Comme un conte de fée

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COLLECTION

Comme un

« Je veux qu’on

parle de nous »

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conte de fées…

Une visite à l’École élémentaire catholique de la Découverte

Michel Gratton



Comme un

conte de fées… Une visite à l’École élémentaire catholique de la Découverte

Michel Gratton


Je veux qu’on parle de nous Je veux qu’on parle de nous. Je veux qu’on parle de nos gens. De ce personnel qui vit pleinement l’une des plus belles vocations de la race humaine. De nos élèves épanouis. De nos parents engagés. Je veux qu’on parle des milieux uniques, enrichissants et grouillants de vie que sont nos écoles. Je veux ouvrir nos portes pour que tout le monde nous voit. Que tout le monde comprenne comment et pourquoi nous vivons chaque jour les valeurs chrétiennes qui sont le fondement de toute notre action. Parce que je suis extrêmement fière de nous.Tellement que m’est venue l’idée de demander à une personne objective de l’extérieur d’aller voir et de nous rapporter ce qu’elle avait vu. Le journaliste et écrivain franco-ontarien Michel Gratton a accepté de partir à l’aventure dans un univers dont il n’avait finalement que des souvenirs d’enfance. Dans ce petit livre qui en dit beaucoup, il nous raconte sa visite à l’École élémentaire catholique de la Découverte. Dans les livres de cette collection, il nous fait découvrir, une école à la fois, le monde passionnant et passionné du Centre-Est. Lise Bourgeois Directrice de l’éducation Conseil des écoles catholiques de langue française du Centre-Est (CECLFCE)

Nous tenons à remercier sincèrement la direction, le personnel et les élèves de l’École élémentaire catholique de la Découverte d’avoir rendu cet ouvrage possible.


« J’aime nos enseignants parce qu’ils ne nous disent pas :“Go! Fais ci! Fais ça!” Ils sont pas mal relax, raconte Sophie. Ils expliquent quoi faire, mais sans donner d’ordres. »

Ça prenait bien une élève de 5e année pour trouver le mot juste pour décrire l’école de la Découverte : relax. C’est exactement ça : une école où les choses bougent, certes, mais où la vie semble couler comme une rivière. C’est une école où l’on sent immédiatement qu’il y règne un climat de bonne entente, une belle complicité et un véritable esprit d’équipe entre tous les membres du personnel, et même entre les élèves. On sent cette liberté d’agir et de faire des excentricités au nom du bonheur de l’enfant et de l’apprentissage. C’est un milieu qui respire la chaleur humaine.

En effet, y a-t-il d’autres endroits où enseignants et élèves se seraient ligués pour obliger leur directrice à passer une nuit sur le toit de l’école par un froid sibérien… au nom de la lecture?! On y reviendra…

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Il faut dire qu’on ne parle pas de n’importe quelle directrice. Jocelyne Lemery-Paul ne donne pas sa place lorsqu’il s’agit de lancer des idées originales. C’est la meneuse de claques en chef de cette école qui a vu ses effectifs augmenter à vue d’œil depuis sa création, il y a maintenant sept ans. En effet, cette école accueille aujourd’hui plus de 700 élèves, alors qu’elle était conçue pour en accueillir 500. Un monstre d’école comparativement aux autres : cinq classes de maternelle totalisant plus de 230 élèves. Et cela ne fait que commencer! Lorsque la directrice convoque une réunion de sa communauté de parents, plus de 800 personnes y viennent en trois jours.

L’originalité de la cérémonie d’ouverture officielle de « DLD » (comme on surnomme cette école), dans un quartier d’Orléans qui s’est développé à la suite d’un boom domiciliaire, était tout à fait à l’image de l’école, l’école des mille merveilles. La directrice et tous les membres de son personnel avaient en effet décidé, pour l’occasion, de se déguiser en personnages de conte de fées. « J’ai dit alors que c’était le début de notre conte de fées » dit Madame Jocelyne alors déguisée en Merlin l’enchanteur. Loin de la réalité? Peutêtre pas tant que ça…

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Deux expressions reviennent constamment lorsque je rencontre des membres du personnel de DLD : « l’équipe du tonnerre » et « les p’tits miracles ». « L’équipe du tonnerre », c’est eux; « les p’tits miracles », ce sont ces élèves qui les émerveillent par leurs progrès souvent étonnants. Ce sont des gens et des enfants ordinaires, mais qui ensemble font des choses extraordinaires.

« Notre !cole est la meilleure parce que les professeurs ne sont pas ici pour le salaire, dit Fr!d!ric. C'est nous qui passons avant. » Pour les élèves de 4e, 5e et 6e année que j’ai rencontrés, l’équipe du tonnerre n’est pas un mythe.

