E RENTRÉ RE I A R LITTÉ 6 201
Phillip Quinn
MORRIS
r e t s i M
a m a b a Al FINITUDE
L’édition américaine de Mister Alabama, est parue chez Random House en 1989, sous le titre Mussels. Mister Alabama est le premier livre de Phillip Quinn Morris traduit en France.
Résumé express
Mud Creek, Alabama, été 1979. Alvin Lee Fuqua, ex Mister Alabama, a 28 ans et un rêve : devenir Mister America, pour passer à la télé dans un talk-show & se faire remarquer & devenir acteur & jouer dans des films avec Burt Reynolds. Un bien beau rêve, contrarié par un problème de hanche. Alors Alvin a changé ses plans – adieu gloire et bodybuilding, cap sur la fortune grâce à la pêche aux moules. C’est bien plus sûr et lucratif que la contrebande de whisky. Alvin plonge dans la rivière et remonte des moules grosses comme le poing. Ses amis, Johnny Ray, Eddie, Cliff et Freddy, s’y sont mis aussi. La vie des plongeurs est paisible à Mud Creek, jusqu’au jour où le meilleur d’entre eux, le plus âgé, le plus futé, le plus costaud, mais aussi le plus solide buveur de la Tennessee River, le mentor d’Alvin, le légendaire Johnny Ray, s’écroule, victime de la maladie des caissons, le mal des profondeurs. Comprendre comment Johnny Ray a pu mourir ainsi, sans un mot, devient l’obsession d’Alvin. Sa vie bascule. Il se remet à la musculation, invente de nouveaux exercices aussi loufoques que terribles, il prend des stéroïdes et suit un régime draconien, au risque d’y laisser sa peau. Rien ne va plus. La veuve nymphomane de Johnny Ray vient s’installer chez lui avec ses deux enfants. Rien ne va plus. Cliff, vétéran du Vietnam, est pourchassé par un détective engagé par sa femme et tombe amoureux d’Alma, la sœur d’Alvin, anorexique, et reine du stand-up. Rien ne va plus. Le shérif découvre les plants de marijuana que Freddy, ancien joueur de baseball, fait pousser sur son bateau. Décidément, rien ne va plus. Et si le salut était au fond de la rivière. La veille de sa mort, Johnny Ray avait fait part à Alvin d’une étonnante découverte. Reconstituer la plongée fatale de Johnny Ray, voilà ce qu’Alvin a en tête. Découvrir le secret. Le secret dont seul Johnny Ray possédait la clé – et il est bien trop mort pour pouvoir parler.
Phillip Quinn Morris en 2015 Š Rachel Schoeller
Phillip Quinn MORRIS
Phillip Quinn Morris est né dans le Comté de Limestone, Alabama, en 1954. Son père possédait une épicerie et une petite ferme aux abords de la ville. Il suit une scolarité sans histoires, et passe son temps libre à aider sa famille au magasin ou pour les travaux de la ferme. Après un premier cycle à l’Université d’Athens, il entre dans la vie active sans diplôme particulier et travaille comme boucher, mécanicien, ou peintre en bâtiment tout en écrivant des nouvelles. Mais il comprend vite que s’il veut réellement écrire, il faut qu’il quitte sa petite ville. Il s’installe alors à Miami, en Floride, puis part retrouver un ami en Équateur. Il va y passer quelques mois avant de revenir en Alabama. C’est à cette époque qu’il commence à plonger pour pêcher des moules. Il entreprend alors un projet plus ambitieux, un roman directement inspiré de sa vie sur les canaux et des gens qu’il y rencontre. Ce sera Mussels (Mister Alabama en français). Il est certain d’avoir enfin trouvé sa véritable voix avec ce roman. Mussels sera publié en 1989 par Random House, puis, en 1990, paraîtra son second roman, Thirsty City chez le même éditeur. Il reprend ses études et obtient un Master en Écriture Créative au Converse College de Spartanburg. Mais ces deux romans ne lui ont pas apporté de quoi vivre de sa plume et très rapidement les contingences matérielles l’obligent à reprendre des boulots alimentaires. Il continue alors à écrire, mais ne cherche plus à publier. Aujourd’hui, il vit avec son épouse et ses jumelles sur la côte ouest de la Floride, et gagne sa vie comme peintre en bâtiment. Mais la publication de son roman en France lui a donné l’envie de se replonger dans la vie littéraire. Il a plusieurs romans dans ses cartons.
