Pôle ressources national “Sport, éducation, mixités, citoyenneté”
s i d u e j n de l’éducattiio n o r e s n i ’ l e et d t r o p s e l r pa Les
“Sport, filles et cités : un enjeu de cohésion sociale ?”
© Denis Boulanger
Disponible dans la même collection :
Pôle ressources national Sport, éducation, mixités, citoyenneté
Les
jeudisn de l’éducatio n et de l’insertio rt par le spo “identifier et valoriser le rôle social des clubs”
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les jeudis de l’éducation et de l’insertion par le sport
Pôle ressources national “Sport, éducation, mixités, citoyenneté”
s i d u e j n de l’éducattiio n o r e s n i ’ l e et d t r o p s e l r pa Les
“Sport, filles et cités : un enjeu de cohésion sociale ?”
Actes des jeudis de l’éducation et de l’insertion par le sport qui se sont déroulés le jeudi 16 septembre 2010 à Tours (37) 3
les jeudis de l’éducation et de l’insertion par le sport
© Denis Boulanger
CREPS SUD-EST site de d’Aix-en-Provence Pont de l’Arc - CS 70445 13098 Aix-en-provence Cedex 2 Tél. 04 42 29 68 99 - Fax 04 42 29 24 75 prn@semc.fr www.semc.fr
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les jeudis de l’éducation et de l’insertion par le sport
Sommaire
Introduction
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p7
Préambule
p 11
Paroles d’universitaire Carine Guerandel
p 12
Débats Animés par Claude Lechartier
p 20
Trame d’animation des débats
p 42
Références bibliographiques
p 44
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Introduction Que sont les jeudis de l’éducation et de l’insertion par le sport ? Initiés en 2008, les jeudis de l’éducation et de l’insertion par le sport (JEIS) constituent des temps originaux de conférences et de débats à destination du mouvement sportif, des éducateurs, des étudiants et de l’ensemble des acteurs du sport. Ils ont en effet pour ambition de répondre au plus près aux problématiques des acteurs de l’éducation et de l’insertion par le sport, en s’inscrivant dans les dynamiques territoriales. Les jeudis de l’éducation par le sport sont des journées thématiques proposant à la fois : - débats - rencontres - échanges - animation de réseaux locaux Autour de thématiques identifiées, et correspondant aux orientations prioritaires du Ministère des sports. Les jeudis de l’éducation par le sport se divisent en deux temps : - un premier temps à dominante universitaire, s’apparentant à une formation à destination des stagiaires (CREPS ; autres organismes de formation…), des étudiants (STAPS & autres). Ces temps de formations sont par ailleurs ouverts aux travailleurs souhaitant enrichir leurs pratiques professionnelles. - une soirée-débats, à destination du mouvement sportif, des professionnels, des bénévoles et du grand public. Quatre éditions ont eu lieu depuis 2008, permettant d’approfondir une réflexion sur les thèmes suivants : - Intégration sociale par le sport, des personnes en situation de handicap, en collaboration avec Marc Clément. - Les liens entre le mouvement sportif et le travail social, prenant appui sur les travaux de recherche de Nathalie Pantaléon. - Les politiques publiques en matière d’éducation et d’insertion par le sport, en suivant les travaux de Michel Koebel. - Conseil général, ville, association, quels niveaux d’intervention, quels objectifs et quels critères d’évaluation ?, en détaillant la politique conduite par le Conseil général de Moselle, et en s’appuyant sur les travaux de Christophe Gibout. En 2009, le PRN SEMC a renouvelé cette opération, en lui offrant une dimension tournante et nationale. - Les jeudis de l’INSEP : Compétition et éducation : entre opposition, conciliation et conjugaison - Les jeudis de l’éducation par le sport à Lambersart dans le Nord Pas de Calais : Identifier et valoriser le rôle social du club, en collaboration avec Emmanuelle Walter.
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Coordination générale des débats : Claude Lechartier – Inspecteur jeunesse et sport – Responsable du Pôle jeunesse, sports, vie associative à la DDCS Indre-et-Loire Comité de pilotage : - Claude Lechartier, Responsable du Pôle « jeunesse, sport et vie associative » DDCS 37 - Christine Grosset, Conseiller d’animation sportive DDCS 37 - Nadine Lorin, Déléguée aux droits des femmes et à l’égalité 37 - Jean Bergeon, Président du CDOS 37 - Pierre Borde, Délégué du Préfet à la politique de la ville - Danielle Reuiller, Responsable de la politique de la ville à Mairie de Tours - Gérard Gernot, 1er adjoint au maire de la ville de Tours et conseiller général sur le secteur des Fontaines - Jean-Jacques Place, Adjoint aux sports à la ville de Tours - Lionel Paquet, Chargé de mission de la vie associative au CG 37 - Nedjid El Baja, Responsable du Boxing club des Fontaines - Myriam Chomaz, Conseillère technique et sportive nationale à la Fédération française de boxe - Didier Foret, Chargé de mission au secrétariat général comité interministériel des villes - Loïc Lecanu, Chargé de mission au PRN SEMC - Christel Clapies, Chargée de mission au PRN SEMC
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Préambule “Sport, filles et cités : un enjeu de cohésion sociale ? ” Les filles sont traditionnellement les plus éloignées de la pratique sportive. La tendance se confirme lorsqu’on se positionne sur les quartiers de la politique de la ville. Or, les filles ne sont pas exemptes des problématiques sociales et éducatives. Il est reconnu que le sport ou les activités physiques et sportives (APS) telles que dispensées dans les clubs sportifs ou structures sociales, regorgent de potentialités éducatives et sociales. Certains projets tels que celui développé par le Boxing club des Fontaines démontrent que lorsque la volonté initiale est présente et accompagnée d’éléments méthodologiques, il est possible de proposer une offre sportive adaptée aux spécificités et aux besoins des publics féminins. Pourquoi les jeunes filles pratiquent-elles moins ? Quels sont les freins réels et évoqués à la pratique féminine dans les quartiers ? Quelles sont les méthodes à mettre en place, notamment en termes d’adaptation des pratiques, lieux de pratiques… ? Quel mode d’organisation des réseaux de partenaires pour accompagner et inscrire durablement ces actions sur les territoires ? Quels sont les enjeux réels de ces actions sur le public féminin, et par extension, sur l’ensemble de la population ? Autant de questions qui seront débattues tout au long de notre rencontre…
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paroles d’universitaire Carine Guerandel Intervenant Carine Guerandel est maître de conférences en sociologie à l’IUT carrières sociales de Tourcoing. Elle travaille au sein du laboratoire de recherches CéRIES (le centre de recherche « individus, épreuves et société »). Carine est également membre de l’équipe lilloise « Études genres et sociétés » (ELIGES) de la Maison européenne des sciences de l’Homme et de la société de Lille. Docteur en sociologie du sport à l’université de Toulouse, le thème de sa thèse porte sur « les modes de socialisation des jeunes filles et des jeunes garçons issus des quartiers populaires urbains dans les situations sportives ». Les principaux domaines de recherche qu’effectue Madame Guerandel portent sur la sociologie de la jeunesse populaire, les rapports sociaux de sexes et la sociologie du sport et du corps.
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Carine Guerandel : Bonsoir à toutes et à tous. Avant de commencer, je tiens à remercier les organisateurs de cette soirée de m’avoir invitée et de me donner la possibilité de discuter avec vous de mon travail mais aussi de votre travail. Dans le cadre de ma thèse, j’ai travaillé sur la socialisation sportive des jeunes garçons et jeunes filles issus des quartiers populaires urbains et plus précisément sur la socialisation sexuée et corporelle à l’oeuvre dans les situations sportives. L’un des axes que je développe dans la thèse renvoie au rôle central joué par les encadrants dans ces processus. Ce soir, mon intervention va se faire en quatre points. D’abord, je ferai un état des lieux de la pratique sportive des filles dans les cités. Je vais donc également parler des garçons. De manière plus générale, je rappellerai aussi rapidement quelques chiffres sur la pratique sportive des Français pour avoir des points de comparaison. Dans un deuxième temps je proposerai quelques pistes d’analyse des différences des taux de pratique des filles et des garçons. Évidemment, c’est multifactoriel et ma présentation demeure partielle. La présentation des enjeux du changement et du développement de la pratique féminine fait l’objet de mon troisième point. Enfin, rapidement, je donnerai quelques pistes de réflexion et d’action. Là, je sors un peu de mon rôle de sociologue. En effet, ce n’est pas au sociologue de prescrire. Mais cela me permettra de faire le lien avec les témoignages des professionnels qui suivent ma présentation.
Je vais donc directement commencer par la présentation des enquêtes sur la pratique sportive des Français qui montrent que globalement les femmes sont moins nombreuses que les hommes à pratiquer une activité physique et sportive, à posséder une licence et faire de la compétition. En revanche, elles sont plus nombreuses à pratiquer des activités d’agréments ou d’hygiène comme la marche, la natation et la gymnastique d’entretien. De même, quand les hommes et les femmes pratiquent le même sport, l’appropriation de la pratique diffère : les hommes s’engagent toujours de manière plus « sportive » au sens traditionnel du terme (c’est-à-dire dans l’effort, la compétition et le dépassement de soi) que les femmes. Les comportements sportifs des hommes et des femmes varient selon leur appartenance sociale. Les membres des classes populaires présentent ainsi le taux de pratique le plus faible et les différences de pratique entre les sexes sont exacerbées dans les milieux populaires. Chez les ouvriers, par exemple, l’écart entre le taux de pratique des femmes et des hommes et de 24 points tandis que chez les cadres, il est 0,2. Ces différences entre les sexes se repèrent dès l’enfance. L’enquête de Sylvie Octobre1 révèle que les filles sont moins impliquées dans les pratiques sportives que les garçons. A 11 ans, 59% des filles pratiquent un sport en dehors de l’école alors que c’est le cas de 75% des garçons. Les garçons choisissent plus souvent que les filles le foot, les arts martiaux et le vélo et sont plus attirés par le risque et la compétition. Les filles se polarisent vers des activités relatives à l’esthétisme comme la danse et la gymnastique ou à la proximité avec les animaux comme l’équitation. De même, comme l’explique Marie Choquet2, plus les adolescents sont issus de milieux favorisés, plus ils pratiquent du sport et plus l’écart entre garçons et filles est
Octobre S., Les loisirs culturels des 6-14 ans, Paris, La Documentation Française, 2004. Choquet M., Jeunes et pratique sportive. L’activité sportive à l’adolescence. Les troubles et conduites associées, rapport au ministère de la jeunesse et des sports, Paris, INJEP, 2001. 1 2
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faible. A l’inverse, plus les jeunes sont d’origine modeste, moins ils pratiquent de sport et plus la différence entre garçons et filles est importante, en défaveur des filles. Par ailleurs les 12-14 ans sont plus impliqués dans la pratique que les 15-19 ans et les filles abandonnent plus précocement que les garçons. J’en viens à présent de manière plus spécifique sur le sport dans les cités. Les études de démographie sportive en banlieue sont relativement récentes. Les données disponibles révèlent un déficit de pratiques sportives pour l’ensemble de la population des Zones urbaines sensibles3 (ZUS). Conformément aux moyennes nationales, les filles pratiquent moins que les garçons, sont moins souvent licenciées dans les clubs et font moins de compétition. Ainsi, alors que 51% des filles pratiquent le sport en France, seulement 32% le font en Zones urbaines sensibles. De même, dès qu’elles atteignent l’adolescence, les filles issues des quartiers populaires ont tendance à sortir progressivement du secteur public des loisirs. Je vais donc vous présentez maintenant quelques résultats d’une enquête par questionnaires, menée dans le cadre de ma thèse, sur les pratiques sportives des collégiens d’un quartier populaire urbain. Dans une Zone d’éducation populaire (ZEP), plus de 50% des filles et plus de 90% des garçons déclarent aimer le sport et pourtant les données montrent bien que la pratique sportive reste essentiellement l’apanage des jeunes garçons. En effet, 30% des filles et 60% des garçons s’investissent dans une institution qui propose du sport. De même, avec l’avancée en âge, les filles pratiquent de moins en moins. En 6ème-5ème, elles sont 38% à s’investir dans les structures sportives, 29% en 4ème et 19% en 3ème. Les filles s’investissent essentiellement dans les associations sportives du quartier à l’entrée au collège et dans celles extérieures au quartier en
classe de 3ème. En 4ème, elles sont nombreuses à rester dans l’établissement scolaire pour pratiquer une activité physique, soit à l’UNSS, soit au centre aéré du collège. L’établissement scolaire semble s’apparenter à un espace protecteur par rapport au quartier et à ses normes. Conformément aux travaux de Catherine Louveau et Annick Davisse4, on constate l’importance du sport scolaire dans le développement de la pratique sportive féminine. La pratique à l’extérieur du quartier n’est pas dominante chez les jeunes interrogés (53/157 sportifs). Elle trouve son apogée en 3ème où 80% des filles sportives et 60% des garçons sportifs sortent du quartier pour faire du sport. Ce constat amène à repenser l’idée d’une jeunesse populaire homogène et assignée à un territoire. La pratique extérieure au quartier qui offre des occasions de mixité sociale et sexuée reste quand même, l’apanage des jeunes dotés en ressources familiales, scolaires et relationnelles. En fait les jeunes déscolarisés ou orientés dans des classes stigmatisées comme les SEGPA ont le taux d’investissement sportif le plus bas. Par ailleurs, de manière générale, les jeunes pratiquent essentiellement des activités que le quartier ou le collège leur propose. On note donc en ce sens le poids de l’offre sportive locale dans la pratique effective des jeunes. Pour exemple, le taux de 21% de filles inscrites à la natation, s’explique par l’existence de la section UNSS au collège et de l’option « secourisme aquatique » en 4ème. Les taux de 12% de filles et de garçons pratiquant le baseball se comprennent au regard de l’importance de cette activité au collège, à la fois proposée dans le cadre de l’UNSS et comme pratique de spécialité de la classe option sport. On remarque également que les garçons se dirigent vers les sports collectifs et le milieu fédéral et les filles vers les sports individuels et la pratique au sein de l’institution
3 Se référer au Rapport Femmes et Sport d’avril 2004 ; Gasparini W. et Vieille-Marchiset G., Le sport dans les quartiers. Pratiques sociales et politiques publiques, Paris, PUF, 2008 ; Vieille-Marchiset, Des loisirs et des banlieues. Enquête sur l’occupation du temps libre dans les quartiers populaires, Paris, L’Harmattan, 2009. 4 Louveau C. et Davisse A., Sport, école, société : la différence des sexes, Paris, L’Harmattan, 1998.
