L'adaptation de l'homme et de l'oiseau face au changement climatique

Page 1

L’ADAPTATION DE L’HOMME ET DE L’OISEAU

FACE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE

Travail de recherche théorique de Master à l’École Nationale Supérieure d’Architecture et de Paysage de Bordeaux 2020-2021 BORDES DORIAN

Sous la direction de Denis BRUNEAU, professeur à l’ENSAP Bordeaux et directeur du laboratoire GRECCAU



Extrait de La Nature à l’Homme Dans tout l’enivrement d’un orgueil sans mesure, Ébloui des lueurs de ton esprit borné, Homme, tu m’as crié : « Repose-toi, Nature ! Ton oeuvre est close : je suis né ! » Quoi ! lorsqu’elle a l’espace et le temps devant elle, Quand la matière est là sous son doigt créateur, Elle s’arrêterait, l’ouvrière immortelle, Dans l’ivresse de son labeur? Et c’est toi qui serais mes limites dernières ? L’atome humain pourrait entraver mon essor ? C’est à cet abrégé de toutes les misères Qu’aurait tendu mon long effort ? Nice, novembre 1867 Louise Ackermann, Poésies Philosophiques


SOMMAIRE PRÉFACE, UNE RÉALITÉ DRAMATIQUE I.

CONTEXTE ET OBJECTIFS

1.

Les objectifs du travail de recherche

1.1. 1.2. 1.3. 1.4. 1.5. 1.6.

2.

Le changement climatique

2.1. 2.2.

3.

L’oiseau, animal bâtisseur par instinct et l’homo sapiens, animal architecte par la culture

3.1. 3.2. 3.3.

4.

L’adaptation ou l’ajustement

II.

ADAPTATIONS ET AJUSTEMENTS FACE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE

1.

Introduction des cas d’études

2.

La réponse de l’oiseau

2.1.

Le cadre et les limites de l’étude Les sujets d’études Les échelles d’études Les critères d’analyse Les cas d’études L’objectif du travail de recherche

Les causes et problématiques Les conséquences et projections futures

L’instinct et l’intelligence La nature et la culture L’évolution et le temps

L’échelle territoriale

2.1.1. Les mobilités 2.1.2. L’organisation et la gestion du territoire et de ses ressources 2.1.3. Les interactions entre êtres vivants


2.2.

3.

L’échelle locale 2.2.1. Le choix d’implantation 2.2.2. Les caractéristiques de l’habitat 2.2.3. Les interactions entre êtres vivants

La réponse de l’Homme

3.1. L’échelle territoriale 3.1.1. Les mobilités 3.1.2. L’organisation et la gestion du territoire et de ses ressources 3.1.3. Les interactions entre êtres vivants

3.2.

L’échelle locale 3.2.1. Le choix d’implantation 3.2.2. Les caractéristiques de l’habitat 3.2.3. Les interactions entre êtres vivants

III.

LA MISE EN PERSPECTIVE DES SOLUTIONS D’ADAPTATION

1.

La mise en perspective des réponses développées

1.1. Les similitudes dans l’adaptation, vectrices de réussite 1.2. Les différences dans l’adaptation, vectrices d’apprentissage et d’assistance 2.

Les perspectives d’avenir

2.2.

L’écologie du sensible et du vivant

UN AVENIR DÉSIRABLE, DES AMBITIONS RÉALISABLES

Références bibliographiques Remerciements



Avant - propos

UNE REALITE DRAMATIQUE

Marqué dès l’enfance, du haut de mes cinq ans, sous mon chapeau, couvert de crème solaire et assis à l’ombre des arbres, je subissais comme nous tous en Europe, la 8ième catastrophe la plus meurtrière de l’histoire de l’humanité. La canicule de 2003 a tué plus de 14 500 personnes en France et près de 70 000 à travers l’Europe (Besancenot, 2002). À cet âge, je n’en avais pas réellement conscience. Quelques années plus tard, je suis retombé sur les photos de ce fameux été 2003, celles-ci ont fait surgir en moi une véritable prise de conscience quant au désastre climatique qui s’abattait sur la Nature. Un désastre qui, à cet âge, portait une importance bien moindre dans mon esprit face à la réalité des dégâts tant sur la faune que sur la flore. Cette prise de conscience s’est déclenchée par cette ancienne photo dans mon jardin familial. Ce jardin, toujours bien entretenu à son habitude, était brulé dans sa quasi-totalité. Un paysage aux couleurs brunes et noires, comme surnaturel. La faune et la flore fragiles n’avaient pu s’adapter à une telle chaleur. Accompagnée d’incendies meurtriers, cette canicule a ravagé des hectares de forêts, tué des milliers d’animaux, endommagé la biocénose et détruit de nombreuses chaînes alimentaires menant à une perte significative de biodiversité à l’échelle mondiale. Pourtant, aujourd’hui encore, 17 ans plus tard, cette situation « exceptionnelle » traversée en 2003 s’est banalisée, nous plongeant chaque été sous des climats tendant à devenir tropicaux. Nous vivons sous des températures toujours plus élevées, atteignant les 46°C lors de l’été 2019 à Vérargues selon Météo France. Cette prise de conscience personnelle, acquise suite à cet été de 2003, m’a ouvert les yeux. Cependant, c’est véritablement quelques années plus tard que j’ai pu réellement me rendre compte de l’ampleur de la problématique du réchauffement climatique au travers de la multitude de facteurs qui agissent sur lui, l’infinité d’impact qu’il cause à nos systèmes et également au travers de son acteur principal, l’être humain qui par définition impacte le déroulé de l‘anthropocène. Depuis de nombreuses années, l’Homme s’interroge sur la possibilité d’un retour en arrière ; peut-il inverser la tendance par ses actions, depuis le « Sommet de la terre » en 1972. Malheureusement, les politiques et accords qui y sont votés, signés et mis en valeur par les gouvernements ne se manifestent que très peu à l’échelle de la planète : le changement est très peu engagé et ne permettra pas d’offrir un avenir durable si les mesures prises ne sont pas davantage mises en œuvre (Figure 1.). Seule la croissance économique comme fondation de nos sociétés s’est affirmée, comme le montre le faible nombre d’actions concrètes

1


Avant - propos

Figure 1. « L’Humanité n’attend plus » Affiche réalisée à l’occasion de la COP 21 de 2015 qui se tenait à Paris. (PCF, 2015)

2


Avant - propos

réalisées face au changement du fait des conséquences économiques immédiates que celles-ci occasionneraient. Mais que faire ? Sommes-nous destinés à regarder progressivement notre planète se détériorer sous nos actions menant ainsi l’Homme à sa perte ? Pour notre survie face à ce contexte, l’Homme, comme la Nature, doit s’adapter à ces contraintes climatiques. Cette adaptation, particulière et spécifique d’une espèce à l’autre, reste la clé de la survie. Elle est mise en application par toutes les espèces vivantes présentes sur terre depuis des millions d’années. Mais comment devons-nous nous adapter pour diminuer l’impact climatique, pour vivre tout en protégeant l’environnement, qui lui aussi, assure notre survie ? Dans un premier temps, il est essentiel de connaître ce à quoi nous devons faire face : le changement climatique. Il est défini comme « l’ensemble des variations des caractéristiques climatiques en un endroit donné, au cours du temps » (GIEC, 2015). Il implique la modification durable des conditions météorologiques et des écosystèmes. Ce concept, assez large, définit une multitude de changements à l’échelle de la planète. Lors de cette étude, il ne sera pas détaillé en totalité, impliquant un trop grand nombre de problématiques. Il est cependant important de le comprendre dans sa globalité afin de proposer de futures pistes d’évolution afin de l’enrayer au maximum. Le cadre de l’étude se limite aux impacts créant une vulnérabilité des territoires telle que la hausse de la température, la diminution des ressources naturelles, la hausse du niveau des océans et l’augmentation des occurrences et des intensités des catastrophes. Cependant, le changement climatique implique d’autres impacts touchant les espèces humaines et animales dans leur ensemble. En effet, de nombreuses études (Mainwaring et al., 2010) supposent un déclin jusqu’à de possibles extinctions de masse de la faune et de la flore au cours des prochaines décennies (Leadley et al., 2010). Elles placent ainsi l’enrayement du changement climatique au stade de principal enjeu de notre siècle. « Le climat c’est le grand défi de l’humanité » (Derive, 2015), (Barrau, 2020). Un défi encore trop peu pris au sérieux à l’heure actuelle malgré sa retombée médiatique. Lors de mon cycle de licence, je me suis intéressé à la symbiose entre l’Homme et la Nature au travers de l’architecture. C’est en recherchant, dans un premier temps, les bénéfices apportés par la Nature pour son architecture puis inversement qu’une relation symbiotique s’est dessinée dans ma pensée. Une relation où l’Homme et la Nature évolueraient de manière symbiotique vers des modes de vies soutenables où chacun serait bénéfique pour l’autre, les deux interagissant du fait qu’ils sont connectés.

3


Avant - propos

La Nature, au travers de la faune et la flore, maîtresse de l’adaptation, possède un apprentissage d’environ 3,7 milliards d’années, définissant la période des premières traces fossiles retrouvées sur terre (Van Kranendonk, 2016). La Nature, dans l’exercice de son adaptation, n’a jamais souillé son environnement et possède des solutions prospectives dans son adaptation. Elle nous les présente à travers son fonctionnement et son organisation. Ainsi, l’apprentissage et la connaissance acquise au travers de la Nature est essentielle. Elle permet l’adoption de méthodes durables, corrélée à une reconnexion aux systèmes naturels auxquels nous appartenons. De ce fait, dans la continuité de ce mémoire de cycle de licence, je souhaite étudier les relations existantes entre l’Homme et l’animal en questionnant l’existence d’échanges entre l’Homme et l’oiseau dans leur adaptation face au changement climatique afin, le cas échéant, d’en dévoiler les clefs pouvant contribuer à construire un futur soutenable pour notre planète. Ce travail de recherche est avant tout un moyen d’exprimer une opinion, qu’elle soit partagée par moi-même et nombre d’individus en faveur de la nature. Les systèmes vivants actuels ont besoin d’un changement drastique de notre part directement lié au changement global. Notre adaptation aux problématiques climatiques actuelles est une réelle opportunité d’engager une mobilisation générale et ainsi enclencher une « transition ». Cependant, l’objectif de ce travail n’est pas de définir une nouvelle voie prospective qui pourrait changer le monde dans sa globalité. Cela serait prétentieux et cupide de ma part tant la complexité de nos systèmes est grande. Il fait part de possibles solutions ou voies, prospectives et utopiques, qui pourraient permettre à l’Homme et à son environnement de vivre de manière plus simple et sensible, dans une relation symbiotique face au changement climatique. Cela peut se matérialiser par des solutions déjà développées chez certaines espèces traduites et mises en relation avec les sociétés humaines. Cette voie d’étude entreprise peut paraître naïve mais pourrait concevoir une aide théorique riche car elle offre un voyage vers une vision prospective et utopique dans laquelle l’Homme et la Nature initieraient une relation symbiotique qui pourrait contribuer à construire un futur durable.

4


Contexte et Objectifs

I. CONTEXTE ET OBJECTIFS 1.

Les objectifs du travail de recherche

Au cours de cette étude, l’Homme et l’oiseau sont analysés selon leurs comportements et aptitudes intrinsèques les définissant respectivement en tant qu’architectes par la culture et bâtisseurs par l’instinct. Ce travail permet une recontextualisation de l’Homme et de l’animal par le biais de leurs valeurs intrinsèques. Il dégage également des méthodes synthétiques appliquées par chacun d’eux dans leur adaptation, pouvant par la suite être mises en relation pour en déceler les différences, les similitudes et ainsi les échanges. Ces relations seront exposées, dans certains cas, comme vectrices d’apprentissage pour l’Homme par le regard porté sur l’oiseau et comme vectrice d’assistance de l’Homme pour l’oiseau. C’est seulement après avoir compris et assimilé le fonctionnement interne et intrinsèque de l’Homme et de l’oiseau que l’adaptation peut être étudiée au travers des problématiques liées au changement climatique. Ainsi, la seconde partie du mémoire est dédiée à l’étude parallèle de l’« adaptation » ou l’« ajustement » de l’oiseau et de l’Homme face au changement climatique. Elle est réalisée selon deux échelles d’études. Toutes deux traitent de la spatialité dans un contexte d’adaptation. La première est l’échelle territoriale et la seconde l’échelle locale. Ces deux échelles ont ainsi pour but d’exposer des voies spécifiques d’adaptations. Elles permettent ensuite de développer, par leurs mises en perspective, de possibles solutions et utopies, spatiales, comportementales ou organisationnelles, applicables par l’un comme l’autre, au travers de nouvelles relations entre êtres vivants. Les solutions sont explicitées selon une diversité de domaines et échelles d’études apportant une multiplicité de réponses adaptatives face au changement climatique. Par le biais de cette étude, ce sujet met en exergue la « collapsologie heureuse » (Servigne, 2015) et cherche à s’en rattacher par la recherche de solutions durables, tant pour l’animal que pour l’Homme, par une modification des modes de vie afin d’éviter un « effondrement » (Servigne, 2015).

5


Contexte et Objectifs

1.1.

Le cadre et les limites de l’étude

Afin d’éclairer les méthodes opérées par l’Homme et l’oiseau face au changement climatique, l’étude a été restreinte selon différents cadres. De plus, elle a été réalisée à l’aide de critères spécifiques permettant une analyse parallèle des deux cas d’études. Le choix de l’oiseau comme référent et représentant de l’animal dans mon étude m’a paru adapté. Nombre d’animaux ont des capacités d’adaptation, parfois hors du commun et de plus en plus visible par l’intensité progressive du changement climatique. Cependant, afin de répondre aux critères d’analyse selectionnés, l’oiseau est l’exemple le plus adapté. Les oiseaux étant sur terre depuis plusieurs millions d’années (Ackerman, 2017), l’espace temporel dans lequel l’étude est réalisée est infime face à leur existence. Il est restreint à une époque contemporaine, véritablement impactée par le changement climatique actuel que nous connaissons. 1.2.

Les sujets d’études

Les oiseaux sont une grande réussite de la Nature. Ils sont de fins stratèges débordant d’ingéniosité dans l’élaboration de solutions pour leur survie. Ils possèdent une marque distinctive d’ingéniosité, qui, à certains égards, semble largement excéder les nôtres » (Ackerman, 2017). Ainsi, ils ont su apprendre à « relever des défis environnementaux et sociaux avec perspicacité et flexibilité » (Ibid.). De plus, ayant des ancêtres communs d’environ 300 millions d’années, (Ibid.) cette étude rapproche l’Homme et l’oiseau par une reconnexion théorique de ces sujets. L’oiseau est un cas d’étude extrêmement riche et intéressant. C’est un être particulièrement sensible aux différences de température au point que « chaque degré Celsius d’augmentation de la température de la planète pourrait entraîner l’extinction de 100 à 500 espèces » (Sekercioglu, 2008), ce qui en fait un cas d’étude privilégié quant à sa conservation. De plus, son caractère adaptatif, ses innombrables espèces, leurs pluralités et leurs capacités à survivre dans une multitude d’environnements en font un être extrêmement diversifié. Il est capable de changer de niches écologiques par la migration ou le déplacement rapide et possède un instinct de bâtisseur qui redouble d’originalité et d’inventivité selon les contextes (Hansell, 2000), (Figure 2). L’oiseau est l’unique animal présent sur la totalité du globe, habitant tous les continents (Ibid.), il est la faune la plus observée et questionnée de notre planète depuis de nombreuses années avec plus de 22 000 sujets à son actif (Pearce-Hinggins, 2014) favorisant ainsi l’existence de constats d’évolution et de

6


Contexte et Objectifs

Figure 2. « Bird’s nests and eggs » Série de photographies de nids d’oiseaux réalisée en 2011 exposant la diversité des nids d’oiseaux. (Beals, 2011)

7


Contexte et Objectifs

données fiables sur des périodes antérieures jusqu’à nos jours. De part cette activité et visibilité accrue à son égard, il en devient le symbole de la lutte animale contre le réchauffement climatique avec plus de 1000 sujets traitants, de loin ou de près, de l’oiseau face au changement climatique (Ibid.). De nombreuses espèces et communautés d’oiseaux sont suivies à travers le monde par des scientifiques et ornithologues passionnés dont les plus renommés pour leurs travaux sont Osterlöf & Stolt, Robbins, Hilden, Blondel, Marchant, O’Connor ou encore James Pearce (Archaux, 2003). Ces suivis sont présents depuis plusieurs dizaines d’années pour certains d’entre eux. Le second sujet de l’étude est l’Homme. Etant au centre des problématiques environnementales actuelles en tant que principal responsable (à environ 95 %) du réchauffement climatique (GIEC, 2015). Ce sujet paraît inévitable afin de développer des stratégies d’adaptation qui puissent ainsi recréer des conditions propices au développement de l’environnement et à la réduction du changement climatique actuel. 1.3.

Les échelles d’études

L’étude est réalisée selon deux échelles d’analyse, toutes deux représentatives de l’adaptation de l’Homme et de l’oiseau et des échelles de définition de la société qu’elles soient humaines ou animales. Grâce à ces échelles, seuls les caractères spécifiques à l’Homme ou à l’oiseau sont étudiés. Le jeu envisagé sur ces échelles permet ainsi de construire des réponses d’une échelle territoriale et généralisée jusqu’à une échelle locale, ponctuelle et précise. Elles organisent l’étude selon un critère spécifique et commun à l’étude qui est la spatialité. L’échelle territoriale permet l’analyse de solutions globales, traitant de grands espaces tels que des régions, départements ou pays. Le territoire, par ses définitions en tant que « région ayant un caractère propre »1 ou « étendue de terre, espace où sont circonscrits une activité, un phénomène »2, indique d’emblée un rapport singulier exercé par les êtres vivants sur celui-ci. La notion de territoire ne se limite pas à un « espace quelconque » mais à un espace où il y a la présence d’« activité ou phénomènes » sur de grandes échelles spatiales et non ponctuelles. La seconde échelle est locale. Plus spécifique et ponctuelle, celle-ci traite en majorité de l’habitat et de ce qui en découle tel que les ressources utilisées dans 1 2

Trésor de la Langue Française Informatisé – TLFI. Ibid.

8


Contexte et Objectifs

sa construction par exemple. L’échelle territoriale ayant des conséquences et influences directes sur l’échelle locale sera traitée en première. Par la suite, elles seront associées et mêlées afin d’obtenir une réponse globale qui serait une représentation de la réponse d’une société ou d’un écosystème à part entière. En effet, « Dans le monde réel, un continuum existe entre les individus, les populations, les espèces, les communautés et les écosystèmes » (Gauzere, 2016), (Figure 3). Je pense que la réunification de ces perspectives est un défi scientifique considérable pour permettre à l’écologie de guider nos sociétés vers un développement de réponses appropriées à la crise écologique mondiale » (Loreau, 2010). L’unification des échelles est un premier pas en faveur de cette réunification des perspectives afin d’obtenir une échelle d’analyse globalisée. Elle permet ainsi d’envisager des conclusions générales quant à leurs « ajustements » ou « adaptations ». Ainsi cette étude permet « une prise en compte plus unifiée des échelles d’études et des processus qui sont associés » (Chaves, 2013) Ces phénomènes adaptatifs étant de nature et traitant de domaines divers tels que l’urbanisme, la philosophie, l’histoire des communautés jusqu’à l’écologie scientifique doivent être définis dans de « larges cadres » que représentent ces deux échelles spatiales. 1.4.

Les critères d’analyse

L’étude est réalisée selon des critères spécifiques afin de ne pas concevoir une liste exhaustive des adaptations rencontrées. Ayant pour but de déceler des solutions d’adaptation chez l’Homme comme chez l’oiseau, elle n’a pas nécessité à être située précisément en un même lieu. Ainsi, seul un contexte commun présentant des contraintes environnementales est présent. Il est défini comme « un territoire vulnérable à une force naturelle ». L’étude est divisée selon deux grandes parties ; l’une correspondant aux solutions proposées par l’Homme et l’autre à celles proposées par les oiseaux dans lesquelles ils sont étudiés selon les mêmes critères.

9


Contexte et Objectifs

ORGANISATION

ESPACE

TEMPS

Figure 3. « Schéma conceptuel des liens entre échelles en écologie » Le temps (axe x), l’espace (axe y) et les différents niveaux d’organisations (axe z). Ces axes séparent différents domaines de recherche tels que la physiologie (fond jaune), l’écologie (fond rouge), et la biogéographie (bleu). Des barrières importantes (traits rouges) existent dans chacune de ces échelles. Ce schéma conceptuel présente trois échelles : spatiale, temporelle et organisationnelle marquant l’adaptation des êtres vivants dans un écosystème. (Gauzere, 2016)

10


Contexte et Objectifs

Définition des critères à l’échelle territoriale

A l’échelle territoriale, les critères analysés définissent la manière dont le sujet en question (l’Homme ou l’oiseau) gère et organise son territoire face à une crise environnementale d’une telle ampleur. Le premier critère étudié est la mobilité des populations. En effet, les populations humaines et animales possèdent toutes deux une logique de déplacement unique sur leur territoire. Acquises par leur position en tant que nomade ou sédentaire ainsi que par leurs déplacements à l’intérieur du territoire, ces mobilités sont un défi pour l’Homme et l’oiseau dans leur démarche d’adaptabilité car elles sont en phase d’évolution. En effet, à cause de l’augmentation de la vulnérabilité des territoires, de la température et des risques mais aussi de la diminution des ressources naturelles et le déplacement des conditions environnementales nécessaires à leur développement, les populations sont contraintes d’adapter leurs modes de vie afin d’assurer leur survie durablement. L’organisation du territoire et de ses ressources, induit par l’analyse des mobilités, est le second critère d’étude. Suite à la modification des mobilités à l’échelle territoriale, l’organisation des territoires se trouve bouleversée et doit être adaptée. Ce critère d’analyse se concentrera plus précisément sur les activités et les enjeux territoriaux présents. Ces notions sont directement liées aux spécificités territoriales et à la gestion des ressources et richesses naturelles du territoire. Enfin, le troisième critère traite des interactions nouvellement présentes entre les êtres vivants suite au bouleversement climatique. Ces interactions témoignent possiblement de nouveaux liens et échanges. Elles sont reliées à l’organisation et la gestion du territoire car ces liens entre espèces vivantes peuvent se matérialiser qu’au travers de solutions spatiales à grandes échelles. Ces interactions sont des notions primordiales dans la recherche d’un « équilibre de nos systèmes vivants » 3 (Friedman, 1976). Il se construit en majorité sur les échanges par le biais de besoins primaires et la création de rapports sociaux sains et équilibrés entre les hommes ainsi qu’avec l’environnement.

3

L’équilibre selon Yona Friedman se définit comme « un état stable où l’harmonie est le bon fonctionnement des systèmes naturels et humains sont primordiaux et connectées. Cet équilibre résulte d’une relation, d’un dialogue entre l’homme et la nature ».

11


Contexte et Objectifs

Définition des critères à l’échelle locale

L’échelle locale est plus restreinte, ainsi, le cadre d’observation des comportements spatiaux se limite à l’individu et ses méthodes, constructives et spatiales, appliquées à l’habitat. Le premier critère d’analyse est le choix d’implantation des habitats sur le territoire. Le choix d’implantation est en évolution constante pour de nombreux être vivants afin de réduire leur vulnérabilité et améliorer leur durabilité. Cependant, elle est en réflexion chez l’Homme qui ne peut s’adapter rapidement à cause des démarches législatives ouvrant la porte à de nombreux questionnements. Le second critère traite des caractéristiques, physiques et constructives, des habitats. Le choix d’implantation dans un milieu implique des évolutions dans la conception de l’habitat. Ces évolutions répondent aux nouvelles contraintes en termes de résistance, d’isolation, de structure et d’autres caractéristiques techniques face à l’augmentation de la force et de l’intensité des catastrophes naturelles ainsi que l’augmentation thermique des milieux. L’oiseau, bâtisseur instinctif, possède d’exceptionnelles compétences quant à l’adaptabilité de son nid en fonction des environnements dans lesquels il se situe (Figure 2). Ce critère met en évidence les grandes capacités architecturales développées par l’oiseau afin de s’adapter dans un contexte précis grâce à un savoir-faire et des systèmes constructifs simples. De plus, la question des ressources dans la construction de l’habitat sera analysée. A l’échelle locale, des interactions entre êtres vivants se manifestent et traduisent des comportements d’adaptation favorisant l’échange et l’entraide entre communautés. Cette fois, ces comportements ne s’affirment pas au travers du territoire mais uniquement à l’échelle de l’habitat. Ces interactions feront l’objet du troisième critère analysé à l’échelle locale.

12


Contexte et Objectifs

1.5.

Les cas d’études

Les cas utilisés dans mon étude diffèrent selon de nombreux points mais sont tous soumis à la vulnérabilité d’un territoire causée par le changement climatique comme énoncé ci-dessus. Ces cas permettent d’obtenir des réponses de la part de l’oiseau et de l’Homme dans chacun des critères explicités ci-dessus selon l’échelle locale et territoriale. Au sujet de l’oiseau, étant un être vivant particulièrement sensible aux différences de température, la vulnérabilité étudiée pour son cas sera donc la hausse des températures. L’utilisation d’un même sujet d’étude est difficilement réalisable pour témoigner de la totalité des adaptations que je souhaite exposer. Cependant une étude est plus précisément analysée grâce à la multiplicité des critères adaptatifs retenus dans celle-ci. Le cas retenu est celui du Merle Commun sur le territoire de la Grande Bretagne (« Adaptive latitudinal variation in Common Blackbird Turdus merula nest characteristics» Mainwaring, 2014), où sont réunies des solutions adaptatives territoriales et locales. Ce travail de recherche est présent dans la revue scientifique bi-hebdomadaire en accès libre « Ecology and Evolution » (Figure 4.). D’autres ouvrages seront largement utilisés tels que « l’urbanité des oiseaux » de Frédéric Malher. Au sujet de l’Homme, le territoire de la Nouvelle-Aquitaine est approprié pour étudier les solutions développées. En effet, cette région porte un intérêt particulier aux dynamiques naturelles et aux potentialités présentes sur son territoire. Cette étude s’est construite grâce au document « Anticiper les changements climatiques en Nouvelle-aquitaine. Pour agir dans les territoires », Editions Région Nouvelle-Aquitaine d’Hervé Le Treut (Figure 5.). Il est un ouvrage informatif présentant les constats et les actions présentes et futures dans notre adaptation. Il a été concrétisé et émis suite à une volonté publique de la part de la région de la Nouvelle-Aquitaine.

13


Contexte et Objectifs

Figure 4. « Ecology and Evolution, l’étude du Merle commun » Page de garde de la revue scientifique bi-hebdomadaire en accès libre « Ecology and Evolution » dans laquelle on retrouve l’étude « Adaptive latitudinal variation in Common Blackbird Turdus merula nest characteristics » Mainwaring, 2014).

14


Contexte et Objectifs

Figure 5. « Anticiper les changements climatiques en Nouvelle-Aquitaine » Page de garde du rapport n°2 synthétique « Anticiper les changements climatiques en Nouvelleaquitaine. Pour agir dans les territoires » Acclimaterra, 2018 ).

15


Contexte et Objectifs

1.6.

L’objectif du travail de recherche

Ce travail de recherche a pour enjeu de sensibiliser la population au changement climatique et à ses problématiques actuelles et futures. En effet, ce sujet est un grand débat du XXIème siècle et mérite d’être étudié, analysé et réinterprété pour en dévoiler de nouvelles approches et paradigmes quant au changement climatique et à notre adaptation à celui-ci. C’est un véritable enjeu qui est « global et lointain »4 souvent décrit de façon « trop technique »5 et « communiqué à partir d’informations abstraites »6. Afin de rétablir une certaine visibilité pour tous à ce sujet, je souhaite m’appuyer sur des exemples transversaux qui permettront d’illustrer mes propos et offrir un cadre solide à mes paroles en réexploitant une notion lointaine que nous oublions progressivement : la Nature. Cette étude parallèle permettra, je l’espère, de sensibiliser la population, d’engager de nouvelles formes de débats citoyens et de proposer de nouveaux paradigmes et utopies pour nos sociétés futures. Elle se développera autour d’une unique notion : L’exposition des relations existantes entre l’Homme et l’oiseau dans l’adaptation pouvant nous permettre de trouver de nouvelles solutions d’adaptation. Cependant, ce sujet de recherche ne se limite pas à la simple comparaison de l’Homme et de l’oiseau, son engagement est plus profond et témoigne de l’existence de solutions avec l’ensemble des animaux auxquels nous pouvons nous apparenter. L’oiseau n’est finalement qu’un exemple symbolique permettant d’illustrer ce travail, manifeste des relations et « utopies réalisables » (Friedman, 1967) entre Homme et Nature (Figure 6.). Cette volonté s’exprime suite à la perte d’équilibre progressive de nos systèmes. « L’équilibre de la vie » (Friedman, 1976) s’écroule petit à petit et doit être rétabli. 4

Tiré de « Anticiper les changements climatiques en nouvelle-aquitaine. Pour agir dans les territoires », Editions Région Nouvelle-Aquitaine, 2018. 5 Ibid. 6 Ibid.

