Entretien avec le Maire de Montevideo

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Entretien Mme Ana Olivera Maire de Montevideo, Uruguay

Quelles sont les domaines d’action prioritaires de votre gouvernement ? Notre principal objectif est de construire une ville digne pour tous. Nous avons trois importants défis opérationnels qui doivent être considérés dans une perspective de renouvellement des défis du gouvernement : nous sommes en train de construire la ville du XXIe siècle. L’idée ordonnatrice centrale de notre activité est la promotion du droit à la ville. Mettre en place le troisième niveau de gouvernance en impulsant une participation aussi étendue, intense et efficace que possible, promouvoir l’amélioration permanente de la qualité environnementale –qui s’exprime aussi bien par l’amélioration opérationnelle des système de nettoyage et de disposition finale des résidus que par l’extension des programmes d’assainissement jusqu’à couvrir le 100% de la ville– ainsi que garantir le développement du système métropolitain de transport de manière à multiplier la capacité de mobilité et l’accès de tous les habitants de Montevideo à tous les points du territoire, sont les objectifs auxquels nous nous sommes engagés pour cette période, objectifs qui s’inscrivent dans un effort à long terme ayant vu le jour il y a 20 ans, qui a connu de nombreuses réussites, mais qui doit en connaître beaucoup d’autres. La félicité publique est toujours à l’horizon. Dans quelle mesure la prise de position « Ville Éducatrice » peut-elle permettre d’affronter ces défis ? Elle est essentielle. Il n’y a aucune possibilité d’amélioration et de transformation permanente d’une ville sans des citoyens informés, éduqués et engagés au point de vue soutien de la gestion quotidienne et impulsion vers des changements. 1


Quelles sont les principales réussites et difficultés rencontrées au cours du processus de décentralisation vers les arrondissements qui intègrent le Département? La principale réussite est d’avoir mis en place le troisième niveau de gouvernement, un projet longuement caressé et promu, qui connaîtra au cours de cette période de gouvernement sa première épreuve de gestion. Les difficultés ont été multiples, mais se sont principalement référées aux résistances que ce projet génère –et continuera à générer– c’est-à-dire un transfert réel du pouvoir sur les décisions et les ressources. Comment est impulsée par ces mairies d’arrondissement la participation citoyenne à la gestion des politiques publiques? Il existe des mécanismes multiples. D’abord, grâce au processus même d’élection du maire d’arrondissement et des conseillers et aux débats sur la politique publique associée à ces processus. Deuxièmement, grâce à l’existence et au fonctionnement des conseils de quartier. Troisièmement, à travers les Conseils d’arrondissement ouverts. Quatrièmement, par la promotion d’un budget participatif. Et finalement, par une présence permanente dans les quartiers, destinée à informer, débattre, écouter. Plus précisément, pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste l’expérience des Conseils d’arrondissement ouverts? Il s’agit d’une instance de participation populaire, projection des activités et soumission des comptes que chaque arrondissement doit organiser annuellement, sans préjudice de toutes les autres activités pouvant être développées dans le même but. Il s’agit de retrouvailles avec une institution de consultation et de participation, qui ont une origine lointaine : les conseils ouverts ont constitué une modalité de réunion extraordinaire, et ont joué un rôle décisif pendant le processus d’indépendance. Pour ceux qui ont eu lieu cette année, le thème proposé a été le plan quinquennal des activités de chaque arrondissement et son budget. En ce qui concerne le pari du gouvernement sur une amélioration de la qualité environnementale, pouvez-vous nous parler d’une bonne pratique actuellement en cours dans ce domaine ? Nous avons fermement soutenu une politique d’investissements dans l’assainissement environnemental, qui nous a permis aujourd’hui que le 80% du territoire urbain soit couvert par ce service, et qui nous permettra d’en couvrir le 100% à la fin des programmes que nous avons lancé au cours de cette étape, programmes qui sont déjà financés. Il s’agit d’un important effort financier et organisationnel qui a été soutenu pendant des décennies et continuera à être soutenu, qui a eu des répercussions non seulement sur la santé générale de la population, mais également par exemple sur le fait que notre système de plages –une des principales ressources au point de vue espace public dont nous disposons– puisse être certifié au point de vue environnement et servir à la fois d’espace de récréation populaire et d’attraction touristique. 2


