’en penses quoi ?

21 juillet

Tribute to Miles Davis : Herbie Hancock, Marcus Miller, Wayne Shorter

Pour célébrer les vingt ans de la disparition du légendaire Miles Davis, trois de ses ex-acolytes se sont réunis pour une série de concerts exceptionnels (seulement quatre dates en France). Herbie Hancock (piano), Wayne Shorter (saxophone) et Marcus Miller (basse) ont joué avec le maître. Et sont aujourd’hui devenus des monstres sacrés du jazz. Profitez-en : ces trois là réunis, vous ne les verrez pas deux fois. L’avis d’Ahmad : « Un bel hommage à Miles Davis. Hancock, Miller, Shorter, ils forment une famille ! Et c’est toujours plus facile de jouer avec quelqu’un que l’on connaît bien. Hancock, c’est un grand improvisateur. Il peut faire du rap, du funk, du latin... Et Shorter, il a une vraie sensibilité… Ça sera une soirée très jazz, mais avec une touche funky à la Marcus Miller ! »

Ahmad Jamal

Encore un géant. Ahmad Jamal a 81 ans, 53 albums à son actif, et toutes ses dents. Pianiste virtuose, il suffit d’énumérer quelques uns de ses surnoms pour se faire une idée de son talent : « L’architecte », « Le prophète », « Le prestidigitateur du piano », « Le monstre aux deux mains droites »... Sur la scène des jardins du Palais Longchamp, il sera entouré de James Cammack (contrebasse), Herlin Riley (batterie) et Manolo Badrena (percussions). L’avis d’Ahmad : « Mon grand-père spirituel ! Ahmad Jamal, c’est… L’élévation ! Il est l’un des pionniers de l’improvisation modale, qui a été réutilisée par Miles Davis ou John Coltrane… Il dit d’ailleurs très justement que l’improvisation n’est pas une spécificité du jazz, que Mozart lui-même improvisait, que tous les musiciens improvisent. Je me retrouve là-dedans. »

23 juillet

Larry Graham & The Graham Central Station Larry Graham, c’est le funk incarné. Bassiste chanteur à la bonne humeur communicative, il a le secret du riff monstrueux, celui qui vous donne une irrésistible envie de danser et de faire la fête. Depuis ses débuts avec Sly and the Family Stone, jusqu’à ses collaborations avec Prince durant les années 2000, il a propulsé le funk à un niveau jamais atteint. Cette fois, avec son groupe The Graham Central Station, il risque bien de mettre le feu au Palais Longchamp ! L’avis d’Ahmad : « Je suis fan ! Ce que j’adore chez lui, c’est qu’il peut faire une note, une seule note, pour faire groover tout un morceau. Il a un feeling très particulier. Non seulement il est l’inventeur du slap, mais aussi, il est l’un des premiers à avoir utilisé les effets sur la basse. Pour moi, c’est un musicien de la trempe de Jimmy Hendrix ! »

56

8e art magazine

été 2011

22 juillet

Monty Alexander & Harlem Kingston Express Le pianiste jamaïcain a joué avec quelques pointures comme Franck Sinatra, Dizzy Gillespie, Sonny Rollins, Quincy Jones… Il propose aujourd’hui un jazz facile d’accès, au swing joyeux et festif. Son jeu robuste reste en effet imprégné d’influences tropicales. À Marseille, il sera accompagné du Harlem Kingston Express. L’avis d’Ahmad : « Du jazz classique, joué par des Jamaïcains, ça donne envie ! »


dossier FESTIVALS JAZZ DES CINQ CONTINENTS 8

25 juillet

Jazz at Lincoln Center Orchestra with Wynton Marsalis Un trompettiste qui se partage entre le jazz et la musique classique. Wynton Marsalis a en effet esquissé ses premières notes à l’âge de 6 ans, avant de découvrir simultanément Haydn et Duke Ellington ! Il a joué aux côtés de Herbie Hancock, et a enchaîné les enregistrements, révélant un style sophistiqué et un jeu particulièrement fluide. Ce soir, il sera accompagné du Jazz at Lincoln Center Orchestra, fort de 19 musiciens. Vous avez dit énorme ? L’avis d’Ahmad : « Marsalis, c’est très cartésien. Cérébral. Tellement technique que ça en devient presque mathématique ! Ça sera donc une master class… Mais attention : avec une grande sensibilité et un son magnifique. Un mec parfait. »

Return to Forever est un groupe de jazz-rock fusion fondé et emmené par le pianiste Chick Corea dans les années 70. Aujourd’hui, il est de retour pour quelques concerts exceptionnels. Au casting, on aura donc le bassiste Stanley Clarke, dont on attend les solos stratosphériques ; le batteur Lenny White, connu pour avoir joué sur le Bitches Brew de Miles Davis ; le français Jean-Luc Ponty, apôtre du violon électrique à cinq cordes ; et l’immense guitariste Franck Gambale. Cinq musiciens ayant marqué l’histoire du jazz pour un final de grande classe. L’avis d’Ahmad : « Une très belle équipe ! Le batteur, Lenny White, est un autodidacte. Ça se sent, son jeu sonne plus vivant, plus vrai… C’est l’un de mes batteurs préférés, et il a un son proche du mien. Le plus important, dans la musique, c’est le feeling ! Quant à Stanley Clarke, tout simplement, c’est beau… Il parle avec sa basse ! Chick Corea, il a dépassé le piano, il utilise plein de sons… Un super musicien. Et un super concert. »

26 juillet

Return to Forever IV : Chick Corea, Stanley Clarke, Lenny White, Franck Gambale, Jean-Luc Ponty

Le Jazz des Cinq Continents, dans la cour des grands ? « C’est une nouvelle ère pour le festival. » Le mot est de Régis Guerbois, président de l’association Jazz des Cinq Continents. Il est vrai qu’avec un tel plateau, le festival marseillais joue maintenant dans la cour des grands. Entre Marciac, Juan les Pins, et Nice, il faudra désormais compter avec la cité phocéenne. « De l’après guerre à la fin des années 70, Marseille était la capitale du jazz en France », tient à rappeler Bernard Souroque, le directeur artistique. Et pour inciter les marseillais à se « remettre à l’heure du jazz », il y aura cette année pas moins de deux soirées d’ouverture : on commence le 18 juillet sur le cours d’Estienne d’Orves avec une fanfare suivie d’un concert gratuit d’Accoules Sax et DJ Rebel. Le lendemain, c’est l’auditorium du Palais du Pharo qui accueille David Murray et un ensemble cubain pour un hommage à Nat King Cole… en espagnol. Le festival s’installe ensuite dans les jardins du Palais Longchamp, où la jauge a été augmentée à 3 700 personnes. Il fallait bien ça pour accueillir quelques-uns des plus grands noms du jazz international : Herbie Hancock, Marcus Miller, Ahmad Jamal, Larry Graham, Chick Corea, Stanley Clarke… « Nous avons la volonté de développer encore le festival, promet Bernard Souroque, et nous comptons bien ramener de grosses surprises à l’avenir ! »

.

Festival Jazz des cinq continents Du 18 au 26 juillet www.festival-jazz-cinq-continents.com

été 2011

8e art magazine

57



dossier FESTIVALS musiques interdites 8

Musiques interdites

Pour que la lumière vive...

Du 7 au 9 juillet, les musiques interdites résonneront dans le parc du Château Pastré. Et l’on se souviendra… Par Michel Apicella

« En 1942, la comtesse Lily Pastré avait fait jouer Le Songe d’une nuit d’été de Shakespeare, avec des artistes juifs… à la barbe de la Gestapo ! » Michel Pastore est encore admiratif : « Ce qu’elle a fait était alors réellement interdit ! » Comme un hommage, le directeur du festival est fier de pouvoir faire entendre cette année ses « Musiques interdites » au Château Pastré, refuge des artistes, intellectuels, communistes, juifs et autres traqués par les nazis durant la Seconde Guerre mondiale. Du 7 au 9 juillet, on se souviendra que ce lieu est bien plus qu’un joli parc où il est bon de venir faire son jogging… Pour rappel, ces « musiques interdites » sont les œuvres censurées par les nazis pour raisons raciales (car composées par des juifs), ou parce que considérées comme « dégénérées », s’éloignant trop du cadre formel défini par Wagner, Beethoven et Bruckner. La dictature stalinienne contribua elle aussi à enrichir le répertoire du festival en interdisant systématiquement toute œuvre s’éloignant du carcan esthétique approuvé par le Parti. Depuis 2004, Michel Pastore fait la lumière sur ces musiques passées sous silence. La sixième édition du festival débutera par un hommage à Gustav Mahler, dont on commémore cette année le centenaire de la mort. « Interdit » par les nazis, ses partitions furent brulées. Toutes ? Sa femme, qui avait fuit l’Autriche pour se réfugier chez Lily Pastré avant de partir pour l’Amérique avait emporté avec elle le manuscrit inachevé de la Xe Symphonie… Œuvre qui nous sera donnée à entendre le 7 juillet. Elle avait été composée par Mahler pour illustrer les Kindertotenlieder (Chants des enfants morts), poèmes écrits par Rückert suite à la disparition

Du coucher au lever du soleil, un « marathon musical » de plus de six heures brutale de ses enfants. Le slameur Abd al Malik les récitera en français. La mezzo-soprano Marie-Ange Todorovitch et le baryton Matthias Hausmann, eux, les chanteront en V.O.

Légende photo : Abd al Malik kiffe Mahler

L’allemand Norbert Glanzberg s’est lui aussi caché à Pastré durant la guerre. La seconde soirée du festival fera revivre ses Holocaust songs et Holocaust lieders, poèmes mis en musiques et déclamés cette fois par la comédienne Anouk Grinberg. La soirée de clôture sera en fait une nuit. Du coucher au lever du soleil, on assistera à un « marathon musical » de plus de six heures, animé par Frédéric Lodéon. Un final en apothéose intitulé Pour que l’esprit vive, du nom de l’association de Lily Pastré. Une quinzaine de musiciens solistes défileront pour interpréter les œuvres interdites de 18 compositeurs. Vers 4h30 du matin, le festival se conclura avec le Quatuor pour la fin du temps de Messiaen. Un moment qui s’annonce admirable : à l’aube, les premiers rayons de soleil, portés par les notes, viendront nous rappeler qu’à Pastré, la lumière a triomphé de l’obscurité. n

.

Festival musiques interdites Du 7 au 9 juillet Château Pastré www.musiques-interdites.eu

été 2011

8e art magazine

59



dossier festivals en bref 8

Images Contre Nature

Festival expérimental La 11e édition du festival international de vidéo expérimentale de l’association P’Silo se déroulera du 12 au 16 juillet au théâtre des Chartreux. Le Soleil 1923. Un film en « found footage » du Serbe Milan Zulic.

La vidéo expérimentale, kezaco ? « Ce n’est pas de la vidéo d’art » répond Hélène Bez, programmatrice du festival. « Ce n’est pas non plus du documentaire, ni de la fiction, poursuit-elle. Les films considérés comme expérimentaux proposent une réflexion sur l’image, une recherche sur le rythme… Mais les limites restent à définir ! » Bon, pour avoir une idée plus précise, on ira au théâtre des Chartreux où seront projetés 77 films « expérimentaux » sélectionnés parmi plus de 300 propositions venues du monde entier. Il y aura notamment des films en « found footage », fabriqués à partir d’« images trouvées » issues de films de toutes époques, remixées et réassemblées pour faire de nouveaux films… Expérimentaux, donc.

.

images contre nature Du 12 au 16 juillet Théâtre des Chartreux 04 91 42 21 75 www.p-silo.org

Musique en Cité(s)

Ils vont sortir les violons… Du 28 juin au 5 juillet, le festival international de musiques de chambre s’installe à la bastide de la Magalone. Depuis sa création en 2006, l’ensemble Des Équilibres explore les pages les plus rares du répertoire de la musique de chambre, du XVIIIe siècle à l’époque contemporaine. Sur l’invitation de la Cité de la musique, l’ensemble toulonnais va faire résonner ses violons à la bastide de la Magalone (construite, pour info, entre 1690 et 1710 sur des plans de Pierre Puget). Avec un programme tonitruant : « La musique de chambre dans la Hongrie du XXe siècle. »

L’ensemble Des Équilibres… Renversant.

.

musiques en cité(s) Les 28 juin, 1er et 5 juillet Bastide de la Magalone 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.com suite page 71

été 2011

8e art magazine

9

61



dossier FESTIVALS aix lyrique 8

Du Slam à l’Atlas

Une quête de la

parole rythmique Jazzmen européens, musiciens berbères, slameurs français et marocain… Ils fusionnent pour inventer une « parole rythmique » transcendant les langues et les cultures. Du slam à l’Atlas : récit d’une quête. Par Sandro Piscopo-Reguieg

© Gilles Abegg

Mot projectile Le slameur français Dgiz harangue le public de ses mots, « projectiles sonores », sous le regard de son pote marocain, le musicien Mehdi Nassouli.