16


Contexte et Objectifs

Figure 6. « Dessins schématiques de la relation entre Homme et Nature » Dessins réalisés à l’occasion de l’écriture du livre « Comment Habiter la Terre» en 1976. (Friedman, 1976).

17


Contexte et Objectifs

2. Le changement climatique

2.1.

Les causes et les problématiques

En tant que principal acteur du changement climatique, l’Homme est confronté à des changements et bouleversements climatiques et environnementaux sans précédents. A l’ère de l’anthropocène, une prise de conscience générale doit s’initier. En effet, de lourdes responsabilités environnementales pèsent sur nos épaules. La faune et la flore actuelle sont fortement impactées et doivent s’adapter pour survivre (Jouventin, 2019). Les oiseaux, en tant qu’êtres vivants sensibles aux différences de température, sont soumis à une phase de sélection et d’évolution causant l’extinction de centaines d’espèces (Ackerman, 2017). Malgré l’implication humaine dans ce changement climatique, l’Homme est, de manière générale, assez faiblement affecté. Il cherche à adopter de nouvelles manières pour se protéger davantage des conséquences actuelles et futures de ce changement climatique. Depuis plusieurs années, l’Homme ne se sent que peu concerné par les enjeux environnementaux actuels malgré leur impressionnante progression. Le changement climatique est directement lié au bon fonctionnement de nos écosystèmes. Malheureusement, la conception que l’Homme s’est fait de la nature est erronée et ancrée dans nos cultures. Cette conception « dans laquelle l’Homme se voit attribuer une position de domination des éléments minéraux, végétaux et animaux de la création » (Sauquet, 2014) n’est pas universelle et encore moins vraie. Joseph Ki-Zerbo, historien et Homme politique burkinabé, critique cette conception de façon ironique : « Multipliez-vous, remplissez la terre et soumettez-la » (Ki-Zerbo, 1992). Une critique du modèle acquis dans la culture occidentale : « une conception dominatrice » (Sauquet, 2014). Nous lui laissons de moins en moins de libertés et d’espaces alors que celle-ci « nous invite à vivre en elle » (Ingenhoven, 2015). Depuis des millénaires, certains philosophes, aujourd’hui reconnus pour leur état d’esprit, nous ont confortés dans cette pensée selon laquelle l’animal est différent de l’Homme. L’animal serait défini comme une « machine perfectionnée » (Descartes, 1646). Il serait « des assemblages de pièces et de rouages » (Ibid.) survivants par instinct, sans âme. Ces pensées nous ont progressivement écartés des éléments naturels, de la faune et de la flore et plus globalement de la Nature. Ce détachement n’a été que négatif pour l’environnement, marqué par sa dégradation, l’épuisement de ses ressources et sa violation avec pour cause la déforestation, l’agriculture intensive et le rejet de gaz et de déchets en tout genre. Les animaux, en connexion avec l’environnement auquel ils appartiennent, sont eux aussi directement touchés

18


Contexte et Objectifs

par ces activités anthropiques dans lesquelles nous instaurons, de plus, l’élevage, la chasse et la pêche intensives. Ainsi, ces animaux sont progressivement menés à leur généralisation et leur perte progressive. Un bilan difficile à entendre après une centaine d’années de considération de la finitude de notre environnement (Malthus, 1798). L’Homme souhaite depuis plus de vingt-ans réduire son émission de gaz à effet de serre et son alarmante consommation des ressources naturelles. Malgré cette volonté de changement symbolisée par la mise en place de nombreuses conférences, déclarations, conventions, protocoles, rapports et autres stratégies afin d’engager des solutions soutenables, elles ne se traduisent malheureusement pas, ou très peu en véritables actions. Ces « rassemblements internationaux » ne sont, à première vue, que de simples outils de communication ne mettant pas ou très peu en œuvre les grands objectifs qui y sont déclarés. Une inquiétude régnait lors de la première déclaration à Rio en 1992. Cependant, en 2012, soit 20 ans plus tard, seulement 4 des 90 objectifs déclarés dans « L’agenda 21 » ont connu une forte progression contre 8 qui ont connu une dégradation. Les 78 autres ont soit stagné, très faiblement progressé ou n’ont reçu aucune donnée7. Le constat établi témoigne du manque de moyens mis en œuvre, d’implication mais aussi de transmission de l’information au public afin de se préparer et répondre à cette crise écologique. L’action reste essentiellement médiatique pour finalement être délaissée dès sa retombée. Ainsi, de nouveaux objectifs sont constamment réalisés sans pour autant que les anciens aient été atteints. L’agende 2030 (Figure 7) en est un exemple symbolique. Cela fait 8 ans qu’il a été instauré et celui-ci a été délaissé, perdu de vue dès son lancement sans aucunes mesures cohérentes et engagées prises au vu des objectifs exposés. 2.2

Les conséquences et projections futures

Ce détachement de l’Homme à la nature, combiné à la progression de sociétés dites industrielles, automatisées, construites et progressant sur et autour de l’économie et de la croissance, a plongé nos sociétés dans un désastre écologique de plus en plus assumé. Aujourd’hui, nous en subissons les conséquences, impliquant une multiplicité de dommages collatéraux, véritables « effet boule de neige » à l’échelle planétaire. De l’oiseau à l’Homme, ce changement affecte l’organisme, les modes de vie jusqu’à l’environnement. Selon les prévisions des scientifiques du GIEC (le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat) estiment une augmentation « de 7

Constats obtenus lors d’une conférence réalisée par Mme BARLET.

19


Contexte et Objectifs

Figure 7. « Objectifs de développement durable, ensemble relevons le défi ! » Affiches publicitaires et de communication réalisée à l’occasion de la création de l’agenda 2030 lors de la conférence de Rio en 2012 ajoutant ainsi 17 objectifs supplémentaires à ceux déjà existants de l’Agenda 21. Ces objectifs sont tournés vers le Développement Durable et sont établis par les États membres des Nations Unis et adoptés par l’ONU. (ONU, 2015)

20


Contexte et Objectifs

1 à 5°C de la température à la fin du XXIe siècle » en fonction des stratégies et moyens adoptés et mis en œuvre pour les appliquer. Un accord de Paris a été signé afin de limiter le réchauffement en-dessous de 2°C avant la fin du siècle sans stratégies globales exposées (Barrau, 2016). Le GIEC, au travers de ses études, prévoit 4 scénarios envisageables selon la progression des sujets influant sur le changement climatique. Les sujets en question sont les « émissions et concentrations de gaz à effet de serre, d’ozone et d’aérosols, ainsi que d’occupation des sols » (GIEC, 2014). Ces émissions et concentrations sont baptisées RCP pour (« Representative Concentration Pathways ») (GIEC, 2014). Ces RCP représentent l’évolution des concentrations des gaz à effet de serre à l’échelle mondiale et permettent de dévoiler le bilan radiatif mondial selon les 4 scénarios. Ce bilan est défini par « la différence entre le rayonnement solaire reçu et le rayonnement infrarouge réémis par la planète » (GIEC, 2014). Ces scénarios illustrent les possibilités auxquelles nous sommes aujourd’hui confrontés jusqu’à l’horizon 2300. Chaque scénario est une situation envisageable plus ou moins complexe à respecter en fonction de l’ampleur des mesures spécifiques à mettre en œuvre. Le scénario le plus positif présente une diminution douce et constante du bilan radiatif de la terre s’initiant aux environs de 2050 dans le cas où nous changerions considérablement nos modes de vie dès aujourd’hui, impliquant des mesures drastiques afin d’enrayer au maximum ce changement climatique (GIEC, 2014). Le scénario le plus pessimiste, défini par une continuité de l’évolution de nos sociétés vers une consommation, une production et une exploitation des ressources en progression constante, fait état d’une possible augmentation allant jusqu’à 5,5°C d’ici la fin du siècle (GIEC, 2014). Ce scénario, bien que probable de par son évolution actuelle, nous mènerait à une augmentation extrême du bilan radiatif. Il impliquerait des changements climatiques considérables à toutes les échelles de la planète. Malheureusement, cette étude parait aujourd’hui, soit 6 ans plus tard, trop optimiste pour la communauté d’experts et témoignerait d’une situation encore plus catastrophique à l’heure actuelle. De nouveaux rapports plus actuels ont été publiés et font état d’une augmentation des températures pouvant aller jusqu’à 7°C d’ici la fin du siècle dans la situation la plus pessimiste contre environ 2°C dans la plus optimiste. (CNRS, 2019), (Figure 8). La hausse de la température n’est pas la seule conséquence liée au changement climatique. Une seconde, liée à la hausse des températures, prend, elle aussi, une ampleur capitale. Il s’agit de la fonte de la banquise, des glaciers et progressivement du pergélisol8, menaçant des centaines d’espèces vivants dans toutes les régions du globe. Cette fonte mène à une disparition de leurs niches écologiques et donc de leurs habitats. Une conséquence qui est partagée par 8

Le pergélisol est un sous-sol gelé en permanence dont la température n’excède pas 0 °C pendant au moins deux années consécutives. Il représente environ 1/5 de la sur face du globe.

21


Contexte et Objectifs

Figure 8. « Projections des températures futures » Comparaison entre les températures moyennes du globe simulées pour CMIP5 (traits tiretés et couleurs pastel) et pour CMIP6 (traits pleins et couleurs vives) pour les deux modèles français. Le modèle CNRM-ESM2 est également montré pour le scénario SSP5 8,5. Ces modèles sont définis comme des Projets d’inter comparaison des modèles couplés afin d’obtenir des projections. Ils sont un sujet du programme mondial de recherche sur le climat. (CNRS, 2019).

22


Contexte et Objectifs

l’Homme pour lequel près de la moitié (49,5 %) des plages (zone intermédiaire de protection entre la mer et la terre contre les tempêtes et inondations9) ainsi que de nombreuses îles et terres habitées seraient amenées à disparaitre d’ici 2100. Plus d’une personne sur 10 dans le monde habite une zone qui est ou qui sera, avant la fin du siècle, menacée par la montée des eaux (Barrau, 2019). En effet, la fonte des glaces induit une montée des eaux progressive : « la fonte des glaces de l’Arctique et de l’Antarctique fait monter le niveau de la mer de 3,6 millimètres par an, soit deux fois plus vite qu’au siècle dernier, qui a vu le niveau de la mer augmenter de 15 cm, à raison de 0,7 mm chaque année » (GIEC, 2015). De plus, La fonte du Groenland et de l’Antarctique causant ainsi celle du pergélisol va induire une augmentation du niveau des eaux bien plus grande qu’estimée par le GIEC. Selon leurs travaux, le niveau des océans pourrait augmenter de « 1,10 mètres d’ici la fin du siècle » et ainsi causer d’irrémédiables dégâts aux infrastructures et sociétés humaines comme animales. Ainsi, nous pouvons également affirmer que ces suppositions ne sont plus d’actualité suite à l’augmentation exponentielle des températures et des conséquences du changement climatique qui avaient été sous-estimées. Finalement, les évènements naturels, tels que « les sècheresses, les pluies tropicales, et ouragans vont connaître une véritable explosion en termes de fréquence et d’intensité » (GIEC, 2014) nous obligeant à modifier considérablement nos modes de vie pour subsister (Figure 9). Selon l’IUCN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature), c’est plus d’un quart des mammifères, un huitième des espèces d’oiseaux et 40% des amphibiens qui sont menacés d’extinctions à l’échelle mondiale. Ces impacts et conséquences, sous la forme d’un « effet papillon », mènent nos sociétés comme la planète vers un futur incertain. Nous pouvons aujourd’hui témoigner d’impacts visibles sur la totalité du globe et en particulier sur les écosystèmes terrestres et marins mais aussi sur la production alimentaire, la santé et l’économie où les inégalités se creusent davantage (Seguin, 2007). Ces premiers constats exprimés ci-dessus définissent un contexte particulièrement critique. La situation ne semble pas s’améliorer. Ces changements climatiques progressent et s’intensifient dans le temps (GIEC, 2015). Le GIEC, par ces nombreuses publications, fait état d’une peur de la part du corps scientifique à l’échelle mondiale. Doucement, cette peur se déteint et prend de l’ampleur. Une prise de conscience s’initie au travers d’une transmission de l’information et à sa vitesse grâce aux réseaux informatiques actuels. Cependant, il est complexe de freiner un changement ayant pris une telle dimension. Le problème est multidimensionnel et implique un engagement de la part de tous et en premier lieu des responsables d’états (Figure 10). 9

Résultat transmis par Michalis Vousdoukas, chercheur au centre commun de re cherche de la Commission Européenne. Il a dirigé l’étude sur la disparition des plages selon le pire scénario du GIEC pour 2100.

23


Contexte et Objectifs

Figure 9. « Conséquences directes et indirecte du changement climatique» Evolutions des conséquences du changement climatique à deux périodes distinctes. (GIEC, 2014).

24


Contexte et Objectifs

Figure 10. « Conséquences directes et indirecte du changement climatique » Dessin humoristique et satirique réalisé par Arend Van Dam, Dessinateur humoristique en 2015. Il souhaite, au travers cet art engagé, dénoncer l’hypocrisie règnante en maître lors des grandes conférences au sujet du climat. (Van Dam, 2015)

25


Contexte et Objectifs

Afin de ne pas nous engager dans la voie annoncée comme la plus pessimiste, un objectif a été mis en place il y de nombreuses années. Il était question de stabiliser le réchauffement climatique à 2°C de 1850 jusqu’à 2100 (GIEC, 2015). Etant donné l’augmentation constante que celui-ci connaît, ayant pour cause principale l’ère que nous traversons, cet objectif reste que très peu envisageable. Selon la communauté scientifique, un réchauffement supérieur à 2°C d’ici 2100 enclencherait un « effet boule de neige » de conséquences. Cellesci impliqueraient des facteurs inconnus à l’heure actuelle, pouvant causer des dommages irréversibles à l’échelle de la planète et de l’humanité (EM, 2005). Aujourd’hui, quelques hommes et femmes se démènent pour remédier aux perturbations causées depuis des dizaines d’années à l’environnement. Le GIEC, au travers de son 5ème rapport, témoigne en 2014 du lancement de premières actions internationales quant à l’ « adaptation » aux problématiques du changement climatique, au moment où la situation est proche de l’insurmontable et difficilement rattrapable. Malgré la difficulté à répondre à ce changement, cet effort marque et symbolise un besoin, une peur ainsi qu’une nécessité de protéger et de s’adapter aux éléments naturels aujourd’hui en danger en les intégrant davantage à nos modes de vie (Figure 11.). Ainsi, des réponses peuvent être envisagées afin d’initier une réduction de nos émissions de gaz à effet de serre et ainsi diminuer ce changement climatique. Cependant, ces solutions impliquent des actions drastiques de la part de tous afin de s’adapter et évoluer en accord avec ces changements. Ces changements et évolutions reposent sur l’adaptation de nos systèmes aux problématiques actuelles. Toute la difficulté réside dans les moyens mis en œuvre, les échelles d’actions et l’implication de l’Homme dans cette adaptation (Jouventin, 2020). Ainsi, il semble essentiel de connaître la valeur de chacune des actions et solutions mises en œuvre. Celles-ci sont associées aux comportements de l’Homme et de l’animal et plus spécifiquement à leurs capacités et aptitudes développées dans le temps.

26


Contexte et Objectifs

Figure 11. « Stratégies de gestion des risques face au changement climatique » Développement de « stratégies de gestion des risques liés au changement climatique fondées sur l’adaptation. Ces stratégies sont jugées de façon complémentaire et sont réalisées et publiées à l’occasion du 5ième rapport de GIEC. (GIEC, 2019)

27


Contexte et Objectifs

3.

L’oiseau, animal bâtisseur par l’instinct et l’Homo sapiens, animal architecte par la culture

3.1

L’instinct et l’intelligence

L’instinct et l’intelligence sont deux termes appartenant à la philosophie. Dans ce domaine, « l’intelligence est une fonction par laquelle l’Homme a essayé de se définir dans l’échelle des êtres, entre la divinité et l’animal, entre l’ange et la bête. Ce n’est pas une réalité tangible. Tout comme l’instinct, l’intelligence s’apparente davantage à une notion psychologique qu’à une catégorie scientifique » (Richard, 2005). Cependant, ces termes permettent d’appréhender la manifestation de nos capacités face à des situations diverses dans le but de s’y accomoder. Ces deux termes, longtemps présentés distinctivement comme l’un appartenant à l’animal (l’instinct) et l’autre à l’Homme (intelligence) sont aujourd’hui vus différemment et symbolisent l’apparition d’une première ressemblance, d’un trait commun entre l’Homme et l’animal. L’instinct, selon le Trésor de la langue française informatisé est défini comme un « mouvement intérieur, surtout chez l’animal, qui pousse le sujet à exécuter des actes adaptés à un but dont il n’a pas conscience.»10. Malgré cette inconscience dans sa réalisation, la définition nous indique que ce mouvement mène véritablement à « des actes adaptés à un but ». La majorité des êtres vivants sont guidés par l’instinct dans la réalisation de leurs actions. Il est donc essentiel d’assimiler les voies instinctives empruntées afin de comprendre pourquoi et comment l’oiseau peut s’adapter sans intervention négative sur les écosystèmes. L’image que l’Homme s’est faite de l’oiseau depuis bien longtemps n’a guère était positive. L’oiseau est défini comme « un animal stupide à l’œil rond perpétuellement étonné, qui s’assomme en fonçant sur les fenêtres fermées […] presque une erreur, ou tout du moins une impasse, de l’évolution » (Ackerman, 2017). Depuis quelques dizaines d’années, cette représentation n’a fait qu’évoluer positivement par les capacités dont il fait preuve au quotidien, adepte de réponses adaptatives à des situations du quotidien toutes plus surprenantes les unes que les autres. Ce « comportement inné, héréditaire et spécifique, accompli sans apprentissage préalable et en toute perfection »11 qu’est l’instinct, est vecteur d’adaptation. Ce caractère instinctif symbolise une « obligation de se mouvoir » dans un but précis auquel il répond, il permet une adaptation contrôlée de la part des animaux. En effet, l’instinct ne se trouve pas altéré par d’autres capacités, 10 11

Trésor de la Langue Française Informatisé – TLFI. Ibid.

28


Contexte et Objectifs

lui seul contrôle les mouvements de l’être. L’instinct ne vient pas modifier la perception naturelle de l’action à entreprendre. Pourvu d’une intelligence, l’action réalisée est directe, sans besoin préalable et sans réflexion. Il apporte des résultats bien souvent extraordinaires, naturels et bénéfiques face aux conditions existantes. Cette action instinctive, présente chez l’animal et en partie chez l’Homme (l’instinct de conservation, sexuel, maternel ou de mort), est avant tout une réponse face à une situation engageant sa survie ou son développement. Cette notion de survie, remise en exergue par le changement global dont nous avons pu prendre connaissance ci-dessus, provoque une action instinctive d’adaptation chez l’oiseau sans véritable réflexion à une solution. Cet instinct adaptatif peut se manifester suite à des changements de territoires, de ressources disponibles, face aux prédateurs ou toutes autres contextes remettant en cause la survie ou les conditions de vie de l’animal. Dans chacune de ces situations, c’est l’instinct qui le guidera dans ces choix et lui permettra d’assurer sa survie. Finalement, cet instinct est en évolution et amélioration constante depuis des millions d’années par le biais de la Nature, adaptant ainsi sa faune et sa flore au regard des changements dans le temps. Cette évolution confère à chaque animal des capacités intuitives étonnantes. Cette aptitude instinctive jusqu’alors perçue comme « un simple reflexe primaire »12 joue un rôle essentiel dans la survie des espèces ainsi que celle de leurs milieux. En effet, cette capacité intrinsèque dominante permet à l’oiseau d’user exclusivement de ses réactions et reflexes naturels et personnels afin de s’adapter d’une façon plus efficiente et soutenable que la nôtre. L’intelligence, quant à elle, se définit comme une « fonction mentale d’organisation du réel en pensées chez l’être humain, en actes chez l’être humain et l’animal. »13 Ainsi, l’animal est lui aussi doté d’une intelligence se manifestant en actes et correspondant à ses capacités instinctives lui permettant de répondre à un problème sans développement de pensées. De plus, l’intelligence peut être explicitée par l’« aptitude à appréhender et organiser les données de la situation, à mettre en relation les procédés à employer avec le but à atteindre, à choisir les moyens ou à découvrir les solutions originales qui permettent l’adaptation aux exigences de l’action ». (Mounier, 1974). Ainsi, il y a tout de même une volonté de s’adapter à une situation dans le but de répondre à l’« exigence de l’action ». On se rend compte au travers de cette définition que l’Homme et l’animal sont capables de l’utiliser pour leur survie. Cependant, l’Homme peut utiliser d’autres capacités afin de répondre à un problème grâce à une intelligence plus développée. Celle-ci lui permet de s’interroger sur le problème en question et ainsi faire évoluer sa réponse. Toutefois, cette faculté supplémentaire n’étant pas innée, elle mène à un « tâtonnement » où les solutions ne sont pas « données » par 12 13

Ibid. Trésor de la Langue Française Informatisé – TLFI.

29


Contexte et Objectifs

la Nature comme elles le sont avec l’instinct. Ce tâtonnement peut être parfois inefficace car l’Homme apprend grâce à ses erreurs et ses échecs. En résumé, il peut, grâce à son intelligence, entreprendre des actions positives ou négatives pour les conditions du milieu où se trouve le problème tant que celui-ci est, selon lui, résolu. L’intelligence permettant à l’Homme de penser et de réfléchir lui confère la connaissance afin d’orienter ses prises de décisions menant parfois à des contradictions ou à des contresens. Ainsi, c’est son intelligence, sa connaissance et donc paradoxalement les sciences qui guident en grande partie les prises de décisions. Or les sciences, y compris celles de l’écologie et de l’environnement14, nous déconnectent du vivant, ce à quoi nous aspirons et à quoi nous devons nous intégrer et nous adapter (Jouventin, 2019). Henry Bergson, philosophe français du XIXème siècle s’est intéressé à la question de l’adaptation de l’Homme et de l’animal en questionnant l’intelligence et l’instinct comme fondement de sa réflexion. Celle-ci est selon moi pertinente et témoigne d’une « double imperfection de l’Homme » (Manon, 2008). « L’Homme est le seul animal dont l’action soit mal assurée, qui hésite et tâtonne, qui forme des projets avec l’espoir de réussir et la crainte d’échouer » (Bergson, 1932). On peut dont affirmer qu’une action réalisée avec la volonté de s’adapter est généralement mal assurée car indirecte. Elle ne permet pas de répondre de façon simple et directe à la problématique sans réflexion et ainsi sans connecter et utiliser l’intelligence sous forme de pensées. Cette caractéristique de l’ « intelligence » nous distingue de l’animal et de la Nature puisque qu’elle est définie et « caractérisée par une incompréhension naturelle de la vie » (Bergson, 1932). De plus, cette intelligence nous conférant la conscience de notre finitude nous pousse à penser, réfléchir et organiser nos actions en fonction de cette finitude, nous menant fréquemment vers des actions négatives et « imparfaites » pour la communauté ou le bien commun contrairement à l’instinct animal. En outre, les performances développées par l’action instinctive sont très questionnées par l’Homme ne pouvant rivaliser par sa supériorité technologique et intellectuelle : « Étonnamment, les espèces ne sollicitant pas ou très peu leurs capacités cérébrales, sont celles qui, par les édifices qu’elles construisent, bousculent le plus les lois de la physique » (Tison, 2016). On se rend compte suite à cette analyse que la capacité adaptative développée par un être vivant est directement impactée par l’utilisation ou non de l’intelligence. Cette déduction remet au cause notre façon de faire lors de nos « adaptations » au travers de processus complexes bien souvent illusoires et néfastes pour l’environnement.

30


Contexte et Objectifs

En conclusion, on retrouve d’un côté l’animal, possédant des capacités instinctives permettant de développer des réponses adaptées, directes, stables et bien assurées avec par exemple, la fabrication d’habitats « à la stricte mesure de leur corps et de leurs besoins » (Tison, 2016). De l’autre, l’Homme et sa conscience liée à l’intelligence sous forme de pensées, gage d’un ajustement souvent hésitant, incontrôlé et exposé à l’échec. Antoine Tison affirme pareillement « opposer instinct et intelligence ». En effet, pour l’oiseau, « l’habitat complète le corps » alors que pour l’Homme, l’habitat est détaché du corps. Ainsi, « tous les animaux sont achevés et parfaits, l’Homme est seulement indiqué, esquissé…Tout animal est ce qu’il est, l’Homme seul originairement n’est rien. Il doit devenir tout ce qu’il doit être puisqu’il est un être pour soi, il doit le devenir par lui-même. La nature a achevé toutes ses œuvres mais elle a abandonné l’Homme et l’a remis à luimême » (Fitche, 1998). Cependant, nous ne pouvons pas symboliser les méthodes d’adaptation de l’Homme et de l’animal exclusivement par l’intelligence et l’instinct car ces caractéristiques témoignent de caractères généraux auxquels viennent se joindre de nombreuses exceptions. Ces exceptions permettent d’entrouvrir les portes séparant l’Homme de l’animal qui sont respectivement la Culture et la Nature.

3.2

La Culture et la Nature

La culture, notion globale s’inscrivant exclusivement chez l’Homme, se définit comme la « fructification des dons naturels permettant à l’Homme de s’élever au-dessus de sa condition initiale et d’accéder individuellement ou collectivement à un état supérieur »15. Elle est plus précisément définie comme une notion « qui tend à élever un être humain au-dessus de l’état de nature »16. La Nature, selon le trésor de la langue française informatisée, est définie comme l’« ensemble de la réalité matérielle considérée comme indépendante de l’activité et de l’histoire humaine ».17 Dans le domaine de la biologie, la Nature est définie comme « Force spécifique au vivant »18, une force quasi supérieure, certainement présente chez tous les êtres vivants « qui donne à l’être son évolution, sa forme. Cette forme est indépendante de la matière ; c’est le pouvoir législatif qui est au-dessus de la matière et qui la dispose ; mais le pouvoir exécutif de cet arrangement est tout à fait matériel et physico-chimique (...). La Nature 15 16 17 18

Trésor de la Langue Française Informatisé – TLFI. Ibid. Ibid. Ibid.

31


Contexte et Objectifs

intervient donc avec ses propriétés comme une force exécutive de toute idée. » (Bernard, 1878). Cette citation rejoint l’analyse réalisée ci-dessus sur l’instinct en appuyant l’idée dans laquelle la Nature guide l’exclusivité des êtres vivants naturels n’ayant pas de « seconde nature » telle que la Culture pour l’Homme. La Culture et la Nature sont deux notions qui ont longtemps été distanciées, jusqu’à être considérées comme contradictoires, notamment par Darwin avec sa théorie de l’évolution et son éthologie comparant l’Homme à l’animal au travers de ces deux notions. Selon Darwin, l’Homme naît animal naturel et c’est sa conscience et ainsi ses « facultés intellectuelles » qui lui permettent de passer du stade d’animal naturel à celui d’animal culturel. Ainsi, l’Homme descend de formes « inférieures », moins développées que celles qu’il est aujourd’hui. Ses facultés innées et la transmission de celles-ci réalisées à travers le temps lui permettent d’acquérir la Culture et ainsi de dépasser sa condition initiale naturelle. Si nous gardons en tête la théorie de Darwin à ce sujet, cette exceptionnelle évolution nous prouve comment l’Homme est devenu Homme par l’intelligence, la transmission d’informations et ainsi la Culture. C’est au travers de cette Culture qu’il pourra se développer davantage, s’affirmer et ainsi tendre vers un « état supérieur » individuellement ou collectivement (Darwin, 1646). L’Homme, par le développement de ses facultés, est à même de construire une civilisation. En effet, il est le seul à contrôler son propre progrès. Le fait qu’il soit capable de bouleverser son évolution et donc audelà de lui-même, l’évolution de son milieu lui confère un rôle supérieur, voir même primordial, contre les crises actuelles. Ses capacités le classe en tant qu’être en devenir, l’éloignant petit à petit de son état primitif et sauvage. Ce développement par la Culture nous mène aujourd’hui à reconsidérer l’Homme qui peut être mené au stade de « surhomme » (Le dref, 2008), le détachant davantage de ce qui l’entoure. Une véritable fracture s’est créée au fur et à mesure de l’évolution de l’Homme. Cette fracture est caractérisée par les évolutionnistes par « la volonté d’orienter l’espèce humaine définitivement hors du destin animal que la Nature lui a donné » (Ibid.). L’évolution humaine tend à nous transformer en « surhomme dans les esprits : puissant, maître de ses émotions, ignorant la souffrance et baignant dans l’ataraxie, en somme, sans plus aucune des caractéristiques de l’existence qui appartiennent à la vie animale sensible. Dans l’utopie post-humaniste, c’est donc finalement l’Homme en tant que vivant que l’on veut faire disparaître ». (Ibid.), (Figure 12.). Cette pensée est loin d’être isolée et tire ses fondements dans la philosophie du XIXème siècle. Nietzsche, philosophe du XIXème siècle et l’un des premiers a avoir évoqué ce statut de « surhomme » principalement dans Ainsi parlait Zarathoustra paru en 1883. Ce « surhomme » a été défini comme un dépassement du simple Homme duquel nous devions avoir « douloureusement honte » tant sa condition est médiocre. Ces pensées sont

32


Contexte et Objectifs

Figure 12. « Le bras Mécanique de Stelarc » Photographique de l’artiste Stelios Arcadiou ou Stelarc lors de l’utilisation d’un bras mécanique qu’il a conçu lui-même. On le voit écrire « EVOLUTION » sur un tableau. (Ballet, 2016).