Nous avons posé quelques questions à Phillip Quinn Morris
Phillip Quinn Morris, quand avez-vous commencé à écrire Mister Alabama ? À vingt-quatre ans j’ai décidé que, si je voulais vraiment devenir écrivain, je devais partir de chez moi. Je suis parti vivre à Miami. Je faisais des petits boulots et un jour un ami m’a appelé : il voulait que je retrouve son associé qui était censé être quelque part dans la jungle équatorienne. J’ai accepté et, en fait, ça a été assez facile : j’ai croisé l’homme en question dans un bar de Quito ! Bref, après avoir passé quelques mois de plus en Équateur, je suis retourné en Alabama. Lorsque je suis rentré, je suis devenu pêcheur de moules. J’ai fait ça pendant à peu près six mois. La rivière, cet hiver-là, était glaciale, même avec une combinaison de plongée, et tu restais sous l’eau pendant des heures. J’ai commencé à écrire Mister Alabama un peu après avoir débuté la plongée. Ça devait être en août ou en septembre 1979. Je pense que vers janvier 1980 j’avais un premier jet, grossier, mais complet. Je ne saurais pas dire combien de fois j’ai réécrit ce roman ! Il pouvait se passer des mois entre deux réécritures quand je travaillais sur d’autres choses.
Mister Alabama est votre premier roman ? C’est le premier qui a été publié ! Avant ce roman, je pense que j’en avais écrit à peu près cinq autres, certains plutôt longs, d’autres plutôt courts, et une bonne quantité de nouvelles, mais rien n’était très bon. Lorsque j’ai commencé Mister Alabama, j’estimais avoir déjà écrit plus d’un million de mots. Avec le recul ça paraît être un gros chiffre et c’était plus certainement quelques centaines de milliers ! Mais ça m’a vraiment servi de préparation. Plus tard, j’ai jeté tous ces manuscrits et toutes les lettres de refus qui les accompagnaient, ne voyant aucune gloire à les conserver. Lorsque j’ai enfin attrapé le ton et l’ambiance de Mister Alabama et que les personnages ont commencé à prendre vie, j’ai su que je tenais quelque chose. J’ai su que mon écriture avait fait
un bond significatif et que j’étais en train de me lancer dans une qualité de fiction « publiable ». Mais c’est aussi un texte que j’ai beaucoup retravaillé. Et en 1986 je l’ai finalement envoyé à un agent, un peu au hasard parce que je ne connaissais personne. Il a adoré ce roman, et la lettre qui l’accompagnait, même si je n’ai plus la moindre idée de ce que j’avais bien pu lui écrire. Il disait que c’était un manuscrit « sorti de nulle part ». Il m’a dit « je peux vendre ce livre, je te le garantis », la façon dont il l’a dit, la confiance qu’il avait ! J’ai su. Après ça n’a plus été qu’une question de temps avant qu’il m’appelle un jour pour me dire que Random House voulait le livre. Ils l’ont publié en 1989.
Comment ce livre a-t-il été accueilli lors de sa sortie ? Je ne connaissais rien au milieu de l’édition et d’après ce que j’ai pu observer, les grandes maisons d’édition semblent avoir deux types de romans, ceux qui ont reçu de grosses avances, qu’on pousse beaucoup et qui font le buzz... et les autres. Le mien était un « petit livre » mais j’ai senti qu’à mon niveau je bénéficiais réellement de beaucoup de soutien et d’attention et Mister Alabama a reçu un accueil très chaleureux. J’ai eu de bonnes critiques qui m’ont touché. J’ai eu la chance que trois écrivains que j’admire énormément – Robert Olmstead, Vance Bourjaily et Harry Crews – me donnent leurs avis sur ce roman. Et chacun d’eux s’est révélé être, réellement, un grand fan du livre. Cela signifiait beaucoup pour moi à l’époque, et encore maintenant. Quand Mister Alabama a été publié, les librairies indépendantes étaient encore assez répandues aux États-Unis. Celles de Miami, où je vivais, se sont montrées très attentionnées avec moi. Grâce à elles, j’ai fait des lectures et des signatures. C’était drôle de faire partie du monde littéraire. Dans le monde des grandes librairies et des gros éditeurs, à mon avis et avec le recul, un livre, à moins qu’il ne soit un best-seller, a une durée de vie très courte. Un mois tout au plus sur les tables. Après il disparaît dans l’obscurité, sur les rayonnages du fond. Mais curieusement, Mister Alabama semblait continuer à vivre. Et maintenant, des années plus tard, il va paraître en France. C’est fantastique et totalement fou ! Plusieurs années après avoir publié Mister Alabama, je suis retourné en Alabama. Je me suis arrêté dans une petite station-service à un carrefour en pleine campagne. Quand je suis sorti de ma voiture, un vieil homme s’est approché de moi. Je ne le connaissais pas, je ne l’avais jamais vu. Il avait l’air d’un type plutôt rude, un vrai country man. Il m’a dit : « C’est vous le gars qu’a écrit Mister Alabama ? »
J’étais sidéré. À le voir, j’aurai juré qu’il ne connaissait rien à la littérature ou aux livres. Et puis j’ai pensé qu’il en avait peut-être entendu parler, qu’on lui avait dit que c’était plein de grossièretés et de choses pas correctes. J’étais certain qu’il allait m’engueuler. J’ai avoué : « Oui, c’est moi qui l’ai écrit. » Il a dit : « C’est le livre le plus drôle que j’ai jamais lu. » Il s’est retourné et est parti. Encore aujourd’hui, je ne sais toujours pas qui il est.