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scolaire. Cela s’explique notamment par le fait que l’offre sportive à destination des filles correspond essentiellement à des pratiques individuelles assez féminisées comme la danse, le tennis et la natation. Pour pratiquer un sport collectif, elles doivent sortir du quartier. Enfin, la socialisation des filles dans le milieu sportif est relativement tardive (en moyenne 11 ans) comparativement à celle des garçons et se limite essentiellement à l’activité hiphop. En revanche, celle des garçons est précoce (7,2 ans pour les footballeurs) et éclectique : ils sont nombreux à avoir testés différentes pratiques et structures. J’en viens à mon deuxième point sur l’analyse de la faible participation des filles. Évidemment ce ne sont pas les seuls facteurs explicatifs, ce sont ceux que j’ai retenus pour initier la discussion. Dès les années 80, les pouvoirs publics mobilisent le sport comme un lieu privilégié de développement de la citoyenneté, des apprentissages des règles sociales. On utilise le sport pour lutter contre les violences urbaines et pour favoriser l’intégration des jeunes. Dans ce contexte, l’offre sportive n’est pas choisie au hasard, certaines pratiques étant considérées comme incontournables et attractives avec en tête le football. Le succès de ce sport est largement entretenu par la médiatisation de l’équipe de France métissée et par la réussite des joueurs issus des quartiers. On a aussi le basket de rue, dès les années 90, favorisé par la médiatisation de la Dream Team américaine aux JO de Barcelone. Les sports de combats comme la boxe et les arts martiaux permettraient, quant à eux, de transmettre le goût de l’affrontement dans le cadre de règles strictes et donc de canaliser la violence. Enfin, la danse hip-hop permettrait de mettre en avant « l’énergie positive » qui existerait dans les banlieues. Comme on peut le voir dans cette offre sportive, seule la danse hip-hop correspond à une pratique plutôt féminisée. Et encore, historiquement la danse 5
hip-hop correspond à une pratique investie par les hommes ; c’est son institutionnalisation qui participe à sa féminisation. Néanmoins, les sociologues rappellent que le sport n’est pas intégrateur en soi, il porte les valeurs qu’on lui attribue. Finalement, à l’origine, l’objectif de l’encadrement par le sport consistait à réduire les opportunités délinquantes en occupant les jeunes tout en menant auprès d’eux des actions éducatives censées les « resocialiser ». En fait, il faut occuper ces garçons qui s’approprient l’espace public et pacifier, socialiser cet entre soi masculin. Les filles, plus discrètes, sont considérées comme moins enclines aux comportements délictueux par rapport aux garçons. En se désintéressant des publics féminins des cités, les politiques d’insertion ont donc produit de manière involontaire de la discrimination sexuelle à l’encontre des filles et de leur accès à la pratique sportive. Sur mon terrain d’enquête, on comptait peu de dispositifs pour les filles. Dans les structures accueillant des filles et des garçons, la réflexion sur la pratique féminine ou la gestion de la mixité apparaît inexistante dans les projets éducatifs et dans la majorité des pratiques observées. Les sportifs sont donc plus nombreux que les sportives. Concernant les relations filles-garçons dans les cités, les travaux sur la jeunesse populaire montrent que les relations entre les sexes semblent particulièrement difficiles et distantes dans les quartiers populaires urbains. Les valeurs de virilité façonnent l’univers quotidien des jeunes garçons qui valorisent une socialisation de l’entre soi ainsi qu’une appropriation de l’espace résidentiel du quartier. Les filles, en quête d’invisibilité, entretiennent leur discrétion par la mobilité. Ces relations entre les sexes s’inscrivent dans un système de codes et de valeurs que David Lepoutre5 nomme « la culture de rue » qui valorise un modèle masculin relatif à la virilité exacerbée. Être un homme viril, c’est ne pas être une femme et afficher
Lepoutre D., Cœur de banlieue, Paris, Odile Jacob, 1997.
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des comportements virils et son hétérosexualité. Les idéaux de la masculinité chez les jeunes des cités renvoie à la force, au courage, à la capacité de se battre pour son honneur ou encore à la résistance à la douleur. Or le sport permet de se forger un corps musclé, fort, sa réputation d’homme valeureux et combatif et donc de construire une virilité valorisé par les pairs. Les travaux de sociologie du sport montrent en effet que le monde sportif peut être assimilé à une « maison des hommes »6, un lieu privilégié de construction du masculin puisque les apprentissages sportifs sont largement organisés autour de la gestion de la puissance physique, de l’agressivité et de la violence. Par exemple, les remarques adressées aux garçons peu performants que ce soit par certains entraîneurs, des coéquipiers ou des spectateurs illustrent bien mon propos. On peut entendre des phrase comme : « tu joues comme une femme », « arrête de pleurer, t’es pas une fille » ; pour interpeller deux garçons qui discutent « eh, les poètes ! », « on n’est pas des coiffeurs », « arrêtez de faire les danseuses » etc. Dans cette perspective, filles des cités rencontrent de nombreuses résistances locales quand elles souhaitent intégrer le monde des hommes comme le football par exemple, un lieu de l’entre soi masculin. Faire du sport dans l’espace du quartier, c’est également se rendre visible dans cet espace. Or les filles entretiennent leur réputation au sein du quartier par leur invisibilité. La socialisation familiale constitue également un facteur explicatif de l’investissement relatif des filles dans le monde sportif. Durant l’enfance, elles sont moins encouragées que les garçons à s’investir dans les pratiques sportives. Les normes vestimentaires et de savoirs-être féminins, les jouets dévolues aux filles ou encore les modèles identificatoires limitent les usages du corps de la petite fille : les robes, les mocassins, rester propre, être calme, douce, les déguisements de princesse, jouer à la poupée, se maquiller, les coiffures 6
travaillées sur cheveux longs… J’en viens à présent à la notion de corps des classes populaires. Le dévoilement partiel de son corps peut également constituer un frein à la pratique sportive des filles avec notamment la question relative à la pudeur, aux normes familiales ou encore la honte de la détresse économique. Je vais expliciter à partir d’exemples rencontrés au cours de mes enquêtes. Une jeune fille m’explique que dans les vestiaires, en EPS, elle refuse de se changer devant ses camarades tout simplement parce que sa mère lui achète des sous-vêtements au marché, des sous-vêtements « un peu de bébé », « sans marque » et parfois troués ou usés. Il existe aussi des complexes liés au corps, le surpoids, les tâches, les marques corporelles, l’anatomie pas assez ou trop développée, le poil. Voici une anecdote : une jeune fille refuse de pratiquer la natation lors des cours d’EPS. Assimilant ce refus au respect des normes parentales liées à des croyances religieuses, l’enseignant convoque les parents pour leur expliquer le caractère obligatoire de la pratique. Il s’avère que la famille ne comprend pas pourquoi leur fille ne veut pas nager. L’enseignant conclut alors à un caprice d’adolescente. Suite à cette situation, cette jeune fille révèle dans un entretien que ses parents lui interdisent de s’épiler ou de se raser. Il est donc hors de question pour elle d’exposer son corps poilu (aisselles, jambes et maillots) devant ses camarades et l’enseignant. Par ailleurs, le corps à corps est difficile à gérer dans les sports de contact. En ce sens, la violence observée des garçons vis-à-vis des filles, lors de certaines séances de sport, s’analyse comme le résultat de la perte de la face quand ils sont mis en difficulté par une fille. Leur réputation se joue aussi dans leur supériorité physique considérée comme naturelle. Si une jeune fille performante les met en difficulté, la sanction des pairs (par la moquerie notamment plus ou moins virulente) devient compliquée à gérer pour eux.
Mennesson C., Être une femme dans le monde des hommes, Paris, L’Harmattan, 2005.
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Le troisième point que je souhaitais aborder concerne les enjeux du développement de la pratique féminine. De manière générale, l’intérêt réside dans la recherche de l’égalité des conditions faites aux hommes et aux femmes dans l’accès au sport et dans les modalités d’entraînement. En effet, si on part du principe que le sport n’est ni bon ni mauvais a priori, il n’y a aucune raison que les femmes n’en pratiquent pas. Je rappelle que la domination masculine (prégnante dans le monde du sport) s’exprime et se construit à travers le corps et ses usages. Le corps des femmes a fait l’objet de nombreuses prescriptions médicales visant à restreindre et contrôler la pratique sportive des femmes en invoquant notamment des raisons hygiénistes. De même, les normes esthétiques valorisent la minceur et un volume musculaire raisonné. La féminité est synonyme de douceur, de vulnérabilité, de légèreté. Le travail de l’apparence place alors souvent les femmes en situation d’insécurité corporelle avec, par exemple, les corsets, les talons, les jupes etc. De même, les manifestations de la douleur, de la peur, le doute sont imputées aux femmes et censées révéler leur infériorité naturelle. Or, sous certaines conditions, investir le monde du sport, c’est tenter de gérer son capital corps, son image, en augmentant ses ressources physiques et morales. La femme sportive et son corps permettent alors de questionner les catégories traditionnelles de définition des sexes. Le sport peut aussi constituer un lieu de brimades ou d’asservissement. Cependant, il ne sera pas plus mauvais pour les femmes que pour les hommes. Le travail de l’encadrant apparaît alors fondamental puisqu’il incombe à ce dernier de proposer une réflexion sur les modalités d’encadrement. Annick Davisse7 précise que penser le sport des femmes ce n’est pas refuser la compétition : « la possibilité d’affrontements réguliers restent une composante humaniste du développement des personnes.
(…) Les filles ont bien un monde à gagner en s’appropriant cette capacité à s’affronter. On peut même penser que cela les aiderait à s’insurger, par exemple, contre les pressions sexistes qu’elles subissent trop souvent sur l’emploi et dans le travail ». Je précise également que libérer les femmes de la domination masculine participe par là-même à libérer les hommes du carcan de la virilité à tout prix. C’est permettre aux garçons de s’autoriser à ne pas aimer le sport, à aller vers d’autres pratiques plus culturelles (davantage connotées du côté du féminin), mais surtout, c’est les autoriser à pratiquer aussi des sports largement féminisés sans être stigmatisés. D’une manière plus spécifique à mes résultats de recherche, le sport apparaît comme un capital pour les jeunes filles et les jeunes garçons des quartiers populaires. Ce capital sportif peut ainsi s’accompagner de l’intériorisation de normes corporelles axées sur le souci de soi et l’attention portée à une hygiène de vie spécifique ainsi que d’un travail du corps (minceur) dans une stratégie d’insertion sur le marché matrimonial. De même, les jeunes sportives possèdent un réseau amical large (mixte d’un point de vue social et sexué) et certaines lycéennes déclarent entretenir une relation de flirt avec un membre de leur club de sport. Le sport permet également un accès à des ressources financières (en devenant initiateurs dans leur club) et à des formations validant des diplômes sportifs. Il constitue un moyen de sortir du quartier (de manière encadrée) parce que le club se situe à l’extérieur de la cité ou pour les compétitions et les stages. Enfin, les jeunes filles sportives obtiennent, dans l’ensemble, de bons résultats scolaires. Dans le collège étudié, il existe une classe « option sport » (un lieu d’excellence scolaire dans l’établissement) dont la moitié des élèves sont des filles. La meilleure de la classe en sport est une boxeuse considérée comme la
7 Davisse A., « Filles et garçons dans les activités physiques et sportives : de grands changements et de fortes permancences… », in Dafflon Novelle A. (dir.), Filles-garçons. Socialisation différenciée ?, Grenoble, PUG, 2006, pp. 296.
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plus performante par l’enseignant mais aussi par les élèves. Les observations menées dans ce contexte permettent notamment de questionner la supériorité supposée comme « naturelle » des garçons en sport. Je terminerai mon exposé en insistant sur l’importance fondamentale de penser la mixité. Les intervenants ne refusent pas de travailler sur cette question, ils considèrent simplement que la coprésence des sexes dans un lieu suffit à construire de la mixité pensée comme l’égalité. Or ces deux termes ne sont pas synonymes. La mixité non pensée et non construite amène à une coprésence des filles et des garçons sans réelle interaction, ce qu’Erving Goffman8 nomme un « ensembleséparé ». Travailler sur la mixité nécessite un travail collectif décliné à tous les niveaux : des politiques jusqu’aux encadrants en passant par la rédaction d’un projet en équipe. Afin de viser l’égalité des sexes dans le monde sportif, les intervenants doivent donc mener une réflexion sur ses pratiques pédagogiques (organisation des pratiques et des modalités d’entraînement valorisées, attentes et traitement différenciés des filles et des garçons…), ses propres représentations sexuées concernant les sportifs et les activités, formuler des objectifs explicites en ce sens... Dans cette perspective, la formation des encadrants et des responsables institutionnels à cette problématique paraît un élément clé pour penser le changement. Je vous remercie pour votre écoute.