33


Contexte et Objectifs

la preuve d’un désir brutal de « détachement de la nature » opéré par l’Homme dans le temps. Elles sont aujourd’hui très discutables et ne sont aucunement une marche à suivre pour nos développements personnels. L’évolution et l’élévation de l’homme doit se réaliser en « acceptant sa responsabilité dans sa propre survie et dans la préservation de son environnement naturel » (Potter, 1971) dans un premier temps. Dans un second temps, il doit selon moi s’inscrire dans la lignée de l’œuvre d’Aldo Leopold par « l’inclusion de l’Homme dans une communauté « biotique » rassemblant tous les « systèmes naturels » considérés comme interdépendants, ce qui impose la préservation et le respect de chacun d’eux. »19 Il existe donc un véritable paradoxe dans lequel l’Homme possède les capacités pour se développer, bâtir une civilisation mais il en oublie son fondement et s’en détache jusqu’à vouloir le faire disparaître de son esprit. L’Homme s’est développé, a acquis la Culture, une morale et pensait appartenir à « une espèce supérieure » (Darwin, 1646) s’affirmant au fil du temps. Pourtant, il n’a fait que se détacher de ses valeurs intrinsèques qui le définissent. Ce détachement déjà explicité au cours de ce travail de recherche se ressent dans la construction et l’évolution de nos civilisations, par des modèles et modes de vie basés sur le triptyque production, consommation et croissance constantes sans objectifs finaux et moraux tel que le développement de l’Homme lui-même. En conclusion, ces pensées relatives à la Culture nous éclairent sur les potentiels futurs de l’Homme concernant son « adaptation » au monde et à l’environnement qui l’entoure. La direction entreprise depuis des milliers d’années n’a fait que détériorer nos milieux par les capacités qui lui ont été conférées. En effet, c’est un être risqué, qui, par la Culture et sans grandes capacités instinctives, est capable de régresser : l’homo sapiens est le seul animal « capable de se perdre » (Rousseau, 1755). De plus, c’est un être inachevé, qui se construit au fur et à mesure du temps : c’est l’éducation qui lui permet le développement grâce à la transmission et ainsi la Culture. Celle-ci est donc essentielle au développement de soi ainsi qu’à la façon dont on va s’adapter au reste du monde. Les cultures évoluent et se modifient au fur et à mesure du temps mais rien ne laisse supposer que la Culture actuelle est « le résultat d’un progrès ». Celle-ci peut régresser. Selon mon opinion, cette Culture est en phase régressive, spécifiquement dans son rapport à la Nature. Le progrès, de manière générale, a remplacé les valeurs fondamentales de l’humanité. Finalement, la Culture est une exceptionnelle capacité transmise à l’être humain dont lui seul en a possession, cependant, elle est un défaut incontestable pour le reste du vivant, lui conférant le rang d’être « inférieur » aux yeux de l’Homme vers lequel il n’a, en général, que peu de considération. 19

Tiré de « Anticiper les changements climatiques en nouvelle-aquitaine. Pour agir dans les territoires », Editions Région Nouvelle-Aquitaine, 2018, 488 pages.

34


Contexte et Objectifs

On a donc d’un côté, une démarche individualisante, définie par une multitude de cultures définissant l’Homme et le distinguant de son milieu, et de l’autre, une démarche généralisée, définie par la Nature et représentant le milieu. L’animal, en tant qu’être naturel et sensible fait donc partie du milieu dans lequel il évolue, contrairement à l’Homme qui s’impose et modifie le milieu dans lequel il évolue. Ces constats ouvrent de nouvelles portes concernant l’évolution de ces êtres, directement rattachée aux milieux dans lesquels ils vivent. Le milieu, va également contribuer à faire évoluer ces êtres par ses conditions naturelles pour les faire devenir qui ils sont aujourd’hui. 3.3

L’évolution et le climat

L’Homme, tout comme l’oiseau, a évolué à travers le temps et l’histoire. L’oiseau, présent depuis plusieurs milliards d’années a prospéré au sein d’environnements très variés marquants sa grande diversité d’adaptation. L’Homme, présent depuis seulement quelques milliers d’années, a également évolué et s’est adapté à des environnements et climats très variés. Grâce à sa faible sensibilité aux fluctuations climatiques ainsi qu’à la Culture et à l’Intelligence qui lui ont été conférées, l’Homme a colonisé la très grande majorité de la planète. Il est allé jusqu’à occuper les espaces les plus inhabitables pour les habiter et s’y accommoder. Leurs évolutions respectives (à l’Homme et à l’oiseau), caractéristiques de leur adaptation aux contextes évolutifs, ont permis à chacun d’eux d’acquérir des atouts primordiaux pour le bon déroulement de leur vie ou survie. Ces évolutions se sont caractérisées par une modification de leur comportement ou de leurs patrimoines génétiques (Hoffmann et al., 2011). Ces développements se sont réalisés de manière naturelle laissant place, d’un côté à des modifications comportementales comme dit précédemment, et de l’autre à une sélection naturelle permettant de faire prospérer les espèces les mieux adaptées. Etant donné l’évolution lente du climat et des environnements dans lesquels les animaux et l’Homme ont évolué, chacun a pu proposer des réponses adaptées « en temps et en heure ». En effet, l’évolution biologique des êtres vivants est étroitement liée aux évolutions climatiques. Elles ont joué un rôle primordial dans l’évolution des espèces telles que l’Homme (Acot, 2003). Certaines périodes climatiques ont plus ou moins favorisé l’apparition et la prédominance de caractères adaptatifs afin de faciliter leur survie face à des conditions spécifiques telles que l’apparition du bipédisme chez l’Homme suite à une grande période de sècheresse (Orlove, 2005). L’évolution d’aptitudes cognitives, de la

35


Contexte et Objectifs

Culture et du langage peuvent, elles aussi, être reliées aux variations climatiques (Orlove, 2005) tout comme l’extension des espaces de culture qui a favorisé le développement de civilisations et ainsi de structures sociales (Diamond, 2005). Ainsi, le climat joue un rôle essentiel quant à l’évolution des êtres vivants et à leurs adaptations, c’est pourquoi les changements climatiques drastiques que nous connaissons ces dernières années sont inquiétants et sans précédent (Füssel, 2007). Ils laissent supposer des dysfonctionnements présents et futurs dans l’évolution des êtres vivants. Face à cette crise en expansion constante, le besoin de comprendre les adaptations passées et présentes de nos systèmes naturels est essentiel. Cette compréhension nous permettrait de réagir sans aggraver la situation dans le développement d’un futur équilibre entre notre survie et celle de l’environnement qui nous entoure. Aujourd’hui, les activités anthropiques sur la surface du globe induisent des changements environnementaux considérables à toutes les échelles. Ces changements impactent de manière néfaste les systèmes et la diversité biologique de par leur rapidité et leur intensité. Ces bouleversements, en particulier climatiques, causent un « retard » de la biodiversité et des écosystèmes dans leurs réponses adaptatives face au changement global causant un effondrement de nombreux maillons d’écosystèmes. Cet effondrement cause des dettes d’extinctions très conséquentes (Tilman et al., 1994) pour les communautés animales et Humaines depuis quelques années (La canicule de 2003, les catastrophes environnementales répétées, la disparition de nombreuses terres et communautés sous le niveau des océans et bien d’autres). La difficulté réside donc dans la vitesse du changement climatique et l’incertitude de son ampleur (IPCC, 2007). Ainsi, le temps et l’environnement sont facteurs d’adaptation. En effet, l’un des principaux fondements du processus d’adaptation réside dans « la variation biologique ou comportementale » et celle-ci implique des domaines scientifiques très variés et des facteurs d’échelles et de temps divers, « impliquant les notions de choix et de prise de décision » (Bates, 2005). Au cours de l’histoire, l’Homme, par sa position d’être inachevé, a constamment évolué. Sur le plan comportemental, c’est principalement son éducation et la transmission d’informations acquises par la Culture qui lui a permis de suivre une direction spécifique plutôt qu’une autre. Cependant, les climats étant divers à l’échelle de la planète, ils ont joué un rôle primordial dans la création de Cultures et d’interactions sociales en fonction des zones géographiques et des environnements divers. Ces différences rencontrées ont grandement influencé le comportement sur de grandes périodes temporelles (Diamond, 2005). C’est donc sur le plan comportemental qu’une piste d’évolution prometteuse se dessine pour un futur changement global. Cependant, le comportement humain, contrairement à celui de l’animal, n’est que peu influencé par les agents extérieurs

36


Contexte et Objectifs

à l’Homme. L’Homme est donc à même de le modifier sur des périodes temporelles plutôt courtes. Le second plan d’évolution et d’adaptation de l’Homme dans le temps est génétique. Celui-ci est exclusivement influencé par les climats ainsi que nos modes de vie. Il se modifie très lentement au cours du temps. Cette voie n’est donc pas privilégiée car elle ne permet pas, ou très difficilement, de déceler de futures solutions ou principes d’adaptations pouvant être modifiés volontairement. Au sujet des animaux, leurs adaptations et évolutions ont été guidées naturellement et donc exclusivement influencées par la Nature et leur instinct. Cependant, l’instinct prend en compte tous les paramètres essentiels à sa survie et à celle de son environnement de manière durable. Ainsi, il peut se révéler parfois plus intéressant que les pensées de l’Homme. Effectivement, comme dit précédemment dans la sous-partie « L’intelligence et l’instinct », celui-ci peut révéler des pistes extrêmement prometteuses pour le développement des sociétés humaines. Ces pistes pourraient se révéler intéressantes par la retranscription des comportements de certains animaux par l’Homme selon ses propres modèles. Ces comportements évoluant dans des périodes temporelles courtes suite à une modification du milieu dans lequel ils vivent, ils témoignent d’un succès adaptatif de la part de certains animaux. Ce phénomène peut être appelé l’accommodation phénotypique ou plasticité d’adaptation : « un ajustement adaptatif, sans modification génétique, des différentes formes du phénotype, à la suite de l’ajout d’un facteur environnemental nouveau ou inhabituel au cours du développement ». (West-Eberhard, 2003). Sur le plan génétique, les oiseaux, comme les autres animaux, évoluent grâce à leur plasticité phénotypique. Cette évolution, comme chez l’Homme, est formelle et leur permet de s’adapter sur un laps de temps long face aux changements des conditions environnementales. La génétique, se modifiant sur de très longues périodes, elle n’est pas un cas privilégié afin d’analyser des réponses face au changement climatique actuel. Ainsi, grâce à l’analyse de l’Homme et de l’oiseau, on peut constater une évolution considérable de ces êtres, définis par la Nature et la Culture, les éloignants progressivement. Cet éloignement se ressent aujourd’hui jusque dans leurs comportements et induit ainsi des solutions face au changement climatique qui diffèrent fortement.

37


Contexte et Objectifs

4.

L’adaptation ou l’ajustement

Le contexte climatique actuel contraint la faune et la flore à des conditions parfois critiques qui engage constamment leur survie. Leurs aptitudes adaptatives sont mises à rude épreuve et chacun doit s’accommoder pour survivre. Cependant, sans vouloir contredire ce discours, l’adaptation doit tout de même être décrite comme un changement, menant à une évolution bénéfique et positive des êtres vivants et des systèmes qui y sont rattachés. C’est avant tout par l’adaptation à leurs environnements et aux contraintes présentes que les êtres vivants ont pu, pour certains, prospérer et évoluer sur terre durant des millions d’années (Jouventin, 2019). L’adaptation est une clé de l’évolution pour chaque être vivant, nous y compris. Dans ce contexte climatique catastrophique, la réduction des émissions de gaz à effet de serre de façon ponctuelle ne suffit plus, l’intérêt se tournant progressivement vers l’adaptation des systèmes (Moran, 2000). L’adaptation doit être requestionnée et redéfinie par et pour l’Homme. Il est essentiel de bien interpréter le mot « adaptation » et son implication au sein de l’environnement, sans quoi, les schémas d’ajustements réalisés par l’Homme seraient toujours assimilés de façon positive. L’adaptation au changement climatique désigne « les stratégies, initiatives et mesures visant à réduire la vulnérabilité des systèmes naturels et humains contre les effets (présents et attendus) des changements climatiques. »20 Elle est définie ici comme une réponse de l’Homme et de la nature face au changement climatique. Cependant, ce phénomène n’est pas réalisé similairement entre l’Homme et la Nature. La Nature a su s’adapter à son milieu pour en tirer une réponse positive par et pour son milieu. Malheureusement, l’Homme s’est parfois adapté au travers de voies désastreuses pour l’environnement, se détachant ainsi de celui-ci. Il ne s’est pas véritablement « adapté » au changement climatique car la fracture de l’Homme avec son milieu naturel a progressivement amplifié les effets du changement climatique et ainsi la dégradation de l’environnement. Enfin, « quant au rapport avec la nature, la nouvelle spiritualité devra surmonter la distinction séculaire entre l’Homme et la nature, distinction qui a eu l’erreur de libérer l’Homme des terreurs et des peurs magiques mais qui est en train de provoquer la ruine de l’humanité et le désastre écologique. Le temps est venu de guérir les blessures de l’Homme coupé de l’univers et de calmer les gémissements de la nature exploitée par l’Homme ; et cela ne peut se réaliser que grâce à la grande réconciliation de l’humain et du cosmique » (Bergeron, 1999). En effet, cette citation induit le fait qu’une reconnexion à nos systèmes naturels est nécessaire pour envisager une action adéquate et durable tel que l’on peut la définir par « adaptation ». 20

Trésor de la Langue Française Informatisé – TLFI.

38


Contexte et Objectifs

C’est au travers d’une définition tirant son fondement dans la philosophie que nous pouvons prendre conscience de la véritable signification du mot « adaptation ». Dans ce domaine d’étude, elle est définie comme la « modification des fonctions psychiques de l’individu qui, sans altérer sa nature, le rende apte à vivre en harmonie avec les nouvelles données de son milieu ou un nouveau milieu » (De la Blache, 1922). Cette définition met en évidence la capacité à vivre en harmonie avec « les données de son milieu » (Ibid.), qui aujourd’hui sont en perpétuel changement et auxquelles l’être humain cherche désespérément à s’accorder au point de les délaisser et s’en détacher. De plus, il est clairement énoncé que ce changement est réalisé « sans altérer la nature » (De la Blache, 1922) soulignant de nouveau que les méthodes progressivement mises en œuvre par l’Homme ne sont pas appropriées puisque sa « nature » intrinsèque a disparu et la Nature s’est altérée dans le temps. En effet, la recherche d’harmonie pousse l’Homme à développer des méthodes parfois contradictoires avec son milieu par l’isolement et l’artificialisation progressive de celui-ci. Finalement, il conçoit sa propre « harmonie » au travers d’un environnement artificiel, dans lequel il injecte de l’énergie, du temps, des moyens et des ressources considérables. Cette conception bouleverse l’ensemble des écosystèmes naturels renforçant la crise écologique actuelle. Par sa volonté d’harmonie artificialisée, l’Homme ne témoigne en aucun cas d’une adaptation qui « équivaut à une économie d’efforts qui, une fois réalisée, assure à chaque être, à moindres frais, l’accomplissement paisible et régulier de ses fonctions » (De la Blache, 1922). Finalement, l’adaptation doit impliquer un développement positif de l’environnement au sein même de son processus. Dans le cas contraire, nous parlerons de simples « ajustements » ne permettant pas un bon développement de l’environnement ainsi qu’une progression négative du changement climatique. Ces « adaptations » vont varier selon chaque être vivant, système social et environnement. Elles sont dynamiques et souvent apparentées à des phénomènes individuels et différents pour tous. En effet, chaque zone géographique, régie par son climat, sa topographie, son activité qu’elle soit anthropique ou naturelle, ses habitants et ses connexions avec le reste du vivant, va amener des « ajustements » différents de la part de chacun, qui ne sont pas toujours assimilés à de l’adaptation. Afin d’engager une véritable « adaptation », telle que décrite ci-dessus, l’Homme devra se reconstruire et se « réconcilier avec la nature » (Tassin, 2020) afin de conserver des conditions des plus bénéfiques pour notre environnement et donc, face au changement climatique. C’est au travers de ces valeurs que j’engage mes recherches afin d’étudier les comportements développés par l’Homme et l’oiseau dans leur « adaptation » et l’ « ajustement » au changement climatique. Finalement, l’adaptation se caractérise par la présence de solutions à travers de multiples notions transversales pouvant se révéler essentielles et

39


Contexte et Objectifs

enrichissantes pour la compréhension de ce phénomène qu’est le changement climatique. Ces notions, traitant de domaines scientifiques variés, sont à analyser afin d’en découvrir des pistes d’adaptations intéressantes pouvant être échangées de l’Homme à l’oiseau et inversement. Ces notions issues de domaines transdisciplinaires se résument par des domaines larges tels que l’environnement, le changement et l’évolution, la modification, l’interaction et l’organisation, la survie et l’équilibre, l’innovation et l’apprentissage, la vitesse, la plasticité, l’échelle spatiale et enfin la perception, l’information et la prise de décision (Figure 13.) dont certaines ne pourront pas rentrer en jeu dans la recherche de solutions adaptatives. Ainsi, avant même d’entreprendre des recherches dans cette diversité de notions, il parait primordial de comprendre et assimiler les fondements de l’Homme et de l’oiseau. Cela permettra de s’orienter vers les notions pouvant être utiles dans le recherche de solutions adaptatives liées à leurs capacités intrinsèques. Ainsi l’étude philosophique et comportementale des sujets parait cruciale avant d’étudier leurs comportements dans l’ « adaptation » ou l’ « ajustement » au changement climatique.

40


Contexte et Objectifs

Figure 13. « Stratégies d’adaptation et d’aténuation » Tableau résumé des notions transversales, issues de plusieurs définitions interdisciplinaires du concept d’adaptation. (Simonet, 2009)

41



Adaptations et ajustements face au changement climatique

II. ADAPTATIONS ET AJUSTEMENTS FACE AU CHANGEMENT CLIMATIQUE

1. Introduction des cas d’études La Nouvelle-Aquitaine est un territoire d’exception aux richesses naturelles rares. A l’heure actuelle, ce territoire initie son accoutumance aux nouvelles transformations climatiques. Cette initiation se matérialise par une bonne connaissance du territoire et la mise en place d’actions à toutes échelles. La diversité naturelle présente au sein de la Nouvelle-Aquitaine est un objet d’étude extrêmement intéressant. De nombreuses dynamiques naturelles s’intensifient dans le temps, causant ainsi des bouleversements climatiques. Ils se manifestent progressivement depuis quelques années et peuvent potentiellement devenir incontrôlables (Le treut, 2018) (Figure 14.). Cette région est l’une des plus fortement touchée par le réchauffement climatique avec pour conséquences une augmentation de la température de plus de 1.1°C au siècle dernier et une vulnérabilité grandissante des littoraux, cours d’eau et zones adjacentes. Bien heureusement, cette région dispose d’un patrimoine naturel (Figure 14.) mais aussi culturel et social très riche qu’il est nécessaire de préserver et faire évoluer au travers de l’adaptation pour répondre aux nouvelles exigences du climat. L’étude et la considération portée à la Nouvelle-Aquitaine dans cette étude permettent de valoriser ce territoire en tant que laboratoire d’expérimentation grandeur nature. L’oiseau, espèce animale sensible aux difficultés environnementales actuelles, est lui aussi en phase d’adaptation au changement climatique. Ces contraintes étant en accélération constante, il est plongé dans un combat perpétuel contre le temps, l’obligeant ainsi à modifier son comportement et son mode de vie pour espérer survivre face à la pression naturelle exercée par ces changements. Cependant, malgré cette complexité, l’étude témoigne de comportements spécifiques intéressants et ingénieux dans leur adaptation. Le cas de l’oiseau n’est malheureusement pas isolé, il est un exemple symbolique de l’ensemble des populations faunistiques qui font face à ces difficultés. Au travers de ce travail de recherche, l’Homme et l’animal sont étudiés dans leur adaptation et plus spécifiquement dans leurs connexions mutuelles dans ce contexte d’adaptation. Ils se retrouvent, se reconnectent et peuvent se soutenir, s’entraider ou s’inspirer face à des contraintes communes. Ces rapprochements,

43


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 14. « La Nouvelle-Aquitaine, territoire marqué par de fortes dynamiques » Cartes et informations concernant les risques et dynamiques naturelles sur le territoire de la Nouvelle Aquitaine. Information tirée de « Anticiper les changements climatiques en NouvelleAquitaine » (ACCLIMATERRA, 2018). Réalisation personnelle, 2020.

44


Adaptations et ajustements face au changement climatique

ces similitudes et ces différences sont des pistes d’émergences de nouvelles voies prospectives d’habiter, dévoilant de nouveaux paradigmes.

45


Adaptations et ajustements face au changement climatique

2. La réponse de l’oiseau 2.1

L’échelle territoriale 2.1.1

Les mobilités

L’aisance développée par les oiseaux dans leur mobilité leur permet de se déplacer d’un milieu à l’autre de façon rapide et régulière. Elle permet le déplacement dans de nouveaux environnements aux conditions nouvelles, favorisant ainsi la spéciation et l’adaptation. Ces deux phénomènes sont dus à la diversité des habitats et des climats rencontrés. En effet, les espèces volatiles actuelles se sont adaptées à une vingtaine d’oscillations climatiques grâce à la migration (Blondel , 2019). Effectivement, leur forte sensibilité au climat les affecte particulièrement. Ainsi, cette hausse de la température oblige l’oiseau à se déplacer et migrer. Depuis plusieurs centaines d’années, la migration se déroule durant l’automne où la grande majorité des espèces migre vers le sud pour se reproduire et pondre dans des conditions climatiques plus clémentes. C’est seulement au retour du printemps que ces espèces retournent dans leurs habitats d’origine. Cette aptitude à la mobilité leur permet de subsister aux manques de ressources et aux difficultés climatiques de la période hivernale. La migration est donc un phénomène plastique, acquis et évoluant au fur et à mesure du temps par la présence de périodes aux températures plus ou moins extrêmes. Ainsi, les oiseaux migrateurs sont contraints de s’adapter pour survivre. Ce comportement est vital et donc instinctif. La grande majorité des oiseaux est « nomade ». Dans le contexte climatique actuel, ces déplacements engendrés par les variations climatiques sont d’actualité. En effet, les mouvements migratoires des populations volatiles ont fortement évolué avec pour cause l’augmentation des températures. Ces populations volatiles se sont déplacées vers des altitudes et latitudes plus élevées afin d’équilibrer le différentiel de température qui s’est établi progressivement dans leur habitat d’origine (Mainwaring, 2014). Malgré cette faculté d’adaptation, certains volatiles restent « en retard » par rapport à l’avancé des températures (Lenoir et al., 2015). Ce retard est explicité dans une étude européenne coordonnée par le CNRS et le Museum de Paris avec des résultats très explicites : 1°C d’augmentation lors des 18 dernières années « a induit un décalage des températures de 249 km vers le nord » durant lequel la population d’oiseaux s’est déplacée de seulement 37km21 21

Données tirées d’une étude Européenne organisée par le CNRS et le Museum

46


Adaptations et ajustements face au changement climatique

(Figure 15.). Ainsi, de nombreux oiseaux sont exposés à une course contre le climat ou « traque à l’habitat » (Blondel, 2019). Cette course les oblige à abandonner leurs aires de répartitions habituelles pour rejoindre des environnements plus adaptés à leur métabolisme, leur demandant moins d’efforts pour survivre. Ainsi, pour répondre à ces problématiques, les oiseaux ont acquis une compétence sensible et avantageuse. Mr Tingley22 nous l’explique de façon très simple : « Si la température augmente et que vous êtes capable de vous échapper, pourquoi ne pas bouger ? » Une citation qui fait pourtant controverse lorsque celle-ci est mise en parallèle avec la situation de l’Homme face aux risques naturels tels que la montée des eaux. L’évolution acquise durant leur passage au travers de grandes périodes climatiques permet à ces êtres vivants de persister sans impacter leurs environnements ordinaires et nouveaux. Néanmoins, cette mobilité est déprogrammée dans le temps et dans l’espace par rapport aux cycles migrateurs ordinaires. En effet, l’arrivée soudaine des hautes températures ne permet plus une concomitance entre la migration de l’oiseau (accompagnée bien souvent de la reproduction et la naissance des petits) et la présence de nourritures et de ressources sur un territoire donné : « Le changement climatique désynchronise ce que l’évolution a calé entre la reproduction et les ressources alimentaires »23. Ainsi, les oiseaux doivent nécessairement s’adapter à ces nouveaux environnements, induisant une nouvelle organisation des territoires, des ressources disponibles et des interactions entre êtres vivants. En effet, on se rend compte qu’un déplacement retardé peut avoir un impact colossal sur l’ensemble des êtres vivants influant ainsi sur la chaîne alimentaire. De plus, le déplacement vers des latitudes et altitudes plus élevées interpelle car il n’est pas un modèle viable pour la totalité des volatiles sur le long terme : les espaces disponibles se réduisent en altitude et affectent ainsi ces populations par une fragmentation, (Drapeau et al., 2000), un rétrécissement, une dégradation (Donald et al., 2001) voire même une destruction (Kelsey, 1992 ; Green, 1995) de leur habitat pouvant mener à des risques d’extinction (Thomas et al., 2004). De nombreuses espèces, suite à leur migration dans des latitudes plus élevées, sont contraintes de vivre sur des territoires de plus petites tailles induites par la forme conique des montagnes. En effet, elle induit une réduction de la surface disponible en fonction de l’augmentation de l’altitude. Ainsi, ces territoires sont de véritables goulets d’étranglements pour les volatiles s’ils ne réussissent pas à de Paris. Cette étude est construite sur l’observation de « 9490 communautés d’oiseaux et 2130 de papillons » « entre 1990 et 2008 ». 22 Morgan Tingley, chercheur américain, ornithologue, biologiste de la conservation, des communautés et de l’écologie quantitative. 23 Tirée d’une interview de Frederic Jiquet, Professeur au Museum d’histoire naturelle.

47


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 15. « La traque à l’habitat, le déplacement en latitude » Cartes et informations concernant les mobilités des volatiles en Europes entre 1990 et 2010 réalisée après un recueil des informations dans le documents « Adaptive latitudinal variation in Common Blackbird Turdus merula nest characteristics » (Mainwaring,2014). Réalisation personnelle, 2020.

48


Adaptations et ajustements face au changement climatique

s’adapter phénotypiquement au réchauffement de la température (Figure 16.). Le Lagopède alpin (Lagopus muta), l’oiseau le plus frigophile de l’avifaune de France voit une déclinaison de sa population car il est contraint de vivre sur un territoire en constant rétrécissement (Gaüzère, 2016). Ces « réfugiés climatiques » sont en danger et devront trouver une réponse plus adaptée telle que la migration vers des latitudes plus élevées, impliquant des environnements diversifiés bien différents des espaces montagneux. Le changement climatique impliquant ce risque est responsable d’un déclin de 5 à 7 % de l’avifaune européenne, ayant un statut de conservation défavorable (Archaux, 2003). Par cette difficulté rencontrée dans leurs habitats, les oiseaux migrateurs se sédentarisent progressivement dans des habitats plus confortables où les conditions environnementales sont moins à craindre. En conclusion, l’attitude générale des volatiles au sujet de leur mobilité est définie par un mode de vie nomade. Lorsque les conditions environnementales ne sont pas réunies pour leur survie, l’oiseau préfère généralement se déplacer et choisir de nouveaux habitats nécessitant moins de dépenses énergétiques. De plus, leur mobilité induit des modifications à d’autres échelles avec notamment une réorganisation de leurs niches écologiques et l’apparition de nouvelles interactions entre être vivants, directement altérées par ces déplacements.

