LIBRAIRIE LARDANCHET
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Le n° 27 est reproduit en couverture Nous remercions pour leur participation au catalogue Guillaume Daban et Thomas Rossignol
Livres du xxe siècle Du Petit Ami
à l ’A m a n t
Livres du xxe siècle Du Petit Ami
à l ’A m a n t
Paris 2009
2 - MARX & ROCHE
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1. LÉAUTAUD (P.). Le Petit Ami. Paris, Mercure de France, 1903, in-12, maroquin janséniste chocolat, dos à nerfs orné, doublure de maroquin terre de Sienne sertie d’un filet doré, couverture et dos, tranches dorées sur témoins, étui gainé de même peau (Huser). Édition originale. Ce roman surprit par sa liberté de ton et le caractère presque impudique des confidences. Le 13 juin 1903, Léautaud notait dans son Journal littéraire le commentaire de Vallette : « Tout le monde m’en parle à chaque instant. Il y en a qui trouvent cela abominable, d’autres au contraire, qui le trouvent très bien. Oui, on trouve cela bien, à cause de la sincérité [...]. Et la preuve de cette sincérité, ce sont vos remords. Vous m’amusez même avec vos remords. Vous êtes le Monsieur qui s’est montré tel qu’il est et qui se demande s’il n’a pas été trop loin. » À la demande de Robert Moureau, Paul Léautaud porta sur un feuillet de garde un intéressant petit texte manuscrit où il évoque le volume et l’ouvrage. Exemplaire en parfaite condition. Provenance : Robert Moureau.
2. MARX (R.) & ROCHE (P.). La Loïe Fuller. Évreux, C. Hérissey, 1904, in-4°, en ff., couverture, étui à lacets d’éditeur. Premier livre décoré de gypsotypie. Édition originale de cet hommage à Loïe Fuller, artiste d’origine américaine qui s’est faite en France, comme elle aimait à le souligner. Soucieuse d’un certain esthétisme, elle apporta aux arts du spectacle plus par ses jeux de couleurs et de lumière que par sa danse. Artistes, poètes et écrivains tels Mallarmé, Rodenbach, Jean Lorrain ou Auguste Rodin, assistaient régulièrement aux représentations qu’elle donnait. Pour accompagner son texte, l’auteur confia à l’élève de Rodin, Pierre Roche (1855-1922), de son vrai nom Fernand Massignon, le soin de l’illustrer. Ce dernier réalisa, avec un certain raffinement, une série de gypsotypies, estampes légèrement colorées sur fond nacré, obtenues grâce à un procédé d’impression utilisant des matrices en métal, technique qu’il avait mise au point à partir de ses gaufrages japonisants. Ainsi créa-t-il 19 gypsotypies, procédé qui ne fut réemployé que pour un seul autre ouvrage. Le texte est imprimé avec les caractères italiques dessinés par G. Auriol, dont c’est ici leur première utilisation. Exemplaire parfaitement conservé. Petites restaurations à l’étui. Tirage limité à 130 exemplaires numérotés, tous sur vélin. Lista (G.), Loïe Fuller, Danseuse de la Belle Époque, pp. 438-440 et pp. 443-444 ; P. Vitry, Art et Décoration, T. XV, 1904 ; A. Coron, Des livres rares depuis l’invention de l’imprimerie, n° 234.
3. TZARA (T.) & ARP (H.). Vingt-cinq poèmes. Zurich, Collection Dada, 1918, in-8°, broché, couverture illustrée. Édition originale. Un livre précurseur. Certains poèmes connurent une pré-publication dans la revue Nord-Sud et Sic. Écrits entre 1915 et 1918, les 25 poèmes font partie des premières compositions Dada. Conspuant les convenances d’un monde qu’ils rejetaient, les dadaïstes s’attaquèrent à son organe social : le langage. À l’image des déclamations pratiquées par les artistes futuristes lors de performances, Tristan Tzara (1896-1963) s’attela à rendre ses poèmes incohérents. Désorganisation syntaxique, 5
interruption narrative, absence de ponctuation et insertion d’éléments phonétiques soumirent le lecteur à l’incompréhension et à son exaspération. Cette recherche de chaos était pour Tzara le moyen de faire table rase du passé avec dérision et humour : « En 1916, je tâchais de détruire les genres littéraires. J’introduisais dans les poèmes des éléments jugés indignes d’en faire partie, comme des phrases de journal, des bruits et des sons. » Bien que séditieux par son affiliation Dada, le recueil de Tzara dépasse cette caractéristique pour révéler une œuvre poétique à la musicalité rythmée d’éléments onomatopéiques, empruntés aux langues primitives pour leur valeur incantatoire, qui provoqua le « plus grand trauma poétique » qu’Aragon eût reçu de sa vie. Premières illustrations données par Hans Arp à Tzara. Membre historique du mouvement aux côtés de Tzara, Hans Arp (1886-1966) entretint une relation d’amitié et de travail avec le poète durant les années Dada (1916-1925). Collaborant à plusieurs reprises, dans la revue Dada, pour Vingt-cinq poèmes (1918), Cinéma calendrier du cœur abstrait. Maisons (1920) et De nos oiseaux (1923), leurs productions révélèrent l’essence même de Dada, dévoilant l’une des associations marquantes du livre illustré moderne. 10 bois gravés, deux ont été répétés et 8 sont à pleines pages, portant leur nombre à douze. Illustrations à formes organiques apparaissant autour de 1917, ces abstractions primitives sont porteuses des bases esthétiques et philosophiques que l’on retrouvera dans l’ensemble de l’œuvre d’Hans Arp. Réduite à des formes guidées par le hasard permettant la création d’un nouveau langage plastique, Hans Arp refusa de s’inscrire dans une imitation de la nature, idée définissant l’art depuis le XVIIIe siècle, pour développer un style original modelé sur une perception identificatoire entre l’homme et son environnement, un retour aux sources s’insérant dans le processus de renaissance prôné par Dada. Exemplaire sur alfa offert par Tzara à Jacques Rigaut. Il porte un envoi autographe ainsi qu’un dessin représentant une main pointant du doigt un crâne :
Dandy désargenté, perpétuel révolté, son insolence et ses excentricités firent de Jacques Rigaut l’incarnation même de Dada. Personnage très apprécié par les figures emblématiques de Dada et du surréalisme, il fascinait par sa désinvolture abordant le sujet du suicide, thème qui tourmenta tout au long de sa vie André Breton. Allant jusqu’à le considérer comme l’un des beaux-arts, Jacques Rigaut mit en pratique sa thèse en se donnant la mort dans une clinique de Châtenay-Malabry d’une balle dans le cœur. Drieu la Rochelle, son fidèle ami, lui rendit hommage en s’inspirant de sa vie pour composer le personnage d’Alain, figure centrale du roman Le Feu follet (1931), adapté au cinéma par le réalisateur Louis Malle en 1963. 6
3 - TZARA & ARP
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Petit manque à une coiffe. Édition limitée à 10 exemplaires sur hollande, numérotés et justifiés, et à un nombre restreint sur alfa. Dimensions : 203 x 146 mm. Provenance : Jacques Rigaut (1898-1929) ; Marcel Bekus (1888-1939) avec son ex-libris. Centre Pompidou, Dada, 2005, p. 96, pp. 962-965 ; Tristan Tzara, Œuvres complètes 1912-1924, 1975, T. I, pp. 640-649 ; Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, Jean Arp, L’invention de la forme, 2004, pp. 48-50 ; Michel Sanouillet, Dada à Paris, 1993, pp. 17-25, pp. 191-193 ; Yves Peyré, Peinture et poésie, 2001, pp. 113-115, p. 231 « Hans Arp a réalisé diverses compositions sur fond d’or pour la couverture des Vint-cinq poèmes ».
4. VALÉRY (P.). Le Cimetière marin. Paris, Émile Paul Frères, 1920, in-8°, broché, couverture, étui. Édition originale. Paul Valéry, méditerranéen d’origine, voua, sa vie durant, un culte à la mer, qu’il immortalisa dans Le Cimetière marin. « La mer toujours recommencée et la mort toujours victorieuse furent les deux thèmes qui lui inspirèrent ses pages et ses vers les plus beaux. » Un passage imprimé en grec des Pythiques de Pindare, figure ici en épigraphe. L’un des 49 exemplaires sur papier vélin à la forme d’Arches, second papier après 7 chine, justifiés à la main en chiffres romains. Exemplaire en belle condition. Karaïskakis-Chapon, Bibliographie des œuvres de Paul Valéry, 20 A.
5. TZARA (T.) & ARP (H.). Cinéma calendrier du cœur abstrait. Maisons. Paris, Au Sans Pareil, Collection Dada, 1920, in-4°, broché, couverture, bande annonce. Édition originale. Le Sans Pareil, « le dépositaire général des publications dada ». Maison d’édition de l’entre-deux-guerres, bien que relativement éphémère (1919-1935), elle eut un impact et une activité considérable auprès des avant-gardes. Sur 163 titres publiés, 30 font partie du patrimoine littéraire français encore vivant, des Champs magnétiques au Plan de l’aiguille. Affilié au Sans Pareil dans la « Collection Dada », Cinéma calendrier du cœur abstrait. Maisons fut en réalité publié en Suisse par Arp, le Sans Pareil se limitant au rôle de distributeur ; « En dépôt au Sans Pareil », mention imprimée dans l’ouvrage. La plus belle réussite du tandem. Seconde collaboration Tzara-Arp, le livre reprend avec une plus grande maîtrise le dialogue amorcé dans Vingt-cinq poèmes (1918), reflétant une nouvelle fois les objectifs dada. Constitué de 21 courts poèmes et d’une seconde partie intitulé Maisons, une série de poèmes dédiés aux amis du duo, le texte a malgré tout moins recours à la dislocation systématique et brutale, laissant place à un certain respect de la syntaxe du vers. Renfermant quelques poèmes majeurs du dadaïsme dont Maison Flake, repris dans toutes les anthologies du mouvement, les poèmes ouvrent la voie aux nouveaux moyens de destruction imaginé par Tristan Tzara : être joyeux, exprimer son bonheur, prôner la vie. 19 bois d’Hans Arp. Répondant aux poèmes, les gravures aux formes organiques noires et contrastées témoignent du cheminement de l’artiste vers un art fondé sur l’identification de l’homme avec la nature. Après l’impression, l’ensemble des bois fut détruit. Exemplaire très bien conservé, non coupé, avec sa rare bande annonce rouge. 8
5 - TZARA & ARP
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Édition limitée à 150 exemplaires tous sur [Vélin de cuve pur chiffon d’Italie] et signés par l’auteur et l’illustrateur. Dimensions : 257 x 209 mm. Centre Pompidou, Dada, 2005, p. 96, p. 954, pp. 962-965 ; Tristan Tzara, Œuvres complètes 1912-1924, 1975, T. I, pp. 660-666 ; Yves Peyré, Peinture et poésie, 2001, p. 117, p. 232 ; Pascal Fouché, Au Sans Pareil, 1983, pp. 5-9, pp. 26-27.
6. VALÉRY (P.). Le Serpent. Paris, NRF, [10 février] 1922, in-8°, box noir, plats ornés d’un décor à froid de filets obliques et sinueux entrelacés, dos à nerfs orné de même, doublure de box rouge, gardes de soie moirée noire, couverture et dos, tranches dorées sur témoins, étui (Semet & Plumelle). Édition originale. Pour se distraire du dur labeur de La Jeune Parque, Paul Valéry composa, à l’intention de Pierre Louÿs, Chanson d’un serpent. S’essayant au monologue burlesque, l’auteur avait volontairement exagéré les assonances et allitérations de ce court poème. Il le retravailla sérieusement par la suite, adoptant un ton différent, et sans retenir les deux premières strophes. Avec la rigueur métrique qui le caractérise, Paul Valéry joue sur la figure du serpent, figure de la tentation selon la tradition chrétienne, mais aussi, avec ses mues successives, possible symbole des différents aspects de l’existence humaine. Comme la plupart de ses pièces, Le Serpent fit l’objet d’une édition originale séparée, avant d’être réuni à un recueil. C’est ainsi qu’il parut d’abord, sous le titre d’Ébauche d’un serpent, en revue, à la NRF en juillet 1921, puis sous forme de volume, avant de figurer dans Charmes le 25 juin de l’année suivante, avec quelques légères variantes, et dans un ordre différent. En 1926, une seconde édition séparée vit le jour aux Éditions Eos. 2 bois gravés de Paul Véra. L’un des 15 exemplaires sur japon impérial, second papier après 5 vieux japon. Semet et Plumelle exercèrent sous ce nom jusqu’en 1955. Condition parfaite. Dimensions : 216 x 140 mm. Provenance : Bibliothèque du Dr Lucien-Graux, avec son ex-libris. Karaïskakis-Chapon, Bibliographie des œuvres de Paul Valéry, 28.