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Goffman E., L’arrangement entre les sexes, Paris, La dispute, 2002.
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Notes : ..............................................
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débats Intervenants : • Nedjid El Baja – Responsable du Boxing club des Fontaines de Tours
• Nadine Lorin – Déléguée aux droits des femmes et à l’égalité
• Thierry Lize – Responsable de la commission diversification et mixités – District de football Indreet-Loire
• Didier Foret - Chargé de mission au secrétariat général du comité interministériel des villes
• Richard Alloncle – Service gestion des activités sportives, ville de Tours – Responsable de la salle de fitness de la ville de Tours
Animation des débats :
• Myriam Chomaz – Conseillère technique sportive nationale - Fédération française de boxe
Claude Lechartier – Inspecteur jeunesse et sport – Responsable du Pôle jeunesse, sports, vie associative – DDCS Indre-et-Loire
• Jean-Jacques Place – Adjoint aux sports de la ville de Tours et membre de l’ANDES
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Claude Lechartier : Merci beaucoup madame Guerandel, après tout exposé, il y a un temps non pas de digestion mais de réflexion. Donc le temps que les choses s’assimilent, je voudrais tout de suite rebondir et me tourner vers ce dont il a été fait état dans l’enquête sur les recherches en milieu scolaire. Nous avons la chance d’avoir dans la salle deux personnes qui travaillent au sein du milieu scolaire, à l’UNSS, Monsieur le directeur régional adjoint de l’UNSS pour la région Centre et Madame la directrice départementale de l’UNSS en Indreet-Loire. La mise en évidence de l’intérêt et de l’importance du sport et en particulier de l’UNSS a été citée, donc je me tourne vers vous pour voir et entendre les observations.
Multiplier les licenciées filles et travailler la mixité à l’UNSS Directeur régional adjoint de l’UNSS pour la région centre : merci Claude de nous donner la parole. Très rapidement quelques rappels, l’UNSS, c’est la fédération sportive de l’éducation nationale, c’est 1 million de licenciés, avec 40% de filles et 60% de garçons. Cette année est la première où notre ministre de tutelle nous donne des enjeux sur les trois ans à venir. C’est la première fois qu’on a une demande institutionnelle qui consiste à multiplier le nombre de licenciés parce qu’on pense qu’effectivement dans une première étape, c’est à l’école que ça va se passer, au collège et au lycée. La deuxième demande est de multiplier les licenciées filles et là, évidemment on ne pourra jamais le faire uniquement dans le milieu enseignant mais forcément en partenariat avec les clubs. Je rappelle que l’UNSS est le trait d’union entre le milieu scolaire et le milieu fédéral : on est là pour ça ! Et c’est une institution qui n’existe nulle part ailleurs dans le monde qu’en France. Donc on a tout un tas de passerelles à tisser. La réflexion pour nous est effectivement dans la mixité. A l’UNSS tout se fait dans le concept d’équipes, donc
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on travaille énormément les activités sportives sous la forme d’équipes mixtes, notamment dans les sports de raquettes par exemple. En revanche, on n’aborde pas encore la mixité dans les sports collectifs, à cause du poids, de la taille, des catégories d’âges, mais on est sur ce plein développement et tout à fait d’accord avec Carine Guerandel pour dire qu’on ne travaille pas la mixité comme il le faudrait. Pour nous, on est dans un schéma simple, on met des filles et des garçons ensemble, et c’est tout. Cependant, on a une piste de travail. La deuxième piste c’est d’ouvrir le menu sportif que l’on propose dans les collèges et les lycées, de voir comment on peut travailler différemment avec les structures sportives qui sont proches géographiquement, ça c’est important. Et savoir aussi quel est le tissu sportif fédéral ou culturel qui peut nous donner un coup de main, construire une féminité ou une masculinité. Ce n’est pas si simple parce que, comme le faisait remarquer la directrice départementale de l’UNSS en Indre-et-Loire, on est sur une formation d’encadrants qui est surtout une formation techniciste et qui ne prend pas du tout en compte justement cet aspect humain et social. C’est un combat ! Souvent il y a des hommes et des femmes parmi les enseignants d’EPS, pas forcément assez de femmes d’ailleurs. Quels sont les rôles qu’on pourrait leur confier ? Peut-être un rôle de technicienne évidemment sportive mais aussi la tache d’accompagner, faire parler… De quelle manière décline-t-on le temps passé dans les clubs ? De quelle manière décline-t-on les relations entre entraîneurs et sportifs ou enseignants et élèves ? Tout ça effectivement ce sont des pistes. Je retiendrai et je le demanderai à Carine Guerandel sous forme de question pour recentrer le débat sur les cités : est-ce que l’enjeu n’est pas finalement de prendre les enfants en main beaucoup plus tôt qu’on ne le fait d’un point de vue sportif ? Vous savez qu’à l’UNSS, on a des armes que les collègues de l’USEP n’ont pas, car on est institutionnellement dans les établissements, de droit. Le président est
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de droit le chef d’établissement, les éducateurs sont, de droit les profs d’EPS. Pour avoir beaucoup pratiqué avec mon ami Jacques Voisin à qui je rends hommage ici, lors de la liaison CM2 - 6ème, une des choses que je voudrais mettre justement en relief, c’est ce manque de prise en main des tous les jeunes. Claude Lechartier : Carine va nous apporter sa réponse et avant de lancer véritablement le débat, je vais appeler les intervenants de la table : Nedjid El Baja, Thierry Lise, Richard Alloncle, Myriam Chomaz, et Monsieur Didier Foret qui représente ici ce soir le secrétariat général du Comité interministériel des villes et qui est donc bien évidemment très impliqué dans les stratégies des politiques de la ville et des pratiques sportives. Je repasse la parole à Mme Guerandel.
Une socialisation sportive précoce favorise le goût du sport et une pratique pérenne Carine Guerandel : Je suis d’accord avec vous sur l’idée que donner le goût du sport aux enfants et notamment aux jeunes filles dès le plus jeune âge permettrait sans doute aux pratiquantes de maintenir leur engagement sportif à l’adolescence. Juste pour exemple, l’enquête de Christine Mennesson sur les sportives de haut niveau investies dans des pratiques dites « masculines », met en évidence la socialisation sportive précoce des jeunes femmes. Généralement, durant leur enfance, elles sont socialisées au sport par un membre de leur famille comme le père ou un frère. Une autre enquête menée par Elsa Croquette9, montre que dans les milieux populaires urbains, les filles aînées sont rarement sportives. Elles aident leur mère en participant à
l’éducation des plus petits et aux tâches ménagères du foyer. En revanche, les petites sœurs peuvent s’investir dans les pratiques sportives, avec la complicité de la grande sœur qui va les décharger des corvées. Claude Lechartier : Je vais passer la parole au représentant de l’USEP, puisque la question a été évoquée de la précocité à la pratique ou de l’accès à la pratique sportive chez les plus jeunes. Comité départemental de l’USEP : l’USEP est l’union sportive de l’enseignement du premier degré. Nous intervenons auprès des enfants jusqu’au CM2 avant qu’ils ne partent au collège. Nous avons une pratique sportive pour l’éducation du citoyen donc bien évidemment on essaye de lutter contre toutes sortes de différences entre les enfants et on tient compte de la mixité. On remarque lors de nos activités, que cette mixité fonctionne bien, mais quand on laisse les enfants livrés à eux-mêmes et même dans une cour de récréation effectivement le clivage sexuel reprend le dessus. J’en veux pour preuve une petite anecdote qui s’est déroulée dans une école de Tours l’année dernière avec une cour relativement petite : les filles de CM2, ont fait en fin d’année, une pétition pour se plaindre auprès du directeur de l’école que les garçons monopolisaient la cour pour jouer au football et qu’elles n’avaient plus d’espace. Claude Lechartier : Voila un témoignage concret, très pertinent ! je cède la parole à Monsieur Place, adjoint au maire de Tours en charge des sports mais également représentant de l’ANDES, il va expliquer ce qu’est l’ANDES.
9 Croquette E., « Les sportives de haut niveau d’origine Nord Africaine : type d’investissement sportif, cadre de socialisation et configurations familiales », Revue STAPS, n°66, 2004, pp. 179-193.
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Equipement, encadrement sportifs et implication dans les quartiers… Jean-Jacques Place : l’ANDES est l’association nationale des élus du sport dont je suis un des membres au niveau du bureau directeur. Je m’occupe de la commission « grandes villes et sport professionnel ». Dans le cadre de l’ANDES, nous avons notamment des discussions sur la féminisation dans le sport parce que nous nous rendons compte, mes collègues et moi, que les problématiques qui sont posées ce soir avec un superbe exposé, nous avions commencé à les travailler je dirais, depuis un certain nombre d’années. A l’heure actuelle nous n’avons pas objectivement de réponses. Concernant la ville de Tours, simplement un petit rappel : la ville compte un service des sports, 260 personnes réparties dans différents types de métiers, avec une soixantaine d’éducateurs sportifs dont M. El Baja fait parti. Nous intervenons dans le domaine scolaire et hors temps scolaire avec notamment des missions que je considère d’intérêt général au niveau de la collectivité. Nos éducateurs exercent sur le temps des vacances sur les différents territoires de la ville et notamment sur les territoires dits « territoires difficiles ». Un des souhaits que j’avais évoqué avec les services il y a maintenant quelques années était de voir quelles étaient les possibilités de pouvoir mieux intégrer le monde féminin dans la pratique sportive et notamment, je parle au niveau du quartier du Sanitas, quartier des Fontaines ou celui de Tours Nord. Il y a tout de même une remarque au départ qui est assez simple : lorsque les villes ont été conçues à une certaine époque, le monde sportif s’est installé après. C’est à dire que les équipements sportifs sont arrivés après l’urbanisation. Les premiers équipements sportifs existants véritablement sont ceux qui sont dans les écoles, les gymnases des écoles. En termes d’outils de travail, ce ne sont pas forcément de gymnases dont on a besoin aujourd’hui, mais plutôt de
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salles spécifiques et celles-ci font encore défaut au niveau de la ville. Nous sommes dans des quartiers qui n’ont pas assez d’espace, parce que l’urbanisation est faite de telle manière qu’on ne peut pas construire comme on le souhaiterait. Un deuxième point, et on en revient malheureusement de temps en temps à ça, les contraintes techniques ou les contraintes fédérales font que sur un outil sportif, on arrive à des sommes qui sont quelquefois trop importantes. Il n’empêche que nous avons le devoir d’être attentifs et d’essayer de trouver des solutions pour que les jeunes filles qui sont dans ces quartiers-là puissent déjà pratiquer du sport à l’intérieur de ces quartiers avant de pouvoir s’externaliser. Je crois que c’est un élément qui existe déjà, car au palais des sports, on a l’avantage d’avoir 2400m², en plein milieu du centre-ville et dans les quartiers dits difficiles ; on a un outil extraordinaire à ce niveau-là. Mais il est vrai, que ce soit sur Tours Nord ou dans le quartier des Fontaines, ou encore du Sanitas, nous avons un autre club qui intègre parfaitement les jeunes filles, et il y a un manque évident de structures. C’est un point important qui peut être non pas un des freins mais qui peut peser. Ça fait déjà un certain nombre d’années que je suis adjoint aux sports et je vais souvent aux assemblées générales des associations sportives. Je rejoins ce que vous disiez tout à l’heure, très peu de femmes sont à la tête d’associations sportives par contre beaucoup de femmes sont dans le milieu associatif c’est assez paradoxal. C’est-à-dire qu’il y a une grande implication du monde féminin dans les associations par contre elles sont peu nombreuses à prendre les responsabilités de l’association. On peut trouver différentes explications. J’en donnerai une : peutêtre qu’entre le travail et s’occuper de son parcours personnel en tant qu’être humain, c’est compliqué, ça prend du temps. On le dit bien, et c’est souvent vrai, une femme occupe deux emplois, c’est-à-dire qu’elle fait son travail, elle revient à la maison, elle fait un deuxième emploi, alors lui rajouter
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un troisième emploi n’est pas forcément facile à mettre en œuvre. Un autre élément important est de savoir si cela n’a pas aussi un impact sur la difficulté que nous avons à amener des jeunes filles dans les associations. Alors ce n’est peut-être pas vrai partout, mais je crois aussi beaucoup au phénomène de la monoparentalité, et je crois que la problématique qui existe aussi sur la multiplicité de cette monoparentalité amène aussi des contraintes pour les femmes. J’estime que la véritable richesse ce sont les hommes et les femmes qui se passionnent par rapport à leurs associations et ce sont eux qui vont être véritablement les meneurs, nous autres politiques, on aura beau insuffler, dire « y’a qu’à, faut qu’on », « il faudrait que » etc., il n’empêche que s’il n’y a pas à la base, la volonté de quelques personnes de s’impliquer de manière forte dans une association, je crois qu’on pourrait faire des débats et des débats, on n’y arriverait pas. Je reste persuadé qu’il y a deux éléments, tout d’abord, c’est l’école. Je suis toujours un défenseur pur et dur de l’école. Ensuite, l’important, c’est l’implication des adultes. Et je suis intéressé par le parcours de M. El Baja, savoir comment est-ce que, justement, il a réussi à travailler au sein de son association dans ce quartier-là et à faire que son association soit aujourd’hui l’une des plus fortes au niveau féminin. Claude Lechartier : Je soupçonne Monsieur Place d’avoir lu mes notes avant ! Cette question que je voulais poser est l’enchaînement auprès de Nedjid et la question qui vient tout naturellement. Nedjid, quel constat avais-tu fais pour mettre en œuvre et développer cette activité-là ? Et comment tu t’y es pris pour que ça connaisse l’ampleur, la rigueur et le sérieux que l’on connaît ? Est-ce que tu peux répondre à ces questions ? Nedjid El Baja : Bien sûr. Bonsoir à tout le monde. J’ai intégré le club en 2000 et j’étais déjà venu avec cet objectif en tête de développer une section
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féminine. Pourquoi ? Parce que dans mes valeurs, j’ai toujours combattu toutes les discriminations et hélas je savais que ça n’allait pas être facile au début. Mais comme ça faisait parti de mes objectifs prioritaires j’ai donc mis ça en place en rencontrant certains parents qui m’amenaient leurs filles. Je pense entre autres à Barbara qui est l’exemple type du club, puisqu’elle est arrivée au club à l’âge de 8 ou 10 ans et est toujours là ... tant mieux !