2.1.2 L’organisation du territoire et la gestion de ses ressources

Une modification des aires de répartitions L’Homme, au travers de ses activités, intervient sur la grande majorité des territoires et écosystèmes généralement avec peu de considération pour les milieux naturels. L’activité anthropique qui y est pratiquée de manière intensive est facteur de réorganisation du territoire car l’oiseau voit ses habitats et niches écologiques disparaître peu à peu. Ainsi, les oiseaux sont des « victimes indirects » (Blondel et al, 2018) de nos activités et de nos modifications territoriales. L’habitat occupé par les oiseaux depuis des millions d’années se transforme peu à peu et est remplacé par des terres cultivées de façon uniforme, de grandes métropoles, des villes en constante expansion et des banlieues en plein essor dans lesquelles peu d’animaux s’accommodent (Ackerman, 2017). En conséquence, leurs aires de distribution se modifient drastiquement ainsi que leurs espaces de migration et de reproduction dans le temps et dans l’espace. (Lenoir and Svenning, 2015). En effet, ces modifications sont visibles

49


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 16. « La traque à l’habitat, le déplacement en altitude » Cartes et informations concernant les mobilités des volatiles selon l’altitude réalisée après un recueil des informations dans le documents « Using the power of comparison to explain habitat use and migration strategies of shorebirds worldwide » (Piersma,2007). Réalisation personnelle, 2020.

50


Adaptations et ajustements face au changement climatique

à l’échelle spatiale avec une migration de nombreuses espèces « à affinité septentrionale » (Ackerman, 2017) vers des environnements aux températures plus fraiches, en accord avec leur organisme, dans lesquels ils sont capables de s’accommoder tels que le merle noir, le passereau, l’oie cendrée ou encore le bruant zizi (Mainwaring, 2014) comme vu précédemment. Ces changements sont, sous de nombreux aspects, négatifs pour l’oiseau. Cependant, ils sont gages d’une découverte de nouveaux environnements, de nouvelles ressources et matériaux, essentiels à leur survie. Ainsi, ils témoignent d’une évolution mettant en exergue de nouvelles méthodes d’adaptation. Les ressources alimentaires Ces modifications spatiales indiquent une adaptation comportementale de la part des volatiles mais aussi de tous les êtres vivants se trouvant plus ou moins dans cette démarche. Arrivé le printemps et le temps de la reproduction, une course contre la montre s’engage (Blondel, 2019). Jusqu’alors, la naissance des oisillons et le « pic d’émergence des insectes et chenilles dont ils se nourrissent étaient concomitants ; aujourd’hui, ce n’est plus le cas » (Ibid,). Ainsi, une majorité se retrouve dans des situations critiques où les ressources ne sont plus présentes en temps et en heure. Pourtant, certains ont déjà tiré parti de ces changements pour migrer plus tôt et s’accorder avec les besoins en ressources alimentaires comme les hirondelles ou les mésanges charbonnières (Charmentier, 2008). Cependant, malgré la diminution de leur habitat, les oiseaux sont naturellement solitaires et peu coloniaux. La grande majorité des espèces ne se bat pas pour les ressources d’un territoire. Elle préfère se distancier pour avoir un contrôle total de son territoire au détriment d’un espace plus grand qu’elle ne contrôle pas. (Hansell, 2000). De plus, voyant leur habitat se rétrécir progressivement à chaque période de reproduction, les oiseaux sont progressivement impactés par le manque de ressources alimentaires pour leurs progénitures. Face à cette diminution constante des ressources et de la surface de leur territoire, certaines espèces n’hésitent plus, depuis plusieurs années, à se servir là où les ressources ne manquent pas, même si les risques y sont importants. C’est dans les villes qu’une nourriture très peu qualitative mais quantitative offre un recours à certains oiseaux en difficulté à laquelle ils s’adaptent. (Figure 17.). Ces dernières années, on peut observer l’arrivée exceptionnelle de nombreux animaux vers les villes. Certains d’entre eux s’accommodent aux systèmes anthropiques et risquent parfois leur vie afin de faciliter leur adaptation.

51


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 17. « La Corneille de Paris en plein action » Base de travail sous forme de photo réalisée par Régine29 en 2017 et postée sur le site web : lepigeonmigrateur.eklablog.com, (Régine29, 2017). Réalisation personnelle, 2020.

52


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Finalement, ces observations mettent en évidence un caractère naturellement opportuniste chez les oiseaux ; ils n’hésitent pas à modifier leur comportement afin de faciliter leur adaptation en habitant dans des milieux urbanisés. Néanmoins, cette adaptation s’est réalisée sur le long terme et révèle une perte de spéciation au sein des espèces. La réduction des espèces spécialistes au profit de celles généralistes Ces changements territoriaux vécus par les oiseaux mènent à une sélection naturelle. En effet, ils sont la cause d’une diminution de la richesse spécifique des espèces et d’une perte de diversité fonctionnelle au sein des environnements naturels (Blondel, 2018). Cette modification se nomme l’homogénéisation biotique (Ibid,). Autrefois utilisée pour décrire le remplacement d’espèces natives par des espèces ubiquistes introduites par les humains (Olden, 2006), elle est par la suite développée selon une vision fonctionnelle définissant « l’enrichissement systématique des communautés en espèces généralistes ou communes au détriment d’espèces spécialistes et plus rares » (Blondel, 2018). Dans sa signature la plus évidente et la plus simple, ce processus se définit comme le remplacement de nombreuses espèces « perdantes » par quelques autres « gagnantes » dont résulte une réorganisation spatiale des communautés vers des assemblages de plus en plus similaires » (Clavel et al., 2011). Ainsi, la spéciation est un caractère qui disparait peu à peu. Les espèces spécialistes sont progressivement remplacées par des espèces à caractères généralistes et opportunistes (Gaüzère, 2016). Ces nouvelles espèces peuvent s’adapter à divers environnements sans grandes difficultés, instaurant ainsi une « banalisation de l’avifaune » à l’échelle du territoire. En effet, l’augmentation d’espèces généralistes est un indicateur fort quant à la santé de la biodiversité. L’apparition abondante d’espèces généralistes (+22% entre 1989 et 2018)24 et la réduction significative des espèces spécialistes (-23% entre 1989 et 2018)25 (Figure 18.) témoignent d’une difficulté causée par la dégradation environnementale de leur milieu. Selon ce modèle, seule l’homogénéisation de populations peu spécialisées à large répartition et qui s’adaptent rapidement, est encore viable.

Ce phénomène traduit une adaptation contrôlée par le biais de la

24 Étude réalisée selon l’indice STOC, cet indice est utilisé par le Centre d’Éco logie et de Sciences de la COnservation (CESCO, ex-CRBPO) du Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN) et repris sur de plus grandes échelles pour des études européennes. 25 Ibid.

53


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 18. « Variation de l’indicateur de la spécialisation et du groupe de spécialisation en fonction du temps » Deux graphiques mettant en lumière la baisse des espèces généralistes à contrario de l’augmentation d’espèces généralistes. Reprise de données sur la base des données du Conservatoire Naturel de la Biodiversité via le programme STOC. (CNB, 2016 ). Réalisation personnelle, 2020.

54


Adaptations et ajustements face au changement climatique

sélection naturelle, mettant ainsi en lumière le facteur de la génétique comme une adaptation chronophage. Ainsi, l’homogénéisation biotique n’est pas une piste exploitable dans la recherche de solutions prospectives sur des temps succincts. Cependant, les conséquences de ces phénomènes permettent d’interpréter de nouveaux comportements adaptatifs susceptibles de nous intéresser et intervenant dans des périodes temporelles brèves. L’adaptation à l’Homme L’accroissement de colonies volatiles généralistes à l’échelle du territoire et le développement anthropique à l’échelle de la planète ont mené certaines espèces d’oiseaux à s’adapter à l’Homme et son environnement urbain afin de se ménager. Cette solution parait plutôt ingénieuse. La venue de nombreuses espèces volatiles dans les milieux urbains montre une adaptation à moindre coût. Cette adaptation urbaine réalisée par certaines espèces montre l’apparition de colonies opportunistes et généralistes ayant connues des difficultés dans leurs milieux naturels suite à la dégradation environnementale. On peut prendre l’exemple du Pigeon et du Goéland, tous deux très présents dans nos milieux urbains et profitant de ce territoire comme un atout pour ses ressources et ses « environnements naturels » tels que les parcs, les jardins de ville ou les friches urbaines (Malher, 2010). Pour une majorité d’entre eux, leur nouveau régime alimentaire bouleverse leurs habitudes. Cependant, ils ont développé de nouvelles solutions acquises par une gestion des ressources originale. Plusieurs exemples nous présentent cette adaptation alimentaire avec, par exemple « Les Moineaux qui visitent les calandres de voitures et de trains en gare où ils trouvent des insectes, les Colibris antillais et américains ont appris à venir « téter » l’eau sucrée des distributeurs mis à leur disposition dans les jardins, le Faucon crécerelle, spécialisé dans les micromammifères à la campagne, a découvert qu’en ville il était plus facile d’attraper de jeunes moineaux que des souris » (Thibault, 1968). Malheureusement, à cause du détachement progressif de l’Homme à ses valeurs intrinsèques et naturelles ainsi qu’à l’homogénéisation des environnements artificialisés, certaines espèces généralistes telles que l’Hirondelle et le Moineau domestique sont en déclin en ville (Blondel, 2019). Ainsi, on découvre progressivement une réorganisation du territoire et de ses ressources pour ces volatiles. De nombreuses espèces partent de leur milieu naturel dans lequel un effort énergétique pour manger et habiter était nécessaire contrairement au milieu urbain où tout est à leur disposition.

Par conséquent, nous observons quelques réorganisations territoriales

55


Adaptations et ajustements face au changement climatique

induites par le changement climatique et l’activité anthropique. Celles-ci impliquent de nouvelles interactions interspécifiques et la destruction d’autres. Ces bouleversements au sein du « cercle social » de l’oiseau semblent témoigner d’une adaptation de son comportement et de ses interactions au sein de son nouvel environnement.

2.1.3 Les interactions entre êtres vivants

Les interactions au sein des systèmes naturels Le forçage climatique subi par la population volatile conduit à des modifications drastiques au sein des assemblages entre communautés. Irrémédiablement, les changements opérés à l’échelle du territoire brisent certaines chaînes alimentaires et interactions (Blondel, 2019). Les conséquences de ces ruptures sont encore assez peu connues et documentées mais elles sont un sujet essentiel et pourraient « avoir des conséquences imprévisibles sur le fonctionnement des écosystèmes » (Blondel, 2019). La disparition ou l’extinction des espèces spécialistes au profit de colonies généralistes en est la principale. Les interactions entre volatiles ne se sont que peu modifiées dans les systèmes naturels, seule l’augmentation de colonies généralistes dans des territoires spécifiques aux espèces spécialistes, plus faibles en nombre d’individus, devrait changer les relations entre volatiles. Par conséquent, les regroupements opérés dans un même territoire dus à la disparition progressive des espaces viables causent inévitablement des relations de compétition dans la recherche d’habitats et de ressources (Commissariat général du développement durable, 2020). Les interactions au sein des systèmes artificiels La facilité adaptative acquise dans le temps a permis à certaines espèces généralistes de cohabiter en ville avec l’Homme et ainsi tirer profit de ses activités anthropiques. Ces oiseaux, compte-tenu de leur difficile évolution dans leur milieu rural, migrent en ville car « Les conditions du milieu urbain sont souvent plus favorables que celles de la campagne environnante » (Luniak et al., 1990). L’adaptation est ainsi facilitée par une présence constante de

56


Adaptations et ajustements face au changement climatique

nourriture par le biais de détritus laissés par les Hommes. Cependant, elle n’est majoritairement pas qualitative. De plus, les conditions climatiques en milieu urbain induites par l’activité de l’Homme sont meilleures durant la période hivernale à raison d’une température supérieure de 2 à 3 °C par rapport à la campagne. Une présence précoce de la végétation et ainsi de ressources alimentaires est, elle aussi, un argument favorable pour l’installation des oiseaux en milieu urbain. « Parfois, l’espèce s’adapte si bien au milieu urbain que sa population urbaine croît tandis que sa population rurale baisse. C’est actuellement le cas de la Pie bavarde » (Chiron, 2007). Lorsque l’adaptation est réussie, ses populations se reproduisent très rapidement car elles n’ont que peu de prédateurs en ville (seuls les chats les chassent). De plus, la chasse effectuée par l’Homme étant interdite en ville, l’équilibre naturel est bafoué. Enfin, la prise en considération des besoins écologiques des dernières années a permis l’installation de parcs, de jardins et d’espaces verts. Ces installations sont de véritables repères pour que ces oiseaux puissent s’accommoder davantage. Ces populations généralistes formées par de grandes colonies possèdent des habitats souvent proches les uns des autres. En effet, peu de rivalité existe dans la recherche d’un habitat en ville. Toutefois, elles sont plus à même de développer un esprit compétitif en ce qui concerne la recherche de nourriture. J’ai pu observer l’exemple frappant du Moineau domestique sur la place Victoire à Bordeaux. Une cinquantaine de moineaux sont visibles tous les jours sur cette place, à l’affut devant les portes du McDonalds, attendant qu’une frite ou qu’un bout de pain tombe pour l’attraper en vol. Après quelques minutes d’observation, un habitant de la place a ouvert sa fenêtre pour y déposer des bouts de pain afin de les nourrir. A partir de ce moment, une véritable compétition entre moineaux s’est déclenchée. Tous se poussaient, se mettaient des coups d’ailes, allaient jusqu’à se faire tomber du rebord de la fenêtre. L’Homme a été obligé de fermer sa fenêtre suite à la frénésie de la scène. Cette observation m’a permis de constater qu’en groupe, ils deviennent agressifs entre eux face à une nourriture dite « facile » et acquise sans effort. Il est donc préférable que la ressource alimentaire ne soit pas « livrée ». Les interactions entre Homme et volatiles au sein d’environnements artificiels Malgré ses qualités, l’environnement urbain est loin d’être un paradis pour les oiseaux. La majorité d’entre eux ont besoin d’une zone calme dans laquelle la sécurité est de mise pour assurer une bonne reproduction. Ainsi, on observe l’émergence d’une « pauvreté de l’avifaune » dans les parcs Parisien car ils sont

57


Adaptations et ajustements face au changement climatique

souvent trop bruyants. Ainsi, ils s’éloignent des centres-villes de plus en plus souvent pour se reproduire. L’être humain est le premier perturbateur des volatiles. En effet, son activité quotidienne, la pollution sonore, visuelle et carbonique constante et le peu de ressources naturelles sont des facteurs négatifs pour la survie de l’oiseau. Les parcs sont principalement conçus pour le confort humain et non pour favoriser l’accueil des volatiles, façonnant ainsi des parcs très pauvres d’un point de vue biologique (Malher, 2010). La pollution peut pousser certaines espèces sensibles à déplacer leur niche écologique car l’environnement n’est plus adapté à eux (on peut prendre l’exemple de l’Hirondelle des fenêtres qui a disparu de Londres fin XIX, période où la capitale était célèbre pour son « smog ». Depuis, en 1956, le « Clean Air Act » a introduit des lois antipollution et 10 ans plus tard, les Hirondelles étaient de retour (Olivier, 1997). Finalement, la pollution lumineuse et acoustique créée par la ville mène à un déplacement des oiseaux vers des rues plus calmes et moins éclairées (Malher, 2010). Ainsi, les nouvelles interactions causées par la présence de l’activité anthropique en ville sont un facteur essentiel dans le confort et l’adaptation de l’oiseau. Ce processus d’adaptation est fragile et se modifie en fonction du rapport entre l’oiseau et l’Homme. Néanmoins, on peut observer une accoutumance progressive de l’oiseau envers l’Homme. De plus, on remarque de premières aides dans l’adaptation apportées à l’oiseau de la part de l’Homme.

58


Adaptations et ajustements face au changement climatique

2.2 L’échelle locale

Comme vu précédemment, les manifestations adaptatives présentes à l’échelle territoriale se manifestent dans des environnements naturels comme artificiels. L’échelle locale n’en est pas exemptée. Dans cette étude, cette échelle traite spécifiquement du caractère adaptatif exclusivement au sujet de l’habitat et du nid. Les nids d’oiseaux ont fortement évolué au cours de l’histoire afin de s’adapter aux oscillations climatiques d’envergures. C’est particulièrement chez les passereaux, « l’ordre qui contient 59 % de toutes les espèces vivantes d’oiseaux contre 41 % pour l’ensemble des 22 ordres non passereaux » (Sibley et al., 1990) que cette évolution se fait le plus ressentir. En effet, le passereau est un bâtisseur naît de par sa large diversité dans la construction de ses nids. Cette faculté a été acquise lors de ses mobilités et rencontres avec des environnements variés durant les évènements migratoires. La migration étant liée à la ponte des œufs et à l’élevage des petits, l’habitat doit être optimal pour assurer un bon développement des progénitures (Hansell, 2005). Pour cela, les oiseaux conçoivent un microclimat intérieur qui influence fortement le développement des progénitures. L’étude réalisée par Marc Mainwaring au sujet de l’adaptation latitudinale du Merle noir commun dans les caractéristiques de son nid (Mainwaring, 2014) est utilisée comme étude de référence afin d’illustrer les potentiels d’adaptions de la part de l’oiseau à l’échelle locale dans un environnement naturel. Cette étude scientifique met en exergue des résultats fiables et vérifiés scientifiquement. Au sujet des environnements artificiels, l’étude s’appuie sur le livre de Frédéric Malher et Jean-François Magne : « L’urbanité de oiseaux ». Là aussi, les références prises dans cet ouvrage ont été majoritairement vécues par l’auteur. 2.2.1 Le choix d’implantation Le choix d’implantation du nid de l’oiseau à l’échelle locale n’a que peu évolué au sein même de son habitat. Les positions suggérées par les oiseaux avant et après ces changements climatiques marqués depuis maintenant plus de 50 ans, n’a que peu bouleversé la localisation des nids dans l’environnement. Cependant, les comportements adoptés se développent autour d’un compromis entre la fabrication d’un environnement adéquate pour se reproduire, couver ses œufs, élever ses progénitures et le facteur de prédation.

59


Adaptations et ajustements face au changement climatique

De plus, l’oiseau fait le choix sensible de se protéger grâce à l’environnement contre les fortes chaleurs, les intempéries et les prédateurs. En effet, on a constaté une diminution des nids situés en bord de lisière, zone régulièrement exposée aux vents forts et aux rayonnements directs du soleil (Mainwaring, 2014). A contrario, les recherches font état d’une faible augmentation des nids proches des cours d’eau et conservant une certaine hauteur par rapport au sol (Mainwaring, 2014). On peut donc en déduire que la construction d’un habitat à proximité d’un point d’eau avec la fraicheur apportée à l’environnement proche, est une solution d’adaptation développée par certains volatiles. Dans les espaces urbains, les volatiles sont opportunistes. Ils n’hésitent pas à se servir d’objets artificiels afin d’améliorer leurs conditions de vie. Ainsi, ils tirent parti de la position mais aussi des caractéristiques de ces matériaux pour habiter des espaces régulés thermiquement et souvent peu exposés à la rigueur du climat. C’est notamment sous les toits des maisons que la plupart des oiseaux décident de faire leurs nids. Le comportement face à l’installation du nid étant très diversifié d’une espèce à l’autre, l’étude n’a pas pour but de retranscrire une liste exhaustive des positions des nids sans un comportement général avéré.

2.2.2

Les caractéristiques de l’habitat

Plusieurs études présentent une modification des caractéristiques de conception des nids des oiseaux. Cette modification intervient à la suite de plusieurs facteurs. Cela peut être le déplacement vers des latitudes ou altitudes plus élevées induites par le changement climatique (Møller, 1990 ; Mainwaring, 2014 ; Hansell, 2000) ou l’installation dans des milieux urbanisés (Malher, 2010). L’adaptation suite au déplacement en latitude Lorsque l’oiseau s’adapte à un environnement naturel, les caractéristiques principales de son nid vont être altérées et adaptées au climat existant et son environnement (Mainwaring, 2014). En effet, le Merle noir commun, fortement répandu en Grande Bretagne, réalise une variation adaptative dans la conception de son nid en réponse au changement d’environnement d’implantation. Ce changement est induit par le déplacement des colonies causé par le réchauffement climatique. Les nids du Merle noir ont été analysés avant et après

60


Adaptations et ajustements face au changement climatique

leurs déplacements. Quatre nids de Turdus merula de Common Blackbirds (Merle noir) (Mainwaring, 2014), présents sur quatre différentes latitudes ont été étudiés selon leur morphologie, leur volume, leur composition et leurs propriétés isolantes. Ces informations sont présentées dans le document « Adaptive latitudinal variation in Common Blackbird Turdus merula nest characteristics » (Mainwaring, 2014). L’analyse morphologique est portée sur le diamètre externe du nid, le diamètre interne de la tasse du nid, la profondeur externe du nid, la profondeur interne de la tasse du nid et l’épaisseur des parois du nid. Les résultats obtenus ont montré une augmentation de la profondeur interne de la tasse du nid, du volume, du diamètre externe et de l’épaisseur des parois des nids lors d’un déplacement vers une latitude plus élevée (causant une baisse de température). Cependant, le diamètre interne de la tasse des nids n’a pas varié. Ces résultats permettent de constater que l’oiseau répond aux différentiels climatiques en ajoutant de la matière à son nid. Cependant, ce « surplus » n’est qu’une réponse aux variations de température. En effet, malgré la modification de nombreuses caractéristiques de son nid, le diamètre interne de la tasse du nid n’a lui pas évolué, montrant ainsi qu’il n’a pas agrandi l’intérieur de son nid. Ainsi, on peut supposer que c’est une adaptation optimale « à la stricte mesure de leur corps et de leurs besoins » (Tison, 2016) (Figure 19.). L’adaptation suite au déplacement en altitude Les variations adaptatives dans la conception des nids présentées suite à un déplacement en latitude révèlent une adaptation sur de grandes échelles spatiales. Cependant, les variations enregistrées sur de petites échelles spatiales sont peu présentes (Collias et al., 1984). L’étude « Altitudinal variations in nests of the Hawaiian Honeycreeper Hemignathus virens virens » (Kern et al., 1984) réalisée sur les sites de nidification des Amakihi commun (Hawaii Amakihi Hemignathus virens virens), à Hawaï (Kern et al., 1984) a néanmoins permis de révéler des différences significatives quant à la structure et l’épaisseur des parois du nid en fonction de l’altitude. Ainsi, l’ensemble de ces résultats démontrent l’existence d’une capacité d’évaluation puis d’adaptation comportementale de la part de l’oiseau dans la construction du nid suite à des variations environnementales à petite et grande échelle.

61


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Latitude basse

Latitude élevé

Figure 19. « Variation des mesures et de la composition des nids en fonction de latitude » Deux schémas mettant en exergue l’adaptation du nid des oiseaux en fonction de leurs déplacements en latitude. Données extraite de l’étude « Adaptive latitudinal variation in Common Blackbird Turdus merula nest characteristics » (Mainwaring, 2014). Réalisation personnelle, 2020.

62


Adaptations et ajustements face au changement climatique

L’évolution des ressources naturelles disponibles La disponibilité et l’organisation des ressources sur les sites de nidifications jouent un rôle majeur dans la sélection de ces sites (Mainwaring, 2014). Ainsi, le choix des matériaux de construction utilisés peut évoluer, se modifier ou être remplacé dans le temps en fonction de facteurs environnementaux et spatiaux. Ces changements révèlent l’existence d’une adaptation de la part des oiseaux concernant les matériaux utilisés dans la confection du nid. Les nids possèdent des capacités en termes d’isolation, de résistance et de confort qui varient en fonction de leurs compositions (brindilles, herbes sèches, mousse, autres matériaux végétatifs, boue, feuilles boueuses, fines tiges mortes, radicelles, matériaux divers...) (Snow, 1958). Les nids des Merles noirs étudiés par Mr Mainwaring sont constitués de brindilles sèches, de mousse et de boue. On observe une augmentation de la mousse et des herbes sèches, en termes de quantité et de volume, en fonction du déplacement des espèces vers des latitudes plus élevées (Figure 19.). Ainsi, ces analyses permettent d’affirmer que les propriétés isolantes des nids (définies par l’épaisseur des parois, la profondeur de la tasse interne ainsi que les propriétés thermiques des matériaux utilisés) varient en fonction de la latitude. On constate une variation adaptative et systémique dans la construction du nid suite à un grand déplacement spatial et un changement de température ambiante (Edelman, 2011). Ainsi, on peut en déduire la présence d’une réponse instinctive adaptative réalisée de manière sensible et sans modification des savoir-faire du Merle. Aujourd’hui, de nombreuses ressources utilisées par l’oiseau dans la confection de son nid sont vouées à s’altérer, à diminuer, voire même à disparaître à cause du changement climatique. Ces changements sont sources de nouvelles adaptations de la part des oiseaux dans la conception de leur nid et la sélection de leur site de nidification. En effet, deux exemples sont significatifs : le premier est celui de la boue. Cette matière est utilisée par bon nombre d’oiseaux dans la confection de leurs nids, notamment en tant que « colle naturelle » (Hansell, 2000). Cependant, celle-ci pourrait s’amoindrir « à mesure que l’augmentation des températures rend les sols plus secs et plus difficiles à pénétrer par les oiseaux » (Tomialojc, 1992). De plus, cette augmentation des températures va causer l’accroissement de nutriments dans le sol, diminuant ainsi le développement de la mousse (O’Neil, 2000), une ressource très appréciée pour ses capacités d’isolant naturel. Ces contraintes climatiques engagent une transformation de leur nid par l’utilisation de nouveaux matériaux encore inutilisés, en remplacement de ceux devenant de plus en plus limités (Mainwaring et al., 2012). Les futures études à ce sujet seront donc extrêmement intéressantes avec l’espoir d’observer de

63


Adaptations et ajustements face au changement climatique

nouvelles adaptations dans le processus de nidification en fonction du choix des matériaux disponibles. Aujourd’hui déjà, de nouvelles ressources en majorité artificielles, sont utilisées par l’oiseau dans son accommodation. Ces ressources sont généralement présentes sous la forme de déchets jetés ou abandonnés par l’Homme. C’est notamment le cas dans les environnements urbanisés où les ressources naturelles se font de plus en plus rare. L’adaptation à un environnement artificiel L’urbanisation s’avère devenir un problème de taille ces dernières années. En premier lieu pour les écosystèmes naturels, directement impactés par l’artificialisation des sols en croissance au rythme d’un stade de football toutes les 5 minutes ou d’un département français tous les 7 à 10 ans en France, causant une grande diminution de la biodiversité26. Ainsi, certaines espèces généralistes occupent des territoires urbains et cherchent à se faire « une place » sur ce territoire où le végétal n’est que minoritairement présent. De nombreuses espèces vont s’accommoder en utilisant des matériaux artificiels pour la création de leur nid ; c’est le cas de multiples oiseaux en ville tels que les moineaux (89%) ou les roselins (86%) qui récupèrent de vieux mégots pour concevoir leur nid (Figure 20.). Ces mégots, grâce aux agents chimiques qu’ils contiennent, permettent une diminution de la présence de nombreux parasites dans les nids, favorisant ainsi une bonne reproduction. Ce caractère développé chez l’oiseau témoigne d’une certaine forme d’intelligence dans son adaptation. Cette utilisation met en évidence la découverte de nouvelles qualités présentes dans ces déchets. Là encore, ce phénomène montre la capacité dont fait preuve l’oiseau pour réutiliser ce qui existe déjà pour en tirer des avantages non négligeables. Depuis maintenant de nombreuses années, la présence de nids construits à l’intérieur ou sur les structures de constructions bâties par l’Homme est en progression (Malher, 2010). Ces nids, sources d’une adaptation réussie, resserent le lien qui unit l’oiseau à l’Homme. Plusieurs exemples symboliques le prouvent comme celui du Faucon crécerelle, un oiseau de grande envergure, qui niche sur les sites élevés comme les monuments et les tours modernes, ou encore le Faucon pèlerin qui a choisi la cathédrale Saint-Michel (Weiserbs, 2007). Ces choix d’installations révèlent des comportements similaires à ceux réalisés en milieu naturel concernant la position, le volume et la forme du nid. D’autres oiseaux de plus petites tailles viennent, eux aussi, s’installer dans les villes similairement à leur habitat d’origine. Ils recherchent des habitats de petites tailles, cachés, 26

Constat énoncé par Claire Burlin, avocate de « l’Affaire du Siècle ».