7. CARCO (F.). Tableau de l’Amour vénal. Paris, NRF, 1924, in-4°, maroquin noir, premier plat orné d’un décor doré au palladium et à froid évoquant un corps féminin, sur le second, petites guirlandes de cercles concentriques dorés ou au palladium, dos lisse, doublure de maroquin terre de Sienne ornée d’une constellation de cercles concentriques dorés, gardes de daim gris, couverture et dos, non rogné, chemise et étui gainés de maroquin noir (Pierre Legrain). Édition originale. 12 lithographies originales hors-texte en noir de Luc-Albert Moreau. 10
7 - CARCO
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Tirage limité à 335 exemplaires ; celui-ci est sur vélin pur fil Lafuma-Navarre. Exemplaire d’Henri Mondor, enrichi : - de trois dessins originaux à la mine de plomb, au format du livre, signés et légendés. - d’une L.A.S. de Luc-Albert Moreau, qui donne quelques conseils au biographe de Mallarmé pour la reliure de son exemplaire, suggestions suivies en pointillé par Pierre Legrain. - d’une photo de Luc-Albert Moreau en mitrailleur de 2e classe, dédicacée au grand Mondor. Achevée le 31 juillet 1928 pour Henri Mondor, cette reliure est atypique dans la production de Pierre Legrain. Son décor s’organise suivant la diagonale des plats, alors que ce dernier a pour habitude de les dessiner suivant un axe vertical ou longitudinal. Elle date de la période où le praticien est parvenu à l’absolue maîtrise. Pierre Legrain en réalisa une seconde sur cet ouvrage qui fut exposée en 1947 à New York ([...], Masterpieces of French modern bindings, 1947, n°16 avec reproduction). Provenance : Henri Mondor ; Pierre Berès (ex-libris).
8. ROCH GREY & SURVAGE (L.). Le Château de l’étang rouge. Paris, Librairie Stock, 1926, in-8°, broché, couverture. Édition originale, dédiée à Survage. Une figure centrale trop méconnue de l’avant-garde parisienne. Fille de comtesse, cette aristocrate fortunée arrivée en compagnie de son cousin Serge Férat à Paris en 1902, fut très vite la mécène de toute l’avant-garde russe et française du moment. Énigmatique et brillante, amante du peintre finnois Léopold Survage, elle fascina l’ensemble des artistes de la bohème parisienne : Modigliani, Braque, Léger, le Douanier Rousseau ou encore Apollinaire et Max Jacob. Derrière cette vie de salon et le financement à grands frais qu’elle leur accordait, Hélène d’Œttingen (circa 1880-1948) produisit une œuvre intellectuelle hétéroclite aux multiples hétéronymes, signant ses poèmes Léonard Pieux, ses romans Roch Grey et ses peintures François d’Angiboult. Le premier roman de l’auteur. Fondateur en 1916 de la revue Sic, publication majeure des avant-gardes littéraires et artistiques, Pierre Albert Birot (1876-1967) perçut très tôt les qualités littéraires de la baronne, l’invitant à continuer dans cette voie. Encouragée dans son désir d’écriture, elle rédigea en 1919 son premier roman, Le Château de l’étang rouge, une biographie romancée de son enfance passée en Russie restituant les grandes contradictions de la société slave oscillant indéfiniment entre splendeur et cruauté. De nature téméraire, elle projeta la conception d’une nouvelle manière d’écrire, mélangeant réalité et fiction, utilisant parfois l’écriture automatique des surréalistes. Le 16 mai 1925, Roch Grey signa un contrat avec la maison Stock, permettant sa publication un an plus tard. Salué à sa sortie par le poète Jean Follain, l’écrivain Jacques Chardonne et l’historien d’art britannique Charles Parker, l’ouvrage connu un beau succès. Illustrations de Léopold Survage. Entretenant une liaison avec la baronne, rencontrée par l’intermédiaire de son ami Archipenko, il eut par ailleurs l’occasion à plusieurs reprises de collaborer avec elle. Après Accordez-moi une audience en 1920, Léopold Survage (1879-1968) grava 4 bois en couleurs pour Le Château de l’étang rouge. Snegaroff, l’imprimeur des Soirées de Paris, en assuma la charge financière. L’un des 13 premiers exemplaires sur japon impérial ; celui-ci est enrichi du dessin préparatoire ayant servi à l’illustration du château de Krasny Staw. Édition limitée à 210 exemplaires. J. Warnod, Chez la Baronne d’Œttingen, Paris russe et avant-gardes, 2008. 12
8 - roch grey & survage
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9. GOGOL (N.) & ALEXEIEFF (A.). Le Journal d’un fou. Paris, La Pléiade, 1927, gr. in-8°, box glacé noir, plats et dos mosaïqués en continu de box bleu, gris et crème, le titre, doré et à froid, frappé irrégulièrement sur le premier plat, doublure de daim gris avec encadrement de veau noir et de box bleu, gris et blanc, gardes de daim gris, couverture et dos, tête dorée, non rogné, étui (Creuzevault). Traduction de B. de Schloezer et J. Schiffrin. Le Journal d’un fou appartient aux récits fantastiques du recueil Arabesques paru à Saint-Pétersbourg en 1835. Ils occupent une place notoire dans la littérature russe. Premier livre illustré par l’aquatinte, l’eau-forte et le burin d’Alexeieff, soit 21 gravures originales. Scénographe, costumier et cinéaste d’animation et de films publicitaires, Alexandre Alexeieff (1901-1982) commença en 1926 sa carrière de graveur, en s’initiant par lui-même à la xylographie, et d’illustrateur. Il exécuta, selon cette technique, ses premiers travaux pour Le Nez de Gogol, livre qui ne sera jamais publié, puis s’essaya aux diverses techniques de la gravure. Petit à petit, se précisa chez lui l’idée du rôle de l’illustrateur. Pour l’artiste russe, l’illustration doit se libérer du texte, elle n’est pas ornementale. Il la considère comme une interprétation de la parole écrite, synthèse du texte de l’auteur, recréant ainsi un monde autonome formé des impressions que l’illustrateur ressent au cours de la lecture, les comparant ensuite à son propre univers constitué de ses souvenirs. Cette étape est précédée d’un long travail préparatoire où Alexeieff effectue des recherches sur l’auteur, son époque, sa pensée et sur les critiques littéraires dont il fut l’objet. Illustrateur de renom, il exerça aussi son talent sur le petit écran. Son œuvre cinématographique (1933 à 1980) est liée à la recherche de procédés nouveaux, tant dans ses films dits de « spectacle » que dans ses films publicitaires. Il est l’inventeur de deux procédés : l’écran d’épingles et les totalisations animées, méthodes nouvelles d’inscription et d’animation des images. L’un des 216 exemplaires sur vélin à la cuve des manufactures B.F.K. Reliure de Creuzevault (1905-1971), commandée par le bibliophile anglais, le major J.R. Abbey (1894-1969). Creuzevault fut soit précédé, soit suivi dans cet exercice par de nombreux relieurs de talent. Pierre Legrain, Paul Bonet, Georges Cretté, Pierre-Lucien Martin... s’y essayèrent à plusieurs reprises à la demande de collectionneurs aussi célèbres que Marty, Scherrer, Gilli... Petite épidermure en pied de dos. Édition limitée à 266 exemplaires. Exposition : Londres, Art Council, 1949, n° 108. Provenance : Abbey (Cat.V, 1970, n° 2570) ; Pierre Berès. John Roland Abbey, brasseur britannique, a constitué en une quarantaine d’années une collection importante de livres anciens et modernes, qui fut dispersée en une quinzaine de ventes à Londres entre 1965 et 1989, seuls quelques volumes furent vendus à l’amiable.
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10. DOSTOïEVSKI (F.) & ALEXEIEFF (A.). Les Frères Karamazov. Paris, Les éditions de La Pléiade, 1929, 3 vol. in-4°, broché, chemise, étui. Les Frères Karamazov, l’œuvre majeure de Dostoïevski, est l’une des plus significatives de la littérature européenne de la seconde moitié du XIXe siècle. L’essentiel de la trame tient à l’inimitié entre un père et ses trois fils, Mitia, Ivan et Aliocha. L’ouvrage est ici publié par le fondateur de La Pléiade, Jacques Schiffrin, traducteur et éditeur originaire d’Azerbaïdjan. 100 lithographies d’Alexeieff. Le cycle iconographique des Frères Kamarazov fut entrepris à un moment clé de sa carrière d’illustrateur, deux ans après son initiation à la gravure sur métal, que complétait une expérience signifivative de l’aquatinte. Par ces deux techniques, Alexeieff passa maître dans l’art du clair-obscur, des différentes variations de gris, et des effets de lumière. Ce livre, qui le rendit célèbre, était l’aboutissement de ses recherches plastiques et graphiques, avant qu’il ne s’oriente durablement vers l’animation. L’un des 100 exemplaires comportant une suite des illustrations sur hollande mince. Tirage unique à 118 exemplaires, tous sur papier Hollande Pannekoeck. G. Bendazzi, Alexeieff, Itinéraire d’un maître, 2001, pp. 98-115.
11. BRETON (A.) & ÉLUARD (P.). L’Immaculée conception. Paris, Éditions Surréalistes, 1930, in-4°, broché, couverture. Édition originale. Succédant au divertissant Ralentir travaux, Breton et Éluard, dans ce texte à deux écritures, explorent un univers où seul Lautréamont les avait précédés ; ils se substituent en quelque sorte à des aliénés. À travers d’admirables poèmes en prose, ils tentent ainsi la reconstruction de l’existence humaine dans sa totalité, depuis la conception, en passant par la vie intra-utérine et la naissance, jusqu’à la mort, puis en deux cycles d’essais groupés sous les titres Les Possessions et Les Méditations, ils opposent les délires mentaux (débilité mentale, délire d’interprétation, démence précoce, manie aiguë, paralysie générale) à la conscience de veille, état perturbé par les poussées de l’inconscient. Une gravure de Dali illustre ce poème. Elle figure uniquement dans les exemplaires sur grand papier. L’un des 100 exemplaires sur hollande Van Gelder, signé par les deux auteurs, avec la gravure. Exemplaire en parfaite condition, condition rare pour ce livre. G. Sebbag, Les Éditions Surréalistes, 1926-1968, n° 16.
12. KIPLING (R.) & JOUVE (P.). La chasse de Kaa. Paris, Javal & Bourdeaux, 1930, in-4°, en ff., couverture illustrée, emboîtage de l’éditeur. Paul Jouve (1878-1973), le portraitiste du monde animal. Ouvrage produit dans sa période de rayonnement (1920-1950), il illustra à deux reprises l’œuvre incontournable de Rudyard Kipling (1865-1936) ; une première fois en 1919 avec Le Livre de la jungle, et par la suite La Chasse de Kaa, nouvelle tirée du même livre. Peintre animalier, il se démarqua de ses homologues par une approche innovante de son sujet, peignant les animaux pour eux-mêmes. Refusant de faire une représentation idéalisée de l’animal et rompant ainsi avec la tradition dix-neuviémiste, Paul Jouve par une recherche de vérité anatomique produisit de réels portraits aminaliers. Soucieux de pénétrer dans la psychologie de l’animal et d’éviter de se focaliser uniquement sur sa beauté, il mit sa technique au service d’une simplification de son dessin. 16
10 - DOSTOÏEVSKI & ALEXEÏEFF
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Un premier contrat fut signé le 31 janvier 1927, précisé le 20 juin 1929, stipulant qu’il n’était pas prévu de rétribution ou de pourcentage pour Paul Jouve mais qu’il disposerait de la moitié des exemplaires que l’artiste devait vendre dans le cadre de ses expositions personnelles. 124 compositions de Paul Jouve, dont 10 hors-texte. Exemplaire en parfaite condition. Emboîtage à l’état de neuf. Édition limitée à 175 exemplaires dont 60 hors-commerce réservés à l’auteur, tous sur papier japon impérial à la forme. Dimensions : 330 x 255 mm. Félix Marcilhac, Paul Jouve, 2005, p. 174, p. 203, p. 379.