« Les professeurs savent ce qu'on aime » dit Nicholas. « Ils enseignent pour que tout le monde comprennent » affirme Marcel. « Ils nous montrent toutes sortes de mani"res d'apprendre. Des fois, on sort dehors pour travailler » explique M!lanie. « Les enseignants aident beaucoup ceux qui sont dans le besoin » confie S!l!na. « Ils nous font rire » dit Mathieu. « On fait des choses pour s'amuser et apprendre » ajoute Maxine. « Ils ne laissent pas les amis faire n'importe quoi, comme de la violence, dit M!lanie. Ils r"glent #a tout de suite. Ils savent comment. » « Le monde te respecte comme tu es » dit simplement Brianna. « Il n'y a pas de personnes m!chantes ici » conclut Nicholas. Mais il n’y a pas que les professeurs qui les enchantent. « C’est une école propre, dit Alexandre. Les concierges font bien leur travail. »

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On me raconte aussi qu’un des concierges « s’est habillé drôle », lors de la « Journée loufoque », journée où l’on peut venir à l’école en pyjama et les cheveux en bataille. Les concierges font également partie de l’équipe du tonnerre.

À ma deuxième visite à l’école de la Découverte, on célébrait la Journée internationale de l’enfant, journée taillée sur mesure pour son directeur adjoint. Il s’agit de Jean-François Bard qui, à 31 ans, est père de cinq enfants : deux garçons de 6 et 4 ans, élèves à son école, une fille de 2 ans et des jumelles de 6 mois. En plus d’être directeur adjoint d’une école surpeuplée, il est enseignant de maternelle où il s’occupe quotidiennement d’autres marmots de 3 et 4 ans. Il est aussi responsable de la « petite enfance » pour l’école, comme si ce n’était pas déjà assez... Et il a toujours le sourire. Adorable folie…

Si l’atmosphère est normalement décontractée à DLD, ce jour-là, c’était l’exubérance la plus totale. Il faut dire que l’on n’était qu’à quelques jours de l’halloween. Ajoutons à cela Madame Jocelyne et son équipe de diablotins, et on a une combinaison explosive. Ils étaient probablement 500 dans le gymnase à écouter, dans l’obscurité et dans une fumée bleue théâtrale, la narration d’une histoire fantastique. Madame Jocelyne s’est mise à danser énergiquement avec les élèves à l’arrière de la salle. Et je n’ai pas compté tous ceux et celles qui se sont arrêtés pour lui donner un câlin en quittant le gymnase.

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On avait aussi prévu une récréation prolongée à l’heure du midi. Ils étaient là par centaines. Plusieurs enseignants, qui n’étaient pas obligés d’y être, s’étaient joints à eux. Une enseignante chantait et dansait une ronde avec une douzaine d’élèves. D’autres venaient s’ajouter au cercle qui ne cessait de grossir. Disons qu’ils étaient déjà passablement excités lorsque nous sommes arrivés dans la cour. En voyant Madame Jocelyne, plusieurs ont spontanément accouru vers elle. Mais nous, nous étions là pour tourner une vidéo. Et, comme on le sait, tout le monde veut passer à la télévision… Lorsque les enfants nous ont aperçus avec notre caméra, ils se sont massés autour de nous avec toute la furie des hordes de Gengis Khan. Pandémonium! Mais total! Disons que je suis heureux d’être encore en un seul morceau.

Une exubérance qui ne se fait pas prier, qui ne peut que provenir d’une école où il fait bon vivre. Et qui a l’équipe pour la rendre ainsi. « J’aime ça, ici, parce que c’est vivant… contrairement à une autre école où j’ai travaillé » confie Madame Chantale. « Ce n’est jamais pareil, dit Madame Danika, enseignante en 1re année. « On planifie toujours des choses, des surprises. C’est une école très occupée et très ouverte à l’innovation. » « Madame Jocelyne a fondé l’école sur le thème du conte de fées. C’est ce que l’on vit jour après jour. On a eu une autre grande fête où nous étions tous déguisés en personnages de contes… J’étais le personnage Super-Net d’Annie Brocoli. Une chanson a été composée sur l’école. L’an dernier, les élèves ont composé un rap sur l’intimidation. »