64


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 20. « Nid d’un Moineau réalisé à base de mégots de cigarettes » Mise en valeur de mégots de cigarettes par le moineau dans la confection de son nid. Photographie inconnu (Droits réservés). Réalisation personnelle, 2020.

65


Adaptations et ajustements face au changement climatique

à l’abri des prédateurs et des chaleurs sous le feuillage des arbres ou sous les charpentes de toits. En ville, ces oiseaux comme l’Hirondelle des fenêtres, apprécient particulièrement nicher sous les toits, là où les températures sont souvent les plus basses. De plus, d’autres espèces ont choisi de s’installer dans des parcs en plein centre-ville afin d’assurer une proximité avec les ressources alimentaires environnantes ; c’est le cas du Rougequeue à front blanc qui niche dans certains vieux arbres des parcs, voisinant avec la Chouette hulotte ou la Bergeronnette des ruisseaux qui a colonisé les villes belges (Weiserbs, 2007). Ce comportement instinctif est induit par la migration et la recherche d’un site adapté dans lequel ils s’installent de façon similaire à celle réalisée dans un milieu naturel. Ces modifications apportées à leurs habitats par le déplacement dans de nouveaux environnements, va induire une modification des rapports et interactions entre l’oiseau et les autres êtres vivants. 2.2.3 Les interactions entre être vivants A l’échelle locale, les interactions se situent particulièrement dans les environnements urbains. En effet, l’oiseau possède de nombreuses interactions symbiotiques avec d’autres êtres vivants : les arachnides par l’utilisation de leur toile en échange des mouches attirées par le nid, les guêpes pour ses réactions hostiles face aux prédateurs ou encore les termites pour profiter de leurs habitats régulés thermiquement (Hansell, 2000). Ces alliances sont réalisées dans le but de faciliter la survie. Bien que ces interactions entre espèces au sein d’environnements naturels soient fascinantes, elles ne sont pas, à priori, liées au changement climatique. Cependant, celles-ci risquent de se modifier dans le futur suite à la réorganisation de leurs territoires et de leurs ressources, brisant ainsi certaines interactions. Il est donc essentiel de veiller quant aux futures évolutions de ces interactions qui peuvent être sources de solutions dans quelques années. Les interactions entre l’Homme et l’oiseau au sein d’environnements artificiels Au sein des environnements artificiels, les interactions visibles présentent une accoutumance au changement climatique car elles sont induites par le déplacement des populations volatiles vers les villes comme suggéré quelques temps auparavant. Les interactions progressivement perceptibles symbolisent

66


Adaptations et ajustements face au changement climatique

l’initiation des relations d’entraide entre l’oiseau et l’Homme. L’oiseau a su s’intégrer à nos territoires et s’en accommoder. Cependant, les relations n’ont pas été et ne sont pas tout le temps faciles. Malgré une majorité d’interactions positives selon les habitants (74%) (Clergeau,1997), très peu les considèrent véritablement : 45 % des habitants interrogés dans une étude en 1997 disent ne quasiment jamais observer les oiseaux chez eux et 40 % le font très exceptionnellement. Seulement 15 % d’entre eux portent un plus grand intérêt (Ibid.). L’ignorance ainsi dévoilée révèle un détachement et une rupture entre l’Homme urbain et la Nature qui s’accentuent avec le temps. Ce détachement, longuement décrit dans la première partie de ce mémoire, montre le peu de considération portée à un système naturel par l’Homme auquel nous sommes pourtant intrinsèquement liés. En effet, les interactions existantes sont en majorité réalisées grâce à l’oiseau qui va se servir de l’Homme et de ses infrastructures pour s’adapter plus aisément. En échange, sa présence en ville sera un atout pour l’Homme dans la résolution de certaines problématiques (diminution des larves et autres insectes nuisibles qui sont un véritable fléau pour la végétation en ville comme en forêt. (Clergeau, 1997)). De plus, ils sont d’authentiques « analyseur de notre condition urbaine » (Clergeau,1997) par leur statut de témoin de l’évolution des saisons et du rythme de la Nature matérialisé par leur migration et leurs périodes de reproduction. Ces bénéfices apportés par les oiseaux sont encore très peu connus mais sont révalateur de bénéfices par leur présence dans nos environnements urbains. L’oiseau, de son côté, tire profit des Hommes en assistant son adaptation par le biais de dispositifs simples mais efficaces. Les plus visibles sont l’installation de nids dans les environnements urbains afin d’utiliser les qualités architecturales existantes pour améliorer et simplifier la conception de son nid. C’est le cas, par exemple, de la Bergeronnette des ruisseaux pour qui « un trou dans un quai ou une échelle métallique d’où dépasse un peu de végétation fait l’affaire » ou encore l’Accenteur mouchet qui a adopté les « jardins suspendus », formés par les terrasses végétalisées qui se multiplient sur les toits » (Malher, 2010). Les localisations choisies permettent, dans la majorité des cas, de se tenir à distance de la pollution lumineuse et sonore de la ville, des rayonnements solaires et des fortes chaleurs mais aussi d’économiser du temps et de l’énergie dans la construction de leur nid. De plus, ces nids possèdent bien souvent des caractéristiques physiques inédites qui en augmentent son confort par rapport à ceux présents dans des milieux naturels. Ainsi, peu à peu, l’Homme et l’oiseau coexistent de façon bénéfique où l’un est assisté dans son adaptation par les infrastructures existantes et l’autre tire avantage de cette assistance par les bienfaits apportés aux environnements urbains et naturels à toutes les échelles (Clergeau,1997). La présence actuelle et future des oiseaux interpelle sur l’évolution de nos espaces naturels comme

67


Adaptations et ajustements face au changement climatique

urbains. Ces interactions doivent-elles s’intensifier, impliquant une redéfinition des espaces dits « naturels » en ville et des comportements humains ou doiventelles diminuer laissant place à des terres artificialisées, davantage déconnecter de la nature ? Le choix paraît évident. On peut s’attendre à ce que les oiseaux et d’autres animaux soient progressivement intégrés dans nos modes de vie. Cela pourrait également permettre d’assister nos actions de façon durable face au changement climatique.

68


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Critères

Adaptation*

Solutions proposées Déplacements vers des altitudes / latitudes plus élevés, territoires urbains - Migration contre le risque, diminution des efforts.

2/2

Abandon de leurs niches écologiques. Avancée des périodes de migrations afin de s’aligner sur le rythme des ressources alimentaires - Conservation d’un équilibre dans l’écosystème. Développement de nouvelles niches écologiques dans des environnements urbains à forte potentialité. Déplacements des zones d’intérêts selon les contraintes / potentialités.

3/3

Modification des aires de répartition et adaptation aux nouvelles conditions et ressources disponibles Sobriété et pragmatisme dans l’implantation - Recherche d’un équilibre entre besoins vitaux et contraintes Recherche de lieux peux exposés, déjà constitué et abrités dans lequel fournir le moins d’efforts possible

2/2

Utilisation des ressources disponibles sur site - Modes d’habiter/ construire induits par les ressources locales Recherche d’efficacité / pragmatisme au travers de ces nouveaux matériaux Développement d’une approche thermique optimal par l’utilisation de ressources naturelles à la stricte mesure de leurs corp

4/4

Développement de solutions novatrice au travers de nouveaux matériaux : Utiliser les déchets comme opportunités Développement d’un caractère opportuniste - Utiliser ce qui est déjà-là comme support Développement d’une coopération avec l’écosystème et les communautés humaines - Faciliter sa survie grâce aux êtres vivants à proximité

2/3

Développement d’une compétition dans des situations spécifiques et isolées - Compétition dans l’environnement urbain où les niches écologiques sont surchargées en populations volatiles

Mobilités

Gestion des ressources et du territoire Caractéristiques de l’habitat

Implantation de l’habitat Interactions sociales

*Nombre d’adaptations réussites / Nombre de solutions proposées (Adaptation ou ajustement)

Figure 21. « Tableau récapitulatif des solutions proposées par l’oiseau dans son adaptation face au changement climatique » Réalisation personnelle, 2020.

69


Adaptations et ajustements face au changement climatique

3.

La réponse de l’homme

L’adaptation des systèmes littoraux de la Nouvelle-Aquitaine liée à ses activités anthropiques révèle des interrogations majeures et pluridisciplinaires. Ils soulèvent de nouvelles interactions où chacun peut contribuer à la recherche de solutions. Ces problèmes se répercutant à des échelles très diverses, une multiplicité d’acteurs aux corps de métiers variés, interviennent dans ce « combat contre le climat ». Aujourd’hui, deux aléas principaux touchent la côte Aquitaine : l’érosion côtière et la submersion marine (GIP littoral Aquitain, 2018). Etant constamment en mouvement, les valeurs enregistrées à ces sujets inquiètent et nous obligent à repenser nos stratégies. Celles-ci permettent de s’adapter aux conséquences actuelles et futures du réchauffement climatique pouvant devenir vitales pour l’Homme telle que la hausse des températures l’est pour les oiseaux. En effet, un rapport publié puis actualisé par l’Observatoire de la côte Aquitaine en 2018 faisait la prévision d’une érosion côtière de 50 mètres d’ici 2050 au rythme de 1,7 à 2,5 mètres/an représentant 1873 surfaces de terrains de football de terre repris par l’océan d’ici 2050. À cette érosion vient s’ajouter le recul ponctuel du trait de côte d’une vingtaine de mètres lors du passage de catastrophes naturelles (GIP littoral Aquitain, 2018). Concernant la hausse du niveau de l’eau, elle reste en légère augmentation à la surface du globe et pourrait augmenter de 1,10 mètre d’ici la fin du siècle (GIEC, 2015).

70


Adaptations et ajustements face au changement climatique

3.1. L’échelle territoriale

3.1.1

Les mobilités

L’Homme s’est accommodé à tous types d’environnements au cours de son évolution. De par sa faible sensibilité aux différences climatiques, il a choisi de s’installer sur l’entièreté des zones habitables de ce monde malgré la quantité considérable d’efforts pour en habiter certaines. Au travers de cette colonisation de l’espace et des environnements alentours, l’Homme a artificialisé une partie non négligeable de la surface terrestre à grands coups de pelleteuses et d’asphaltes, renforçant la rupture entre l’Homme et la Nature. En effet, la Nouvelle-Aquitaine n’est pas épargnée par ce phénomène. Ce mode de vie sédentaire incite, par l’avancement du progrès et ainsi des moyens de déplacements, à se déplacer de façon pendulaire sur le territoire (Près de 2,38 millions d’actifs occupés se déplacent chaque jour en Nouvelle-Aquitaine dont 63 % se déplacent pour le travail)27. Ainsi, l’Homme s’installe sur des territoires à risques (Lacanau océan par exemple) et se déplace tous les jours pour aller sur des territoires « stratégiques » pour travailler ou subvenir à ses besoins. La remise en cause des modes de vies sédentaires face aux risques Au travers de ce mode de vie en majorité sédentaire et dévastateur pour l’environnement, l’Homme se retrouve confronté à des difficultés environnementales d’envergure. Dans le territoire de la Nouvelle-Aquitaine, les côtes littorales sont soumises à des bouleversements climatiques drastiques auxquels les habitants sont contraints de réévaluer constamment le risque et leur prise de position pour s’y adapter. En effet, le littoral est soumis depuis plusieurs décennies à des catastrophes environnementales telles que des tempêtes causant des dégâts de plus en plus dramatiques comme Xynthia en 2010 ou Leiv en 2017 par exemple (Figure 22.). A la suite de ces évènements, des moyens titanesques sont mobilisés afin de réparer les dégâts occasionnés et de consolider davantage les protections. Ces dégâts causés aux infrastructures anthropiques et à l’environnement placent le littoral de l’estuaire dans une situation critique où certaines zones telles que Lacanau océan et ses dunes alentours sont rongées par 27

Tiré de « Anticiper les changements climatiques en Nouvelle-aquitaine. Pour agir dans les territoires », Editions Région Nouvelle-Aquitaine, 488 pages.

71


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 22. « Lacanau Océan lors d’une tempête en 2014» Photographie. (Lestage, 2014)

Figure 23. « L’immeuble Signal à Soulac au bord de la destruction » Photographie. (Theillet, 2019)

72


Adaptations et ajustements face au changement climatique

l’océan. Cette ville balnéaire, régulièrement « frappée » par les éléments naturels, ne peut pas se protéger indéfiniment avec la construction de gigantesques digues constamment renforcées. Petit à petit, le recul du trait de côte grignote le pourtour de la ville (Figure 23.) et fait de cette ville une île en devenir. Ainsi, deux propositions ont été admises pour lutter face à l’érosion côtière et la submersion marine causée en majorité par le changement climatique. Des études de prévision pour 2100 sont également en cours afin de mieux comprendre l’évolution de ces territoires dans le temps. La première proposition est celle de la relocalisation. En effet, une étude psychologique a été lancée depuis 2012 (GIP Littoral Aquitain, 2018) afin d’envisager une relocalisation des biens et des activités. C’est au total « un périmètre recouvrant plusieurs centaines de logements, des infrastructures publiques et des activités commerciales liées au tourisme et aux loisirs » qui doit être déplacé. Cette logique, similaire à l’adaptation faite par les oiseaux, fait preuve d’une sensibilité aux risques, au climat et plus globalement à la Nature. De plus, elle traduit une volonté de restituer les territoires à risques couteux en énergie à l’environnement (Figure 24.). La seconde proposition est celle de la protection. Une solution plus simple à mettre en œuvre, moins coûteuse sur le court terme mais qui n’engage, en aucun cas, une solution durable. Effectivement, une protection supplémentaire pourrait permettre à la station balnéaire de Lacanau océan de survivre quelques décennies supplémentaires. Néanmoins, l’effort transmis dans cette protection est ponctuel et fréquent. En effet, d’ici quelques années, les protections devront être de nouveau renforcées, nécessitant des moyens démesurés pour survivre sur un territoire « protégé » perdant progressivement son charme et sa beauté naturelle d’antan (Figure 25.). Aucune des deux solutions n’a été retenue pour le moment mais l’une d’elle demande une adaptation de la part de l’Homme. Celle-ci remet en cause l’organisation de son territoire par le déplacement et la relocalisation des habitats menacés ainsi que ses modes de vie par l’acceptation du retour de la Nature et d’une résilience face aux risques. L’autre solution définit un ajustement de la part de l’Homme, ne prenant pas ou très peu en considération son environnement en appliquant une politique d’isolement et de protection au travers de moyens titanesques dans le but de conserver ce territoire.

73


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 24. « Déplacements des populations suite à une relocalisation » Carte schématique des mobilités des populations suite à la montée des eaux. Réalisation personnelle, 2020 ).

74


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 25. « Immobilité des populations suite à une renforcement des protections » Carte schématique des mobilités des populations humaines suite à la montée des eaux. Réalisation personnelle, 2020.

75


Adaptations et ajustements face au changement climatique

L’adaptation des mouvements pendulaires Les régions sont, depuis 2004, détentrices de libertés et responsabilités locales concernant les politiques de transports de voyageurs et de marchandises ainsi qu’aux déplacements à l’intérieur et l’extérieur du territoire (échelle interrégionale, nationale et mondiale)28. Ces nouvelles compétences offrent aux régions l’opportunité d’élaborer leur propre schéma des mobilités dans le schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire (SRADDET). Ainsi chaque territoire dispose d’un schéma unique. En Nouvelle-Aquitaine, la région souhaite mettre en œuvre le report modal et ainsi exploiter les alternatives telles que le transport ferroviaire. A l’échelle des départements, c’est un désenclavement des territoires isolés qui est recherché pour diminuer l’usage du transport individuel. Finalement, à l’échelle des communes, la décongestion des centres villes est souhaitée par le développement d’alternatives telles que les mobilités douces. Ainsi, un grand nombre d’acteurs sur différentes échelles permettent une mise en relation des politiques de transport au sein du territoire. Ces adaptations facilitent le déplacement à moindre coût (prix et énergie dépensée). A la suite de ces deux modes de vie que sont le sédentarisme (symbolisé ici par la protection constante de son milieu environnant) et le nomadisme (symbolisé par le déplacement vers des territoires moins à risques), deux organisations territoriales se dessinent. La première, définie par le sédentarisme, n’engendre que de très faibles changements dans l’organisation du territoire. La seconde, mettant en avant « un retrait stratégique » des populations vers des territoires moins à risques implique une nouvelle organisation territoriale offrant une réponse plus adaptée aux contraintes actuelles. 3.1.2 L’organisation et la gestion des ressources du territoire Les spécificités territoriales La Nouvelle-Aquitaine possède un territoire assez peu artificialisé avec seulement 9,3% de territoires urbanisés pour plus de 90 % d’espaces dits « naturels » ou destinés à l’agriculture (Figure 26). Ces espaces naturels disposent de richesses spécifiques alimentant l’activité économique de la région telle que la 28

Loi n°2004-809 du 13 août 2004 mises en place par le législateur.

76


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 26. « Carte des spécificités territoriales de la Nouvelle-Aquitaine » Fond de cartographie réalisée à l’occasion d’une exposition : « Nouvelle Aquitaine, Mosaïque de territoires » (l’Agence régionale de la biodiversité Nouvelle-Aquitaine, 2018). Retouches personnelles, 2020.

77


Adaptations et ajustements face au changement climatique

culture de céréales (oléo protéagineuses présentes dans la Vienne, les Charentes, en Gironde et dans les Landes), la culture bio (de fruits, légumes et fourragères dans le lots et Garonne, la Dordogne et en Haute-Vienne, les ensembles viticoles (autour de Bordeaux et de Cognac), la conchyliculture (très présente dans le département de la Charente-Maritime et particulièrement dans les zones de la baie de l’Aiguillon et de Marennes-Oléron), l’élevage (bovin et ovin dans la Creuse, la Corrèze, la Haute-Vienne, les Pyrénées-Atlantiques, la Dordogne et les Deux-Sèvres) et enfin la présence de grands massifs forestiers dans les Landes, en Dordogne et en Garonne. Le reste des territoires dits naturels et utilisés par l’Homme présente une agriculture diversifiée (polyculture combinée à l’élevage) ainsi qu’un secteur de la pêche très développé. De plus, on note l’existence de nombreux réseaux d’eau naturels et d’espaces protégés (9 réserves naturelles régionales, 21 réserves naturelles nationales et un parc naturel national)29 sur tout le territoire de la NouvelleAquitaine représentant 52 000 hectares de surface protégée. Cependant, la ressource en eau sur le territoire de la Nouvelle-Aquitaine est de mauvaise qualité. En effet, 54 % des masses d’eau de surface sont dans un état écologique classé de moyen contre 36 % classé comme bon ou très bon30. Ces résultats sont bien en-dessous de l’objectif fixé par le SDAGE31 en 2015. Le bon état écologique est donc très loin d’être atteint et tous les milieux aqueux sont touchés à l’exception des eaux côtières. Ainsi, seul 36% des cours d’eau, 15% des plans d’eau et 8% pour des eaux de transition32 sont dans un bon état. L’objectif fixé en 2027 ne sera donc pas atteint et des problèmes majeurs vont en découler. Le point primordial est la détérioration très probable et progressive de la qualité des eaux jusqu’à en affecter sa quantité sous l’effet du changement climatique. Cette dégradation, visible en surface, pourrait nuire aux milieux naturels existants et impacter la production d’eau potable. Par conséquent, ce territoire possède de nombreuses spécificités liées à l’environnement naturel et peut être réorganisé afin de faciliter l’adaptation 29 30 31 32

Tiré de « Anticiper les changements climatiques en Nouvelle-aquitaine. Pour agir dans les territoires », Editions Région Nouvelle-Aquitaine, 488 pages. Résultats obtenus par l’équipe de Bernard Legube, coordinateur du chapitre « milieux naturel » dans « Anticiper les changements climatiques en Nouvelle- aquitaine. Pour agir dans les territoires », Editions Région Nouvelle-Aquitaine, 488 pages. SDAGE : Schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux Résultats obtenus par l’équipe de Bernard Legube, coordinateur du chapitre « milieux naturel » dans « Anticiper les changements climatiques en Nouvelle- aquitaine. Pour agir dans les territoires », Editions Région Nouvelle-Aquitaine, 488 pages.

78


Adaptations et ajustements face au changement climatique

de l’Homme, par l’utilisation contrôlée et le développement de ces spécificités. Les dynamiques naturelles présentes sur le territoire sont, elles aussi, preuves de spécificités territoriales et sont des outils efficaces dans notre adaptation. En effet, la Nouvelle-Aquitaine, grâce au vent, à l’eau, au bois et au soleil, produit plus de 20% (36 529 GWh) de l’énergie totale consommée par la région (182 719 GWh en 2015, soit 10,6 % de la consommation nationale) sur une année. La gestion des énergies Au sujet des énergies naturelles et renouvelables, ce sont des outils juridiques qui engagent les actions et définissent les objectifs. Le Schéma Régional Éolien, annexé au SRCAE ainsi que le schéma Régional Biomasse identifient tous deux les territoires plus ou moins favorables aux développements d’énergies en fonction des dynamiques et ressources naturelles renouvelables présentes. Ce constat fait état d’une volonté de rentabilité en stoppant les actions qui engagent des pertes d’énergie et de productivité par une sous-exploitation des ressources naturelles et renouvelables. Par exemple, le Limousin, 1er département producteur d’énergie de Nouvelle-Aquitaine, avait en 2009 une part d’énergie renouvelable qui gravitait autour de 28,5 % grâce au potentiel électrique et biomasse. Ce résultat était déjà très encourageant par rapport aux moyennes nationales. Cependant, ces systèmes n’étant pas optimisés en fonction des territoires d’implantation, cette production a rapidement atteint plus de 50% pour graviter aux alentours de 56 % aujourd’hui, suite à une planification plus réfléchie. Cependant, la volonté de transition énergétique initiée par le territoire de La Nouvelle-Aquitaine semble reposer sur une transformation profonde de la société et une compréhension active de la transition. L’enjeu n’est plus seulement de changer les modes de production pour consommer moins. Le plan est multidisciplinaire et se développe à l’échelle territoriale où la justice environnementale et la redistribution des énergies en fonction des inégalités territoriales seraient entreprises ; une véritable coopération à l’intérieur et entre les territoires. Ces actions entreprises révèlent une véritable prise de conscience et témoignent d’une volonté forte de reconnexion de nos territoires entre eux. C’est une approche initiatique à la coopération entre territoire et un premier pas vers les modes naturels où tous les systèmes fonctionnent coopérativement sans compétition.

79


Adaptations et ajustements face au changement climatique

La gestion de l’eau Face aux difficultés et aux problématiques naissantes concernant la qualité et les besoins en eau, une adaptation doit être réalisée afin d’engendrer une bonification des réseaux existants. Actuellement, on observe une hétérogénéité dans la répartition des besoins et de la quantité d’écoulement en eau présente sur le territoire (Figure 27., 28.). Afin d’assurer une protection de la qualité actuelle des réseaux et ne pas les détériorer davantage, des actions territoriales sont instaurées. Cependant, avant même d’engager des solutions coûteuses et contestées socialement ou écologiquement telles que la construction d’ouvrages de rétention, d’autres moyens sont possibles afin de revaloriser ces réseaux. C’est au travers d’une nouvelle lecture des réseaux qu’un premier pas peut être réalisé. En effet, il est nécessaire de considérer l’eau comme une unicité et une ressource finie, qui irréfutablement, interagit en un tout : entre eaux superficielles, eaux souterraines et zones humides. Les eaux souterraines, mieux filtrées et moins atteintes par l’accroissement de la température et les activités anthropiques de la surface sont une source peu exploitée qu’il est nécessaire de revaloriser. Ainsi, suite à la compréhension de ces interactions, des premières démarches peuvent être enclenchées. Il est nécessaire de valoriser les têtes de bassin et les zones humides au sein du territoire. De plus, il est important de favoriser le ralentissement du ruissellement en surface afin de favoriser une infiltration lente et en plus grande quantité. Cependant, la majorité des réseaux devront donc interagir avec les nappes souterraines impliquant des moyens supplémentaires sur le court terme. Néanmoins, ce stockage sera assuré de façon optimal : en plus grande quantité et de façon durable. La Gironde étant installée sur les roches de l’Eocène, âgées de 33 à 65 millions d’années, l’eau qui y circule est datée d’environ 20 000 ans. A cette époque, l’infiltration était renouvelée rapidement. Aujourd’hui ce n’est plus le cas à cause du réchauffement climatique et de l’artificialisation des sols. Ainsi, les solutions engagées ci-dessus sont une possible adaptation à ce renouvellement ralenti des nappes phréatiques. Un ciblage devra être réalisé afin d’adapter au maximum les zones de stockage d’eau en fonction des besoins spécifiques. Ainsi, cette adaptation va mener à une réorganisation du territoire selon les besoins de la population mais aussi des activités telles que la culture céréalière et l’élevage, très consommateurs en eau. Afin de répondre aux deux aléas en Nouvelle-Aquitaine que sont l’érosion côtière et la submersion marine, de nouvelles stratégies sont étudiées, bouleversant complètement l’organisation territoriale de la région. En effet, on s’interroge sur les besoins d’une stratégie de résilience relative aux zones les

80


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 27. « Carte de l’écoulement des eaux entre 2012 et 2017 sur le territoire de la Nouvelle-Aquitaine » Fond de cartographie réalisée à l’occasion d’une exposition : « Nouvelle Aquitaine, Mosaïque de territoires » (l’Agence régionale de la biodiversité Nouvelle-Aquitaine, 2018). Retouches personnelles, 2020.

81


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 28. « Carte des prélèvements d’eau entre 2012 et 2017 sur le territoire de la Nouvelle-Aquitaine » Fond de cartographie réalisée à l’occasion d’une exposition : « Nouvelle Aquitaine, Mosaïque de territoires » (l’Agence régionale de la biodiversité Nouvelle-Aquitaine, 2018). Retouches personnelles, 2020.

82


Adaptations et ajustements face au changement climatique

plus proches des littoraux telles que Lacanau océan. Ces zones étant soumises à une intensification progressive du risque et de la fréquence des catastrophes, la relocalisation paraît être une solution aujourd’hui envisageable malgré la difficulté juridique à sa mise en place. Cette relocalisation permettrait ainsi de rabaisser ou d’abandonner les digues existantes et ainsi redonner sa liberté à l’océan pour inonder les zones à faibles enjeux. Cela permettrait de réduire significativement les périodes de submersion des zones essentielles. Ainsi, de grands territoires à faibles enjeux se transformeraient en plaines inondables, véritables repères pour la biodiversité et remparts naturels contre les inondations et autres catastrophes naturelles (Bertin et al., 2017). De nombreux avantages suivent cette relocalisation et la reprise de ces terres par la Nature : coûts amoindris dans les défenses et protections côtières, accroissement de réservoirs biologiques et d’habitats pour les oiseaux, aubaine pour la biodiversité alentours, risque de submersion marine diminuée et retour d’une évolution naturelle des territoires pouvant mener à une sanctuarisation future de ces littoraux. La gestion de la faune et la flore Plusieurs outils législatifs ont été développés sur le territoire Aquitain afin de permettre une accommodation au changement climatique concernant les environnements naturels. Le premier est le Schéma régional de Cohérence Écologique. Son objectif est de définir les zones naturelles à protéger et dans lesquelles une continuité écologique doit être rétablie. Ce plan permet une fragmentation plus réfléchie du territoire selon les besoins et les enjeux qui en découlent. C’est un outil intéressant pouvant permettre le rétablissement de continuité paysagère à l’échelle de la région. D’autres actions ont été engagées ces dernières années afin de restituer une place plus importante à la nature. Elles se matérialisent par l’augmentation de zones « Natura 2000 », de corridors biologiques et de milieux naturels protégés au sein du territoire. Une politique de protection environnementale (parcs naturels régionaux33 et surtout réserves naturelles régionales34) et de préservation des continuités écologiques35 a également été instaurée. Ces actions marquent la naissance de multiples étapes sur les voies de migration de la faune sauvage. (Figure 29.) De plus, les modèles prédictifs de l’évolution de la distribution des oiseaux permettent ainsi d’aménager le territoire en fonction des besoins présents et futurs de la faune et de la flore et donc des ressources nécessaires sur les étapes 33 34 35

Articles L. 333-1 et suivants du Code de l’environnement. Article L. 332-2-1 du Code de l’environnement. Article L. 371-3 du Code de l’environnement.

83


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 29. « Carte des territoires naturels protégés sur le territoire de la NouvelleAquitaine » Fond de cartographie réalisée à l’occasion d’une exposition : « Nouvelle Aquitaine, Mosaïque de territoires » (l’Agence régionale de la biodiversité Nouvelle-Aquitaine, 2018). Retouches personelles, 2020.