Vous parlez de l’Alabama. Est-ce que vous pensez que votre roman est dans la tradition d’une certaine littérature du sud des États-Unis ? C’est difficile de répondre à cette question. Ce serait tellement facile de me raccrocher au fait que j’écris de la littérature du Sud. Il y a certains éléments, bien sûr, dont la source est Sudiste, comme les lieux que je décris et l’histoire de ces lieux. Mais je ne considère pas écrire dans la tradition du Sud. Je pense qu’Harry Crews l’a dit mieux que moi. Il a dit quelque chose comme : « Je ne me considère pas comme un auteur du Sud. Je suis un écrivain qui se trouve être du Sud. » Je pense que Twain, Tennessee Williams, O’Connor, Welty – et tous ces auteurs exceptionnels ont une voix particulière. Mais c’est également le cas de Marquez et Steinbeck.
Quels sont vos modèles, en littérature ? Harry Crews m’a beaucoup influencé. Et ça a été un honneur de recevoir ses commentaires sur Mister Alabama. Je ne peux pas dire que je le connaissais bien mais on a eu plusieurs conversations au téléphone et j’ai eu la chance de le rencontrer. Je n’ai pas rencontré beaucoup de grands auteurs et je ne suis pas en position de faire du name-dropping. Mais Harry Crews est l’exception. Je l’ai consulté quelques fois pour avoir des conseils et il m’en a donnés, de façon très franche, et ils se sont avérés essentiels. À chaque fois, ça m’a permis de résoudre un problème dans mes choix d’écriture ou de sortir d’une période de confusion. Sinon, dans les auteurs plus classiques, je dirais qu’Ernest Hemingway est l’un de mes, si ce n’est mon, écrivains préférés. J’ai beau lire des tas d’autres romanciers, je reviens toujours à Hemingway ! Et quand j’étais plus jeune, j’étais fasciné par Steinbeck. D’ailleurs, la critique du Palm Beach Post m’a fait très plaisir : « Le Marais de Beaulah de Phillip Quinn Morris rappelle la Rue de la sardine de John Steinbeck ; ses habitants oublient plus souvent les lois de Dieu et des hommes qu’ils ne les enfreignent. »
On sent beaucoup de « vécu » dans Mister Alabama. C’est un roman très autobiographique ? Oui et non. Je pense que presque tous les personnages dans la littérature sont inspirés par de vraies personnes. Dans Mister Alabama, tu vois, chaque personnage est un amalgame et s’inspire des caractères de certaines personnes que j’ai connues. Mais je ne suis pas Alvin. Le roman n’est autobiographique que métaphoriquement. Je veux dire que même si, entre la fin de mon adolescence et le début de la vingtaine, je soulevais de la fonte avec enthousiasme, je n’ai jamais fait de compétition de bodybuilding. Ou pour aborder la question sous un autre angle, et pour utiliser des analogies littéraires, j’aurais voulu vivre dans le monde de Zooey et Franny, les héros de Salinger, mais en réalité j’ai été élevé dans un environnement plus proche des romans d’Harry Crews. Et c’est important de savoir de quoi on parle, c’est ce que j’ai appris avec ce roman. Quand je suis revenu en Alabama la première fois, je suis allé à Nashville un soir avec un pote. Nous étions assis dans un café ouvert tard dans la nuit. Tous ces gamins du lycée Vanderbilt entraient et sortaient. J’avais seulement quelques années de plus qu’eux mais les choses avaient changé. Plus de jeans et de cheveux longs. Ils portaient des vêtements de marque, conduisaient de belles voitures, avaient les cheveux courts. Plutôt BCBG, tu vois, de futurs jeunes cadres dynamiques. C’était ce genre de monde dans lequel j’aurais aimé vivre ou sur lequel j’aurais aimé écrire. Un peu dans le style de Fitzgerald. J’ai remarqué cette grosse différence et me suis tourné vers mon pote : « Hey, à ton avis, qu’est-ce qu’ils pensent de nous ? » « Rien. » C’était une courte et fidèle analyse de nos vies, à la fois drôle et hyperbolique mais en même temps acide. C’est là que j’ai réalisé que j’avais écrit à propos de choses dont j’ignorais tout. Je veux dire des choses que je ne connaissais pas intimement. Le jour suivant, j’ai arrêté ce que j’écrivais. J’ai emprunté la machine à écrire électrique de ma sœur (avant, j’écrivais à la main) et j’ai commencé Mister Alabama. C’est à ce moment-là que j’ai atteint un nouveau niveau dans mon écriture.
