European
Forum for Urban
Security
Des espaces publics sûrs et inclusifs : Des villes européennes partagent leur expérience
Publié par le Forum européen pour la sécurité urbaine (Efus), cet ouvrage est le résultat du projet PACTESUR (Protect Allied Cities against TErrorism in Securing Urban aReas), qui a été mené de janvier 2019 à décembre 2022. Il a été rédigé par Marta Pellón Brussosa (chargée de mission), Tatiana Morales (chargée de mission) et Nathalie Bourgeois (copy editor), et produit sous la direction d’Elizabeth Johnston (déléguée générale) et Carla Napolano (déléguée générale adjointe), avec la contribution des partenaires du projet, des 11 villes associées et du Comité consultatif d'experts.
L'utilisation et la reproduction sont libres de droits pour usage non commercial et à condition que la source soit spécifiée.
Traduction : Nathalie Bourgeois
Révision : Global Voices Ltd, Royaume-Uni
Mise en page : Marie Aumont
Impression : Technicom, Boulogne-Billancourt
Imprimé en mars 2023
ISBN: 2-913181-91-0
EAN: 9782913181915
Dépôt légal : mars 2023
Forum européen pour la sécurité urbaine
10 rue des Montibœufs 75020 Paris – France
+33 (0)1 40 64 49 00 contact@efus.eu – www.efus.eu
Cette publication a été financée à 90 % par la Direction générale HOME (Commission européenne), Fonds pour la sécurité intérieure – police. Elle n’engage que ses auteurs et ne reflète pas l’opinion du Consortium ou de la Commission européenne.
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Des espaces publics sûrs et inclusifs Des villes européennes partagent leur expérience
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for Urban Security
Remerciements
Le projet PACTESUR a été mené à bien grâce à la mobilisation et à l’engagement des villes partenaires, des villes associées et des experts qui ont contribué à ses différentes composantes ainsi qu’à la préparation de cette publication. Nous les remercions pour leur implication tout au long du projet et pour avoir généreusement partagé leurs connaissances, leur expérience et leur expertise. Ils ont ainsi contribué à atteindre nos objectifs communs. Nous souhaitons également remercier tous ceux qui ont contribué aux nombreux événements, rencontres, académies de police et discussions (en présentiel ou en ligne) organisés dans le cadre du projet. Enfin, nous souhaitons remercier la Commission européenne, et notamment le Fonds pour la sécurité intérieure (FSI)-programme police, pour son soutien financier sans lequel ce projet et cette publication n’auraient pas été possibles.
Le projet PACTESUR a été mené avec la participation des partenaires du projet, les 11 villes associées et le Comité d’experts. Nous souhaitons remercier, pour leur engagement et leur enthousiasme :
Les coordinateurs du projet
Florence Cipolla, Jean-François Ona et Sébastien Viano (Nice, France).
Les partenaires du projet
Bénédicte Biron et Bernard Frederick (Liège, Belgique), Elena Ciarlo et Edoardo Mattiello (ANCI Piemonte, Italie), Gianfranco Todesco, Elena Ghibaudo, Federico Dellanoce (Turin, Italie).
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Les villes associées
Paul Seddon (Leeds, Royaume-Uni), Claudia Beck (Munich, Allemagne), Francisco Javier Espinosa et José Ramon Carrasco (Madrid, Espagne), Martyn Holt (Londres, Royaume-Uni), José Antonio Monfort Pons et Fernando Gaona de Sande (Xàbia, Espagne), Raimonds Nitišs et Staņislavs Šeiko (Riga, Lettonie), Ana Veronica Neves (Lisbonne, Portugal), David Robertson (Édimbourg, Écosse), Dominic Seth (Essen, Allemagne), Leszek Walczak (Gdańsk, Pologne), Thanos Tatsis (✝︎) (Athènes, Grèce).
Le Comité d’experts
Isabella Abrate, Mariusz Czepczynski, Susanne Diemer, Karine Emsellem, Lina Kolesnikova, Michaël Nicolaï, Gian Guido Nobili, Petia Tzvetanova, Eric Valerio, Christian Vallar, Yves van de Vloet, Nicolas Vanderbiest, ainsi qu’un représentant du Centre pour la protection des infrastructures nationales (CPNI) qui a requis l’anonymat pour des raisons de sécurité.
Nous remercions également :
Laetitia Wolff, consultante et enseignante en impact du design, qui a dirigé le cours mis en place par la Sustainable Design School de Nice (aujourd’hui intitulée Besign School) en partenariat avec le projet PACTESUR. Nous souhaitons remercier les étudiants qui ont participé aux projets In/pact et Project Citiz, ainsi que Grant Linscott, directeur des études, et Maurille Larivière, directeur.
Étudiants designers : Mathieu Andries, Holly L. Bartley, Jules Baudrand, Ibrahim Benouna, Owen Cartau, Maxime Chef, Julian Coiffard, Juliette Dunand, Romain Desrez, Enzo Jamois, Marine Jean, Lola Mangot, Tarushee Mehra, Sacha Nouviale, Pauline Poirot, Clément Pheulpin, Arjun Rao, Fanny Ricciardi, Noémie Rocheteau, Manon Roulan, Matthew Slack, Stefani Takac, Tristan Terrusse, Nicolas Thomas, Agatha Verlay, Baptise Viot, Emma Weber, Eva Zortich.
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6 Avant propos ................................................................... 8 Chapitre 1 - Les espaces publics au cœur de la ville . 11 La protection des espaces publics, un défi complexe ........................ 13 La protection des espaces publics, une priorité pour l’Union européenne ......................................................................... 13 Le rôle clé des autorités locales et régionales ................................... 15 Le projet PACTESUR : une approche globale et intégrée de la protection des espaces publics 16 Chapitre 2 - Une approche pluridisciplinaire et transversale de la protection des espaces publics .... 21 Associer les communautés locales 26 Sécurité par le design : comment rendre les espaces publics sûrs et ouverts à tous................................................................................... 31 Planification et design urbains : des espaces publics inclusifs et sûrs .............................................................................................. 36 L’importance de l’art ........................................................................ 43 Chapitre 3 - L’utilisation des technologies pour la protection des espaces publics : efficace, mais insuffisante ............................................................................... 47 Sommaire >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>
7 Chapitre 4 - Planifier à l’avance .......................................... 63 1. Évaluer correctement la situation et les besoins sur le terrain ..... 64 2. Renforcer les capacités des acteurs locaux et régionaux à minimiser l’impact d’une crise 68 3. Échanger des pratiques, des connaissances et des idées avec ses pairs 77 4. Associer les entreprises locales .................................................... 80 Chapitre 5 - Communiquer efficacement avec le public en cas de crise ................................................................ 83 Rôles et responsabilités dans la communication de crise ................. 84 Prendre en compte ce qui peut mal se passer 90 Conclusion ..................................................................... 93 Recommandations 94 Annexes.......................................................................... 98 Références et bibliographie....................................... 117
Avant-propos
La gestion et la protection des espaces publics urbains sont l’une des priorités des collectivités territoriales. Il s'agit aussi d'une attente importante des électeurs, étant donné le rôle prépondérant de ces espaces dans l’attractivité des villes et leur capacité à favoriser l’inclusion de tous les groupes de population, ainsi que dans l’offre de culture, de loisirs et de commerce des villes. Il n’est donc pas étonnant que la protection des espaces publics soit depuis longtemps un thème de travail du Forum européen pour la sécurité urbaine (Efus), réseau dédié à la sécurité urbaine qui réunit près de 250 villes de 16 pays européens.
Les vagues d’attentats terroristes contre les villes européennes depuis le milieu des années 2010 ont créé une onde de choc dans les collectivités, qui se sont retrouvées confrontées à un défi complexe, celui de rendre leurs espaces publics plus sûrs sans pour autant les transformer en bunkers. Que peuvent faire les villes pour rendre leurs espaces publics plus sûrs, plus inclusifs et ouverts à tous ? Comment collaborer efficacement avec les autorités nationales, mais aussi les forces de police et tous les autres acteurs locaux concernés ? Comment prendre en compte les avancées de la technologie ? Comment mieux faire participer les citoyens et la société civile ?
Ville membre de l’Efus, Nice a été la cible d’un attentat terroriste particulièrement meurtrier le 14 juillet 2016 sur la Promenade des Anglais, à une date éminemment symbolique en France et dans un espace public emblématique de la ville. Au cours des années qui ont suivi, la ville a pris une série d’initiatives pour prévenir ce type d’attentats et mieux protéger ses espaces publics, dont certaines avec le soutien de la Commission européenne et de l’Efus. En 2019, Nice a pris la tête d’un large projet financé par l’UE et intitulé PACTESUR (Protect Allied Cities against TErrorism in Securing Urban aReas). Son objectif était de renforcer les capacités des villes et des acteurs locaux de la sécurité face aux menaces terroristes, mais aussi plus largement aux risques inhérents aux espaces publics. L’Efus était l’un des partenaires du projet avec la ville de Liège (Belgique), la ville de Turin (Italie) et l’Association nationale des municipalités du Piémont (ANCI), en Italie.
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Pendant quatre ans, le projet a organisé une série d’activités, dont le déploiement d’équipements pilotes de sécurité dans les villes partenaires du projet, des académies de police pour différentes forces de police locale européennes, et des Semaines européennes de la Sécurité destinées à faire entendre la voix des acteurs locaux européens, des représentants de la police, des experts et de la société civile dans la conversation sur la sécurité des espaces publics.
Cette publication, présentée lors de la conférence finale du projet PACTESUR (Bruxelles, 23-24 novembre 2022), résume les principaux enseignements que l’Efus a tirés de ce projet. En clair, elle n’est pas une description détaillée de tout le travail mené par le projet, mais plutôt une présentation de ses principaux enseignements qui, nous l’espérons, pourront être utiles aux collectivités européennes.
Ainsi, nous avons examiné les principales difficultés auxquelles les collectivités font face pour protéger leurs espaces publics. Quelle est l’approche des institutions européennes en la matière ? Pourquoi est-il important d’associer un large éventail d’acteurs, mais aussi directement, les citoyens ? Qu’apportent les technologies et quels sont les principaux écueils à éviter ? Comment évaluer les vulnérabilités des espaces publics et se préparer à toute éventualité ? Et enfin, comment communiquer en cas de crise ?
Nous avons souhaité présenter autant de cas concrets que possible, tirés du projet PACTESUR, mais également d’autres projets sur la protection des espaces publics financés par l’UE et auxquels l’Efus a participé.
Nous espérons que cette publication vous intéressera et qu’elle vous encouragera à participer avec nous à la conversation en partageant votre point de vue et votre expérience par le biais de notre site web ou de nos conférences (en présentiel ou en ligne), ateliers et autres types de rencontres et de plateformes. Il n’y a pas de réponse unique ou simple, mais il est évident qu’échanger directement entre villes sur une question aussi importante ne peut qu’être bénéfique, autant pour les collectivités que pour les citoyens.
Elizabeth Johnston Déléguée générale
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Chapitre 1
Les espaces publics au cœur de la ville
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Les espaces publics urbains ont changé au fil du temps. Le rôle traditionnel de la place centrale comme lieu de rassemblement pour le commerce et l’expression politique ou religieuse a évolué vers une multitude de nouveaux usages et de modes d’interaction. La façon dont les citoyens ont accès à, utilisent et envisagent les espaces publics a changé. Ces espaces urbains sont devenus des points où se concentre la vie urbaine, des lieux où l’on communique et se rassemble, où se déroulent des manifestations politiques, des performances ou des spectacles artistiques et culturels et toute sorte de loisirs. Ce sont des lieux où les gens se rassemblent, échangent et rencontrent la différence.1
Le discours politique sur les espaces publics a changé au fil du temps : la plupart des responsables politiques les considèrent aujourd’hui comme des « biens publics » et reconnaissent le rôle déterminant joué par les collectivités dans leur gestion. Les autorités locales et régionales investissent dans ces espaces pour renforcer la cohésion sociale, améliorer la qualité de vie et renforcer l’image et l’attractivité des villes. De nombreuses études ont en effet montré que des espaces publics bien entretenus, sains et sûrs améliorent la sécurité et le sentiment de sécurité des citoyens.
Qu’est-ce qu’un espace public ?
L’ONU-Habitat définit les espaces publics comme « des lieux appartenant au domaine public ou bien à disposition du public, accessibles, et dont tout le monde peut jouir gratuitement et sans but lucratif »2. Les espaces publics sont des composantes importantes du bien-être individuel et social, des lieux où s’expriment la vie collective et le patrimoine naturel et culturel dans toute sa diversité. Ce sont des lieux fondateurs des villes, et donc de l’identité des citoyens, tel qu’exprimé par la Convention du Conseil de l’Europe sur le paysage3.
Les espaces publics peuvent être définis comme tout espace ouvert qui est accessible à tous sans coût direct, tels que les rues, les routes, les places publiques, les parcs, les centres commerciaux et les plages, ainsi que les lieux clos accessibles aux citoyens tels que les édifices gouvernementaux et officiels.
1- Barker, A. (2017). Mediated Conviviality and the Urban Social Order: Reframing the Regulation of Urban Public Space, British Journal of Criminology, 57(4), 848-866.
2- ONU-Habitat (2015). Global Public Space Toolkit: From Global Principles to Local Policies and Practice.
3- La Convention du Conseil de l’Europe sur le paysage est le premier traité international consacré au paysage dans toutes ses dimensions. Elle promeut la protection, la gestion et la planification des paysages et organise la coopération internationale sur les questions liées au paysage.
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1.1 La protection des espaces publics, un défi complexe
Parce qu’ils sont très fréquentés et par nature ouverts, les espaces publics peuvent être la cible de toute sorte de menaces telles que le terrorisme, la présence de foules et le risque de mouvements de panique, ou d’autres types d’attentat extrémiste. Veiller à ce qu’ils demeurent sûrs, inclusifs et ouverts à tous est un défi complexe.
En tant que niveau de gouvernance le plus proche des citoyens, les autorités locales et régionales sont les mieux placées pour comprendre les inquiétudes que ceux-ci peuvent avoir sur la sécurité et la liberté d’accès des espaces publics. Elles sont aussi les mieux placées pour mettre en place des mesures qui réduisent le sentiment d’insécurité. Les espaces publics requièrent une politique de sécurité fondée sur la coopération entre différents types d’organisations, le secteur privé et les institutions concernées (autorités locales, police, services de secours, urbanistes et représentants des usagers). En d’autres termes, une véritable coproduction de la sécurité qui garantit que ces espaces publics sont à la fois sûrs et ouverts à tous est nécessaire4
1.2 La protection des espaces publics, une priorité pour l’Union européenne
Conseil de l’Union européenne (2021). Conclusions du Conseil sur la Protection des espaces publics du 7 juin 2021.
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« La protection des espaces publics doit être fondée sur une approche holistique et horizontale qui lie l’UE aux stratégies nationales et locales pertinentes, ainsi que sur les partenariats public-privé ».
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4- Efus (2017). Manifeste Sécurité,Démocratie et Villes : Coproduire les politiques de sécurité urbaine.
La prévention et la protection des espaces publics contre le terrorisme
La stratégie européenne de sécurité adoptée en juin 2020 affirme que la responsabilité en matière de lutte contre la criminalité et de sécurité est avant tout celle des États membres. Cette publication ne prétend pas refléter de façon détaillée tous les efforts menés à l’échelle internationale et nationale en matière de contre-terrorisme. Notre objectif est de présenter les principaux enseignements que nous avons recueillis dans ce domaine à travers PACTESUR et d’autres projets financés par l’UE que nous avons menés ou bien dans lesquels nous avons été partenaires, tels que PRoTECT, Secu4All et IcARUS.5
Bien que les villes européennes soient depuis des décennies la cible du terrorisme, on peut avancer que sa version moderne est apparue avec les attentats du 11 septembre 20016 à New York et les attentats de Madrid (2004, 193 morts) et Londres (2005, 56 morts). Ces événements ont marqué un avant et un après. De façon très générale, on peut dire que dans le passé les attentats en Europe étaient principalement le fait de mouvements séparatistes et extrémistes qui agissaient indépendamment les uns des autres. Aujourd’hui, le phénomène est davantage transnational, ce qui renforce la nécessité d’une réponse européenne commune.
Une des conséquences de cette évolution est que le rôle des autorités locales et régionales dans la protection des habitants et des espaces publics contre de telles attaques s’est renforcé, en parallèle au rôle traditionnel des gouvernements et de la police nationale. À l’Efus, nous avons remarqué ces vingt dernières années que nos collectivités membres sont de plus en plus mobilisées pour agir directement sur la protection de leurs espaces publics. Les membres de l’Efus sont désireux d’explorer le rôle et les responsabilités des collectivités face aux menaces terroristes7.
5- Respectivement, Public Resilience using Technology to Counter Terrorism (PRoTECT), Training local authorities to provide citizens with a safe urban environment by reducing the risks in public spaces (Secu4All), and Innovative Approaches to Security (IcARUS).
6- European Union Institute for Security Studies (EUISS) (2017). Trends in terrorism.
7- Efus, Villes contre le terrorisme (2007).
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Le rôle clé des autorités locales et régionales
Depuis le début des années 2000, l’Union européenne reconnaît de plus en plus le rôle clé que jouent les autorités locales et régionales dans la protection des espaces publics. Ainsi, en 2003, le Conseil de l’Europe affirme qu’en parallèle aux gouvernements nationaux et aux organisations et agences internationales, celles-ci ont « la claire responsabilité de protéger leurs citoyens contre les attentats terroristes et les menaces au mode de vie démocratique »8. Après les attentats de janvier 2015 en France et en Belgique9, l’UE réaffirme la nécessité de renforcer la protection des espaces publics et la résilience des communautés locales. Elle met en place différentes initiatives ainsi que des orientations et des outils pour renforcer les échanges d’informations et de connaissances et ainsi mieux comprendre et anticiper les menaces contre les espaces publics. Ces initiatives sont fondées sur une approche holistique et horizontale qui établit un lien entre l’UE et les stratégies nationales et locales ainsi que les partenariats public-privé10
En 2017, la Commission européenne adopte un plan de soutien aux États membres en matière de protection de leurs espaces publics qui comprend un volet financier ainsi que l’échange de pratiques prometteuses et d’enseignements, une coopération renforcée et des réseaux d’échange dédiés. C’est en partie grâce au travail de plaidoyer de l’Efus auprès des institutions européennes pour des politiques de sécurité urbaine fondée sur une approche multipartite et locale, associant tous les acteurs pertinents, qu’est lancé en 2019 le Partenariat sur la Sécurité des espaces publics de l’Agenda urbain pour l’Union européenne. Mené conjointement par l’Efus et les villes de Madrid (Espagne) et de Nice (France), ce Partenariat réunissant 10 membres avait pour objectifs « d’apporter des réponses européennes concrètes à des besoins réels identifiés à l’échelle locale, d’encourager l’échange et la dissémination de pratiques prometteuses et innovantes, et de faciliter un meilleur ciblage des interventions en termes de législation et d’instruments financiers ».
8- Conseil de l’Europe. Congrès des pouvoirs locaux et régionaux. Résolution 159 (2003) sur le rôle et les responsabilités des pouvoirs locaux face au terrorisme.
9- Attentat contre le magazine Charlie Hebdo suivie d’une attaque contre un supermarché kosher à Paris ; attaque contre des policiers en Belgique.
10- Le plan d’action de l’UE de 2017 pour améliorer la protection des espaces publics ; document de travail (2019) des équipes de la Commission européenne sur les bonnes pratiques en matière de protection des espaces publics ; stratégie européenne de sécurité de l’Union 2020-25 ; agenda de l’UE en matière de contre-terrorisme.
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Le Partenariat a produit un plan d’action en six points sur un ensemble de thématiques telles que l’évaluation de l’intelligence artificielle et l’élaboration de recommandations pour la sécurité dès la conception (security by design), pour ne citer que quelques exemples. Ce plan d’action était, à l’heure où nous finalisions cet ouvrage (novembre 2022), en cours de mise en œuvre11
La Commission a aussi publié des orientations et compilé les recommandations/conseils existants. À l’issue d’un large processus de consultation, des pratiques prometteuses ont été identifiées pour améliorer la protection des espaces publics contre les attaques terroristes12
1.3 Le projet PACTESUR : une approche globale et intégrée de la protection des espaces publics
Lancé à la suite des attentats terroristes de 2015 en Europe, notamment celui du 14 juillet 2016 contre la Promenade des Anglais à Nice, le projet PACTESUR fait suite à une série d’initiatives de la ville de Nice, avec le soutien de la Commission européenne et de l’Efus, en matière de prévention et de protection contre les menaces terroristes affectant les espaces publics. En tant que membre de l’Efus, la ville a promu la Déclaration de Nice sur le rôle des villes dans la prévention de l’extrémisme violent et du terrorisme. Co-écrite par le réseau Euromed de villes européennes et méditerranéennes et l’Efus, cette Déclaration a été adoptée par ces deux réseaux ainsi que par 60 maires de 18 pays13
Bien que le nombre d’attentats terroristes dans les pays de l’Union européenne ait récemment légèrement baissé, la dernière vague d’attentats en France (Conflans-Sainte-Honorine et Nice, octobre 2020), en Allemagne (Dresde, octobre 2020) et en Autriche (Vienne, novembre 2020) montrent
11- Agenda urbain (2020). Partenariat de l’UE sur la sécurité des espaces publics (2020), Plan d’Action.
12- Communication de la Commission du 20 mars 2019 sur les bonnes pratiques pour améliorer la protection des espaces publics.
13- Elle a été publiée à la fin de la Conférence des maires de la région euro-méditerranéenne organisée en septembre 2017 par la Ville de Nice et Euromed avec le soutien de l’Efus, de l’Université de Toulouse Jean Jaurès et de l’Université de Nice Sophia Antipolis.
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que la menace terroriste demeure élevée en Europe14. Les espaces publics sont toujours des cibles et les criminels se sont adaptés aux mesures de sécurité en modifiant leur modus operandi et en utilisant des moyens plus difficiles à détecter parce qu’ils font partie de la vie quotidienne, comme l’usage d’un véhicule banal (camionnette ou camion) comme bélier pour pénétrer en force dans un lieu, ou bien des couteaux au lieu d’armes à feu. L’évolution de cette menace, qui est devenue plus diffuse et donc plus difficile à anticiper, pose un défi important aux États membres.
