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ART – Surréalisme : quand le temps transperce la toile
from JUNOD 4
La Persistance de la Mémoire, Salvador Dalí
La Persistance de la Mémoire ou Les montres molles, tableau célébrissime de Dalí, aborde les grandes thématiques du temps et de la mort. La scène représente la plage de Portlligat sur laquelle des montres à gousset sont en train de fondre. La rigidité du temps – opposée à la permanence de la mémoire – est ici tournée en dérision, tout en reflétant les angoisses du peintre devant l’écoulement du temps et l’approche inexorable de la mort.
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Surréalisme
QUAND LE TEMPS TRANSPERCE LA TOILE
Le poète surréaliste Robert Desnos se plaisait à dire: « Qu’il est temps enfin de s’occuper de l’éternité ». Inhérent au langage surréaliste, le paradoxe emplit cette formule, exprimant une temporalité singulière. Pour les surréalistes, le temps, en effet, n’a pas de fil, l’éternité se confondant avec le présent, le passé avec le futur. Les grands peintres du mouvement ont transcrit cette temporalité surréelle sur leur toile.
La Durée Poignardée, Renée Magritte
La Durée Poignardée constituerait une exploration du concept de l’énigme via la rencontre incongrue et poétique de deux objets. Peint selon une esthétique hyperréaliste avec des contrastes définis, le tableau met en scène une cheminée de marbre blanc d’où s’échappe une locomotive à vapeur. Sur la console sont posés deux chandeliers et une horloge se reflétant dans un large miroir. Plusieurs éléments entrent en jeu dans le tableau: le rapport entre les mots et les images, le rapport entre les mots du titre et les choses représentées, le rapport entre les choses peintes. Le temps court sans que le spectateur ne puisse lire l’heure. Magritte refuse ici de penser un temps mobile dans un espace uniforme, et homogénéise l’espace et le temps en les faisant s’interpénétrer.
Les archéologues, Giorgio De Chirico
La notion du temps qui passe est omniprésente dans la peinture de Giorgio De Chirico, peintre métaphysique dont l’œuvre suscite l’admiration des surréalistes. Les objets du passé (statues, bâtiments antiques) rencontrent ceux de la modernité (trains, gares, cheminées d’usine), dans un entremêlement entre différentes temporalités. Dans le cycle des Archéologues, De Chirico met en scène des mannequins – croisement entre des automates des XVIIIe et XIXe siècles, des mannequins en vitrine et des statuaires africaines – remplis d’objets anciens. Les archéologues, tout comme nombre des tableaux du peintre, reflètent une chronologie qui déraille : le temps s’évanouit dans une tension entre les « mouvements immobiles», figé dans l’attente d’un événement qui ne vient pas. Giorgio de Chirico interroge dans sa peinture les mystères du temps.
Le Temps n’a point de rives, Marc Chagall
Le Temps n’a point de rives est un des tableaux les plus emblématique de Marc Chagall. L’huile sur toile représente un poisson ailé volant devant une horloge mécanique et jouant du violon au dessus d’une rivière. Allégorie de la vie de l’artiste, le poisson s’envole à l’instar de Chagall qui réchappa durant sa vie à de nombreux dangers, son instinct l’ayant sauvé de pogroms en Empire russe, de la répression stalinienne et des camps de concentration nazis.
Le sablier des ans, Igor Morski
Le surréaliste polonais Igor Morski est passé maître dans l’art de croquer la société et d’en dégager les aspects les plus acides. Dans Les sabliers des ans, il met en évidence la relation de plus en plus conflictuelle que l’homme entretient avec le temps qui passe, en pointant notamment du doigt l’apologie du jeunisme et le refus de se voir vieillir. Il met ainsi en exergue le caractère immuable de la vieillesse quels que soient les stratagèmes mis en place pour retarder son échéance.