84


Adaptations et ajustements face au changement climatique

de sa migration. Dans un cadre plus spécifique et plus resserré, une volonté de protection de l’environnement pyrénéen se dévoile et se matérialise par la mise en place d’une convention tripartite (France, Espagne, Andorre) afin de doter ce territoire d’un « instrument global de protection de l’environnement » tel qu’il existe déjà dans les Alpes.36 La gestion des cultures La gestion des milieux exploités pour la culture est un enjeu de taille contre le réchauffement climatique. En effet, le changement climatique crée des modifications significatives et pénalisantes pour la plupart d’entre elles. Ces conséquences ne vont que s’aggraver dans le temps, il est donc nécessaire d’adapter nos systèmes de culture pour conserver et développer une production alimentaire à l’échelle du territoire. De plus, l’agriculture est un domaine très polluant et consommateur. En effet, c’est un secteur très émissif de gaz à effet de serre par l’utilisation en grandes quantités d’intrants et par sa forte consommation en eau. Ainsi, il est primordial d’adapter au maximum nos systèmes de cultures en fonction des besoins et contraintes futures. Une stratégie en trois parties se développe pour répondre à ces problématiques d’envergures : La première solution développée est celle du « choix d’espèces, de variétés, de races mieux adaptées et plus résilientes face aux nouvelles conditions climatiques. » De nombreuses caractéristiques peuvent être génétiquement privilégiées d’une espèce à l’autre telles que la durée de cycle, l’adaptation à la sècheresse, la sensibilité au stress thermique ou encore la résistance aux maladies. De plus, des associations symbiotiques entre espèces et variétés doivent être adoptées telles que la création de mélanges entre céréales et légumineuses ou en utilisant l’agroforesterie. La seconde stratégie adoptée sur le territoire de la Nouvelle-Aquitaine est une adaptation des techniques et savoir-faire liés à la culture tels que l’avancé des dates de semis, la réduction du travail du sol et l’utilisation de mulch pour limiter au maximum l’utilisation de l’eau. De plus, une évolution des techniques de vinification et un décalage dans les dates de récolte sont progressivement mis en place. De nouvelles techniques d’irrigation sont ainsi mises en œuvre afin d’utiliser au minimum la ressource en eau par l’utilisation de ressources végétales ou en privilégiant l’exploitation de cultures peu consommatrices en eau. Enfin, la troisième stratégie développée est celle de « la répartition spatiale 36 Outil obtenu suite à la signature d’une convention à Salzbourg le 7 novembre 1991.

85


Adaptations et ajustements face au changement climatique

des cultures ». En effet, certaines cultures, bien plus sensibles aux différences de températures, peuvent être déplacées pour venir s’installer sur des parcelles plus adaptées à leurs besoins. Cette réorganisation des cultures peut être mise à profit, en particulier pour les vignes qui sont particulièrement impactées par les fortes chaleurs. Enfin, il est essentiel que cette continuité agricole se fasse en accord avec l’environnement en adoptant une politique de diminution des gaz à effet de serre et de conservation des milieux naturels. La Nouvelle-Aquitaine souhaite répondre à ces enjeux par une diversification des cultures, une réduction du travail du sol et le développement de méthodes de cultures alternatives, plus en accord avec notre environnement naturel tel que l’agroforesterie, la création de haies ou la couverture du sol par du blunch par exemple. Toutes ces méthodes peuvent être résumées par une volonté régionale de développer des systèmes d’agroécologie permettant une adaptation contrôlée et une résilience face au changement climatique. L’enjeu global étant posé, ces stratégies sont déjà expérimentées par certaines filières clés telles que la viticulture. L’organisation territoriale Afin de s’adapter aux problématiques du changement climatique, la Nouvelle-Aquitaine souhaite mettre au point un plan général du territoire faisant constat des espaces vulnérables et des espaces à revaloriser. Ce plan (Figure 26.) se construit au moyen d’outils juridiques que sont le CODE DE L’ENVIRONNEMENT (2001), GRENELLE I ET II (2009 et 2010), le PNACC (Plan National d’Adaptation au Changement Climatique), le SRADDET (Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires), le PCAET (Plan Climat Air Énergie Territorial) et le PLU-I (Plan Local d’Urbanisme Intercommunal)37. Ce plan, orienté vers le respect de l’environnement et le développement des spécificités territoriales, indique une volonté de s’intégrer davantage aux systèmes naturels. Il s’agit, dans la situation de la NouvelleAquitaine, d’opérer une transformation progressive et structurelle du territoire par le biais de deux sujets de planification traitant de domaines transversaux (la résilience des territoires symbolisée dans l’étude par le retrait stratégique des zones à risques et la réorganisation du territoire, la transformation économique formulée dans l’étude par les interactions et le développement des spécificités territoriales dans une logique de symbiose avec la nature). Ces cadres juridiques tolèrent un réaménagement du territoire selon les risques naturels et les dynamiques territoriales mais impliquent de multiples 37

Ibid.

86


Adaptations et ajustements face au changement climatique

barrières législatives difficilement franchissables, ralentissant régulièrement les possibles évolutions. Cependant, au travers des nombreuses notions parcourues dans cette partie, une prise de conscience s’initie par des engagements à toutes les échelles et dans chacun des secteurs évoqués. Une volonté coopérative se distingue sérieusement. C’est une notion primordiale afin de s’adapter de façon durable dans notre environnement. De plus, les différentes notions soulevées attestent d’une prise en compte plurielle des spécificités et des atouts du territoire afin de proposer une réorganisation qui soit la plus juste possible. Malgré le fait qu’aucun plan territorial précis et engagé n’ait encore été réalisé, ces intentions n’en sont pas moins intéressantes et prouvent que celui-ci pourrait voir le jour. 3.1.3

Les interactions entre êtres vivants

Les interactions dans le territoire Le réaménagement du territoire de l’Homme modifie ses interactions, au même titre que chez l’oiseau. En Nouvelle-Aquitaine, de nombreux réseaux se matérialisent entre individus afin de s’engager vers une cause commune. La complexité de cette crise environnementale et la multidisciplinarité de ses conséquences en font « un outil » de coopération idéal. Au travers de ses dimensions, la crise influence la prise de décision collective ainsi que leur mise en œuvre. Des solutions communes et une mise en cohésion des parties prenantes, initiatives citoyennes et publics s’initient. Ce changement climatique est particulièrement adapté comme « champs d’expérimentation » à l’échelle du social car il met en avant une forme de participation citoyenne ainsi qu’une forme de coopération et de collaboration donnant du « sens » aux transitions à développer. Cette démarche, initiée sur le territoire de la Nouvelle-Aquitaine, est primordiale pour lancer des actions communes et transmettre un apprentissage public et collectif. Les interactions au-delà des territoires Au-delà du territoire, les actions engagées afin de s’adapter, mènent à d’inédites relations. Gravitant majoritairement autour de l’entraide, celles-

87


Adaptations et ajustements face au changement climatique

ci sont une véritable aubaine pour l’Homme qui, la plupart du temps, s’est détaché des autres et est devenu compétitif. Les actions engagées entre territoires et entre pays témoignent d’une modification comportementale face à un risque auquel nous faisons tous face et qui nous affecte tous. Ainsi, des coopérations se forment entre pays afin de répondre de manière plus soudée. Une logique de résilience et de soutenabilité se développe entre chaque territoire et à l’intérieur de ceux-ci. Ces coopérations sont bâties dans le seul but de restreindre le changement climatique au travers d’actions communes telles que la mutualisation des infrastructures dans le secteur des transports en commun et des déchets entre la France, Andorre et l’Espagne par exemple. Cette coopération possède un cadre institutionnel acquis en 1983 qui réalise des interventions prioritaires sur la protection des ressources naturelles et de l’environnement38 que depuis peu. De plus, d’autres coopérations se forment entre les territoires français, espagnols et andorrans afin de s’accorder sur une continuité spatiale des corridors biologiques. En outre, les instruments européens offrent de grandes potentialités quant aux nouvelles organisations territoriales. Il est indispensable de travailler ensemble afin d’assurer un modèle unique qui puisse fonctionner et garantir une stabilité. Ce raisonnement, bien loin de la société industrielle, compétitive et personnelle, est signe d’adaptation par l’exposition d’un modèle d’entraide encore une fois similaire à celui des écosystèmes naturels. Les interactions entre êtres vivants Au travers des solutions d’adaptation engagées par le territoire de la Nouvelle-Aquitaine, l’Homme et l’oiseau devraient progressivement se reconnecter. Les nombreuses actions mises en œuvre par l’Homme afin de s’adapter permettent ainsi de soulager à minima l’oiseau. En effet, l’augmentation des réserves naturelles et la préservation de ses ressources, l’avènement de l’agroécologie et la diminution de la pollution liée à l’agriculture vont permettre aux oiseaux de réaliser leur migration plus aisément. Ainsi, on peut supposer une augmentation drastique des ressources alimentaires et des territoires naturels de qualité comme support d’adaptation pour ces êtres vivants. Par conséquent, nous devrions connaître un essor des populations volatiles et plus généralement faunistiques dans les espaces auxquels nous apportons de la valeur par les actions explicitées ci-dessus. 38

Article n°2 du conseil du CTP (Communautés de Travailleurs des Pyrénées).

88


Adaptations et ajustements face au changement climatique

3.2 L’échelle locale L’échelle locale traite spécifiquement du secteur du bâtiment et à maxima de la ville car le parc immobilier existant est un enjeu majeur dans la transition engagée face au changement climatique. Le bâti est vecteur d’influence des modes de vie, capable de les faire évoluer en atouts incontestables comme en faiblesses, en fonction de la conception qui lui est accordée. De plus, il occupe une place très importante dans l’énergie finale consommée à l’échelle de la Nouvelle-Aquitaine, de la France, de l’Europe et du monde. Il ne représente pas moins de 42 % de l’énergie finale consommée en Europe et 35 % des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle de la planète. Le secteur du bâtiment est une des voies d’approche primordiale dans la recherche de solutions durables, résilientes et économes.

3.2.1.

Le choix d’implantation

La logique d’implantation pour diminuer les risques Repartons de la double proposition engagée dans la partie 3.1.1 mettant en exergue une protection ou une relocalisation du bâti présent dans les zones à risque telles que Lacanau océan. L’une des deux propositions reste tout de même bien plus intéressante. En effet, la relocalisation engage des changements radicaux et complexes à mettre en œuvre mais reste une solution qui devra nécessairement être adoptée dans les années à venir. Nous considérons que cette proposition sera réalisée. Comme vu précédemment, le territoire restitué à l’environnement se matérialise par la présence de systèmes naturels permettant une infiltration optimale de l’eau, une diminution du risque et une réduction de l’érosion côtière. En Nouvelle-Aquitaine, ces sujets d’études sont primordiaux. Ainsi, une réflexion est portée quant aux choix d’implantation avec l’avènement d’un « ordre de maîtrise de l’implantation des permis de construire » afin de restreindre la liberté d’installation au plus proche de l’eau. La gestion empirique de ces territoires à risques est progressivement démantelée. Cette volonté de se protéger davantage mène à une exposition aux risques de plus en plus élevés. De plus, elle implique une perte de temps, d’énergies et de moyens dans la construction d’infrastructures de protection toujours plus importantes. L’exemple de l’immeuble « Le signal » (Figure 21.) en bord de mer proche de Lacanau océan en est un exemple symbolique où il a été nécessaire de relocaliser la population

89


Adaptations et ajustements face au changement climatique

par sa situation devenue instable. D’ici 2050, plus de 5800 logements seront affectés par l’érosion côtière et la submersion marine en Nouvelle-Aquitaine. Ces constats, à l’échelle de la région, montrent l’importance du foncier dans la gestion des ressources et du territoire. Ainsi, l’Homme prend progressivement conscience qu’il ne peut habiter où il le souhaite et que des mesures doivent nécessairement être prises afin de s’accorder vers des méthodes plus résilientes. Ces méthodes exigent la revalorisation de la Nature comme allié envers les problématiques climatiques actuelles. 3.2.2

Les caractéristiques de l’habitat

L’enjeux de l’habitat à faible émission Sur le territoire de la Nouvelle-Aquitaine, de nombreux moyens et aides sont injectés dans la rénovation thermique des logements et la mise en place de réglementations et normes strictes (RT 2012). Ces moyens induisent une réduction des besoins énergétiques par l’isolation des habitats (consommation énergétique réduite de 2/3 entre la RT2005 et la RT2012 sur des bâtiments neufs avec la volonté de faire encore mieux avec la RT2020). C’est un point positif afin de diminuer notre impact sur le changement climatique39. En effet, le Programme régional pour l’efficacité énergétique mis en place en Nouvelle-Aquitaine oriente les consommateurs vers des solutions moins coûteuses pour l’environnement et pour leur budget. Ainsi, le bâtiment est un pilier essentiel dans la réduction énergétique et par conséquent des gaz à effet de serre à l’échelle de la planète. Cette solution est, selon moi adaptée à la situation mais pourrait être améliorée afin de proposer une véritable « adaptation » et non pas seulement un ajustement permettant une consommation amoindrie. D’autres notions deviennent des piliers fondamentaux dans la construction durable contre le changement climatique et en accord avec « la décarbonation »40. Nous devons développer au maximum l’exploitation des énergies renouvelables,

39 40

Aides mises en place par le Programme régional pour l’efficacité énergétique sur le territoire de la Nouvelle-Aquitaine. La décarbonation selon Negawatt signifie « l’absence de carbone d’origine fossile tout au long de la chaîne énergétique considérée. »

90


Adaptations et ajustements face au changement climatique

une sobriété énergétique41 ainsi qu’une efficacité énergétique42 à l’échelle de l’habitat. Ces notions seront abordables au moyen d’une compréhension complète de nos systèmes naturels. Le développement de la résilience face aux risques Les mouvements de populations générés par l’adaptation aux nouvelles conditions environnementales engagent une réflexion concernant le bâti au sein de son environnement extérieur. En effet, les mesures prises au sujet de l’implantation ne suffisent pas. On observe l’émergence de principes constructifs ingénieux, résistants ou résilients face à l’augmentation des risques sur de nombreuses zones de la Nouvelle-Aquitaine. Cette adaptation est le plus souvent pensée tant sur l’aspect de la conception que sur son usage. Une volonté grandissante de mise en place de politiques de résilience à l’échelle de l’habitat dès leur conception jusqu’à leur déconstruction se dessine progressivement. Le constat est le même au sujet des bâtis existants. Ces politiques prennent en compte les risques actuels et futurs en limitant au maximum l’architecture porteuse de risques dans les zones en question. Cette nouvelle voie se développe par l’avènement de la bio inspiration ; Principe consistant à s’inspirer du monde vivant et de ses capacités encore peu connues par l’Homme, afin de répondre à un problème donné. Ainsi, elles favorisent une architecture raisonnée, responsable et connectée à son environnement. Une prise de conscience se dessine avec une ambition forte pour nos évolutions futures. Celle-ci n’étant pas présente sur le territoire Bordelais, elle est une piste à envisager comme une possible solution prospective face aux risques. 41 La sobriété énergétique selon Negawatt « consiste à interroger nos besoins puis agir à travers les comportements individuels et l’organisation collective sur nos différents usages de l’énergie, pour privilégier les plus utiles, restreindre les plus extravagants et supprimer les plus nuisibles. » 42 L’efficacité énergétique selon Negawatt « consiste à réduire la consommation unitaire d’énergie des équipements, sans que l’utilisateur ait à modifier ses pratiques. »

91


Adaptations et ajustements face au changement climatique

L’adaptation aux risques naturels Concernant le bâti individuel et collectif existant, les zones spécifiques exposées à l’augmentation future des catastrophes naturelles relatives au changement climatique (sècheresse, risques littoraux, incendies, feux de forêt)43 sont sources de modification du bâti. Ces mesures, globalement complexes à appliquer sont avant tout de la prévention, de la protection et de la sauvegarde du patrimoine existant. De nouveaux cadres combinés à des référentiels techniques sans règlementation viennent se rajouter (ex. le référentiel des travaux de prévention du risque d’inondation dans l’habitat existant)44 ainsi que des mesures de prévention portées à l’usage des bâtiments telles que la création de zones de refuges et la libération des écoulements d’eau en sous-sol lorsque le bâtiment est en zone inondable, laissant place à une forme de résilience plutôt que de protection. De plus, des dispositifs plus minimes et temporaires tels que des emmarchements en entrée ou des barrières anti-inondations sont progressivement installés par les habitants. L’adaptation à la hausse des températures

En ville, la situation est bien différente. Les îlots de chaleur se multiplient à travers les villes avec plus de 41°C à Bordeaux le 23 juillet 2019 ainsi que 5% des villes à travers le monde qui « pourraient voir des hausses de températures de 8°C et plus » (NCC, 2017) d’ici à 2100. Il devient urgent de trouver des solutions afin de réduire ces chaleurs insurmontables et meurtrières pour les personnes les plus fragiles. Face à elles, la solution naturelle est, une fois de plus une solution simple et efficace. En effet, la végétation plantée à même le sol est un bon acteur de fraicheur qui contribue fortement au confort des villes. Ces arbres sont un atout efficace contre les îlots de chaleur et doivent être implantés dans les zones les plus fortement touchées par les fortes températures. Ainsi, la mairie de Bordeaux a engagé un plan de plantation nommé « Canopée » en promettant la plantation de 20 000 arbres d’ici 2025 soit le passage de 1000 à 3000 arbres plantés par an au sein de sa ville. L’uniformisation et le rétrécissement des espaces est un fléau formel et matériel des îlots de chaleur. Afin de répondre à ces contraintes formelles, 43 Explicitement exprimé dans l’article L. 562-1 du Code de l’environnement, relatif aux plans de prévention des risques naturels prévisibles. 44 Référentiel mis en place par le CSTB (Centre scientifique et technique du bâtiment) et le CEPRI (Centre européen de prévention des risques d’inondation).

92


Adaptations et ajustements face au changement climatique

la ville souhaite accentuer l’installation de grandes voies végétales et laisser une partie de la végétation spontanée se développer, ralentissant les fortes chaleurs. De plus, des ingénieurs et architectes se sont penchés sur la question et ont réalisé l’étude « Adapter les tissus urbains de la métropole bordelaise au réchauffement climatique » (A l’urba, 2019), témoignant d’une forte influence des formes et matériaux dans l’augmentation de températures. En centreville, la pierre blanche, la cale bordelaise et les dalles en calcaire ou en granit sont à conserver car elles n’influent que peu sur le réchauffement de l’espace, contrairement à l’asphalte, de par leur surface lisse, leur couleur claire et ainsi leur albédo. Cependant, par le moyen de la réflexion, ces surfaces réfléchissent le soleil, amplifient l’effet de serre, stockent une partie de la chaleur et mènent à une destruction de la biodiversité. Ainsi, ce sont bien les plans d’aménagement paysagers qui pourront diminuer drastiquement ce phénomène. L’utilisation des systèmes naturels et leur augmentation dans nos milieux urbains actuellement très pauvres en végétaux sont une approche attrayante et rentable pour l’Homme. Cela permet une adaptation à moindre coût, tout en améliorant son confort visuel, sonore et thermique. De nombreuses recherches sont réalisées afin d’augmenter la résilience et le confort des villes faces aux problématiques du changement. Cependant ces recherches sont que trop peu tournées sur l’utilisation de la végétation et de ces multiples qualités afin de répondre à ces besoins. 3.2.3. Les interactions entre être vivants Les interactions entre individus Ces préoccupations environnementales font naître de nouvelles interactions entre individus à l’échelle locale. Celles-ci sont gages d’une nouvelle organisation et de nouveaux « droits » pour les habitants, les impliquant davantage dans la volonté de transition et d’adaptation. En effet, plusieurs opérations urbaines et architecturales questionnant le changement climatique ont montré une prise en compte accrue du public et ont permis la mise en place d’une démarche participative. C’est notamment le cas lors de l’appel à projets sur la relocalisation des biens et activités de Lacanau Océan pour 2100. Ainsi on observe la mise en place d’une coopération par l’implication des habitants dans cette démarche de relocalisation. Un débat est né de cette intention dans laquelle les individus ont fait part de leurs imaginations prospectives concernant le cas

93


Adaptations et ajustements face au changement climatique

de Lacanau océan. Cette démarche novatrice et gage de solutions qualitatives, montre une cohésion et une dynamique d’apprentissage sociale importante. En effet, ce genre de situation peut être une « éducation sociale » qui ouvre la porte au développement de pratiques telles que les sciences participatives dans lequel on retrouve un partage des connaissances et des idées ainsi que des décisions effectuées. Aujourd’hui, présentes à toutes les échelles, des solutions se traduisent par des dispositifs parfois très spécifiques et localisés. On ne parle plus seulement de la fonte des glaces ou des pôles souvent montrés comme trop éloignés des préoccupations locales. Ainsi, des comités et associations telles que « TaCa » en Nouvelle-Aquitaine ont mis en place un réseau éducatif de transmission de savoir sur le changement climatique. Il est destiné aux élèves dès le collège et jusqu’à la fin du lycée afin qu’ils puissent, plus aisément, s’approprier les actions indiquées comme bénéfiques, comprendre le fonctionnement des systèmes naturels et ainsi participer à l’adaptation à leur échelle. De plus, cette association accompagne des actions afin de répandre cette nouvelle éducation à travers le territoire. Cette démarche marque un bouleversement dans nos positions face au changement climatique par une éducation dès l’enfance afin de préparer les futures générations au changement à venir. L’éducation et la démarche participative sont des pratiques novatrices qui raniment les préoccupations chez tous les individus et offrent un certain « pouvoir » face à celles-ci. Tous les individus de la société sont peu à peu impliqués dans ces démarches, de la conception jusqu’à la réalisation. Elles permettent ainsi de revoir nos pratiques de « démocratie locale » contribuant à une évolution drastique des modèles d’adaptation fournis par les dirigeants. Cependant, n’étant encore que peu démocratisés, ces réseaux ne s’imposent pas sur le plan institutionnel et font partie de démarches hors parcours scolaires.

94


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Critères

Adaptation*

Solutions proposées Conservation des habitats en zone à risques et renforcement des ouvrages de protection - Mise à distance des environnements naturels

1/2

Déplacements vers des zones à fort potentiels et sans risques Migration contre le risque et reconnexion avec la Nature Développement de zones protégées et contrôlées en accord avec les besoins du vivant Volonté de productivité par l’exploitation au maximum des potentialités énergétiques, agricoles - Révéler, valoriser et exploiter les dynamiques et spécificités naturelles du territoire

3/3

Développement d’une compréhension des systèmes de manière globale comme une unité : Prise en compte et compréhension de l’écosystème comme outil de résilience et support d’actions Sobriété et pragmatisme dans l’implantation - Installation sur un territoire à fort potentiel limitant la dépense de temps et d’énergie Protection progressive de l’habitat en zone à risques - Lutte contre les éléments naturels, dépenses d’énergie et de temps superflues dans le but de conserver une implantation

1/2

Limiter l’implantation d’architecture en territoire à risque Développement de protections, d’élévations de bâtis, de détachement du sol contre le risque Initiation d’actions résilientes grâce à des moyens artificiels face aux risques Développement de politiques de rénovations énergétiques par le biais de ressources artificielles

1/4

Initiation d’une démarche participative dans la recherche de solutions. Création d’un réseau associatif à l’échelle du territoire pour répondre aux problématiques du changement climatique. Développement d’une coopération à petite échelle. Augmentation des interactions avec les systèmes naturels Initiation d’actions ayant pour but de les intégrer dans nos espaces urbains. Volonté de territoires partagés et d’échanges à toutes échelles.

2/3

Recherche d’une résilience face aux risques - Utilisation de systèmes artificiels

Mobilités

Gestion des ressources et du territoire Caractéristiques de l’habitat

Implantation de l’habitat Interactions sociales

*Nombre d’adaptations réussites / Nombre de solutions proposées (Adaptation ou ajustement).

Figure 30. « Tableau récapitulatif des solutions proposées par l’homme dans son adaptation face au changement climatique » Réalisation personnelle, 2020.

95


La mise en perspective des solutions d’adaptation

III. LA MISE EN PERSPECTIVE DES SOLUTIONS D’ADAPTATION Par le biais d’échelles transversales à la notion d’adaptation au changement climatique, il a été possible de dégager au cours de cette étude, une évolution des comportements généraux chez les oiseaux et l’Homme. Définis comme similaires ou différents entre l’Homme et l’oiseau, ces diverses évolutions sont gages de solutions prospectives à toutes les échelles. D’un côté, les similarités existantes indiquent une adaptation similaire entre l’oiseau et l’Homme. Étant donné que l’oiseau tient compte de son environnement lors de son adaptation, on peut supposer que l’Homme fait de-même. Ainis, ces adaptations sont à conserver. De l’autre côté, les différences sont vectrices d’apprentissage pour l’Homme mais également pour l’oiseau. En effet, l’oiseau, animal instinctif, propose des solutions adaptées sans causer d’effets néfastes à la Nature. L’Homme, animal culturel, est capable d’assister la biodiversité dans son adaptation grâce à sa pensée et sa culture. Ainsi, ces aptitudes adaptatives mettent en exergue de nouvelles interactions et échanges entre l’Homme et l’oiseau, sources de soutenabilité. Suite à cette étude comparative, il est essentiel d’énoncer les grandes voies d’adaptation, suivies par l’un et par l’autre, tout en proposant des développements prospectifs des solutions présentées. Malgré la forte évolution comportementale rencontrée dans le processus d’adaptation, celui-ci reste constant et définit l’évolution. Ainsi l’ouverture de nouvelles « portes » par des solutions et paradigmes inédits est attrayante et fascinante. La règlementation actuelle étant un frein à l’ouverture d’esprit et au développement de solutions utopiques, elle n’est pas appliquée, ni prise en considération dans les solutions envisagées.

96


La mise en perspective des solutions d’adaptation

1.

Les similitudes dans l’adaptation, vectrices de réussite

La mobilité Développé à l’échelle du territoire, le nomadisme révèle une adaptation et une intégration sensiblement contrôlée entre l’oiseau et son milieu. Cependant, certains volatiles, par l’accommodation à un environnement viable et peu demandeur en énergie, n’hésitent pas à devenir sédentaires. Deux approches particulièrement accordées aux besoins et aux milieux en question. Les oiseaux sont capables de prouesses en termes d’efficacité, d’énergie dépensée et de moyens mis en œuvre dans leur adaptation. Ces capacités sont acquises grâce à un comportement instinctif. L’Homme est progressivement sensible aux difficultés liées à sa sédentarisation sur des territoires à risques. Il cherche lui aussi à s’adapter par le biais d’une relocalisation. Celle-ci peut être assimilée à un nomadisme et ainsi s’apparenter aux solutions proposées par l’oiseau. Malgré le fait qu’elle n’est pas encore été concrétisée, cette adaptation symbolise l’engagement de l’Homme dans une reconnexion aux milieux naturels par son effacement sur ces espaces. De plus, elle témoigne d’une prise en considération des pertes d’énergies et de moyens mis en œuvre dans le but de conserver un territoire à risques et engage un déplacement moins contraignant et énergivore sur le long terme. Cette volonté est gage de résilience pour les territoires de la Nouvelle-Aquitaine et offre une protection naturelle contre les futures catastrophes climatiques liées à la montée des eaux. Ce caractère dévoilé par l’oiseau dans sa mobilité, doit être une clef d’adaptation à privilégier pour l’Homme dans sa recherche de solutions. Une fois l’ensemble de la population délocalisée, ces territoires auront un potentiel notable pour le développement de nouvelles formes d’activités. Selon moi, une des voies vers laquelle tendre, serait la valorisation des nouvelles dynamiques naturelles présentes sur ces terres. En effet, ces nouveaux territoires étant restitués à leur état d’origine, de nouvelles dynamiques vont s’affirmer telles que l’avancée de l’océan. Ainsi il serait intéressant de mettre à profit ces nouvelles conditions et dynamiques. Cela pourrait se matérialiser par une production contrôlée d’énergie hydraulique due à la force de l’océan ou encore le développement de zone de cultures spécifiques à ces territoires tels que la culture des moules ou des huitres. C’est l’opportunité d’offrir un nouveau milieu à la faune et à la flore, tout en se protégeant des catastrophes naturelles futures grâce à cet entre-deux, espace entre océan et terre, naturellement résilient.