Le projet PACTESUR (janvier 2019–décembre 2022) avait pour objectif de renforcer les capacités des villes et des acteurs locaux en matière de protection des espaces publics, principalement face aux menaces terroristes, mais aussi face à d’autres risques inhérents à ces espaces publics. Utilisant une approche ascendante, PACTESUR a réuni des décideurs locaux, des forces de sécurité, des experts en sécurité, des urbanistes, des praticiens de première ligne, des designers et d’autres professionnels dans l’objectif d’élaborer de nouvelles politiques locales européennes en matière de protection des espaces publics contre différents types de menaces.
Un projet fondé sur quatre piliers
RÉFLEXION
APPROFONDIE
Réflexion sur les normes, les cadres législatifs et la gouvernance locale.
FORMATION SPÉCIALISÉE
Élaboration de formations
spécialisées pour les praticiens locaux de la sécurité.
SENSIBILISATION
Sensibilisation des citoyens et des décideurs politiques sur leur rôle en tant qu’acteurs de la prévention et de la sécurité.
IDENTIFICATION
Identifier les investissements locaux les plus appropriés pour protéger les espaces publics ouverts en partageant une expérience de terrain.
14-En 2021, il y a eu 15 occurrences d’attentats terroristes (qui ont soit échoué, soit ont été déjoués, soit ont été menés à terme) dans l’Union européenne, comparé à 57 l’année précédente. Pour plus d’informations, voir Europol (2022), European Union Terrorism Situation and Trend Report, Publications Office of the European Union, Luxembourg.
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Une approche multipartite et pluridisciplinaire des espaces publics
VILLES ET RÉGIONS PARTENAIRES
Piloté par la Ville de Nice, le consortium PACTESUR comprenait la participation de la ville de Liège (Belgique), la ville de Turin (Italie), l’Association nationale des municipalités italiennes du Piémont (ANCI), le Forum européen pour la sécurité urbaine (Efus) et la Métropole Nice Côte d’Azur.
LE COMITÉ CONSULTATIF D’EXPERTS
Un groupe de 14 spécialistes de diverses disciplines, tels que des architectes, des géographes culturels et des experts en sécurité et en coopération transnationale.
UN GROUPE DE TRAVAIL DE 11 VILLES
Pour échanger des connaissances et des pratiques prometteuses en matière de sécurité des espaces publics.
UN COURS ÉTABLI EN PARTENARIAT
Un cours établi en partenariat entre la Sustainable Design School de Nice (aujourd’hui appelée Besign School) et le projet PACTESUR, fondé sur la recherche et la mise en pratique d’un design centré sur l’humain pour la sécurité.
Comprendre les menaces et les perceptions des citoyens européens
En 2017, la sécurité, notamment le terrorisme, était l’un des principaux sujets de préoccupation des citoyens européens selon l’Eurobaromètre de la Commission européenne. En octobre 2020, selon cette même source, la sécurité arrivait seulement en neuvième place. Seulement 7 % des personnes interrogées mentionnaient la sécurité comme une priorité, comparé à 44 % trois ans auparavant15
Deux crises récentes – la pandémie de Covid et la guerre en Ukraine –ont fait évoluer les motifs de préoccupation des citoyens européens : à
15- Eurobaromètre 2020 de la Commission européenne – Citoyenneté européenne.
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l’échelle de l’UE, la situation économique arrive en tête, suivie de l’environnement et du changement climatique, puis de l’immigration. À l’échelle nationale, la santé demeure la principale préoccupation, légèrement devant la situation économique du pays.
Comme l’affirme la nouvelle stratégie de l’UE pour l’union de la sécurité, adoptée en juin 2020, la crise sanitaire du Covid-19 a « transformé notre notion de la sécurité et des menaces sur la sécurité » et « souligné la nécessité de garantir la sécurité dans l’environnement physique, mais aussi digital »16. La pandémie a aussi changé notre façon d’envisager et d’utiliser les espaces publics. Pendant la pandémie, les villes et les citadins ont opté pour les événements en plein air ; les trottoirs ont été élargis pour faciliter la distanciation sociale, et des terrasses temporaires ont été créées, parfois trop près de la chaussée. Ces transformations, dont certaines perdurent, ont créé de nouvelles situations que les villes doivent gérer pour garantir qu’elles ne créent pas de nouvelles vulnérabilités dans les espaces publics.
Afin de comprendre comment les espaces publics sont affectés par des menaces sur la sécurité, tout autre type d’incident susceptible de mobiliser divers acteurs de la sécurité doit aussi être pris en compte. C’est ainsi que le projet PACTESUR a évolué naturellement pour inclure non seulement les risques d’attentats terroristes, mais aussi la gestion de foule et de mouvements de paniques, ou encore les risques climatiques tels que les incendies et les inondations. Les graves inondations qui ont affecté l’Europe du Nord en 2021 et les incendies qui ont ravagé une grande partie du territoire européen pendant l’été 2022 (y compris, pour la première fois dans l’histoire, la ville de Londres), ont montré combien les villes européennes sont exposées aux conséquences du changement climatique. Comment peuvent-elles se préparer à ce type de désastre et renforcer la résilience du public ?
Un autre facteur à prendre en compte (à l’heure où nous écrivons ces lignes) est la crise énergétique résultant de l’invasion de l’Ukraine par la Russie qui a conduit un certain nombre de villes européennes à baisser le niveau d’éclairage public, ce qui peut avoir un effet sur la sécurité urbaine la nuit et sur le sentiment d’insécurité des citoyens, notamment les femmes et les filles.
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16- Communication de la Commission du 24 juillet 2020 sur la stratégie de sécurité de l’union de la sécurité de l’UE.
En ligne avec les priorités de l’UE
En ligne avec les priorités stratégiques de l’Union européenne, et notamment la Direction générale Migrations et affaires des intérieures (DG HOME), sur la protection et la gestion des espaces publics, l’Efus a participé à l’élaboration de dispositifs de prévention dans le cadre du projet PRoTECT et de formations pour les collectivités dans le cadre du projet Secu4All. L’Efus a également porté les préoccupations des col-lectivités sur cette question au travers du Partenariat sur la sécurité des espaces publics de l’Agenda urbain pour l’Union européenne, et au sein de l’intergroupe URBAN du Parlementeuropéen,dontilestparte-naireofficiel. >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>
Le positionnement de l’Efus
Faire en sorte que les espaces publics urbains soient sûrs, inclusifs et ouverts à tous est un défi complexe pour les collectivités. Depuis 25 ans, l’Efus soutient les collectivités dans la planification, la conception et la gestion des espaces publics. Dans son Manifeste Sécurité, Démocratie et Villes, l’Efus souligne « de nombreuses études et expériences montrent que l’aménagement, la gestion et l’animation des espaces publics ont un impact sur la sécurité et le sentiment d’insécurité ». Il recommande de prendre en considération les multiples usages des espaces publics sur la base de données objectives et subjectives ; d’associer le public, notamment les femmes et les minorités, à la coproduction des politiques de sécurité, et de garder un équilibre sain entre la sécurité et le respect des droits fondamentaux.
L'expérience de l’Efus et les enseignements du projet PACTESUR montrent que pour que les espaces publics soient vivants et attrayants, les citoyens doivent y être et s’y sentir en sécurité. Ils doivent aussi être en mesure de s’exprimer, quel que soit leur origine ethnique, leur religion, leur orientation sexuelle, leur identité de genre ou leur statut socio-économique.
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Une approche pluridisciplinaire et transversale de la protection des espaces publics
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Chapitre 2
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comprendre le problème, donc pas de haut en bas, pas seulement tech, et pas seulement experte. Pensez à l’espace public comme une toile qui n’est jamais tout à fait blanche ou neutre. Commencez par comprendre le contexte et prenez-le en compte dans sa totalité : les spécifications physiques du lieu, l’histoire récente, les histoires passées, les traumatismes, l’identité culturelle et les marqueurs culturels qui en font un espace mémorable ».
Laetitia Wolff, consultante en impact du design et partenaire associée de PACTESUR17
L’Efus promeut depuis 35 ans une coproduction des politiques de sécurité qui associent un large éventail d’acteurs des secteurs public et privé ainsi que les citoyens.
La gestion des espaces publics demande que les villes et les autorités locales travaillent en partenariat avec différents acteurs et organisations, notamment les urbanistes, les services de secours, les services de transport, les entreprises et commerces locaux, les universités et la société civile. La sécurité des espaces publics n’est pas l’apanage de la police, ni une question qui requiert davantage de technologie, ni le domaine réservé des spécialistes. Elle relève de la responsabilité d’une gamme d’acteurs représentant une variété de disciplines et de parcours.
La nécessité d’une approche multipartenariale et pluridisciplinaire est mise en avant par la nature même du projet PACTESUR, qui a impliqué non seulement les villes et régions partenaires, mais aussi un groupe de travail de villes associées18 et un Comité consultatif d’experts qui
17- Laetitia Wolff est consultante en impact du design et formatrice. Elle a dirigé le cours élaboré en partenariat entre la Sustainable Design School de Nice (aujourd’hui appelée Besign School) et le projet PACTESUR, qui était fondé sur une action-recherche expérimentale et une approche créative et centrée sur l’humain. Voir aussi la section (dans ce chapitre) Sécurité par le design : comment rendre les espaces publics sûrs et ouverts à tous
18- Le projet PACTESUR comprenait un groupe de 11 villes associées (Athènes, Édimbourg, Essen, Gdańsk, Leeds, Lisbonne, Londres, Madrid, Munich, Riga et Xàbia) qui avaient des problèmes et des connaissances spécifiques en matière de protection des espaces publics.
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« Adoptez une approche ouverte, pluridisciplinaire et transversale pour
réunissait 14 spécialistes de diverses disciplines telles que l’architecture, la géographie culturelle, la sécurité et la coopération transnationale. Le projet a aussi mis en œuvre un cours en partenariat avec la Sustainable Design School de Nice (aujourd’hui intitulée Besign School) qui était axé sur la recherche et une approche de la sécurité centrée sur l’humain.
Le projet PACTESUR a non seulement exploré les mesures classiques de protection telles que la présence policière, la technologie, les bornes ou les barrières, mais aussi les mesures dites « douces » destinées à encourager les citoyens à s’approprier ces espaces par l’art, le design, ou encore à travers l’implication d’entreprises locales et d’organisations de la société civile. Il s’agit de faire en sorte que ces espaces soient peuplés, vivants et attrayants, ce qui les rend rassurants, à l’inverse d’espaces publics désertés que les citoyens évitent parce qu’ils semblent abandonnés, ou bien sursécurisés avec des barrières et une technologie qui semblent décourager la fréquentation. C’est un domaine où les collectivités ont beaucoup de marge de manœuvre et peuvent mobiliser et coordonner un large éventail d’acteurs locaux des secteurs public et privé.
« Plutôt que de nous demander comment créer des espaces publics toujours plus sécurisés, nous devrions peut-être explorer comment assurer un minimum de sécurité qui permette à d’autres valeurs civiques, d’autres finalités sociales et d’autres biens publics de s’épanouir. Des espaces où la réglementation est légère et non-intrusive qui permettent, quand c’est possible, aux citoyens de s’autoréguler ».
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Apporter un minimum de sécurité qui favorise d’autres valeurs civiques
Adam Crawford, professeur de Criminologie et de Justice pénale, Université de Leeds
La conception et la gestion d’espaces publics sûrs sont l’un des quatre domaines de travail du projet IcARUS que mène l’Efus pour une durée de quatre ans. Ce projet s’appuie sur les connaissances accumulées depuis 30 ans en matière de politiques et de pratiques de sécurité urbaine pour aider les acteurs locaux de la sécurité à mieux anticiper et répondre aux défis de sécurité.
L'Université de Leeds a conduit une étude sur les tendances, tensions et lignes de fracture qui ont caractérisé l’évolution sur une période de 30 ans de la conception des espaces publics et des réglementations qui s’y appliquent en Europe et au-delà19. L’étude a révélé quatre tendances :
1. Une tendance à altérer l’environnement construit et physique pour éliminer par le design les opportunités criminogènes, souvent inspirée par une logique d’« exclusion préventive » et de surveillance excessive comme moyen de dissuasion.
2. La logique d’intervention détourne l’attention des aspects locaux et contextuels des lieux, de ‘ce qui marche’, ‘où’ et ‘pour qui’. Simultanément, cette logique ne cherche pas à savoir quels groupes de personnes bénéficient de tels ou tels interventions et aspects du design dans un lieu/une situation donnés et à un tel ou tel moment.
3. Les solutions technologiques supplantent les solutions humaines pour répondre aux préoccupations de sécurité. On s’intéresse peu à l’intersection entre les processus sociaux et technologiques.
4. La sursécurisation des espaces publics : dans leur quête de sécurité, la mise en œuvre de solutions peut favoriser le sentiment d’insécurité parce qu’elles alertent les citoyens sur les risques, aiguisent leur sensibilité et émaillent ces espaces de signes visibles indiquant l’existence de menaces.
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19- Efus, IcARUS (2021). The Changing Face of Urban Security Research: A Review of Accumulated Learning, Université de Leeds.
In practice: a multi-stakeholder, comprehensive strategy to protect public spaces in Gdańsk (Poland)
Cas pratique : la stratégie de protection des espaces publics de Gdańsk (Pologne)
Following the assassination of Mayor Pawel Adamowicz during a public event in 2019, the City of Gdańsk (Poland), one of PACTESUR’s 11 associated cities, developed a strategy aimed at increasing the capacity to respond to future security threats in public spaces.
The strategy included the rebuilding of the Municipal Crisis Management Centre, the improvement of the communication and management system, the development of a CCTV network as well as other technical and architectural elements contributing to safer public spaces.
À la suite de l’assassinat du Maire Pawel Adamowicz lors d’un événement public en 2019, la ville de Gdańsk (Pologne), l’une des 11 villes associées du projet PACTESUR, a élaboré une stratégie pour mieux répondre aux menaces affectant la sécurité des espaces publics. Elle comprenait la reconstruction du Centre municipal de gestion de crise, l’amélioration du système de communication et de gestion, le déploiement d’un réseau de vidéosurveillance, ainsi que d’autres éléments techniques et architecturaux pour améliorer la sécurité des espaces publics.
Diverses organisations municipales et nationales ont participé à ce projet, notamment le service de Sécurité et de gestion de crise, la police municipale, la police nationale, l’Agence de sécurité intérieure, l’Agence municipale de sécurité, les pompiers, Gdańsk immobilier, l’Agence municipale des routes et des espaces verts, des entreprises de sécurité privée, des spécialistes du contre-terrorisme et des associations. Le projet PACTESUR et les expériences partagées par les autres villes partenaires du projet ont inspiré cette nouvelle stratégie.
A number of municipal and national organisations were involved in the project, including the Department for Security and Crisis Management, the municipal police, the national police, the Internal Security Agency, the Municipal Security Agency, the fire brigade, Gdańsk Real Estate, the Gdańsk Road and Greenery Authority, private security companies, anti-terrorism specialists and volunteer groups. The PACTESUR project and the experience shared by the other partner cities were a great source of inspiration for its new strategy. This project will serve as the foundation for the whole safety management system of the city for the coming years.
Ce projet servira de base pour l’ensemble du système de gestion de la sécurité de la ville, pour les années à venir.
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2.1 Associer les communautés locales
Le projet PACTESUR, de même que d’autres projets européens dans lesquels l’Efus participe (ou a participé), ainsi que notre travail permanent avec nos villes membres sur la question de la sécurité des espaces publics, mettent en lumière la nécessité d’impliquer et de faire participer les citoyens au développement et à la gestion d’espaces publics sûrs. En effet, l’expérience montre que lorsque les citoyens participent à la vie de leur quartier, y compris à sa sécurité, ils ressentent un sentiment d’appartenance et accordent davantage de valeur à leur ville et leur quartier, y compris ses espaces publics. Ceci tend à réduire les troubles à l’ordre public et la délinquance. La question est de savoir comment. Quels moyens ou dispositifs fonctionnent le mieux pour encourager la participation citoyenne ?
Le consensus parmi les villes membres de l’Efus et ses partenaires est que la première étape consiste à identifier les besoins des communautés locales, les ressources existantes et les organisations qui peuvent contribuer (par exemple, les organisations de la société civile et les associations). De très nombreuses collectivités travaillent avec des organisations de la société civile dans divers domaines de la vie publique locale. Collaborer avec elles est un bon point de départ lorsque l’on cherche à associer les habitants, par exemple pour évaluer le sentiment d'(in)sécurité dans un espace public donné, ou bien avant de mettre en œuvre une mesure ou un dispositif de prévention, ou encore pendant ou immédiatement après un incident. Une telle analyse doit aussi examiner comment différents groupes de population utilisent un espace public donné.
Une deuxième étape consiste à entrer directement en contact avec des membres individuels ou des groupes représentatifs de la communauté locale, comme des habitants qui sont respectés par leurs pairs, ou des chefs religieux, ou les dirigeants d’associations, etc. Ce type d’acteurs ont la capacité d’entrer en contact avec et d’avoir une influence sur de nombreux domaines, notamment domestique, professionnel, social et culturel20
20- Voir chapitre 5, cas pratique : la boîte à outils du Strong Cities Network
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Une autre pratique souvent utilisée dans les villes est celle des marches exploratoires lors desquelles des citoyens représentant différents groupes de population (par exemple les femmes ou les seniors) marchent dans certains espaces publics, généralement la nuit, et notent tous les éléments qui contribuent au sentiment d’insécurité, comme le manque d’éclairage public ou la présence de graffitis menaçants. Leurs comptes-rendus donnent aux autorités locales et aux responsables de l’urbanisme des informations directes et précieuses sur la façon dont les citoyens vivent ces espaces publics.
In practice: a multi-stakeholder, comprehensive strategy to protect public spaces in Gdańsk (Poland)
Cas pratique : conseils locaux de prévention de la délinquance au Pirée (Grèce) et à Montreuil (France)
On peut aussi encourager la participation des citoyens au travers des Conseils locaux de prévention de la délinquance (CLPD), une structure de gouvernance utilisée, notamment en France, depuis le milieu des années 1980 dans le cadre des politiques nationales de prévention dans le but de réunir un large éventail d’acteurs locaux de la sécurité urbaine.
Following the assassination of Mayor Pawel Adamowicz during a public event in 2019, the City of Gdańsk (Poland), one of PACTESUR’s 11 associated cities, developed a strategy aimed at increasing the capacity to respond to future security threats in public spaces.
The strategy included the rebuilding of the Municipal Crisis Management Centre, the improvement of the communication and management system, the development of a CCTV network as well as other technical and architectural elements contributing to safer public spaces.
Les CLPD ont pour mission de favoriser une collaboration multisectorielle et pluridisciplinaire et de veiller à ce que toutes les voix soient entendues, non seulement celles des acteurs de la sécurité, mais aussi celles des citoyens.
Au Pirée, le Conseil local de prévention de la criminalité (CLPC) réunit différents services municipaux, des experts en criminologie, des acteurs de première ligne et des organisations non gouvernementales. Il cherche à créer un climat de sécurité et de confiance et à mieux connaître la vie quotidienne des habitants afin d’identifier leurs besoins et leurs difficultés.
A number of municipal and national organisations were involved in the project, including the Department for Security and Crisis Management, the municipal police, the national police, the Internal Security Agency, the Municipal Security Agency, the fire brigade, Gdańsk Real Estate, the Gdańsk Road and Greenery Authority, private security companies, anti-terrorism specialists and volunteer groups. The PACTESUR project and the experience shared by the other partner cities were a great source of inspiration for its new strategy.
Cet objectif est aussi celui de la ville de Montreuil, où le Conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) cherche à encourager la participation des habitants. Cela reste
This project will serve as the foundation for the whole safety management system of the city for the coming years.
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difficile parce que cela signifie identifier et opérationnaliser des canaux de communication avec les citoyens qui soient efficients, ainsi que des méthodes et outils pour favoriser leur participation au travail du CLSPD.
Plus d’informations sur le projet BeSecureFeelSecure ici.
Les villes peuvent aussi conduire des projets limités dans le temps auxquels les citoyens sont associés, par exemple lors de la rénovation d’un quartier. C’est ce qu’a fait la ville de Turin (Italie) avec le projet ToNite (septembre 2019–août 2022), qui avait pour objectif de réduire le sentiment d’insécurité des habitants de deux quartiers situés près du fleuve Dora et d’améliorer la qualité de vie, notamment la nuit. Le projet était en grande partie fondé sur la participation des citoyens à l’élaboration et la mise en œuvre d’une série d’initiatives et de services locaux qui ont amélioré la qualité de vie. Le projet a également mené une recherche ethnographique et sociale pour mieux comprendre les comportements, les attitudes et les valeurs à l'œuvre dans ces quartiers et voir comment ils sont vécus par les habitants. Le projet a pris en compte les différentes zones d’intérêt de ces quartiers, notamment les espaces verts et les espaces publics, et la différence entre le sentiment de sécurité et de qualité de vie le jour et la nuit. Une des méthodes utilisées a été celle des marches exploratoires avec les habitants.
> Plus d’informations sur le projet ToNite ici.
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Les associations volontaires de prévention de la criminalité
La participation citoyenne à la protection des espaces publics peut aussi venir des citoyens eux-mêmes et il existe de nombreux exemples en Europe d’initiatives lancées par des citoyens. Un exemple classique est celui de l’association britannique Neighbourhood Watch, qui se présente comme « le plus grand mouvement volontaire de prévention de la criminalité d’Angleterre et du Pays de Galles, avec plus de 2,3 millions de membres ».
Cette association offre des conseils pratiques aux communautés locales sur divers types de crimes et délits, tels que les comportements antisociaux, les cambriolages, le harcèlement de rue, la violence domestique et la cybercriminalité.
On peut aussi citer l’exemple de Setúbal (Portugal), où la municipalité a enrôlé des citoyens seniors pour « patrouiller » la ville, notamment une des principales artères ainsi qu’un parc situé dans un quartier où de nombreux actes de vandalisme avaient lieu, tels que les graffitis sauvages et les atteintes contre les arbres et le mobilier urbain. Cette expérience a un double bénéfice : elle encourage les seniors à sortir, être actifs et contribuer à la société, et elle permet de prévenir les incivilités.