« Etablir une relation de confiance avec les parents… » Claude Lechartier : on peut rappeler les titres de sa courte mais néanmoins honorifique carrière sportive ? Nedjid El Baja : Oui. Barbara a été vice championne de France cadette, championne de France junior et maintenant elle est cadre technique et bientôt maman et je me réjouis personnellement de l’accompagnement que j’ai pu avoir avec Barbara et son implication aujourd’hui. Je reviens sur ce que vous disiez tout à l’heure, l’implication des filles : on peut compter dessus, une fois qu’elles sont impliquées, on peut les solliciter à tous les niveaux et c’est ça qui est intéressant. Par contre à la base il faut vraiment les accrocher et avoir une relation de confiance au niveau des parents. Ça n’a pas été évident tout au début. Quand j’ai voulu mettre en place des activités pour les filles, j’avais les préjugés de quelques garçons qui n’acceptaient pas la présence des filles et puis, au fur et à mesure, j’ai instauré cette politique et puis ça a adhéré. Aujourd’hui j’en suis très content parce que maintenant, ce sont les garçons qui informent des filles, d’autres filles en dehors du quartier, pour venir pratiquer au sein du club. D’ailleurs Denis Lafont qui est président du comité de boxe, m’apprend qu’au niveau du pourcentage, il y a un taux important de filles au club.
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Président du comité de boxe : Oui ! Au Boxing club des Fontaines il y a quand même 32% de filles, je pense que c’est un bon exemple et d’ailleurs dans le département d’Indre-et-Loire, c’est dans ce club qu’il y a le plus de filles. Nedjid El Baja : Oui, et également par rapport à la fédération. Mais les chiffres, je les suis moins car je suis plutôt un homme de terrain. C’est ce que je me suis permis de dire à la ministre lors de la remise des prix « Femmes et sport » ! Parce qu’ils sont tous venus ce jour là avec le football notamment. Ils ont tous disserter pendant des heures, et quand c’est arrivé à nous, on m’a donné le micro, je ne savais pas quoi dire, je me suis tourné vers la ministre et puis je lui ai dit : « Madame Rama Yade, je suis désolé, je ne suis pas Monsieur discours, je suis un homme de terrain ! ». Elle s’est levée et m’a fait la bise, donc ça a été vite fait, j’ai tout gagné ! Claude Lechartier : Merci Nedjid. On va passer le micro à ta voisine que je vais présenter brièvement parce qu’il y aurait deux pages à dire. Myriam Chomaz qui, au-delà de son activité professionnelle d’éducatrice spécialisée, directrice de structure, a aussi un parcours sportif exemplaire au niveau de la boxe, championne du Monde, championne d’Europe combat, championne d’Europe combat Paris Île-de-France, boxe anglaise en combat amateur, 50 combats et 36 victoires… Je ne vais pas lister tout votre palmarès, vous m’en excusez. Vous exercez une mission importante au sein de la fédération de boxe anglaise et ce qui nous intéresse, c’est de vous écouter sur votre parcours et votre expérience et ce que la fédération développe et poursuit.
« 10 ans en arrière, les combats de boxe étaient interdits pour les filles… » Myriam Chomaz : Bonsoir à tous. Tout d’abord je suis très heureuse d’être là et d’accompagner
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un club qui a été primé au concours « Femmes et sport ». C’est pour nous une grande fierté au niveau de la fédération puisque c’est un concours national. Ce titre on l’avait eu aussi au niveau de la fédération en 2007, on avait été primé pour notre plan de féminisation. Je suis conseillère technique nationale, 1er cadre féminin arrivé à la fédération de boxe anglaise grâce également à un accompagnement aussi de ma reconversion d’athlète par la fédération. Notre plan de féminisation prend en compte justement le constat que les filles sont minoritaires. Si on remonte 10 ans en arrière, les combats étaient interdits pour les filles. On était donc vraiment sous représentées dans cette fédération-là. Il y avait vraiment un très gros chantier à faire, et on est encore en plein dedans. Si on regarde les chiffres, on a 17% de filles licenciées dans la fédération, on a donc encore du chemin à faire. Dans le constat qu’on a pu faire, on a vu qu’il y avait des freins, culturels et historiques. La boxe anglaise est vraiment très ancrée chez les hommes. Des filles qui arrivent dans ce sport, ce n’est pas forcément bien vu : comme sur un bateau, ça porte malheur ! Les hommes ont l’impression de perdre un peu quelque chose quand ils voient une fille sur un ring. On a donc dû combattre un peu toutes ces valeurs-là et communiquer, changer le regard et l’image que les hommes pouvaient avoir sur les femmes. Il y a eu une campagne avec des affiches, on a montré l’équipe de France féminine, on a montré que c’était des filles qui restaient des filles, c’était très important aussi. On a montré qu’on ne recherchait pas à être des hommes, qu’on aimait juste le combat et que l’on souhaitait qu’on nous laisse de la place sur un ring. On a le droit aussi de conquérir des combats et de s’épanouir à travers le combat. Donc ça c’est déjà important. La fédération a lancé cette campagne de communication ainsi que des mini clips qui ont été diffusés à la fédération pour que les licenciés puissent voir que les filles pratiquaient. Parce qu’il y avait aussi
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malheureusement des entraîneurs de clubs, ils ne sont pas tous à l’image de Nedjid, qui n’avaient pas cette volonté de mixité, il y en avait beaucoup qui n’étaient pas vraiment favorables à ce que les filles entrent dans leur club. Voilà pourquoi on a travaillé à ce niveau-là. Puis on s’est dit, pour les filles, il y a la pratique de compétition qui est une chose mais elles ont peut-être d’autres besoins. Donc on a multiplié l’offre de pratiques, proposé l’aéroboxe dans les clubs. L’aéroboxe, c’est une boxe fitness qui correspond aussi à une attente d’une partie des femmes. On va alors plutôt utiliser la salle de boxe comme un centre de remise en forme, mais aussi le sac de frappe, la leçon et puis des cours avec des chorégraphies en musique. Il y a aussi le précombat, qui est aussi une forme de combat mais adapté avec des protections faciales et des gants plus gros et une réglementation qui protège aussi un peu plus le boxeur, ce qui correspond aussi à une recherche pour certaines femmes de faire du combat mais sans s’engager complètement. Voilà en ce qui concerne les propositions que la fédération a mis en place. Également, une sensibilisation est effectuée dans les formations des entraîneurs pour leur faire prendre conscience que le public féminin existe, et comment s’y prendre, quelle est la réglementation particulière. Et je pense qu’on a aussi beaucoup bénéficié de l’image positive de l’équipe de France qui a performé assez rapidement. On a eu des filles que vous connaissez peut-être comme Myriam Lamarre qui a eu des résultats en amateur et puis ensuite en professionnelle. Il y a eu un grand combat en professionnel avec Myriam Lamarre et Anne-Sophie Mathis qui ont fait complètement changer la mentalité, et amené à se dire, « ah les filles font aussi du combat ! ». Grâce à ces filles, on a changé un peu tous les regards qu’il pouvait y avoir. Claude Lechartier : On reviendra sur l’évolution et l’adaptation des disciplines sportives par rapport à ces attentes-là. Tout à l’heure Nedjid disait le foot... le foot, eh bien on a de la chance car on a
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Thierry Lise autour de la table. Il est membre du comité directeur du district de football d’Indreet-Loire et a pour mission de développer au sein de la commission du football diversifié, d’autres pratiques, d’autres approches du football. Alors là aussi, un témoignage autour de la nécessité que vous avez ressentie de diversifier l’offre de pratique au niveau du foot et peut-être faire référence à des choses que l’on suit de très près au pôle jeunesse et sport de la cohésion sociale, c’est le futsal, les actions dans les quartiers…
Favoriser la mixité dans le domaine du foot Une passerelle entre le foot fédéral et le foot de rue : le futsal… Thierry Lise : Bonsoir. Je vais vous expliquer un peu la genèse du projet, on s’est aperçu que notre football fédéral avait de plus en plus de mal à capter les jeunes des quartiers, garçons ou filles, et pourtant le football de rue est en plein essor. Le foot, c’est vraiment la passion numéro un. Je vais vous lire quelques petits passages, parce qu’on a pris des témoignages de jeunes filles. Alors à la question : « quelle est la différence entre le foot des quartiers et le foot des clubs ? », je vais vous dire ce que l’une d’entre elles a répondu : « le foot traditionnel se joue plus en équipe, dans le foot de rue, les passes sont plus nombreuses et surtout très tactiques, très vite je me suis retrouvée à l’aise même si au début il y avait beaucoup de choses à assimiler, les garçons m’ont acceptée parce que techniquement ils étaient impressionnés, après ils m’ont encouragée ». Donc on avait fait un constat et il fallait essayer de trouver un remède. On a trouvé une passerelle qui fait le lien entre le foot de rue et le foot fédéral, c’est le futsal. Le futsal met vraiment en valeur le joueur technique et donc on a demandé à cette jeune fille : « que pensestu du futsal ? ». « C’est super, il faut savoir jouer
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technique, rapide, c’est un jeu complètement différent du foot traditionnel ». Ce constat fait, on s’est dit qu’il fallait proposer un projet ouvert aux licenciés et ou non licenciés et favoriser la mixité dans ce projet. La mixité, on ne voulait pas la forcer, on ne voulait pas l’imposer, on ne voulait pas par exemple imposer une joueuse par équipe, ce n’était pas l’idée, il nous semblait qu’on allait à l’échec. On a essayé de concevoir un projet qui soit attirant et là on a vu toute la nuance qu’il pouvait y avoir entre « jouer au foot » ou « faire du foot ». J’ai quelques témoignages : Zakia, de Jouélès-Tours à laquelle on demande « Et ces matchs au milieu des garçons ? ». Elle répond : « je me débrouille, je sais rester à mon poste, j’essaie de pas trop intervenir, je suis contente, j’ai le niveau pour m’en sortir ». Et c’est vrai que faire sa place sur le terrain n’est absolument pas simple. Un autre témoignage de Daloba : « Alors Daloba, tu joues avec les garçons, comment ça se passe ? ». Elle répond : « avec les garçons je suis goal et je ne sais pas trop pourquoi !». L’après-midi, le référent de l’équipe l’a placée sur le terrain et comme c’est une basketteuse et qu’elle maîtrise parfaitement les déplacements, les garçons l’ont acceptée mais elle est passée par l’épreuve du goal. Claude Lechartier : Alors, outre cette approche, je voudrais savoir comment êtes-vous allés chercher les jeunes filles pour qu’elles passent de l’immeuble au futsal ? Car on a dans la salle plein de représentants de différentes disciplines et autres responsables de diverses associations et c’est un petit peu la question que je posais tout à l’heure à Nedjid : comment on fait ? Faut-il faire du porte-à-porte ? Avoir des réseaux ? Faire de la communication, des clips ? Comme l’évoquait la fédération de boxe tout à l’heure. Comment fait-on au niveau du foot ? Parce que s’il est une discipline qui est très macho, c’est bien le foot !
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Prendre le temps et co-construire avec les centres sociaux Thierry Lise : Tout simplement, on a pris le temps. On est arrivés avec un squelette de projet, on a rencontré tous les centres sociaux avec ce projet et on l’a étoffé ensemble. C’était une espèce de coquille vide avec un projet où on a annoncé qu’on ferait du futsal, qu’on mènerait à bien un projet socio-éducatif et qu’on essaierait de le pérenniser avec un plan de formation. Ça c’était la coquille. Et après il fallait la remplir. Et le déclic je crois que c’est qu’en élaborant ce projet, les encadrantes, les référentes s’y sont intéressées car très vite elles se sont rendues compte que ce projet ça ne serait pas que du foot, qu’on allait aussi l’étoffer et apporter autre chose que le énième tournoi de football. Claude Lechartier : Très bien. Je vais passer la parole à Nadine Lorin, déléguée aux droits des femmes et à l’égalité parce que l’on a entendu plusieurs mots dont un que j’ai retenu en particulier : « la mixité ». Je suppose que cela ne peut pas laisser indifférent.