9 été 2011

8e art magazine

63


dossier festivals 9 aix lyrique

Le mot, projectile sonore, fédère les musiciens de tradition marocaine comme les improvisateurs européens

« superbe énergie », Deval juge l’architecture musicale « bancale ». L’expérience mérite cependant d’être poursuivie. Cette fois, direction le Maroc. L’Atlas plus précisément, où l’on partira à la rencontre de la musique amazigh. Avec un véritable directeur artistique. Le pianiste Andy Emler veillera à insuffler la rigueur et l’uniformité manquantes au premier projet. Autour de son quintette de jazz « classique » viennent se greffer le slameur français Dgiz, la chanteuse berbère Fatima Tabaamrant (une « star » locale « dont on baise la main dans les rues d’Agadir », indique Deval) ; le slameur marocain Khalid Moukdar, qui rappe en arabe classique, ainsi que trois musiciens amazigh : Mehdi Nassouli (guembri, ghaïta), Youssef Mejjad (oud) et Omar El Asri (percussions). Du slam à l’Atlas prend forme. Tâtonnements Une première résidence a lieu à l’Institut français d’Agadir au printemps 2010. Durant une semaine, ces artistes européens et marocains, de quatre langues différentes (arabe dialectal darija, berbère, français) et une dizaine d’idiomes musicaux, essaient d’imaginer un dialogue commun. « Notre propos n’était pas de faire le bœuf, ce qu’on a déjà entendu des millions de fois, mais davantage de créer la rencontre entre les genres et les styles » souligne Andy Emler. Le directeur musical garde un sentiment mitigé de cette cession inaugurale : « Cela s’est assez bien passé, même si le travail a été lent. On a eu besoin de temps, et j’avoue que les musiciens européens ont plus facilement pénétré l’univers des musiques marocaines que l’inverse. » À leur décharge, précisons que les artistes marocains, de différentes cultures, se rencontraient pour la première fois et ne formaient pas

Du griot à l’Atlas Cette ambitieuse quête musicale a débuté à la Fondation Royaumont, en région parisienne. Une structure très active en matière de création artistique. Frédéric Deval, responsable du programme « musiques orales et improvisées », travaillait déjà depuis quelques temps sur le concept de parole rythmique, supposant que « cet élément structurant du langage - un mot utilisé pour son son et sa pulsation récurrente - peut donner lieu, même à notre époque de mondialisation, à un dialogue entre des individus issus de cultures différentes ». Pour vérifier son hypothèse, il conçoit en 2008 le projet Du griot au slameur : la rencontre de musiciens et slameurs français avec des chanteurs mandingues du Mali. Un demi-succès. Malgré une

64

8e art magazine

été 2011

« Le premier temps , chez toi, c est le troisième chez moi » un ensemble homogène. Ils devaient donc non seulement entrer en interaction avec le langage proposé par Emler et ses musiciens, mais aussi créer des ponts entre eux. Ainsi, la mise en route fut pour le moins difficile. La recherche de ce dialogue commun, peu évidente. Incompréhensions et résistances La rencontre, la découverte de « l’autre », les moments de partage, permettent progressivement de cimenter cette « communauté imaginée ». Une seconde résidence permettra de nouer des liens plus profonds. C’est maintenant aux Marocains de faire le grand voyage. Ils sont accueillis à l’abbaye de Royaumont en octobre 2010 pour une nouvelle semaine de travail avec leurs homologues européens. Frédéric Deval se souvient que là encore, les barrières culturelles furent difficiles à transcender : « Un jour, Andy Emler a essayé de leur faire travailler un rythme en tapant dans les mains, pensant qu’un quart d’heure serait suffisant pour que chacun le maîtrise : trois quarts d’heure plus tard, ils y étaient toujours ! C’est

© Gilles Abegg

« Les premières œuvres de Monteverdi étaient proches du parlé. La force et la musique de la langue étaient alors prédominantes. L’évolution vers le bel canto virtuose fut plus tardive... » Pour Bernard Foccroulle, il existe un lien évident entre l’opéra des origines et le slam, art basé selon lui sur « la rapidité d’invention, la force poétique des mots et la projection verbale ». Ce lien, c’est la « parole rythmique », nous apprend le directeur du festival d’Aix : « Elle fait émerger les racines communes, mais profondément enfouies, liant des univers supposés étanches comme les cultures classique et urbaine, l’orient et l’occident. » La parole rythmique abolit les frontières historiques, géographiques et culturelles que dressent les hommes entre eux. Du slam à l’Atlas suit ce fil rouge : entre les aphorismes rythmés de la chanteuse berbère Fatima Tabaamrant, et le flow slamé de Dgiz ou de Khalid Moukdar, la rencontre a lieu. Le mot, projectile sonore, fédère les musiciens de tradition marocaine comme les improvisateurs européens dans un rêve transculturel et multilingue. Car au commencement était la parole rythmique…

FUSION Musiciens européens et marocains ne forment plus qu’un seul ensemble. Au fond à gauche, Andy Emler. À côté de lui, la chanteuse amazigh Fatima Tabaamrant.


© Gilles Abegg

RYTHME Ils sont marocains tous les deux. Mais avant de se rencontrer, le musicien Mehdi Nassouli (à gauche) ne connaissait rien au slam en arabe classique de Khalid Moukdar. Et inversement. La parole rythmique les a réunis.

« Nous avons réussi à obtenir un son cohérent global, avec, comme références constantes, la parole rythmique, le slam, le chant » là qu’apparaît l’écart entre les cultures. La pensée musicale et la pensée rythmique sont fortement liées au contexte historique de sa création puis de sa performance originelle. En guise d’exemple, Mehdi Nassouline, extraordinaire polyinstrumentiste marocain disait à Andy ’’le premier temps chez toi, c’est le troisième chez moi.’’ » Il faudra toute la patience et l’assiduité d’Andy Emler pour parvenir à effacer les « incompréhensions » et « résistances ». Ainsi en sera t-il de sa relation avec la chanteuse Fatima Tabaamrant : « Au début, elle ne voulait pas improviser à la voix en duo avec le piano, explique t-il. Le deuxième jour, j’ai essayé autre chose : plutôt que d’accompagner harmoniquement, j’ai imité un instrument de percussion avec les graves de mon piano, pour rester dans un contexte sonore plus ou moins afro-maghrébin. Mise à l’aise, elle a commencé à chanter. » Peu à peu s’élabore un discours cohérent dans lequel chacun trouve sa place. La « fusion » relativement convenue des premiers moments laisse place à une profonde interpénétration des univers musicaux, créant un système neuf. Andy le perfectionniste est fier de ses troupes : « Nous avons réussi à obtenir une unité d’orchestre, un son cohérent, global, avec comme références constantes, la parole rythmique, le slam, le chant. » Le 15 juillet, Khalid, Mehdi, Dgiz, Fatima, Andy et tous les autres seront à Aix-en-Provence. De la scène du Grand Saint-Jean, ils feront retentir la parole rythmique. Et lanceront au public leurs mots projectiles. n

Programme

La parole rythmique en 4 concerts « Cycle de la parole rythmique en quatre concerts », Du slam à l’Atlas propose au public du festival d’Aix-en-Provence de s’imprégner des cultures musicales de chacun des protagonistes de cette aventure musicale lors des trois premiers concerts à l’Hôtel Maynier d’Oppède, avant un final en apothéose. Le 11 juillet, L’esprit du groove sera consacré au jazz, avec un trio piano - contrebasse - batterie autour d’Andy Emler. Le lendemain, c’est Le slam ou le mot projectile, qui sera à l’honneur avec le slameur Dgiz. Et le 13 juillet, L’Atlas ou la ritournelle amazigh nous fera découvrir la musique traditionnelle berbère de Raissa Fatima Tabaamrant. Le cycle se conclue le 15 juillet au Grand Saint-Jean avec le rassemblement des treize musiciens européens et marocains pour le concert final L’appel de l’Atlas. Du Slam à l’Atlas Du 11 au 15 juillet Festival d’Aix-en-Provence www.festival-aix.com

été 2011

8e art magazine

65


6

dossier festivals 9 aix lyrique

le Festival d’Aix en

opéras et 2 expos

Premières fois Une commande du festival d’Aix. Car Bernard Foccroulle a pour ambition d’instaurer « un nouvel équilibre entre répertoire et création contemporaine ». Il a donc demandé au dramaturge Joël Pommerat de mettre en scène l’un de ses propres textes, Grâce à mes yeux. Oscar Bianchi en composera la musique. Ensemble, ils créent leur premier opéra. Thanks to my Eyes Les 5, 6, 8, 9 et 11 juillet Théâtre du Jeu de Paume

© K. Howard

© K. Howard

Mozart, classique

Un Nez… monumental

Ce n’est pas le plus célèbre des opéras de Mozart… Mais sachez que les spécialistes rangent La Clemenza dans la catégorie des chefs-d’œuvre de la maturité du compositeur. On ira le vérifier dans cette mise en scène « classique » en costumes d’époque. Avec l’immense Sir Colin Davis à la baguette. La Clemenza di Tito Les 7, 10, 13, 15, 19 et 21 juillet Théâtre de l’Archevêché

Un beau matin, Kovaliov s’aperçoit qu’il a perdu son nez. Il se lance alors dans une folle course-poursuite à travers Saint-Pétersbourg afin de mettre la main sur son appendice nasal en fugue… La nouvelle de Gogol fournit un sujet cocasse à l’opéra pétaradant de Dimitri Chostakovitch. Pour cette œuvre à l’ironie mordante, l’artiste sud-africain William Kentridge a créé une installation satirique, une performance poétique, un collage technologique. Après sa création triomphale au Metropolitan Opera de New York, cette coproduction internationale est présentée en première européenne à Aix avec ses gigantesques La polémique de l’année ? toiles peintes, ses projections vidéo À l’image du Don Giovanni de Tcherniakov, ayant suscité en 2010 autant de bravos que virtuoses et son nez géant poursuivi de huées ; cette Traviata (avec Natalie Dessay) sera peut-être la polémique aixoise de par une foule de personnages pris de l’année… Il fallait en effet un regard neuf sur l’opéra de Verdi que les amateurs d’art démence. Monumental et jouissif. lyrique connaissent sur le bout des doigts. Pour cette création, la mise en scène de JeanLe Nez François Sivadier s’annonce donc pleine de surprises… Bonnes, espérons. Les 8, 10, 12 et 14 juillet La Traviata Grand Théâtre de Provence Les 6, 8, 9, 12, 14, 16, 18, 20, 22 et 24 juillet Théâtre de l’Archevêché

Un Nez, deux expos

À l’atelier Cézanne, une sculpture animée de William Kentridge tourne sur elle-même et fait jaillir d’un enchevêtrement de fils de fer et de papiers la silhouette de Chostakovitch, celle d’un nez en cavalier, ou même un portrait de Staline… À la Cité du Livre, I am not me, the horse is not mine montrera huit petits films réalisés par Kentridge en préparation de cet opéra. Du 22 juin au 3 septembre

Empire multimédia

Haendel vu du Japon Pour mettre en valeur la dimension bucolique de cette pastorale, Bernard Foccroule a tenu à ce que le spectacle se déroule sur la scène fleurie du Grand Saint-Jean. Et il en a confié la mise en scène au japonais Saburo Teshigawara qui a notamment imaginé une « chorégraphie d’arbres »… Prometteur. Acis and Galatea Les 9, 10, 12, 13, 16, 17, 19, 20, 22 et 23 juillet Domaine du Grand Saint-Jean

Un double voyage dans le temps et l’espace. Celui de deux créateurs d’aujourd’hui, le compositeur Jérôme Combier et l’artiste vidéaste Pierre Nouvel, partis sur les traces d’un écrivain et de son personnage, W.G. Sebald et Jacques Austerlitz dont les natures réelle et fictive sont inextricablement mêlées. Un comédien, des images vidéo et six instruments mettent l’espace en mouvement et nous conduisent dans un univers à la fois onirique et enraciné dans l’histoire du XXe siècle. Austerlitz n’est pas vraiment un opéra, car il n’y a pas ici de voix chantées. Un projet multimédia… Une forme nouvelle. festival d’aix-en-provence

.

Austerlitz Les 19 et 20 juillet Théâtre du Jeu de Paume

66

8e art magazine

été 2011

Du 5 au 25 juillet 08 20 92 29 23 www.festival-aix.com




dossier festivals en bref 8

Aix en baroque

Aix 1613, capitale du baroque Le quinzième festival de musiques patrimoniales d’Aix s’installe à la chapelle du Sacré-Cœur du 2 au 7 juillet. Au XVIIe siècle, Aix fut un haut lieu de la musique baroque… Elle le redevient le temps d’un festival, se déroulant à la chapelle du Sacré-Coeur construite, justement, au XVIIe siècle. Un événement à l’initiative de l’ensemble Les Festes d’Orphée, créé en 1986 et fort d’un chœur d’une trentaine de chanteurs. Au programme de cette quinzième édition : une conférence (musicalement) illustrée sur les maîtres baroques en Provence, des polyphonies françaises, des œuvres de Monteverdi, et un « divertissement provençal ».

.

aix en baroque Les 2, 3, 5 et 7 juillet Chapelle du Sacré-Cœur - Aix-en-Provence 04 42 16 11 70 www.orphee.org

Beaux comme un chœur.