À Bologne (Italie), les Assistants civiques sont des volontaires qui « patrouillent » autour des écoles, des jardins publics et des parcs. Leur mission est d’améliorer la sécurité des citoyens et de les rassurer par leur présence. Ces volontaires opèrent de façon concertée avec la mairie et la police, en étroite collaboration avec les mairies de quartiers et les unités locales de la police municipale. Cette stratégie a été adoptée par de nombreuses autres villes italiennes telles que Brescia, Forli, Gênes, Legnano et Parme.
> Plus d’informations sur Neighbourhood Watch ici.
> Plus d’informations sur le dispositif de Setúbal ici.
> Plus d’informations sur le dispositif de Bologne ici.
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Cas pratique. Le rôle des citoyens dans la planification d’urgence
Les catastrophes climatiques récentes, comme les inondations en Belgique et en Allemagne et la tempête Alex dans le sud de la France en 2021, ont mis en lumière l’importance d’associer les citoyens le plus en amont possible dans la prévention et la réponse à ce type de crise. Le projet ALARM (2017-2021), dans lequel l’Efus était partenaire, a été en grande partie consacré au rôle des citoyens dans la planification d’urgence. Le projet a ainsi organisé un séminaire sur les Réserves Communales de Sécurité Civile créées par plusieurs villes françaises, dont Nice qui a mené le projet PACTESUR21.
Il s’agit de groupes de volontaires qui peuvent aider les services d’urgence, tels que des infirmier.es, des techniciens radio, des électriciens, des plombiers et des charpentiers qui peuvent, par exemple, construire des abris, aider à enlever les décombres, ou bien établir un cordon de sécurité autour d’immeubles endommagés. Les volontaires ont joué un rôle clé dans les secours en Belgique et ont même sauvé des vies. Ce type d’intervention doit cependant être bien organisé. Les volontaires doivent être formés et leur rôle doit être clairement défini dans le cadre des mesures d’urgence. À noter : ils peuvent aussi constituer un vivier de recrutement pour les services d’urgence.
Quelques points à signaler
Associer les citoyens à la protection des espaces publics peut être complexe. Toutes les initiatives émanant de la société civile ne sont pas forcément légitimes ni ne doivent être soutenues par les autorités locales (par exemple les groupes d’autodéfense). Il est important de toujours préserver un équilibre entre l’autorité publique qui est mandatée par les électeurs et les initiatives promues par des groupes de citoyens qui ne représentent pas nécessairement la population dans son ensemble.
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21- Voir Annexe 4 pour une description plus détaillée du projet ALARM.
C’est pourquoi les initiatives citoyennes directes doivent être complémentaires des politiques et des dispositifs mis en place par l’autorité locale ou régionale (maires ou autres) plutôt que de les substituer. Cela demande que l’autorité locale suive de telles initiatives et, idéalement, soit en contact avec leurs promoteurs.
De plus, certains types de dispositifs ou d’initiatives émanant de la société civile demandent une formation adaptée, notamment celles qui sont liées à la protection civile ou les Réserves Communales de Sécurité
Civile mentionnées plus haut. De façon plus large, les citoyens ou les entreprises locales qui organisent volontairement des activités de surveillance, de contrôle ou d’assistance au public en cas d’accident, d’attentat ou de catastrophe doivent être connus des autorités publiques et dûment informés et formés.
2.2 Sécurité par le design : comment rendre les espaces publics sûrs et ouverts à tous
De nombreuses études ont montré que la planification, la conception et la gestion des espaces publics ont un impact sur la sécurité et le sentiment d’insécurité des citoyens. On parle dans ce cas de Sécurité par le design (Security by Design ou SbD), un système par lequel les aspects de sécurité sont intégrés dès la conception et le design d’un espace public, en prenant en compte son caractère ouvert et son intégration au paysage urbain. Cette approche peut contribuer à équilibrer les efforts pour renforcer la résilience urbaine tout en promouvant le caractère ouvert et inclusif des espaces publics22. L’une des modalités de cette approche est la Prévention de la délinquance par l’aménagement et la planification urbaine (Crime Prevention through Urban Design and Planning ou CP-UDP), un concept qui a été appliqué dans le projet européen Cutting Crime Impact (CCI) dans lequel l’Efus était partenaire23. La CP-UDP cherche à influencer de façon positive le comporte-
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22- Agenda urbain pour l’UE (2020). Partenariat sur la sécurité des espaces publics.
23- Efus, CCI (2020). Fiche de synthèse sur La prévention de la criminalité par le design urbain.
ment des utilisateurs des espaces urbains en incorporant des éléments physiques et en encourageant des comportements prosociaux par un design et une gestion des lieux de qualité.
Qu’est-ce que l’approche de Sécurité par le design ?
Le Partenariat sur la sécurité des espaces publics de l’Agenda urbain pour l’UE définit la sécurité par le design comme « un concept général et une nouvelle culture qui devraient être développés dans toutes les villes européennes. Il s’agit de concevoir dès le départ l’urbanisme, l’architecture et le mobilier urbains, les flux et les infrastructures en fonction des problèmes de sécurité. Il s’agit de protéger les immeubles, les espaces publics, les infrastructures essentielles, les méthodes de détection et les technologies ».
En d’autres termes, cette approche s’appuie sur les connaissances existantes en matière de protection physique, de renforcement des sites et des cibles, de contrôle des accès et de technologies telles que la vidéosurveillance. Elle est fondée sur les principes de résilience urbaine, de qualité de vie dans les villes, d’inclusivité, sur le sentiment d’(in)sécurité, sur la coproduction de la sécurité, et sur l’utilisation des technologies numériques et les sciences du comportement.
La Sécurité par le design est aussi connue sous les termes d’Espace défendable, de Prévention de la criminalité par le design, la planification et l’aménagement urbains, de Secured by Design, de Design contre la criminalité et de Prévention de la criminalité par l’aménagement urbain (Crime Prevention Through Environmental Design, CPTED). Cette dernière expression est la plus utilisée dans le monde (voir ISO 22341:2021)24.
Qu’est-ce que la Prévention de la Criminalité par l’Aménagement Urbain (Crime Prevention Through Environmental Design, CPTED) ?
Cette approche vise à prévenir la criminalité, y compris le terrorisme, ainsi que les comportements antisociaux et le sentiment d’insécurité.
24- Voir Annexe 2 pour une description plus détaillée des processus et des principes de la CPTED en matière de protection des espaces publics, par Paul van Soomeren, fondateur de DSP Groep.
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La CPTED implique deux concepts, physique et social, qui doivent tous deux être abordés en profondeur afin de mettre en œuvre des solutions efficaces. L’approche vise à inclure toutes les parties prenantes, quels que soient leur catégorie sociale et leur niveau d’expertise. La CPTED est axée sur un domaine/environnement spécifique et exige des mesures fondées sur des données probantes. Pour qu’elle fonctionne efficacement, l’approche doit être adaptée spécifiquement à un temps et un lieu donnés, par exemple en se focalisant sur un bâtiment. L’approche s’avère efficace lorsqu’elle est soigneusement et précisément ciblée, comme nous l’avons vu par exemple aux Pays-Bas et au Royaume-Uni25.
L'approche situationnelle de prévention de la criminalité
Dans les années 1980, Ronald V. Clarke a défini l’approche situationnelle de prévention de la criminalité26. Elle est centrée sur une gestion, un design ou une manipulation permanente de l’environnement immédiat et cherche à prévenir certains types de délits. La prévention intervient sur l’environnement dans lequel la criminalité se produit, plutôt que sur les personnes qui commettent des délits spécifiques. Dans le cadre de cette approche, Cornish et Clarke (2003) ont proposé 25 stratégies et techniques pour prévenir et réduire la criminalité27.
Cas pratique : identifier les investissements
L’approche de Sécurité par le design a été centrale dans le projet PACTESUR. L’un des quatre axes du projet était l’identification des investissements locaux les plus adaptés pour sécuriser des espaces publics touristiques et ouverts par la mise en place d’équipements de sécurité pilotes dans les villes partenaires du projet – Nice, Liège et Turin – qui puissent être répli-
25- Efus, CCI (2020). Fiche de synthèse sur la Prévention de la criminalité par le design urbain.
26- Clarke, R. V. (1995) Situational Crime Prevention, Crime and Justice (Vol. 19), Building a Safer Society: Strategic Approaches to Crime Prevention, pp. 91-150.
27- Cornish, D.B., et Clarke, R.V. (2003) Opportunities, Precipitators and Criminal Decisions: A Reply to Wortley’s Critique
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locaux les plus adaptés
qués dans d’autres villes européennes. Une attention toute particulière a été portée à leur intégration dans le paysage urbain et le patrimoine culturel, mais aussi à l’esthétique, au design et à la mobilité urbaine afin d’éviter la « bunkerisation » des villes. Ces équipements de sécurité étaient considérés comme des outils complémentaires contribuant à la sécurité des espaces publics, mais en aucun cas une fin en soi.
À Nice, un équipement anti-intrusion a été développé pour la Promenade des Anglais, notamment pour prévenir des attentats similaires à celui perpétré par camion-bélier le 14 juillet 2016.
À Liège, une barrière mobile anti-véhicules a été mise en place pour protéger la place Saint-Lambert et Le Carré28.
À Turin, un système high-tech de contrôle des foules a été installé sur la Piazza Vittorio Veneto dans le but de prévenir les mouvements de panique comme celui, catastrophique, qui avait eu lieu en juin 2017 pendant la projection en plein air de la finale de la Ligue des Champions de football.
Cas
pratique
: Guide pour l’intégration des systèmes de sécurité des espaces publics, Région Bruxelles-Capitale
La Région Bruxelles-Capitale, représentée par safe.brussels, a développé un guide pour les exploitants, les gestionnaires et les designers d’espaces publics qui présente les grands principes de la sécurité de ces espaces. Il met notamment l’accent sur les risques terroristes et extrémistes et les attentats au véhicule-bélier.
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28- Voir Annexe 3 pour un résumé d’une étude sur la prévention des menaces par véhicule-bélier et engins explosifs à bord de véhicules (Vehicle Borne Improvised Explosive Device), par le Centre britannique pour la protection des infrastructures nationales (CPNI).
Le guide souligne la nécessité de mener deux types d’audit : l’un sur la sécurité (menaces et risques) et l’autre sur la valeur d’usage d’un lieu. Recouper ces deux types d’audit permet d’incorporer les exigences de sécurité aussi efficacement que possible dans le design d’un espace public et de son mobilier urbain. Même lorsque l’on conduit de tels audits sur un espace public donné, il est recommandé de les élargir à une zone plus étendue, par exemple tout un quartier, voire une municipalité, afin d’avoir une vision générale cohérente. Cela permet aussi de mettre en place des périmètres qui permettent de gérer les cas d’une façon bien organisée. La phase de design/conception peut démarrer après ces audits. Le guide examine quatre types d’espaces publics et recommande des principes de design pour chacun d’eux : rues, zones piétonnières, squares et parcs.
> Plus d’informations ici.
Sécurité par le design : 10 règles générales
Le Partenariat sur la sécurité des espaces publics de l’Agenda urbain pour l’UE a élaboré des directives pour les collectivités territoriales sur le design architectural et spatial (le processus de sécurité par le design)29. Ce document intitulé 10 Rules of Thumb (« 10 règles générales ») (2021) a pour objectif d’aider les villes et les régions qui appliquent l’approche de sécurité par le design en les dotant d’une liste de contrôle pour une application efficiente.
> Plus d’informations ici.
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29- Agenda
6).
urbain (2019). Security by Design: SecureCity, 10 Rules of Thumb for Security by Design (Action
2.3 Planification et design urbains : des espaces publics inclusifs et sûrs
« Il est crucial de prendre en compte l’influence des aménagements urbains sur le sentiment d’insécurité des citoyens. Si on peut prévenir la criminalité avant tout par des programmes sociaux et éducationnels, agir au niveau de l’environnement physique constitue une approche intéressante. Les mesures architecturales, même si elles ne suffisent pas à réduire la criminalité, sont susceptibles de limiter à la fois les risques de méfaits et la crainte d’être victime d’un délit ».
Eric Valerio, Architecte auprès du Service public fédéral Intérieur du gouvernement belge et membre du Comité d’experts de PACTESUR
Principes clés de la conception d’espaces publics sûrs par les mesures environnementales
Il est important d’appliquer les principes suivants lorsque l’on rénove ou construit un espace public : la fréquentation, la diversité, la pénétrabilité, la clarté et la visibilité, l’éclairage public, et l’attractivité.
1. Fréquentation
Le nombre d’utilisateurs d’un espace public semble être le facteur le plus important contribuant au sentiment de sécurité. Faire en sorte que différents groupes d’utilisateurs soient présents dans l’espace public à différents moments du jour et de la nuit crée un mouvement d’aller-retour qui renforcera le contrôle social.
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2. Diversité
Lorsque l’on designe et développe un espace urbain, il convient d’encourager une variété d’activités (logements, emploi, loisirs) afin d’attirer différents publics à différents moments du jour et de la nuit. Il convient également de créer des zones de repos où les habitants peuvent s’asseoir et discuter.
Un autre aspect important est d’encourager la mixité générationnelle : lorsque des habitants senior et des jeunes familles partagent un quartier, les personnes plus âgées se sentent plus en sécurité.
3. Pénétrabilité
La pénétrabilité signifie qu’il doit y avoir plusieurs routes d’accès et que le trajet vers l’espace public doit être aussi agréable que possible :
En offrant des fonctions secondaires le long du chemin (ce qui renforce l’activité, l’attractivité et le contrôle social).
En offrant une définition et une structure claires de la zone traversée par un éclairage adéquat.
De manière générale, un environnement moins pénétrable réduira le contrôle social, ce qui aura un impact sur la sécurité et le sentiment d’insécurité des habitants et autres utilisateurs.
4. Clarté et visibilité
L’espace public doit être clairement signalé et facile d’utilisation : les gens se sentent plus en sécurité dans un espace public doté d’une signalisation claire.
La visibilité renvoie à voir et être vu. Il faut qu’un nombre suffisant de personnes soient présentes dans un espace public et puissent tout voir et tout entendre. Un certain degré de voisinage est aussi nécessaire pour que les habitants puissent facilement connaître leurs voisins et l’environnement proche.
Il est également important de prévoir de la végétation, tout en veillant à son volume et à son maintien pour qu’elle ne cache pas la lumière.
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5. Un éclairage suffisant
Un quartier bien éclairé influence le sentiment de bien-être et de confort des habitants, et donc leur sentiment de sécurité. L’éclairage contribue également à réduire la délinquance. En règle générale, l’éclairage ne doit être installé que lorsque nécessaire. Un site ne doit pas être éclairé aveuglément, mais de façon équilibrée. Les personnes doivent pouvoir se reconnaître à une distance minimum de quatre mètres.
6. Attractivité
D’autres aspects du design ont une influence sur le sentiment de sécurité :
L’esthétique. Les gens aiment différentes formes, tailles et textures. Mais il existe aussi quelques valeurs universelles : par exemple la nature est attrayante (la végétation, l’eau, la chaleur, la lumière du soleil). À l’inverse, les zones vastes créent un sentiment d’insécurité.
La maintenance et la gestion déterminent pour une grande part l’attractivité d’une zone. Cependant, il ne s’agit pas non plus de créer un quartier parfaitement maintenu.
Lisibilité et propreté : tout élément qui peut indiquer qu’un espace est détérioré ou abandonné affecte directement le sentiment d’(in) sécurité.
Durabilité technique : le design du mobilier urbain (bancs, corbeilles, etc.) doit être suffisamment solide pour résister à un usage intensif et aux actes de vandalisme.
Durabilité sociale : la cohésion sociale d’un quartier détermine en grande partie le sentiment de sécurité des habitants. Il convient d’encourager la participation à la vie du quartier. Un signe de reconnaissance, comme par exemple offrir des plantes pour le jardin, est généralement suffisant pour encourager les gens à prendre soin des espaces verts et de la propreté de leur environnement.
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> Ces conseils sont extraits du guide rédigé par Eric Valerio pour le projet PACTESUR. La version intégrale est disponible ici
Cas pratique : l’expérience de Lisbonne, Portugal, et la Prévention de la criminalité par l’aménagement
urbain
La ville de Lisbonne investit en Prévention de la criminalité par l’aménagement urbain (CPTED selon le sigle en anglais) depuis 2011, par le biais d’activités de sensibilisation telles que des ateliers, des formations pour les agents de police de proximité et d’autres services de la police municipale et pour le personnel municipal qui intervient en matière d’aménagement des espaces publics.
L'approche consistant à inclure la CPTED dans le modèle de la police de proximité permet aux agents d’acquérir les connaissances, les outils et les compétences suivants :
1. Renforcement des capacités de l’équipe avec des stratégies et des outils permettant que les patrouilles à pied contribuent réellement à améliorer le sentiment de sécurité des habitants et leur bien-être.
2. Développement des et formation aux compétences techniques, relationnelles et institutionnelles au sein de la communauté locale ; réflexion de l’équipe sur les difficultés et les bienfaits de la mise en œuvre du modèle de police.
3. Amélioration de la qualité du travail mené sur le territoire grâce à des directives fondées sur des stratégies préventives et des méthodologies participatives favorisant la participation des habitants à la sécurité locale.
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La formation à la CPTED a amélioré l’identification des problèmes et de leur solution et contribué à favoriser une utilisation plus positive et saine des espaces publics. La coordination avec d’autres services municipaux comme la maintenance des espaces publics, l’urbanisme, l’éclairage public et les logements sociaux fonctionne beaucoup mieux et permet d’obtenir des résultats plus durables.
> Plus d’informations ici.
Étude de cas : les approches de design centrées sur l’humain pour la protection des espaces publics
La Sustainable Design School de Nice (SDS) a été missionnée pour évaluer les équipements de sécurité installés par les villes partenaires du projet – Nice, Turin et Liège –, créer des systèmes et des stratégies de sécurité et imaginer des façons de faire participer les citoyens à ce processus. Ce cours fondé sur un partenariat explore le rôle du design dans la protection des espaces publics et les approches de design centrées sur l’humain en matière de sécurité.
La première partie du projet In/Pact de la SDS a créé des interventions de rue interactives, des jeux de société et des stratégies pour la participation des citoyens. Le projet a remis en question le système traditionnel de prise de décision de haut en bas en faveur d’une approche participative du design urbain. Cette approche a aussi adopté une perspective nouvelle en impliquant des migrants.
Occupy est un jeu inspiré de la pétanque qui permet d’explorer les idées que se font les gens du terrorisme.
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« Pourquoi le terrorisme est important ? Il permet que nous autres responsables de la sécurité ayons un travail ! Mais en fait, ce n'est pas important. C'est une façon extrême de réagir à ce qu'ils veulent. C'est une question que je trouve très déconcertante ». Expert en sécurité Pactesur, Royaume-Uni
Le Projet Citiz a invité des étudiants à étudier la Piazza Veneto à Turin et la place Saint-Lambert à Liège. Comme aucun voyage n’était possible en raison de la pandémie de Covid, ils ont mené leur recherche avec de nombreux entretiens en ligne avec des habitants de ces quartiers, des architectes, des criminologues, des designers, des représentants de la police, des psychologues, des éducateurs et des directeurs d’urban labs.
Les étudiants ont conçu une stratégie fondée sur quatre solutions de design représentées par des verbes d’action simples : Être informés, Informer, Agir, et S’engager. Les solutions qu’ils ont conçues comprennent une application, un bracelet d’alerte et un système de barrières en forme de bouclier pour les événements publics. Les étudiants ont inclus dans chacune de leurs propositions des solutions de design et une évaluation de leur impact pour que les services municipaux et la police puissent avoir un feedback automatique intégré aux nouveaux équipements.
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En ce qui concerne la gestion des foules (comportements et mouvements), les étudiants ont cherché des solutions permettant d’éviter la « vision tunnel » et le « phénomène de l’arche » qui créent des zones d’engorgement lors de mouvements de foule. Ils ont cherché à créer des équipements de sécurité qui soient immédiatement reconnaissables, visibles et qui contribuent à fluidifier le mouvement de la foule vers les sorties. Les recherches préliminaires ont exploré l’utilisation d’effets sonores et olfactifs, de codes visuels et de la lumière pour envoyer des messages et diriger la foule.
Le projet a aussi exploré l’idée de mobilier protecteur ou avec un design conçu pour offrir une cachette pendant une attaque.
> Ces informations sont tirées d’un entretien avec Laetitia Wolff pour le projet PACTESUR. La version intégrale est disponible ici
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2.4 L’importance de l’art
« Les professionnels de la sécurité, les associations locales, les urbanistes et les artistes doivent travailler de façon coordonnée avec les villes pour créer des espaces publics sûrs et paisibles. Repenser et réfléchir au design visuel des espaces publics est essentiel pour améliorer le sentiment de sécurité des habitants ».
Michael Nicolai, artiste spécialisé en street art basé à Liège et membre du Comité consultatif d’experts de PACTESUR
Le Comité consultatif d’experts de PACTESUR a réfléchi sur le rôle de l’art pour améliorer la perception qu’a le public de l’animation, la sécurité, l’image et la sociabilité d’un espace public. Les installations artistiques temporaires sont en effet une forme d’appropriation des espaces publics par les citoyens30. L’art de rue est une façon de promouvoir l’identité d’une ville et de renforcer la cohésion sociale. Il utilise différents médiums dans des espaces publics, tels que les graffitis, les fresques murales, l’affichage et le collage, la mosaïque et le stencil. L’art de rue favorise les échanges et la communication entre les quartiers et la participation civique. Parce qu’il est immédiat, accessible et gratuit, il démocratise la culture en la plaçant dans la rue.
Pour Laetitia Wolff, qui a dirigé le cours conçu en partenariat entre la Sustainable Design School de Nice (SDS) et le projet PACTESUR, « la notion de sécurité se trouve à l’intersection de dimensions multiples qui ont toutes du sens, que ce soit les besoins humains, les valeurs éthiques, les devoirs démocratiques, la vie urbaine, les normes environnementales ou les valeurs culturelles ».
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30- Robazza, G. (2020) Build Art, Build Resilience. Co-creation of Public Art as a Tactic to Improve Community Resilience, The Journal of Public Space, 5(4), 283-300.