97


La mise en perspective des solutions d’adaptation

L’organisation territoriale L’homogénéisation des espaces agricoles est un véritable fléau pour la Nature. Il devient primordial de reconsidérer ces milieux. Une réorganisation selon des principes naturels doit s’engager. Cette volonté doit se traduire par un développement drastique des méthodes de cultures et de la manière dont elles sont valorisées sur chaque territoire. Un accord commun et une harmonie doit régir les types de cultures en fonction des territoires concernés. Ces dispositions permettront l’obtention de cultures de qualité, variées et en grandes quantités. Dans un premier temps, une adaptation dans l’espace et le temps est nécessaire. Ce phénomène d’adaptation spatiale et temporelle dans l’exploitation de la ressource alimentaire est également visible chez l’oiseau, migrant un peu plus tôt chaque année pour espérer s’accorder avec les ressources alimentaires disponibles. Cette similitude dans l’adaptation doit être continue et devra faire l’objet de réflexion constante pour adapter nos méthodes de culture face à l’évolution du climat. Ces nouvelles techniques de culture impliquent une réorganisation territoriale en établissant les zones les plus optimales en fonction de la spécificité et des besoins de chaque type de culture. En effet, comme en témoigne la Nature, chacune des ressources alimentaires poussant naturellement sur terre s’implante là où les conditions sont idéales à son bon développement. Ces conditions vont prendre en compte le climat, les besoins en ressources présentes dans la terre et l’assistance portée par les autres systèmes naturels. Ainsi, la production peut être réalisée tout en diminuant considérablement la dépense d’énergie humaine ou animale. Ainsi, l’évolution de nos cultures se concrétisera par l’avènement de l’agroforesterie, la permaculture et aux principes de l’agriculture naturelle. Les dynamiques de chaque milieu doivent régir l’organisation des cultures sur le territoire afin d’optimiser l’ensemble des procédés et ainsi se servirdes dynamiques existantes. En conséquence, cela permettra la reconnexion des zones de cultures avec la faune et la flore environnante grâce à une nouvelle richesse écologique, source de résilience et de diversité écologique. L’application de ces actions peut permettre une diminution de la fragmentation des territoires et l’accroissement de ressources naturelles diverses, extrêmement bénéfiques pour les animaux. L’observation de nos milieux forestiers montre les bénéfices apportés par cette formidable diversité. Les systèmes présents sont plus résistants, productifs et résilients car ils s’entraident et se complètent. Nous devons reconnecter nos cultures, stopper l’homogénéisation et l’aseptisation de nos espaces et utiliser la Nature comme support de développement.

98


La mise en perspective des solutions d’adaptation

Des premières actions sont initiées en faveur d’une évolution de ces techniques de production et d’une gestion des ressources alimentaires. Il est néanmoins nécessaire de les faire évoluer vers des systèmes connectés à leurs milieux qui s’en servent pour se développer. L’oiseau a su tirer parti de la Nature et de l’Homme dans son adaptation. L’Homme, quant à lui, prend seulement conscience qu’il doit faire la même chose en s’appuyant sur la Nature et l’ensemble de ces systèmes pour espérer s‘adapter durablement. Les caractéristiques de l’habitat A l’échelle locale, l’oiseau a su faire évoluer son habitat afin de répondre aux nouvelles contraintes climatiques présentes comme aux besoins secondaires, sans pour autant en modifier son volume initial. Cette capacité également présente chez l’Homme, se retranscrit par la volonté de s’adapter sans revoir les systèmes développés. Afin de réduire son besoin en énergie, l’Homme souhaite conserver au maximum son parc immobilier existant. En effet, tout ne peut pas être revu. Pour l’oiseau, la conservation des systèmes constructifs existants et leurs évolutions dans le temps pour répondre aux fluctuations climatiques, parait la solution la plus adaptée. De plus, l’oiseau sélectionne le site idéal lors de la construction de son nid : isolé du vent, éloigné des prédateurs, peu exposé et proche de ressources. Ce choix d’implantation doit se préciser chez l’Homme. Il a été primordial à une certaine époque pour la survie des populations nomades mais a aujourd’hui totalement disparu. Seuls quelques principes tels que les ouvertures et l’orientation sont, la plupart du temps, intégrées dans la construction des bâtiments. Néanmoins, les règlementations, souvent contraignantes, possèdent quelques exceptions. En effet, les règlementations thermiques évoluant en faveur de l’environnement et du confort dans l’habitat à moindre coût énergétique, sont une manière de s’adapter. Elles retranscrivent la pensée humaine combinée aux besoins naturels et traduisent une implication forte vers un développement soutenable. Cependant, les bienfaits de la Nature et de l’environnement alentour ne sont que trop peu utilisés. En effet, le développement d’habitats bioclimatiques à des échelles collectives doit être largement mis en place, proposant une faune et une flore d’exception, base du confort de l’habitat. La Nature en tant que telle, doit devenir une norme architecturale et doit être intégrée à l’ensemble des projets architecturaux, également urbains.

99


La mise en perspective des solutions d’adaptation

2. Les différences dans l’adaptation, vectrices d’apprentissage et d’assistance

Organisation du territoire et de ses ressources Comme la grande majorité des animaux, certains oiseaux, par la fragmentation et la réduction de leurs habitats et niches écologiques, se trouvent dans des situations dans lesquelles leur vie est en jeu. Il est fondamental que ces conditions soient prises en considération par l’homme. L’animal, dépourvu de pensées, ne peut désormais que s’adapter davantage. Il est nécessaire pour l’Homme de comprendre ses difficultés pour l’épauler dans cette adaptation. A l’échelle du territoire, il parait essentiel de restaurer des continuités naturelles de grande ampleur afin de rétablir des territoires viables pour l’oiseau comme pour le reste des animaux. Ainsi, plusieurs chaînes écologiques pourraient être sauvées de l’extinction. Les solutions aujourd’hui développées se matérialisent par le développement, la protection et la conservation de zones spécifiques : « Natura 2000 »45 à l’échelle du territoire ainsi que des corridors naturels à toutes les échelles jusque dans la ville. Ces actions permettent ainsi d’offrir aux oiseaux et autres animaux, des territoires plus amples, moins fragmentés et aux richesses naturelles plus importantes. Ainsi, la migration et le déplacement des oiseaux et autres animaux se font plus aisément. Malgré ces actions réalisées à grande échelle, cela ne suffit plus face à l’ampleur des dégâts territoriaux réalisés. Il est indispensable de combiner la protection et la restauration des continuités écologiques à l’échelle territoriale avec les solutions proposées dans le domaine de la culture. Le territoire doit être établi selon une unité écologique. Cela implique le fait que l’ensemble des systèmes développés par l’Homme intègre, à juste mesure, la Nature dans leurs procédés. Cela passe par les espaces de cultures comme détaillé plus haut dans ce rapport, mais également par les espaces urbanisés où la Nature doit s’affirmer et devenir majoritaire face aux infrastructures artificielles. Directement lié aux espaces de cultures mais aussi aux besoins vitaux de la population, le besoin en eau paraît essentiel et doit être géré selon cette nouvelle organisation. Le territoire de la Nouvelle Aquitaine possède de nombreuses 45

Outil essentiel à la politique européenne dans la préservation et le bon développement de la biodiversité. Les zones Natura 2000 sont instaurées sur le territoire à l’échelle Européenne. Ces zones disposent de chartes et de contrats permettant de garantir une bonne gestion et une conservation des sites en question selon des objectifs précis et spécifiques à chaque zone.

100


La mise en perspective des solutions d’adaptation

ressources et notamment des espaces de cultures assez développés, impliquant d’importants besoins en eau. Etant donné l’arrivée prématurée d’une montée des eaux proche de Lacanau d’ici quelques années, il semble intéressant de faire évoluer nos types et méthodes de cultures et ainsi nos ressources alimentaires consommées. Nous pourrions se servir de ce changement comme d’un avantage en exploitant la culture à l’eau de mer. En effet, ces zones étant laissées à l’état naturel, elles pourraient être utilisées pour de la culture maraichère réalisée grâce à des techniques naturelles et efficientes en utilisant la permaculture. Cela permettrait ainsi d’économiser le temps et les moyens appliqués à ces cultures. En conséquence, ce système pourrait offrir une résilience aux territoires habités se trouvant plus à l’intérieur des terres mais également servir de ressource alimentaire qualitative pour la population et de réserve biologique pour les animaux. De plus, les besoins en eau des espaces de cultures seraient naturellement satisfaits ; l’exploitation frénétique et incontrôlée des nappes phréatiques pourrait fortement diminuer. Cette solution engage une modification territoriale d’ampleur ainsi que celle du mode de vie. Une part non négligeable de la population sera contrainte de modifier son alimentation quotidienne et changer de travail pour permettre une adaptation réussie en tout point. De plus, ces solutions progressivement proposées doivent être appuyées par une nouvelle organisation territoriale régie par un fonctionnement novateur dans lequel chaque territoire devient finalement résilient et possède donc sa propre indépendance. Afin de retranscrire un fonctionnement tel que celui de l’écosystème naturel, chaque territoire doit nécessairement se composer de milliards d’interactions à petite échelle, formant ainsi une unité résiliente, résistante et soutenable lors de crises éventuelles (Figure 31.) Les interactions entre les êtres vivants et les caractéristiques de l’habitat Comme vu précédemment, certaines espèces volatiles s’adaptent par le biais d’une sélection naturelle et migrent pour se sédentariser en ville. Cette sélection implique une diminution d’espèces spécialistes au profit d’espèces généralistes plus opportunistes. Ces oiseaux, encore que peu acceptés par l’Homme au sein des villes, sont pourtant bénéfiques à nos milieux. Néanmoins, cette faune n’a pas besoin d’être acceptée par l’Homme pour tirer bénéfice des systèmes anthropiques. En effet, l’oiseau adapte son régime alimentaire et son habitat pour se nourrir

101


La mise en perspective des solutions d’adaptation

Figure 31. « Carte synthétique et schématique des solutions proposées concernant le gestion du territoire et de ses ressources » Réalisation personnelle, 2020.

102


La mise en perspective des solutions d’adaptation

et habiter en milieu urbain. Cela leur permet une économie de temps et d’énergie non négligeable pour un confort optimal. L’oiseau urbain, par son caractère opportuniste46 est extrêmement ingénieux. Il est capable de tirer profit d’environnements inconnus pour faciliter son adaptation. L’Homme doit nécessairement s’inspirer de ce caractère opportuniste. Nous avons des milieux naturels d’une richesse extrême que nous exploitons seulement pour y extraire et utiliser ses ressources mais ils possèdent bon nombre d’avantages que nous connaissons mais que nous ne prenons pas la peine d’utiliser. Il parait essentiel d’intégrer la Nature dans nos milieux urbanisés de façon drastique comme peut le traduire l’utopique « cité Jardin » de Luc Schuiten, le bâtiment « 25 verde » de Luciano Pia ou encore le groupe scolaire de Chartier d’Alix (Figure 32.). Ces 3 projets témoignent à des échelles différentes (la ville, l’immeuble et le mur) et à un stade de conception différent (architecture de papiers et architecture concrète), du caractère opportuniste qui est utilisé. Une surface rugueuse faite d’impuretés formelles, un immeuble envahi par la végétation ou une ville Nature : ces trois projets sont de véritables repères pour la biodiversité grâce à des formes et qualités similaires à la Nature. Ils témoignent des bienfaits et des qualités de la Nature combinés à l’architecture au service de la faune, la flore et l’Homme. Ces systèmes, véritables usines naturelles, offrent une multiplicité de qualités (isolation thermique, acoustique, confort visuel par l’adaptation de la végétation aux saisons, absorption du CO2², rafraichisseurs naturels, dynamiseur social, repère pour la faune et la flore, diminution des îlots de chaleur, diminution des inondations, etc...) tout en dépensant moins d’énergie et de temps. Comme observé chez l’oiseau, l’utilisation de matériaux naturels dans la confection de son nid est dominante mais il n’hésite pas à se servir dans des ressources parfois artificielles telles que des mégots de cigarettes, filets de pêche et autres déchets abandonnés par l’Homme. Ainsi l’Homme doit apprendre à tirer parti de la Nature comme dit précédemment mais également de ses ressources artificielles en valorisant au maximum le réemploi, le recyclage et la réutilisation dans l’architecture. Un potentiel non négligeable existe au travers de la déconstruction. L’opportunité et les potentiels existants à valoriser sont selon moi essentiels au développement d’un futur durable. Ainsi, je tiens à faire référence à mon travail de recherche de licence « La symbiose entre l’Homme et la Nature au travers de l’architecture » (consultable en ligne). Cette démarche révèle des échanges symbiotiques entre l’Homme et la Nature au travers de l’architecture. 46 Le caractère opportuniste est utilisé lorsque un être vivant se sert d’un outil afin de s’aider à accomplir une action. L’outil utilisé peut impliquer le développement de nombreuses qualités autre que l’accomplissement de l’action voulue.

103


La mise en perspective des solutions d’adaptation

Figure 32. « 1. Mur habité du groupe scolaire de Chartier d’Alix à Paris ; 2. Projet 25 verde de Luciano Pia à Turin (Réalisations personnelles d’après photos, 2020).

104


La mise en perspective des solutions d’adaptation

De plus, l’ architecture, tant pour l’Homme que pour l’oiseau, fait lien entre les êtres vivants et la Nature. Les méthodes de construction sont donc représentatives d’une culture, une civilisation ou une espèce spécifique. Ainsi, les méthodes de constructions développées sont décisives du lien existant avec la Nature. Le système de construction défini par nos sociétés occidentales reste à l’heure actuelle le béton. Il offre de multiples potentialités tant dans l’échelle de construction, la liberté des formes que dans l’optimisation de sa mise en œuvre. Cependant, elle reste profondément déconnectée des techniques de construction de l’oiseau où chaque composante de son habitat est assemblée par luimême, imposant des échelles d’habitats plus restreintes mais offrant une liberté dans sa démontabilité et son adaptabilité. Cette méthode de construction paraît bien moins impactante et plus intégrée à son environnement. Elle est à l’échelle de l’être qui l’habite et plus adaptée aux évolutions du climat et de son environnement. Ces notions développées dans l’habitat de l’oiseau ont été progressivement oubliées par l’Homme suite à l’avènement du béton, propulsant ainsi l’habitat à une échelle qui n’est plus adaptée et non représentative de l’être humain. Ainsi, il semble important de reconduire nos méthodes de construction vers des bases originelles telles que la maçonnerie où l’habitat est construit « pièce par pièce » dans lequel «c’est la main de l’homme qui assemble avec soin » (Kuma, 2020) créant ainsi un lien massif entre l’Homme et la Nature. La maçonnerie, par ses irrégularités dans sa forme et sa diversité de mise en oeuvre, peut également devenir un potentiel repère à biodiversité. L’agriculture est, encore une fois, un aspect qui doit assurément évoluer comme suggéré plus haut. Dans nos milieux urbains, ces évolutions doivent se matérialiser par le déploiement de cultures urbaines à l’échelle de la ville. Afin de s’accorder aux environnements urbains, ces évolutions prendraient la forme de cultures verticales et horizontales, le long de nos bâtiments et sur leurs toits. Il paraît indispensable d’utiliser ces espaces vides comme potentialités. Ainsi, ces principes permettraient de produire des quantités accrues de nourritures locales au sein des milieux urbains tout en enveloppant nos bâtiments et nos environnements urbains d’une Nature aux nombreuses qualités comme explicité ci-dessus. En effet, cet exemple est symbolique. Par l’installation de cultures sur les façades de nos bâtiments, on produirait une ressource alimentaire en quantité tout en améliorant le confort en milieu urbain. De plus, cela permettrait la réduction des besoins énergétiques du bâti, la création d’un biotope agréable, augmentant ainsi la présence et la diversité de faunes et de flores et, en particulier, celle des insectes pollinisateurs aujourd’hui en diminution constante et pourtant essentiels pour l’Homme et de nombreux aliments que nous mangeons quotidiennement. De plus, l’augmentation de la végétation et des espaces de culture mèneraient subitement à une valorisation sociale des habitants où de nouvelles

105


La mise en perspective des solutions d’adaptation

démarches, entreprises et postes de travail se développeraient de façon exponentielle autour de ces notions. Ce sont des démarches qui peuvent nous reconnecter à nos valeurs intrinsèques tout en étant de véritables incubateurs d’activités durables pour notre futur. De nouvelles manières de vivre ensemble se dévoileraient sous ces principes, favorisant la coopération face à la compétition. Dans un second temps, comme dit précédemment, on observe un faible engagement de la part de l’Homme dans ses interactions avec les oiseaux. Cependant, cet engagement évolue progressivement, en particulier dans les territoires urbains. De nombreux volatiles sont assistés par l’Homme grâce à la présence de nids artificiels créés par l’Homme, invitant ainsi l’oiseau dans ses jardins et parcs grâce à des « cocons » agréables et sécurisant pour l’oiseau. Ces nids, aujourd’hui de plus en plus évolués, permettent à l’oiseau de s’accommoder à la ville. Des architectes, soucieux du bien-être environnemental à toutes échelles, s’engagent à construire des habitats ingénieux pour l’oiseau grâce à des isolations spécifiques, des entrées de lumière adaptées et des matériaux recyclés ou naturels. Des premiers concours et projets d’Architectes voient le jour et proposent de nouveaux paradigmes quant à l’attention portée à la Nature en ville (Figure 33.). Ces projets sont la preuve d’une véritable sensibilisation à l’importance des systèmes naturels et permettent de regrouper des personnalités engagées et engageantes (Kengo Kuma par exemple). C’est une manière originale d’interroger architectes et penseurs sur la place de l’oiseau, de la Nature et de la biodiversité en ville. D’autres architectes ont fait le choix de s’impliquer entièrement dans cette cause. C’est le cas de Samuel Gerber qui a fait du nichoir sa passion. (Figure 34.) Ce sont véritablement des nids bioclimatiques, offrant un confort optimal au quotidien face au changement climatique. Cette intervention n’est pas exclusivement réservée à l’oiseau car de nombreux insectes volants sont aujourd’hui accompagnés face aux difficultés environnementales. C’est grâce à ces « hôtels à insecte » et autres dispositifs que ceux-ci peuvent perdurer dans nos milieux urbains et ainsi apporter un avantage non négligeable au développement de notre Nature urbaine. Mais toute la question réside dans notre niveau d’interaction avec ces êtres vivants. Ces solutions sont-elles vraiment viables ou sont-elles simplement des ajustements ? C’est au travers de ces interrogations que l’utopie d’une ville aux interactions nouvelles entre Homme et Nature doit naître. Il est nécessaire de proposer des solutions prospectives pour aller encore plus loin que les solutions développées par l’un et l’autre afin d’engager de nouveaux paradigmes, source de soutenabilité et d’un futur durable. C’est avant tout par la sensibilisation, la conception mais aussi la coopération que ces actions peuvent aboutir à des évolutions drastiques dans nos villes.

106


Adaptations et ajustements face au changement climatique

Figure 33. « Photo du nichoir de Marion Normand sur le mur de l’ENSAR »

Projet de nichoir réalisé par une élève à l’occasion du concours «Muz Yer» àl’ENSA de Rennes. (Le Morvan, 2020)

Figure 34. « Photo de Samuel Gerber exposant son Nid bioclimatique » Photo de l’Architecte Samuel Gerber, reconverti dans la création d’habitats pour volatiles. , Samuel Gerber, 2020.

107


La mise en perspective des solutions d’adaptation

La coopération face à la compétition Constamment régulé et organisé par des codes rigoureux et des rôles dans lesquels chacun acquiert plus ou moins de pouvoir, notre système sociétal, dans sa globalité, se retrouve plus que jamais divisé. Au travers de l’exemple de l’oiseau dans ces conditions dites « naturelles », la coopération est une spécificité développée acquise chez l’ensemble des animaux. Elle n’est pas toujours positive mais permet d’établir un équilibre (Friedman, 1976) au sein de l’écosystème pour assurer son bon fonctionnement. Ainsi, la coopération peut devenir une solution dans les interactions entre le peuple et les acteurs du territoire. Aujourd’hui, nos rôles sont trop fortement disloqués et sources de disparité et d’une « perte d’équilibre » (Ibid.) au sein de nos systèmes. Une des politiques capable de rétablir une cohésion et une bonne compréhension de nos systèmes est l’auto planification ou la planification de l’espace par tous et pour tous et, plus généralement, la démocratie participative à l’échelle de nos systèmes. Cette politique, déployée depuis quelques années, témoigne de réussites en tout point qu’il est nécessaire de promouvoir. Cependant, comme dit précédemment, cette coopération ne doit pas se limiter aux interactions entre les hommes. Elle doit également s’établir entre les Hommes et la Nature. La compétition est l’un des principaux moteurs de nos sociétés capitalistes. Afin d’enrayer cette évolution construite sur la croissance, cela semble crucial de s’allier autour de causes communes telles que le changement climatique et la protection environnementale. Nous ne pourrons jamais arriver à une forme d’égalité impartiale dans nos sociétés mais l’équité envers certaines causes doit être primordiale pour espérer pouvoir s’en sortir. Chacun peut apporter sa pierre à l’édifice, peut engager des actions dans la continuité ou en collaboration avec d’autres individus pour faire évoluer cette situation. Il est fondamental de faire évoluer les mentalités au sujet de ces problématiques qui nous touchent tous. Le premier pas pour cela peut être réalisé grâce à l’une de nos facultés intrinsèques : la culture menant à la transmission d’informations et l’éducation.

108


La mise en perspective des solutions d’adaptation

La transmission, l’éducation et la connaissance En tant qu’êtres naturels et instinctifs, les animaux sont dotés d’une adaptation incontestable par rapport à l’Homme. Cette capacité, dévoilée dès le début de mon travail, est centrale dans la recherche d’un futur soutenable. L’oiseau, comme le reste des animaux, a une capacité intrinsèque transmise par la Nature comme en témoigne leurs comportements au quotidien. Ils sont connectés à celle-ci et ne peuvent s’en détacher. Cette aptitude, non délayée par la culture, lui permet de s’assister par des systèmes naturels dans sa survie tout en les accompagnant dans un développement favorable. Ainsi, ces actions acquises intrinsèquement sont positivement impactantes pour le sujet et le milieu, l’adaptation est donc réussie. L’Homme, encore trop éloigné de cette voie, n’arrive que trop rarement à mettre en œuvre des actions positivement impactantes pour le sujet et le milieu. Cependant, ces capacités et compétences présentes chez les animaux sont le résultat de millions, et parfois même de milliards d’années d’évolution. Malheureusement, en tant qu’être non fini, l’Homme n’a jamais pu acquérir naturellement ces capacités. Ainsi, il est essentiel qu’il puisse se développer grâce à la culture. Ce dialogue, interactions et recherches entre Hommes et animal, sont essentiels pour connaître, assimiler et comprendre leur fonctionnement. Ce travail de recherche sur l’adaptation de l’Homme et de l’oiseau face au changement climatique est un recueil à ce sujet. Sur la base du modèle de réflexion et de développement des animaux, nous devrions développer, dès le plus jeune âge, un apprentissage inspiré des modèles déjà présents tels que « La fresque du climat » permettant ainsi la transmission de valeurs progressivement effacées chez l’Homme : une école de la vie resserrant ainsi les liens entre l’Homme et son milieu naturel autour d’une pédagogie novatrice. Cette pédagogie devra se construire autour de notions fondamentales à cette approche telles que la pratique, l’expérience, le partage et la découverte. Ces modes d’apprentissage permettraient ainsi de construire une population consciente des difficultés environnementales actuelles, prête et destinée à vivre en harmonie avec nos milieux naturels et bien plus à même de trouver des solutions de grandes ampleurs. Grâce à nos capacités intrinsèques, nous avons la possibilité de transmettre ces connaissances à tous et partout, c’est pourquoi il semble essentiel de dépasser les actions marginales effectuées afin de développer des réponses multiples et diverses à toutes échelles. Cette recherche de solutions « adaptatives » doit finalement devenir une « facette » de l’Homme, lié et indéracinable comme elle peut l’être intrinsèquement avec l’oiseau.

109


La mise en perspective des solutions d’adaptation

Critères

Solutions proposées suite à la mise en perspective des cas étudiés Mise en place d’une relocalisation des habitats à risque, création de zones résilientes où de nouvelles activités non impactantes pour la Nature peuvent être mises en place

Réorganisation du territoire par la restructuration des espaces de culture favorisant le développement de continuité écologique à toutes les échelles. Développement de zones méthodes de culture alternatives afin de favoriser une culture diversifiée, gage de résistance, de production naturelle, d’une baisse des moyens, d’énergie et ressources dans leur fonctionnement et d’un retour en tant que zone naturelle viable pour la biodiversité. Mise en valeur des zones à risque par l’installation de nouvelles activités non impactante pour la Nature et gage de résilience. Conservation du parc immobilier existant ne se trouvant pas en zone à risque. Création d’un plan de gestion de l’implantation du parc immobilier en prenant en compte les prévisions des évolutions futures des territoires sur plusieurs décénnies. Diminution progressive des constructions en milieu naturel impliquant la destruction d’un quelconque système naturel et progression d’une volonté de s’intégrer à l’environnement afin d’assurer son bon développement. Développement d’une volonté de faire évoluer et non pas détruire pour reconstruire. Modification des caractéristiques techniques des habitations afin de les adapter aux besoins et changements. Insertion et développement de systèmes naturels en lien avec notre architecture comme atout dans notre adaptation Adaptation de l’architecture afin de favoriser l’installation d’une faune et d’une flore au sein Apparition et développement d’une prise de conscience afin de mieux considérer les opportunités existantes à échanger et s’appuyer sur les systèmes naturels afin de simplifier notre adaptation au changement Transmission d’informations et le partage d’informations dès le plus jeune âge afin de concevoir des générations « intrinsèquement » consciente des erreurs commises et des solutions à mettre en œuvre pour essayer de rétablir un futur soutenable. Développement d’une coopération, d’une participation active et d’une hiérarchisation des besoins et actions afin de favoriser un équilibre et un partage entre les hommes. Mise en place d’une démarche d’assistance de l’Homme et la Nature avec une volonté symbiotique

Mobilités

Gestion des ressources et du territoire Caractéristiques de l’habitat

Implantation de l’habitat Interactions sociales

*Nombre d’adaptations réussites / Nombre de solutions proposées (Adaptation ou ajustement)

Figure 35. « Tableau récapitulatif des solutions déduites par la mise en perspective des solutions d’adaptation au changement climatique développées par l’Homme et l’Oiseau » (Réalisation personnelle, 2020).

110


La mise en perspective des solutions d’adaptation

3.

Les perspectives d’avenir

L’écologie du sensible et du vivant

3.2

« Nous vivons au milieu d’elle et nous lui sommes étrangers. » (Tobler, 1948). L’indifférence envers notre milieu n’a jamais été si intense chez certaines personnes. Et pourtant, une minorité, bientôt une majorité je l’espère, souhaite que ce sentiment envers notre milieu évolue positivement. Cette volonté induit dans un premier temps, la mise en place d’actions. Celles-ci restent encore bien souvent au stade du papier. Cependant, elles ont la capacité de remettre en question l’idéologie d’une personne, modifier son paradigme, d’instruire et de faire rêver tous ceux qui en prennent connaissance. C’est le cas du concept d’ « écologie sensible » ou « écologie du vivant ». Né il y a seulement quelques années, il se démocratise au sein de la population par sa justesse scientifique, sa poésie engagée sur l’avenir souhaité pour notre planète et la remise en question drastique des modèles actuels. Ce concept est sorti de terre grâce à deux auteurs ayant écrit deux essais différents dans leurs formes mais similaires sur le fond : Jacques Tassin, auteur et chercheur en écologie végétale « Pour une écologie du sensible » et Pierre Jouventin, éthologue « Pour une écologie du vivant ». Les constats décrits dans ces essais montrent la difficulté qu’à l’Homme à se mobiliser autour de valeurs naturelles, sensibles et responsables. Dans un monde où tout nous pousse à la consommation, à l’extravagance et où beaucoup rêvent d’une richesse monétaire, il est complexe de réaliser que la véritable richesse est en nous et autour de nous, dans le vivant. Une société ne peut pas fonctionner durablement et en accord avec son milieu naturel lorsque celle-ci pense à s’enrichir davantage en tuant les arbres, les animaux et en extrayant les minerais de terre plutôt qu’en laissant la terre elle-même garder ses propres richesses que nous lui volons. Ce concept, peut-être trop lyrique, sensible et idyllique parait pourtant bien réel. Toute la difficulté reste dans l’application d’actions engageantes à ce sujet. Ces paroles sont des voies qui permettent de prendre entière connaissance de notre dimension humaine et sensible dans ce rapport à la Nature, permettant le fondement « d’une écologie différente » (Tassin, 2020). Cette dimension reste encore aujourd’hui biaisée par le surplus d’informations et leurs natures fallacieuses ou fausses. Le point de départ est donc la remise en question des concepts dans lesquels nous avons été bercés toute notre vie, de la société en croissance constante jusqu’à la définition scientifique même de l’écologie. C’est suite à cette remise en question que « tout le reste découlera » (Ibid.). Redéfinir et comprendre l’écologie est donc indispensable

111


La mise en perspective des solutions d’adaptation

pour avancer. Aujourd’hui très loin de ces fondements, l’écologie est devenue « un objet de science » (Ibid.) transmettant une « vision mécaniste du vivant ». Cette profonde erreur qui a été de faire de ce concept une science a, une fois de plus, inconsciemment déconnecté l’Homme de son vivant. Cette écologie du sensible peut être une clé vers de nouvelles voies prospectives et c’est au travers de ces valeurs que ce travail de recherche s’est construit. Cette écologie, propre à l’humain et pourtant sensible, permet de replacer l’Homme a sa juste valeur au sein de la Terre où le paradoxe de l’Homme fragile et de la Nature puissante reprend place. La Nature est notre fondement, elle est la base de compréhension de nos systèmes, c’est pourquoi son analyse ne peut qu’être bénéfique et c’est au travers d’elle que nous trouverons toutes solutions. Si cette prise de conscience pouvait être généralisée, nos rapports aux vivants seraient profondément bouleversés. La Nature serait pour tous synonyme de solutions et sa destruction n’aurait plus d’intérêt. Nous sommes encore loin d’une telle situation et je ne pense pas que cela arrivera prochainement. Cette réflexion nous mène dès aujourd’hui à développer des solutions prospectives, gage de durabilité, proposant de façon poétique de tourner progressivement la page pour en écrire une nouvelle.