13. CONRAD (J.). Lettres françaises. Paris, Gallimard, 1930, in-4°, couverture, reliure tressé crème, angles et dos tressé noisette, gardes nubuck gold et papier noir, étui (Jean de Gonet, 2007). Édition originale. Préface de G. Jean-Aubry. Ouvrage réunissant la correspondance de Joseph Conrad (1854-1924) rédigée entre 1889 et 1924 en langue française. On peut y découvrir l’aisance linguistique pour le français de cet écrivain anglais d’origine polonaise au « bon accent provençal » selon les dires de Paul Valéry, à travers les lettres échangées avec André Gide, Valery Larbaud, Waliszewski, Davray... Un des 110 exemplaires réimposés sur papier vergé Lafuma-Navarre ; celui-ci est du tirage réservé aux Bibliophiles de la Nouvelle Revue française, imprimé spécialement pour M. Vanderborght. Reliure muette de Jean de Gonet, appartenant à la famille des 34 reliures « en biais » recouvrant chacune un texte de Conrad. Dimensions : 220 x 174 mm. Jean de Gonet, Joseph Conrad-34 reliures en biais de Jean de Gonet, Artefacts, 2007, n° 25.
14. ALBIN GUILLOT (L.). Micrographie décorative. Paris, chez l’Auteur, 1931, in-folio, reliure à spirale, premier plat estampé d’un décor de feuillages et marqué du titre en grandes lettres au palladium, chemise d’éditeur cartonnée à rabats marquée du titre et du nom de l’auteur. Édition originale. Préface de Paul Léon, directeur général des Beaux-Arts. Science et art. Figure active de la photographie d’avant-garde, adhérant au mouvement de la Nouvelle Vision des années 1930, Laure Albin Guillot (1879-1962) connut un important succès pour ses clichés consacrés au monde publicitaire et de la mode. Épouse et collaboratrice d’un chercheur spécialiste en microscopie, une première approche entre science et art fut conceptualisée au sein du couple, établissant ainsi les bases expérimentales d’un style moderniste. Projet très personnel survenu après la mort de son époux, Laure Albin Guillot corréla les recherches de son mari à son travail artistique dans Micrographie décorative, afin d’y révéler par l’étude scientifique un répertoire stylistique neuf et illimité. Recherchant dans les structures moléculaires ou cristallisées, les beautés géométriques des formes proposées par la nature, l’album fut très vite rapproché des travaux des designers Art Déco ; et bien que Micrographie décorative eût un tirage confidentiel n’ayant fait l’objet d’aucune mise en commerce, il acquit rapidement un statut de classique du livre photographique d’Art Déco et fut exposé dès 1939 par Beaumont Newhall au MOMA de New York. 18
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20 microphotographies de Laure Albin Guillot. Imprimées par photogravures en différentes couleurs sur papier métallique, la vue en coupe d’une racine d’orge ou encore le cliché de l’acide margarique nous permettent d’observer la beauté insoupçonnable des formes géométriques et kaléidoscopiques proposées par la nature. Exemplaire très bien conservé. Chemise d’origine rentoilée. Édition limitée à 305 exemplaires. Dimensions : 425 x 364 mm. Martin Parr and Gerry Badger, The Photobook : A History vol. 1, 2004, p. 65, p. 80 ; Michel Frizot, Nouvelle Histoire de la photographie, 1995, p. 674. Reproduction en frontispice
15. CREVEL (R.) & ERNST (M.). Mr Knife Miss Fork. Translated by Kay Boyle. Illustrated by Max Ernst. Paris, Black Sun Press, 1931, in-12, cartonnage noir, premier plat orné d’une plaque dorée avec, en son centre, l’esquisse d’un torse féminin, second plat orné du même décor mais à froid, dos lisse orné, tranches lisses, emboîtage à dos de maroquin (cartonnage d’éditeur). Traduction anglaise du premier chapitre Monsieur Couteau, Mademoiselle Fourchette, extraite de l’ouvrage de Crevel, Babylone, publié aux éditions Simon Kra en 1927. Dans ce court extrait on retrouve les principaux thèmes chers à l’auteur : la méditation, les digressions, la mort, les personnages défiant toute vraisemblance, l’enfance… 19 photogrammes de frottage de Max Ernst réalisés dans l’atelier de Man Ray, chacun précédé d’une serpente légendée en rouge. Réalisés d’après des frottages originaux de Max Ernst, ils furent ainsi obtenus : chacun d’eux fut appliqué sur du papier photo, la face contre le papier sensible et exposé à la lumière. Les parties dessinées retiennent ainsi la lumière et apparaissent en blanc sur fond noir (Werner Spies). Le cartonnage décoré de l’édition a été réalisé par Gonon, relieur et premier éditeur de Paul Éluard, d’après une maquette conçue selon certains par Man Ray, pour d’autres elle serait de Max Ernst. L’un des 200 exemplaires sur finest bristol paper ; celui-ci présente la particularité d’avoir le frontispice signé par Ernst, état réservé au grand papier. Coiffe supérieure épidermée. Édition limitée à 255 exemplaires. A. Roth, Seminal Photographic Books of the Twentieth Century, p. 66 ; W. Spies, La Révolution surréaliste, Centre Pompidou, p. 443.
16. SCHMIED (F.-L.). Peau-Brune de St-Nazaire à La Ciotat. Journal de bord de F.-L. Schmied. S.l., Société des XXX, 1931, in-4°, en ff., couverture, chemise, étui. 121 gravures sur bois en couleurs de Schmied. « Édité par le XXX de Lyon, Peau brune est le journal de bord de F.-L. Schmied. C’est aussi le nom de la goélette de quatre-vingt-dix tonneaux sur laquelle, yachtman, l’artiste entreprit en compagnie de Jean Dunand une croisière de Saint-Nazaire à La Ciotat. Le bateau était très beau, une tête de bélier, laquée rouge et noir par J. Dunand, en guise de proue, un aménagement étudié par Dunand également, des voiles ocre et jaune au vent, Schmied comptant faire le tour du monde aux frais d’un groupe de bibliophiles pour en rapporter les illustrations d’un prochain livre. Malheureusement des événements imprévisibles allaient contrecarrer ce projet. » Exemplaire signé par Schmied. Tirage limité à 135 exemplaires. 20
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17. MALRAUX (A.). La Condition humaine. Paris, NRF, 1933, in-4° tellière, maroquin prune janséniste, dos lisse, doublure et gardes de daim rouge serties d’un listel de box gris souris, couverture et dos, tranches dorées sur témoins, chemise et étui bordés de maroquin rouge (C. et J.-P. Miguet). Édition originale. Malraux entama la rédaction de ce roman en septembre 1931, lors de son tour du monde qui l’amena à Canton, puis Shanghai, ville choisie précisément par l’auteur pour camper son récit. Il se déroule de l’insurrection communiste de mars 1927 à son étouffement par Tchang Kaï-Chek, le 12 avril de l’année suivante. Ce roman métaphysique rencontra tout de suite un large public, et reçut le prix Goncourt à sa sortie. L’un des 39 premiers exemplaires sur papier vergé pur fil Lafuma-Navarre ; celui-ci est un des 9 hors-commerce. Reliure janséniste de Colette et Jean-Pierre Miguet, parfaitement réalisée. Ils dirigèrent conjointement un atelier à Genève de 1949 à 1951, année d’ouverture de leur officine parisienne. Dimensions : 215 x 161 mm. Michel Cazenave, En français dans le texte, 369.
18. ROUAULT (G.). Cirque de l’étoile filante. Eaux-fortes originales et dessins gravés sur bois par Georges Rouault. Paris, Vollard, 1933, in-folio, broché, couverture. De Seurat à Picasso, en passant par Chagall et Léger, le cirque occupe une place de choix dans l’imaginaire des peintres. Nombreux furent les tableaux inspirés par les clowns, acrobates et danseuses du cirque Médrano, boulevard Rochechouart. À son tour, Georges Rouault s’essaya à ce sujet, et c’est au terme de longs et coûteux efforts que le Cirque de l’étoile filante vit le jour. L’ouvrage succède en effet à un premier projet avorté, Cirque, auquel Georges Rouault travailla de 1926 à 1932, fournissant à son éditeur, Ambroise Vollard, plus de 70 bois et eaux-fortes en couleurs, les uns tirés par Georges Aubert, les autres par Maurice Potin. Le travail de ce dernier mécontenta l’artiste au point qu’il rompit avec lui en 1932. Mais c’est le texte d’André Suarès qui mit fin au projet, l’éditeur le jugeant trop polémique, à commencer par la diatribe sur les « yankees », qui risquait de lui aliéner sa clientèle américaine. Il fut alors question d’un autre Cirque, sans le concours d’André Suarès, consensus qui permettait au peintre et à l’éditeur de ne pas complètement perdre toutes ces années de travail, les bois étant conservés. Georges Rouault se lança dans la réalisation de 17 eaux-fortes, tirées par Roger Lacourière, parfait maître-imprimeur. Il écrivit également le texte de ce nouvel ouvrage, intitulé le Cirque de l’étoile filante. 17 eaux-fortes originales en couleurs hors-texte et 82 in-texte gravés sur bois par Georges Aubert d’après Rouault. L’ un des 25 exemplaires hors-commerce sur vergé de Montval. Il est conservé dans une chemise-étui de Devauchelle. Édition limitée à 280 exemplaires. Dimensions : 448 x 337 mm. Rouault-Chapon, Œuvre gravé, Rouault, T. II, 240-246 ; Chapon, Rouault, Le livre des livres de Rouault, pp. 11-12 ; Kornfeld, Les peintres et le livre, n° 170. 22
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19. HUGNET (G.) & BELLMER (H.). Œillades ciselées en branche. Paris, Jeanne Bucher, 1939, in-12, broché, couverture rose recouverte d’une dentelle de papier blanc. Édition originale. Recueil de poèmes dédiés à Germaine Hugnet et à Margaret Bellmer. L’ouvrage, réalisé selon la technique de l’héliogravure coloriée à la main en plusieurs passages, reproduit avec fidélité les poèmes calligraphiés du Parisien et les dessins de Bellmer, qui a su jouer avec les espaces laissés libres par le texte. 25 compositions en couleurs de Hans Bellmer, sur le thème des métamorphoses du corps. Le trait de Bellmer n’est pas sans rappeler celui de Beardsley. L’un des 200 exemplaires sur Rives, numérotés à la main. Édition limitée à 231 exemplaires.