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© Artists 2SHY (2017), Okuda (2014), Felipe Pantone (2015), Spray Can Arts
Cas pratique : l’art de rue à Liège, Belgique
Au printemps 2002, la ville de Liège a passé commande à l’association Spray Can Arts d’une fresque murale dans un quartier abandonné proche d’une zone très peuplée où plusieurs maisons et cabanons abandonnés avaient été détruits pour faire place à un parking temporaire. Avec le temps, cet espace s’était rempli de détritus et de graffitis.
Spray Can Arts a créé une fresque monumentale représentant une scène joyeuse : une fille lisant un livre. Quelques semaines plus tard, les associations intervenant dans le quartier ont rapporté que les habitants et les passants se sentaient plus en sécurité et qu’il y avait moins de dépôts sauvages de détritus. Les habitants s’étaient approprié la fresque, qui était devenue un point de ralliement dans le quartier. La fresque est restée exposée pendant sept ans.
> Plus d’informations ici.
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Cas pratique : l’expérience de Dunkerque, France, d’association des citoyens à un projet de rénovation
Le projet En rue a été établi par un partenariat entre le service Art et Espace public de la mairie de Dunkerque et l’association spécialisée en prévention de la délinquance Les Alizées. Il a réuni des habitants, des travailleurs sociaux, des sociologues et des associations locales. Dans le cadre d’un projet global de rénovation urbaine, En rue avait pour objectif de permettre aux habitants de contribuer directement à la conception d’un espace public en fonction de leurs besoins.
Une série de réunions a été organisée avec les habitants pour cartographier et identifier les ressources existantes, les différentes utilisations de l’espace public, et ce qui manquait. Une fois ce diagnostic réalisé, les habitants et les autres partenaires ont élaboré des solutions telles que des sièges, des zones de pique-nique et de jeux, un terrain de pétanque et d’autres éléments de mobilier urbain. Les entreprises locales ont mis à disposition leur personnel et leurs équipements.
Aujourd’hui, les habitants se sont approprié cet espace public et le mobilier urbain nouvellement installé n’a subi aucun dommage.
> Plus d’informations ici.
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Chapitre 3
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L’utilisation des technologies pour la protection des espaces publics : efficace, mais insuffisante >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>
L’accroissement des technologies de surveillance depuis 20 ans a donné aux collectivités territoriales toute une série de nouveaux outils pour mieux protéger leurs espaces publics, en permettant notamment la surveillance 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, le contrôle des accès, ou en poussant le public à se comporter de telle ou telle façon. Aujourd’hui, la question qui se pose aux collectivités n’est pas tant s’il faut utiliser les technologies, mais plutôt lesquelles choisir, où, quand et comment. C’est un domaine très large qui peut sembler difficile à maîtriser, en particulier pour les petites et moyennes municipalités qui n’ont pas les ressources pour s’informer en permanence des évolutions technologiques. La difficulté est d’utiliser les technologies pour mieux protéger les espaces publics tout en préservant leur caractère ouvert et inclusif et en respectant les libertés fondamentales et le droit à la vie privée.
Le positionnement de l’Efus
L’Efus accompagne les collectivités territoriales pour les aider à innover non seulement en utilisant mieux les nouvelles technologies, mais aussi en innovant dans le domaine social, dès la conception des politiques de prévention et de sécurité. Son approche est fondée sur un principe clé : toute politique de prévention de la délinquance, quel que soit l’espace où elle s’exerce – numérique ou physique –, doit incorporer le respect des droits de la personne, de la vie privée et des libertés fondamentales. Si les technologies transforment la façon dont la police, les pouvoirs publics et la société civile agissent et réagissent face au crime, elles ne changent pas en elles-mêmes les principes fondamentaux selon lesquels la prévention est efficace contre la criminalité et que la cohésion sociale est la clé de la sécurité.
Les technologies intelligentes
Les technologies intelligentes telles que la reconnaissance faciale ou sonore sont de plus en plus utilisées par les collectivités et d’autres acteurs de la sécurité, en particulier la police, pour mieux protéger les espaces publics. Elles peuvent aussi être utilisées pour localiser les
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victimes d’inondation ou de glissements de terrain ou pour retrouver des personnes portées disparues. Efficaces, quoique loin d’être infaillibles, les technologies intelligentes ne doivent pas être considérées comme une solution en soi, mais plutôt comme faisant partie d’une approche cohérente et holistique de la sécurité. Il est important de toujours les utiliser en veillant à respecter le droit à la vie privée et les droits fondamentaux.
Les principales technologies intelligentes utilisées (jusqu’à présent) pour la protection des espaces publics sont :
Caméras
intelligentes
• caméras portées (caméras portées sur le corps)
• vidéosurveillance (télévision en circuit fermé)
• Caméras sur drone
Technologies
biométriques
• Reconnaissance faciale
• Scanners pour empreintes digitales
• Reconnaissance de la voix
• Scan de l’iris
Technologies
digitales
• Algorithmes, big data
• Police prédictive
Les technologies qui utilisent des données générées par les citoyens
Un autre aspect de l’utilisation des technologies pour la sécurité des espaces publics est celui de la participation citoyenne. Un nombre croissant de collectivités européennes et de forces de police nationale utilisent les réseaux sociaux et les technologies mobiles (les applications) qui favorisent des échanges directs avec les citoyens. Elles peuvent être utiles en cas de crise, car elles permettent aux autorités de récolter des informations sur le terrain et d’informer le public en temps réel sur l’évolution d’une situation. Elles peuvent aussi aider à détecter un incident et à repérer des malfaiteurs. Mais comme toutes les autres technologies de sécurité, elles doivent être utilisées dans un cadre éthique clair qui garantisse les droits fondamentaux pour tous et le respect de l’État de droit.
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Les outils prédictifs
Les outils de police prédictive sont plus sensibles. Ils utilisent des algorithmes pour prédire où un délit ou un crime peut se produire et même qui pourrait le commettre. Ces technologies encore assez nouvelles et qui vont sûrement beaucoup évoluer dans les années à venir ne sont pas destinées aux collectivités, mais à la police. Cependant, les collectivités doivent être conscientes de leurs avantages et de leurs défauts parce qu’elles sont directement concernées par la façon dont la police opère sur leur territoire et auprès des communautés locales. Nous présentons ci-dessous quelques pratiques et enseignements recueillis par l’Efus dans son travail sur ce vaste champ des technologies de sécurité, soit par le biais de projets européens (PACTESUR, Secu4All, PRoTECT et CCI), soit au travers de son travail permanent et quotidien, notamment son groupe de travail Sécurité & Innovation. Dans ce chapitre, nous essayons de dépasser les discours faciles qui sont soit trop optimistes, soit trop pessimistes, un écueil fréquent quand on aborde des sujets polarisants comme la police prédictive, la reconnaissance faciale ou le sentiment subjectif d’insécurité.
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La police prédictive est l’application de techniques analytiques, en particulier quantitatives, pour identifier les cibles probables d’interventions de la police ou de prévention de la criminalité, ou bien pour résoudre des crimes et délits passés grâce aux prédictions statistiques. La police prédictive peut être considérée comme une méthode pour prévoir dans quelles zones géographiques les comportements délinquants sont les plus probables, mais aussi les individus et les groupes qui seront le plus probablement impliqués dans des activités délictueuses, par le profilage prédictif31
31- Efus, CCI (2020). Fiche de synthèse Predictive Policing.
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Environnement modifié Collecte des données Fusion des données Prédiction Évaluation Intervention Collecte des données Analyse Opérations de police Réponse pénale
Le processus de la police prédictive (Perry et al., 2013)
Cas d’étude : l’utilisation de drones pour la protection des espaces publics en Europe
Ces dernières années, l’utilisation de drones ou de Systèmes d’aéronefs sans pilote (UAS selon l’acronyme en anglais) par les autorités publiques dans les zones urbaines a considérablement augmenté. Ils sont utiles pour effectuer des fonctions de surveillance des espaces publics. On peut les utiliser pour prévenir des attaques physiques sur des infrastructures critiques (énergie, eau, systèmes de vie), les aéroports, et les événements et concerts en plein air. Certaines villes européennes ont créé des unités de drones au sein de leur police municipale chargées de développer, de mettre en œuvre et d’améliorer leur utilisation dans les espaces publics. Cependant, il convient de poursuivre les recherches pour identifier la meilleure façon d’obtenir des résultats optimaux. L’utilisation de ces technologies soulève des questions en matière de droit à la vie privée et de protection des données. D’autres risques sont les atteintes à la cybersécurité et de l’utilisation à mauvais escient, par exemple le transport par drone de drogue ou pire, de bombes, ou encore pour l’espionnage.
« Les drones doivent être considérés comme faisant partie d’une large gamme d’outils et de mesures utilisés dans le cadre d’une stratégie globale. Il faut les intégrer aux actions et aux technologies qui existent déjà sur le terrain ».
Gianfranco Todesco, Commissaire principal, police locale de Turin
La ville de Turin coordonne le DronEUnit Network, un réseau européen spécialisé dans les drones qui réunit plusieurs forces de police, des entreprises privées, des universités et des centres de recherche. Son
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(1) L’unité drones de la ville de Turin (Italie)
objectif est d’étudier comment utiliser les drones au mieux pour améliorer certains services que les municipalités apportent au public. Le réseau utilise des drones pour surveiller les grands événements et les foules, pour repérer les individus en détresse et informer les services d’urgence.
Turin est la première ville en Europe à avoir deux zones de tests de drone (l’une à l’intérieur, l’autre à l’extérieur) :
1. DoraLab, un parc urbain dont la position est optimale pour garantir des vols de drones en sécurité.
2. La Città dell’aerospazio (« la ville de l’aéronautique ») où les pilotes s’entraînent à voler dans des conditions difficiles comme des vents forts.
(2) L’utilisation des drones pour surveiller les espaces publics par Police Scotland, ville d’Édimbourg (Royaume-Uni)
« Toutes les activités de police par drone sont ouvertes et transparentes. Le déploiement doit être effectué pour des motifs de police légitimes et être sûr, légal, proportionné et nécessaire ».
Inspector Graeme Rankin, Police Scotland, ville d’Édimbourg
Police Scotland dispose de deux unités distinctes :
1. L’unité de Systèmes aériens pilotés à distance par la police (Police Remotely Piloted Aircraft Systems, RPAS) qui utilise les drones pour la sécurité des habitants dans toute l’Écosse. Les drones sont utilisés comme moyen rapide et efficace pour faire des recherches dans des zones vastes et parfois inaccessibles, qui demanderaient autrement des moyens importants sur le terrain et du temps. L’unité RPAS estime que les drones ne sont pas adaptés aux zones urbaines en raison du bâti et de la proximité des personnes. Pour les zones
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urbaines, la vidéosurveillance et les ressources sur le terrain sont plus efficaces. Cependant, on a utilisé des drones pour détecter les menaces aériennes lors du sommet sur le climat COP26 à Glasgow (novembre 2021)
2. L’unité de sûreté et de sécurité aérienne (Aviation Safety and Security Unit, ASSU) emploie une gamme de techniques pour protéger le public et les partenaires des menaces aériennes potentielles. Elle utilise une gamme de moyens tels que les restrictions à l’espace aérien, la mise en place de géobarrières (geofencing) ainsi que des équipes de secours dûment formées pour aider la police locale à lutter contre l’usage illicite de drones, qui augmente. Ces méthodes sont déployées sur site et lors d’événements, d’opérations et d’incidents.
Toutes les opérations drones de Police Scotland sont conformes au Data Protection Impact Assessment (Privacy Assessment), au Règlement général pour la protection des données (RGPD) de l’UE, et au Equalities & Human Rights Impact Assessment. Police Scotland informe le public ou les résidents d’une zone donnée lorsqu’une activité de police par drone est prévue, soit par les réseaux sociaux, soit par le contact en personne, soit parfois par la distribution de prospectus. Toutes les activités de drone de la police sont ouvertes et transparentes. Le déploiement doit être effectué à des fins de police légitimes, être sécurisé, légal, proportionné et nécessaire.
> Cette analyse est tirée d’une interview conjointe des villes d’Édimbourg et Turin dans le cadre du projet PACTESUR.
La version intégrale est ici.
(3) L’utilisation de drones par la police municipale de Madrid (Espagne)
À Madrid, la section Soutien aérien collabore avec tous les départements municipaux (dont l’urbanisme, les pompiers et les services médicaux d’urgence) et utilise les drones comme suit :
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Suivi & surveillance : suivi des foules et de la capacité d’accueil des lieux ; surveillance et supervision d’événements publics et des parcs de loisirs la nuit ; soutien aux Unités centrales de sécurité pour des événements ou des interventions de police ; suivi des infractions au Code de la route ; surveillance de zones étendues pour prévenir et repérer le dépôt sauvage de détritus ; surveillance nocturne générale.
Communication : information du public en matière de santé (en particulier pendant la crise sanitaire du Covid-19).
Reconstruction d’accidents : l’utilisation d’UAS pour les enquêtes sur les accidents du travail (blessures graves ou décès) dans des lieux difficiles d’accès ; collaboration avec l’Unité d’investigation des accidents, création de cartes en 3D des accidents et reconstructions des accidents de la route.
Gestion des catastrophes : collaboration avec les pompiers et les techniciens de la mairie lors de catastrophes telles que des explosions au gaz dans des immeubles, des effondrements de toits, des incendies d’immeubles, etc.
Recherche et saisie : par exemple les plantations illégales de marijuana.
Recherche et sauvetage : recherche de personnes disparues sur des zones étendues.
> Plus d’informations dans la fiche de pratique de Madrid ici.
Cas d’étude : la technologie de vidéosurveillance et la reconnaissance faciale
Appliquées à la surveillance des espaces publics, la technologie de la vidéosurveillance et la reconnaissance faciale peuvent faciliter l’identification de comportements suspects. La reconnaissance faciale est
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sans doute l’une des applications les plus controversées et répandues en matière d’algorithmes fondés sur l’intelligence artificielle. C’est une technologie biométrique qui permet de reconnaître une personne par ses caractéristiques physiques ou comportementales. D’autres exemples de technologie biométrique sont les empreintes digitales ou la reconnaissance de l’iris, la reconnaissance de la voix ou encore l’identification à partir de la démarche32
La reconnaissance faciale a deux fonctions : l’authentification et l’identification d’une personne.
Dans le premier cas, le système compare le modèle biométrique d’un visage ou une seule image d’une personne pour vérifier s’il s’agit bien de la même personne.
Dans le second cas, le modèle est comparé à une base de données de photos afin d’identifier une personne parmi beaucoup d’autres.
Une troisième fonction, très controversée, est la catégorisation – le classement des personnes en différentes catégories selon les caractéristiques individuelles, comme le sexe, l’âge et l’origine ethnique.
Cas pratique : tests de reconnaissance faciale à Londres, London Metropolitan Police (Royaume-Uni)
Entre 2016 et 2019, la London Metropolitan Police Service (MPS) a mené 10 tests grandeur nature de reconnaissance faciale en fonction de différents scénarios et avec différentes listes de personnes d’intérêt dans la ville. L’objectif de ces tests était « d’évaluer la valeur, la viabilité et les difficultés (y compris technologiques, légales, éthiques et de gouvernance) » de cette technologie. Le logiciel de reconnaissance faciale a été intégré aux caméras qui pouvaient émettre des alertes, que les agents de police pouvaient évaluer et affecter.
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32- Commission nationale informatique et libertés (CNIL) (2019). Reconnaissance faciale : pour un débat à la hauteur des enjeux.
La MPS a utilisé comme base de données une liste d’individus d’intérêt pour la police et de leur image faciale, qui comptait 2 401 sujets. Pendant les trois années de test, la reconnaissance faciale en temps réel (Live Facial Recognition, LFR) a été déployée pendant un total de 69 heures. Sur la base de quelque 180 000 occasions de reconnaissance (les visages qui sont apparus dans les vidéos), la police est entrée en contact avec 27 individus et en a arrêté 9 en réponse aux alertes émises par le système de reconnaissance faciale.
L'efficacité du système de LFR dépend pour beaucoup du nombre d’individus inscrits sur la liste des personnes d’intérêt. Le fait que cette liste a été élargie est sans doute à l’origine du plus grand nombre d’identifications et d’arrestations pendant la deuxième moitié de la phase de tests. Comparée à la tactique de la « chasse à l’homme » où les délinquants sont localisés en déployant des agents dans de multiples lieux, la LFR demande moins de ressources et peut améliorer l’efficacité opérationnelle. En ce qui concerne l’emplacement des caméras, le système était plus efficace lorsqu’il y avait un certain niveau de contrôle sur le flux de personnes passant par la zone.
Les tests ont aussi montré que si le taux d’identifications faussement positives était statistiquement insignifiant en matière d’ethnicité, il était significatif en matière de différence de genre. Les femmes ont un taux inférieur à la fois de faux et de vrais positifs.
> Pour une description détaillée de ce cas, voir ici
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Cas pratique : reconnaissance faciale pendant le Carnaval de Nice (France)
En 2019, la ville de Nice a décidé d’évaluer l’intérêt et la fiabilité de la reconnaissance faciale en temps réel pendant son carnaval annuel. Les objectifs étaient de contribuer à la sécurisation des espaces publics et de contribuer à la recherche scientifique, sur la base d’un logiciel israélien intitulé AnyVision. Quarante volontaires ont accepté que leur image soit incluse dans une base de données fictive. Le logiciel peut prendre en compte le vieillissement et ainsi reconnaître les personnes jusqu’à 20 ans après que la photo a été prise.
Afin de respecter le RGPD ainsi que le droit à la vie privée et les droits fondamentaux, la simulation n’a eu lieu que dans une zone spécifique autour des entrées du site du carnaval. Des informations claires étaient données aux festivaliers par le biais de dépliants et de bannières. Les personnes qui acceptaient de passer par cette zone recevaient également un bracelet de couleur. L’expérience comprenait trois scénarios : le contrôle de l’accès à l’une des portes d’entrée par la reconnaissance faciale, la détection d’une personne d’intérêt (fictive) dans la foule, et l’identification d’une personne d’intérêt à son passage par la porte d’entrée. Au total, 5 000 personnes ont accepté de prendre part à l’expérience sur une période de trois jours.
Le rapport réalisé a posteriori par la mairie a souligné le fort degré d’acceptation sociale de telles technologies, à condition qu’elles soient régulées correctement. En ce qui concerne son efficacité, la police municipale a indiqué dans le rapport qu’elle la trouvait utile et l’utiliserait si elle était disponible33
33- Mairie de Nice (2019). Évaluation de l’expérience de reconnaissance faciale.
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Le Centre de supervision urbain de Nice
Le Centre de supervision urbain de Nice (USC) est le commandement opérationnel qui contrôle toutes les caméras du réseau de vidéosurveillance de la ville. Il fonctionne 24 heures sur 24 et sept jours sur sept avec trois objectifs :
Renforcer la sécurité publique en déjouant et en prévenant les attaques contre la sécurité des personnes et des biens. Les vidéos sont notamment utilisées dans les enquêtes criminelles et pour l’identification des délinquants.
La prévention des catastrophes naturelles et des risques : recherche et sauvetage, protection contre les incendies. Par exemple, la vidéosurveillance est utilisée pour surveiller les bords de rivière et la côte. Elle donne une vue à la fois contextuelle et spécifique de ces zones sans poser aucun risque pour les agents. Les images sont aussi utilisées par les services de sauvetage pour identifier l’origine et surveiller l’évolution des phénomènes naturels et mobiliser les moyens de secours adéquats.
Surveillance du trafic et de la circulation urbaine avec des technologies telles que les outils de prédiction afin d’anticiper les problèmes de trafic ; caméras thermiques pour détecter les personnes et les obstacles à la circulation, ou pour limiter les comportements inciviques tels que se garer en double file ; vidéoprotection en temps réel du réseau de tramway.
Considérations à prendre en compte lors du développement et du déploiement de technologies de reconnaissance faciale
Le respect des droits fondamentaux et des libertés est d’autant plus important en ce qui concerne cette technologie complexe que ses utilisations potentielles sont très nombreuses. Comment préserver l’anonymat dans l’espace public ? Quelles formes de surveillance sont acceptables sans générer des inquiétudes et un sentiment d’insécurité chez les citoyens ? Si la technologie offre toute sorte d’opportunités en matière de protection des espaces publics, les solutions doivent être développées en parallèle aux mesures physiques de protection et être conçues
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pour qu’elles respectent la réglementation sur la protection de la vie privée. Le groupe de travail Sécurité & Innovation de l’Efus a formulé à cet égard un certain nombre de recommandations pour les collectivités :
Vers un cadre législatif et réglementaire clair : étant donné la rapidité et la complexité des récentes évolutions en matière de technologie de reconnaissance faciale, l’Union européenne prévoit de réévaluer les cadres réglementaires existants, tels que le RGPD, et d’introduire de nouvelles réglementations. Dans son Livre blanc sur l’intelligence artificielle, la Commission européenne précise les domaines dans lesquels cette nouvelle réglementation sera nécessaire : données de formation, archivage et données, informations à fournir, robustesse et exactitude, et contrôle humain. Le partage d’expériences locales, de difficultés rencontrées et d’enseignements à l’échelle de l’Europe permettrait de garantir que ces nouvelles normes correspondent bien aux besoins des villes et régions européennes.
Évaluer l’impact sur les droits fondamentaux : étant donné que les technologies de reconnaissance faciale ont un impact sur un certain nombre de droits fondamentaux, il est important de les évaluer pendant le développement et le déploiement des algorithmes.
Évaluer la nécessité et la proportionnalité : avant de déployer un système de reconnaissance faciale, une ville ou une région doit avoir une vue claire de la situation de sécurité locale et des connaissances fondées sur des données probantes. Les informations récoltées pendant un audit local de sécurité permettront d’évaluer la nécessité et la proportionnalité pour garantir que les avantages et les inconvénients de l’utilisation de la reconnaissance faciale soient bien équilibrés. Notamment, il s’agira d’évaluer quels espaces publics peuvent être équipés de cette technologie, pour quelles raisons et pour résoudre quels problèmes.