112


Conclusion et regard critique

UN AVENIR DÉSIRABLE, DES AMBITIONS RÉALISABLES À partir des constats pessimistes établis au sujet du changement climatique actuel et de l’« ajustement » réalisé par nos sociétés, une vision pessimiste de notre futur se dessine. L’élévation de la température, la fonte des glaces, la hausse du niveau des océans, l’augmentation des catastrophes naturelles et des crises sanitaires en intensité et en fréquence ainsi que toutes les conséquences moins visibles mais tout autant impactantes sur les êtres vivants, font du changement climatique la première problématique de notre siècle. Ces premiers constats font naître chez l’Homme des prises de conscience parfois engagées. Depuis quelques années, la dégradation des populations volatiles induit une prise en considération de l’environnement par l’Homme de plus en plus marquée. La Nature, symbolisée dans cette étude par l’oiseau, est un exemple révélateur de solutions et de réponses durables. En effet, nous avons pu observer des modifications comportementales réalisées par l’oiseau sans négliger ses valeurs intrinsèques témoignant d’une adaptation réussit en tout point. Grâce à ses méthodes d’adaptation ingénieuses et révélatrices de soutenabilité, l’oiseau devient un atout majeur pour l’Homme dans son adaptation si son cas est étudié et considéré à sa juste valeur. Ce travail de recherche a pour but de souligner cette considération naissante portée à ces volatiles et montre à quel point il est essentiel pour l’Homme d’observer et de s’inspirer de leurs modèles comportementaux. Cette recherche s’est édifiée au travers de ce constat afin d’observer l’existence d’échanges et de possibles interactions entre l’oiseau et l’Homme dans leur adaptation au changement climatique. Par le biais de leur étude et par leur mise en perspective, nous pouvons confirmer l’existence d’échanges entre l’Homme et l’oiseau. Ils se dévoilent au travers de leurs comportements adaptatifs au changement climatique, parfois similaires ou opposés. Ces échanges sont bénéfiques pour l’Homme comme pour l’oiseau et se développent à double sens. Certains existent déjà tandis que d’autres peuvent se créer par l’application des solutions prospectives énoncées dans la troisième grande partie. Cependant, à l’heure actuelle, les solutions adaptatives présentes sont généralement théorisées mais peu mises en œuvre. Ils se manifestent sur les deux échelles d’études traitées (locale et territoriale), dans chacun des critères étudiés, tant dans l’intensité

113


Conclusion et regard critique

que dans la réaction réciproque de l’Homme et de l’oiseau. On peut les observer lorsque l’Homme prend exemple sur les solutions développées par l’oiseau, notamment dans leurs mobilités face aux territoires à risques. De plus, sur le territoire Aquitain, l’Homme commence à s’inspirer et à s’appuyer sur les systèmes naturels pour concevoir son habitat en termes d’implantation, de gestion, de caractéristiques physiques et de mise en œuvre. D’autre part, l’Homme, grâce à ses aptitudes intrinsèques, a la capacité d’aider l’oiseau dans son adaptation. A l’échelle de la NouvelleAquitaine, cette assistance s’enrichit aujourd’hui grâce au développement d’espaces protégés, d’une agriculture responsable et diversifiée et de zones d’accueils et d’habitats dans les territoires urbanisés. Cependant, l’oiseau, grâce à son caractère opportuniste vient de lui-même tirer bénéfice des infrastructures et des ressources artificielles existantes, particulièrement en ville. Toutefois, l’Homme tend à s’impliquer davantage et initie de premiers échanges symbiotiques avec les oiseaux et la Nature sur son territoire. Cette assistance portée aux oiseaux se matérialise à toutes les échelles, créant ainsi des repères à biodiversité, du territoire jusqu’au détail architectural. Ces premières interactions nous amènent aujourd’hui à reconsidérer le modèle de nos espaces urbains. Le développement de systèmes naturels et autosuffisants dans l’ensemble de ces échelles paraît être une opportunité extrêmement intéressante et avantageuse pour les besoins de l’Homme et de la Nature. Lors de cette recherche, l’étude du territoire Aquitain a été un cas riche de sens par ses actions déjà entreprises. Il est un référentiel à suivre concernant la recherche de solutions d’adaptations futures, tant par sa richesse en terme de biodiversité que par les solutions proposées. Grâce à ces qualités et aux acteurs déjà mobilisés dans cette recherche, il joue le rôle de territoire d’expérimentation. Construite autour du changement climatique, cette étude met en évidence le manque de connexion entre l’Homme et son environnement. Le regard porté sur nos systèmes naturels et en particulier celui de l’oiseau, peut déclencher une réorganisation de nos modes de vie vers des valeurs intrinsèques plus sensibles et naturelles comme le présente la notion d’écologie du sensible et du vivant. Une des premières solutions envisageables réside dans l’éducation et la prise en compte des systèmes naturels dès le plus jeune âge. Cette implication juvénile favoriserait la coopération entre êtres vivants et impliquerait la remise en cause du modèle actuel contribuant à une plus grande responsabilisation : « Nous sommes des chenilles qui doivent devenir papillons pour survivre : puisque notre société n’a pas d’avenir en continuant sur sa lancée, il nous faut muer » Edgar Morin, Le paradigme perdu.

114


Conclusion et regard critique

Ce travail, quelque peu optimiste, a pour objectif de remettre en cause les modèles actuels. Il permet ainsi la transgression des règles classiques et contraignantes par lesquelles nous sommes constamment dirigés et éduqués. Au travers de cette transgression, c’est l’exhibition de nouvelles approches sensibles, imaginatives et sublimes qui se dévoilent. Celles-ci offrent la conception de nouvelles utopies, de rêves fantasmagoriques, imaginés et fabriqués, sources d’inspiration pour notre futur, comme le montrent Yona FRIEDMAN au travers de ses « Utopies réalisables », SUPERSTUDIO par le biais de son « ARCHITOPIE » ou encore Luc SCHUITEN avec « Les fabuleuses cités végétales ». Cette étude, entre « utopie chimérique » et « utopie rigoureuse », touche à l’imaginaire sans pour autant sortir des cadres actuels, précis et empiriques auxquels nous sommes confrontés. L’utopie, de mon point de vue, est un outil essentiel à nos sociétés. Concept idéal permettant d’en dénoncer ses fondements. Ce changement, ou plus précisément cette révolution, ne peut pas se concrétiser dans un laps de temps réduit. Il faudra attendre de nombreuses années avant de pouvoir observer des premiers résultats visibles et concrets. Ils ne prendront effet que par l’application d’une décroissance et la réorganisation de nos territoires, nos habitats, nos modes de vie et également par un regard différent sur la relation de l’Homme et la Nature. Enfin, il reste néanmoins essentiel de développer des solutions adaptatives et réalisables sur de petites échelles afin de limiter les bouleversements climatiques actuels. La question de « l’équilibre » entre nos systèmes, tel qu’il est appliqué dans la Nature, réside dans la durée et l’intensité avec lesquelles nous réussirons à le rétablir. Serons-nous capables d’enrayer ce changement climatique par le rétablissement de cet équilibre ? Quelle part des êtres vivants sera-t-elle capable de s’adapter à ces bouleversements ? La question reste entière et ne peut être résolue sans volonté, sensibilisation, expérimentations et avant tout une pointe d’utopie.

115


Bibliographie

BIBLIOGRAPHIE -

ACOT P, 2003, « Histoire du climat », Paris, Edition Perrin, 448 pages.

-

ACKERMAN J, 2017, « Le génie des oiseaux : Prendre exemple sur leurs exceptionnelles capacités », Hachette édition, 457 pages.

-

ARCHAUX. F, 2003 « Birds and climate change : Avifaune et changement climatique », Vie et milieu, Volume 53, Issue 1, pp. 33-41.

-

BARBER. I, 2013, « The evolutionary ecology of nest construction: insight from recent fish studies », Avian Biology Research, Google Scholar, pp. 83–98.

-

BARRAU. A, 2020 « Le plus grand défi de l’histoire de l’humanité » face à la catastrophe écologique et sociale, Michel Lafont édition, 211 pages.

-

BATES. D, 2005, « Human Adaptive Strategies: Ecology, Culture, and Politic », Pearson Education, 238 pages.

-

BERGERON. R, 1999, « Pour une spiritualité du troisième millénaire », Religiologiques, pp. 231-247.

-

BERNARD. C, 1878, « Principes de médecine expérimentale », Presses universitaires de France, 243 pages.

-

BERTIN. X, 2017, « Storm-induced marine flooding: Lessons from a multidisciplinary approach », Earth-Science Reviews, Volume 165, pp. 151-184.

-

BESANCENOT. J-P, 2002, « Vagues de chaleur et mortalité dans les grandes agglomérations urbaines », Environnement, risques et santé, Équipe de recherche Climat et santé, pp. 229-240.

-

BLONDEL. J; DESMET. J-F; MARIS. V, 2018, « Des oiseaux et des Hommes, fonctions écologiques et services écosystémiques », édition Quae, 164 pages.

-

BLONDEL. J, 2019, « Comment les oiseaux s’adaptent-ils à un climat qui change ? », [en ligne], . [consulté le 08 décembre 2019], Encyclopédie de l’environnement. Disponible sur https://www.encyclopedie-environnement.org/vivant/commentoiseaux-sadaptent-climat-qui-change/

-

BONNET. F, 2016, « Atout risques, Des territoires exposés se réinventent », Edition Parenthèse, 176 pages.

-

BORREL.

P,

2014,

«

L’urgence

116

de

ralentir

»,

Arte,

Film,

84mn.


Bibliographie

-

CHARMENTIER. A; McCLEERY. R; COLE. L; PERRINS. C; KRUUK. L; SHELDON. B, 2008, « Adaptive phenotypic plasticity in response to climate change in a wild bird population », Science 320, pp. 800-803.

-

CGDD (Commissariat Géneral au Développement Durable), 2018, « Biodiversité, les chiffres-clefs – Edition 2018 », Ministère de la transition écologique et solidaire, [en ligne], [consulté le 22 fevrier 2020], Ministère de la transition écologique et solidaire. Disponible sur https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/biodiversite-leschiffres-cles-edition-2018

-

CGDD (Commissariat Géneral au Développement Durable), 2020, La biodiversité sous pression [en ligne], [consulté le 22 fevrier 2020], Ministère de la transition écologique et solidaire. Disponible sur https://www.vie-publique.fr/parole-dexpert/272596-quelest-letat-de-la-biodiversite-en-france-les-principales-menace

-

CHAVES-CAMPO. J, 2011, « Elevational movement of large frugivorous birds and temporal variation in abundance of fruit along an elevational gradient », Ornitologia Neotropical 15, pp. 433-435.

-

CLAVEL. J; JULLIARD. R; DEVICTOR. V, 2011, « World-wide decline of specialist species : toward a global functional homogenization ? », Frontiers in Ecology and the Environment, Issue 9(4), pp. 222-228.

-

CLERGEAU. P; SAUVAGE. A; LEMOINE. A; MARCHAND. J-P; DUBS. F; MENNECHEZ. G, 1997, « Quels oiseaux dans la ville ? Une étude pluridisciplinaire d’un même gradient urbain », [en ligne], [Consulté le 19 août 2020], Persée. Disponible sur https://www. persee.fr/doc/aru_0180-930x_1997_num_74_1_3127

-

COLLIAS. N, 1964, «The evolution of nests and nest-building in birds », Department of Zoology, pp. 175-190.

-

COLLIAS. N; COLLIAS. E, 1984, « Nest building and bird behaviour », Princeton Univ. Press, pp. 101-119.

-

COMITÉ SCIENTIFIQUE RÉGIONAL ACCLIMATERRA, 2018, « Anticiper les changements climatiques en Nouvelle-aquitaine. Pour agir dans les territoires », [en ligne], [consulté du 15 mai au 28 novembre 2020], Editions Région Nouvelle-Aquitaine, 488 pages. Disponible sur http://www.acclimaterra.fr/uploads/2018/05/RapportAcclimaTerra.pdf

-

CORBOZ. A, 2001, « Le territoire comme palimpseste », édition brochée, 288 pages.

-

CROSSMAN. C; MARTIN. P; ROHWER. V, 2011, « Variation in the structure of bird nests between northern Manitoba and south-eastern Ontario », Google Scholar, 10 pages.

117


Bibliographie

-

DARDOT. P; LAVAL. C, « La nouvelle raison du monde, essai sur la société néolibérale », édition La découverte, n°325 collections sciences humaines et sociales, août 2010, pp. 384-402.

-

DEEMING. D; MAINWARING. M; HARTLEY. I; REYNOLDS. S, 2012, « Local temperature and not latitude determines the design of Blue tit and Great tit nests », Google Scholar, pp. 203-208.

-

DERIVE. G, 2015, « Le climat, c’est le grand défi de l’humanité », [en ligne], [consulté le 15 mars 2020], Série d’interviews, Le point.fr. Disponible sur https://www.lepoint. fr/invites-du-point/gael_derive/gael-derive-le-climat-c-est-le-grand-defi-de-l-humani te-11-09-2015-1963824_2632.php#

-

DESCARTES. R, 1646, « la lettre au Marquis de Newcastle », Œuvres et lettres. La Pléiade, pp. 1254-1257.

-

DIAMOND. J, 2005, « Collapse: How Societies Choose to Fail or Succeed », New York, Viking, 592 pages.

-

DION. C; LAURENT. L , 2015, « Demain », DVD, France, Mars Films, 1h 58mn, couleur.

-

ELDMAN. S; KOLODNY. O; LOTEM. A; NOTES. A, 2015, « Evolved to adapt, A computational approach to Animal innovation and creativity», Current Zoology, Volume 61, Issue 2, pp. 350-368.

-

EM GREENFACTS, 2005, « Consensus scientifique sur la dégradation des écosystèmes », [en ligne], [consulté le 28 fevrier 2020]. GreenFacts. Disponible sur https://www. greenfacts.org/fr/ecosystemes/ecosystemes-greenfacts.pdf.

-

FITCHE. J, 1998, « Fondement du droit naturel, selon les principes de la doctrine de la science », Quadrige, Press Universitaires de France, 424 pages.

-

FRIEDMAN. Y, 1976, « Comment habiter la terre », L’éclat poche, 128 pages.

-

FÜSSEL. H, 2007, « Adaptation planning for climate change: concepts, assessment approaches and key lessons », Sustainability Science, 2, pp. 265-275.

-

GAÜZERE. P, 2016, « Réponses de l’avifaune commune au changement climatique : naviguer entre les échelles pour mieux identifier leurs déterminants et leurs conséquences », directeur de thèse Devictor, Vincent, Université de Montpellier, Montpellier, 282 pages.

-

GEOCONFLUENCE, 2017, « Changement environnemental global, changements globaux », [en ligne], [consulté le 17 mars 2020], Geoconfluence,. Disponible sur http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/changements-globaux

118


Bibliographie

-

GIP Littoral Aquitain, 2018, « Les stratégies de la gestion côtières sur le littoral Aquitain », [en ligne], [consulté le 08 octobre 2020], Littoral Aquitain. Disponible sur https://www.giplittoral.fr/sites/default/files/upload/pdf/risques/gip-littoral_erosioncotiere.pdf

-

GREEN. R, 1995, « Diagnosing causes of bird population declines », Ibis 137, pp. 47-55.

-

HANSELL. M, 2000, « Bird Nests and Construction Behaviour », Cambridge, 273 pages.

-

HOFFMAN. A, 2008, « Climate change and evolutionary adaptation », Nature, Volume 470, Issue 7335, pp. 479-485.

-

INGENHOVEN. C, 2015, « Architecture et nature : une union durable », [en ligne], [consulté le 15 mai 2020], ARTE. Disponible sur https://bio.construction/ARTEArchitecture-et-nature-une-union-durable.html

-

IPCC, 2007, « Climate Change 2007: Impacts, Adaptation and Vulnerability. Contribution of Working Group II to the Fourth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change », [en ligne], [consulté le 10 mars 2020], Cambridge University Press. Disponible sur https://cutt.ly/ehdlelY

-

JOUVENTIN. P; LATOUCHE. S; PAQUOT. T, 2019, « Pour une écologie du vivant, regards croisés sur l’effondrement en cours », Libre & Solidaire édition, 163 pages.

-

KUMA.K, 2020, « L’architecture naturelle », arléa edition, 200 pages.

-

KERN. M; VAN RIPER. C, 1984, « Altitudinal variations in nests of the Hawaiian Honeycreeper Hemignathus virens virens », The Condor, Volume 86, Issue 4, pp. 443– 454.

-

KI-ZERBO. J; BEAUD-GAMBIER. M-J, 1992, « Compagnons du soleil, Anthologie des grands textes de l’humanité sur les rapports entre l’Homme et la nature », Paris, la Découverte, UNESCO, 682 pages.

-

LAVOREL. S; LEBRETON. J-D; LE MAHO. Y et al., 2017, « Les mécanismes d’adaptation de la biodiversité aux changements climatiques et leurs limites », Institut de France, Académie des sciences, 157 pages.

-

LE DREF. G, 2009, « L’Homme face à l’évolutionnisme : un Animal paradoxal », [en ligne], [consulté le 17 mai 2020], Le Portique. Disponible sur https://journals. openedition.org/leportique/2451

-

LENOIR. J; SVENNING. J-C, 2015, « Climate-related range shifts - a global multidimensional synthesis and new research directions », Ecography, Issue 38(1), pp. 15-28.

119


Bibliographie

-

LOREAU. M, 2010, « From Populations to Ecosystems: Theoretical Foundations for a New Ecological Synthesis », Princeton University Press, 328 pages.

-

LEADLEY. P; PERIERA. H; PROENÇA. V; ALKEMADE. R, 2010, « Scenario for Global Biodiversity in the 21st Century » [en ligne], [consulté le 22 novembre 2020], Sciencexpress, Review, 19 pages. Disponible sur https://www.researchgate.net/ publication/224852326_Scenarios_for_Global_Biodiversity_in_the_21st_Century

-

MANON. S, 2008, « La double imperfection : rançon de l’intelligence », PhiloLog, [en ligne], [consulté le 12 fevrier 2020], Sciencexpress, Review, 19 pages. Disponible sur https://www.philolog.fr/la-double-imperfectionrancon-de-lintelligence-bergson/

-

MAINWARING. M, 2015, « Nest, Eggs and incubation, Nest construction and incubation in a changing climate », Oxford University Press 2015, Chapitre 6, pp. 65-74.

-

MAINWARING. M; HARTLEY. I; LAMBRECHTS. M; DEEMINGS. C, 2014, «The design and function of birds nests», [en ligne], [consulté le 18 fevrier 2020] , Ecol Evol, Série 4(20), pp. 3909–3928. Disponible sur https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/ ece3.1054

-

MAINWARING. M; HARTLEY. I; DEEMINGS. C; JONES. C, 2014, «Adaptive latitudinal variation in Common Blackbird Turdus merula nest characteristics», [en ligne], [consulté du 10 fevrier au 17 novembre 2020], Ecol Evol, Série 4(6), pp. 841-851. Disponible sur https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1002/ece3.952

-

MAINWARING. M; HARTLEY. I, 2012, « Causes and consequences of differential growth in birds: a behavioral perspective », [en ligne], [consulté le 10 fevrier 2020] Google Scholar, pp. 225–277. Disponible sur https://www.sciencedirect.com/science/ article/pii/B978012394288300006X?via%3Dihub MALHER. F; MAGNE. J-F, 2010, « L’urbanité des oiseaux », [en ligne], [consulté le 11 fevrier 2020], Ethnologie française, Volume 40, pp. 657-667. Disponible sur https:// www.cairn.info/revue-ethnologie-francaise-2010-4-page-657.htm

-

MALTHUS. T, 1798, « L’essai, Principe des populations, Le développement futur de la société », Éditions Gonthier, 236 pages.

-

MATHOS VIEIRA MACHADO. U; PERAKI. E; PERRON. A, 2014, « Utopies d’architectes du rêve à la réalité », [en ligne], [consulté le 24 octobre 2020], ENSA de Paris Belleville, sous la direction de Philippe Villie, 18 pages. Disponible sur http://th3.fr/ imagesThemes/docs/Utopies_d_architectes_du_reve_a_la_realite.pdf

-

MOUNIER. E, 1974, « Traité du caractère », Anthologie, Edition du Seuil, 380 pages.

-

MORAN. E, 2000, « Human Adaptability », Boulder, Westview Press, pp. 389-392

120


Bibliographie

-

OLDEN. D, 2006, « Biotic homogenization: a new re-search agenda for conservation biogeography », Journal of Biogeography, Issue 33, pp. 2027-2039.

-

ORLOVE. B, 2005, « Human adaptation to climate change: a review of three historical cases and some general perspectives », Environmental Science & Policy, Volum 8, pp. 589-600.

-

PAUL-DESSE. R al., 2017, « Introduction. Adapter les territoires aux changements climatiques : transition urbanistique et aménagement de l’espace », [en ligne], [consulté le 24-25 mars 2020], OpenEdition Journals, Norois, Volume 245, pp. 7 à 13. Disponible sur https://journals.openedition.org/norois/6201

-

PEARCE-HIGGINS, J; GREEN. R, 2014, « Birds and climate change » Impacts and conservation responses, Cambridge university press, EBC, 382 pages.

-

POTTER. V, 1971, « Bioethics, bridge to the Future », Biological science, Prentice Hall, 205 pages.

-

RODRA, Serge, 2019, « Nid », [en ligne], [consulté le 30 mars 2020], Imago Mundi. Disponible sur http://www.cosmovisions.com/nid.htm

-

RICHARDS. J-F; LAUTREY. J, 2005, « L’intelligence, traité des sciences cognitives », Hermès science publication, Broché, 303 pages.

-

SAUQUET Michel et al., 2014, « L’intelligence interculturelle », Éditions Charles Léopold Mayer, 383 pages.

-

SEGUIN. M, 2003, « Adaptation des systèmes de production agricole au changement climatique », Geoscience, Volume 335, Issues 6–7, pp. 569-575

-

SEKERCIOGLU. C; SCHNEIDER. S; FAY. J; LOARIE. S, 2008, « Climate change, elevationnal range shifts, and bird extinctions », [en ligne], [consulté le 27 juin 2020] Conserv Biol., Volume 22, pp. 140-150. Disponible sur https://conbio.onlinelibrary.wiley. com/doi/abs/10.1111/j.1523-1739.2007.00852.x

-

SERVIGNE. P; STEVENS. R, 2015, « Comment tout peut s’effondrer, petit manuel de collasposlogie à l’usage des générations présentes », Broché, 296 pages.

-

SIMONET. G, 2009, « Le concept d’adaptation : polysémie interdisciplinaire et implication pour les changements climatiques », Nature Science et Sociétés, Volumes 17, pp. 392-401.

-

SNOW. D, 1958, « The breeding of Blackbird, Sonf Thrush and Mistle Thrush in Great Britain », Clutch size, Bird Study, pp. 72-84.

-

TASSIN. J, 2020 « Pour une écologie du sensible », Odile jacob édition, 183 pages.

121


Bibliographie

-

TINGLEY. M, 2009, « Birds track their Grinnellian nichethrough a century of climate change », Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, pp. 43.

-

THOMAS, C; FRANCO. A; HILL. J, 2006, « Range retractions and extinction in the face of climate warming », Trends in Ecology and Evolution, Issues 21(8), pp. 415-416.

-

THOMAS. C; LENNON. J, 1999, « Birds extend their ranges northwards », Nature 399, 213 pages.

-

TISON. A, 2015, « L’Animal architecte », conduites à projet et mécanismes instinctifs de l’Animal bâtisseur, directeur de mémoire CHADOIN, Olivier, ENSAP Bordeaux, Bordeaux, 117 Pages.

-

TOMIALOJC. L, 1992, « Colonization of dry habitat by the Song Thrush. Turdus philomelos : is the type of nest material a important constraint ? » Bull, Birt, Orn, Club, pp. 27-34.

-

TOBLER. G, 1783, “Nature”, Tiefurt Journal, 20 pages.

-

VAN KRANENDONK. M; CHIVAS. A; FRIEND. C; BENNETT. V; NUTMAN. A, 2016, « Rapid emergence of life shown by discovery of 3,700-million-year-old microbial structures », [en ligne], [consulté le 24 novembre 2020], Nature, Volume 537, Issue 7621, Nature Publishing Group, pp. 535-538. Disponible sur https://www.nature.com/ articles/nature19355

-

VIDAL DE LA BLACHE. P, 1922, « Principes de géographie humaine », Archives Kareline, pp. 106-107.

-

WEISERBS. A; JACOB J-P, 2007, « Oiseaux nicheurs de Bruxelles », Aves, 288 pages.

-

WEST-EBERHARD. M, 2003, « Developmental plasticity and evolution », [en ligne], [consulté le 20 janvier 2020] Oxford University Press. Disponible sur https://cutt.ly/ bhdm6RA

122


Remerciements

REMERCIEMENTS Je tiens à remercier toutes les personnes ayant participés à l’élaboration de ce travail de recherche en proposant des échanges, une aide, un accompagnement ou des corrections de qualités. Ce travail, étalé sur ces deux années de Master m’a offert une échappatoire aux cadres et règlementations de plus en plus affirmées dans nos études. Il m’a permis d’affirmer et de confirmer mes volontés quant à notre rôle en tant que futurs architectes dans notre société face aux crises actuelles. Je souhaite dans un premier temps adresser mes remerciements à mon directeur de Mémoire, Mr Denis BRUNEAU, qui a su m’aiguiller au cours de mes recherches, me proposer des acteurs avec lesquelles réaliser des entretiens et prendre de son temps pour me conseiller dans les choix et voies entreprises lors de la réalisation de ce travail. J’adresse tous mes remerciements à l’équipe du séminaire Architecture, Ingénierie et Environnement de la ville durable et plus particulièrement à Mme. Aline BARLET pour la transmission de sa méthodologie, ses corrections et ses pistes de réflexion transmises tout au long de la réalisation de ce travail de recherche. Je remercie également Mme. Helène SANTORELLI pour sa correction intersemestrielle de qualité qui m’a permis de revoir quelques parties de mon travail et de le développer dans la bonne direction. Mes remerciements se tournent également vers les différents acteurs avec qui j’ai eu la chance d’intéragir lors d’échanges en présentiel, en vidéo ou par mail selon la progression de la COVID-19. Ainsi, je voudrais remercier l’équipe de chercheurs de la Ligue de Protection des Oiseaux installée à Villenave d’Ornon, Mlle. Hubert TESSA, Thèsarde, avec pour sujet les façades biomimétiques et leurs rapports à la nature, Mr. Pierre Gauzere, chercheur et écologiste quantitatif ayant réalisé un travail de recherche sur la réponse de l’avifaune commune au changement climatique ainsi que Mlle. Estelle CRUZ, chercheuse et thésarde chez CEEBIOS au sujet de l’architecture bio-inspiré. Enfin, mes remerciements s’adressent à mes proches pour leur accompagnement moral au quotidien et leurs avis personnels dans le but d’améliorer ce travail. Ils vont plus spécifiquement à mes parents pour les heures passées à la relecture cette étude.

123


Bibliographie

Extrait de La Nature à l’Homme Dans tout l’enivrement d’un orgueil sans mesure, Ébloui des lueurs de ton esprit borné, Homme, tu m’as crié : « Repose-toi, Nature ! Ton oeuvre est close : je suis né ! » Quoi ! lorsqu’elle a l’espace et le temps devant elle, Quand la matière est là sous son doigt créateur, Elle s’arrêterait, l’ouvrière immortelle, Dans l’ivresse de son labeur? Et c’est toi qui serais mes limites dernières ? L’atome humain pourrait entraver mon essor ? C’est à cet abrégé de toutes les misères Qu’aurait tendu mon long effort ? Nice, novembre 1867 Louise Ackermann, Poésies Philosophiques

124


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.