Festival Côté Cour

Les notes et les mots, un “conflit harmonique” Du 9 au 24 juillet, le petit frère du festival d’art lyrique d’Aix propose une programmation aussi éclectique qu’ambitieuse.

Pendant que les notes et les mots argumentent, la danse triomphe…

Depuis sa création en 1998 sur les cendres du festival des Voix Off, Côté Cour a pour ambition de « faire découvrir des voix nouvelles dans des lieux appartenant au patrimoine aixois ». Cette année, le festival s’installe donc au musée Granet, au cloître des Oblats, et sur la cour de l’Hôtel de Ville pour une édition consacrée à « la dialectique entre parole et musique, leur harmonique conflit, le chant syllabique soumis au texte ou la vocalise qui brise le mot ». Le tout sera notamment illustré par un « Djazz Oratorio », un concert de fado, et une « rencontre » entre Shakespeare et Purcell. Vaste programme.

.

festival côté cour Les 9, 17, 19, 24 et 27 juillet Aix-en-Provence 06 83 60 19 80 www.festival-cotecour.org

été 2011

8e art magazine

69


Festival d’avignon

du printemps, ils font surgir

...

À l’automne de leur vie, ils célèbrent le printemps. Un groupe de danseurs amateurs âgés de 60 à 88 ans s’est constitué à Marseille autour du chorégraphe Thierry Thieû Niang. Les 14 et 15 juillet, leur spectacle … du printemps sera à l’affiche du Festival d’Avignon. Une belle aventure.

C’est une première. Jamais des amateurs n’avaient été programmés dans le « In » du Festival d’Avignon. Emmenés par le chorégraphe Thierry Thieû Niang, ces 28 femmes et hommes, âgés de 60 à 88 ans, présenteront une évocation dansée du Sacre du printemps. Une partition qui porte haut les élans et les souffles de cette communauté incroyablement vivante : des êtres sans fard, qui se donnent pleinement au présent.

Par Sandro Piscopo-Reguieg

« Pas là pour faire de la gym » La plupart n’avaient jamais pratiqué la danse avant leur rencontre avec le chorégraphe. C’était en 2005, à Marseille, au théâtre du Merlan. Thierry Thieû Niang, qui travaille aussi bien avec des artistes professionnels qu’avec des enfants et adultes amateurs, a l’idée de proposer une expérience chorégraphique inédite, reposant entièrement sur des personnes âgées. « J’étais à Marseille depuis peu, se souvient-il. Ces gens, porteurs d’une mémoire, je devais les rencontrer afin de mieux m’imprégner de cette ville. » Aussi, il s’agissait de « casser l’image du vieux qui déambule, qui joue à la pétanque... » Le projet séduit l’équipe du Merlan. Petites annonces,

70

8e art magazine

été 2011


dossier FESTIVALS

la danse « Thérèse arrive aux répétitions avec sa canne, la pose pendant trois jours pour danser, et repart… avec sa canne ! »

© Marc Strub

© Marc Strub

avignon 8

bouche à oreille… Peu à peu, un groupe se constitue autour du chorégraphe. Ces retraités, issus de milieux sociaux différents, seront unis par la danse. Les ateliers prennent forme à raison de trois jours consécutifs par mois. Pour des répétitions interminables : souvent plus de huit heures chaque jour. Amateurs ou pas, Thierry déploie en effet toute son exigence de chorégraphe. « Nous n’étions pas là pour faire de la gym rééducative ! Mais pour se réinventer ; chercher, à travers son propre mouvement, la question du temps et de la mémoire. » Il invite ses danseurs à se replonger dans leur passé. Certains, par exemple, lui apportent leurs vieilles photos… « J’en ai tiré la matière chorégraphique pour les aider à pouvoir inventer leur propre danse. » Leur apprendre à danser ? L’idée n’a jamais traversé l’esprit du chorégraphe. Son ambition était toute autre : « Il fallait faire surgir la danse. » Loin du culte de la performance, dans une fragilité assumée et revendiquée, le chorégraphe aide chacun de ses danseurs à « rendre positif ce corps fatigué ». En se réappropriant leur corps, ils retrouvent confiance en eux, perdent leurs habitudes de « petits vieux ». « Désormais, ils ne gardent plus leurs petits-enfants le weekend ! », assure Thierry Thieû Niang. « On s’adresse à eux comme à des hommes et des femmes, pas comme à des papys et des mamies ! Ces gens ne veulent plus qu’on leur demande tout le temps si ça va ou s’ils ont besoin de notre aide pour monter les escaliers. » Il cite aussi l’exemple de Thérèse, qui « arrive aux répétitions avec sa canne, la pose pendant trois jours pour danser, et repart... avec sa canne ! » Pendant deux saisons, les ateliers du Merlan donnent lieu à des présentations publiques en fin d’année. Le groupe devient ensuite nomade et, de 2008 à 2010, les ateliers de Thierry Thieû Niang

9 été 2011

8e art magazine

71


dossier festivals

© Marc Strub

9 AVIGNON

Cercle De leurs corps anonymes et vieillissants, ils questionnent la figure du temps à l’intérieur d’une ligne chorégraphique simple : le cercle. « On montre souvent les personnes âgées bouger de façon fragmentée, explique Thierry Thieû Niang. Or, je voulais aborder la question du renouveau, du mouvement continu, du temps qui passe. » En courant ou en marchant, mais sans jamais abandonner le lien qui les unit, ils recomposent à l’infini une spirale dont surgissent mille et une images, comme autant de rites et de récits, de farandoles enfantines et de processions funéraires, de fins et de recommencements.

sont successivement accueillis (dans le désordre) à la Friche Belle de Mai, au studio Kelemenis, au BNM, à Montévidéo, aux Bancs Publics… Le projet attire la curiosité du metteur en scène Patrice Chéreau. Celui-ci invite les séniors à présenter leur travail à Paris. Et pas n’importe où : au Louvre. Ils font forte impression. « Il n’est nullement la peine de faire de grands sauts pour parvenir à être émouvant, s’exclame Thierry Thieû Niang. Les professionnels qui ont assisté aux ateliers l’ont bien compris. » Le buzz commence à prendre…

Pour sensibiliser son groupe à l’histoire de la danse, Thierry leur fait découvrir les grandes œuvres du répertoire. La chorégraphie de Pina Bausch sur Le Sacre du printemps de Stravinsky les fascine. C’est décidé. Thierry et sa petite troupe (assistés de Jean-Pierre Moulères) commencent à travailler sur ce qui deviendra … du printemps en septembre 2010. Une première version du spectacle est présentée trois mois plus tard au Ballet National de Marseille. Les organisateurs du Festival d’Avignon étaient dans la salle. La proposition ne tarde pas : les 14 et 15 juillet, les séniors se produiront

72

8e art magazine

été 2011

© Marc Strub

… du printemps… à Avignon


dossier FESTIVALS avignon 8

Thierry Thieû Niang : Chéreau, Duris, Ascaride… et les Baumettes

© Jean-Louis Fernandez

C’est durant la première partie de sa vie que Thierry Thieû Niang a développé son goût pour l’échange, la pédagogie et la dynamique de groupe. Il fut en effet instituteur à Strasbourg, puis psychomotricien pour Médecins sans Frontières avant de se mettre à la danse sur le tard, à l’âge de 25 ans. « Au milieu des années 80, il y avait une certaine effervescence autour de la danse contemporaine. Les hommes étaient recherchés comme une espèce rare ! » Très vite, il imagine ses premières chorégraphies. Puis il parcourt la France, de résidences en collaborations, avant de se fixer à Marseille en 2001. Là, il multiplie les projets sans oublier de se consacrer aux amateurs. Personnes âgées, mais aussi adolescents autistes (Au bois dormant, 2008, avec Marie Desplechin et Patrice Chéreau), et détenus de la prison des Baumettes (avec Lieux Fictifs). Des expériences qui nourrissent sa réflexion d’artiste, et qui lui seront notamment utiles dans son travail avec Romain Duris pour La Nuit juste avant les forêts cosigné avec Patrice Chéreau en 2010. La même année, il effectue la mise en scène d’un opéra contemporain pour le festival d’Aix (Un retour) et dirige Ariane Ascaride au festival d’Avignon (Proposition d’un jour d’été). Il y sera doublement de retour cette année. Avec … du printemps, ainsi que la nouvelle création de Patrice Chéreau, I Am The Wind. Le chorégraphe a quitté Marseille il y a quelques mois. Il est aujourd’hui artiste associé à la Comédie de Valence et au Théâtre des Tanneurs de Bruxelles. Mais il promet : « Travailler avec des stars permet de ne pas se poser de question : je peux descendre à Marseille chaque mois pour poursuivre mes ateliers avec les détenus des Baumettes et les personnes âgées... Si je ne le fais pas, ils vont me lyncher ! » www.thierry-niang.fr

dans le plus prestigieux des festivals. Une « consécration » pour Thierry, fier de prouver qu’ « un travail avec des amateurs peut s’inscrire dans la durée ». Depuis la genèse du projet il y a presque six ans, le groupe a peu évolué. « Plus de la moitié de ceux qui iront à Avignon sont là depuis le début », se félicite le chorégraphe. Cinq danseurs originaires de Valence sont venus compléter le casting. « Car j’ai eu beaucoup de mal à trouver des hommes à Marseille ! » Il s’amuse d’ailleurs qu’avant les répétitions, « les célibataires marseillaises se battent pour héberger les Valentinois chez elles ». Une vraie complicité unit aujourd’hui le groupe de danseurs et le chorégraphe. « Je ne suis pas leur fils ni leur petit-fils ; ils ne sont pas mes parents, mais travailler avec eux m’a transformé. Je les considère comme des camarades, des amis. C’est une très belle leçon de vie. » n

.

festival d’avignon ... du printemps Les 14 et 15 juillet au gymnase du lycée Saint Joseph www.festival-avignon.com

été 2011

8e art magazine

73



festival les voix du Gaou 8

« Chinese Man ne connaît pas la crise ! » Chinese Man, c’est un trio basé à Mar Zhei (Marseille). Cet été, ils vont tenter d’envahir l’île du Gaou armés de leurs samples imparables. Rencontre avec Jonathan alias High Ku, dj-producteur 3e dan. Par Bertrand Ors

« En live, le DJ mixe les images pour les mettre en adéquation avec la musique »

Comment peut-on décrire la musique de Chinese Man aux jeunes disciples qui n’ont pas encore été initiés ? Nous traversons toutes les disciplines. Notre musique part du sample avec des méthodes de production inspirées du hip hop. Mais là où le hip hop se limite souvent au funk et à la soul, nous dérivons vers d’autres ambiances : reggae, drum & bass, musiques du monde… Chinese Man, c’est un hip hop mâtiné de plein d’influences. Des influences asiatiques, aussi ? L’Asie, c’est un continent comme un autre dans lequel on peut éventuellement puiser des samples. Le délire chinois, c’est plutôt pour la com’ et l’identité visuelle ! Sur notre album Racing with The Sun, on a bien un morceau avec une chanteuse chinoise, mais aussi beaucoup d’autres sons…

Les Voix du Gaou île de beautés sonores L’île du Gaou est reliée à la commune de Six-Fours-lesPlages par une passerelle. Ici, on assiste aux concerts en pleine nature, la tête dans les étoiles. On savoure. Car Les Voix du Gaou est un festival parvenant à allier cadre paradisiaque et exigence artistique. C’est suffisamment rare pour être souligné. Du 16 au 29 juillet, cette quatorzième édition reste fidèle à ces valeurs : Jamiroquai, Texas, Louis Bertignac, Angus & Julia Stone, Lilly Wood and The Prick, Jack Johnson, Catherine Ringer, Cocoon, Ben l’Oncle Soul, Yannick Noah, Jimmy Cliff, Dub Inc… Dix dates pour près de quarante concerts répartis sur deux scènes. Du 16 au 29 juillet - Six-Fours-les-Plages www.voixdugaou.fr

Racing With The Sun est sorti en avril. Depuis, vous enchaînez les dates… Nous avons donné le coup d’envoi de la tournée au Dock des suds dans la foulée de la sortie de l’album. Depuis, nous sommes sur les routes : on a joué à Paris (au Bataclan), Bourges, Strasbourg, Bruxelles… C’est pratiquement toujours complet et les retours sont bons. Chinese Man, c’est une petite entreprise qui ne connaît pas la crise ! Et Chinese Man en live, c’est un vrai spectacle ! Oui, nous utilisons beaucoup la vidéo. Elle fait partie intégrante du live, au même titre que les lumières, la déco… Il y a un gros travail de synchro entre sons et images. Le DJ alterne les caméras, mixe les images, pour les mettre en adéquation avec la musique. Pour notre concert au Gaou, il y aura aussi quelques invités : Taïwan MC (qui est en fait parisien), un joueur de trombone, et Héru, un MC indonésien avec qui nous avons sympathisé lors de notre tournée en Asie du Sud-Est. Il intervient d’ailleurs sur l’album. Le Gaou, c’est un bon festival. Ça sera cool de faire découvrir ça aux Indonésiens ! n

.

chinese man Le 28 juillet au festival Les Voix du Gaou www.chinesemanrecords.com

été 2011

8e art magazine

75



festivals en bref 8

Moussu T e lei Jovents. Aux Estivales, ils déverseront leur « blues provençal ».

