Plorer, Gemir, Crier... Hommage à la «voix d’or» de Johannes Ockeghem
diabolus in musica . antoine guerber
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Plorer, gemir, crier... Un Requiem pour la « voix d’or » de Johannes Ockeghem († 1497) Johannes Ockeghem meurt à Tours le 6 février 1497. Très âgé, peut-être octogénaire, il jouit d’une réputation de chantre et de compositeur de génie dans toute l’Europe. Mais c’est également une haute figure de la vie religieuse et sociale de Tours, ville royale, qui disparaît. Ockeghem est entré à la chapelle royale 46 ans auparavant en 1451. Il en deviendra rapidement le premier chapelain et à sa mort, il a servi pas moins de trois rois qui tous l’ont confirmé dans ses importantes fonctions 1. Il est également, depuis fin 1458 ou début 1459, trèsorier de la collégiale Saint-Martin de Tours, cette puissante seigneurie ecclésiastique dont l’abbé laïc est le roi de France lui-même, qui peut ainsi récompenser son premier chapelain en lui octroyant la très lucrative charge de trésorier.
Photo : Benjamin Dubuis.
Ockeghem est donc une des principales personnalités de la « bonne ville » de Tours et si les historiens ont longtemps souligné sa réputation de « bon père », exemplaire, débonnaire, plein de vertus, etc. il est intéressant de noter que l’étude des archives de la ville et de la basilique laisse entrevoir un tout autre portrait : celui d’un homme jaloux de ses prérogatives, défendant constamment ses propres intérêts financiers, se montrant procédurier devant le chapitre de la Collégiale ou même devant le roi à qui il doit pourtant toutes ses charges.
Diabolus in Musica
Nous ne connaîtrons jamais plus précisément la psychologie de notre trésorier et c’est évidemment le « musico eccellentissimo » que les poètes et musiciens vont louer après sa mort. De par sa longévité, de par la puissance de son œuvre qui permet de tracer le lent cheminement qui mène du Moyen Âge finissant aux premiers feux de la Renaissance, Ockeghem occupe une position singulière et fondamentale. Cette place éminente est déjà perçue de son vivant comme centrale au sein de cette sorte de caste internationale des chantres-compositeurs de haut niveau en cette fin de siècle. Tous ces musiciens, dont certains de tout premier plan et dont on commence à peine à reconnaître l’immense valeur, semblent se respecter et s’apprécier. Les œuvres circulent et celles d’Ockeghem sont manifestement beaucoup admirées et commentées par tous ses collègues. Le jeune poète Guillaume Crétin le traduit bien dans sa « Déploration sur le trespas de feu Ockeghem, trésorier de Sainct Martin de Tours ». Il voit en songe tous les grands compositeurs du passé se rassembler pour chanter les œuvres du défunt 2 : Du Fay, Busnoys, Fede, Binchois, Barbingant, Dunstable, Pasquin, Lannoy, Barbizon, Copin, Regis, Joye et Constant. Cette accumulation est en soi bien révélatrice d’une impressionnante réputation. Plus loin, Crétin convoque les plus grands musiciens vivants afin qu’ils pleurent ce « notable seigneur, en visitant ses doulx chants angélicques ». Il appelle ainsi Agricola, Verbonnet, Prioris, Josquin Desprez, Gaspar, Brumel, Compère, Prevost, Verjust, Prospère et Fresneau. On ne voit guère que le grand Obrecht qui ait été oublié. Il interpelle également au passage les plus célèbres poètes de son temps,
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Chastellain, Chartier et Molinet, leur demandant avec insistance d’écrire les louanges du grand homme. Après une telle harangue, plusieurs parmi ces artistes, et non des moindres, relevèrent le gant : Josquin Desprez, sur un texte de Molinet écrit le célèbre Nymphes des Bois / Requiem, en forme de motet-chanson, qui est certainement une allusion à une autre déploration antérieure, celle d’Ockeghem pleurant la mort de Binchois en 1460 (Mort tu as navre / Miserere) Pierre de La Rue écrit le plus modeste Plorer, gemir, crier / Requiem sous cette même forme de motetchanson, genre représentant probablement une sorte d’hommage privé qui laisse une grande place aux émotions personnelles, davantage que le Requiem, expression publique et officielle du deuil. Un certain Lupus, musicien qui connaît