Surveiller la technologie de reconnaissance faciale : lorsque la police utilise un logiciel de reconnaissance faciale, il est essentiel que les agents vérifient les résultats. Ils doivent évaluer si une identification est exacte et décider de la réponse appropriée à apporter. L’exactitude et l’efficacité du logiciel lui-même doivent être supervisées par des organes de contrôle indépendants.
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Une bonne connaissance de la technologie : les collectivités s’appuient souvent sur des technologies développées à l’extérieur. Il leur est donc difficile de comprendre comment fonctionne un logiciel et de l’évaluer. Afin de garantir que les droits fondamentaux, tels que le droit à la non-discrimination et à la protection des données, soient intégrés non seulement dans le déploiement, mais aussi dans le développement de la technologie, ces considérations doivent faire partie du processus d’attribution du marché (FRA, 2019).
Une formation adéquate de la police : en fonction de la qualité du logiciel utilisé, la police peut recevoir un grand nombre de cas détectés. L’interaction avec les personnes qui ont été détectées comme correspondant à un visage listé dans la base de données doit suivre les mêmes principes de respect que toute autre interaction. Ici aussi, être conscient des éventuels défauts et inexactitudes du logiciel est important pour comprendre que le fait qu’une personne ait été détectée ne signifie pas pour autant qu’elle a été véritablement identifiée ou authentifiée. Former les agents de police à gérer ce genre de situation aidera à ce que les échanges avec le public soient calmes et dignes.
Le Artificial Intelligence (AI) Act de l’Union européenne (2021)
En avril 2021, la Commission européenne a publié une proposition de réglementation sur l’utilisation de l’intelligence artificielle. Ce cadre réglementaire conçu comme une réponse aux lacunes de la législation existante fixe des règles pour renforcer la transparence et minimiser les risques d’atteinte aux droits fondamentaux. Il est centré sur les systèmes d’intelligence artificielle à haut risque tels que les logiciels de prédiction de la criminalité et la reconnaissance faciale dans les zones urbaines. Ces systèmes peuvent être déployés à condition de remplir un certain nombre de critères : l’utilisation de bases de données de grande qualité, l’établissement d’une documentation appropriée pour renforcer la traçabilité, le partage d’informations avec l’utilisateur, et la conception et la mise en œuvre de mesures adéquates de contrôle humain.
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63 Planifier à l’avance Chapitre 4 >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>
4.1. Évaluer correctement la situation et
les besoins sur le terrain
Le travail mené dans le cadre du projet PACTESUR a confirmé ce que l’Efus défend depuis 35 ans : évaluer le ‘paysage de sécurité’ d’une ville en conduisant un audit de sécurité est une étape indispensable avant de concevoir des politiques et des mesures de sécurité urbaine. L’audit de sécurité est l’un des cinq éléments de l’Approche stratégique de la sécurité urbaine promue par l’Efus, qui comprend l’élaboration de la stratégie, l’action, l’évaluation et la mobilisation des différents acteurs de la sécurité. En ce qui concerne les espaces publics, un tel audit doit aussi évaluer leurs vulnérabilités34. De plus, toute nouvelle intervention doit être soigneusement planifiée en association avec tous les acteurs pertinents outre les services municipaux et la police, c’est-à-dire les habitants et les entreprises et commerces locaux ainsi que les groupes habituellement sous-représentés ou qui sont rarement en contact avec les institutions publiques35.
Qu’est-ce qu’un audit de sécurité ?
Un audit de sécurité est une analyse systématique qui permet de comprendre les problèmes de criminalité et de victimisation d’une ville ou d’une zone donnée, d’identifier les atouts et les ressources que l’on peut mobiliser pour des activités de prévention, ainsi que les priorités qui doivent être données à la prévention, et enfin, élaborer une stratégie de sécurité36.
34- Efus (2016), Méthodes et outils pour une approche stratégique de la sécurité urbaine.
35- Les audits de sécurité ne sont réellement complets que s’ils prennent en compte les perceptions de la sécurité de différents groupes d’habitants, lesquels sont souvent différents des autres et négligés. Au sein de l’Efus, l’Initiative Femmes et Villes (Women in Cities Initiative, WICI) accompagne les collectivités qui souhaitent conduire des audits de sécurité genrés dans leur ville ou sur une zone particulière, ce qui suppose de choisir la bonne méthodologie, le domaine sur lequel l’audit se focalisera, et des conseils pour mettre en œuvre la méthodologie choisie. WICI peut aussi réaliser des études en profondeur sur l’inclusion du genre dans les forces de police locale.
36- Efus (2007), Guide sur les audits locaux de sécurité : résumé de la pratique internationale.
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Les menaces peuvent être de types différents et peuvent affecter différents types d’espaces publics à des moments différents. Évaluer les risques d’un lieu en particulier ne doit pas se faire une seule fois, mais au contraire être continu et porter sur la situation et les niveaux de risque présents. L’évaluation des risques comprend trois processus continus37 :
l’identification des risques (identifier les menaces et les scénarios des menaces) ;
l’analyse des risques (déterminer les conséquences, les probabilités, les niveaux de risque et les vulnérabilités) ;
l’évaluation des risques (déterminer les priorités, les actions de gestion des risques, l’acceptation des risques).
Le manuel pour l’évaluation des vulnérabilités
Afin d’identifier et d’évaluer précisément les vulnérabilités d’un espace public aux menaces terroristes et autres, les collectivités peuvent utiliser le Manuel pour l’évaluation des vulnérabilités (Manual for Vulnerability Assessment) développé par le projet PRoTECT38, dans lequel l’Efus était partenaire. Les partenaires du projet PACTESUR ont consacré plusieurs réunions à étudier ce manuel.
Il est destiné à aider les équipes municipales en charge de la sécurité des espaces publics et les acteurs locaux à identifier les vulnérabilités d’un espace public donné aux différents types d’attentats terroristes. Ce manuel est fondé sur l’outil d’évaluation Vulnerability Assessment Tool (EU VAT) créé par la Direction générale Migration et affaires intérieures de la Commission européenne afin d’aider les forces de police à mieux protéger les espaces publics.
L'outil EU VAT assiste les collectivités ou autres acteurs de la sécurité à réaliser un certain nombre d’opérations afin de conduire une évaluation des vulnérabilités d’un espace public spécifique (que l’outil appelle Public Space of Interest, PSoI) contre les menaces terroristes. Il liste les
37- Efus, PRoTECT (2020). Livrable 2.1. EU VAT manual.
36-Mené par l’Institut néerlandais pour la technologie, la sûreté et la sécurité (Dutch Institute for Technology, Safety and Security, DITSS), le projet PRoTECT (novembre 2018–juin 2021) avait pour but de proposer aux collectivités des outils, de la technologie, de la formation et des démonstrations sur le terrain dans l’objectif d’améliorer leur capacité à évaluer le niveau de sécurité d’un lieu ou d’une situation, ainsi que des propositions de mesures pour renforcer leur sécurité, prévenir un attentat terroriste et limiter ses conséquences.
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menaces probables en fonction du type d’espace public et d’activités qui y sont menées, par exemple s’il s’agit d’une place, d’une gare, d’un centre commercial, etc. Les types de menaces prises en compte par l’outil vont de l’attentat armé à l’attentat au véhicule-bélier, aux attaques chimiques, biologiques, radiologiques ou nucléaires. L’outil d’évaluation EU VAT produit une matrice des risques qui permet ensuite d’élaborer des mesures adaptées pour y remédier.
Trois autres fiches de synthèse du projet PRoTECT sur les évaluations des vulnérabilités, concises et faciles à lire, sont à disposition des collectivités et des techniciens (en anglais) : Preparing a Vulnerability Assessment ; How to Use/Fill In the Record Template, et Conducting a Vulnerability Assessment.
Le site web de la Commission européenne comprend de nombreuses informations disponibles en recherchant « protection des espaces publics », comme un article sur l’évaluation des risques terroristes sur les espaces publics pour les praticiens (disponible en anglais sous le titre Terrorism Risk Assessment of Public Spaces for Practitioners). Facile à lire, il présente une synthèse des connaissances et des ressources disponibles.
Les espaces publics sont aussi vulnérables à d’autres types de menace, hormis les menaces terroristes, telles qu’évaluées par l’EU VAT. Mené par l’Efus, le projet Secu4All a élaboré un module de formation sur l’évaluation des menaces non terroristes. Par le biais d’exercices pratiques et d’exemples, on peut utiliser le processus d’identification des risques proposés par l’EU VAT à d’autres types de menaces ou de risques de crimes et délits contre un espace public (incivilités, harcèlement sexuel, émeutes, etc.).
Capitale de la Bavière (Allemagne), la ville de Munich a une population d’environ 1,5 million d’habitants et accueille de nombreux grands événements, dont la célèbre Oktoberfest. Avec la montée des attentats au véhicule-bélier contre les espaces publics en Europe dans les années qui ont précédé la
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Cas pratique : la protection des espaces publics de Munich (Allemagne) contre les attaques au véhicule-bélier
pandémie de Covid-19, la mairie a décidé en 2018 de renforcer la sécurité des espaces publics et des zones piétonnières dans toute la ville.
La priorité a été de maintenir, ou même de renforcer, l’attractivité et l’accessibilité de ces lieux, ce qui impliquait de choisir des barrières invisibles. Partout où cela était possible, on a choisi du mobilier urbain (bancs, bacs à plantes…) plutôt que des systèmes de bornes. Tous les équipements choisis devaient être soumis à des essais de choc.
Lors de la phase préparatoire, le département Sécurité et Ordre public de la mairie, la police locale et les pompiers ont évalué tous les espaces publics pertinents en fonction du système de priorité suivant :
nombre de visiteurs/jour,
nombre d’événements/année,
popularité et symbolisme à l’échelle locale, régionale, nationale ou mondiale,
accessibilité aux véhicules/mesures de protection.
L’évaluation comprenait une analyse des lieux pertinents, sur document et sur place, dans le cadre d’une approche multipartenariale (associant la plupart des services municipaux, la police locale, le système de transport public, etc.). Les barrières (naturelles) existantes, les droits de passage, l’accès à la police, aux services d’urgence et/ou aux services municipaux, les interdépendances avec d’autres lieux, l’utilisation actuelle, les plans de développement futurs, etc., ont été évalués. Une évaluation du comportement dynamique des véhicules (c’est-àdire évaluer les vulnérabilités d’un trajet ou d’un espace à un attentat par véhicule) a également été réalisée.
> Plus d’informations dans la Fiche de pratique de Munich ici.
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4.2. Renforcer les capacités des acteurs locaux et régionaux à minimiser l’impact d’une crise
Un autre niveau de protection consiste à s’assurer que tous les acteurs pertinents (équipes municipales, police locale et nationale, départements du tourisme, urbanisme, entreprises et commerces locaux, opérateurs et gestionnaires d’espaces publics) ont la capacité de minimiser
l’impact d’une crise et d’assurer la sécurité des citoyens.
C’est ce que l’on appelle le « renforcement des capacités » et qui est défini par le processus par lequel on développe les compétences, les instincts, les capacités, les processus et les ressources dont ont besoin les organisations et les communautés pour survivre, s’adapter et s’épanouir face aux pressions telles que les menaces à la sécurité39. L’objectif est d’équiper tous les acteurs avec les outils dont ils ont besoin pour mieux exercer leurs fonctions en cas de crise, notamment par le biais de formations ciblées et régulières.
Créer une culture commune et encourager la communication ouverte
Un aspect important du renforcement des capacités en matière de protection des espaces publics est la création d’une culture commune à tous les acteurs pertinents pour qu’ils travaillent en harmonie afin de prévenir, répondre et se rétablir après un incident qui a lieu sur un espace public. Une telle culture commune doit être intégrée à la gestion de crise dès la première formation et doit être développée par un processus de formation continue dans le cadre d’une approche pluridisciplinaire favorisant l’échange de connaissances et de pratiques prometteuses. C’est pourquoi les collectivités ne doivent pas seulement encourager la conception de programmes de formation, mais aussi
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>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>
39- Nations Unies - Academic Impact (UNAI), Capacity-Building.
veiller à ce qu’ils soient alignés sur d’autres programmes existants à l’échelle nationale ou européenne.
Il est important de mobiliser différents types d’acteurs et de ressources pour encourager la communication ouverte, à la fois horizontale et verticale, ainsi que l’échange de connaissances et de pratiques prometteuses.
Élaborer des programmes de formation sur mesure Chaque ville a ses caractéristiques, problèmes et risques spécifiques. Les programmes de formation doivent donc être adaptés aux spécificités locales, mais aussi prendre en compte le sentiment d’insécurité des citoyens et la perspective de genre.
De tels programmes aideront à familiariser les opérateurs, les gestionnaires et les concepteurs d’espaces publics avec les principes de la sécurité physique et les procédures administratives locales spécifiques.
Les objectifs stratégiques, tactiques et opérationnels d’un programme de formation adapté
Pour la préparation
Sensibiliser tous les acteurs pertinents à la sécurité.
Améliorer la gouvernance (locale) des fournisseurs de sécurité pertinents.
Veiller à avoir des canaux de communication locaux, selon les besoins.
Conduire ou participer à des audits de la situation existante (documenter les menaces et les risques, évaluer les vulnérabilités…)
Créer une liste des compétences des fonctionnaires.
Pour la réponse
Veiller à ce que chaque acteur ait un niveau suffisant de personnel et des responsabilités claires en cas de crise.
Apporter une expertise et une assistance locales pour résoudre les difficultés spécifiques à certains lieux géographiques.
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Mettre des canaux de communication locaux à disposition des organes de gestion de crise, selon les besoins.
Pour la récupération
Restaurer et renforcer l’État de droit.
Utiliser les acteurs locaux pour apporter une aide additionnelle à la récupération.
Pour l’atténuation des risques
Coproduire la sécurité en associant tous les acteurs.
Pour toutes les phases
Mener des projets de soft power (« pouvoir discret ») (par exemple, échanger avec les communautés locales, mobiliser les acteurs locaux avec des objectifs réalisables localement).
Cas pratique : la structure de commandement Or, Argent, Bronze en cas de crise, Royaume-Uni
À la suite de graves émeutes à Londres en 1985, la Metropolitan Police a créé un système de commandement efficace et flexible intitulé Or, Argent, Bronze. Il permet une réponse stratégique, tactique et opérationnelle en cas d’incident ou lors d’une opération.
Niveau Or – le groupe en charge de la stratégie et de la coordination
Ce groupe est responsable de la partie stratégique du commandement et du contrôle par une structure multiagences. C’est le niveau où la politique, la stratégie et la réponse dans son ensemble sont établies et gérées.
Ce groupe définit et communique un but et des objectifs stratégiques clairs et les révise régulièrement.
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Il établit un cadre politique pour la gestion globale d’un événement ou d’une situation.
Il établit des priorités entre les demandes du groupe Argent et affecte les personnels et les ressources en fonction des besoins.
Il coordonne la planification directe et les opérations au-delà de la réponse immédiate afin de faciliter le processus de rétablissement.
Niveau Argent – groupe de coordination tactique
Il s’agit du niveau de commandement et de contrôle tactique dans le cadre d’une structure multiagences. C’est le niveau qui gère la réponse à une crise.
Ce groupe définit les priorités d’affectation des ressources disponibles.
Il prévoit et coordonne comment et quand les tâches seront accomplies et par qui.
Il obtient des ressources additionnelles si nécessaire.
Il évalue les risques importants et s'en sert pour établir les tâches des commandants Bronze.
Il assure la santé et la sécurité du public et du personnel sur le(s) site(s).
Niveau Bronze – groupe de coordination opérationnelle
C’est le niveau de commandement et de contrôle qui gère le travail de terrain sur le site de l’incident. Le groupe Bronze peut être une seule ou plusieurs agences.
Ce groupe concentre ses efforts et ses ressources sur des tâches spécifiques, dans le cadre de ses responsabilités.
Il exécute le plan tactique.
Il coordonne les actions du personnel sur le terrain.
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Construire un programme sur mesure : recommandations essentielles
1. Formation fondée sur des données probantes (Evidence-Based Training, EBT) : il s’agit d’une méthode de formation et d’évaluation fondée sur des données opérationnelles, qui est caractérisée par le développement et l’évaluation des capacités générales sur une gamme de compétences clés, plutôt que de mesurer la performance d’événements individuels.
2. Ludification de la formation : la ludification applique la mécanique des jeux pour favoriser l’adhésion des participants et améliorer l’obtention de connaissances.
3. Plateformes pédagogiques digitales : les plateformes digitales offrent une très large gamme de produits et services. Leurs avantages pour les utilisateurs sont :
• l’accès à n’importe quel moment, n’importe où, de n’importe quelle façon ;
• possibilité de revenir à un module précédent et de revoir le contenu ;
• apprentissage facilité par une gamme de technologies multimédia ;
• grande flexibilité de structure et de contenu, sur tous les aspects de la formation.
4. Exercices ou manœuvres grandeur nature : ce type d’exercice simule un événement réel aussi fidèlement que possible. Il est pluridisciplinaire et implique des partenaires de différentes disciplines professionnelles dans l’objectif d’évaluer les capacités opérationnelles des systèmes de gestion de crise ou d’urgence, dans un environnement hautement stressant. Une manœuvre est un exercice coordonné et supervisé qui est généralement utilisé pour tester une opération ou une fonction unique. On peut aussi l’utiliser pour former les personnels au maniement d’un nouvel équipement, ou pour pratiquer et maintenir des compétences existantes40.
5. Échange de pratiques prometteuses et de leçons apprises : cette approche pluridisciplinaire favorise le partage d’enseignements et de pratiques prometteuses entre acteurs.
40 - Département américain de la sécurité intérieure, Homeland Emergency Management Institute (FEMA), Types and Training and Exercises.
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Étude de cas : simulation de situations de crise pour la police locale
« Le principal enseignement est que nous sommes tous confrontés à des problèmes très similaires. Je me sens mieux préparé à remplir mes fonctions et à améliorer la sûreté et la sécurité de ma ville grâce aux nouveaux protocoles et procédures qui m’ont été enseignés par d’autres forces de police ».
Un agent de police d’une des villes associées à PACTESUR pendant l’académie de police de Liège, mai 2022
Afin d’améliorer le niveau de préparation et de réponse de la police et des services d’urgence, il est recommandé d’organiser des exercices pratiques et des formations conjointes pour les personnels des collectivités, la police, la protection civile, les services de secours médicaux, les entreprises privées, dont celles de sécurité, et les autres acteurs de la sécurité41.
Le projet PACTESUR a encouragé le développement de programmes de formation spécialisés pour les agents de police locale. Ainsi, trois Académies de police locale ont été organisées dans les villes partenaires, à Nice (2019), Turin (2021) et Liège (2022). De son côté, Xàbia a organisé un exercice de simulation d’un incendie de forêt dans une zone périurbaine.
Ces sessions, qui ont réuni des agents de police locale des villes hôtes et des villes associées, ont duré plusieurs jours et comprenaient des exercices sur site et virtuels, tels qu’une opération en commando armé pendant une fusillade dans une école, des opérations de gestion de foule, ou encore l’utilisation de la réalité virtuelle dans les programmes
41- Conseil de l’Union européenne (2021). Conclusions du Conseil sur la protection des espaces publics, 7 juin 2021.
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de formation42. Les sessions de Turin et Xàbia ont également compris une démonstration de l’usage des drones pour la prévention des risques naturels et technologiques et l’assistance aux personnes affectées par une crise, quelle que soit sa nature43.
Ces exercices de simulation ont associé non seulement des représentants de collectivités et des services de secours (pompiers, police locale, gendarmerie, ambulances, etc.), mais aussi des citoyens. Ils ont permis des échanges fructueux entre collègues qui ont pu voir en situation réelle comment d’autres acteurs interviennent. Ainsi, de nombreux participants européens ont apprécié l’unité de pompiers spécialisée de Liège qui évacue les blessés et les transfère à l’hôpital pendant qu’une intervention est en cours. De nombreuses collectivités européennes manquent de ce type de service. La police de Liège, conjointement avec la police fédérale belge, a aussi partagé avec ses collègues européens sa doctrine d’intervention en cas de problème sur l’espace public, qui est fondée sur le dialogue et la résolution de conflits. Cette approche est similaire à celle de Police Scotland, qui est fondée sur le respect des droits de la personne. Les policiers écossais considèrent en effet que leur devoir est aussi de protéger le droit de protester44.
De telles approches, assez nouvelles, s’appliquent également aux événements festifs et aux compétitions sportives. La police dialogue avec les organisateurs pour s’assurer que tout se passe sans encombre et pour maintenir le dialogue pendant toute la durée de l’événement, afin d’éviter le recours aux moyens dissuasifs « durs » tels que l’usage de lances à incendies ou de gaz lacrymogène. Un exercice a été mené à Liège avec un scénario où des supporters de football essayaient d’occuper une artère de circulation en dépit des appels au calme des autorités.
Le succès de l’Académie de police de Turin a débouché sur l’organisation d’exercices pour la police locale du Piémont
L’Académie de police de Turin a réuni quelque 60 agents et officiers de police de plusieurs municipalités européennes, ainsi que des policiers locaux de la région du Piémont. Suite aux réactions positives des parti-
42- Ces exercices se sont déroulés dans le cadre de la Semaine européenne de la sécurité organisée par le projet à Nice en 2019 et à Liège en 2022. L’Académie de police de Turin a été organisée dans le cadre du troisième atelier de gouvernance locale, en 2021.
43- Voir aussi Chapitre 3, L’utilisation des technologies pour la protection des espaces publics : efficace, mais insuffisant.
44- Voir aussi Cas pratique - Police Scotland et la gestion du sommet des Nations unies sur le climat (COP26), Glasgow, novembre 2021.
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cipants, deux partenaires de PACTESUR, ANCI Piemonte et Turin, ont décidé de proposer la formation aux forces de police locale de la région du Piémont. Deux sessions ont eu lieu en 2022 dans le cadre de PACTESUR et six autres sessions étaient prévues (à l’heure où nous écrivons ces lignes) pour 2023, avec la contribution de la Région.
> Plus d’informations sur le site web de l’ANCI Piemonte ici
Cas pratique : un programme de formation sur la sécurité des espaces publics pour un partenariat local multipartite
Le projet Secu4All a pour objectif d’apporter aux collectivités des connaissances théoriques et des outils pratiques pour améliorer la sécurité des espaces publics et la protection des cibles dites vulnérables (telles que les terrains de sport, les centres commerciaux, les écoles…) contre les menaces potentielles.