« Dans les quartiers, les femmes sont des vecteurs de cohésion sociale importants… » Nadine Lorin : Oui, et c’est le thème de ce soir principalement. J’ai écouté tout ce qui a été dit, la démarche de travailler avec des centres sociaux me paraît essentielle parce qu’on ne peut pas parachuter des quotas dans les équipes, ce serait malvenu on n’est pas en politique et effectivement il faut passer par un autre biais. J’ai envie de dire qu’il ne faut pas perdre de vue que le débat de ce soir ce n’est pas que sur les filles dans le sport, mais c’est aussi la cohésion sociale. Et les femmes dans les quartiers sont vraiment des vecteurs de cohésion sociale importants. La réflexion sur les
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familles monoparentales me semble essentielle car il y a beaucoup de femmes seules dans les quartiers, seules avec leurs enfants. Et comme chacun le sait il existe deux sexes, les enfants peuvent être aussi des filles donc il est important de ne pas perdre de vue le rôle des mères et des femmes dans les quartiers notamment sur le volet du sport mais pas que sur le volet du sport. Et là, je pense qu’il y a un enjeu à la fois des associations, des clubs sportifs, des politiques, de tous les acteurs de la politique de la ville puisqu’on est situé sur des quartiers. Je pense qu’il y a un enjeu fort de rentrer dans la politique de la ville par le biais des femmes. C’est une chose qui n’a jamais été essayée dans aucun projet politique de la ville. On dit que les femmes sont invisibles dans le sport mais il n’y a pas que dans le sport. Elles sont invisibles un peu partout : dans le travail, dans le quartier… J’ai eu une discussion intéressante avec une jeune fille dans un quartier il n’y a pas très longtemps qui me disait ne pas avoir pu accéder à un dispositif pour permettre à des jeunes de partir en vacances parce que c’était plein. Et renseignements pris, elle a vu qu’il n’y avait pas beaucoup de filles dans ce dispositif, qu’il y avait beaucoup plus de garçons. Un éducateur lui a expliqué que le dispositif était essentiellement pour des jeunes qui avaient de grosses difficultés, notamment des difficultés avec la justice etc. et la conclusion de la jeune fille a été de me dire : « Eh bien avec des copines on va brûler des voitures et comme ça on partira en vacances ! ». Évidemment je l’ai dissuadé de brûler des voitures mais on voit bien quand même qu’il y a un vrai problème et ce qui a été dit lors des informations que nous avons eues au cours de cette soirée c’est qu’effectivement, non seulement le problème c’est qu’elles sont invisibles mais qu’on soutient cette invisibilité en ne s’occupant que de ce qu’on voit et de ce qui gêne dans les quartiers. Les garçons occupent beaucoup l’espace public, donc on crée des activités pour les canaliser un peu, pour qu’ils restent plus sages et du coup on oublie ces filles,
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qui rassurez-vous, vont finir par occuper l’espace public car elles commencent à réagir fortement. La violence, malheureusement, monte aussi au niveau des filles, mais je pense que les filles occupent traditionnellement moins de place et dans ces quartiers se sont renforcés ces stéréotypes exacerbés. Elles occupent aussi des places très nettement plus domestiques que les garçons, elles sont beaucoup à l’intérieur et les garçons beaucoup à l’extérieur. Ce n’est donc pas tellement étonnant que le sport soit un miroir fort de cette place traditionnellement réservée à l’un et à l’autre. Et là, je pense qu’il faut une volonté de tous les acteurs notamment en formant les éducateurs sportifs dans leur formation de base au rôle important de la mixité des équipes, des équipes d’encadrements, et pas seulement des équipes sportives. Je pense que c’est essentiel car de toute façon notre société est composée d’hommes et de femmes et l’équilibre c’est ce qu’il y a de mieux pour notre société et je pense que la cohésion sociale se fait aussi par un équilibre entre les garçons et les filles quel que soit le secteur, dans le sport également. Claude Lechartier : je vais passer la parole à Monsieur Foret du Secrétariat général du Conseil interministériel de la ville. Didier Foret : Les solutions viennent de vous tous qui êtes acteurs de terrain sans fausse modestie aucune. Je suis ravi d’être ici et j’y apprends beaucoup de choses intéressantes et je reviendrais vers nombre d’entre vous car je démarre une action sur les éducateurs sportifs dans les communes et il y a un certain nombre de gens vers lesquels je reviendrai pour compléter mon travail. Mais j’insiste sur le fait que c’est surtout vous qui détenez les clés de la réussite. Je suis moi-même à titre personnel responsable d’une association sportive en SeineSaint-Denis et je sais combien c’est par le terrain que passe un certain nombre de solutions. Je vous encourage donc à continuer à les interroger.
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Claude Lechartier : Je vais à présent passer la parole à Richard Alloncle qui travaille au service des sports de la ville de Tours et qui a été missionné pour développer au niveau de la salle Clotaire Blanchart un certain nombre d’activités, là encore une ouverture certaine vers des pratiques féminines. Richard, comment avez-vous enclenché, mis en œuvre et développé cette stratégie qui, on le sait, conduit aussi à une réussite ?
« La présence d’une femme professeur a facilité l’accès des femmes aux cours collectifs… » Richard Alloncle : La salle Clotaire Blanchart a rouvert ses portes en 1998. A l’époque trois personnes dont deux emplois jeunes étaient responsables de l’ouverture de la salle. Celle-ci était réservée aux garçons pour la pratique de la musculation notamment. L’année suivante a vu le jour un cours de gymnastique avec un éducateur spécialisé. Les garçons s’étaient approprié la salle et après la formation d’une collègue féminine au brevet d’État des métiers de la forme, on a commencé à proposer des cours de fitness. Comme on le sait, dans ces cours il y a très peu de garçons. Avec la présence d’une femme professeur, c’est vrai que ça a facilité l’accès des femmes aux cours collectifs. Je suis arrivé progressivement à partir de 2004 et à plein temps à partir de 2006 pour continuer à développer ces cours de fitness et multiplier les cours que ce soit avec des cours de step, de renforcement musculaire ou autre, avec la notion d’entretien. Après, on a essayé de proposer quelques petits challenges. Nous avons tenté d’aborder le principe de mixité du côté de la musculation où les garçons jusque là se mesuraient notamment et principalement avec leur performance : on a essayé de proposer aux filles qui s’intéressaient à la musculation, des challenges avec des équipes mixtes. L’idée était qu’il
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y ait au moins une fille par équipe et de mesurer les performances. Et de la même manière on a essayé d’intéresser les garçons à venir participer à des challenges marathon fitness. Au cours de ces marathons les cours se suivent et s’enchaînent un peu plus rapidement de façon à essayer d’inviter les garçons à venir participer un peu plus souvent au cours collectifs féminins. Inversement, on invite certaines filles intéressées par la musculation à franchir le pas. C’est un peu comme ça que nous voyons la mixité de la pratique à la salle Clotaire Blanchart. Claude Lechartier : merci beaucoup, je me tourne vers la salle, est-ce qu’il y a des observations ?
« En tant que dirigeants, penser la mixité, c’est au cœur des choses… » Cadre technique de handball dans le département : j’ai eu des missions de chef de projet sur la filière féminine dans la ligue du Centre et aujourd’hui lui je suis membre du bureau directeur du club de « Chambray Touraine Handball » qui évolue en D2 féminine. C’est un club mixte, mais le projet est plutôt porté sur les féminines. Le sport féminin m’intéresse depuis de très nombreuses années, tout comme « penser la mixité ». Et en ce qui concerne la mixité, il y a plein de choses à faire, auprès des parents, de la famille et c’est très important. Et pour autant nous avons peu d’impact sur eux, on en a un petit peu mais vraiment très peu. Je pense que nous en tant que dirigeants, penser la mixité, c’est au cœur des choses. J’ai monté il y a quatre ans une section sportive à la Rabière, quartier dit sensible à Joué-lès-Tours. Cela n’a pas été simple, mais on y est arrivé. On a fait un travail de partenariat avec le collège de la Rabière et je tiens à dire que ce travail a été fait avec l’enseignante de la Rabière qui est extraordinaire. Les ponts entre les clubs et l’enseignement sont vitaux, surtout pour les clubs.
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On a donc monté une section sportive et les filles de la 6ème à la 3ème se sont investies. Je fais du handball. Dans les quartiers, le foot, on connaît, mais le handball, pas vraiment. On a beau être champions du monde, champions d’Europe, champions olympiques, en filles, en garçons mais pour autant tous ces titres n’ont pas d’impact dans les quartiers. On est donc arrivés avec le projet de section handball auprès des filles et elles ont adhéré. Si bien qu’elles ont obtenu le titre de championnes départementales d’UNSS, ce qui ne s’était jamais vu à la Rabière, elles étaient connues pour autre chose que pour gagner des titres. Donc c’était formidable, une vraie réussite humaine avant que ce ne soit une réussite sportive. Et ensuite elles sont rentrées dans les clubs. Ça a été difficile, on les a accompagnées en mettant notamment en place un bus et en travaillant en partenariat avec le principal du collège. Claude Lechartier : Quand vous dites difficile, quels étaient les types de blocages en particulier ?
« Ce projet on l’a fait pour les filles et uniquement pour les filles… » Cadre technique de handball dans le département : Les parents n’emmènent pas les filles à l’entraînement, les garçons on peut les emmener parce qu’ils sont bons, mais les filles, non. C’était ça au début, mais il s’avère que par la suite, on va voir que ce blocage n’a plus de résistance mais c’était ça le premier blocage. Le collège a donc travaillé avec nous. Ils ont mis en place un bus qui allait du collège à la sortie des cours jusqu’au club de Chambray. Les filles prenaient le bus et elles ont automatisé ce déplacement. Elles ont automatisé le fait qu’après le cours elles allaient à l’entraînement. Ce sont des choses qui ne se faisaient pas : « aller à un entraînement », « on va dehors mais on ne va pas à l’entraînement », donc elles ont automatisé ça. Elles y ont pris plaisir
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et maintenant elles viennent elles-mêmes. Le bus existe toujours le vendredi, mais il y a d’autres entraînements et elles viennent à l’entraînement. Ce que je trouve important, pour penser la mixité, est ce projet que l’on fait pour les filles et uniquement pour les filles. Les garçons se sont dits « elles sont championnes départementales à la Rabière et nous on veut bien faire du handball ». On a dit non ! Ce projet, il appartient aux filles et ça, je peux vous assurer que les filles étaient très fières que pour une fois un projet leur appartienne à elles et à elles seules. Il n’est pas question de faire ici une dichotomie entre filles et garçons bien entendu, mais dans ce collège on a fait le choix que ce sport-là appartiendrait aux filles et uniquement aux filles et donc les filles s’investissent parce que c’est leur sport et qu’en plus elles réussissent plutôt bien et pour l’instant on a des résultats. Alors estce qu’on va les pérenniser sur plusieurs années ? Au bout de quatre ans, elles sont encore là ! On en a une qui joue en D2 avec nous. Donc voilà, c’est une vraie réussite. Donc penser la mixité, je le vois aussi comme ça ! Claude Lechartier : merci pour votre témoignage, y a-t-il d’autres interventions dans la salle parmi les différents responsables, il y a beaucoup de responsables de différentes institutions, clubs et associations ? Est-ce que d’autres personnes veulent intervenir ?
USEP, UNSS…un rôle à jouer pour l’accès aux valeurs du sport et à la mixité Responsable de secteur du centre social Maryse Bastier : il y en a d’autres effectivement au niveau club, région. Je pense que quand on a démarré la séance, Monsieur Place a un peu montré du doigt ce que nous pensons dans l’ensemble du corps disciplinaire. C’est l’école ! C’est vrai
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que l’école sert aussi de grande base parce qu’à l’époque, je me souviens, en termes de mixité, et qui était intéressant à développer, c’était les contrats bleus, les « ARVEJ » etc., ça marchait bien. Ce qui était intéressant, c’était que nous, acteurs de terrain, on allait dans l’école et après, on revoyait ces enfants-là qu’on pouvait ensuite envoyer vers les clubs etc. et à travers nos structures. Et là, il y avait quelque chose d’intéressant. Et je voulais rebondir à propos de l’USEP, parce que dans l’histoire, peut-être qu’il y a Monsieur Julien que vous connaissez certainement, qui est à la retraite maintenant, qui était enseignant et je pense que si maintenant je fais ce métier-là, c’est grâce à ce qu’il nous a transmis dans le cadre de l’USEP. C’était un monsieur qui faisait du sport, qui faisait du basket au TBC, je ne sais pas s’il est toujours dirigeant, c’était quelqu’un de très sévère mais ceci dit, le mardi soir il nous emmenait en voiture, on allait faire des matchs de basket de rugby, etc. Et ça, ce sont des souvenirs extraordinaires, avec d’autres personnes que j’ai revues par la suite, des élèves, on a discuté un peu de tout ça, et on a un souvenir de ce monsieur qui nous a transmis des choses, des valeurs que maintenant on souhaite transmettre à d’autres. Ça, c’est mon histoire, mais je crois qu’il a donné un peu toutes ces petites choses, et je pense qu’avec l’USEP, si on démarre de bonne heure, à l’école, avec des acteurs, les jeunes reçoivent ces valeurs. Il peut aussi y avoir les éducateurs qui exercent notamment dans une collectivité. Il ne faut pas oublier ces acteurs, c’est-à-dire les collectivités proches. Il y a aussi les centres sociaux ou les MJC. Derrière ces structures, on a des passerelles parce que maintenant on n’a plus de liens avec les parents, on les connaît, mais maintenant c’est difficile d’avoir des liens avec les parents comme on avait auparavant grâce au fait qu’on intervenait dans les écoles. Alors après, pour les collégiens, j’ai été un petit peu déçu par rapport à l’UNSS où l’on a voulu percer un petit peu par rapport à la boxe anglaise, boxe française
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aussi. On avait des jeunes de quartiers, donc on est allé voir les enseignants, mais le problème dans le cadre de l’UNSS c’est pour emmener les gens aux championnats de France, rugby, football etc., le problème c’est que si les enseignants sont footballeurs ou rugbyman, eh bien ils n’emmènent que les rugbyman ou les footballeurs, pas les autres. Nous, on insiste pour que les enfants s’inscrivent à l’UNSS, on joue le jeu en tant qu’acteur social, on dit « prenez des licences ! », « il y a de la boxe française et de la boxe anglaise ». Ils prenaient leur licence, comme ça, à un moment donné ils pouvaient partir en déplacement, en compétition. On est allé voir les profs en leur disant : « ils se sont inscrits, ils sont qualifiés pour aller faire les championnats de France à Besançon » Eh bien il n’y a eu personne pour les emmener parce que les profs partaient sur une autre structure. Donc rien n’était fait pour qu’en fin de compte tous les enfants puissent accéder bien que les inscriptions aient été libres. Donc j’ai pris un congé sur mon temps de travail et je suis parti à Besançon accompagner les jeunes parce que ça me plaisait aussi il est vrai ! Mais je trouve que le système est mal fait parce qu’à un moment donné on encourage les gens à faire du sport et à un autre moment, quand il y a une échéance, qu’ils sont qualifiés, on ne peut plus parce qu’on va choisir, on va privilégier un sport plus qu’un autre. Et je tiens à dire qu’il y avait des filles avec nous. Je vais arrêter de causer sur le constat que sociologiquement, pourquoi les filles ? Parce qu’il y a un gros travail de fait quand même. Claude Lechartier : je trouve que c’est bien que tu poses la question, tu dis, sociologiquement, pourquoi les filles ? Responsable de secteur du centre social Maryse Bastier : cette question commence à évoluer depuis l’après-guerre et je trouve qu’on est plutôt pas mal situé, vu comment les femmes sont parties au niveau du sport. Il serait intéressant
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de voir où on en est rendu aujourd’hui, car il y a eu un gros travail de fait aujourd’hui en France. Il y a certaines politiques qui ont fait que, on parle de la boxe, boxe anglaise boxe française, par exemple. Depuis longtemps la boxe française accueille les femmes. M. Leroux, DTN de boxe française, pourrait mieux en parler que moi mais c’est vrai qu’il y a une évolution extraordinaire. Il y a une problématique certes au niveau des jeunes filles dans les quartiers mais ce n’est pas une problématique insurmontable.