au début du XVIe siècle quelque succès mais dont on sait très peu de choses, écrit le motet Ergone conticuit, plus conventionnel, sans doute plus de vingt ans après la mort d’Ockeghem, sur un poème de louanges d’Erasme. Le grand Jacob Obrecht, extraordinaire musicen flamand, écrit, lui, une messe entière qui semble un hommage majestueux à son aîné. Mais si Barton Hudson a d’abord émis l’hypothèse que la Missa Sicut spina rosam, basée sur la seconde section du grand répons marial Ad nutum domini fut écrite en guise d’hommage post mortem en 1497-1498, il semble plus rationnel de suivre Rob Wegman qui dans une brillante analyse stylistique situe la composition de cette messe beaucoup plus tôt,
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dans les années 1480, au moment où le jeune Obrecht ne s’est pas encore détaché de l’influence de ses deux importants devanciers Busnoys et Ockeghem 3. Quoi qu’il en soit, Obrecht a clairement à l’esprit la magnifique Missa Mi-mi, œuvre emblématique, sorte de signature d’Ockeghem, quand il écrit son cycle Sicut spina rosam. La voix de basse du Kyrie de la Missa Mi-mi est ainsi entièrement intégrée à la Missa Sicut spina rosam par Obrecht et lui sert même de deuxième cantus firmus dans l’Agnus Dei. Les circulations de répertoires, les emprunts de matériaux mélodiques, les allusions, parodies, reprises partielles, etc. sont une caractéristique majeure de cette fin de XVe siècle et deviennent fréquemment des jeux intellectuels, voire des défis de composition. Obrecht « s’amuse » ainsi à intégrer également dans sa messe la voix supérieure du célèbre motet d’Ockeghem Intemerata Dei Mater, œuvre qui a probablement beaucoup impressionné et contribué à bâtir sa réputation. Enfin, le fantasque Busnoys écrit, avant 1467, le motet In hydraulis, un spectaculaire hommage poético-musical à son aîné, bien représentatif de la virtuosité rythmique et mélodique de son auteur, à une époque durant laquelle les deux hommes ont travaillé et chanté ensemble à Saint-Martin de Tours. Rassembler ces différentes œuvres nous permet ainsi de suivre les déchirants conseils de Guillaume Crétin :
Musiciens, pensez de lamenter; Dueil angoisseux debvez en l’ame anter, Et vous monstrer par tristesse remis, Quant vous voyez celluy a terre mys Qui de vostre art a sceu parlamenter. ... Chantres, plorez ce notable seigneur, En visitant ses doulx chantz angelicques...
(Musiciens, prenez soin de vous lamenter, Vous devez ressentir en vous-mêmes un deul angoissant Et vous montrer accablés de tristesse Quand vous voyez abattu Celui qui a si bien représenté votre art. ... Chantres , pleurez cette remarquable personnalité En chantant ses doux chants angéliques...)
1 Charles VII, Louis XI et Charles VIII. A quelques mois près, il aurait pû servir en plus Louis XII qui monte sur le trône en avril 1498. 2 La Missa Mi-mi de Ockeghem est citée par Crétin comme devant être chantée par ces musiciens prestigieux. 3
Rob Wegman émet la séduisante hypothèse d’une composition de cette messe à l’occasion de l’installation d’Obrecht comme maître des enfants de la cathédrale de Cambrai en septembre 1484, au moment de la fête de la Nativité de la Vierge. La Missa Sicut spina rosam est en effet basée sur une partie du répons Ad nutum domini pour les Matines de ce jour.
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Antoine Busnoys (vers 1430 – 1492) Prolifique et très important compositeur, considéré comme l’égal d’Ockeghem au XVe siècle mais que la postérité a moins favorisé. Il travaille quelques années à Tours sous la direction de ce grand maître et y est excommunié en 1461 pour avoir battu un prêtre jusqu’au sang et célébré la messe malgré l’interdiction qu’on lui avait signifiée. Le tempérament manifeste de Busnoys se retrouve dans son œuvre musicale énergique, flamboyante et démonstrative. Guillaume Cretin (vers 1460 – 1525, Paris) Poète et chantre, trésorier de la Sainte Chapelle de Vincennes puis chanoine de la Sainte Chapelle de Paris. Auteur de poésies morales ou religieuses très appréciées, Crétin nous apprend beaucoup sur les milieux littéraires du début du XVIe siècle dont il est un membre éminent, cité par Marot et Rabelais.