Des modules de formation théoriques et pratiques ont été élaborés pour améliorer les connaissances et les compétences des acteurs locaux dans quatre domaines :
méthodes et outils permettant d’identifier, d’analyser et d’évaluer les vulnérabilités des espaces publics locaux et des cibles vulnérables ;
réduction de la délinquance et le sentiment d’insécurité par le biais de l’urbanisme et du design et de la gestion des espaces publics ;
utilisation de technologies innovantes pour améliorer la protection des espaces publics, et les questions éthiques qu’elles soulèvent ;
communication de crise avec les acteurs concernés et les citoyens (avant, pendant et après une crise).
> La plateforme Secu4All sera disponible en juin 2023.
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Coopération et assistance transfrontalières
Il y a peu de coopération transfrontalière entre les pays européens en matière de gestion des risques et des catastrophes naturelles, notamment parce que la notion de territoire communal ou municipal diffère selon les pays. Cependant, la coopération et l’assistance entre les entités administratives rurales et urbaines, entre les villes et entre pays voisins peut être cruciale lorsqu’un incident survient dans une zone frontalière et requiert l’intervention des services de secours des deux côtés de la frontière.
Les villes frontalières peuvent bénéficier de la mise en commun de leurs ressources en cas d’incident majeur, de catastrophe naturelle ou d’attentat terroriste affectant leurs espaces publics. Elles peuvent aussi appeler les autorités nationales à conclure des accords de coopération avec le(s) pays voisin(s) prévoyant la mobilisation mutuelle de ressources financières et humaines en cas de crise, ainsi que le partage d’informations.
Ainsi, en France et en Belgique, les maires sont tenus par la loi de publier des plans de sécurité détaillant le mode d’intervention des services de secours en cas de catastrophe naturelle, d’accident industriel ou d’attentat terroriste. Ces plans doivent spécifier les responsabilités de chaque niveau de gouvernance : local, régional et national, ainsi que transnational dans le cas des régions frontalières45. Ce n’est pas le cas dans d’autres pays européens tels que le Royaume-Uni ou le Danemark, où les maires ont une fonction largement honorifique (sauf, au Royaume-Uni, pour certaines villes telles que Londres et Manchester), et n’ont pas de pouvoir de décision en matière de sécurité et de protection civile. Ceci rend plus difficile l’établissement de protocoles sur l’organisation d’une réponse commune des municipalités et des forces de police de différents pays européens.
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45- Voir Annexe 4 pour une description détaillée de la coopération transfrontalière.
4.3. Échanger des pratiques, des connaissances et des idées avec ses pairs
Le projet PACTESUR a montré que les villes sont demandeuses d’échanges de connaissances et de pratiques avec leurs pairs à l’échelle nationale et internationale et soucieuses de tirer des enseignements de ces expériences. Cela confirme ce que nous disent les villes membres de l’Efus dans nos échanges quotidiens. Quelle que soit leur taille ou leur situation géographique, de nombreuses villes souhaitent avoir des échanges concrets avec d’autres villes similaires sur les problématiques de sécurité urbaine telles que la protection des espaces publics.
PACTESUR a organisé ces échanges par le biais de débats présentiels tels que les Ateliers de gouvernance locale et les Semaines européennes de la sécurité organisées à Nice (2019), Turin (2020) et Liège (2022) dans le but de donner la voix aux acteurs locaux, représentants de la police, experts et représentants de la société civile en Europe sur la question de la sécurité des espaces publics. Ces échanges ont également contribué à sensibiliser les citoyens et les responsables politiques locaux sur leur rôle en matière de prévention et en tant qu’acteurs de la sécurité. Certains de ces échanges ont déjà débouché sur des résultats concrets : la ville d’Édimbourg, l’une des 11 villes associées de PACTESUR, a créé un groupe de travail sur la « mitigation des véhicules hostiles » dans l’objectif de renforcer la sécurité du Festival international d’Édimbourg, qui a lieu chaque année. David Robertson, surintendant responsable des opérations spéciales de la police écossaise, nous a déclaré que l’équipement qui a été choisi « a été directement inspiré par notre visite à Liège ». De plus, des représentants de la ville de Turin ont visité Édimbourg pendant le Festival international afin de tester des capteurs intelligents destinés à gérer les foules46 « C’est une première étape pour devenir une ville intelligente et un résultat direct de notre visite à Turin et de l’atelier auquel nous avons participé », a-t-il ajouté. Les représentants de la ville d’Édimbourg ont également été présentés à leurs homologues de Xàbia en juin 2022.
46- Les capteurs intelligents pour la gestion des foules font partie de l’équipement de sécurité financé dans le cadre de PACTESUR, qui comprend d’autres outils high-tech tels que les capteurs wi-fi et Bluetooth, les drones, un système de vidéosurveillance et l’analyse des données sociales.
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La Publication Series de PACTESUR
Afin d’enrichir la conversation sur la protection des espaces publics et de disséminer les enseignements du projet PACTESUR, l’Efus a coordonné la Publication Series, une collection d’articles, d’interviews et de guides rédigés par les villes partenaires et les experts du projet. Les sujets abordés vont des défis posés par la pandémie de Covid à la protection des lieux de culture, la sensibilisation des citoyens, l’impact de l’urbanisme et du design urbain sur le sentiment d’(in) sécurité, l’utilisation des drones, et l’importance de l’art dans les espaces publics.
> Les articles de la Publication Series sont disponibles ici
Par exemple, dans le cadre des échanges directs entre villes, la Series a mené un entretien à deux voix avec des représentants des villes d’Édimbourg et de Turin sur l’utilisation de drones pour surveiller les espaces publics. « La possibilité d’apprendre auprès d’autres professionnels qui travaillent dur pour que les gens soient en sécurité permet de partager les idées, d’améliorer les méthodes de travail et de veiller collectivement à ce que le public ait la meilleure qualité de service et une valeur ajoutée de la part de la police et des autorités locales. Travailler de façon isolée n’a pas de sens », affirme dans cet entretien l’Inspecteur Graeme Rankin de Police Scotland.
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Suivre la conversation avec l’Efus
L’Efus travaille depuis plus de 30 ans sur la question de la protection des espaces publics. Son positionnement est exprimé dans le manifeste Sécurité, Démocratie et Villes : Coproduire les politiques de sécurité urbaine où il recommande de prendre en compte les différents usages des espaces publics à partir de données objectives et subjectives, d’associer les citoyens à la coproduction des politiques de sécurité publique, et de maintenir un équilibre sain entre l’utilisation des technologies de sécurité et le respect des droits fondamentaux. Lors de la dernière édition de la conférence Sécurité, Démocratie et Villes (octobre 2021), deux ateliers avaient eu lieu sur cette thématique : « Comment les villes peuventelles concevoir et animer des espaces publics plus sûrs et plus inclusifs ? » et « Stratégies d’anticipation pour mieux protéger les espaces publics et renforcer la résilience urbaine. »
Les webconférences régulières de l’Efus
Tout au long de l’année, l’Efus organise régulièrement des webconférences, accessibles à toute personne intéressée, sur diverses thématiques de sécurité urbaine telles que la protection des espaces publics sous ses différents aspects. Elles réunissent des représentants de municipalités européennes, des universitaires, des techniciens, des représentants de la police, etc., et sont des sources utiles d’informations et de contacts.
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4.3. Associer les entreprises locales
Le projet PACTESUR a aussi mis en lumière la nécessité d’associer les entreprises locales aux mesures préventives de protection des espaces publics. Les entreprises et commerces locaux peuvent jouer un rôle important d’alerte des autorités en cas d’incident et pour protéger ou abriter les citoyens. Les collectivités peuvent sensibiliser les entreprises locales, les former et leur donner des outils pour qu’elles soient vigilantes et les alertent en cas d’activité suspicieuse, ou bien en venant directement en aide aux citoyens en cas d’attaque (par exemple en leur offrant refuge dans leurs locaux).
Au Royaume-Uni, le Home Office, le Bureau national du contre-terrorisme, la compagnie d’assurance Pool Reinsurance Company, et les services de police spécialisés en contre-terrorisme ont créé conjointement une plateforme digitale intitulée Protect UK qui offre des directives, des conseils et des formations en ligne aux entreprises et aux citoyens sur les menaces terroristes. La plateforme encourage les entreprises à renforcer leurs systèmes de sécurité et à intégrer la sécurité à tous les échelons de leur organisation afin de mieux détecter, prévenir et contrer les menaces terroristes. Le fait que cette plateforme ait été créée par le gouvernement illustre une tendance croissante, au Royaume-Uni comme dans d’autres pays européens, à associer toute la société, y compris les entreprises privées, à la prévention du terrorisme.
Une autre initiative intéressante au Royaume-Uni est la brochure publiée par l’Association des chefs de police (Association of Chief Police Officers), l’Office national du contre-terrorisme (National Counter Terrorism Security Office) et London First, organisation représentant des entreprises privées. Cette brochure est destinée à sensibiliser les entreprises locales à la nécessité de se préparer à un attentat
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> Plus d’informations sur Protect UK ici.
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terroriste ou autre incident majeur. Intitulée Expecting the unexpected (« s’attendre à l’inattendu »), elle note que 40 % des entreprises qui avaient été affectées par l'attentat contre le Manchester Arena en 2017 n’ont jamais repris leurs activités.
> Téléchargez la publication ici
Cas pratique : l’application SHIELD, commandement des opérations de protection du London Metropolitan Police Service (Royaume-Uni)
La London Metropolitan Police a créé une application mobile pour les entreprises locales, inspirée par une pratique du New York Police Department (NYPD).
Elle a été lancée en 2018, un an après l’attentat du London Bridge au cours duquel des terroristes avaient attaqué les passants avec une camionnette-bélier, avant de lancer une attaque au couteau contre des personnes qui se trouvaient non loin de là au Borough Market. Cet attentat avait fait huit morts et 48 blessés. Pendant l’attaque, de nombreux citoyens s’étaient réfugiés dans des cafés et restaurants.
La police de Londres affirme que l’application a pour objectif de « donner aux professionnels de la sécurité une source unique qui leur permet de renforcer leur plan de gestion de crise, leur sécurité physique, ainsi que leurs connaissances en matière de contre-terrorisme ». Plus de 2 000 entreprises londoniennes se sont inscrites.
> Plus d’informations ici.
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Cas pratique : Police Scotland et la gestion du sommet des Nations Unies sur le climat (COP26), Glasgow, novembre 2021
L’Opération Urram a permis d’assurer une COP26 sans aucun incident grave grâce à la coopération et un dialogue intense entre la police et les entreprises locales, les habitants et les groupes protestataires. La police a mis en œuvre trois principes : dialoguer avec le public et les protestataires, faciliter les manifestations pacifiques (même si illicites), et utiliser la force en dernier recours.
Ce résultat est d’autant plus remarquable que la COP26 était, selon Police Scotland, l’opération de police la plus complexe jamais réalisée en Écosse et l’une des opérations de police les plus importantes jamais conduites au Royaume-Uni. Jusqu’à 10 000 agents de police étaient mobilisés certains jours tandis que la conférence a réuni, sur une période de 13 jours, quelque 40 000 délégués et près de 100 000 contestataires.
Police Scotland souligne que ce succès est dû en grande partie au dialogue intense organisé avec le public et les contestataires avant et pendant l’événement, dans l’objectif d’expliquer les problèmes de sécurité et les mesures policières mises en place. Le fait que l’une des priorités de la police était de « faciliter la tenue de manifestations pacifiques » a permis que celles-ci aient lieu sans encombre, contrairement à d’autres conférences COP des Nations Unies organisées dans le passé dans d’autres pays.
> Plus d’informations ici.
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Chapitre 5
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Communiquer >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>> >>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>
efficacement avec le public en cas de crise
Lorsqu’une crise se produit, quelle que soit sa nature, les autorités locales jouent un rôle majeur dans la communication avec le public pour l’informer, le rassurer, éviter que l’incident ne s’aggrave, protéger les personnes et veiller à ce qu’elles n’interfèrent pas avec la police et les services de secours. Un aspect important de cette communication de crise consiste à bien coordonner les messages donnés par l’autorité locale avec ceux de la police et des services de secours. Il s’agit de parler d’une seule voix pour ne pas désorienter le public. De plus, comme nous l’avons vu au chapitre précédent, la communication est en soi une mesure de prévention que les autorités locales peuvent utiliser pour assurer la protection d’un espace public.
Il est donc important de prendre en compte les principaux aspects d’une stratégie de communication avec le public avant, pendant et après une crise. Une crise peut être définie comme un événement, une perception, une conséquence, une menace ou une situation dont le déclenchement a généralement pour caractéristiques d’être inattendu, imprévu et improbable. Ce déclenchement affecte une organisation parce qu’il crée de l'ambiguïté et de l’incertitude : le temps s’accélère et de nouveaux acteurs apparaissent.
Les plans de gestion de crise sont importants aussi bien au niveau horizontal (entre les principaux acteurs locaux) que vertical (entre les acteurs locaux, régionaux ou nationaux). Une communication claire, cohérente et efficace est essentielle pour rassurer les citoyens, non seulement pour les informer des décisions prises pour résoudre la crise, mais aussi pour réduire son impact social et prévenir la propagation de fake news.
5.1. Rôles et responsabilités dans la communication de crise
L’une des premières conditions pour une communication efficace est d’avoir une équipe compétente où chacun a des responsabilités claires, ce qui comprend la récolte d’information, la définition et la mise en œuvre d’une stratégie de communication, faire le lien avec les autres acteurs qui interviennent pour résoudre la crise (police, services de secours, autres autorités…), et la coordination de toutes ces opérations.
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Pour que les messages touchent les publics ciblés et soient bien compris et suivis, il faut connaître les différents canaux de communication existants, dont la presse et les réseaux sociaux, leurs caractéristiques, leurs audiences respectives et leur mode opératoire. Il est important que les collectivités aient un.e seul.e porte-parole capable de communiquer avec tous les acteurs pertinents et avec le public de façon rassurante, crédible, « audible » et en temps opportun.
Un autre aspect important à ne pas négliger est la communication après la crise pour aider les membres du public à se rétablir après l’incident, par exemple en partageant leurs émotions et en participant à une ritualisation qui aide à assimiler l’événement. Ce peut être un rassemblement avec des fleurs et des bougies sur le lieu où a eu lieu l’événement, signer un livre de condoléances en ligne, ou encore faire des dons. De façon générale, la communication d’après-crise a pour but de rassembler les communautés locales dans un processus de guérison, mais aussi, crucialement, de prévenir un contrecoup sous forme de polarisation accrue, de haine ou de tensions ethniques.
Cas pratique : le manuel du Strong Cities Network
Il est aisé de trouver des informations sur la communication de crise, un volet important de la communication et des relations publiques, notamment des conseils que les collectivités peuvent utiliser quelle que soit la nature de la crise à laquelle elles sont confrontées. En ce qui concerne plus spécifiquement la communication lors d’une crise affectant un espace public, telle qu’un attentat terroriste, il peut être utile de consulter le manuel détaillé de l’Institute for Strategic Dialogue (ISD) et du Strong Cities Network (SCN), réseau qui fait partie de l’ISD. Ces deux organisations sont des partenaires de longue date de l’Efus.
Ce guide d’une cinquantaine de pages est divisé en quatre chapitres : 1) engagement communautaire, ou « comment les
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autorités peuvent s’appuyer sur les réseaux existants pour mesurer l’impact d’un attentat et identifier les mécanismes les plus adaptés pour assister les victimes ? » ; 2) communication publique ou « comment les autorités locales peuvent élaborer des plans pour réduire les tensions et renforcer le sentiment d’identité, le moral et la cohésion sociale d’une ville ? » ; 3) s’assurer que les communautés locales reçoivent une assistance psychologique et sociale adéquate ; 4) recommandations clés à l’attention des responsables politiques des villes pour la période qui suit immédiatement un attentat, un moment où la tension est à son comble. Le guide comprend également en annexe des fiches et d’autres outils pour organiser le travail et notamment suivre les réseaux sociaux, qui peuvent être très utiles dans toutes les actions menées par la ville en réponse à un attentat.
> Ce guide, intitulé Responding to a Terror Attack, est disponible (en anglais seulement) ici
Cas pratique : la campagne Courir, Se cacher, Signaler
« Nous avons besoin de l’aide et du soutien des individus, des entreprises et des communautés dans tout le Royaume-Uni pour être vigilants et assurer la sûreté et la sécurité des lieux où nous vivons, nous travaillons et échangeons socialement ».
Conseils de la Metropolitan Police de Londres, Royaume-Uni
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Une communication de crise efficace fait partie intégrante de la réponse à tout type de menace. Au Royaume-Uni, la campagne Courir, Se cacher, Signaler (Run, Hide, Tell) guide les citoyens dans le cas, improbable, d’un attentat.
1. Courir pour se mettre à l’abri.
2. Se cacher en évaluant les voies de sortie et d’échappement.
3. Signaler à la police lorsqu’on est hors de danger.
> Vous pouvez consulter le dépliant d'information de la Met Police ou regarder le film Stay Safe.
Il est intéressant de noter que la police londonienne recommande de Courir, Se cacher et Signaler, alors que dans d’autres villes européennes, les recommandations des autorités publiques sont différentes. Par exemple à Liège et à Oslo, les recommandations officielles en cas d’attentat sont de Courir et Se cacher, mais aussi, si l’on est pris au piège, de Se battre.
Ces différences sont apparues lors d’un exercice de simulation organisé dans le cadre de l’Académie de Police de Liège par le projet PACTESUR. Elles montrent combien il est important que tous les organes intervenant pour protéger le public en cas d’attentat terroriste aient un message cohérent. Comme nous l’avons vu plus haut, la cohérence et la clarté des messages sont essentielles et peuvent sauver des vies.
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Cas pratique : L’application Police in your Pocket, Luxembourg
L’application mobile de la police du Luxembourg comprend une fonction intitulée Citizen Cop qui permet aux citoyens de signaler des activités ou des comportements suspects rapidement et de façon simple et sans filtre. Gratuite, elle est disponible en quatre langues : luxembourgeois, français, allemand et anglais. Il faut s’inscrire en donnant son nom, une adresse email et un numéro de téléphone. L’appli permet aussi à la police d’informer les utilisateurs directement et rapidement en cas de crise grâce aux notifications push et de lancer des appels à la population, par exemple pour retrouver une personne disparue ou pour traquer un présumé délinquant. L’appli permet aussi de localiser le commissariat de police le plus proche, donne des informations sur le trafic et permet d’accéder à un commissariat virtuel.
Cas pratique : les podcasts du projet Secu4All
Une autre ressource utile est la série de quatre podcasts produite par le projet européen Secu4All (décembre 2020–novembre 2022), qui avait pour objectif de renforcer les capacités des collectivités en leur apportant des connaissances théoriques et des outils pratiques pour renforcer la sécurité des espaces publics et la protection des cibles dites vulnérables (telles que les installations sportives, les centres commerciaux et les écoles) contre les menaces potentielles.
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> Plus d’informations ici.
Les podcasts couvrent quatre thèmes : évaluer la vulnérabilité d’un espace public ; planification, aménagement et gestions des espaces urbains ; communication de crise ; technologies innovantes pour la sécurité des espaces publics.
L’épisode sur la communication répond à des questions telles que : à quoi devrait ressembler une équipe de communication de crise ? Comment l’équipe de communication de crise doit-elle se préparer à une crise ? Quels sont les principaux éléments de la communication pendant et après une crise ? Comment s’assurer que la communication soit cohérente, fondée sur des faits vérifiés, et bien coordonnée ?
Le programme cite le manuel Responding to a Terror Attack du Strong Cities Network et le projet européen Driver+ (Driving Innovation in Crisis Management for European Resilience), qui portait sur les besoins opérationnels des intervenants en cas de crise telle qu’une catastrophe climatique ou un attentat terroriste.
> La série de podcasts de Secu4All est disponible sur le site web de l’Efus ici.
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Prendre en compte ce qui peut mal se passer
Un aspect important de la préparation à une crise est de prendre en compte ce qui peut mal se passer, soit au travers d’un exercice de simulation, soit à partir d’un événement réel. Les cas d’étude qui ont été analysés dans le cadre de PACTESUR comprenaient deux exemples montrant comment le manque de coordination entre les différentes forces de sécurité chargées de protéger un espace public peut mener à frôler la catastrophe ou pire, à une tragédie.
Madrid : lorsque le manque de coopération entre différentes forces de police fait frôler la catastrophe
Le premier cas était une contribution de la ville de Madrid. L’incident a eu lieu en 2018, lorsqu’un passager a embarqué à bord d’un train à grande vitesse à la gare centrale de Barcelone, en chemin vers Madrid. Le passager portait dans ses bagages un objet ressemblant à une grenade à fragmentation.
Les gardiens de sécurité privée de la gare de Barcelone ne détectent pas l’objet et les services de sécurité à Madrid ne sont alertés que lorsque que le train a déjà quitté la gare. L’affaire est alors transférée à la police nationale qui ordonne la fermeture et l’évacuation de la gare de Madrid
Atocha, où le train est attendu, ainsi que la place Carlos V voisine. Comme l’incident se produit vers 8h du matin, en pleine heure de pointe, et sachant qu’Atocha est l’une des plus grandes gares d’Espagne ainsi qu’un important nœud de métro, l’impact sur le trafic de la ville est important.
Une fois que la police nationale est en mesure de monter dans le train et de vérifier les bagages du passager en question, elle réalise que l’objet suspect est en fait une boucle de ceinture en forme de grenade. L’alerte est levée et tout retourne à la normale.
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Cet incident a mis en lumière un certain nombre de failles : à Barcelone, un manque de vigilance des gardiens de sécurité privée lors des contrôles de bagages à l’embarquement, et un manque de communication entre cette entreprise privée de sécurité et la police régionale de Catalogne ; à Madrid, un manque de communication entre la police nationale et les services municipaux d’urgence ainsi que la police municipale.
Le principal enseignement de ce cas est que l’incident était dû à un manque de coordination entre les différents corps de police, ce qui est lié en partie à l’organisation administrative de l’Espagne où les responsabilités ne sont pas clairement délimitées entre les niveaux de gouvernance national, régional et local et les forces de police correspondantes.