Les Estivales d’Allauch

Théâtre, musiques et danse se donnent rendez-vous au Théâtre de Nature et à la Bastide de Fontvieille durant tout le mois de juillet.

.

les estivales d’allauch Du 5 au 31 juillet Bastide de Fontvieille et Théâtre de Nature - Allauch 04 91 10 49 20 estivales.allauch.com

Joli coup réalisé par les Estivales, avec une onzième édition très variée. On aura du théâtre avec l’irrévérencieux Cabaret des hérétiques, l’onirique Blanche Neige des frères Grimm, les drolatiques Fourberies de Scapin et la (forcément) pagnolesque Manon des sources. De la musique avec The Blue Turtle (qui reprend des tubes pop à la sauce jazzy), Et toi tu marcheras dans le soleil, spectacle musical autour de Rimbaud, L’Amérique du Nord au Sud, dédié aux musiques noires et aux danses sud-américaines, Liszt et le romantisme, par Nathalie Lanoë accompagnée de Philippe Bride, et un concert de Moussu T e lei Jovents, inventeurs du « blues provençal ». Enfin, la danse sera dignement représentée par le Ballet d’Europe.

Le thème de l’année est bien le vert. Si cette photo est rouge, c’est parce qu’elle date de l’année dernière, quand la couleur mise à l’honneur était le rose. Vous suivez ?

Les Chromatiques

Fos sur vert Du 7 au 10 juillet, le festival de la couleur va repeindre Fos en vert… Après le rouge, le bleu, l’orange, le violet, le jaune et le rose, 2011 sera donc vert. En effet, depuis 2005, le festival Les Chromatiques met chaque année une couleur différente à l’honneur. Les rues, balcons, arbres, et habitants de Fos vont donc passer quatre jours en monochrome. À côté des multiples spectacles, expos, apéros et repas collectifs, on assistera notamment à une parade d’insectes géants dans le centre historique. Il y aura aussi des Indiens, des clowns et du flamenco. Question : vont-ils oser jouer du théâtre ?

.

les chromatiques Du 7 au 10 juillet Fos-sur-Mer 04 42 47 71 96 www.leschromatiques.com

9 été 2011

8e art magazine

77


festivals 9 en bref

Charlie Jazz Festival

Shut up and jazz Du 1er au 3 juillet, ça jazze à Vitrolles. Née de la passion d’une poignée de Vitrollais pour le jazz, l’association Charlie Free organise depuis quatorze ans son festival sous les platanes tricentenaires du Domaine de Fontblanche. Au programme de cette nouvelle édition : une légende, le saxophoniste Charles Lloyd et son New Quartet ; une invitation au voyage avec la musique métissée du Majid Bekkas Sextet ; et une institution : l’Orchestre National de Jazz, mené par Daniel Yvinec, qui présentera son nouveau projet, Shut up and Dance. On sait donc ce qu’il nous reste à faire…

.

charlie jazz festival Du 1er au 3 juillet Domaine de Fontblanche - Vitrolles 04 42 79 63 60 charliejazzfestival.com

Les Nuits d’Istres

L’ONJ (Orchestre National de Jazz) sous la direction de Daniel Yvinec clôturera le Charlie Jazz Festival en présentant son étonnant projet Shut Up And Dance, composé par John Hollenbeck.

Rires et chansons Cyndi Lauper dans un pavillon du XVIe siècle… C’est possible. Et ça se passe aux Nuits d’Istres.

© A. Tiaffay

Festival familial et sympa, les Nuits d’Istres a patiemment bâti son succès avec une programmation grand public mêlant chanson française, humour, et vieille gloire internationale sur le retour. Cette année, nous aurons donc respectivement droit à Zaz, Anne Roumanoff et Cyndi Lauper. Ajoutons à cela Gotan Project et Brian Setzer, ex-leader des Stray Cats, et pape du rockabilly. Familial, donc. Au sens large. Bon, ça se passe quand même au Pavillon de Grignan, petit château bâti vers 1575. Un lieu historique où se pressent 1 700 spectateurs chaque soir. La nouveauté, c’est que les jardins accueilleront désormais avant et après les spectacles, des « cocktails dinatoires » proposés par le chef étoilé istréen Sébastien Richard (40 euros + le prix du billet de concert). Cindy Lauper à Istres. Toujours aussi fun ?

.

les nuits d’istres Les 3, 6, 7, 9 et 12 juillet Pavillon de Grignan - Istres 04 42 81 76 00 www.istres.fr

9 78

8e art magazine

été 2011




festivals en bref 8

Festival de Piano de La Roque d’Anthéron

crédit : Florian Bruger

Le piano classe mondiale

.

Ici, les pianistes sont de vraies « Roque-stars ».

Le mois d’août à La Roque, c’est un hommage à Liszt, un musée imaginaire et 86 concerts. Depuis 31 ans, La Roque d’Anthéron s’est imposée dans le paysage musical et pianistique mondial. Si les sites du festival se diversifient depuis plusieurs années, le parc du Château de Florans en demeure le point névralgique. Cette année, parmi les 86 concerts Francis Huster sera Dom Juan. Et Francis Perrin, Sganarelle. À moins que ça ne soit l’inverse ?

Festival de Piano de La Roque d’Anthéron Du 22 juillet au 21 août Parc du Château de Florans La Roque d’Anthéron 04 42 50 51 15 www.festival-piano.com

au programme, 20 seront consacrés à Franz Liszt dont on fête le 200e anniversaire. Brigitte Engerer sera à ce titre une invitée de marque. La Roque se délocalisera pour un temps à Aix, au musée Granet, où Le Musée imaginaire des musiciens confrontera œuvres picturales et musicales. Le 21 août, le concert de clôture sera retransmis en direct sur Arte… Classe, mais c’est toujours mieux en live. Festival Côté cour

Mini Avignon Un festival de théâtre dans la cour d’un château médiéval… À Salon de Provence aussi. Ancienne résidence des archevêques d’Arles devenue caserne au XIXe siècle, le château de l’Empéri est aujourd’hui un musée militaire. Et l’été, on y joue du théâtre. Pour sa 22e édition, le festival Côté Cour reste fidèle à son ambition : allier exigence de qualité et « divertissement ». La preuve en quatre spectacles : une vision contemporaine des Misérables, le oneman-show de l’humoriste marseillais Ali Bougheraba, un Dom Juan créé par Francis Huster et Francis Perrin, et Les 39 marches d’Éric Métayer, où planera l’ombre d’Hitchcock…

.

Festival coté cour Les 5, 7, 9 et 11 juillet Château de l’Empéri Salon de Provence 04 90 56 00 82 www.theatre-cote-cour.fr

9 été 2011

8e art magazine

81



festivals en bref 8

Les Chorégies d’Orange

40 ans et 2 Verdi Au théâtre antique d’Orange, on célèbre les quarante ans des Chorégies. Sous le signe de Verdi.

En 2010, Puccini ; en 2011, Verdi ; en 2012, Rossini ?

.

Les Chorégies d’Orange Les 9, 11, 12, 16, 30 juillet et 2 août Théâtre antique d’Orange 04 90 34 24 24 www.choregies.com

Après une représentation d’Andromaque, le 17 juin, les Chorégies fêtent leur quarantième anniversaire avec deux opéras et deux concerts. Les 9 et 12 juillet, Aïda réunira aux côtés de la soprano américaine Indra Thomas et du ténor sud-américain Carlo Ventre les prestigieux interprètes internationaux que sont Ekaterina Gubanova, Andrzej Dobber et Giacomo Prestia. Le 30 juillet et le 2 août, on aura droit à un autre chef d’œuvre de Verdi, Rigoletto, chanté par le couple vedette de La Traviata 2009, Patrizia Ciofi et Vittorio Grigolo, avec en prime le baryton italien Leo Nucci, le plus grand interprète actuel du rôle-titre. Entre temps, un concert symphonique de Tugan Sokhiev (Symphonie n°5 de Tchaïkovski et Concerto n°3 pour piano et orchestre de Rachmaninov, le 11 juillet) et une IXe Symphonie de Beethoven (le 16 juillet) seront également au programme.

Festival de Châteauvallon

Amour, danse et flamenco De la nuit du fado aux nuits flamencas, Châteauvallon danse. Installé sur un site exceptionnel dominant la rade de Toulon, le Centre national de Châteauvallon fait son festival dans un amphithéâtre de plein air et un charmant petit théâtre couvert. Après Salif Keita, le Ballet Preljocaj et Luz Casal, le mois de juillet débutera par une « nuit du fado » (avec Cristina Branco). Ensuite, place à la danse contemporaine avec le Roméo et Juliette de Thierry Malandain par le Ballet Biarritz, et un spectacle en trois pièces du Béjart Ballet Lausanne. On termine en beauté avec deux « nuits flamencas » les 29 et 30 juillet. Où l’on fera notamment la rencontre de la sublime Fuensanta « La Moneta »…

Fuensanta « La Moneta », papesse du flamenco.

.

Festival de Châteauvallon Jusqu’au 30 juillet 795, chemin de Châteauvallon - Ollioules 04 92 22 02 02 www.chateauvallon.com

été 2011

8e art magazine

83




expo 9 l’orientalisme en europe

© Service presse Rmn-Grand Palais / Hervé Lewandowski

Eugène Delacroix Chasse au tigre, 1854 Huile sur toile 73 x 92 cm Paris, musée d’Orsay, legs d’Alfred Chauchard, 1910

86

8e art magazine

été 2011


expo l’orientalisme en europe 8

à Gérôme, la puissance de la couleur et de la lumière s’exprime dans la splendeur des costumes ou des paysages du désert ainsi que dans la représentation de la sensualité. Ils seront les sujets récurrents des artistes, plus attachés à cet orient « rêvé » qu’à une peinture fidèle de la réalité. Delacroix débarque à Tanger en 1832. Une révélation. Il ressent une énergie, une force, qu’il exprime dans les scènes de combat ou de chasse (ci-contre). Les grands palais et leur majestueuse architecture seront les décors de nombreux tableaux, comme celui d’Achille Zo représentant le plus fameux d’entre eux, l’Alhambra,

« L’Orient est devenu pour les intelligences autant que pour les imaginations une préoccupation générale » Victor Hugo

symbole des fastes de la civilisation arabe classique (voir p.90). Le harem et ses scènes de bain (légitimant la nudité) sera, de tous les thèmes abordés par la peinture orientaliste, celui qui connaîtra la plus grande fortune. Dans une vision toujours plus fantasmée. À ce titre, Le Rêve d’un Eunuque (p.88-89) est une hallucination :

Un mirage oriental Jusqu’au 28 août, la Vieille Charité accueille l’exposition L’Orientalisme en Europe : de Delacroix à Matisse. Où prédomine la vision d’un Orient fantasmé entre harems, vues du désert, et palais majestueux… Par Mustafa Bey

Après Bruxelles et Munich, la grande expo itinérante termine logiquement son périple à Marseille, « porte de l’Orient ». L’Orientalisme en Europe : de Delacroix à Matisse, c’est plus de 120 peintures et sculptures réalisées pour la plupart au XIXe siècle. Quand l’Occident regardait le monde arabe avec fascination… Une fascination qui débute après la campagne de Napoléon en Égypte (1798-1801). Les scientifiques et artistes qui accompagnaient cette expédition ont à leur retour inondé l’Europe de publications illustrées. Les représentations des ruines colossales des monuments pharaoniques envahis par les sables ont particulièrement frappé l’imagination des contemporains. L’Égyptomanie est née. L’Orientalisme suivra. Il faut en effet attendre les années 1830 pour que la rive sud de la Méditerranée devienne accessible aux Occidentaux. Avec la conquête de l’Algérie et les progrès des transports, les artistes seront nombreux à quitter les brumes de l’Europe pour l’Afrique du Nord, terre de tous les possibles. D’Ingres

n n n n n n n n

la femme, inaccessible objet du désir est accompagnée d’un « cupidon oriental » tenant un couteau, venant ainsi rappeler à l’homme castré sa terrible condition… Parallèlement, sous l’influence du réalisme puis du naturalisme, le regard des artistes se veut de plus en plus juste. Aux effets attrayants de l’imaginaire exotique succède bientôt un orientalisme descriptif. Des tons plus sourds, une lumière plus crue, traduisent l’âpreté et la frugalité de la vie quotidienne dans les régions préservées des influences européennes. Des images souvent mélancoliques, mais d’où se dégage une extraordinaire puissance évocatrice (p.91).

Mais déjà, au tournant du XXe siècle, le genre s’essouffle. Certains modernes continuent cependant à faire le voyage. Sur les traces de Delacroix, Renoir reprendra le thème de l’Odalisque, tout comme Matisse, beaucoup plus tard. Dans le chemin qui le mène vers l’abstraction, Klee fera quant à lui une étape décisive en Tunisie. Là, il notera dans son journal, le 16 avril 1914 : « La couleur et moi ne faisons plus qu’un. Je suis peintre. » n

.