Josquin Desprez (vers 1450 ou 1455, près de Saint-Quentin – 1521, Condé sur Escaut) Musicien majeur de notre histoire de la musique, qui sera un modèle pour tout le XVIe siècle européen. Au cours d’une carrière exemplaire dans les grandes chapelles françaises et italiennes, il écrit une œuvre immense. Ses messes et motets représentent une sorte d’apogée de l’art franco-flamand unanimement admirée. Didier Erasme (vers 1469, Rotterdam – 1536, Bâle) Théologien et philosophe de la tolérance et de l’humanisme chrétien. La recherche du bien commun et de la paix guident toute sa vie, par l’union de la sagesse antique et du savoir moderne.
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Pierre de La Rue (vers 1452, Tournai – 1518, Courtrai)
Johannes Ockeghem (vers 1420 ?, près de
Diabolus in Musica / Antoine Guerber
Chantre aux cours de Philippe le Beau puis de Marguerite d’Autriche, il est un des rares compositeurs de son temps à n’avoir pas pris le chemin de l’Italie. Son œuvre prolifique lui assure la seconde place auprès de Josquin dans l’histoire. Il enrichit la sonorité de la polyphonie du début du XVIe siècle par un certain nombre d’innovations audacieuses (première messe à six voix, première messe canonique, premier cycle de Magnificat, etc.).
Mons – 1497, Tours). Compositeur majeur assurant la transition entre Moyen Âge et Renaissance par une œuvre riche et puissante. Jouissant d’une grande notoriété de son vivant, maître de la chapelle de trois rois successifs, trésorier de Saint-Martin de Tours pendant plusieurs décades, Ockeghem termine sa longue vie riche et admiré par les jeunes générations de musiciens qu’il a profondément influencées.
Depuis 1992, une petite et fidèle équipe de musiciens passionnés recrée, autour d’Antoine Guerber, les musiques extraordinaires de cette époque si éloignée, intriguante, fascinante, qui a forgé notre culture, notre langue, notre société : le Moyen Âge. Concerts et disques se succèdent avec aujourd’hui une reconnaissance internationale. Désormais, l’ensemble s’attache à s’ouvrir aux autres arts et disciplines afin de renouveler l’approche de ce merveilleux patrimoine musical tout en gardant la plus grande fidélité au travail musicologique qui le guide. L’ensemble se consacre à l’étude et l’interprétation de toutes les musiques médiévales, du plain-chant jusqu’aux grandes polyphonies du XVe siècle, avec une prédilection marquée pour les XIIe et XIIIe siècles français. A raison de deux à trois créations annuelles, l’ensemble s’est constitué un vaste répertoire de programmes sacrés et profanes, abordant tous les styles existants, du VIe au XVe siècle. A la pointe de la recherche musicologique et historique, Diabolus in Musica travaille directement sur les sources manuscrites et privilégie les répertoires et les œuvres inédits. Ses programmes abordent toujours le Moyen Âge de façon originale et créative, en replaçant les musiques dans leur contexte historique et esthétique et en cherchant à cerner au plus près la mentalité et la sensibilité médiévales. Nos répertoires demeurent encore très méconnus et ne sont redécouverts que depuis peu de temps. C’est pourquoi le souci pédagogique qui nous anime est constant, envers les jeunes, les publics non avertis comme auprès des grands mélomanes : interventions en milieu scolaire comme
Johannes Lupus (actif vers 1518-1530) On ne possède que très peu d’éléments biographiques de ce compositeur dont les œuvres ont pourtant connu un certain succès comme en témoignent les nombreuses sources manuscrites ou imprimées en France et en Italie comportant ses motets. Jean Molinet (1435, Desvres – 1507, Valenciennes) Chroniqueur et poète le plus célèbre de la fin du XVe siècle, sa réputation s’est d’abord forgée à la cour du duc de Bourgogne Philippe le Bon. Jacob Obrecht (vers 1457-58, Gand – 1505, Ferrara) Avec La Rue et Brumel (sans oublier Agricola et Isaac, absents sur cet enregistrement), Obrecht initie les grands changements stylistiques entre Moyen Âge et Renaissance, notamment dans son impressionante production de messes tout au long de sa vie. S’il est porté aux nues par ses collègues musiciens, sa carrière dans les cours et chapelles françaises et italiennes n’est pas aussi justement récompensée.