20. MICHAUX (H.). Arbres des tropiques. Paris, Gallimard, 1942, in-12, broché, couverture illustrée. Édition originale. L’un des livres les plus atypiques de l’auteur. Conçu au cours d’un voyage au Brésil (juillet 1939-janvier 1940) qu’effectua Henri Michaux (1899-1984) pour fuir les conflits déchirant l’Europe, le livre au sujet insolite s’ouvre sur un texte-préface ; un poème métaphorique qui ne fera l’objet d’aucune réédition, accompagné d’un ensemble de dessins d’arbres exotiques découverts lors du périple. Le côté décalé de l’ouvrage permet à l’auteur, comme il n’eut de cesse dans son œuvre, de revendiquer la primauté poétique aux agitations et considérations humaines. Typographe averti amateur du livre-objet, Henri Michaux souhaitait pour sa publication une impression rapide et de qualité, et ce malgré les difficultés d’approvisionnement rencontrées dues à la guerre. Cet empressement, bien que coutumier chez Michaux, fut à l’origine d’un combat féroce avec ses éditeurs, l’amenant à se brouiller avec son ami Jean Ballard des Cahiers du Sud, pour obtenir au bout du compte, suite à de longues et fastidieuses négociations, la publication chez Gallimard. 18 dessins d’Henri Michaux. Reproduits aux traits, ces curieux végétaux aux formes extravagantes sont ici traités dans un langage poétique et littéraire qui préfigure de façon allégorique la nature intrinsèque de l’homme ; son éternelle instabilité. Par la peinture et le dessin, Henri Michaux chercha à exprimer autrement que par des mots ses recherches sur l’être, son dessin apparaissant comme une autre forme d’écriture. Exemplaire offert à Nina Dausset par Michaux, enrichi d’un dessin à l’encre de Chine et d’un envoi autographe :
Animatrice de la galerie d’avant-garde La Dragonne, elle exposa une série de gouaches de Michaux en 1953. Édition limitée à 350 exemplaires tous sur héliona des papeteries Navarre. Provenance : Nina Dausset. 24
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21. KERTÉSZ (A.). Day of Paris. New York, J. J. Augustin, 1945, in-8°, cartonnage et jaquette illustrée à rabats d’éditeur. Édition originale. Premier livre de sa période américaine (1936-1962). Annonciateur de Garry Winogrand ou de Lee Friedlander, amenant Brassaï (1899-1984) à la photographie et référence d’Henri Cartier-Bresson (1908-2004), ses clichés se distinguent par un intérêt prononcé pour l’intimisme au style dit « clos ». Fondant l’approche du documentaire humaniste à la « française » singularisé par ces scènes de genre pleines de rêverie, André Kertész (1894-1985) compta parmi les photographes les plus influents de Paris à la fin des années 1920. Avec la ville lumière il connut une relation toute particulière ; si la parution en 1936 de Paris vu par André Kertész le révéla à l’Europe, c’est une nouvelle fois grâce à la capitale et Day of Paris, son premier livre publié aux États-Unis, qu’il reçut la difficile reconnaissance américaine. Le livre est composé de trois parties : Morning, Afternoon et Night, et les photographies sont ordonnées selon l’heure de leur prise de vue, offrant un tour de la ville en 24 heures. Légendé par George Davis et conçu par Alexis Brodovitch (1898-1971), l’un des directeurs artistiques les plus doués de sa génération, il s’agit de l’ouvrage le plus abouti d’André Kertész renfermant certains clichés majeurs de son œuvre. 103 photographies en noir et blanc d’André Kertész. Prises entre 1925 et 1935 quand il vivait à Paris, les photographies réunies pour Day of Paris sont dépourvues de tout commentaire social offrant une vision de la ville très personnelle d’André Kertész qui mêle sa mélancolie et son goût pour la composition et les cadrages modernistes. Cette nostalgie visible en toile de fond s’explique par ses difficultés rencontrées à son arrivée sur le continent américain et les regrets de sa notoriété laissée en France. Exemplaire bien complet de la rare jaquette. Elle présente quelques restaurations. Dimensions : 250 x 183 mm. Martin Parr and Gerry Badger, The Photobook : A History vol. 1, 2004, p. 189, p. 200 ; Andrew Roth, The book of 101 books, 2001, pp. 114-115 ; BNF, La photographie humaniste, 2006, pp. 32-33.
22. DUBUFFET (J.). Ensemble de 37 catalogues, invitations, prospectus, affiches. 1. Exposition de lithographies de Jean Dubuffet avec quelques peintures et dessins du même artiste ayant rapport aux Murs. Paris, Galerie André, 1945, in-16, agrafe. 2a. Mirobolus Macadam & Cie - Hautes Pâtes. [Paris, Galerie René Drouin, [3 mai 1946]], papillon dépliant multicolore. 2b. Mirobolus Macadam & Cie - Hautes Pâtes. Paris, Galerie René Drouin, [1946], in-8°, agrafes, couverture typographiée. 3. Exhibition of Lithographs by Jean Dubuffet. New York, Pierre Matisse Gallery, 1947, in-8°, agrafes, couverture illustrée. 4. Les gens sont bien plus beaux qu’ils croient - Vive leur vraie figure - Portraits à ressemblance extraite, à ressemblance cuite et confite dans la mémoire, à ressemblance éclatée dans la mémoire de Mr. Jean Dubuffet - peintre. [Paris, Galerie René Drouin, 1947], in-folio de 2 ff.. 5. Notice sur la Compagnie de l’Art Brut. [Paris, Compagnie de l’Art Brut, Octobre 1948], in-8° de 2 ff. 6a. Vous êtes invité à visiter l’exposition de dessins et peintures de Jean Dubuffet organisée par l’auteur et son ami Geert van Bruaene... Bruxelles, [Galerie Le Diable par la queue, 17 décembre 1949], in-4° d’un f.. 26
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6b. Mémorial de la petite exposition de dessins et de peintures de Jean Dubuffet joyeusement organisée à Bruxelles en décembre 1949 par l’auteur et son ami Geert Van Bruaene pour l’inauguration de sa nouvelle boutique : Le Diable par la Queue. Bruxelles, Galerie Le Diable par la queue, 1949, in-4°, attache de fil noir. 7. Vous êtes invité à visiter l’exposition de : La Métromanie ou Les dessous de la Capitale, par Jean Paulhan, calligraphié et orné de dessins par Jean Dubuffet. [Paris, Galerie Nina Dausset, 4 février 1950], in-4° d’un f. sur papier rose. 8. Peintures initiatiques d’Alphonso Ossorio par Jean Dubuffet. [Paris, La Pierre Volante, [1951]], 2 ff. in-12° sur papier rose saumon. 9. ... des toiles, des gouaches, des dessins, des lithographies, des livres (1943-1951) ont été choisis et réunis... Paris, [Galerie Rive Gauche, 17 mars 1951], in-4° d’un f. sur fond jaune. 10. René Drouin présente au Cercle Volney (...) les peintures, dessins et travaux divers de Jean Dubuffet. [Paris, Cercle Volney, 17 mars 1954], un f. in-4°, illustré. 11. Petites statues de la vie précaire de Jean Dubuffet. Paris, Galerie Rive Gauche, 1954, in-8°, agrafe, couverture typographiée. 12. Daniel Cordier présente (...) Dewasne - Dubuffet - Matta. [Paris, Galerie Daniel Cordier, 18 décembre 1956], un f. dépliant. 13. Tableaux d’assemblages. Paris, Galerie Rive Droite, 1957, in-4°, agrafes, couverture typographiée. 14. Jean Dubuffet - La Hune vous présente (...) avec la participation des auteurs et des réalisateurs, les deux nouveaux livres consacrés au peintre : Introduction à son œuvre, par James Fitzsimmons / les Assemblages de Jean Dubuffet, Signes, Sols, Sorts, par Pierre Voldboudt. [Paris, Librairie La Hune, [1958]], simili-papier kraft. 15. Alphonse Chave présente l’Art Brut. Vence, Galerie Les Mages, 1959, in-8°, agrafe, couverture illustrée. 16a. Célébration du Sol. [Paris, Galerie Daniel Cordier, avril 1959], un f. in-4°. 16b. Célébration du Sol. Paris, Galerie Daniel Cordier, 1959, gr. in-4°, couverture à rabats, papier de cristal typographié. 17. Einladung zur Ausstellung Dubuffet. [Dusseldorf, Galerie Schmela, 18 juillet 1960], un f. in-8°. 18a. Lithographies. Série des Phénomènes. [Paris, Galerie Berggruen & Cie, 6 mai 1960], papillon illustré. 18b. Lithographies. Série des Phénomènes. Paris, Galerie Berggruen & Cie, 1960, in-8°, broché, couverture à rabats. 19a. As tu cueilli la Fleur de barbe. [Paris, Galerie Daniel Cordier, 31 mai 1960], un f. in-4° à rabats. 19b. As tu cueilli la Fleur de barbe. Paris, Galerie Daniel Cordier, 1960, in-4°, agrafes, couverture illustrée, bandeau typographié. 20a. Matériologies de Jean Dubuffet. [Frankfurt, Galerie Daniel Cordier - Pierre de Montbas, 3 mars 1961], papillon typhographié. 20b. Matériologies de Jean Dubuffet. Frankfurt, Galerie Daniel Cordier - Pierre de Montbas, 1961, in-4°, agrafes, couverture illustrée, film plastique typographié. 21. Dubuffet. Roma, Galleria Il Segno, 1962, triptyque illustré. 22a. Paris circus. [Paris, Galerie Daniel Cordier, 7 juin 1962], papillon illustré. 22b. Paris circus. Paris, Galerie Daniel Cordier, 1962, in-8°, broché, couverture illustrée. 28
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23. Jean Dubuffet. Roma, Marlborough Galleria d’Arte, [9 mars 1963], papillon dépliant cartonné. 24. L’Hourloupe. Paris, Le Petit Jésus, 1963, in-16°, broché, couverture typographiée. 25. Le cabinet logologique accompagné de Villa Falbala, Le Mur bleu, Elément d’architecture contorsionniste V. Paris, Centre National d’Art Contemporain, 1970, in-4°, agrafes, couverture à rabats. 26. Jean Dubuffet. Paris, Galerie Jeanne Bucher, 1971, in-4°, broché, couverture illustrée à rabats. 27. Parachiffres, mondanités et autres peintures de 1975. Basel, Galerie Beyeler, 1976, in-4°, dépliant illustré. 28. Le salon d’été et autres. Paris, Musée des Arts Décoratifs, 1978, in-4°, agrafes, couverture illustrée. 29. J. Dubuffet - choix d’œuvres de 1942 à 1981. [Paris, Galerie Baudoin Lebon, 1983], papillon. 30. Rétrospective : peintures, sculptures, dessins. [Saint-Paul-de-Vence, Fondation Maeght, 6 juillet 1985], triptyque illustré. Un détail pour chaque pièce est disponible.
23. [ALCAFORADO (M.)] & MATISSE (H.). Lettres portugaises. Paris, Tériade, 1946, in-4°, en ff. couverture rempliée, chemise, étui. Publié pour la première fois en 1699, ce texte célèbre, anciennement attribué à Mariana Alcaforado, a été récemment restitué à l’écrivain français Guilleragues. Un livre entièrement conçu par son illustrateur, le peintre Henri Matisse, la mise en pages et les images sont de sa main. Le cycle iconographique est formé de 20 lithographies originales à pleine page, dont 19 sur le thème du visage, ici inspiré par celui d’un jeune modèle russe de 14 ans, Doucia, de cinq titres décorés, cinq départs de chapitre, deux compositions de couverture, 75 lettres ornées et décorations. L’un des 80 premiers exemplaires, comportant une suite de 12 planches d’étude, soit 12 lithographies originales. Édition limitée à 270 exemplaires, tous sur vélin d’Arches et signés par l’artiste. Duthuit, Henri Matisse, Catalogue raisonné des ouvrages illustrés, n° 15.