> La leçon à tirer est qu’il est essentiel d’identifier et d’établir des canaux de communication clairs entre tous les acteurs pertinents, notamment la police, lorsque l’on planifie une intervention d’urgence dans un espace public. La difficulté est d’identifier l’autorité responsable de coordonner ces différents acteurs. À notre connaissance, et à l’heure où nous écrivons cette publication, ni les autorités de Catalogne et de Barcelone, ni celles de Madrid, ni celles à niveau national en Espagne n’ont pris de mesures structurelles spécifiques pour remédier aux manquements identifiés dans ce cas.
Turin : lorsqu’un mouvement de panique dans une foule dégénère en tragédie
Les faits se sont déroulés en 2017 à Turin pendant une projection sur grand écran extérieur de la finale de la Ligue des Champions, sur une place centrale de la ville. La zone avait été bouclée par des barrières de sécurité et les 40 000 spectateurs devaient tous passer un contrôle de sécurité.
Tard dans la soirée, un groupe de jeunes a utilisé des vaporisateurs de gaz poivré pour effrayer les personnes qui se trouvaient près d’eux et profiter de la confusion pour dérober leurs sacs, téléphones et bijoux. Quelqu’un dans la foule a crié qu’il s’agissait d’un attentat à la bombe, ce qui a provoqué une énorme panique. Tout le monde s’est précipité vers les sorties et dans le tumulte, trois personnes sont mortes et quelque 1 500 ont été blessées.
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Trois points critiques et enseignements à tirer
L’enquête qui a été menée sur cet événement a mis en lumière trois points critiques. Le premier est que toute la stratégie de sécurité était fondée sur l’idée d’empêcher une attaque terroriste depuis l’extérieur. Elle n’envisageait pas un incident qui puisse se produire à l’intérieur, parmi les spectateurs.
> L’enseignement à tirer est qu’il est aussi impératif de prendre en compte les menaces qui viennent « de l’intérieur ».
Le deuxième est que la police municipale et la police nationale qui surveillaient l’événement ont été incapables d’identifier correctement ce qui se passait pendant un long moment, en raison de la confusion générale qui régnait sur la place.
> L’enseignement ici est que les plans de gestion de crise doivent comprendre des mesures pour permettre à la police et autres acteurs pertinents d’évaluer correctement une situation.
Le troisième point est le manque de coordination entre la police municipale, dont la mission se limitait à contrôler la consommation d’alcool, et la police nationale. Ce n’est qu’après un long moment que la police municipale a reçu l’instruction de la police nationale d’évacuer le public.
> L’enseignement ici est que, comme dans le cas de Madrid, une coopération fluide est nécessaire entre les différentes forces de police.
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Les collectivités sont en première ligne pour identifier les problèmes qui préoccupent le plus les citoyens et agir pour les résoudre. Elles ont d’énormes capacités d’innovation et de solidarité et peuvent élaborer des politiques intégrées et durables.
Par ailleurs, la protection des espaces publics est un défi qui évolue en permanence et demande de constamment réévaluer et actualiser les stratégies, les politiques et les mesures mises en œuvre. Le terrorisme évolue et de nouvelles menaces émergent sans cesse, ce qui demande des collectivités un effort permanent d’adaptation de leurs stratégies pour mieux répondre à ces menaces affectant les espaces publics.
Les récentes catastrophes climatiques confirment que le changement climatique affectera de plus en plus nos espaces publics dans un avenir proche. Comment les villes peuvent-elles s’y préparer ? La crise énergétique actuelle et le fait que de nombreuses villes européennes ont choisi de réduire (ou couper) l’éclairage public requièrent la réévaluation de l’impact de celui-ci sur la sécurité publique. Comment garantir la sécurité dans une ville la nuit avec moins ou pas d’éclairage public ? La généralisation du travail chez soi pendant la pandémie de Covid amène à se demander si l’espace virtuel doit être considéré comme faisant partie de l’espace public. Comment protéger cet espace ? Et qui protège-t-on dans cet espace ? Ce sont certaines des questions qui ont émergé ces dernières années en matière de protection des espaces publics et du rôle des collectivités à cet égard. Le Forum européen pour la sécurité urbaine (Efus) travaille en permanence sur la question de la protection des espaces publics, qui est centrale pour les collectivités, soit par le biais de projets financés par l’Union européenne, tels IcARUS et Secu4All, soit dans le cadre de ses activités régulières telles que la conférence Sécurité, Démocratie et Villes (SDC), ses groupes de travail thématiques, et les nombreux ateliers, conférences en ligne et autres rencontres qu’il organise régulièrement en ligne ou en présentiel. La protection des espaces publics sera une thématique clé lors de la conférence du projet IcARUS et de la prochaine conférence SDC, toutes deux prévues en 2024.
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Conclusion >>>>>>>>>>>>>>>>>>>
Au terme de quatre années de travail sur divers aspects de la protection des espaces publics contre les menaces terroristes et autres, le projet PACTESUR a formulé une série de recommandations aux collectivités européennes, qui sont exprimées dans la Déclaration de Bruxelles publiée ci-après. Ce texte a été adopté lors de la conférence finale du projet à Bruxelles, les 23-24 novembre 2022. L’un des arguments principaux de la Déclaration est que les collectivités, qui représentent le niveau de gouvernance le plus proche des citoyens, ont un rôle clé à jouer dans la protection des espaces publics et qu’à ce titre, elles doivent être davantage écoutées et soutenues par les gouvernements nationaux et les institutions européennes. Une autre idée clé de la Déclaration est que l’amélioration ou le renforcement de la sécurité des espaces publics doit toujours se faire en préservant la nature ouverte de ces espaces, c’est-à-dire la possibilité offerte à tous les groupes de population d’y accéder et de les utiliser.
À partir de ces deux principes fondamentaux, la Déclaration recommande aux collectivités différents types d’intervention pour mieux protéger leurs espaces publics. Tous reposent sur des partenariats multi-acteurs, c’est-à-dire l’implication de tous les acteurs locaux pertinents, que ce soit la police locale, les entreprises et commerces, le secteur créatif ou encore, surtout, les citoyens eux-mêmes.
Recommandations
Déclaration de Bruxelles
Adoptée à Bruxelles le 23 novembre 2022
Événement de clôture du projet PACTESUR (initié le 1er janvier 2019 et ayant pour objectif d’améliorer la sécurisation des espaces publics)
Nous, élus locaux et représentants des collectivités membres du projet PACTESUR, forts de la Déclaration de Nice du 29 septembre 2017 pour une action en faveur de la prévention de l’extrémisme violent et
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de la sécurisation des villes en Europe et en Méditerranée, de la Déclaration adoptée le 22 octobre 2021 à Nice par les membres de l'Efus lors de la Conférence internationale Sécurité, Démocratie et Villes, et des travaux menés depuis quatre ans dans le cadre du projet PACTESUR, sur la base du consensus établi au sein de ce partenariat,
Nous sommes convaincus que :
Nous jouons un rôle central dans l’élaboration et la mise en œuvre de politiques de sécurité transversales, fondées sur une approche globale et intégrée de la protection des espaces publics.
Nous partageons une réflexion commune sur les moyens à mettre en œuvre pour mieux protéger nos espaces publics urbains face à l'évolution des menaces tout en nous assurant qu'ils restent ouverts et accessibles à tous.
Nous avons beaucoup à gagner à poursuivre nos échanges sur nos stratégies locales, nos outils innovants et nos meilleures pratiques.
Nous sommes investis dans un processus de collaboration continue et productive avec les institutions nationales et européennes pour mettre en œuvre des politiques adaptées et des actions concrètes avec l’appui d’une communauté d’experts internationaux pluridisciplinaires.
Nous sommes également investis dans des partenariats locaux de sécurité, les acteurs locaux étant les mieux placés pour repérer, prévenir et répondre aux problématiques de terrain et aux préoccupations des habitants.
Nous, élus locaux et représentants des collectivités membres du projet PACTESUR, réunis lors de l’événement de clôture du projet PACTESUR, nous engageons à :
Reconnaître le caractère évolutif des menaces et des risques inhérents aux espaces publics. Une telle considération renforce la nécessité de procéder à des évaluations fréquentes des risques.
Prioriser les réponses aux menaces en fonction des évaluations des risques et de la vulnérabilité afin de promouvoir une approche préventive et concevoir des solutions sur mesure et ciblées afin d'offrir des espaces publics plus sûrs.
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Adopter une approche de sécurité globale et intégrée, où la mise en œuvre d’équipements est conçue comme une composante complémentaire qui s'inscrit dans une politique de sécurité générale de protection des espaces publics, qui mobilise l’ensemble des services locaux compétents et non les seuls acteurs locaux de la sécurité.
Envisager également des solutions de sécurité temporaires au lieu d'investir uniquement dans des solutions permanentes. Une approche intégrée et globale de la sécurité doit combiner des solutions à court et à long termes et pouvoir s'adapter aux situations évolutives.
Prioriser le développement d'une culture de prévention en matière de sécurité afin d’améliorer la perception du public et de renforcer la participation des citoyens au processus décisionnel.
Encourager les initiatives de la société civile en valorisant les solutions créatives ou qui ajoutent une valeur artistique, culturelle ou d’intégration au paysage urbain et en accordant une attention particulière aux solutions ayant un impact sur l'attractivité, l’accessibilité et l'ouverture de l'espace.
Améliorer les actions de communication et de sensibilisation avant, pendant et après la mise en place d'équipements de sécurité physique afin d’accroître l'acceptation du public.
Répondre aux préoccupations juridiques, sociétales et éthiques lors de la planification et de la gestion des espaces publics, notamment en fournissant les garanties nécessaires à la protection des droits fondamentaux.
Continuer à travailler en coopération étroite avec les institutions européennes et rapprocher l’Union européenne et les citoyens au travers d’échanges et de collaborations renforcés entre les niveaux de gouvernance urbaine locaux, régionaux et européens.
Nous, élus locaux et représentants des collectivités membres du projet PACTESUR, appelons les institutions européennes à :
Reconnaître le caractère évolutif et multifactoriel des menaces sur l’espace public et la nécessité d’adopter une approche globale et intégrée.
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Développer davantage l'harmonisation des normes, notamment en matière d'équipements, et favoriser l'échange des bonnes pratiques pour la protection et l'aménagement des espaces publics. Poursuivre leur soutien aux échanges d’expériences et à la coopération entre villes et régions européennes en matière de sécurité urbaine. La mise en place d’un Erasmus des polices locales devrait être envisagée.
Faciliter l’accès des villes et collectivités européennes aux financements, aux conseils et à la formation pour leur permettre de répondre aux défis de sécurité actuels et de renforcer leur résilience.
Signature du Maire de ………….
Le projet PACTESUR était financé par le Fonds de sécurité intérieure de l’Union européenne –Police. Les opinions exprimées dans cette déclaration n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas les opinions de la Commission européenne. Elle n’est pas responsable de son contenu et de l’usage qui peut être fait des informations qu’elle contient.
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Annexe 1: Vingt-cinq techniques de prévention situationnelle
Intensifier les efforts
1. Renforcer les cibles
- Équipements anti-vol pour les véhicules
- Écrans anti-vol
- Packaging sécurisé
Accroître les risques Réduire les bénéfices Réduire les provocations
6. Gardiennage
- Prendre des précautions de routine : sortir en groupe la nuit, laisser des signes indiquant la présence chez soi, avoir son téléphone
- « Cocon », gardiennage (Neighbourhood watch)
2. Contrôle de l’accès aux sites
- Téléphones d’entrée
- Accès par carte électronique
- Contrôle des sacs et bagages
3. Surveiller les sorties
- Exigence d’un ticket de sortie
- Documents d’exportation
- Taguage électronique de la marchandise
7. Améliorer la surveillance naturelle
- Meilleur éclairage public
- Un design urbain qui rend l’espace défendable
- Soutenir les lanceurs d’alerte
8. Réduire l’anonymat
- Identité du chauffeur de taxi et autocollant
« Appréciezvous ma façon de conduire ? »
- Uniformes à l’école
11. Dissimuler les cibles
- Ne pas laisser son véhicule dans la rue
- Annuaires téléphoniques non genrés
- Camionnettes de transport de fonds anonymisées
12. Retirer les cibles
- Autoradio amovible
- Refuges pour les femmes
- Cartes de téléphone prépayées
16. Réduire les frustrations et le stress
- Queues efficaces et service courtois
- Accroître les places assises
- Musique et lumière douce
Supprimer les excuses
21. Fixer des règles
- Accords de location
- Codes sur le harcèlement
- Enregistrement à l’hôtel
17. Éviter les disputes
- Zones séparées pour les supporteurs d’équipes rivales
- Réduction du nombre de personnes dans les cafés/pubs
- Tarif de taxi prédéterminé
13. Identifier les biens/la propriété
- Signalisation de la propriété
- Immatriculation des véhicules et des pièces détachées
- Marquage du bétail
18. Prévenir la montée des émotions
- Contrôle de la pornographie violente
- Avoir un bon comportement sur le terrain de football
- Interdire les commentaires racistes
22. Afficher des instructions
- « Parking interdit »
- « Propriété privée »
- « Éteindre les feux extérieurs de camping »
23. Encourager la vigilance
- Panneaux de limitation de vitesse sur la route
- Signature pour les déclarations de douanes
- « Le vol à l’étalage est du vol »
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Annexes
Intensifier les efforts Accroître les risques Réduire les bénéfices
4. Dévier les délinquants
- Fermer l’accès aux rues
- Toilettes séparées pour les femmes
- Répartir les pubs/cafés
5. Contrôler les outils/armes
- Armes à feu intelligentes
- Déconnecter les téléphones volés
- Restreindre la vente de peinture aérosol aux jeunes
Annexe
9. Utiliser des managers de site
-Vidéosurveillance pour les autobus à étage
- Deux vendeur. ses dans les commerces locaux
- Rétribuer la vigilance
10. Renforcer la surveillance formelle
- Caméras à infrarouge
- Alarmes anti-vol
- Gardiens de sécurité
14. Désorganiser les marchés
- Surveiller les boutiques de prêts sur gage
- Contrôle des petites annonces
- Licence pour les vendeurs de rue
15. Empêcher les bénéfices
- Étiquettes de marchandise à l’encre
- Nettoyage des graffitis
- Ralentisseurs de vitesse
Réduire les provocations Supprimer les excuses
19. Neutraliser la pression des pairs
- « Les idiots boivent et conduisent »
- « C’est OK de dire non »
- Disperser les fauteurs de trouble à l’école
20. Décourager l’imitation
- Réparation rapide après les actes de vandalisme
- Puce électronique dans les téléviseurs
- Censurer les informations sur les modes opératoires
24. Faciliter le respect des règles
- Checkout facile dans les bibliothèques
- Toilettes publiques
- Corbeilles à détritus
25. Contrôle des drogues et de l’alcool
- Éthylotests dans les pubs/ cafés
- Intervention du personnel des cafés/ restaurants
- Événements sans alcool
Cet article reprend des directives et d’autres documents sur les processus de prévention par l’aménagement urbain (CPTED selon l’acronyme en anglais) utilisés dans la protection des espaces publics.
La standardisation en matière de prévention peut être efficace et amusante, par Paul van Soomeren, fondateur, DSP Groep
Il est bien connu que la prévention de la délinquance, des incivilités et du sentiment d’insécurité demande une approche où les collectivités et la police travaillent ensemble avec les travailleurs sociaux, les urba-
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2 : La standardisation en matière de prévention peut être efficace et amusante
nistes et designers, les habitants et les entreprises locales. Il en va de même pour le Security by Design (SbD), la prévention par le design, la planification et l’aménagement urbains (Crime Prevention through Urban Design, Planning and Management, CP-UDP), et la prévention par l'aménagement urbain (Crime Prevention through Environmental Design, CPTED). Dans cet article, nous utiliserons le terme CPTED.
Une définition de la CPTED
La norme ISO 22341:2021 et les nouvelles normes européennes CEN (CEN/TS 14383-2:2022; voir ci-dessous) définissent la CPTED comme suit47:
elle vise la criminalité (dont le terrorisme) + la peur du crime/le sentiment d’insécurité. Objectifs principaux : qualité de vie, vie en sécurité, habitabilité ;
un mélange de mesures sociales et techniques/physiques (bâtiment & modes de vie) ;
les racines théoriques du concept de la CPTED sont variées ;
toujours spécifiquement liée à un moment/un lieu ; au niveau du quartier, en tant qu’entité géographique, sociale et physique, peut structurer l’approche ;
des groupes très différents d’acteurs doivent participer : approche partenariale (multipartite et pluridisciplinaire) ;
travailler ensemble selon un processus par étapes dans un contexte national et local spécifique : urbanistes, architectes, ingénieurs, police, habitants, responsables municipaux/maintenance, etc. ;
planifier-faire-vérifier-agir c’est-à-dire apprendre en faisant, évaluer et travailler sur la base de données probantes ;
une approche organique adaptée aux situations locales et aux acteurs locaux, y compris les habitants et les utilisateurs finaux.
47- Paul van Soomeren a donné une présentation à la conférence internationale Urban environment – security threat or opportunity for prevention? à Prague, République tchèque, en octobre 2022. Les chiffres présentés ici sont tirés de cette présentation.
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Une soupe d’acronymes
La grande quantité de noms et la « soupe d’acronymes » existant en Europe (SbD, CPTED, CP-UDP, CP-UDPM, DAC, SCP, DfS, DOC, DS UPDM-US, etc.)48 montre qu’un certain degré de standardisation est utile, notamment pour les designers, architectes, urbanistes et consultants qui travaillent souvent à une échelle transnationale et même mondiale. À cet égard, la récente norme ISO49 est un mal pour un bien : ISO 22341:2021 explique la CPTED (Crime Prevention through Environmental Design). Un terme utilisé couramment dans toutes les régions du monde.
Qu’est-ce qu’une norme ou un standard ?
Une norme (on peut aussi dire un standard selon le terme utilisé en anglais) est un texte préparé par des experts sur lequel il y a un consensus. Il peut s’agir d’une méthode ou d’une procédure de test, d’un produit, d’un service ou d’un processus (comme la gestion de la qualité ou du risque, ou un processus régulier de CPTED, étape par étape). Les normes CEN sont européennes et les normes ISO sont mondiales.
48- SbD : Security by Design ou Secured by Design (au Royaume-Uni) ; CPTED : Crime Prevention through Environmental Design ; CP-UDP : Crime Prevention through Urban Design and Planning (aussi Planning and Design ou Planning, Design and Management) ; DAC : Design Against Crime ; SCP: Situational Crime Prevention ; DfS : Design for Security ; DOC : Designing Out Crime ; DS: Defensible Space ; UPDM-US : Urban Planning, Design and Management for Urban Security. Sans oublier le CEN (qui est le Comité européen pour la standardisation) : Crime Prevention through building design, urban planning and city maintenance.
49- ISO = International Standardisation Organisation qui promeut des normes mondiales.
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Travailler ensemble comme un orchestre
Travailler en partenariat paraît relativement simple : cela ressemble à un orchestre harmonieux où les urbanistes, les designers et les managers (les violons) synchronisent leur action avec la police (percussion et basses), l’école et les éducateurs de jeunesse (flûtes), et les habitants et les entreprises (violoncelles). Un orchestre a besoin d’un chef. Mais différentes organisations = différents langages et cultures, approches (dur/doux, rapide/lent, préventif/réactif), styles de management, systèmes de planification et options financières. En un mot, travailler ensemble en partenariat est un défi.
Sur quoi doivent se focaliser les normes CPTED
Pour la CPTED, les normes les plus urgentes devraient concerner :
les produits : il existe plusieurs normes de produits qui sont pertinentes en matière de prévention de la criminalité (portes et fenêtres antivol, vitrages de sécurité, systèmes anti-véhicules bélier50, éclairage public, systèmes d’immobilisation du moteur en cas de tentative de vol51, etc.) ;
la terminologie/les définitions : ce travail a déjà commencé et s’achèvera en 2023-2024 (la nouvelle norme CEN EN 14383-2) ;
principes et processus : ceci a été fait récemment avec la nouvelle norme CEN TS 14383-2:2022.
Parce qu’il est souvent difficile de lire les normes, il est indispensable de les accompagner de manuels/guides et de formations. À cet égard, le manuel de formation développé dans le cadre du projet Secu4All, mené par l’Efus, peut être considéré comme un prototype52
50- Pour la protection contre les véhicules-bélier par des barrières, voir aussi Karlos, V., Larcher M., Solomos G. (2017). Review on vehicle barrier protection guidance et Karlos V. Larcher M., Salomon G. (2018). Guideline: Selecting proper security barrier solutions for public space protection.
51- van Ours, J.C. & Vollaard, B. (2014). The Engine Immobiliser: A Non-starter for Car Thieves. The Economic Journal, Volume 126/593, June 2016, pp.1264-1291. https://doi. org/10.1111/ecoj.12196 Pour ce qui est des logements, voir aussi van Ours, J.C. and Vollaard
B.A. (2011) « Does regulation of built-in security reduce crime? Evidence from a natural experiment ». Economic Journal, Volume 121, numéro 552, pages 485–504.
52- Efus, Secu4All (2021). Manuel de formation : Former les collectivités territoriales à offrir aux citoyens un environnement urbain sûr en réduisant les risques dans les espaces publics.
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Un chemin long et souvent fastidieux
En Europe, le travail du CEN sur la standardisation de la CPTED a commencé dès 1995. La route a été longue et parfois fastidieuse avant d’arriver à un consensus européen, rendue encore plus difficile à mesure que de nouveaux pays se joignaient à l’effort collectif. Une série de normes a été publiée au fil des années. La plus récente est la CEN TS 14383-2:2022, qui doit être publiée (à l’heure où nous écrivons ces lignes) vers la fin de 2022 ou le début de 2023.