L’ORIENTALISME EN EUROPE, DE DELACROIX À MATISSE Centre de la Vieille Charité 04 91 14 59 18 www.expo-orientalisme.be

été 2011

8e art magazine

87


expo 9 l’orientalisme en europe

n n n n n n n

n n n n n n n n

Jean Lecomte du Nouy Rêve d’Eunuque, 1874 Huile sur bois 39,3 x 65,4 cm

88

8e art magazine

été 2011


© Cleveland Museum of Art, don de Mrs. Noah L. Butkin pour son soixante-quinzième anniversaire.

l’orientalisme en europe 8

expo

n n n n n n n n

été 2011

8e art magazine

n n n n n n n

89


expo 9 l’orientalisme en europe

n n n n n n n n n n n n n n n

n n n n n n n n n n n

© Pau, musée des Beaux-Arts, photo Jean-Christophe Poumeyrol

Achille Zo Patio à l’Alhambra, vers 1850-1901 Huile sur toile 56 x 40 cm

90

8e art magazine

été 2011


expo l’orientalisme en europe 8

n n n n n n n n n n n n n n n n Léon Bonnat Le barbier nègre à Suez, 1876 Huile sur toile 80 x 58,5 cm

© Curtis Galleries, Minneapolis, Minnesota

n n n n n n n n n n n n n n n n

été 2011

8e art magazine

91


Jean Planque

Peintre raté, collectionneur inspiré Jean Planque en 1975


expo planque 8

Pablo Picasso Buste de femme endormie, 1970 Pastel sur carton 21 x 30 cm Fondation Jean et Suzanne Planque

© Succession Picasso 2011 - Photo : Luc Chessex

Photo : Luc Chessex

Paul Cézanne La montagne Sainte-Victoire vue des Lauves, 1901-1906 Aquarelle et crayon sur papier vélin 29,8 x 46,2 cm Fondation Jean et Suzanne Planque

Pour célébrer le dépôt de la collection Planque au musée Granet, une exposition en présente les fleurons : Cézanne, Picasso, Klee, Dubuffet et bien d’autres stars de la peinture du XXe siècle sont au rendez-vous. Par Élodie Dubarry

Elle était promise au nouveau musée cantonal des beaux-arts qui devait être construit sur le site de Bellerive, à Lausanne (Suisse). Un projet rejeté par référendum populaire en novembre 2008. La collection Planque a donc du partir à la recherche d’un nouvel écrin susceptible de mettre en valeur ses quelques 300 peintures, dessins et sculptures. Dans sa « quête d’idéal », Michel Pfulg, président de la fondation Planque, rêvait d’un lieu offrant « des collections ni trop riches, ni trop pauvres ». Ce « Planque a collectionné sera le musée Granet d’Aix-enles tableaux qu’il aurait Provence. À l’automne 2010, souhaité peindre » le mariage de raison est acté : les responsables de la fondation Planque signent avec la CPA et la Ville d’Aix une convention pour un dépôt temporaire de quinze ans au musée Granet des pièces de la collection. Pour célébrer l’événement, une exposition convie le grand public à venir découvrir durant tout l’été (du 11 juin au 2 octobre) les chefs d’œuvres du XXe siècle rassemblés par Jean Planque. Un collectionneur doué qui (et c’est bien pratique) était fasciné par Cézanne. Il a même passé quelques années à Aix sur les traces de son modèle. De quoi justifier une union qui, au premier abord, ne paraissait pas tellement évidente… « Le hasard sourit à l’art (…) l’art sourit à l’histoire », résume justement M. Pfulg. Pas la main, mais l’œil Jean Planque (1910-1998) est né dans une famille pauvre de la campagne vaudoise (Suisse). En 1945, il gagne une petite fortune en mettant au point un procédé révolutionnaire pour nourrir les porcs (sic). Il peut donc librement se consacrer à sa passion pour la peinture et, de 1948 à 1951, s’installe à Puyloubier au pied de la Sainte-Victoire, pour « refaire Cézanne sur nature ». Planque y

9 été 2011

8e art magazine

93


expo 9 planque

© ADAGP, Paris - Photo : Luc Chessex

Nicolas de Staël Marine, 1954 Huile sur toile 60 x 81 cm Fondation Jean et Suzanne Planque

mène une existence solitaire, dans un petit cabanon, et reprend les motifs du maître dans des compositions à l’huile ou à l’aquarelle. Par la même occasion, il noue des liens amicaux avec Louis Malbos, alors conservateur du musée Granet. Un musée qu’il « aimait passionnément », nous apprend Michel Pfulg. Au point que quelques années plus tard, il essaiera (sans succès) de convaincre Picasso de céder au musée aixois une vue de l’Estaque peinte par Cézanne.

© Succession Picasso 2011 - Photo : Luc Chessex

Pablo Picasso Arlequin, 1917 Huile sur panneau 21 x 17 cm Fondation Jean et Suzanne Planque

94

8e art magazine

été 2011

Entre temps, Jean Planque avait mis ses pinceaux au placard. « Il ne sut jamais se dégager entièrement des modèles admirés », explique le conservateur du musée Granet, Bruno Ely. Il affirme, diplomate : « Cézanne, Klee, Dubuffet, Picasso, lui obstruaient les yeux. » Planque n’avait pas la main, mais une chose est sûre : il avait l’œil. Il savait distinguer, dans une foule d’œuvres, le « tout beau tableau, intact, lourd, noir comme la nuit, tout lumière », comme il l’a écrit à Picasso. Un œil qui n’échappa pas à son compatriote Ernst Beyeler qui, ayant repris une galerie en 1954, lui proposa de l’assister dans ses choix. Il le charge de partir pour Paris et d’acquérir pour lui toutes les toiles qu’il Il savait distinguer, trouvera intéressantes. La collaboration dans une foule durera jusqu’en 1972 et la galerie Beyeler d’œuvres, le « tout deviendra l’une des institutions les plus beau tableau, intact, renommées d’Europe. lourd, noir comme la L’ami des peintres

nuit, tout lumière »

Pendant plus de quinze ans, Jean Planque va nouer des liens privilégiés avec les plus grands artistes. Le peintre raté savait entrer


Jean Dubuffet Opéra Bobèche, 1963 - Huile sur toile - 81,4 x 100,2 cm - Fondation Jean et Suzanne Planque

en empathie avec ceux qu’il admirait. « Cette passion inassouvie de la peinture, ces questions qu’il adressait sans cesse à l’audace des autres (…) l’ont singulièrement rapproché des artistes avec lesquels il dialoguait en connaissance de cause », analyse Bruno Ely. Le conservateur du musée Granet va même jusqu’à supposer que « d’une certaine manière, Planque a collectionné les tableaux qu’il aurait souhaité peindre ». Il se lie d’amitié avec Picasso, Dubuffet, Giacometti et bien d’autres. Au fil des visites dans les galeries, dans les ateliers ou chez les collectionneurs, au gré des rencontres et des occasions, Jean Planque finit par réunir, presque malgré lui, une impressionnante collection. « Elle mise entièrement sur la qualité et la cohérence des œuvres entre elles, juge Bruno Ely. Des liens se tissent ente

© ADAGP, Paris - Photo : Luc Chessex

les tableaux de peintres que rien ni personne n’avait imaginé pouvoir associer. » On ira le vérifier au cours de cette exposition opportunément intitulée Planque, l’exemple de Cézanne. n

.

collection planque, l’exemple de cézanne Jusqu’au 2 octobre Musée Granet 04 42 52 88 32 www.museegranet-aixenprovence.fr

été 2011

8e art magazine

95



portfolio rencontres d’arles 8

La photo res d’Arles i, t n o c n e R urd’hu ns, les Il y a dix a au numérique. Aujo manifeste. t s’ouvraieen ition s’ouvre par un d cette 41 llaé Par Michel

Rut Blees Luxemburg O, New York, 2010 Avec l’aimable autorisation de Rut Blees Luxemburg et de la Galerie Dominique Fiat, Paris

Apice

Une 41e édition certifiée « non conforme ». Sur l’affiche, le ton est donné. Une nouvelle ère débute pour les Rencontres, et celle-ci est actée par un manifeste. François Hébel a pour ambition de renouveler cette année le « coup » réussi il y a dix ans, quand il fut nommé directeur des Rencontres. En effet, en 2001, seulement 9 000 visiteurs s’étaient rendus aux expositions d’une institution qui, bien que légendaire, était sur le déclin. À son arrivée, Hébel dépoussière l’événement, instaurant une nouvelle politique de programmation désormais ouverte à la photo numérique. En 2002, suite aux attentats du 11 septembre, il présente Here is New York (Voici New York), première manifestation d’envergure consacrée à l’ère digitale, ouverte aux professionnels comme aux amateurs. Depuis lors, la fréquentation a augmenté de près de 20 % par an, le nombre d’expositions est passé de dix à soixante et le budget a été multiplié par cinq. L’année dernière, les Rencontres d’Arles ont ainsi réuni plus de 73 000 visiteurs. Pari gagné. Manifeste Dix ans après ce révolutionnaire Here is New York, Hébel enfonce le clou. « Le monde a changé, la photographie et son public aussi », explique-t-il pour introduire le manifeste From Here On (À partir

de maintenant), qui débute ainsi : « Tous, nous recyclons, nous faisons des copier-coller, nous téléchargeons et remixons. Nous pouvons tout faire faire aux images... » Signé par cinq artistes et directeurs artistiques, liés de longue date aux Rencontres, ce document « déclare un changement profond dans les usages de la photographie, engendré par la suprématie d’internet et de la création numérique dans l’accès et la diffusion des images ». Une monumentale exposition regroupant trente-six artistes (parmi lesquels Thomas Mailaender, voir p.100) illustrera ces nouveaux champs de la création photographique. De son mythique court-métrage La Jetée à son travail sur Second Life et la « galerie virtuelle », le réalisateur Chris Marker a très tôt cherché à utiliser la photographie de façon différente. Une exposition majeure lui sera consacrée, présentant des séries en noir et blanc réalisées durant ses voyages autour du monde, ainsi que son œuvre la plus récente, inédite et en couleur, prise dans le métro parisien (p.99). Mexique Une large partie de la programmation sera dédiée au Mexique. En commençant par des « vintages » de la révolution de 1910, premier moment de la photo documentaire moderne. Parallèlement à la très belle rétrospective consacrée à Graciela Iturbide, on verra aussi le travail de quelques jeunes artistes contemporains. Citons Ricas y famosas (p.101-103), une série de photographies signée Daniela Rossell, réalisée dans les hautes sphères de la société et de la politique mexicaines. En 2002, sa publication avait fait scandale et avait suscité l’indignation des médias. Dulce Pinzón nous conte quant à elle La véritable histoire des super-héros (p.104) alors que Fernando Montiel Klint dévoile de surprenants Actes de foi (p.106-107). Maya Goded, elle, est partie à la rencontre de sorcières et guérisseurs (p.105)... Enfin, La valise mexicaine présente les légendaires photographies de la guerre d’Espagne, prises par Robert Capa. Cette fameuse valise, que l’on croyait perdue, a été retrouvée avec plus de 4 500 négatifs…
au Mexique. La relève Autre temps fort, les trente ans du New York Times Magazine, célébrés avec une exposition démontrant l’excellence de cette publication en matière de photo documentaire et de portrait (p.108109). Comme chaque année, les nouveaux talents postuleront pour le « Prix Découverte ». Avec O (ci-contre), l’Allemande Rut Blees Luxemburg a toutes ses chances : l’œil aguicheur d’une actrice américaine, coupé par un autocollant bas de gamme incitant au commerce du sexe ; ou la profanation démesurée de la beauté et de l’éros, rendue visible le temps d’un battement de cils... Au même moment, le jeune Augustin Rebetez (p.98), lauréat « Photo Folio Review » en 2010, exposera ses images brutes, symboles d’une génération. From Here On… n

.

Rencontres d’arles Du 4 juillet au 18 septembre 04 90 96 76 06 www.rencontres-arles.com

9 été 2011

8e art magazine

97


portfolio 9 rencontres d’arles

Augustin Rebetez Tiré de la série Gueules de bois, 2009

98

8e art magazine

été 2011


portfolio rencontres d’arles 8

Chris Marker Passagers, 2008-2010 Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Peter Blum Gallery, New York.

été 2011

8e art magazine

99


portfolio

© Thomas Mailaender

9 rencontres d’arles

Thomas Mailaender Tourisme extrême Tirage Lambda, 75 x 100 cm

100

8e art magazine

été 2011


portfolio rencontres d’arles 8

Daniela Rossell Sans titre (Riches et célèbres) Méduse, 1999 C-print 30 x 40 cm Avec l’aimable autorisation de la galerie Greene Naftali, New York

été 2011

8e art magazine

101



Daniela Rossell Sans titre (Riches et célèbres) Harem, 2002 C-print 30 x 40 cm Avec l’aimable autorisation de la galerie Greene Naftali, New York


portfolio 9 rencontres d’arles

Dulce PinzÓn Série La véritable histoire des super-héros José Rosendo de Jesus, de l’État de Guerrero. Il travaille comme organisateur syndical à New York. Il envoie 700 dollars par mois.