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« La mission de l’école part du mot cœur, dit Madame Josée, elle aussi enseignante en 1re année. L’enfant est au cœur de l’apprentissage. On met beaucoup l’accent sur la communication, sur l’accueil des nouveaux élèves. Ici, c’est un menu à la carte. » « Il faut aller au-delà des programmes scolaires, toujours revenir à l’enfant, aller le chercher sur le plan affectif. Il faut croire en l’enfant et reconnaître que chaque enfant est unique. Peu importe l’âge, l’ethnie, la religion, il faut convaincre l’enfant qu’il est capable. Il faut aussi miser sur ses talents, ses champs d’intérêt et ses forces. » « Les enfants réussissent dans différents domaines, ajoute Madame Danika. Si un enfant s’intéresse à un domaine donné, je m’y intéresse aussi. » « Il ne s’agit pas seulement de lui enseigner la matière, mais aussi de trouver la façon d’amener l’enfant à s’y intéresser » dit Madame Julie, enseignante en 6e année. « Quand l’enfant dit :“Je ne suis pas capable”, je lui réponds :“On va essayer”. Et ensemble, on essaye. Les élèves ont confiance en nous. » Et il y a de ces moments que ces enseignantes n’échangeraient pas pour tout l’or du monde. Comme lors de la Journée des enseignants. Raconte Madame Josée : « Une de mes élèves est venue me donner une pomme. Elle l’a mise sur mon bureau et a dit simplement :“Tiens, Madame Josée. Une pomme pour toi.” Je me suis mise à pleurer. » « Les p’tits miracles » dont ces enseignantes aiment parler, c’est un peu tout ça : ces gestes du quotidien où tout à coup on sent que l’on a fait la différence.

Le fameux épisode de la « nuit sur le toit » a commencé par un défi qu’avait lancé une directrice à ses élèves. Il y a quatre ans, l’école avait lancé un projet spécial visant à inciter les élèves à lire des livres. L’objectif était d’en lire 2 000 avant une certaine date. Or, les résultats tardaient à venir. « Je devais quitter pendant une semaine pour prendre part à une conférence, raconte Jocelyne Lemery-Paul. Avant de partir, j’ai dit aux élèves : Si vous lisez 2 000 livres, je vais coucher sur le toit de l’école! » À ce moment-là, ils en avaient lu 280.

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La prudence est de rigueur lorsqu’on lance un défi aux élèves et au personnel de DLD, accoutumés qu’ils le sont tous aux méthodes non conventionnelles de Madame Jocelyne. Pendant son absence, les professeurs et les élèves ont organisé un véritable blitz de lecture. Ils ont lu 1 000 livres de plus. Forts de leur succès et de la promesse de voir leur directrice coucher sur le toit de l’école en plein hiver, ils ont atteint le chiffre magique de 2 000 dans les jours qui ont suivi. Jocelyne Lemery-Paul parle de cette expérience comme de la meilleure soirée de sa vie. « On a érigé une tente. C’était glacial. On n’avait pas de chaufferette, mais on était bien dans nos sacs de couchage. Deux enseignantes sont venues passer la nuit avec moi. Les élèves et les parents nous apportaient du chocolat chaud et des beignes. J’ai dormi… Et le lendemain, j’ai fait 40 minutes de jogging! » L’affaire a évidemment fait la manchette des journaux locaux. « Je cherchais à obtenir l’engagement de mon personnel pour le projet de lecture, confie-telle avec un regard espiègle. Aujourd’hui, je peux dire qu’il n’y a pas un élève de l’école qui ne soit pas venu faire la lecture à Madame Jocelyne. » Je souris, comprenant que, lorsqu’elle a fait ce pari de fou, elle savait exactement ce qu’elle faisait.

« C’est l’histoire d’un garçon qui vivait au bord de la forêt et qui se retrouve dans un labyrinthe où il rencontre un animal poilu qui s’appelle Roussette… » Alexia me raconte avec passion le récit d’un livre qu’elle a particulièrement aimé. Madame Jocelyne m’avait présenté plus tôt Marie-Sophie, championne lectrice avec 1 000 livres à son actif… cette année seulement! On compte aussi les livres lus durant l’été. Chaque livre tombe dans une catégorie adaptée aux élèves. Par exemple, pour les plus jeunes, un chapitre équivaut à un livre. C’est donc dire que cette élève aurait lu 1 000 chapitres au cours de l’été et de la première moitié de l’année scolaire. Je défie n’importe qui, jeunes et adultes confondus, de le faire.