1. Termes et définitions (EN 14383-1:2006). Le travail sur une nouvelle norme (remplaçant les précédentes) a commencé en 2022
2. Urbanisme (ENV 14383-2:2003 remplacée par TR 14383-2:2007 puis remplacée par TS 14383-2:202253)
3. Logements (TS 14383-3:2005)
4. Commerces et bureaux (TS 14383-4:2006)
5. Stations d’essence (TR 14383-5: 2010)
6. Sécurité dans les écoles (TS 14383-6:2022)
7. Équipements pour le transport public (TR 14383-7:2009)
8. Protection des immeubles et des sites contre les attaques criminelles avec des véhicules (TR 14383-8:2009)
Une norme utile pour les collectivités territoriales
La nouvelle norme CPTED européenne CEN TS 14383-2:2022 est particulièrement utile pour les collectivités locales dans leurs efforts d’amélioration de la sécurité urbaine. Elle explique les grands principes de la CPTED et comment les appliquer : Orientée sur les processus, Contribuant au développement urbain, Inclusive, Scientifique, Fondée sur des données probantes, Pro-sociale, Focalisée sur le changement du comportement humain. L’objectif principal : réduire la délinquance et la peur du crime pour améliorer la qualité de vie.
53- La nouvelle norme CEN TS 14383-2:2022 remplace l’ancienne norme TR. Elle reprend des idées concernant la gestion du risque (série ISO 31000), le management de la qualité (série ISO 9000), la CPTED (ISO 22341:2021) et de nouvelles approches, de nouveaux types de crimes et délits, et des normes et des documents des Nations Unies et de l’UE (comme l’ICCS).
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Les mesures à mettre en place sont toujours une combinaison adaptée à un contexte, un immeuble ou un projet de développement spécifique. Cependant, la CPTED comprend une série de possibles mesures sociales, physiques et techniques telles que : la surveillance naturelle, le renforcement territorial, le contrôle naturel de l’accès, la maintenance, la cohésion sociale, la participation communautaire, le renforcement du site ou des cibles, le soutien à l’activité, la connectivité sociale, la culture communautaire, le seuil de capacité, la qualité de vie, etc.
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Schéma 1 Comment appliquer les principes de la CPTED
Schéma 2 Utiliser les principes de la CPTED
Chaque contexte va requérir un ensemble spécifique de mesures. Ces principes d’utilisation peuvent être considérés comme les produits du ‘supermarché de la CPTED’ que les partenaires peuvent choisir en fonction de leur spécificité et du contexte de leur projet.
La nouvelle norme CEN TS 14383-2:2022 décrit aussi le cadre général d’un processus de CPTED à plus grande échelle, celui d’une ville ou d’une municipalité, d’une région, d’une nation et même de l’UE. Ce cadre ressemble au cercle planifier-faire-vérifier-agir (le PDCA-Demming circle) : Examiner, Prioriser, Analyser, Assigner les tâches, Intervenir, Évaluer, Apprendre.
Un autre niveau, plus proche du terrain, est celui d’un immeuble ou d’un projet d’urbanisme. Il peut s’agir d’un bloc d’immeubles, d’un nouveau quartier, d’une nouvelle structure de sport ou de loisirs, ou de la rénovation d’une place ou d’une avenue. Ici, nous reconnaissons l’approche de gestion des risques courante (ISO 31000) avec quelques ajouts :
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Schéma 3 Cadre général d’un processus de CPTED
Schéma 4 Approche de gestion des risques pour un projet/environnement spécifique (CEN TS 14383-2:2022 basée sur ISO 31000)
Rendre les normes pratiques et amusantes
Lors de diverses sessions de formation locale, nationale et même de niveau européen, nous avons simplifié l’approche de la CEN TS 14383-2 et formé divers participants – le plus souvent des policiers, designers, gestionnaires urbains, experts et autorités locales – à suivre, dans une situation spécifique, des normes CPTED plus ou moins standardisées en utilisant les principes de la CPTED.
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Cas pratique : l’expérience des villes de Fano, Xàbia, Hanovre, Riga et La Haye
La nouvelle norme CPTED CEN x TS 14383-2:2022 a été testée en pratique dans plusieurs villes dans le cadre du programme de formation du projet Secu4All, mené par l’Efus.
Ce programme avait pour objectif de former les acteurs concernés à l’intégration de mesures de design fondé sur des données probantes, de planification et de gestion pour renforcer la sécurité des espaces publics, anticiper des situations indésirables et évaluer les aspects éthiques.
Des exemples concrets ont été utilisés pour la formation : un quartier résidentiel et des installations sportives (Fano, Italie) ; un boulevard animé (Xàbia, Espagne) ; une énorme place sur deux niveaux du centre-ville (Hanovre, Allemagne) ; une zone de loisirs (Riga, Lettonie) ; et un centre urbain où sont situés des bâtiments officiels (gouvernement et parlement) (La Haye, Pays-Bas).
Dans tous les cas, des groupes mixtes d’acteurs locaux ont été formés à identifier les risques, les menaces et les vulnérabilités de ces espaces publics. Ils ont également dû formuler des solutions faisables et éthiques, et identifier quels acteurs doivent être mobilisés pour mettre en œuvre ces solutions.
La séquence est en fait simple et aussi très réelle :
1. Réunissez-vous (de préférence dans le cadre d’un partenariat multipartite)
2. Allez ensemble dans une zone spécifique (à problème) et discutez des risques et des menaces (portez des lunettes noires et soyez pessimistes) ainsi que des atouts (portez des lunettes roses et soyez op-
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timistes). Nous avons utilisé des autocollants ou des icônes « risques » à placer sur la carte ou la vue aérienne (faite par drone).
3. Allez ensemble dans un endroit agréable, prenez un café (ou une bière, ou du vin) et discutez des risques/menaces atouts/opportunités de l’endroit que vous avez visité. Notez les commentaires sur la grande carte/photo et utilisez les autocollants. Cherchez un consensus au sein du groupe. Essayez d’ajouter de la valeur en analysant d’autres/plus d’informations (chiffres de la police, études de victimisation, associations de voisins, écoles, etc.).
4. Établissez des priorités (gestion du risque : hasard x gravité des conséquences). Mettez-vous d’accord sur la ou les deux priorités.
5. Réfléchissez ensemble/faites du brainstorming/rêvez des solutions possibles et écrivez chaque solution sur une feuille de papier.
6. Pensez aux acteurs dont vous aurez besoin pour chacune des solutions et vérifiez la faisabilité de chaque solution et ses conséquences éthiques (nous avons souvent joué un rôle de simulation en divisant le groupe entre ceux qui sont extrêmement pour et ceux qui sont extrêmement contre).
7. Résumez et commencez.
Comprendre et appliquer les normes de prévention de la criminalité peut sembler de premier abord plutôt technique et fastidieux. Mais si les autorités locales et régionales affirment qu’une telle approche est vraiment nécessaire et que la standardisation est un outil utile, tout ce qu’elles doivent dire est : « respectez la norme CEN TS 143832:2022 ! ». Alors, avec un peu de créativité, une approche de la CPTED centrée sur l’humain est possible dans chaque ville. En plus, elle peut s’avérer plutôt amusante.
> Contacter l’auteur : pvansoomeren@DSP-groep.nl
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Annexe
3
: La prévention des attaques
par véhicule : l’expérience du Centre britannique pour la protection des infrastructures nationales
Le Centre pour la protection des infrastructures nationales (Centre for the Protection of National Infrastructure, CPNI) est l’autorité technique du gouvernement britannique chargée de la sécurité physique et personnelle.
Il a réalisé une étude sur la prévention des menaces par véhicule et des engins explosifs improvisés et embarqués dans un véhicule (Vehicle Borne Improvised Explosive Device, VBIED). Voici un résumé des principaux enseignements qui s’en dégagent.
Les véhicules sont utilisés depuis des décennies pour commettre des attentats terroristes, la forme la plus répandue traditionnellement était celle des engins explosifs embarqués dans un véhicule (Vehicle Borne Improvised Explosive Device, VBIED), c’est-à-dire un véhicule rempli d’explosifs. Des véhicules ont aussi été utilisés dans de nombreux autres cas d’attentat ou pour faciliter une attaque armée contre un site ou des personnes, soit en utilisant le véhicule comme bélier pour enfoncer les dispositifs de sécurité, soit simplement pour transporter les attaquants et leur équipement.
Comme pour tout autre type de menace, la nature et la fréquence des attaques par véhicule est changeante, de même que la méthodologie employée. Ces dernières années, l'utilisation de véhicules comme arme (Vehicle As a Weapon, VAW) a été la menace embarquée dans un véhicule la plus présente, mais les attentats VAW ne sont pas nouveaux.
Afin de compléter son programme de développement de contre-mesures (initié il y a de nombreuses années) et de développer des conseils de sécurité fondés sur les risques contemporains, le CPNI a étudié plus de 150 attentats VAW afin de bien comprendre comment ils se manifestent.
Entre 2014 et 2021, il y a eu plus de 140 attentats VAW, en majorité en Europe, en Amérique du Nord et en Asie occidentale. La plupart de ces attentats ont eu lieu dans des endroits accessibles au public. La grande majorité peut être attribuée à des terroristes islamistes, et un nombre significatif à des terroristes d’extrême droite.
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La collaboration avec les acteurs-clés est essentielle
Justifier une protection des lieux accessibles au public contre les attentats terroristes peut être difficile. Ce type de lieux est le plus souvent d’économie mixte et comprend des bars/restaurants/hôtels, des lieux ou installations de loisirs, et des espaces sociaux, de commerce, d’entreprises, résidentiels, publics et de transit.
Un terroriste exploitera toute opportunité ou faiblesse. C’est pourquoi une sécurité « en tranches » et la collaboration avec toutes les parties prenantes sont essentielles pour réduire les risques. Il existe de grandes opportunités de partenariat public/privé et les bénéfices sont souvent mutuellement symbiotiques.
Pour les autorités et les entreprises locales, il est essentiel d’avoir des structures de gouvernance robustes et l’accès à des informations détaillées sur les menaces et à des conseils en matière de sécurité. Suivre des processus structurés de gestion du risque permet d’identifier les défis, les opportunités et les risques ainsi que de développer des stratégies de réduction cohérentes et raisonnablement applicables.
Une collaboration étroite avec des spécialistes du contre-terrorisme permettra de mieux connaître les menaces, d’élaborer des hypothèses pour la planification et le cas échéant des options, la conception et la mise en œuvre de mesures de protection physiques opérationnelles pour Prévenir, Détecter, Retarder, Réduire et Répondre à un incident ou un attentat.
Les mesures de sécurité antiterrorisme doivent compléter les mesures destinées à prévenir la criminalité par le design (Designing out Crime) et de prévention de la criminalité par l’aménagement urbain (Crime Prevention Through Environmental Design, CPTED).
Au niveau stratégique, il convient de répondre à six priorités :
1. Développer des cadres de protection et de sécurité afin d’aider les autorités locales à prioriser les lieux à protéger et à gérer les risques résiduels.
2. Fournir des directives de sécurité contre-terroriste, de la formation et des conseils aux entreprises, aux autorités locales et aux services d’urgence.
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3. Collaborer entre les différents niveaux de gouvernance (à l’échelle locale et nationale).
4. Collaborer avec et professionnaliser les entreprises réputées de conseils en matière de sécurité et les professionnels de la sécurité.
5. Collaborer avec et, le cas échéant, unifier les pratiques de réponse d’urgence.
6. Être prêts à s’adapter, car ces menaces continueront d’évoluer et peuvent potentiellement se renforcer de façon soudaine.
Limitation physique des menaces par véhicule
Comprendre comment se manifestent les attentats VAW, y compris les environnements dans lesquels ils se produisent et la réponse des personnes et des services de sécurité et d’urgence, permet d’appliquer des stratégies de réduction des risques qui comprennent une sécurité « par tranches ».
La méthode éprouvée pour stopper un véhicule hostile est le déploiement de barrières de sécurité anti-véhicules (Vehicle Security Barriers, VSB) qui répondent aux normes internationales reconnues et aux évaluations de performance. Il existe plus d’un demi-millier de VSB évalués, dont 470 sont listés dans le catalogue des équipements de sécurité du CPNI capables de stopper une série de véhicules menaçants à différentes vitesses et selon différents angles d’impact.
Les VSB peuvent avoir toute sorte de formes et de taille : robustes en apparence, ‘anodins’ et agréables à regarder, d’utilisation double comme les sièges, les panneaux d’information et autre type de mobilier urbain, ou encore comme éléments du paysage tels que les bermes, les murs et autres barrières temporelles.
Les fabricants de barrières anti-véhicules et de mobilier urbain ont aussi beaucoup investi pour rendre leurs produits adaptables à l’environnement urbain, en créant des barrières qui ont des fondations très superficielles ou aucun dispositif de fixation, ce qui coûte moins cher pour les autorités et évite d’avoir recours à des entreprises d’installation.
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Dans l’environnement construit, les mesures de sécurité antiterrorisme ne sont pas nécessairement onéreuses, visibles ou oppressives. Si elles sont bien conçues, elles peuvent compléter l’architecture, contribuer à donner un sens de l’espace, rassurer le public et indirectement offrir des opportunités commerciales, sociales et environnementales.
Ce ne sont pas seulement les équipements qui sont importants. La façon dont les VSB sont installés est toute aussi importante que le niveau de protection qu’ils offrent. Ils doivent notamment être installés dans la même configuration par laquelle ils ont été évalués. Au-delà, il existe diverses solutions de protection que les architectes et urbanistes ainsi que les responsables de sécurité peuvent envisager, notamment :
l’interdiction totale à la circulation (aucun véhicule autorisé)
le contrôle de la circulation (certains véhicules autorisés)
la protection des zones piétonnières (protection des piétons)
réduire la vitesse de circulation
les protections semi-permanentes (des barrières d’accès installées de façon permanente et fermées de façon occasionnelle)
des protections temporaires (barrières amovibles installées sur une courte période)
ne rien faire (pas de protection).
Le personnel de sécurité est aussi un atout
Un individu ou un groupe peut identifier un espace public comme une cible potentielle. Il va alors chercher à obtenir des informations fiables en menant une reconnaissance hostile pour planifier l’attentat. Veiller à ce que les organisations aient des stratégies de communication qui prennent en compte la sécurité est ici essentiel. Cela permettra que les messages de sécurité appropriés soient communiqués au public, mais aussi que les informations sensibles ne soient pas divulguées.
Les autorités publiques et les entreprises emploient toute sorte de personnel et de contractuels, dont beaucoup connaissent bien les espaces publics où ils passent beaucoup de temps. Ils représentent un atout de
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sécurité et il est important qu’ils soient vigilants et sachent répondre à toute activité suspecte ou agressive, ou au cas de sacs abandonnés ou de tentative de dissimuler des engins explosifs dans le mobilier urbain. L'attitude et le professionnalisme du personnel de sécurité sont cruciaux pour déterminer la façon dont un attaquant potentiel percevra l’espace public. À ce titre, il joue un rôle pour empêcher qu’aient lieu la reconnaissance hostile et l’attaque.
La réduction des risques d’attentat par véhicule (Hostile Vehicle Mitigation, HVM) est une discipline dont l’un des principes fondamentaux est la réduction des risques. Connaître la menace, les vulnérabilités et les conséquences d’un attentat permettra aux responsables d’évaluer, de réduire et/ou d’accepter les risques résiduels.
> Ceci est un résumé d’un article paru dans la Publication Series de PACTESUR en septembre 2021. La version intégrale est disponible ici.
Annexe 4 : L’exemple du projet ALARM
Le projet ALARM54 avait pour objectif de développer une coopération transfrontalière opérationnelle entre les acteurs de la sécurité civile et de la frontière franco-belge à différents niveaux (analyse des risques, planification, gestion de crise) et sur un large éventail de risques. Il a donné priorité au concept « la sécurité n’a pas de frontières ».
La gestion intégrée des risques
Le projet a établi une gestion intégrée des risques naturels, technologiques et d’origine humaine des deux côtés de la frontière franco-belge. En pratique, la plateforme Geo-Alarm identifie les sites à risque et la nature de ces risques, ainsi que la zone géographique et la population
54- Le projet était inscrit dans le cadre du programme de coopération territoriale européenne Interreg V France-Wallonie-Vlaanderen. ALARM était financé à 50% par le Fonds européen de développement régional (FEDER) de l’Union européenne (2017-2020).
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qui pourrait être affectée et les ressources matérielles et humaines disponibles des deux côtés de la frontière (échelles mécaniques, moyens spécialisés en cas d’accident chimique, d’inondation, de glissements de terrain, d’accident ferroviaire…). Le projet ALARM a créé un registre actualisé des ressources médicales disponibles comprenant la liste des hôpitaux pouvant traiter les grands brûlés, les structures d’hébergement des personnes évacuées, les ambulances et autres véhicules de secours, etc. Les services concernés en Belgique et en France actualisent régulièrement cette plateforme pour que le niveau des risques et les ressources disponibles soient constamment à jour.
2) Planifier et mener des exercices de simulation communs
Une coopération opérationnelle en matière de sécurité civile nécessite l'organisation régulière d'exercices impliquant les autorités administratives concernées ainsi que les services opérationnels.
Un engagement régulier des moyens de secours belges et français, c'est-à-dire la capacité d'assistance mutuelle des secours en zone transfrontalière, et le développement d’une culture partenariale entre les services des deux pays.
S’il existe depuis 1981 des accords de coopération franco-belge permettant de se porter assistance mutuelle en cas de catastrophe et d’accident majeur, le projet ALARM a intégré la possibilité d’intervention sur les risques quotidiens en fonction de la disponibilité des secours.
Régulièrement, des équipes de SAMU / SMUR interviennent en appui à leurs collègues de l’autre côté de la frontière. Un poste de secours français peut être le plus proche et le plus apte à intervenir lors d’un accident survenant en Belgique, et inversement. Cette coopération quotidienne permet aux pompiers, ambulanciers et policiers de mieux se connaître, donc d’être complémentaires et d’agir efficacement.
Chaque intervention ayant conduit à une coopération transfrontalière fait l’objet d’une évaluation et d’un retour d’expérience qui permet d'adapter, de modifier ou de confirmer des modes d'intervention. De plus, les pompiers français et belges mènent régulièrement des exercices et entraînements conjoints.
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Le projet ALARM a ainsi contribué à l’élaboration d’un schéma transfrontalier d’analyse et de couverture des risques (STACR).
3) La sensibilisation des élus locaux et régionaux
Le projet ALARM a souligné la nécessité de sensibiliser les élus locaux et régionaux à leurs responsabilités civiles et pénales en matière de prévention des risques et de préparation de plans adaptés.
Rappeler le contexte juridique du rôle de l’élu local en matière de prévention et de gestion des crises
Agir en concertation avec les différents intervenants en cas de crise (pompiers, aide médicale d’urgence, police, armée, protection civile, secteur privé)
Mettre en évidence la nécessité d’une approche européenne
Souligner la place des citoyens en matière de prévention et de gestion des crises (Réserves de sécurité civile, volontariat citoyen, etc.).
537 maires français et 83 bourgmestres belges ont été sensibilisés à des degrés divers à la nécessité de coopérer, tout au long des 630 km de la frontière franco-belge.
Établir des protocoles de coopération
Les protocoles de coopération sont essentiels et doivent être établis dans le respect des compétences dévolues d’une part aux autorités stratégiques et d’autre part aux autorités opérationnelles.
Au niveau stratégique, les premières autorités seront les élus locaux, les maires qui ont la responsabilité d’assurer la sécurité des citoyens. En fonction de l’ampleur ou de la nature de certains événements, les autorités locales peuvent être amenées à solliciter des moyens humains et matériels qui dépendent d’un niveau de gouvernance supralocal, tel que les préfets en France ou les gouverneurs et ministres régionaux en Belgique. Il s’agit là de coordonner les efforts en respectant les prérogatives de chaque niveau de gouvernance et, c’est important, en parlant d’une même voix face aux médias. Les
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expériences européennes montrent que la mobilisation des moyens se fait graduellement, du niveau local au niveau supralocal (province, département, région) et ensuite au niveau national en cas de crise majeure, comme cela a été le cas pour la pandémie de Covid.
Le projet ALARM a également mis en évidence la nécessité d’agir au niveau international, et notamment au niveau transfrontalier vu les risques partagés et leurs conséquences sur les populations. Il existe déjà des mécanismes de coopération entre les différents membres de l’Union européenne. Ainsi, le Mécanisme de protection civile de l’UE vise au renforcement de la coopération en protection civile entre les États membres ainsi que six pays associés. Lorsqu’un pays est dépassé dans ses capacités de réponse par l’ampleur d’une catastrophe, il peut demander une assistance via le mécanisme. La Commission européenne contribue à au moins 75 % des frais de transport et/ou coûts opérationnels des missions de déploiement. En 20 ans, plus de 540 demandes d’assistance ont été faites par le biais de ce dispositif, dont une centaine pour la seule année 2020, notamment lors de l’explosion au port de Beyrouth (Liban) en août 2020 et lors d’inondations en Ukraine, au Niger et au Soudan. Par ailleurs, le Centre de coordination de la réaction d’urgence (ERCC) de l’UE est en contact permanent avec les autorités nationales de protection civile et assure le déploiement rapide de l’assistance. L’ERCC est en mesure d’agir lors d’une catastrophe qui survient hors de l’espace européen. Les protocoles de coopération sont essentiels et doivent être établis en fonction des compétences respectives des autorités stratégiques et opérationnelles.
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Des espaces publics sûrs et inclusifs
Des villes européennes partagent leur expérience
La gestion et la protection des espaces publics urbains sont une priorité pour les collectivités territoriales. Il s'agit aussi d'une attente importante des électeurs, étant donné le rôle prépondérant de ces espaces dans l’attractivité des villes, leur capacité à favoriser l’inclusion de tous les groupes de population et leur offre de culture, de loisirs et de commerce. Il n’est donc pas étonnant que la protection des espaces publics soit depuis longtemps un thème de travail du Forum européen pour la sécurité urbaine (Efus), réseau dédié à la sécurité urbaine qui réunit près de 250 villes de 16 pays européens.
Les vagues d’attentats terroristes contre les villes européennes depuis le milieu des années 2010 ont créé une onde de choc dans les collectivités qui se sont retrouvées confrontées à un défi complexe, celui de rendre leurs espaces publics plus sûrs sans pour autant les transformer en bunkers. Que peuvent faire les villes pour rendre leurs espaces publics plus sûrs, plus inclusifs et ouverts à tous ? Comment collaborer efficacement avec les autorités nationales, mais aussi les forces de police et tous les autres acteurs locaux concernés ? Comment prendre en compte les avancées de la technologie ? Comment mieux faire participer les citoyens et la société civile ?
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