24. SAINT-JOHN PERSE. Vents. Paris, Gallimard, 1946, in-4°, box janséniste chocolat, dos lisse orné, doublure et gardes de daim havane, couverture et dos, tranches dorées sur témoins, chemise et étui gainés de box (J.-P. Miguet). Édition originale. Écrit en 1944, Vents constitue le second grand recueil du cycle américain de Saint-John Perse. Important poème consacré à un élément naturel, il fut publié à la NRF. Qu’il s’agisse des Andes, des hauts plateaux de l’Amérique du Sud ou des grands espaces du Nord... on retrouve une palette de paysages, américains pour la plupart, ce qui traduit, après Exil, un certain « ancrage » du poète à ce continent. Depuis 1946, sa situation s’est d’ailleurs stabilisée par l’obtention d’une bourse allouée par une fondation privée de mécénat littéraire, la Bollingen Foundation de New York. L’un des 15 premiers exemplaires sur papier de Chine ; celui-ci est l’un des 5 hors-commerce. Sobre reliure janséniste des Miguet qui, après avoir dirigé conjointement un atelier à Genève, s’établirent à Paris en 1951. Provenance : Bibliothèque Fred Feinsilber (ex-libris). 30
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25. TAPIÉ (M.) & DUBUFFET (J.). Mirobolus Macadam & Cie. Hautespâtes de Jean Dubuffet par Michel Tapié. Paris, René Drouin, 1946, gr. in-4°, broché, non rogné, couverture imprimée rempliée. Monographie de Michel Tapié. Parfait exemple de la manière dont un artiste peut orchestrer l’exposition qui lui est consacrée. S’attelant au catalogue de l’exposition, Dubuffet en confia le texte à Tapié, la mise en pages à Olga Drouin et les relectures à Paulhan, ce qui ne l’empêcha pas de veiller diligemment aux moindres détails et d’embellir le tout par une lithographie réalisée à cette occasion, Suite de visages bronzés, qui annonce l’intérêt nouveau du peintre pour les matières minérales. Il la plaça en tête du texte, des 32 reproductions photographiques des œuvres et des indications qu’il avait rédigées. Une autre variante de cette planche deviendra l’affiche de l’exposition. Peut-être parce qu’il anticipait le scandale que provoquerait sa peinture, l’artiste joignit au catalogue une brochure de son cru du même titre, Mirobolus Macadam & Cie, sorte de duplicata ou version abrégée du premier, comprenant un texte-manifeste, « L’auteur répond à quelques objections », daté du 23 mars 1946, et une nomenclature des œuvres. Alors que régnait l’abstraction en France, les critiques et le public furent choqués par la facture des tableaux et le caractère truculent, grossier, empâté des personnages. Les plus tolérants voulurent voir en Dubuffet un farceur sans talent sérieux, tandis que la critique américaine fut des plus élogieuses. L’un des 30 premiers exemplaires sur papier vélin d’Arches à la forme, les seuls à contenir la lithographie en trois couleurs Suite de visages bronzés tirée sur Rives, signés par l’auteur, le peintre, l’imprimeur et l’éditeur. Dans ce format, le tirage de cette planche est aujourd’hui connu à 32 exemplaires. Petits défauts à la couverture. Dimensions : 320 x 250 mm. S. Webel, Jean Dubuffet, Catalogue raisonné de l’œuvre gravé, I , p. 48 ; Dubuffet, Centre Pompidou, pp. 361-363 ; Jean Dubuffet, Prospectus et tous écrits suivants, II., pp. 63-66 .
26. GRACQ (J.). Liberté grande. Paris, J. Corti, 1946, in-12, maroquin bleu traversé de lignes brisées reprenant la disposition du décor des plats recouverts de papier orange orné de jeux de filets dorés et argentés, dos lisse, couverture et dos, tête dorée, non rogné, étui (P.-L. Martin). Édition originale. Premier et unique recueil poétique de l’auteur. Composé d’une quarantaine de poèmes en prose, il fut rédigé durant les années de guerre et publié dès son retour de captivité, à la fin de l’année 1946. Gracq l’enrichit, au fur et à mesure des éditions successives, jusqu’en 1969. Liberté grande illustre une forme particulière de la poésie, la prose poétique, qui exclut le vers. Inaugurée par les « petits poèmes en prose de Baudelaire », elle fut passablement enrichie par tous les grands poètes modernes et contemporains, Nerval, Louÿs, Max Jacob, Valéry, Jouve, Rimbaud... sous le patronage duquel est d’ailleurs placé le recueil. Parfaitement adaptée au talent de Gracq selon Yves Vadé, cette prose si particulière confère aux lieux, aux instants et aux êtres fugacement évoqués, une beauté étrange, envoûtante et délibérément floue. Frontispice par A. Masson. L’un des 50 exemplaires sur papier vélin du Marais. Y. Vadé, Le poème en prose (« La composition de poèmes en prose est la mise en œuvre naturelle de la forme d’écriture qui lui est propre »), p. 145 . 32
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27. ÉLUARD (P.). Elle se fit élever un palais. Paris, Maeght, 1947, gr. in-folio, vélin ivoire, plats ornés d’une grande composition abstraite, inversée suivant les plats, de bandes de papier de liège et de bois disposés verticalement et horizontalement soulignées de filets dorés et poussés à l’œser, dos lisse avec titre en long, doublure de vélin, gardes de daim vert, couverture illustrée d’une vignette dessinée par l’artiste et dos, chemise et étui gainés de maroquin fauve (R. Adler, 1955). Poème d’Éluard paru dans le recueil 22, La Rose publique, en 1934, illustré par le peintre Serge Rezvani, d’origine russe par sa mère et persane par son père. Serge Rezvani (1928- ), tour à tour peintre, chansonnier, dramaturge, poète et écrivain. Arrivé très jeune en France, il étudia à la Grande Chaumière sous la direction de Friesz jusqu’à l’âge de dix-huit ans. Il exposa à Paris, en Suisse, en Suède et au Mexique, se joignit au groupe de jeunes artistes d’obédience abstraite « les Mains éblouies », période de son œuvre qui lui valut une estime toute d’esthétisme et de raffinement. Dès 1965, il conçoit une peinture de facture réaliste, qui prendra en 1969 un tour politique, dénonçant par la mise en images, la guerre du Vietnam. Également compositeur de chansons interprétées surtout par Jeanne Moreau, il se consacra progressivement à l’écriture sous toutes ses formes ; pièces de théâtre, roman, poème, journal et autobiographie. Dans Les Repentirs du peintre, Rezvani décrit sa lente mutation de la peinture à la littérature. Bois gravés de Serge Rezvani dont 2 couleurs et 9 en noir. « Pendant l’hiver 1946, Lanzmann et Rezvani se rendent sur la Côte d’Azur. Un soir, Lanzmann vola dans la rue une caisse de savon et s’amusa de son canif à graver une planche, puis la mouilla d’encre pour en tirer l’image. Il illustra ainsi une nouvelle qu’il écrivit. De son côté, Rezvani réunit un certain nombre d’épreuves et envoya le rouleau à M. Monny de Boully qui alla voir Éluard. Son enthousiasme fut immédiat et il n’hésita pas à lui confier un de ses plus beaux et vastes poèmes... Rezvani tomba malade, mais de retour à Paris il tira lui-même ces planches que contenait sa valise dans l’atelier de Mourlot. Il dut se limiter à 16 exemplaires tant la matière du bois était mauvaise. » Exemplaire, dont chaque bois a été signé, justifié et daté par l’artiste, enrichi : – d’une gouache en couleurs de Rezvani. Femme de profil. 48,5 x 32,6 cm. – d’un tirage en noir du frontispice, avec au verso un dessin. – d’un bois en couleur, variante de l’illustration de la page 5. – d’une suite d’essai en noir ou en couleurs des 9 bois en noir. – d’une épreuve unique tirée pour Mr Goulier, signée et datée 1959. – du faire-part de décès de Paul Éluard. Intéressante reliure de Rose Adler (1890-1959), d’une format inhabituel chez cette dernière, dont on connaît l’attirance pour les miniatures ou les formats intimes. Malgré ses dimensions, cette dernière n’a pas dû être insensible à ce livre qui rappelle par son côté artisanal et son faible tirage certaines productions de PAB. Tirage limité à 16 exemplaires numérotés sur vélin de Montval, tous signés par l’auteur. Provenance : Goulier, célèbre et discret collectionneur des années 1960 ; Pierre Berès avec son étiquette. Dimensions : 507 x 326 mm. Dumas-Scheler, Paul Éluard, Œuvres complètes, pp. 1057-1058 ; Chapon, Le Peintre et le Livre, pp. 169-170 (« Cautionner une mise en train aussi peu rentable, commercialement parlant, ne pouvait être que le fait du prince, ici de l’éditeur ») ; Bénézit, II, 626-627 ; J.-Cl. Vrain, Filipacchi, 2005, n° 115. Reproduction de la reliure en couverture 34
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28. ÉLUARD (P.) - MAN RAY & DORA MAAR. Le temps déborde. Paris, Éditions Cahiers d’art, 1947, in-4°, broché, couverture à rabats. Édition originale. Poignant hommage écrit après la mort de Nusch, l’égérie du poète. Ces 14 poèmes furent publiés sous le nom de Didier Desroches, pseudonyme utilisé par Paul Éluard (1895-1952) afin d’« échapper aux formes d’écriture qui lui sont personnelles ». Le recueil structuré en deux parties se compose d’un premier ensemble de poésies écrites avant la mort de Nusch (1906-1946) où l’amour et la tendresse d’Éluard s’expriment avec lyrisme ; la seconde partie est constituée de poèmes produits en réaction à l’événement malheureux, lesquels manifestent la détresse immense du poète : « J’étais si près de toi que j’ai froid près des autres. » Deux poèmes du recueil furent pré-publiés dans la revue argentine Sur et dans Les Lettres françaises. Destiné à un cercle intime, ce livre souvenir marqua une rupture dans la vie de l’homme et de l’auteur, le poète résistant et engagé porteur de bonheur et d’espoir n’exprimant plus que sa solitude et la négation de son existence. Le soutien du couple Trutat, auquel le recueil est dédié, lui permit de reprendre goût à la vie comme en témoignent ses futurs Poèmes politiques, retraçant ce cheminement qui le mena du déchirement à l’espoir retrouvé. 10 photographies de Man Ray et Dora Maar. Les dix clichés, portraits multiples de Nusch, dévoilent la beauté séduisante de ce visage aux traits mimétiques qui inspira les artistes du surréalisme. Recueil intime, son illustration ne pouvait être confiée qu’à ses plus fidèles amis, dont Man Ray (1890-1976) avec lequel Paul Éluard s’était déjà associé pour célébrer Nusch dans Facile, recueil de 1935, et Dora Maar (1907-1997), amante et muse de Picasso, présentée en 1935 par l’entremise du poète. Après sa rupture avec le peintre, Dora Maar traversa une période douloureuse qu’Éluard s’efforça d’atténuer, prévenance ne laissant pas indifférente la photographe qui l’aida à son tour en œuvrant à cette parution. Exemplaire numéroté, sur papier couché, très bien conservé. Tirage limité à 500 exemplaires numérotés, dont quelques exemplaires sur japon. Dimensions : 245 x 180 mm. Pléiade, Œuvres complètes, T. II, pp. 1059-1063, p. 1345 ; Pléiade, Album Éluard, pp. 268-271 ; J.-C. Gateau, Paul Éluard ou Le frère voyant, 1988, pp. 309-313.
29. DUBUFFET (J.). Ler dla canpane. Paris, L’Art Brut, 1948, in-12, agrafes, couverture. Ler dla canpane apparaît comme le premier véritable livre de Dubuffet, si l’on excepte les livres de Pierre Seghers, Paul Éluard et André Frénaud, lesquels sont seulement accompagnés d’une ou deux lithographies extraites de l’album Matière et Mémoire. Le texte, dont l’orthographe phonétique est propre au peintre, est reproduit au stencil sur papier journal. Six gravures sur fond de boîte de camembert ou sur linoléum tirées en noir, l’accompagnent. La publication d’un tel livre marque une rupture dans l’édition, quelque peu traditionnelle, des livres illustrés de cette époque. C’est l’un des premiers livres de l’Art brut. Bien que le tirage soit non annoncé, il serait de 165 exemplaires, tous sur papier journal. La fragile couverture est ici bien conservée. Noël Arnaud, Jean Dubuffet : gravures et lithographies, n° 96-105 ; Jean Dubuffet, Prospectus et tous écrits suivants, I, pp. 475-478 ; Antoine Coron, 50 livres illustrés depuis 1947, n° 6 ; Castleman, A Century of artists books, p. 46. 36
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30. [..]. Poésie de mots inconnus. Paris, Le Degré 41, 1949, [1949], in-8° de 29 ff. pliés en quatre répartis en cinq chemises portant imprimés les noms des collaborateurs représentés à l’intérieur de chacune, le tout contenu dans deux feuillets doubles formant chemise, eux-mêmes placés dans une couverture de parchemin illustrée [par Ribemont-Dessaignes] avec la mise en garde Ne coupez pas mes pages, enveloppe de parchemin. Poésie de mots inconnus, l’un des plus célèbres recueils d’Iliazd, auquel ont participé plus de quarante poètes et artistes, rassemble, auprès de quelques inédits, une majorité de textes parus de 1910 à 1948. Ils sont l’œuvre de l’avant-garde russe, des principales figures du mouvement Dada, français ou allemand, et d’autres amitiés du Montparnasse des années 1920. Se présentant sous forme de feuillets libres, répartis en cinq chemises, le livre témoigne d’une grande invention typographique. Iliazd publia cette anthologie de la poésie phonétique authentique en réponse à l’ouvrage d’Isidore Isou, Introduction à une nouvelle poésie et à une nouvelle musique, manifeste pour une nouvelle forme de poésie. Textes d’Akinsemoyin, Albert-Birot, Arp, Artaud, Audiberti, Ball, Beaudin, Bryen, Dermée, Hausmann, Huidobro, Iliazd, Jolas, Khlebnikov, Krutchonykh, Picasso, Poplavsky, Schwitters, Seuphor, Terentiev, Tzara, ornés par Arp, Braque, Bryen, Chagall, Dominguez, Férat, Giacometti, Gleizes, Hausmann, Laurens, Léger, Magnelli, Masson, Matisse, Metzinger, Miro, Picasso, Ribemont-Dessaignes, Survage, Taeuber-Arp, Tytgat, Villon, Wols. L’un des 157 sur papier Isle-de-France à la cuve. Édition limitée à 171 exemplaires numérotés et signés par l’éditeur. Dimensions : 171 x 136 mm. The Artist and the Book, n° 305 ; Iliazd, Centre Georges Pompidou, 1978, p. 113 ; Cramer, Picasso, Livres illustrés, n° 54 ; Chapon, Le Peintre et le Livre, 209-211 et 293-294 ; 50 livres illustrés depuis 1947, Bibliothèque nationale, n° 7.