104

8e art magazine

été 2011


portfolio rencontres d’arles 8

Maya Goded Guérisseurs mexicains, septembre 2006 Huasteca, San Luís Potosí, Mexico

été 2011

8e art magazine

105


portfolio 9 rencontres d’arles

Fernando Montiel Klint Actes de foi, 2009 Issue de la série Actes de foi

106

8e art magazine

été 2011


portfolio rencontres d’arles 8

Fernando Montiel Klint Artiste dans son atelier, 2008 Issue de la série Nirvana

été 2011

8e art magazine

107



Gregory Crewdson Julianne Moore (Pour le New York Times Magazine)



expositionse

galeries

S VERNISSAGesV

expos

Mues

Muséum d’Histoire Naturelle

Voyage à rome

Galerie d’art du Conseil général

jardin d’addiction Abbaye de Silvacane

Arman

Les Baux de Provence

Argila Aubagne

été 2011

8e art magazine

111


expos 9 Marseille

muséum d’histoire naturelle Palais Longchamp - 13004 Marseille 04 91 14 59 50 www.festivaldemarseille.com

Mues

de N + N Corsino Jusqu’au 9 juillet Une installation troublante autour de la danse et du nu, visible dans le cadre du festival de Marseille. Chorégraphes de l’image et réalisateurs du mouvement, N + N Corsino plongent leurs danseurs au cœur d’environnements virtuels. Dans ces mondes nouveaux, le mouvement trouve une liberté fascinante. Composée de cinq écrans, Mues (« se mouvoir » et « changer de peau ») règle une danse de nus s’exprimant avec une extrême sensualité, pris dans le ralenti d’une chute, le trouble d’un quasi-arrêt sur image. Par ce travail inédit, N + N Corsino atomisent la dernière frontière qui séparait encore la danse et le paysage. Une expérience…

Rétine Lelieu 85, rue d’Italie - 13006 Marseille 04 91 42 98 15 www.retineargentique.com C’est une adresse connue des photographes et amateurs éclairés. LeLieu partage les locaux du laboratoire photographique Rétine ouvert depuis avril 2009. Deux passionnés, Stéphane et Nicolas, tireurs, « amoureux du tirage photographique », conçoivent leur espace d’exposition comme la suite évidente du labo « pour poursuivre l’aventure du tirage jusque sur les murs ». Artistes émergents ou confirmés, amateurs, à leurs yeux tous peuvent trouver une place sur leurs murs. Cette situation privilégiée, d’observatoire de la création à la croisée des chemins de différents univers photographiques, conduit Rétine LeLieu à changer sa proposition d’exposition en un photorama renouvelé chaque semaine comme un rendez-vous systématique le jeudi à 19h afin de faire découvrir ces photos produites quotidiennement au laboratoire qui risqueraient de rester invisibles. Dans cet esprit, Rétine LeLieu devenu association de diffusion photographique, a imaginé une formule d’abonnement qui permettra à ce réseau de la création, des collectionneurs et des amateurs de se rencontrer et de bénéficier de conditions privilégiées sur l’acquisition d’œuvres et les diverses prestations de Rétine LeLieu. Prometteur et révélateur !

Michel Muraour Michel Muraour, 2011

9 112

8e art magazine

été 2011



expos 9 provence

Galerie d’art du

conseil général Hôtel de Castillon 21 bis, cours Mirabeau - 13100 Aix-en-Provence 04 42 90 03 67 www.culture-13.fr

Voyage à Rome Du 1er juillet au 18 septembre

Abbaye de Silvacane 2, avenue de l’Europe unie - 13640 La Roque d’Anthéron www.abbaye-silvacane.com www.cbmp.fr - www.circa.fr - www.fracpaca.org.fr Christophe Berdaguer et Marie Péjus Avec la collaboration des parfumeurs créateurs Les Christophs [Christophe Laudamiel et Christoph Hornetz)

Jardin d’addiction Du 25 juin au 25 juillet vernissage le 25 juin à 19h

© Berdaguer & Péjus. Photo : Cirva

Le corps est un capteur sensible aux moindres émanations extérieures. Chaque molécule est à même de modifier nos sens et notre esprit, de distordre notre rapport au monde… Les œuvres de Berdaguer & Péjus induisent souvent un type d’échanges psychiques et physiologiques avec le spectateur. […] « Dans le Jardin d’addiction, le visiteur n’est pas “touché” par des voies “traditionnelles” comme la vue, le son, la lecture… mais par des stimuli qui mettent en jeu directement son cerveau. Les parfums qui émanent de la plante sont modélisés à partir des odeurs de différentes substances (whisky, cocaïne, café, opium…) toutes responsables d’un état de dépendance chez l’homme. La forme de ce jardin s’inspire à la fois du monde végétal et du système neuronal (synapses, neurones) ; la chimie végétale et humaine sont “synthétisées” dans ce jardin de verre. »

François-Marius Granet - Au Colisée, un peintre au travail, huile sur papier marouflée sur toile, collection privée, Rome

Longtemps considéré comme le passage obligé et indispensable à toute formation artistique, le voyage en Italie et plus précisément à Rome, représentait un retour vivifiant aux sources de la civilisation occidentale. Du XVIIIe siècle à nos jours, les Provençaux furent nombreux à entreprendre ce périple initiatique. Cette expo nous montrera les travaux de vingt-sept d’entre eux : les Marseillais Chabaud, Hugues ou Papety, l’Aixois Dandré-Bardon, l’Arlésien Réattu… Installés à Rome, ils ont réalisé des œuvres qui repoussent la frontière de l’imaginaire et du rêve, du souvenir et de la mémoire. André Allar - Enfant des Abruzzes, 1873, bronze, Musée d’Orsay, Paris

114

8e art magazine

été 2011

Produit par le CIRVA. Œuvre réalisée en 2010 au CIRVA - Centre International de Recherche sur le Verre et les Arts plastiques. En partenariat avec le FRAC PACA. Exposition réalisée en partenariat avec la commune de La Roque d’Anthéron, en collaboration avec la mission Marseille-Provence 2013 pour Aix et le Pays d’Aix


expos provence 8

Les baux-de-provence

Aubagne

04 90 54 36 99 www.lesbauxdeprovence.com

04 42 03 49 98 www.aubagne.com - www.argila.fr

Arman

Argila

s’installe aux Baux-de-Provence

les 20 et 21 août

© François Fernandez

Jusqu’au 16 octobre

La grande nuit, 1994 292 x 413 cm, Acrylique et brosse sur toile Installée dans l’atelier de dessin

« Donner à voir et aussi donner à comprendre. » C’était le crédo d’Arman (1928-2005), repris à la lettre par sa fondation qui a conçu un admirable parcours artistique dans tout le village des Baux-de-Provence, où l’Hôtel de Manville, l’ancienne citerne, et l’îlot Post Tenebras Lux proposent de nombreux ateliers (peinture, sculpture, dessin) à l’attention des enfants. Une soixantaine d’œuvres montrant toutes les facettes des diverses productions du Niçois seront exposées au musée Brayer. Et le soir, on découvre des projections au fil des ruelles, sur les murs de la cité historique…

C’est la dernière édition de la biennale consacrée à « la céramique dans tous ses états », avant le grand rendez-vous de 2013… Une répétition générale qui réunira 180 artisans dans « le plus grand marché potier d’Europe », nous offrant un vaste panorama de la production contemporaine en la matière. Parallèlement aux nombreuses animations rythmant ce week-end, l’exposition Ma belle santonnière, Therèse Neveu nous permettra d’investir les anciens ateliers de l’artisane aubagnaise. À la chapelle des Pénitents noirs, Mondes céramiques (aux Pénitents noirs) présentera les travaux de 19 artistes contemporains « de rayonnement international ».

© Fondation A.R.M.A.N.

La chute des courses,1996 345 x 433 x 115 cm, Accumulation de Caddies, acier inoxydable Installée dans la cours de l’Hôtel de Manville

9 été 2011

8e art magazine

115


expos

Sage comme une image Estelle Contamin

Du 9 juin au 23 juillet 2011 - Du mercredi au samedi de 10h à 13h et de 15h30 à 19h30

La 3e Rue Galerie, installée depuis 2 ans à Marseille, inaugure un nouveau mode d’exposition : un même artiste présenté simultanément dans ses deux lieux, à la Cité Radieuse Le Corbusier et rue Saint Martin dans le 3e arrondissement à Paris.

Sans titre, 2011, acrylique et huile sur toile, 100 x 100 cm

Sans titre, 2010, acrylique et huile sur toile, 95 x 140 cm

Sans titre, 2011, acrylique et huile sur toile, 100 x 120 cm

3e rue galerie

Le Corbusier - 280, bd Michelet - 13008 Marseille 06 12 49 56 60 - www.3emeruegalerie.com

116

8e art magazine

été 2011

Scènes d’un monde rêvé, ou souvenu, ou fantasmé, monde en tous les cas absent et que l’artiste cherche, par le biais de la peinture, à amener à la présence. Et cherche avec un certain empressement, consciente de la possibilité d’une perte définitive que serait la perte de l’image elle-même. Dans sa captation hâtive d’une réalité à peine apparue et déjà en passe de disparaître, Estelle Contamin privilégie l’évocation à la narration, et sacrifie le détail des situations à leur empreinte émotionnelle. Sage comme une image est l’enfant tel que « cristallisé » par l’adulte, l’enfant gardé à soi et en soi. Entrer dans l’exposition d’Estelle Contamin, c’est participer à ce processus de cristallisation, c’est être, avec l’artiste, dans la potentialité de la peinture, c’est se laisser confondre par les présences flottantes des tableaux aux thèmes édéniques.


expos publi-reportages 8

Galerie d’art

Galerie

42, rue Canot - 13210 Saint-Rémy-de-Provence 04 90 92 46 34 - 06 89 14 62 00 Du mardi au dimanche (10h30-12h30 et 15h-19h) www.aubagne.com - www.argila.fr

14, rue du 4 septembre - 13100 Aix-en-Provence 04 42 90 78 50 www.galerie-maisondauphine.com

evangeline

Maison dauphine Dominique Mulhem

Exposition permanente

Musée Imaginaire et Holopeintures

Elle a passé 25 ans au sein de la galerie de la Méditerranée. Quand celle-ci a fermé, Evangeline Pinotie-Puig a décidé d’ouvrir, dans les mêmes locaux, sa propre galerie. Un bel espace de 80 m2 entièrement consacré à l’art contemporain, au sens large. Toute l’année, Evangeline expose les travaux de vingt artistes (nationaux et internationaux). La peinture est particulièrement bien représentée avec Josiane Becker, Yves Thos, Jean-Marc Severe, Nelson Fabiano ou encore Robert Di Credico, qui « gratte » sa toile pour évoquer le mouvement, s’attachant à des sujets comme le tango, la tauromachie ou les chevaux. Quant à Georges Corominas, sa peinture figurative fait écho aux natures mortes de sa fille Ludivine. Aussi, chez Evangeline, la sculpture n’est pas en reste. Citons les drôles de personnages d’Isabel Miramontes ou les éléphants de François Vanderberg. Enfin, on ira découvrir les œufs du maître verrier lituanien Remis Kriukas et le travail sur verre soufflé de Nicolas Laty. Un lieu à découvrir absolument.

du 24 juin au 30 juillet

Regards Multiples, d’après Warhol, holopeinture - Huile sur toile, 65 x 81 cm, 1992

La Galerie Maison Dauphine présente les peintures et holopeintures de Dominique Mulhem, l’un des pionniers historiques de l’hologramme. Sur son travail, Pierre Restany disait : « Je m’attendais à ne voir que des holopeintures, c’est de la peinture à la puissance 2 qui m’a été montrée. J’ai assisté à une véritable visite de musée, à la parfaite reproduction d’œuvres de grands maîtres, devant lesquelles de jolies filles agréablement dévêtues prenaient une pose avantageuse. Des créatures de rêve devant une peinture de rêve ! Devant ?! C’est plutôt "dans" que je devrais dire, car mon œil s’est avéré incapable de faire la part des choses, d’effacer cette vision simultanée, d’en séparer les deux éléments. » À voir et même à revoir.

© Fondation A.R.M.A.N.