Dans quelle mesure le programme de mobilité urbaine en cours permettra -t-il d’améliorer les espaces publics et de les récupérer pour les citoyens ? La meilleure politique d’attention à l’espace public est celle qui promeut son utilisation intense et plurielle. Le système de transport collectif permet d’accéder à cet espace : plages, parcs, places, centres ; le renfoncer est donc un des nos objectifs fondamentaux. Montevideo Place de l’Independence © Tomás Jorquera Sepúlveda La mobilité est un droit. L’accès aux biens publics de la ville est un droit. Et afin que tout le monde puisse exercer ces droits, nous devons développer un ensemble d’infrastructures, de services et de politiques de dynamisation de son utilisation. Il s’agit du Programme de Mobilité. Un programme destiné à renforcer et à ordonner la mobilité des individus et des chargements dans le département.

Qu’apporte à la gestion municipale la prise de conscience du potentiel éducatif des différentes politiques et interventions municipales ? Elle l’enrichit, elle lui lance le défi d’une amélioration permanente, elle le valorise et fait que ses acteurs se sentent appréciés. Comment impulsez-vous la transversalité dans les actions municipales ? Il existe une tension permanente entre l’intégralité des problèmes et les défis réels involucrés dans la gestion quotidienne de la ville et leur traitement sectoriel traditionnel, habituellement renforcé par l’organisation sectorielle ou départementale des institutions. Afin de surmonter cette inertie, nous avons organisé des cabinets opérationnels grâce auxquels différents départements sectoriels travaillent ensemble et simultanément à la solution d’un problème ou à la définition d’une politique institutionnelle. Nous promouvons également ce genre d’intervention coordonnée avec d’autres organismes. Et nous promouvons en particulier le fait que les politiques concernant le genre, l’enfance, la jeunesse, les adultes âgés, l’aide aux handicapés, le combat contre la discrimination soient présentes en tant que dimension inéluctable dans toutes nos actions, parce qu’en construisant la ville, il ne s’agit pas seulement d’une œuvre physique, mais surtout de construire ce réseau complexe d’actions économiques, politiques sociales et culturelles, dont les œuvres physiques constituent à peine une partie du soutien matériel. Pouvez-nous nous parler brièvement d’autres bonnes pratiques en cours à Montevideo, destinées à construire une ville plus éducatrice? Nous avons instauré un programme de transparence, d’accès à l’information et de production de données ouvertes, qui est un instrument qui renforce la qualité de l’information disponible et la facilité d’accès à celle-ci. Nous avons un réseau d’institutions –théâtres, musées, parcs zoologiques, planétarium, bibliothèques, programmes d’animation culturelle et éducative rattachées à l’environnement, à la science, à la vie dans la ville– qui soutiennent les activités éducatives promues par le gouvernement de la ville et par d’autres organisations publiques et privées et sont un motif d’orgueil et une plateforme de services pour tout le pays. Nous développons en outre des programmes éducatifs spécifiques, comme le Programme Nos Enfants, le Théâtre en Classe ou les campagnes destinées à inciter nos travailleurs à terminer leurs études primaires ou secondaires et à se spécialiser dans les thèmes rattachés à nos responsabilités de gestion à travers le Centre de Formation et d’Etudes, ou des programmes de communication éducative, par l’intermédiaire de personnages s’adressant au public enfantin, comme par exemple la Tía Libbi. Au-delà de toutes ces actions, la vie dans la ville est une expérience éducative permanente en relation avec la construction du projet de convivialité qui nous identifie. Cet aspect doit être très présent dans toutes les politiques publiques. 3


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