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À chaque génération ses figures rebelles qui font bouger les lignes du paysage urbain. Qui sont-elles aujourd'hui ? Rencontre avec Camila Tola Alvarez (31 ans), skateuse et cinéaste qui combine sans complexes vêtements masculins et jupes plissées.

on style vestimentaire se décline de deux façons. D’une part, je porte des pièces féminines classiques, comme des jupes et des robes. Par ailleurs, j’enfile des vêtements pour homme. En fait, si je suis attirée par un gars, j’ai envie de lui piquer ses fringues. Il s’agit souvent de chemises fines, en coton, dans un style plutôt asiatique. D’où me vient ce penchant ? Aucune idée. Je trouve ça bizarre aussi (rires). »

« Je mets une robe pour aller au ciné ou au musée. Les vêtements de garçon, je les garde plutôt pour le travail ou le skate. Je ne pratique ce sport que depuis l’âge de 26 ans. Adolescente, je n’osais pas m’y mettre car j’étais convaincue que les mecs trouveraient ça trop garçon manqué. À seize ans, je voulais surtout être féminine et attirante. »

« Ma passion pour le skate est apparue à l’âge de 12 ans, lorsque j’ai quitté mon Équateur natal pour la Belgique. J’ai débarqué dans un pays étranger dont je ne parlais pas la langue. Ici, à Malines, je me suis vite liée d’amitié avec les garçons et les filles du skate park, et j’ai beaucoup traîné dans les parages. Pendant et après mes études de cinéma, ce même skate park a servi de décor à mes photos et mes vidéos. Sans lui, je ne sais pas si je vivrais encore à Malines. L’endroit rassemble toute une communauté. »

M« Quand je vais faire du skate, je m’habille comme aujourd’hui : un tee-shirt au-dessus d’un short, un legging ou une jupe. Le tee-shirt que je porte, je l’ai créé avec une amie, Pitou Schutz. Elle a fait l’illustration, j’ai ajouté un poème d’amour au dos. Quand je pratique le skate, je porte toujours des chaussettes hautes parce qu’elles me procurent un certain sentiment de sécurité. Non pas qu’elles soient d’une grande utilité : elles m’évitent tout au plus quelques éraflures lorsque la planche heurte mes tibias. J’enfile toujours un tee-shirt à manches longues pour la même raison. La jupe plissée présente l’avantage d’être à la fois classique et sportive. Finalement, les joueuses de tennis en portent. Maintenant que j’y pense, cette jupe pourrait être un clin d’oeil à mon enfance en Équateur. Là-bas, l’uniforme est de mise à l’école. Les chaussettes hautes en font également partie. »

« Je ne mélange pas vêtements masculins et féminins. Mais pour être honnête, je n’y pense pas. Je n’essaie pas non plus de briser le carcan du genre. Je me sens femme, je tombe amoureuse de garçons et je me conforme généralement à ce que la société attend d’une femme. Mais tout un pan de ma personnalité échappe à ces attentes. Je travaille dans le monde de la télévision, comme monteuse à la VRT et comme shader pour les matchs de football : j’ajuste la lumière et la couleur de l’image de la caméra. Ces deux métiers sont des univers typiquement masculins. »

« Je réalise également des courts-métrages. Pendant mes études, il s’agissait de films très politiques et un peu naïfs. Je pensais que je pouvais changer le monde. Aujourd’hui, je réalise des films à travers lesquels je cherche essentiellement à me comprendre. Sur Instagram, je poste des vidéos très directes qui reflètent mes émotions, dans lesquelles je chante et joue de la guitare, sans être vraiment très douée pour cet exercice. Vous trouvez ça audacieux ? Je ne pense pas, non. Mes émotions prennent tellement de place que je ne peux m’empêcher de les partager avec le plus grand nombre. »

@camilatolaalvarez

CAMILA TOLA

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