ArMan Ray, d’après Arman et Man Ray - Huile sur toile, 97 x 130 cm, 2011

9 été 2011

8e art magazine

117


Galerie

l’entrepot 13, rue Pastoret - 13006 Marseille 04 91 92 61 81 www.brems.fr

Brems exposition permanente Artiste peintre et plasticienne autodidacte, Brems est née en 1966 dans le sud de la France, où elle vit et travaille. Son style peut varier de l’art conceptuel au figuratif, et pour réaliser ses toiles, elle emploie librement différentes techniques. L’opposition des densités confère à ce travail une identité unique. Quand elle créé, un chiffre, une phrase peuvent s’imposer à son esprit, la conduisant de l’abstrait à l’impressionnisme, du coloré au demi-ton ; suivant son inspiration...


publi-reportage

présente dans les deux espaces d’exposition de la galerie

«Entre terre et ciel New York / Tibet»

«ELEVEN STORIES»

Photographies de Françoise Gourichon et Sophie Caillis-Moron

Françoise Gourichon - New York

Eleven Stories est un travail plastique suscité par un événement marquant de notre histoire contemporaine, où l’évocation de l’urbain croise l’émotion du drame et de l’impensable. 11 plasticiens, sculpteurs, photographes présentent des oeuvres et installations réalisées à cette occasion. Exposition produite avec le collectif Photoevent13 Sophie Caillis-Moron - New York

Urban Gallery poursuit son exploration de l’espace urbain à travers une confrontation de parcours entre la ville symbole de l’urbain qu’est New York, et les larges et vides étendues des déserts tibétains. Ces évocations saisissent à travers des effets de plein et de vide un dénominateur commun l’étendue, le démesuré, l’un façonné, comblé par le travail industrieux, l’autre laissé au primat de la nature. Porteuses d’un sens à retrouver ces images décalées du réel le transfigure en révélant toute la magie que ces mondes opposés recèlent. Expositions du 10 au 24 septembre Vernissage le samedi 10 septembre à partir de 17h - Horaires des expos : du mardi au samedi 15h-18h et sur rendez-vous

Sur plus de 500 m2, un espace dédié à la création contemporaine Événementiels artistiques et culturels - Projets pédagogiques - Conférences et débats

3, rue Mazenod - 13002 Marseille - 04 91 37 52 93 - www.urbangallery.org

été 2011

8e art magazine

119


120

8e art magazine

ĂŠtĂŠ 2011


agenda

Musique Danse Théâtre 9 été 2011

8e art magazine

121



agenda

musique Cuarteto Mondo Yengue Un quatuor typique de tango argentin. Le concert sera suivi d’un bal. Le 29 juin Cité de la musique 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.com

Métigane

EddY Mitchell Ce ne sera pas encore sa dernière séance… Le 30 juin Le Dôme 04 91 12 21 21

Henri Florens, Piano Solo L’un des plus grands pianistes de jazz en France. Il a notamment accompagné les frères Belmondo, le Jazz Hip trio, Roy Haynes, et surtout Chet Baker. Ce soir, il sera en solo. Le 2 juillet Roll’ Studio 04 91 64 43 15 www.rollstudio.fr

© DR

Auteur-compositeur et interprète marseillais, Métigane écrit des chansons pas polies, rêches et rugueuses. Comme la vie. Le 30 juin Espace Julien 04 91 24 34 10 www.espace-julien.com

ZZ Top Les papys texans se sont-ils rasés la barbe ? Réponse au Dôme… Le 12 juillet Le Dôme 04 91 12 21 21

danse

Igor Stravinsky Petrouchka Dennis Russel Davies Orchestre français des jeunes

Label unique en son genre, YGZ promeut les jeunes loups de la scène électro parisienne et européenne. La soirée While you sleep, we burn réunit quelques uns de ces talents : Manaré, French Fries, Digikid 84, Bambounou, Alan Gay, Chaos in the CBD… © DR

Le 2 juillet Cabaret Aléatoire 04 91 11 45 63 www.cabaret-aleatoire.com

© Sylvain Pelly

Youngunz prEsentS : While you sleep, we burn

« Petrouchka, ce mélange insolite d’agressivité et de poésie, de familiarité et de candeur, de bonne humeur et de mélancolie. » Pierre Boulez lui-même était sous le charme de cette pièce composée par Stravinsky pour la compagnie des Ballets Russes. Durant ce concert, l’Orchestre des jeunes interprètera aussi la Symphonie en ut majeur de Bizet et une œuvre de Schleiermacher. Les 16 et 17 août Grand Théâtre de Provence 04 42 91 69 69 www.grandtheatre.fr

Noces / Le Sacre du Printemps Chorégraphie : Angelin Preljocaj Musique : Igor Stravinsky Une soirée avec Stravinsky. En première partie, Noces, une pièce qui marqua les esprits à sa création en 1989. Angelin Preljocaj imagine un enlèvement ne niant jamais la violence sous-jacente de la musique d’Igor Stravinsky à l’image des femmes « aveuglées » que l’on guide en scène. En deuxième partie, le chorégraphe reprend Le Sacre du Printemps, créé en 2001. Les 28, 29, 30 juin et 1er juillet Pavillon Noir 04 42 93 48 00 www.preljocaj.org

9 été 2011

8e art magazine

123


FLEURS ET BOUGIES PARFUMテ右S

1 boulevard de la Corderie - Marseille 13007 Tテゥlテゥphone : 04 91 33 00 14


agenda

Festival international de Folklore Pour cette 47e édition du festival, plus de 300 artistes venus du bout du monde vous feront partager leur culture. L’Espagne, la Finlande, la Grèce, la Moldavie, le Népal, le Pérou et le Togo seront particulièrement mis à l’honneur cette année. Du 2 au 9 juillet Château Gombert 04 91 110 461 www.roudelet-felibren.com

Salsatongs Artistes internationaux, DJ’s, danseurs… Les amoureux de musique Salsa se retrouvent sur les plages de Marseille pour cinq soirées très caliente. Du 27 au 31 juillet Plages de Marseille 04 91 85 63 30 festivalsalsatongs.com

Festival d’humour de la Fontaine d’Argent Avec : Laurent Febvay, Les Poz, Katia Doris, Isabelle Parsy, Louise Bourisse, et des tremplins jeunes talents Du 25 juin au 2 juillet Théâtre de la Fontaine d’Argent 04 42 38 43 80 www.lafontainedargent.com

Ali au pays des merveilles De et avec : Ali Bougheraba Un spectacle pour enfants ? Non. Une fable contemporaine dans laquelle Ali nous livre avec un humour décapant les codes et coutumes de son quartier, le Panier. Le 1er juillet Théâtre de verdure - Venelles 04 42 54 93 10 www.venelles.fr

La véritable histoire du Petit Poucet D’après : Les frères Grimm Avec : Juan Uen Ping et Laurent Vignaux

Une ballade au bord, dans et sous l’eau, contée, jouée et chantée par deux comédiens musiciens (flûte irlandaise, guitare, trombone, tambours vagues, coquillages). Les histoires, (un petit crabe à qui personne ne veut serrer la pince, un bateau aventureux, des poissons insouciants, une grande murène et une partie de cache-cache bien risquée), la musique des mots, la magie du théâtre d’ombres, l’humour, la poésie et la tendresse familiarisent les tout petits à l’émotion d’être spectateurs. Les 18 et 21 juillet Théâtre Badaboum 04 91 54 40 71 www.badaboum-theatre.com

Toujours aussi propre ! Ecrit et mis en scène par : Kanouk Avec : Charlotte Hamer et Anouk Franchini Chantal est toute émoustillée. Elle va dire « oui » à Bernard. Mais la cérémonie va prendre une tournure inattendue… Les 15, 16, 22, 23, 29 et 30 juillet Théâtre L’Antidote 04 91 34 20 08 www.theatreantidote.fr

théâtre Peau d’Âne D’après : Charles Perrault Mise en scène : Laurence Janner Avec : Jonathan Bidot, Marianne Houspie, Anne Naudon

Il était une fois un « roi-papa » amoureux de sa « fille-princesse », et qui entreprit de l’épouser… Les 22, 25, 29 juin et 2 juillet Théâtre Badaboum 04 91 54 40 71 www.badaboum-theatre.com

Tout en privilégiant la narration, ce spectacle explore l’univers des masques et de la marionnette. Les représentations ont lieu à 14h30. Les 4, 7 et 11 juillet Théâtre Badaboum 04 91 54 40 71 www.badaboum-theatre.com

Le vent, la mer, une plume légère De et avec : Roseline Dauban et Jean-Noël Rodriguez

Moi… J’étais où quand j’existais pas ? Compagnie Le cri de l’escargot Avec : Pascal Contival, Cécile Givernet, Jenny Lepage Des marionnettes se posent des questions philosophiques… Auxquelles seul le jeune public pourra répondre. Les 25 et 28 juillet Théâtre Badaboum 04 91 54 40 71 www.badaboum-theatre.com

été 2011

8e art magazine

125


publi-reportages

Greg & Co 35, rue Neuve Sainte Catherine - 13007 Marseille - 06 16 54 50 50 - www.gregandco.fr Ouvert du lundi au samedi de 10 h à 19 h non-stop Un magasin d’un genre nouveau, où Greg, ébéniste de formation détourne des objets... Son plaisir ? Chiner du mobilier industriel et lui donner une nouvelle vie en le détournant : un vieux projecteur de cinéma se transforme en lampe, une vieille bobine de cable devient une table sur pied... Toute une gamme de meubles atypiques et d’objets hétéroclites est proposée dans son atelier-boutique de 180 m2. Chaque pièce est unique et possède sa propre histoire. Le style est épuré et brut à la fois... Mais Greg peut aussi créer sur mesure en travaillant le bois et le métal. Il revisite votre intérieur : table basse, table de salle à manger, bibliothèque : le mobilier est pratique et fonctionnel, facile à vivre, en phase avec la vie de tous les jours. Greg vous accueille avec Corinne dans ce lieu unique où les objets les plus simples reprennent vie pour apporter du caractère à votre intérieur...

Boutique SNATCH 14, rue Sainte - 13001 Marseille - 04 91 90 53 11 Ouvert du lundi au vendredi : 10h30-12h et 14h-19h et le samedi : 10h30-19h non-stop Dans un cadre typiquement « English », la boutique Snatch propose un ensemble de marques à la fois casual et élégantes sans perdre de vue l’esprit « tendance ». Un veritable espace « confort » où « l’homme » pourra trouver son bonheur quelque soit son âge et ses envies. Pour cela la boutique Snatch reste à l’affut des marques qui montent comme des valeurs sûres telles Scothe and Soda, Junk de luxe, G.Star Premium ou G.Star Army.chic. Et d’autres à venir... Il ne vous reste plus qu’à venir dans cet ecrin créé pour vous messieurs, afin de satisfaire toute vos envies.

126

8e art magazine

été 2011


publi-reportages

RÉSILISse 108, boulevard Baille - 13005 Marseille 09 53 56 32 55 - www.resilisse.com Marque française de revêtements de sols décoratifs à base de résine époxy, issue de l’expérience acquise dans les mondes industriel, médical et agroalimentaire. Nos formulations peuvent être adaptées par notre laboratoire à tout type de besoins. Nous vous accompagnons dans la conception et la réalisation de vos projets en mettant à votre disposition les conseils de nos techniciens qui, par leur expérience du terrain (chantiers dans toute la France), vous transmettront un réel savoir-faire. Vous acquerrez ainsi les techniques nécessaires à l’application de nos résines, les finitions ainsi que les différentes méthodes pour créer des effets de matière.

horsy

Horsy 8e

127, rue de Rome - 13006 Marseille

523, rue Paradis - 13008 Marseille

04 91 48 46 07

04 91 77 31 17

BORN IN AJACCIO ! Attention voici Napoléon version rock’n roll !

Attention, ne soyez pas surpris si cet été, vous croisez cette marque dans toutes les soirées les plus branchées. Born in Ajaccio débarque sur la planète avec comme symbole de la marque NAPOLEON BONAPARTE, dans une version très rock’n roll autour d’une collection de 8 tee shirts collectors designés et illustrés par le graphiste marseillais Stephan Muntaner. Chaque visuel des tee shirts est une référence à l’homme, à son histoire réelle, combinée avec des titres mondialement connus (des Doors , Led Zep, Bowie, Elvis) Avant d’être diffusés sur Londres, Berlin et Paris, venez découvrir en exclusivité ces tee shirts à Marseille chez Horsy (523, rue Paradis et 127, rue de Rome) Prix du tee shirt : 42 euros (et à venir très prochainement les casquettes et les draps du hammam dans la même collection).