L’École, c’est la base de notre société… Jean-Jacques Place : Je voudrais ré-intervenir non pas par rapport à ce que vous venez de dire, mais ce que vous venez de dire justement m’amène à une autre réflexion. J’en reviens à l’école parce que je considère, comme beaucoup d’entre vous, très certainement, que c’est la base même de notre société. C’est là que beaucoup de valeurs sont véhiculées et ça permet à ces jeunes d’essayer de voir quelle société ils auront plus tard. Il y a une réflexion que je me fais aujourd’hui et que je n’aurais pas eue certainement il y a une vingtaine d’années. Comme beaucoup le savent, ma mère était institutrice, je dis encore institutrice vous m’excuserez pour les professeurs des écoles mais il y a un élément qui était important dans l’ancien temps, c’est que au niveau des personnes que les jeunes avaient en face d’eux, il y avait une vraie mixité d’hommes et de femmes. Or aujourd’hui, dans les écoles élémentaires, on n’y peut rien, c’est une réalité, nos élèves ont environ 80% de femmes en face d’eux avec tout ce que cela implique et notamment lorsque l’on parle du sport. Et on va revenir au sport enfin disons au sport féminin, on a des difficultés d’une manière globale à essayer de donner la vraie valeur du sport au niveau de l’éducation. Ça, c’est déjà le premier point, que ce soit féminin ou masculin, je dirais le sport a-t-il sa valeur aujourd’hui ? Oui, entre nous, parce que
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évidemment on baigne dedans et on aime ça. Mais au niveau de la société, je ne suis pas certain que ce soit le sport qu’ils mettent en premier, encore moins aujourd’hui par rapport à certaines images où il y a certaines non-valeurs qui sont véhiculées. La deuxième chose, c’est que justement cette féminisation de l’école élémentaire amène aussi un élément important d’où le fait que dans les grandes villes les éducateurs sportifs scolaires sont importants parce qu’ils amènent au monde féminin je dirais un savoir-faire, dans le sens professionnel du terme. Et je crois que peut-être, là aussi, il peut y avoir un frein par rapport à cette image que peut donner le sport et la féminité. C’est une réflexion, et je la prends comme telle. Et puis le troisième point, vous parliez tout à l’heure des jeunes filles et des sports pratiqués, là par contre je vous rejoins. À l’heure actuelle on est vraiment très loin de la féminisation du sport et j’en veux pour preuve que, ne serait-ce que dans les fédérations, dans les assemblées générales où je vois beaucoup de présidents de clubs, la réflexion que je me suis faite c’est qu’il n’y a pas beaucoup de femmes comme présidentes de fédérations sportives. Claude Lechartier : Effectivement, cette semaine, on recensait avec Jean Bergeon, Président du CDOS, le nombre de présidentes de comités sportifs départementaux en Indre-etLoire et on est arrivé à 4. 4 femmes sur combien de disciplines ? Sur 70 disciplines. Il y a le basket, la gymnastique, l’aéronautique et l’UFOLEP, qui ont des présidentes.
Il y a un distinguo à faire entre le sport et le jeu… Témoin de la salle : Juste un petit témoignage. Tout à l’heure vous avez parlé de la réussite du Boxing club des Fontaines. A côté de ça, il y a un club de football aux fontaines également. Et parallèlement, ce n’est pas une réussite mais un
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échec. Ça n’a pas duré longtemps, deux ans je crois, et il faut qu’on comprenne ce qui n’a pas fonctionné et les raisons de cet échec. Le club avait été créé avec un autre club de garçons et rattaché à celui-ci, il y avait un président homme. Cela confirme ce que nous venons d’entendre précédemment. Et en plus, l’échec est venu aussi un petit peu du fait que le club des garçons n’avait pas de mixité et il y avait des soucis. Quand les garçons jouaient à l’extérieur, il y avait toujours des problèmes, du racisme etc. Et quand le club de garçons s’est dissout, les filles sont parties aussi. C’était vraiment une expérience éphémère mais intéressante, les filles venaient de plusieurs villes environnantes. Un autre élément que je voulais aborder avec la sociologue, quand on parle de sport, on oublie de dire qu’il y a un distinguo à faire entre le sport et le jeu. Je me rappelle que j’avais un professeur, qui était sociologue et qui disait que le sport amène toujours à la compétition. Par contre le jeu, et c’est là que je voulais en venir, ce n’est pas la compétition, c’est le loisir. Donc en tant que responsables d’une association sur le quartier, on va plutôt encourager le jeu dans les centres socioculturels. Et j’ai envie de dire, parce que je me rappelle ma jeunesse, que ce qu’on appelle les jeux scolaires, cela vous dit peut-être quelque chose, à travers le jeu scolaire, ces jeunes, plus tard, rejoindront peut-être un peu les clubs sportifs.
« Les jeunes filles se servent du domaine scolaire voire universitaire pour sortir de ce qu’elles appellent elles-mêmes un ghetto… » Représentant de la direction des sports du conseil général de Loire-Atlantique : Je vous donne quelques éléments pour compléter les informations qui ont été données. Effectivement, toutes fédérations françaises confondues et à
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l’heure où je vous parle, il y a 107 hommes qui dirigent les fédérations pour 7 femmes seulement, il faut le souligner. Ça laisse rêveur quand même, ou alors c’est en voie de disparition. Par contre je viens infirmer un propos, je suis en LoireAtlantique et je m’occupe de tous les comités sportifs et je vais rebondir sur ce que vous disiez par rapport à la féminisation de l’enseignement. En Loire-Atlantique on a une chose un petit peu particulière, on a un corps d’enseignement extrascolaire qui s’appelle « l’animation sportive départementale » où on a effectivement 47 animateurs qui travaillent pour des gamins de 8 à 12 ans et notamment dans les écoles, qu’elles soient publiques ou confessionnelles. Cette petite satisfaction mise à part, on constate que l’USEP a 9105 gamines qui fréquentent leurs activités et quand elles passent dans le domaine du secondaire elles descendent à 5350. On a donc le phénomène inverse de ce que vous disiez tout à l’heure. On a une déperdition quand on passe à l’UNSS. Je n’en ai pas d’explication mais j’ai simplement ce chiffrelà. J’ai une question à l’attention de Madame Guerandel. Dans la ville de Nantes et dans les quartiers difficiles de la ville de Nantes, bien que le conseil général n’en soit pas gestionnaire (la ville de Nantes avec sa municipalité à une gestion autonome du sport), le conseil général n’intervient pas dans les villes de plus de 10 000 habitants. Nonobstant, les jeunes filles se servent du domaine scolaire voire universitaire pour sortir de ce qu’elles appellent elles-mêmes « un ghetto ». Par voie de conséquence je vous pose la question : « Est-ce que le phénomène de la pratique sportive tout aussi minime soit-il dans les pratiques féminines est également un vecteur pour sortir du quartier ? Est-ce que vous avez mesuré, notamment en pourcentage, ce qui ferait que ces jeunes filles, ces jeunes femmes ou mêmes étudiantes, pratiquent une activité sportive quitte à aller pratiquer hors quartier ? Est-ce que vous l’avez mesuré ? » Et, autre petite question, « Est-ce que dans les analyses que
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vous avez faites, quand on parle de la petite fille qui est licenciée ou de la femme qui est licenciée, est-ce que vous êtes en capacité de mesurer les conséquences que ça a sur la femme à travers les différents âges que sont les nôtres ? ».
« La féminisation du sport est à relativiser même si effectivement elle existe… »
Carine Guerandel : Est-ce que je peux me permettre de revenir sur la question de la féminisation du sport et du grand effort qui est fait depuis l’existence du sport ? Je serais beaucoup plus nuancée par rapport à cela et je tiens quand même à rappeler que le sport a été créé par et pour les hommes, historiquement parlant. En fait, en partant de zéro, il semble normal qu’une féminisation paraisse extrêmement conséquente. Maintenant, quand on s’intéresse aux taux effectifs, on observe qu’en 2003, moins de 25% des fédérations sportives agrées par le Ministère des sport (soit 6 fédérations) sont investies majoritaire ment par des femmes. Parmi ces fédérations seulement trois d’entre elles dépassent le taux de 60% de pratiquantes. A mon sens, la féminisation du sport est quand même à relativiser même si effectivement elle existe et qu’elle a eu un essor considérable durant le XXème siècle. Par rapport à la question du jeu, un ensemble de travaux montrent en effet que le jeu ne se confond pas avec le sport caractérisé par la compétition, des institutions, des calendriers, des records… Certes, conformément à leur socialisation sexuée, la modalité du jeu peut, peut-être, davantage attirer les filles. Après, se pose la question de savoir pourquoi la compétition ne serait que l’apanage des garçons. Si l’on tient compte du fait que la société, et plus spécifiquement le monde professionnel, se base essentiellement sur cette idée de compétition, préserver ou garder à distance les filles de ce système, ne serait-ce pas participer à les éloigner
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des jeux de pouvoirs du marché professionnel par exemple ? On peut se poser la question. On peut effectivement avoir un regard critique sur le fonctionnement de la société prônant les notions de productivité et de compétition. Cependant, il faudrait que les normes de non compétitivité soient aussi celles proposées aux garçons.
« Sortir du quartier par le sport et par la réussite scolaire… » Par rapport à la question sur la possibilité de « sortir du quartier par le sport » et « par la réussite scolaire », ce que je peux dire par rapport à mon enquête, c’est que les filles les plus sportives sortaient du quartier et obtenaient de bons résultats scolaires. Je n’ai pas rencontré de jeune fille extrêmement sportive et performante et qui, à un moment donné, présentait une trajectoire scolaire marquée par l’échec ou la déscolarisation. Concernant la question : « Peut-on mesurer les conséquences sur les femmes aux différents âges ? », je ne peux pas répondre à partir de mon travail. Mais il existe des travaux qui appréhendent notamment la question de la construction de la féminité des sportives et le paradoxe dans lequel elles se trouvent : être reconnue comme une sportive performante et en même temps être considérée comme une femme. Effectivement la féminité ne va pas avec l’affrontement, le muscle. Les femmes doivent à la fois être performantes et féminines afin de ne pas subir de stigmatisation. Si elles valorisent le pôle sportif, on remet en cause leur identité de femme en parlant négativement de leur apparence ou de leur sexualité. Si elles choisissent le pôle de la féminité, il y a des chances que les performances sportives en pâtissent.