Puis il y a eu Thirsty City. Oui, c’est le second roman que Random House a publié, en 1990. J’ai bien aimé ce que le Publishers Weekly a écrit : « C’est un hommage rendu au trafic de gnole, aux bagnoles et aux belles nanas. P.Q. Morris pose regard amusé mais plein d'affection sur ces coutumes locales, rustiques et parfois hautes en couleurs, auxquelles nous sommes tous profondément attachés. »
Après Thirsty City, j’ai écrit plusieurs romans qui n’ont pas trouvé preneur. Oh, j’aimerais bien pouvoir blâmer le monde des éditeurs New-Yorkais et ces grandes chaînes et ces best-sellers et les rachats d’entreprises et la détresse de ces auteurs qui ont tout, et trépignent en attendant un New York Times Bestseller ! Mais au fond, je suis content qu’aucun d’eux ne soit publié pour le moment. Ils avaient tous besoin de se « reposer au fond d’un tiroir » et de certaines révisions majeures. Et puis la vie a fait que j’ai dû me consacrer à autre chose que l’écriture. Depuis, j’ai effectué ces révisions sur quelques-uns d’entre eux et j’espère que mon agent aura de la chance avec ceux-là.
Et maintenant, que faites-vous ? Vous plongez toujours ? Non, je ne plonge plus pour pêcher des moules, je ne plonge plus du tout d’ailleurs. Je ne vis plus dans ce coin-là et je n’ai plus envie de plonger à nouveau, pas même une fois « comme au bon vieux temps ». C’était toute une aventure à l’époque, mais aller sous l’eau dans des endroits où tu ne peux même pas voir tes propres mains ne m’attire plus du tout. Je n’ai même plus aucun rapport avec ce milieu. Je ne sais pas si les gens ont arrêté de pêcher des moules. Quand je pratiquais, c’était quand même une activité assez marginale, même si pas mal de gens savaient plus ou moins que ça existait, surtout les pêcheurs et les amoureux de la rivière. Ils voyaient les bateaux avec les compresseurs et les divers drapeaux et savaient ce qui se passait. J’ai entendu dire qu’il y avait d’autres régions dans le Tennessee, l’Ohio, l’Oklahoma où se pratiquait ce type de pêche. Donc ce n’est pas réservé à ce petit territoire du nord de l’Alabama mais plutôt à des petits coins où il y a des rivières avec des moules que l’on pouvait vendre. Aujourd’hui, je suis peintre en bâtiment et je rénove des maisons quand le climat économique s’y prête.
« Phillip Quinn Morris possède une voix unique. C’est un formidable conteur dont l’écriture se nourrit de son talent d’observateur. Ce livre ne pourra pas vous décevoir ! » Harry Crews
« Les personnages de Phillip Quinn Morris mènent une existence faite de débrouillardise et de courage. Parmi eux, il n’y a pas de place pour les esprits faibles, ni pour ceux qui ont un trop grand sens moral. On ne peut qu’admirer leur manière de prendre la vie comme un jeu, malgré les mauvaises cartes qu’ils ont reçues. » Robert Olmstead
« Le marais de Phillip Quinn Morris rappelle la Rue de la sardine de John Steinbeck ; ses habitants oublient plus souvent les lois de Dieu et des hommes qu’ils ne les enfreignent. » The Palm Beach Post
« Ses personnages sonnent vrai. Ils sont plongés dans la vie, de tout leur corps et de tout leur cœur. Pas besoin de jouer les intellectuels lorsque vous vivez si intensément. » The Miami Herald
MISTER ALABAMA un roman de Phillip Quinn Morris 336 pages / 14,5 x 22 cm ISBN 978-2-36339-071-4 diffusion Harmonia Mundi Livre
EN LIBRAIRIE LE 6 OCTOBRE 2016 Contact presse : Agence Anne & Arnaud - Anne Vaudoyer 06 63 04 00 62 / anne@anneetarnaud.com