31. BRETON (A.) & KOPAC (S.). Au regard des divinités. [Paris, Messages, 1949], 6 ff., in-12 oblong plié, broché, couverture cartonnée noire imprimée, rabats intérieurs de papier bleu illustrés. Édition originale. Illustration de l’artiste croate Slavko Kopac (1913-1993). Après des études aux Beaux-Arts de Zagreb, il enseigna le dessin. En 1943 il émigra pour Florence, puis en 1948 à Paris où il rencontra Jean Dubuffet. En même temps qu’il développa son œuvre personnelle, peinture, sculpture, collage, poésie, illustration..., il devint conservateur des collections de l’Art brut au Foyer de l’art brut puis à la Compagnie de l’Art brut, avant de superviser le transfert du fonds à New York en 1951, puis à Lausanne en 1976. Au regard des divinités comme Tir à cible s’inscrit dans le mouvement initié par Jean Dubuffet, l’Art brut. Au dos du volume, figure sur un papillon de papier contre-collé le numéro de l’exemplaire. Tirage unique à 100 exemplaires, tous signés par Breton et Kopac.
32. PAULHAN (J.) & DUBUFFET (J.). La Métromanie ou les dessous de la capitale. Paris, E. et J. Desjoberts, 1949, in-8°, cartonnage en toile bleue, sur le premier plat titre de l’ouvrage en lettres dorées, dos lisse, non rogné (Cartonnage d’éditeur). Édition originale. 38
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Le texte et les 59 illustrations de Dubuffet (1901-1985) ont été tracés au roseau taillé à l’encre lithographique sur du papier report, puis reportés sur pierre. De septembre à décembre 1949, Dubuffet réalisa des dessins sur le thème du métro pour accompagner le texte de Paulhan (1884-1968), La Métromanie ou les dessous de la capitale, inspiré des gouaches réalisées par le peintre en 1943. Envoûté par l’atmosphère du métro parisien, il élabora cette série d’illustrations avec un regard différent et neuf : « Je travaille assidûment à calligraphier entièrement et orner le texte de Jean Paulhan sur le métro... Ces dessins m’intéressent beaucoup et je les fais avec grand entrain... Je rôde souvent dans le métro avec grand enchantement. Quel lieu étrange. » (Lettre à J. Berne, 6 nov. [1949]. Notes P II, p. 434). Le livre sera présenté à la galerie Nina Dausset, du 4 au 24 février 1950. Exemplaire en belle édition conservée dans une boîte à dos de buffle d’Alain Devauchelle. L’un des 125 exemplaires sur papier de chiffon gris souris. Édition limitée à 150 exemplaires. Dimensions : 200 x 200 mm. Provenance : collection lyonnaise. Webel, L’œuvre gravé et les livres illustrés par Jean Dubuffet, I, 64 à 76.
33. MICHAUX (H.) & ZAO WOU-KI. Lecture par Henri Michaux de huit lithographies de Zao Wou-Ki. Paris, Éditions Euros et Robert J. Godet, [1950], in-folio en ff., couverture à rabats, chemise d’éditeur, étui. Édition originale. Premier livre de Zao Wou-Ki (1920-), qui scella le début d’une longue et sincère amitié. L’ouvrage permit la rencontre entre le peintre et Henri Michaux (1899-1984). La vue des 8 planches, présentées par Robert Godet l’éditeur qui publia Exorcismes et Labyrinthes, fut une véritable révélation pour l’écrivain séduit par la vision d’un monde poétique et filiforme ; il s’empressa dès le lendemain de composer un poème pour chaque lithographie. Leur travail fut présenté à la librairie-galerie La Hune « Zao Wou-Ki / Michaux, Flocon / Bachelard : 2 artistes, 2 écrivains », qui permit au peintre de se faire connaître et remarquer à peine débarqué de Chine. Passeurs exemplaires entre l’Orient et l’Occident, s’initiant mutuellement à l’art de leur culture respective, Henri Michaux lui dédicaça un texte-préface dans Calligraphie chinoise (1971) « à mon introducteur en choses chinoises » ; Zao Wou-Ki quant à lui, témoigna de sa reconnaissance réciproque : « Il est un ami sacré [...] un des seuls qui comprenne vraiment le sentiment oriental. » Lecture restera le seul livre illustré par Zao Wou-Ki du vivant de l’écrivain. 8 lithographies de Zao Wou-Ki. Toutes premières lithographies de l’artiste, elles furent conçues avant même qu’il ne se destine à la peinture à l’huile. Tirées en trois couleurs et réalisées à l’atelier d’Edmond Desjobert à partir d’aquarelles et d’esquisses, il les dilua fortement à l’eau à la manière des techniques chinoises bien que cela soit déconseillé avec l’encre des lithographies ; le résultat inattendu et prometteur incita l’artiste à poursuivre dans cette voie. Un des 13 exemplaires hors-commerce sur Rives ; celui-ci fut offert par Henri Michaux à André Rolland et Cassilera de Renéville : « à son ami André Rolland de Renéville et à Cassilera de Renéville Hommage d’un homme qui tardivement songe à réapprendre à lire. H. Michaux » 40
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Ami d’Henri Michaux, André Rolland de Renéville (1903-1962) accompagné de sa femme Cassilera, côtoya fréquemment l’écrivain. Comme René Daumal, avec lequel il était très lié, il percevait dans la poésie une dimension spirituelle. Passionné d’occultisme et érudit en théosophie, son Rimbaud le voyant (1929) retint l’attention des surréalistes et lui permit d’intégrer le mouvement. Plus surréaliste dissident que membre convaincu, ce qui n’était pas pour déplaire à Henri Michaux, leur amitié fut sincère et profonde. Étui refait. Tirage limité à 92 exemplaires. Jean-Pierre Martin, Henri Michaux, 2003, pp. 220-221, pp. 471-472 ; Michaux, Œuvres complètes, La Pléiade, T. II., pp. 1140-1146 ; BNF, Zao Wou-Ki, estampes et livres illustrés, 2008, pp.18-20 ; A. Biro, R. Passeron, Dictionnaire général du surréalisme et de ses environs, 1982, p. 367.
34. PETRONIUS ARBITER (T.) & DERAIN (A.). Le Satyricon. Paris, Aux dépens d’un Amateur, [1951], in-folio, maroquin noir, sur les deux plats mosaïque de box noir sertie de box ocre et blanc, dessinant un visage stylisé de faune, dos lisse avec titre doré à la japonaise, doublure et gardes de daim noir, couverture et dos, chemise, étui (Creuzevault). Publié par Daniel Sickles et René Bas, l’ouvrage est orné de 33 burins originaux d’André Derain, gravés en 1934 d’après un projet d’Ambroise Vollard, et tirés en 1951 sous la direction de l’artiste. 43 bois d’ornements, interprétés par Paul Baudier d’après les dessins de Derain, complètent l’iconographie. L’un des 33 premiers exemplaires, contenant : - deux dessins originaux à la plume et encre de Chine, dont l’un représente un ornement. - une suite complète de 36 burins dont 3 inutilisés, sur vergé ancien. - une suite complète des burins sur vélin Richard de Bas. - une suite en noir d’ornements gravés sur bois tirée sur Malacca teinté. - une suite en gris des ornements sur Malacca blanc. L’exemplaire a été enrichi : - d’un dessin original à la sanguine, signé par Derain. Femme nue de dos. 41,5 x 9 cm. - d’un dessin à la plume et encre de Chine. Femme accroupie. 26,5 x 11 cm. Tirage à 326 exemplaires sur vélin d’Arches. Nous avons localisé quatre reliures de ce type, dont l’une est aujourd’hui conservée dans la collection du Victoria and Albert Museum de Londres. Cette série a été réalisée dans les années cinquante. Provenance : Colonel Vinckenbosch. Colette Creuzevault, Henri Creuzevault, 1905-1971, T. IV, p. 293 (Cite 2 exemplaires) ; [...] Henri Creuzevault, Relieur, Musée des Arts Décoratifs de Bordeaux, 1984, n° 28, p. 33.
35. PRÉVERT (J.). Spectacle. [Paris], Le Point du jour, 1951, in-8° carré, broché, couverture. Édition originale. À l’occasion de ce second recueil, Jacques Prévert présenta une soixantaine de textes, dont une vingtaine écrits exprès, les autres ayant été collectés avec le précieux concours de René Bertelé dans des revues et catalogues d’expositions, films et chansons. 42
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Il en résulta un curieux mélange, étonnamment varié, de sketches, saynètes, ballets, tableaux vivants, documentaires... que Prévert organisa en spectacle, poussant la vraisemblance jusqu’à insérer un programme, un intermède et un entracte à l’ensemble des pièces. Ainsi assimilée à la représentation, la lecture poétique devenait une véritable fête, susceptible de réjouir l’œil et l’oreille. L’un des 35 premiers exemplaires sur madagascar. Exemplaire conservé dans une chemise-étui de Thérèse Treille, non signée. Dimensions : 194 x 140 mm. Jacques Prévert, Œuvres complètes, La Pléiade, pp. 1117-1178.
36. CHAR (R.) & STAËL (N.). Poèmes. Paris, Aux Dépens de l’artiste, 1952, in-folio, en ff., couverture rempliée en gouttière, chemise, étui noirci et aux reliefs frottés d’agathe. L’un des rares livres entièrement assumé par son illustrateur, Nicolas de Staël, papier, caractère, illustration, chemise et étui, relevant tous de son propre choix. Conception et réalisation s’écoulèrent de juin à novembre 1951. 14 bois originaux à pleine page et une lithographie originale en couleurs sur la chemise. Pour ce premier livre illustré, Nicolas de Staël réalisa ses bois, sans connaître les textes qui les accompagneraient. Char, voyant les gravures, associa à chacune d’elles une pièce de Poème pulvérisé, recueil qui avait déjà fait l’objet d’une publication, ne sacrifiant ainsi en rien à son habitude qui consistait, pour ses grands livres illustrés, à les constituer de poèmes anciens, qu’il modifiait ou qu’il assemblait différemment. L’ouvrage, construit sur l’opposition noir-blanc, que l’on retrouve non seulement dans les bois, mais aussi dans l’architecture du livre, où illustration et texte ne sont jamais face à face, semble être unanimement apprécié. L’un des 15 premiers exemplaires sur grand vélin d’Arches comportant une double suite des bois sur japon ancien et sur vélin J. Green & Son. Tirage limité à 120 exemplaires, tous sur vélin d’Arches, signés par l’auteur et l’artiste. Dimensions : 367 x 285 mm. A. Coron, 50 Livres illustrés depuis 1947, n° 14 ; Nicolas de Staël, L’Œuvre gravé, Bibliothèque nationale, 2-16 ; Chapon, Le Peintre et le livre, pp. 270 à 273 (« Peu de livres où l’intrication soit aussi serrée que dans les Poèmes de R. Char illustrés par Nicolas de Staël. Deux génies dont l’impulsion animatrice coïncide ») ; Peyré, Peinture et Poésie, p. 150 (« En 1951 vient donc au jour ce volume très émouvant... L’affection qui unit les deux créateurs est à l’origine de cette publication qui entend le manifester clairement, le livre sera ainsi le monument le plus à même de saluer un sentiment ») ; Castleman, A Century of Artists Book, New York Museum of Modern Art, n° 148 ; Victoria & Albert Museum, From Manet to Hockney, p. 127. Voir reproduction ci-contre
37. SAGAN (F.). Bonjour tristesse. Paris, René Julliard, 1954, in-12, maroquin gris souris, dos à nerfs, doublure et gardes de box rose, couverture et dos, tranches dorées, chemise et étui bordés de même peau (Devauchelle). Édition originale. À sa parution, ce mince roman fit grand bruit. On s’étonna beaucoup de ce mélange de clairvoyance, de cruauté et de désinvolture chez une jeune fille de dix-huit ans. Récompensé par le Grand Prix 44
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de la Critique, l’ouvrage fut traduit dans une vingtaine de langues, imprimé à plusieurs milliers d’exemplaires et mis en scène en 1958 par Otto Preminger (1906-1986). Désormais connue sous le pseudonyme qu’elle s’était choisie à cette occasion, inspiré du personnage proustien Hélie de Talleyrand Périgord, le prince de Sagan, Françoise Quoiriez mena de front une vie de bohème et un travail d’écriture, avec de nombreuses incursions du côté du théâtre, de la chanson et du cinéma, éclipsées, aujourd’hui encore en France, par la notoriété de ce premier roman. L’un des rares exemplaires hors-commerce sur vélin Alfa de Navarre, premier papier, réservés à l’auteur. Le feuillet de justification porte une intéressante mention manuscrite de René Julliard : « L’ éditeur soussigné certifie que le nombre d’exemplaires hors-commerce qui a été tiré pour l’auteur est de vingt, passe et défaits compris. » Dos légèrement plus clair.