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« La question de l’espace et des infrastructures… » Ensuite je voulais revenir sur ce qui a été dit au tout début, que je trouve très important : c’est la question de l’espace et des infrastructures. J’ai pu observer que les cours de danse hip-hop dans le quartier dans lequel j’étais, au niveau de l’association, se faisaient dans un gymnase qui était au cœur du quartier. Il y avait beaucoup de passage et ces jeunes filles étaient totalement contrôlées et surveillées. On avait des jeunes filles habillées de noir, pantalons, manches longues. Elles étaient sur le rapport au corps, sur le corporel dans l’espace intime, avec pour conséquence : peu d’expression, peu de bruit, très scolaire. A l’inverse, paradoxalement, l’association de danse qui se faisait par l’intermédiaire du collège et donc qui se faisait dans des salles fermées le mercredi après-midi où personne ne venait voir, quand on va observer, ce sont des gamines qui hurlent, qui taquinent leur prof, qui se maquillent, qui mettent des paillettes et qui s’habillent d’une autre manière, on voit le piercing au nombril etc. etc. Donc un rapport au corps totalement différent parce qu’elles n’étaient pas du tout surveillées. Et en même temps, c’était quelque chose d’extrêmement valorisant pour les parents car quand on interroge les parents, ils sont très fiers de dire « ma fille est à l’école tout le temps même quand elle fait du sport », et donc il a ce rapport à l’institution scolaire extrêmement important pour eux. Finalement, des choses très différentes se passaient sur une même pratique : elles n’avaient vraiment pas la même manière de pratiquer. Alors se posait la question de l’infrastructure et de la manière dont les fillettes pouvaient pratiquer. A cela, je voulais rajouter la question des horaires, d’où le problème des infrastructures. Quand il n’y a pas vraiment d’infrastructures sur un quartier, même s’ils sont assez bien dotés à ce niveau-là, quand il y a beaucoup de pratiques sportives, beaucoup
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d’offres sportives, que ce soit pour les adultes, pour les femmes, il faut partager et trouver des créneaux horaires dans les salles. Et parfois, quand on dévolue un créneau horaire le soir tard pour les filles et qu’effectivement les parents ne peuvent pas les accompagner aux pratiques sportives, elles ne viennent pas ou elles ne viennent plus parce la nuit, l’hiver, et c’est ce que j’ai pu observer, on ne veut pas que les filles sortent et rentrent tard alors que le mercredi après-midi ou le samedi après-midi c’est beaucoup plus facile. Claude Lechartier : Je voulais bien évidemment passer la parole à Mme Chomaz puisqu’on a parlé de sport de haut niveau, de féminité, de responsabilité, de cadre, il n’y a que vous qui puissiez répondre.
« L’ascenseur social qui peut être fait dans le sport… » Myriam Chomaz : Je voulais rebondir à propos de l’ascenseur social qui peut être fait dans le sport et sur le recul qu’on a un peu, nous, en équipe de France. On a une équipe de France féminine qui est vraiment dans la double performance puisqu’on a notamment une fille qui est de votre région, qui suit des études de médecine en même temps qu’elle a été médaillée aux championnats du Monde et championnats d’Europe. Il y a eu un très beau reportage qui a été fait sur cette boxeuse et que l’on peut revoir dans l’émission sept à huit. Elle est plutôt issue d’une famille des quartiers populaires, monoparentale aussi. Cette jeune fille est vraiment dans l’excellence sportive et en même temps à un très haut niveau d’études et ce n’est pas une exception puisqu’on a une deuxième fille en équipe de France qui est dans une classe supérieure en médecine, et qui est performante à ce niveau-là. On a aussi trois filles qui sont à Sciences-Politiques. Je dirais donc qu’on a une équipe de France plutôt « doublement » performante ! C’est vrai que le fait d’être athlète de haut niveau fait qu’il y
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a des portes qui s’ouvrent, cela permet de sortir. On est athlète de haut niveau donc on sort un peu du lot et on a des propositions qui arrivent. Je crois que les filles sont battantes sur le ring et aussi à côté. Elles ont envie de prouver plein de choses, surtout au niveau des féminines. C’est un public un peu différent de l’équipe de France masculine, mais, et c’est ce que je disais tout à l’heure, ces filles sont des pionnières, elles sont en train de véhiculer une image de double réussite et ça, c’est très important pour certaines autres filles issues des quartiers : que des filles arrivent vraiment à choisir leur vie. Directeur régional adjoint de l’UNSS Région Centre : Je voulais répondre à plusieurs choses sur des constats, des informations sur notre structure. Nous sommes très privilégiés car grâce à l’EPS que nous défendons becs et ongles parce que c’est un gage d’égalité entre garçons et filles au niveau du sport. Nous défendons cette matière qui doit rester une matière principale. Seconde chose, nous sommes privilégiés car on a des gamins et des gamines en face de nous, et on peut tisser un réseau, de relations de manière très facilitée pour les faire venir ensuite sur une association sportive. Trois axes dans cette association sportive : le premier, c’est la compétition, qui maintenant ne regroupe que 30% de nos licenciés sur l’académie OrléansTours. Nous avons 38 000 licenciés et nous n’avons qu’un tiers seulement qui fait de la compétition sportive. Pourquoi ? Ça tient au deuxième pôle, le pôle animation. Le pôle animation propose le jeu sous toutes ses formes. Ca va du raid jusqu’au tournoi avec des activités diversifiées : futsall, Beach volley, rugby sur plage etc. Ce sont des animations qui rejoignent un peu le côté touristique. Par exemple, dans le département d’Indre-et-Loire, un des pôles important des lycées professionnels, c’est de faire connaître aux filles la Loire à vélo, c’est d’aller sur une structure d’escalade, c’est de faire de l’aquagym ou de la Capoeira. Et j’en reviens à ce
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que je disais tout à l’heure, une ouverture, une découverte sur tout ce que la ville ou le quartier peut proposer en termes d’activités. Le troisième pôle, c’est le pôle de la responsabilisation, des jeunes officiels, on en est très fiers parce que pour nous, une équipe c’est forcément un arbitre jeune. Directrice départementale de l’UNSS en Indre-et-Loire : Au niveau des jeunes officiels il y avait 1100 jeunes officiels l’an passé et 400 qui ont suivi une formation d’arbitre. Directeur régional adjoint de l’UNSS Région Centre : Et je compléterai par le constat que c’est pratiquement équilibré, qu’il y a presque autant de filles que de garçons. Autre remarque, que je souhaitais formuler, c’est sur le passage du nombre de licenciés USEP en 6ème au nombre de licenciés UNSS. Le premier constat c’est que partout où l’USEP fonctionne bien, partout ou il y a des éducateurs municipaux qui interviennent, on est riche en licenciés dès l’entrée en 6ème, ça c’est très clair. Ce qu’il faut savoir, c’est que lorsqu’une école est affiliée à l’USEP, tous les gamins de l’école sont licenciés, tandis que la licence UNSS est sous l’égide du volontariat, donc il y a de la déperdition. Par contre, ce qui explique la déperdition entre le nombre de licenciés que l’on a en 3ème quand il passe en 2nde, c’est le même créneau, on observe le même phénomène en club. Quand on passe de la catégorie des minimes aux cadets, quand on passe de la 3ème à la 2nde, on a une grosse déperdition, on perd pratiquement 30 à 40% de licenciés. Pourquoi ? Eh bien tout simplement parce qu’un lycée c’est tout sauf un lieu de vie. Et donc on en revient aux expériences qui sont menées maintenant, et qui peut-être vont voir le jour : école uniquement le matin et un rythme de vie un peu plus adapté. Car c’est sûr que les entraînements en club à partir de 15 ou 16 ans, c’est souvent le soir et là on rencontre toujours la même problématique de l’accompagnement par les parents et on retombe
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sur la même problématique pour les filles, sortir le soir etc. Claude Lechartier : Merci, je vais passer la parole au président de la boxe, par ailleurs membre de jury du brevet d’État. Président du CD de Boxe : Je vais vous raconter une anecdote qui m’est arrivée cette année au mois de juin. Je suis officiel pour la fédération, délégué fédéral pour les réunions. Le comité Île-de-France m’a appelé huit jours avant et m’a dit : « on est embêté, il n’y a personne qui veut aller faire un gala de boxe à Villiers-le-Bel ». Finalement, je peux vous dire que ce gala-là a été une réussite parce qu’il n’a été organisé que par des femmes, entièrement. L’organisation, le déroulement, l’avant et l’après, les affiches, tout a été fait par des femmes. Les femmes sont très capables d’organiser, surtout dans le milieu de la boxe. Pour terminer, je voudrais féliciter Nedjid car vous ne le savez peut-être pas, le club des Fontaines a été labellisé Fédération française de boxe pour cette saison et pour les années à venir. Directrice adjointe d’un accueil de loisirs : Nous avons des enfants de 3 à 13 ans. On utilise le jeu pour atteindre des objectifs pédagogiques qui sont, entre autres, ce que vous appelez « les valeurs du sport » : notamment sur le plan de la mixité. Nous avons la mixité entre filles et garçons en accueil de loisirs, nous avons aussi la mixité au niveau des encadrants. Et cette année, nous avons la chance de pouvoir avoir autant de garçons que de filles en tant qu’animateurs. Nous faisons en sorte d’avoir un recrutement avec une mixité de compétences culturelles et sportives. On est là aussi pour transmettre nos savoirs. On ne fait pas du sport comme vous l’appelez, parce que pour nous, pour enseigner le sport, il faut être éducateur spécialisé. On ne peut pas faire du rugby comme
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on le ferait sur un vrai terrain de rugby. On fait de l’initiation sportive, on fait de la balle ovale, on fait du touch rugby, des jeux de coopération avec des sports innovants qui apparaissent, le juke ball , le king ball, le speedmington, le blackmington qui sont des variantes de squash et tennis mélangés. Donc on a des animateurs qui sont compétents sur le terrain et qui amènent une initiation sportive qui draine les mêmes valeurs que celles qu’on trouve dans le sport. On accueille les enfants les mercredis, les vacances scolaires et durant les pauses scolaires. Les éducateurs et animateurs interviennent sur le périscolaire et on leur demande de développer leurs compétences. Ils ont des compétences en sport puisqu’ils sont eux-mêmes sportifs. La transmission du savoir se fait par des gens qui connaissent le sport et qui ont la volonté de faire un passage et une transmission de savoirs ou de valeurs.
« Développer des actions d’initiations basées sur le jeu… » Aujourd’hui on fait énormément de jeux de coopération en accueil de loisirs. J’ai un animateur qui travaille sur l’arbitrage et ses objectifs sont simplement d’amener sur le respect des règles avec la notion de citoyenneté derrière. Nous essayons de lier initiation sportive et transmission de valeurs citoyennes. Mais il est vrai qu’à terme, notamment pour accompagner les jeunes filles dans la durée, il sera important d’établir des réseaux clairs et complémentaires, entre les différentes structures écoles, USEP, centres de loisirs, clubs… Claude Lechartier : J’aimerais qu’on reprenne car on n’a pas répondu totalement à l’enjeu de cohésion sociale notamment sur le plan de la formation. La formation des encadrants a été évoquée par plusieurs intervenants et je souhaiterais qu’on y revienne, en interrogeant le mouvement sportif pour comprendre sa position sur ce sujet.
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Boxing club Tours Nord : De par mon expérience quand j’étais collégien, lycéen, je trouve qu’il y avait un fossé entre le sport à l’école, le sport au collège et au lycée et les associations sportives. Ce fossé est plus ou moins comblé par des opérations ponctuelles. Mais globalement on a constaté qu’il y avait relativement peu de contact entre les deux. Alors chaque année, nous, on essaye de contacter des professeurs d’EPS et on s’aperçoit que le message passe relativement peu. Par exemple on s’est aperçu que chaque année on envoie nos programmes à une vingtaine de lycées sur la ville de Tours pour un affichage, une information ou éventuellement un contact mais les retours sont relativement peu importants. Ce n’est pas une critique, mais c’est un souhait d’échanges.
temps, et notamment en boxe française savate, il y a une large diversité de pratiques, autour des notions de plaisir, de loisirs et de santé. Il y a de nombreuses disciplines associées qui se mettent en place : la boxe anglaise avec l’aéroboxe, des pratiques sportives qui ne vont pas forcément amener des filles compétitrices mais qui répondent à d’autres attentes. Je trouve qu’il y a une très belle évolution au niveau du mouvement sportif, en termes d’adaptation mais aussi d’ouverture à de nouveaux publics. Le cadre de pratique évolue…
« Multiplier les passerelles pour réduire l’écart entre sport scolaire et sport de club… »
Fédération de natation : Nous n’avons pas trop de construction spécifique vers la mixité puisque c’est un sport qui se pratique à la fois avec les deux sexes mais aussi très difficilement ensemble. Tout le système de compétition reste : garçons d’un côté et filles de l’autre, mais toujours conjointement car il y a l’entraînement qui est toujours commun. Au niveau de la vie sociale quand on organise des stages, des journées de formation, on voit nos jeunes évoluer, garçons et filles ensemble. Nous, on a un avantage dans le rapport au corps, parce que le corps n’est vêtu que d’un simple maillot de bain et les problèmes de croissance se passent relativement bien et relativement simplement.
Nedjid El Baja : Je voulais revenir sur ce que disait la demoiselle par rapport au savoir. C’est vrai que cet échange est très important. Par rapport au club, pour faire sortir les jeunes du quartier, avec l’aide de la ville de Tours, j’avais mis en place un échange avec la ville de Marseille où le but était l’échange de savoirs. On avait mixé beaucoup de filles et de garçons des quartiers Nord de Marseille et la ville de Tours. Ca a porté énormément ses fruits parce que certaines filles du club ont visé une autre optique de vie par rapport à cet échange. C’est vrai que c’est très important, de ne pas oublier çà, cet échange de savoirs des éducateurs. Claude Lechartier : Tu nous amènes sur la réflexion de la formation qu’on va aborder. Éducateur sportif : Concernant les pratiques sportives, les fédérations bougent. Le monde sportif bouge un peu quand même. Depuis quelques
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Claude Lechartier : Il y a une autre discipline qui est représentée, c’est la natation. C’est une fédération, une discipline classique, sans être péjoratif.
