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Tapis volants Philippe-Alain Michaud
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Dans les années 1850, Elisha Graves Otis installait à New York les premiers ascenseurs pour passagers, baptisés Vertical Screw Railways, d’abord dans un grand magasin situé au coin de Broadway et de Broome Street, puis dans un hôtel de la cinquième Avenue10. Cent-cinquante ans plus tard, en 1991, Ernie Gehr réalise Side/Walk/Shuttle depuis l’ascenseur de verre accroché à la façade extérieure du Fairmont Hotel au sommet de Nob Hill, à San Francisco. Le film devait être réalisé en lumière zénithale, entre midi et une heure, au moment où les ombres disparaissent mais aussi au moment précis où les clients de l’hôtel montaient déjeuner dans le restaurant panoramique situé au dernier étage. Le cinéaste se vit donc refuser l’autorisation de tournage et décida de réaliser son film en dissimulant sa caméra, c’est-à-dire sans cadrer. À la projection, avec le mouvement toujours plus erratique des immeubles surgissant des bords de l’écran dans une indifférence complète à la direction et à la gravité, la ville se transforme en une suite de projections axonométriques émancipées de tout point de vue fini11. L’ascenseur en s’élevant transforme le monde en surfaces, les édifices se réduisant à des diagrammes spatiaux fantomatiques. « Cette réduction diagrammatique rend possible le passage d’un art à un autre : les plans flottant dans l’espace montrent la destruction du plan urbain et, simultanément, sa reconstruction sous forme sculpturale. »12 La vue à vol d’oiseau, que la photographie aérienne au XXe siècle a rendu usuelle, frontalise le plan de sol et défait les lois de la pesanteur : les volumes se résolvent sous l’effet de la verticalisation en une structure linéaire géométrisée faite d’intrications et de divisions13, une surface ornementale que Nadar, photographiant Paris en plongée depuis la nacelle d’un ballon ascensionnel, décrivait un siècle plus tôt précisément comme un tapis : « Sous nous, comme pour nous faire honneur en accompagnant notre marche, la terre se déroule en un immense tapis sans bords, sans commencement ni fin, aux couleurs variées où la dominante est le vert, dans tous ses accents comme dans tous ses mariages. Les champs en damiers irréguliers ont l’air de ces « couvertes » en pièces multicolores mais harmoniques rapportées par l’aiguille patiente de la ménagère. Il semble qu’une inépuisable boîte à joujoux vient d’être répandue profuse par cette terre, la terre que Swift nous découvrit vers Lilliput*, comme si toutes les fabriques de Carlsruhe avaient vidé là leur stock. Joujoux ces petites maisons aux toits rouges ou ardoises, joujoux cette église, cette prison, cette citadelle, les trois habitacles où se résume toute notre civilisation présente. Joujou bien plus encore ce soupçon de chemin de fer qui nous envoie de tout en bas son aigre petit cri de sifflet […]... Et quelle pureté de lignes […] ! Pas de scories ni de bavures. Il n’est tel que l’éloignement pour échapper à toutes les laideurs. »14
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* De l’île volante de Laputa, Jonathan Swift a peut être trouvé l’inspiration dans Les Oiseaux d’Aristophane, dont la ville de Néphélococcygie – « la cité des nuages et des coucous » –, est bâtie entre ciel et terre. « Je fis quelques pas sur les rochers. Le ciel était parfaitement clair et le soleil donnait si fort que je ne pouvais regarder dans sa direction. Or, il perdit brusquement son éclat, mais non pas, notai-je, comme s’il se couvrait de nuages ; je me retournai et vis qu’une grande masse opaque passait entre moi et le soleil, s’avançant en direction de l’île : elle pouvait bien être à deux milles de hauteur et cacha le soleil pendant cinq à six minutes. Je ne trouvai pourtant ni l’air bien plus frais ni la lumière beaucoup moins vive que si je me trouvais à l’ombre d’une montagne. Quand cette chose inconnue fut suffisamment près, je vis qu’il s’agissait d’un corps solide dont la face inférieure était plate et lisse au point que la mer, en s’y réverbérant, lui donnait un vif éclat. J’étais sur une hauteur qui dominait la plage de peut-être deux cents yards, et vis cette masse énorme descendre jusqu’à se trouver à peu près à mon niveau ; je n’en étais pas alors à plus d’un demi-mille, et à la lorgnette, je voyais nettement des gens qui, en grand nombre, montaient et descendaient, au long de ses flancs en pente. »15 10 Siegfried Giedion, Space, Time and Architecture. The Growth of a New Tradition, Cam11 Sur l’axonométrie opposée à la bridge, Harvard University Press, 1977, p. 209-210. perspective centrale, voir Yve-Alain Bois, « Metamorphoses of Axonometry » in C. Boskaal, F. Bool, H. Henkels, Het Nieuwe Bouwen. Neo-plasticisme in architecture, Delft, The Hague, 1983, p. 146-156. 12 Linda Darlimple Henderson, The fourth dimension and non-euclidean 13 Christoph Asendorf, Supergeometry in modern art, Princeton, 1983, p. 321-334. 14 Nadar, Quand constellation. Flugzeug und Raumrevolution, Vienne, Springer, 1997. 15 Jonathan Swift, Voyages de Gulliver, III : j’étais photographe, Paris, 1899, p. 76-78. Voyage à Laputa, trad. Émile Pons, Paris, Gallimard, Pléiade, 1965, p. 166. Swift explique ainsi l’étymologie du nom de Laputa : « Le mot que je traduis par « île volante » ou « flottante » se dit en cette langue Laputa. […] Laputa me faisait penser à Lap outed, où Lap signifie exactement « le scintillement des rayons du soleil sur la mer » et outed « une aile. » Mais je ne garantis pas cette étymologie, je la propose simplement à la sagacité du lecteur. » (ibid, p. 171). 44
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