38. ARTAUD (A.) & ERNST (M.). Galapagos. Les Îles du bout du monde. Paris, Broder, 1955,
in-8°, en ff., couverture illustrée, chemise, étui. Édition originale de ce texte écrit pour Voilà, l’hebdomadaire du reportage. Des ouvrages publiés par Broder, il est le plus réussi et le plus significatif. De la collection Écrits et gravures. 11 eaux-fortes originales de Max Ernst dont une en couleurs pour la couverture rempliée, 4 hors-texte dont 2 en couleurs et 6 in-texte en couleurs. L’emboîtage est illustré de 2 compositions de Max Ernst reproduites en noir. Tirage limité à 135 exemplaires tous sur vélin de Rives, signés par Ernst. A. Coron, 50 Livres illustrés depuis 1947, n° 17 ; Chapon, Le Peintre et le Livre, pp. 251-258 ; The Artist & the Book, n° 101.
39. SIMON (C.). Le Vent. Tentative de restitution d’un retable baroque. Paris, Éditions de Minuit, 1957, in-12, broché, couverture. Édition originale du premier ouvrage de l’auteur publié par les éditions de Minuit. Il inaugure avec l’éditeur Jérôme Lindon une aventure éditoriale et littéraire qui durera plus de quarante ans et sera récompensée par le prix Nobel. Le Vent marque dans l’œuvre du romancier un véritable tournant. Refusant la logique et la linéarité du récit traditionnel, Claude Simon élabore une écriture qui va bouleverser la narratologie (science du récit). Plutôt que de raconter l’histoire de Montès, étranger venu dans une ville du Sud toucher un héritage, il préfère la restituer à partir de voix, scènes et souvenirs entrecroisés. On ne sait pas toujours qui, de Claude Simon ou de son personnage, est le narrateur. Poursuivie dans L’Herbe et La Route des Flandres, cette manière ressemble à celle d’un peintre, procédant par touches successives pour créer un ensemble harmonieux, d’où le sous-titre, Tentative de restitution d’un retable baroque. L’un des 35 premiers exemplaires sur pur fil, dont 5 hors commerce, tous illustrés de deux photographies. Condition parfaite. 46
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40. LEIRIS (M.) & MIRO (J.). Bagatelles végétales. Paris, Jean Aubier, 1956, in-4°, en ff., couverture, chemise, étui. Édition originale. Une référence du « livre de dialogue ». Dernier titre édité par les soins de Jean Aubier, mort peu de temps avant la publication, le recueil est considéré comme l’un des livres illustrés le plus abouti du genre. Né du trio Leiris-Miro-Aubier, il fut conçu dans une harmonie et une entente amicale permettant l’élaboration d’un ouvrage parfaitement homogène entre typographie, texte et illustration. Soucieux de rendre le livre vivant et animé, Michel Leiris (1901-1990) projeta la création d’un nouveau langage fondant ses recherches sur les perceptions des sons par l’enfant, l’interprétation singulière de ces derniers étant synonyme de liberté créative. Ainsi, jouant avec les mots, jonglant avec les diverses figures de style ; phonème, assonance... les termes employés sont groupés par association d’idées et de consonances, donnant un caractère expressif et imagé dépassant la neutralité de l’écriture. Jean Aubier : un éditeur de talent. Exerçant de 1949 à 1956, il eut une relation privilégiée avec les poètes dont les avant-gardistes Tristan Tzara ou Francis Ponge. Ses plaquettes, dont l’élégance était sans nul doute leur marque de fabrique, étaient rarement tirées à plus de cent exemplaires, et bien que peu connu, sa réputation auprès des amateurs avertis ne fut jamais démentie. Le texte de Michel Leiris, édité par Jean Aubier, fait suite à Glossaire, j’y serre mes gloses que Daniel-Henry Kahnweiler (1884-1979), autre éditeur talentueux, publia en 1939. 6 gravures originales sur cuivre de Joan Miro, dont 2 retouchées à la main par l’artiste. Signes et formes colorés en apesanteur, les eaux-fortes sont ici traitées dans le style représentatif du peintre catalan (1893-1983), donnant à cette recherche de dialogue avec le lecteur, une illustration joyeuse et attachante faisant écho aux poèmes de l’auteur. Plus qu’un simple collaborateur, il était pour Michel Leiris un véritable ami, s’associant fréquemment ; Marrons sculptés pour Miro (1961), Fissures (1969), Ruban (1981),… composant ainsi l’un des tandems marquants du livre illustré moderne. L’un des 44 premiers exemplaires, signés par Leiris et Miro, sur vergé d’Auvergne fabriqué à la main, les seuls à contenir les gravures de Joan Miro : celui-ci est du tirage réservé aux amis de l’éditeur. Dimensions : 240 x 188 mm. Patrick Cramer, Joan Miro-Catalogue raisonné des livres illustrés, 1989, pp. 106-107 ; Laffont-Bompiani, Le nouveau dictionnaire des œuvres, T. I, p. 573 ; Yves Peyré, Peinture et poésie, 2001, pp. 74-76 ; Bulletin du Bibliophile, 1974, T. III, p. 273 ; A. Coron, Bibliothèque nationale, 50 livres illustrés depuis 1947, 1988, n°18 « Quant aux gravures de Miro elles sont parmi les plus belles qu’il ait données pour des livres. »
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41. SAINT-JOHN PERSE. Amers. Paris, NRF, 1957, in-4°, maroquin citron pâle, plats partagés verticalement par un listel de box bleu, traversé, sur le premier plat, par une double bande formée de listel blanc, dos lisse avec titre en long, couverture et dos, tranches dorées, chemise et étui gainés de même peau (Renaud Vernier, 2006). Édition originale. Dédié à la gloire de la mer, le poème fut rédigé à Seven Hundred Island dans le Maine, dans les années 1953-1954 et se compose de trois parties, Invocation, Strophe et Chœur. C’est le plus long jamais écrit par Saint-John Perse, qui a délibérément attendu d’être en mesure d’offrir « un chant de mer comme il n’en fut jamais chanté ». Pour lui, cette marche vers l’océan illustre la quête errante de l’esprit moderne. Elle est représentée par toutes sortes de personnages mythiques (tragédiennes, patriciennes, poétesse...) dont l’auteur orchestre les récitations. Il en résulte un puissant souffle lyrique, qui fait de ces strophes l’aboutissement de ses recherches poétiques. Après sa publication en 1957, la renommée de Saint-John Perse croît rapidement. L’année suivante, Amers paraît chez Bollingen, dans une édition bilingue. En 1962, il est publié avec des lithographies originales d’André Marchand par les Bibliophiles de Provence, et exposé à la galerie La Hune. L’un des 35 premiers exemplaires sur vélin de Hollande van Gelder. Reliure à décor minimaliste de Renaud Vernier. [...], Saint-John Perse et ses illustrateurs : « un compagnonnage », 1887-1975, pp. 111-129.
42. GRACQ (J.). Un balcon en forêt. Paris, José Corti, 1958, in-8°, maroquin gris anthracite orné sur chaque plat de six formes abstraites mosaïquées en box vert bronze et noir rehaussées pour quatre d’entre elles de box rouge, dos lisse portant le titre de l’ouvrage en lettres capitales poussées à l’œser noir et rouge, doublure de daim gris, gardes de daim rouge, tranches dorées, couverture et dos, étui-boîte (Claude Honnelaître, 2004). Édition originale. L’ouvrage le plus accompli de l’auteur. Livre empruntant une nouvelle voie dans l’œuvre de Julien Gracq (1910-2007), la dimension mythique et intemporelle propre à son univers fut abandonnée au profit d’une réalité historique mêlée aux souvenirs autobiographiques. Le thème de l’attente, cher à l’auteur, est développé à travers la période dite de la « drôle de guerre », événement historique qualifiable de « surréaliste ». Face à cette attente interminable et absurde, le sens de la vie est ici questionné, Julien Gracq donnant comme seule issue l’évasion dans le rêve afin d’échapper à un monde qui parfois nous dépasse. Un balcon en forêt fut éclipsé par la notoriété du Rivage des Syrtes, due en partie au refus de son auteur de recevoir le Goncourt, fait unique dans l’histoire de cette distinction. La critique récente tend à réhabiliter et revaloriser le roman, plus abouti et maîtrisé que l’œuvre célèbre qui le précéda. L’un des 50 premiers exemplaires sur vélin de rives ; celui-ci est enrichi d’un envoi autographe : À Henri Michel Tranchimand dans la lumière d’une guerre évanouie. Sincère hommage de l’auteur. Julien Gracq 23 octobre 1995 Dimensions : 190 x 130 mm. Michel Murat, Julien Gracq, 1991, pp. 198-205 ; Bibliothèque historique de Paris, Reliures de Claude Honnelaître, 1996, p. 7. 50
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43. FRANK (R.). Les Américains. Paris, Robert Delpire Éditeur, 1958, in-12 carré, cartonnage illustré d’éditeur. Édition originale. L’année suivante, une édition américaine avec une préface de Jack Kerouac fut publiée par Press Grove à New York. Textes réunis par Alain Bosquet. D’Alexis de Tocqueville à Simone de Beauvoir, ce livre de photographie consacré à la culture populaire américaine des années cinquante, donne la parole à une douzaine d’écrivains célèbres. Cette approche, française et littéraire, fut ajoutée à la demande de l’éditeur, Robert Delpire, qui fut le premier à introduire le travail de Robert Frank en France, en publiant en 1956 son reportage pour le magazine Life, « Indiens pas morts ». Elle confère au livre un aspect sociologique, absent de l’édition américaine. 83 photographies de Robert Frank imprimées en héliogravures à pleine page. Elles forment une sorte de manifeste esthétique de l’artiste, qui fréquenta dans le quartier new-yorkais de la 10e rue les principaux tenants de l’expressionnisme abstrait, et obtint pour ce projet qu’il voulut mener en toute liberté, une bourse de la Fondation Guggenheim. Robert Frank parcourut les États-Unis d’avril 1955 à juin 1956 et collecta une grande diversité de portraits : jeunes Noirs, camionneurs, étudiants, starlettes hollywoodiennes, politiciens... Entre ces personnes si différentes, certaines concordances s’établissent : un geste repris, une attitude similaire... La couverture est plastifiée et illustrée d’après un dessin de Saül Steinberg. Exemplaire en parfaite condition. Rare. M. Parr-G. Badger, The Photobook I, p. 247 ; A. Roth, 101 Books, p. 150 (version américaine); Open Book, pp. 176-177 (version américaine) ; A. Sinibaldi - J.-L. Couturier, Regards sur un siècle de photographie à travers le livre, 120 (version française).