Claude Lechartier : Alors on a vu que pour capter certains publics, les filles des cités, beaucoup de disciplines sportives avaient été aménagées, et ont évolué vers de nouveaux jeux sportifs. Au niveau de la natation, y a-t-il cette démarche ? Fédération de natation : C’est vrai que nous faisons partie des sports qui n’ont pas attendu la pleine réussite au haut niveau pour se pencher sur une politique de développement diversifié.
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Au niveau fédéral, il y a une recherche constante d’élargir les activités puisque l’aquaforme, la natation avec palmes, la natation synchronisée, le water-polo, ça représente une palette importante dans les activités. Ca fait des années que la fédération essaie d’élargir son offre, et maintenant il y a même d’autres axes qui sont investis avec la natation familiale, avec le handicap. Claude Lechartier : La question toute simple que je veux poser à Jean Bergeon, président du comité olympique en Indre-et-Loire est « comment le mouvement sportif peut-il être partenaire pour inciter et aider au développement de ces pratiques » ? On l’a vu au travers des exemples qui ont été évoqués, le développement et l’ouverture se fait parce qu’il y a des partenariats qui sont mis en place. Donc quel peut être le rôle du mouvement sportif, du mouvement olympique sportif qui fédère en Indre-et-Loire 70 comités ? Jean Bergeon : Je crois que nous avons déjà essayé. On a essayé au travers de l’UNSS justement car on considère qu’il y a une passerelle à jeter entre le mouvement fédéral et le sport scolaire. Tout à l’heure j’entendais quelqu’un qui disait qu’il y a un fossé entre le monde scolaire et le monde fédéral et je dirais que le monde fédéral en est à 90% responsable, parce que ce n’est pas faute d’avoir tendu la perche et l’UNSS a bien joué le jeu. On a tendu la perche en insistant auprès des comités départementaux, en disant « il y a un sport scolaire, ces gamins qui pratiquent dans les collèges, dans les lycées, il ne faut pas les laisser tomber lorsqu’ils franchissent le pas des collèges et des lycées », mais c’est vrai que ça n’a pas toujours été bien perçu. Il y a à peu près trois ou quatre ans, je me trouvais aux Ovalides de Amboise et j’avais été très surpris du nombre d’équipes féminines de rugby qui était en compétition. C’était impressionnant ces filles qui avaient la « gnac » et dont on sentait qu’elles avaient envie de jouer.
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J’ai eu l’occasion d’en interroger quelquesunes au hasard en fin de match et de leur dire « je suppose que le week-end vous jouez dans un club ». Leur réponse fut sans équivoque : « eh bien non, on n’en trouve pas »… et c’est là qu’on s’est rendu compte que le monde fédéral n’avait pas saisi cette perche qui lui était tendue. À sa décharge je dirais que c’est peut-être aussi une mauvaise perception et une mauvaise recherche car je crois que des gens comme Nedjid il faudrait en trouver dans tous les sports. Trouver des gens qui ont cette capacité à dire, « je me crée un enjeu, je vais créer des sections féminines dans un club ou dans un comité… » Cette absence me donne l’impression que personne ne s’est vraiment penché sur ce problème. On l’a mis de côté en disant, ce ne sont que des filles… Cela renvoi à la dimension dévalorisée du sport féminin. C’est un petit peu dommage car je crois qu’il y a un potentiel énorme. Il y a des jeunes qui sont demandeuses de participer en compétition même si au départ je suis intimement convaincu qu’il faut commencer par des jeux. C’est une progression tout à fait normale mais il y a une envie de participer et nous, le monde fédéral, on l’a mal géré parce qu’on n’a pas voulu s’en préoccuper véritablement. Je crois qu’on a le devoir maintenant de se pencher véritablement sur ce phénomène parce qu’on ne doit absolument pas délaisser les filles qui souhaitent pratiquer un sport.
« Faire évoluer les pratiques fédérales… » Jean-Jacques Place : J’ai deux réflexions. Si au niveau de la natation, la mixité existe depuis très longtemps je n’ai pas l’impression que les jeunes femmes venant des cités soient véritablement « intégrées » dans ce sport là. J’y mets des guillemets mais j’ai véritablement le sentiment que la difficulté qu’a ce sport à faire venir des jeunes femmes de cités est tout de même un élément
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important. On voit les jeunes venir avec l’école, ça c’est une réalité, mais après on ne les voit plus. Pourquoi ? Je n’ai pas la réponse et peut-être vous non plus mais c’est une réalité. Le deuxième point par rapport à ce que dit Jean et c’est un élément important, j’ai envie de dire aussi : on a notre part de responsabilité les collectivités. Les clubs sportifs, les associations sportives, au niveau d’une ville telle que la nôtre, ont depuis très longtemps intégré le fait que le sport était masculin donc ils occupent de fait les créneaux nécessaires pour faire du sport. On vient leur demander aujourd’hui : « attention les gars, vous êtes bien gentils mais il faut que vous ayez des structures sportives féminines ! ». Très bien ! Mais ça veut dire que dans ces cas-là j’ai deux choix : soit je mets moins de garçons voulant pratiquer le sport, soit je demande à la municipalité des créneaux supplémentaires pour pouvoir pratiquer ce sport et il y a tout de même un élément qui est important et on ne va pas le nier c’est qu’aujourd’hui on n’a pas la possibilité de pouvoir répondre présent à 100%, c’est une réalité. On a tous notre part de responsabilité, nous aussi collectivités. Il faut qu’on la prenne. Il faut aussi que lorsque l’on envisage aujourd’hui d’avoir de nouvelles infrastructures sportives. Il faut intégrer ce fait dès le départ.
et donc ça ne m’étonne pas du tout qu’on retrouve la double réussite pour se faire accepter et notamment dans des sports qui ne sont pas traditionnellement des sports féminins. On voit bien qu’elles font des doubles performances très souvent. On retrouve ça dans la boxe, mais pas seulement. Au niveau des clubs il faut intervenir sur la formation des femmes et des hommes dès le début. Dans les établissements scolaires il y a certainement une information très importante à faire sur les métiers du sport auprès des filles. On constate que très souvent, lorsqu’il y a des informations libres c’est-à-dire qu’elles peuvent y aller et s’informer sur les métiers qui leur plaisent, alors les filles, traditionnellement, vont vers 10 secteurs professionnels, toujours les mêmes, en gros ceux qui touchent aux soins à la personne, le commerce, la coiffure etc. alors qu’il y a plus de 80 secteurs professionnels. Donc on voit bien qu’elles sont déjà dans un entonnoir parce que c’est notre éducation, parce que c’est l’identité. Mais il faut faire la claque aux clichés ! C’est-à-dire, à tout ce qu’on dit depuis le début de la soirée. C’est ancré non pas dans nos gènes mais dans notre culture. Culturellement, la place des femmes, elle est là. Et une femme qui sort de sa place, ce n’est pas si simple ni pour elle ni pour la société et ni pour les hommes bien évidemment.
Claude Lechartier : On a bien vu qu’un certain nombre d’activités de qualité passent par un encadrement de qualité et je me tourne vers Nadine Lorin et je passerai ensuite la parole pour une conclusion avec Carine Guerandel et le tout dernier mot de la fin à M. Gernot si vous le voulez bien.
« Mieux informer les filles sur l’étendue des possibilités… »
Nadine Lorin : La question c’est la formation des femmes. Je dirais qu’en général vous le savez, vous avez ces données-là en tête : les femmes font des études supérieures en plus grand nombre que les hommes. Ça, c’est vrai pour la vie générale
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Donc je pense qu’il faut aussi les inciter à aller se renseigner sur d’autres formations professionnelles. Je vois des sites s’installer sur les métiers du social, où là, c’est trois garçons pour 60 filles. Par contre sur les métiers du sport, la tendance est plus facilement inversée. Il y a vraiment quelque chose à faire là-dessus parce qu’effectivement on voit que quand elles se saisissent de quelque chose qui les motive, elles « bouffent » ça avec une énergie incroyable, elles sont à fond tout le temps.
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Il y a eu une petite phrase qui a fait rire tout le monde parce que c’est vrai que c’était rigolo, tout à l’heure dans l’exposé de Mme la sociologue, qui était : « une fille performante, elle a fait peur à tout le monde ». Alors tout le monde a ri, mais c’est un peu ça : une fille performante fait peur a beaucoup de gens et d’ailleurs elle se fait peur à elle-même des fois parce qu’elle est toujours convaincue qu’elle est moins performante. On le voit dans des études autres, par exemple sur des classes prépas scientifiques ou des jeunes en bac S. J’ai posé une simple question aux élèves : j’ai pris 30 garçons et 30 filles. A la question « quelle moyenne faut-il pour accéder à une préparation scientifique en math ? », la réponse des garçons était 11/20 et pour les filles c’était 15. Il y a donc toute une éducation à faire, chez les garçons et chez les filles parce qu’elles se mettent une barre tellement haute. Il y a un travail d’ensemble à entreprendre, aussi au niveau des clubs. Mais il ne faut pas que les clubs travaillent seuls c’est-à-dire qu’il faut absolument d’autres partenaires qui n’ont peut-être rien à voir avec le sport mais qui peuvent accompagner sur d’autres logiques : la formation, la mixité, l’égalité hommes-femmes. Parce que toute la problématique sur laquelle on parle depuis le début de la soirée, est une problématique d’égalité hommes-femmes et de respect mutuel. Claude Lechartier : Je vais repasser la parole à Mme Guerandel pour quelques mots de conclusion mais je reprendrai, pour introduire sa conclusion, les propos qui ont été énoncés tout à l’heure : « le sport n’est pas intégrateur en soi, il ne porte que les valeurs qu’on lui attribue ». C’est ce qui a été mis en évidence. Je me pose la question, comment allons-nous réussir l’enjeu de cohésion sociale ?
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Carine Guerandel : La cohésion sociale… Je reprendrai les propos d’une dame, ici à la tribune, qui disait que ça passe par l’équilibre hommesfemmes. En guise de conclusion, je dirai que cet équilibre doit passer par l’existence de projets pour les femmes, comme avec l’exemple du handball. Il ne s’agit pas de penser la pratique féminine que dans la mixité mais en mettant en place également des projets exclusivement pour les filles tout comme il y existe des projets exclusivement pour les garçons. En revanche, quand on propose une pratique mixte, il parait essentiel de construire cette mixité comme l’a énoncé ce soir le projet sur la boxe. Il ne faut pas se contenter de faire venir les filles dans le club en restant sur un fonctionnement spécifique aux garçons.
« Penser des actions directement ciblées vers les filles… » Dans un deuxième temps, comme cela a été dit dans la dernière présentation, il est important de réfléchir à une initiation précoce avec, pourquoi pas, du jeu pour intéresser les filles aux pratiques sportives et pérenniser leur engagement. Notons alors la place cruciale du partenariat qui a été souligné ce soir. J’insiste aussi sur l’importance d’un encadrement formé. Je ne suis pas sûre qu’être sportif suffise pour encadrer un sport et une mixité de manière réfléchie. Il me semble important de former à la question du genre et à la question des interactions filles/garçons. Enfin, nous rappellerons la nécessité d’accorder une place plus importante aux femmes dans le monde du sport, au niveau des encadrements, de la direction, des missions et des postes de dirigeantes.
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Trame d’animation des débats Pourquoi les jeunes filles pratiquent-elles moins ? Quels sont les freins réels et évoqués à la pratique féminine dans les quartiers ? Dans un même quartier, il y a différents profils de jeunes filles, des modes d’éducation diverses. Cela suppose qu’il faut connaître les habitudes de vie et repères socio-éducatifs qui façonnent ces dernières, en tenir compte dans « l’écriture » de tout projet. Quelles sont les méthodes à mettre en place, notamment en termes d’adaptation des pratiques, des lieux de pratiques… ? Quelle réponse des clubs à la demande, aux besoins des jeunes filles : - en termes d’accueil ? - en termes d’aménagement des équipements ? - considérant l’évolution des disciplines elles-mêmes ? (Exemple : l’aéroboxe !) Production de l’émergence de pratiques autres, différentes… Questionner l’importance du qualitatif (qualité et qualification de l’encadrement…) au sein des structures d’accueil. Proposer autre chose que ce qui semble aisé, plus « pratique » car réclamé par une majorité. Proposer des pratiques construites en direction des jeunes filles dans les structures. Quelles démarches de la part des fédérations, quel rôle jouent-elles ? Quel est le rôle des parents ? Quelles actions en direction de ces derniers ? Quels sont les enjeux réels des actions d’éducation et d’insertion par le sport sur le public féminin, et par extension, sur l’ensemble de la population ? Enjeux politiques ? Enjeux sociaux ? Enjeux en termes de cohésion sociale ? Enjeux pour qui ? (pour les jeunes filles ? pour la population des quartiers ? pour toute la population ?…) Quel mode d’organisation des réseaux de partenaires pour accompagner et inscrire durablement ces actions sur les territoires ? Quels partenariats ? Quelles ressources ? Quel est le rôle des institutions, des collectivités territoriales pour le soutien et l’accompagnement de projets en direction des jeunes filles de quartiers… ? Conclusion des débats : Carine Guerandel
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Notes : ..............................................
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Actes des jeudis de l’éducation et de l’insertion par le sport Le Pôle ressources national “Sport, éducation, mixités, citoyenneté” a pour principales finalités de faire connaître les bonnes pratiques, de valoriser les expériences innovantes et de développer des savoirs faire pour permettre de renforcer les capacités d’expertise-conseil dans les fonctions éducative et sociale du sport des agents missionnés sur ce domaine.
www.semc.fr
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