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Jeanne-Chandra, elle, me dit avoir lu 2 500 livres l’an dernier. Ils sont nombreux à me raconter que c’est à l’école de la Découverte qu’ils ont pris goût à la lecture. Plusieurs commencent en disant : « Avant, je n’aimais pas lire… » Une autre élève m’avoue qu’elle n’aimait pas les romans « parce qu’il n’y avait pas d’images. » Sa grand-mère lui a expliqué que la lecture de romans permettait de se faire des images dans la tête. Elle a par la suite lu un roman qui l’a tellement captivée qu’elle en avait « la chair de poule. » À écouter les élèves, je ne peux m’empêcher de me demander si tout cela a quelque chose à voir avec leur étonnante maturité, avec cette assurance et cette facilité qu’ils ont à s’exprimer et à dire exactement ce qu’ils pensent.

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« Bonjour! Et bienvenue à la première radio scolaire de DLD! » Il le fait comme s’il était né avec un micro de radio dans les mains. J’ai l’honneur d’assister à un lancement en cette journée de l’enfant. À vrai dire, les deux animateurs et la grande disque-jockey blonde font ça avec plus d’aplomb que la plupart des adultes. C’est l’année de la communication à l’école de la Découverte. « Le thème de l’année est :“La communication, c’est ma passion” me dit la directrice adjointe, Marie-France Paquette. On veut explorer la communication sous toutes ses facettes. Montrer la façon de communiquer autant avec le corps qu’avec les mots et les gestes, par les arts, l’informatique… » « Nous avons invité des auteurs à venir parler aux élèves, des gens à animer des ateliers de bande dessinée… Nous allons faire un ciné-pop corn à la Charlie Chaplin, pour montrer aux élèves que le cinéma était muet à ses débuts, que la communication se faisait donc avec le corps et les gestes. » « Nous cherchons à outiller chaque élève pour qu’elle ou il apprenne à s’exprimer devant des groupes. C’est important pour l’avenir de l’élève. »

« Si un enfant est heureux, si un enfant se sent aimé, il va apprendre. » « J’irais même un peu plus loin. Je dis souvent aux membres de mon personnel : Si un enfant vous aime, il va apprendre davantage. » Jocelyne-Lemery Paul résume ainsi sa philosophie.

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« C’est pour ça que nous cherchons à créer un climat chaleureux, à sortir de l’ordinaire. Pour que l’enfant sente qu’il a une place ici, au-delà du devoir d’apprendre, et qu’il a aussi une place dans le cœur de l’enseignante, des adjointes, des concierges. » Ce n’est pas d’hier qu’elle cherche à rendre des enfants heureux. Il y a quelques années, à une autre école d’Orléans, elle s’était rendu compte que les enfants de milieux dits favorisés pouvaient aussi vivre de grands drames familiaux, comme la séparation de leurs parents. Elle a décidé d’aller elle-même en thérapie « pour comprendre ce que vivaient ces enfantslà. » Elle a lancé et dirigé par la suite, durant huit ans, le programme Grandir ensemble pour venir en aide aux élèves qui vivaient des peines profondes. Ce programme, aujourd’hui connu sous le nom de Programme Arc-en-ciel, est en place dans pratiquement toutes les écoles du Centre-Est. Je sais personnellement à quel point les enfants l’apprécient. Pourquoi? Bien que je ne la connaisse pas personnellement, Madame Jocelyne a contribué à soulager la peine de mes trois filles il y a de cela 20 ans, et indirectement la mienne, lorsque leur mère et moi avons vécu une pénible séparation. C’est ça faire une différence sans rien attendre en retour.

Mon taxi m’attend. Mais Madame Jocelyne m’a demandé de passer à son bureau avant de partir. J’entre pour me retrouver devant une trentaine d’élèves massés là avec des livres et des cahiers dans les mains. Ce sont tous des champions de lecture. Elle leur explique que je suis « un grand » auteur et me dit que « les élèves » aimeraient que je signe des autographes. Les « élèves », vraiment… Oui, elle sait exactement ce qu’elle fait.

Et « l’équipe du tonnerre » et « les p’tits miracles » continuent à vivre et à nous faire vivre… leur conte de fées.

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Une visite à l’École élémentaire catholique de la Découverte

Édition et impression : Centre franco-ontarien de ressources pédagogiques, 2009.


J’avais une petite idée de ce que je cherchais. Mais je ne savais vraiment pas ce que j’allais trouver. J’ai trouvé des écoles en effervescence. J’ai trouvé des gens d’un dévouement total. Mais j’ai surtout trouvé des élèves heureux. Des élèves aux yeux brillants, gonflés d’espoir en l’avenir et de confiance en eux. Et j’ai compris. J’ai compris que c’est possible. Qu’on ne rêve pas lorsqu’on dit que chaque élève peut réussir. Et, qu’aux yeux de mon ordinaire, j’avais peut-être la chance de voir en mouvement les meilleures écoles… au monde. – Michel Gratton


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