été 2011

8e art magazine

127



publi-reportages

Étapes gourmandes

La gourmandise ne connait pas la crise ! Grand établissement gastronomique ou petit resto sympa, le 8e art s’est armé de sa fourchette et a déniché pour vous quelques petites étapes gourmandes à découvrir absolument ! 9 été 2011

8e art magazine

129


publi-reportage

Hôtel

Château de Roussan HHHH

A

u cœur de la Provence, à quelques pas d’Arles et d’Avignon, c’est au sein d’un parc écrin majestueux bordé de platanes, que le Château de RoussanHHHH vous accueille dans son univers. Tout visiteur vivra des heures inoubliables dans ce nouvel hôtel au charme incontestable dirigé par la douce fermeté de la Directrice Emilie Cartray. Chaque visiteur sera sensible à l’accueil chaleureux d’une équipe de professionnels et de passionnés. Nos hôtes seront séduits par l’authenticité qui se dégage du lieu et seront envoûtés par sa beauté. Nos chambres de 25 à 45 m2, sont entièrement restaurées dans un total respect des lieux. Le mobilier ancien s’accorde avec bibelots et objets de curiosité. La vue sur les Alpilles, le parc, où l’allée majestueuse de platanes centenaires est toujours de toute beauté, des cours d’eau au travers des prés créant de petites chutes alimentant la pièce d’eau et son île. Sous les regards bienveillants de Platon, Socrate, d’Alembert, Aristote, Montesquieu, Sénèque et Cicéron, s’organisent les

130

8e art magazine

été 2011

bibliothèques montées dans l’épaisseur du mur au 18e siècle. Au cœur de ce parc, la serre du XIXe siècle aujourd’hui restaurée, provoque l’admiration. Ailleurs, poursuivez la balade vers le bassin, gardé tel un temple par 6 statues de nymphes grecques. Le Château vous propose un restaurant gastronomique où nous nous efforçons d’offrir une cuisine construite de recettes maîtrisées, qui se veulent parfaitement équilibrées, aux justes accents méditerranéens, sans jamais tomber dans le trop…

Un lieu magique, point de départ idéal pour explorer la Provence. Hôtel restaurant

Château de RoussanHHHH Route de Tarascon - 13210 Saint Rémy-de-Provence Tél. 04 90 90 79 00 - Fax 04 90 90 49 04 www.chateauderoussan.com


publi-reportage

Hôtel Château La Pioline

À trois kilomètres du centre d’Aix en Provence, sur les bords de la rivière de l’Arc, dès 1303, se trouvait le Moulin de Verdaches du nom de son propriétaire le seigneur Rodolphe de Verdaches. Arnaud de Borilli, trésorier général du roi en Provence en fait l’acquisition au XVIe siècle le rebaptise Beauvoisin. L’édifice et son propriétaire sont assez importants pour y recevoir Charles Quint visitant son Lieutenant Général Antoine de Lève le 9 Août 1536 durant le siège de Marseille par l’Empereur. La Provence connait depuis trois années des guerres religieuses et Catherine de Medicis séjourne en ce lieu. Elle y signe la paix entre les deux parties le 1er Juillet 1579. L’année suivante le roi Henri III érige le domaine en fief, avec haute moyenne et basse justice. Guillaume du Vair, Premier Président au parlement de Provence, achète la seigneurie en 1613 et la vend trois ans plus tard à Renaud de Piolenc, écuyer d’Aix, Seigneur de Cornillon, issu d’une très vieille famille comtadine. Celui-ci apporte des modifications à la façade qui est portée à 42 mètres avec un rythme de 13 fenêtres. En 1760 des revers de fortune accablent Honoré Henry de Piolenc de Thoury. Le Château de la Pioline est vendu aux enchères, l’acquéreur est le Marquis de Meyronnet, conseiller au parlement. Il entreprend la construction de deux ailes latérales et de la cour d’honneur dotée d’une fontaine centrale et ornée de vases du fameux sculpteur Chastel. D’autres transformations sont réalisées : un nouvel escalier et sa rampe, le pavement de tomettes de toutes les pièces du château. En 1772 il fait construire la petite « ménagerie » baptisée Hôtel de Pourceaugnac comme le montre la plaque d’ardoise gravée sur la façade, sous une montre solaire. Il inaugure enfin, en 1774, le grand salon doré rebaptisé Salon Louis XVI très richement décoré pour l’époque dans cette région. Malheureusement nous ignorons tout du nom des artistes, nous ne saurons sans doute jamais qui est l’auteur de l’esquisse au fusain exécutée derrière la fausse porte de ce salon… Après la Révolution La Pioline devient la propriété d’un négociant, Balthazar Moutte puis en 1829 du Duc de Blacas d’Aups, familier du Roi Charles X. Laissé un temps à l’abandon le Château de La Pioline est cédé à un antiquaire qui restaure fort bien la propriété et obtient le classement parmi les monuments historiques Aujourd’hui, la mémoire du passé subsiste dans cette élégante demeure, au sein de l’hôtellerie de luxe et traditionnelle de la ville d’Aix en Provence.

Hôtel Château La Pioline 260, rue Guillaume du Vair - 13546 Aix-en-Provence 04 42 52 27 27 chateaudelapioline.com

été 2011

8e art magazine

131


le péron

fonfon

56, Corniche Kennedy - 13007 Marseille 04 91 52 15 22 Là, nous avons affaire à une véritable institution datant de 1880 ! Depuis la réouverture en 2001 avec une décoration très années 40 (teck, cuivres, acajou et marbre), Peron est resté un lieu d’exception que l’on savoure de génération en génération. Le point fort étant évidemment une vue merveilleuse sur la baie. L’endroit romantique par définition. La carte, haut de gamme, fait évidemment la part belle aux poissons. Un établissement étoilé au guide Michelin en 2008.

140, Vallon des Auffes - 13007 Marseille 04 91 52 14 38 Envie d’une bonne bouillabaisse ou d’un poisson à l’argile ? Depuis trois générations, le restaurant Fonfon vous accueille chaleureusement dans le typique port de pêche du Vallon des Auffes et vous propose une cuisine méditerranéenne inventive et colorée, aux saveurs d’huile d’olive, de tomates et d’ail. Vous aurez aussi peut-être l’occasion d’y croiser quelques unes des nombreuses personnalités déjà séduites par l’établissement telles Zazie, Florent Pagny ou Claude Brasseur. Car depuis 1952, tous les amateurs de bonne cuisine provençale se retrouvent chez Fonfon…

132

8e art magazine

été 2011


la villa

La grotte

113, rue Jean Mermoz - 13008 Marseille 04 91 71 21 11 L’ètablissement chic et reconnu logé rue Jean Mermoz s’affirme comme le lieu de rendez vous pour les habitués du quartier. Restaurant au charme atypique, lieu de quiétude, une vaste terrasse jardin, ombragée l’été et chauffée aux jours friquets. Sa cuisine offre un large choix avec une mention spéciale pour les poissons grillés au feu de bois. Une touche originale pour la présence d’un kiosque à coquillages de l’automne au printemps ainsi qu’une sushi women japonaise à demeure. Une large carte des desserts permet de terminer ce moment agréable par une touche sucrée.

Calanque de Callelongue - 13008 Marseille 04 91 73 17 79 Nous sommes au bout des Goudes, au début des Calanques, dans celle de Callelongue. Un cadre dépaysant, et une salle au décor raffiné fait de beaux tableaux marins anciens. À l’extérieur, la terrasse et son grand patio fleuri, véritables havres de paix, vous attendent pour un dîner rafraîchissant. La carte de l’établissement, installé en ces lieux depuis plus d’un siècle, est dédiée aux spécialités provençales et propose également pizzas et poissons frais : loup, turbot, sar, pagre, rouget... Il n’en manque aucun. Un resto de charme et de caractère, pour les amoureux de l’art de vivre provençal.

9 été 2011

8e art magazine

133



les échevins

la vieille pelle

44, rue Sainte - 13001 Marseille 04 96 11 03 11 La renaissance d’une adresse mythique ! Depuis trois mois, Françoise de Lorenzo (aidée de Johann, Ghislain et toute leur équipe), fait revivre Les Echevins, établissement légendaire, sis à la rue Sainte depuis plus d’un demi-siècle. Et remet au goût du jour quelques valeurs oubliées : le sens de l’accueil, la convivialité, le coeur... Surtout, Les Echevins propose une carte qui fait la part belle à la cuisine provençale, mais aussi aux plats du sud ouest. Aiguillettes de canard, Cabécou au miel, bourride, bouillabaisse authentique, foie gras maison, foie gras poelé... Un lieu à la décoration raffinée, où l’art a toute sa place. Une grande fresque de Jean-Claude Campana dispute la vedette aux oeuvres d’artistes marseillais, régulièrement renouvelées. Enfin, on peut aussi réserver le savoureux salon privé pour réunions et dîners d’affaire.

39, avenue Saint-Jean - 13002 Marseille 04 91 90 62 00 À deux pas du Vieux-Port et du quartier du Panier, La Vieille Pelle vous fait découvrir toutes les saveurs d’une cuisine italienne. Ici, tout est fait maison. Laurent, le patron, est aux fourneaux. Il surveille les sauces qui mijotent et prépare une déclinaison de suggestions. Le pizzaiolo confectionne pains, raviolis, gnocchis, pizzas au feu de bois... La Vieille Pelle est devenue une institution marseillaise pour les amateurs de cuisine italienne. Tout cela accompagné du sourire de Fabienne...

9 été 2011

8e art magazine

135


AU BOUT DU QUAI 1, avenue de Saint-Jean 13002 Marseille

04 91 99 53 36 06 86 52 16 96

Au Bout du Quai, pour retrouver le goût simple des bonnes choses. Situé comme son nom l’indique, tout au bout du Quai du Port, cet établissement (l’ancien San Francisco) vous proposera de savoureuses spécialités marseillaises et provençales à déguster en face d’une vue imprenable sur l’abbaye de Saint-Victor, le Fort SaintJean, et Notre Dame de la Garde. À côté des plats de tradition typiquement marseillais, à base de poissons et coquillages, vous pourrez aussi découvrir des créations exclusives, mises au point par le chef tel le filet de daurade en croûte de foie de lotte au miel ou le tartare de veau aux huîtres. La décoration intérieure imaginée par la designer Manon Gaillet, moderne et tout en tons rouges et gris, a été primée par le Prix Commerce Design Marseille 2007. Un beau restaurant où l’on mange bien. C’est Au Bout du Quai...

136

8e art magazine

été 2011


ACAPULCO

le lunch

Plage & restaurant Les Lecques 06 09 51 64 30

Calanque de Sormiou Chemin de Sormiou - 13009 Marseille www.sormiou-lunch.com - 04 91 25 05 37 Au fil des ans, le Lunch s’est imposé comme une adresse incontournable des tables marseillaises, avec comme évidence une spécialité de poissons et bouillabaisse. Au coeur de la calanque de Sormiou, le Lunch est un restaurant cossu donnant directement sur la plage, entièrement rénové, disposant de grandes baies vitrées et de meubles en teck avec une terrasse donnant sur l’eau ombragée par d’amples voiles latines. Dans cet environnement naturel et ce cadre extraordinaire, l’équipe du Lunch vous accueille avec un service haut de gamme et une cuisine raffinée pour vous offrir un moment de plaisir rare.

Elue plus belle plage de l’année 2008-2009, cette plage privée est réputée pour son cadre de rêve, son restaurant et... ses jolies filles qui s’y retrouvent le vendredi soir pour des apéros devenus célèbres des Lecques à Saint Cyr ! Depuis 1963, on vient tous “chez Nono” pour commencer l’été, le prolonger, et même plus... Ouvert tous les jours du 15 avril au 15 octobre.

été 2011

8e art magazine

137


abonnement

Retrouvez-nous sur coup d

E Fo

4

0 hiver 201

# 13 ART &

E

CULTUR

NCE

-PROVE

EILLE

MARS

INE

AGAZ FREEM

marseille : QuELLE pLAcE pouR LA cuLtuRE ? p.36

et a

ROv i ENC La possibilitéuss : E 2013 d’une capital mARsA e TAC fiEsTA REN dEs CON TRE sU S DU 9e ART ds smALL Aix is bE s les bulles AUsou TifU L ACTo LUC RA IEN L CLERgUE ExposPortfolio MARSEILLE-P

ÉA

MARSEILLE EN MODE CU LTURE

P. 15

ssi :

et Au

NEWS

P. 61

2013 ovence IER ille-Pr DOSS Marse e arseill M 0% 10 LIO Design pORTFO mac au ra di ... Zineb Se

Print emp s de

20 FE l’art contempora in STIV ALS mARS EILL

E 2013 Qui ê M. Ch tes-vous ougn et ? PE

Guid e de

20 Fes tiv

surv ie po ur un

Mari RFoRmAncE age 2 filles Mode 2013 oFF d’em plo P. 61 i

Expo s, so rties ...

als

été c ultur el !

#15

MARSEILLE-PROVENCE

ART & CULTURE FREEMAGAZINE

M.

Nom :

Prénom :

Adresse :

Code Postal :

e-mail :

Téléphone : Je certifie être majeur Signature obligatoire >

Date : __ / __ / 20__ En application de l’article 27 de la loi n°78-17 du 06-01-78, les informations qui vous sont demandées sont nécessaires au traitement de votre abonnement. Vous bénéficiez d’un droit d’accès et de rectification des données qui vous concernent.

138

8e art magazine

été 2011

Ville :

été 2011

je souhaite m’abonner au magazine 8e art pour une durée d’un an (soit 4 numéros). Je règle par chèque la somme de 20 euros à l’ordre des Editions Bagatelle.

Mme

15

# Printemps de l’art cont ART & CULTUR MARSEILLE emporain E FREEM -PROVENC E AGA ZINE

été 20

e l’ère nt à Aix e tistes d Les ar ique s’expos numér

FUTUR

11

...

s LISME

P. 39

Mlle

printemps 2011

#1

MARSEILLE-P ART & CUL TURE FREEM ROVENCE AGAZINE

8e art magazine - 19, avenue de Delphes - 13006 Marseille

OUI

2

P. 64

Pour cela, il vous suffit de remplir le bulletin ci-dessous, et de nous le retourner accompagné de votre règlement à l’adresse suivante :

!

#11

#1

AIX - MA

FREEMA RSEILLE GAZINE

AIX - MARSEILLE

magazine n chez vous !

LTURE

udRE p ouR zE il vCULTURE a taFREEMAGAZINE ART & vs vieille guer la charit é!

e

et recevez votre magazine

ART & CU

automne 2010

8 art Abonnez-vous à

printemps/été 2010

www.8e-art-magazine.fr




Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.