44. [ARSAN (E.)]. Emmanuelle. Emmanuelle l’anti-vierge. [Paris, Eric Losfeld, 1959-1960], 2 vol. in-8°, broché, couverture à rabats. Édition originale de ce chef-d’œuvre de la littérature érotique, paru clandestinement en 1959 et l’année suivante. Il n’y a pas eu de tirage sur grand papier. L’histoire éditoriale du livre commence en 1957, lorsque l’éditeur indépendant Éric Losfeld reçut de Bangkok un manuscrit narrant l’initiation sexuelle d’une jeune femme. Son auteur, Marayat Andrianne, était à peine âgée de vingt ans. D’origine thaïlandaise, mariée à un diplomate français, elle garda longtemps son identité secrète sous le pseudonyme d’Emmanuelle Arsan, en partie pour protéger la carrière de son mari mais aussi par stratégie littéraire. L’ouvrage parut clandestinement et fut, par surcroît de précautions, scindé en deux parties, Emmanuelle et L’Anti-Vierge. Sa condamnation n’intervint que dix ans après, suite à sa réédition et première publication officielle, l’éditeur ayant porté sur la page de titre son enseigne et le pseudonyme de l’écrivain. L’« érotisme radieux » qui émanait du monde d’Emmanuelle fut la cause de son succès. Ce monde « sans obstacle, timidité ou hésitation » ne se réclamait pas des romans libertins, ni de la pensée parfois morbide d’un Sade et d’un Bataille. Il intronisait une nouvelle forme d’utopie sexuelle qui conquit rapidement l’intelligentsia parisienne; Breton le signala en première page de la revue des Arts et Mandiargues écrivit un élogieux article dans la Nouvelle Revue francaise. L’ouvrage connut par la suite un succès planétaire, fut traduit en plusieurs langues et accéda au mythe grâce au cinéma, avec l’adaptation de Just Jaeckin en 1974, la première d’une longue série. Exemplaire conservé dans une chemise-étui de Thérèse Treille. J.-P. Dutel, Bibliographie des ouvrages érotiques publiés clandestinement en français entre 1920 et 1970, n° 1470 (il donne pour auteur d’Emmanuelle, « Louis Jacques Rollet », le mari de Marayat Andrianne, « diplomate, membre de la représentation française à l’UNESCO, après avoir été un certain temps en poste à Bangkok »). 52
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45. SIMON (C.). La Route des Flandres. Les Éditions de Minuit, Paris, 1960, in-8°, broché, couverture. Édition originale. Paru chez Minuit en 1960, La Route des Flandres fit l’unanimité de la critique. Le récit est d’abord la transcription originale d’une expérience du narrateur : Claude Simon confia en effet aux journalistes avoir fait la guerre dans des circonstances assez similaires à celles de son personnage principal, Georges. Le 17 mai 1940, le régiment dans lequel il s’était engagé en tant que brigadier-cavalier tombait dans une embuscade. De la débâcle qui suivit et de son arrestation, quelques jours plus tard, par les Allemands au stalag IVB à Mühlberg an der Elbe, dans le Brandebourg, Claude Simon tire les prémices de ce livre sur la folie meurtrière de la guerre. Le récit de Georges s’entremêle avec l’histoire du cousin de sa mère, le capitaine de Reixach, abattu sous ses yeux par un soldat ennemi, et celle d’un lointain ancêtre de la famille, républicain et général. La richesse de la matière narrative, l’écriture lacunaire, constituée de bribes de souvenirs et de sensations, et l’habileté du montage, qui fait apparaître les personnages et situations de manière récurrente et organisée, malgré l’apparence chaotique des événements rapportés, font toute la singularité de La Route des Flandres. Il fut couronné du prix de L’Express et connut cinq éditions. L’un des 80 premiers exemplaires sur pur fil. Claude Simon, Œuvres, La Pléiade, pp. 1205-1325.
46. PRÉVERT (J.). Histoires et d’autres histoires. Paris, Le Point du jour, Gallimard, 1963, in-8°, maroquin bleu ciel orné sur les plats de deux reproductions de collages de Jacques Prévert montées sous plexiglas, titre mosaïqué en maroquin bleu ciel sur pièce de maroquin noir disposée à cheval sur le dos et les plats, dos lisse, doublure et gardes de papier japon bleu, couverture et dos, chemise et étui (Daniel-Henri Mercher, 1996). Édition en partie originale, publiée par René Bertelé. Le livre d’une vie. Édité à trois reprises entre 1946 et 1949, il est ici dans sa version définitive revue, corrigée et augmentée de 40 textes n’ayant fait l’objet d’aucune édition antérieure. Avec près d’une centaine de textes réunis, ce recueil permet de retracer l’ensemble de l’œuvre du poète, de ses années surréalistes à sa période Saint-Germain-des-Prés. L’ouvrage constitué de deux parties se compose d’un premier ensemble intitulé « Histoires » regroupant les textes précédemment publiés accompagné de 13 nouveaux poèmes, et d’une seconde partie entièrement inédite titrée « D’autres histoires » dont le contenu donne à découvrir l’inclination de l’auteur pour les contes d’enfants, mais à la morale peu conventionnelle rarement conforme aux lois des bonnes mœurs. Cette parution est l’occasion d’éditer les premières compositions de Jacques Prévert (1900-1977), dont « Les animaux ont des ennuis » écrit en 1928 qui semble être son plus ancien texte connu. Exemplaire imprimé pour René Bertelé, sur vélin d’Arches Arjomari, premier papier. Prévert l’a enrichi de trois collages originaux et d’un laconique et discret envoi autographe, adressé à celui qui publia son premier recueil poétique, Paroles. pour René Jacques son ami. Printemps 1963 54
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La pratique du collage fut à partir de 1943 omniprésente dans le processus créatif du poète qui la mettait en lien direct avec ses compositions poétiques. Acquérant un véritable statut d’image-poème par leur singularité et leur fantaisie, de nombreux galeristes dont Adrien Maeght en 1957 exposèrent ces assemblages comme œuvres à part entière. Prévert apporta un soin tout particulier aux compositions destinées à son ami René Bertelé, ce dernier lui rendant hommage par la publication en 1966 de Fatras, ouvrage regroupant 57 collages. Dimensions : 190 x 130 mm. Provenance : René Bertelé (Cat., 1997, n° 295). Pléiade, Œuvres complètes, T. I, p. 1372, pp. 1386-1387 ; Pléiade, Album, p. 477 ; Eugénie Bachelot Prévert - N.T. Binh, Jacques Prévert Paris la belle, 2008, pp. 236-240 ; Bibliothèque nationale, Les Prévert de Prévert - Collages, 1982, p. XIII.
47. CHAR (R.) & PICASSO (P.). Les Transparents. Alès, PAB, 1967, in-4°, broché, couverture. Premier livre illustré par Picasso de cartalégraphies. La technique de la cartalégraphie, nouvelle pour Picasso, lui a été suggérée par son inventeur, Pierre André Benoit, qui la résume ainsi : « La matrice est constituée par un carton plus ou moins épais, déchiré à la main, ou, le plus souvent, découpé avec des ciseaux… Enfin encrée, elle donne par l’impression une empreinte originale où les à-plats peuvent révéler de légères variations dues à la matière du carton qui reste vivante… chaque épreuve est presque unique. Cette technique permet une grande spontanéité… la fragilité, par contre, empêche des tirages importants. » 4 cartalégraphies à pleine page de Pablo Picasso accompagnent ces poèmes extraits des Matinaux. Édition limitée à 60 exemplaires, tous sur vélin de Rives, signés par Picasso et l’éditeur. P. Cramer, Pablo Picasso, Les Livres illustrés, n° 138 ; Bloch, Catalogue de l’œuvre gravé et lithographié, 1236-1239 et 1369 ; A. Coron, Le Livre et l’Artiste, 1977, 25 ; R.F. Johnson-D. Stein, Artist’s books in the Modern Era, 1870-2000, n° 90 ; D. Fourcade, L’Herne, René Char, 351.
48. NARAHARA (I.). Supein idainaru gogo. Tokyo, Kyuryudo, 1969, 2 vol. in-4°, couverture en toile ou souple illustrée, emboîtage illustré d’éditeur. Édition originale. Regard d’un photographe japonais sur l’Espagne et la tauromachie. Préface d’après « La méditation de Don Quichotte de José Ortéga », poèmes de Garcia Lorca et Ramon Jimenez dans le premier volume, et Voyage promis, texte rédigé par Ikko Narahara, lui-même dans le second. Le livre éclaire bien les rapports privilégiés qu’entretint cet artiste japonais avec la culture occidentale. À partir de 1962, il séjourna trois ans en Europe, la plupart du temps à Paris. Il porta sur les rituels tauromachiques un œil d’autant plus averti que ses études à l’université de Wiseda l’avaient initié à l’art espagnol. 236 photographies en noir et 46 en couleurs de Narahara. La réalisation graphique fut exécutée par le graphiste Mitsuo Katsui, qui conçut aussi celle de Shometsu Shita Jikan publié en 1975. Emboîtage illustré de deux photomontages imprimés en orange sur fond rose. Voir reproduction ci-contre 56
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Ikko Narahara fit en 1956 une première exposition, Human Land, qui décida de sa carrière de photographe. Il fut l’auteur d’un essai, About My Method, et fonda au début des années soixante avec six autres confrères, dont Hosoe Eikoh, auteur de Barakei, l’agence Vivo destinée à assurer leur propre diffusion. M. Parr-G. Badger, The Photobook, A History volume I, p. 269 ; A. Wilkes Tucker-D. Friis-Hansen-K. Ryuichi-T. Joe, The history of a japanese photography, pp. 217-218.
49. MELVILLE (H.). Pontoosuce. S. l., [Benoît de Roux], 1984, in-8° oblong, plats souples constitués d’un assemblage de semelle « Topy » et tapis de sol caoutchouc, bordé de teck en gouttière, au mors large bordure de teck sur laquelle est attachée par deux œillets d’acier une étiquette triangulaire du même bois toilée dans la marge et titrée en noir, cousu sur deux nerfs gainés d’un fil de lin gris et noir et rivetés d’ébène, dos en veau rouge brique, gardes de nubuck acajou et brique, couverture, chemise et étui (Jean de Gonet, 1985). Édition originale de la traduction française. Traduit par Pierre Leyois, ce poème retrouvé après la mort d’Herman Melville (1819-1891) porte le nom indien d’un lac situé dans la région du Massachusetts où l’auteur acheta une ferme en 1850. Vivant une douzaine d’années dans cette maison, il y composa ses plus grandes œuvres à commencer par Moby Dick. L’un des 15 premiers exemplaires comportant chacun un dessin à la plume d’Élisabeth Leyois. Intéressante association bois-Topy. Lors de l’exposition « Jean de Gonet, relieur » organisée par la Bibliotheca Wittockiana, deux reliures en semelle de Topy ont été montrées. Elles étaient datées de 1984. Dimensions : 144 x 206 mm. Provenance : Feinsilber (ex-libris).
50. DURAS (M.). L’Amant. Paris, Les Éditions de Minuit, 1984, in-12, broché, couverture. Édition originale. Le livre qui la fera connaître au monde entier. Immense succès dès sa parution, couronné du prix Goncourt en 1984, L’Amant, roman autobiographique retraçant le récit de l’adolescence de Marguerite Duras (1914-1996) en Indochine, apporta à son auteur une reconnaissance tardive pour l’ensemble de son travail littéraire. Derrière la trame de cette liaison interdite et des étapes de la vie traversées par une jeune fille pour devenir femme, l’ouvrage dans un style efficace traite des grands thèmes développés par Duras, l’enfance, les souvenirs, les colonies, les transgressions sociales... qui ont fait d’elle une femme engagée dans les combats de son temps. Best-Seller de l’édition moderne, traduit dans trente-cinq pays, le roman fut adapté au cinéma en 1992 par le réalisateur Jean-Jacques Annaud, dans une production de Claude Berri, recevant de nombreuses distinctions dont l’Oscar du meilleur film étranger. L’un des 106 premiers exemplaires sur vélin d’arches. Dimensions : 191 x 142 mm. 58
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