Antoine Guerber
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en colloques scientifiques, conférences, introductions brèves, textes introductifs replaçant les musiques dans leur contexte sont très appréciés et nous paraissent indispensables. Sortant de la forme traditionnelle du concert, l’ensemble propose également des spectacles innovants faisant intervenir comédiens, jongleurs, mise en espace et projections d’images assistées par ordinateur, la technologie la plus moderne se mettant ainsi au service des somptueuses iconographies médiévales ou des créations de vidéastes. Enfin, les collaborations artistiques se multiplient associant nos répertoires à la musique orientale, à l’univers du conte, au répertoire des chœurs, des maîtrises d’enfants... Diabolus in Musica est l’invité des plus grands festivals, en France (Ambronay, Saintes, Royaumont, Fontevraud, Cité de la Musique) comme à l’étranger (Europe, Etats-Unis et Amérique du Sud), et enregistre désormais pour æon. Sa discographie s’est très largement distinguée par de nombreuses récompenses (Diapason d’Or de l’année 1999 et 2004, Choc du Monde de la Musique, ffff de Télérama, 10 de Répertoire, 5* de Classica, 5* de Goldberg…). La critique met particulièrement en relief la forte personnalité de ses interprétations novatrices. L’ensemble Diabolus in Musica est porté par la Région Centre, son principal financeur. Diabolus in Musica est aidé par le Ministère de la Culture et de la Communication / direction générale des affaires culturelles du Centre, au titre de l’aide aux ensembles conventionnés. Diabolus in Musica est soutenu par le Conseil Général d’Indre-et-Loire et la Ville de Tours.
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Plorer, gemir, crier... A Requiem for the ‘golden voice’ of Johannes Ockeghem (+1497) Johannes Ockeghem died at Tours on 6 February 1497. Very old by that time, perhaps in his eighties, he enjoyed a Europe-wide reputation as a singer and a composer of genius. But with him died, too, a leading figure of the ecclesiastical and social life of the royal city of Tours. Ockeghem had entered the royal chapel forty-six years earlier, in 1451. By the following year he was already its senior chaplain (premier chapelain), and by the time of his death he had served no fewer than three kings, all of whom confirmed him in his important functions. 1 He was also, from late 1458 or early 1459, treasurer of the collegiate church of St Martin de Tours, that powerful ecclesiastical lordship whose secular abbot was the King of France himself; the sovereign was thus able to reward his first chaplain by granting him this highly lucrative post. Ockeghem, then, was one of the principal personages of the ‘good city’ of Tours. Although historians have long underlined his reputation as a ‘bon père’, exemplary, good-natured, abounding in virtues, it is interesting to note that examination of the archives of the city and the basilica gives us a glimpse of a quite different picture: that of a man jealous of his prerogatives, constantly defending his own financial interests and displaying a litigious bent towards the collegiate chapter and even the king, to whom he owed all his preferments.
We will never be able to gain a more precise idea of the psychology of our treasurer, and of course it was the ‘musico eccellentissimo’ that was extolled by the poets and musicians after his death. By virtue of his longevity and his compelling œuvre, which enables one to trace the slow transition from the late Middle Ages to the dawn of the Renaissance, Ockeghem occupies a unique and fundamental position. Already during his lifetime he was seen as a central figure within the international ‘caste’ of leading singer-composers of the late fifteenth century. All these musicians, some of them belonging to the very front rank and whose immense worth is only beginning to be recognised today, seem to have respected and admired one another. Their works circulated widely, and those of Ockeghem were clearly much appreciated and commented on by all his colleagues. The young poet Guillaume Crétin depicts this environment very well in his Déploration sur le trespas de feu Ockeghem, trésorier de Sainct Martin de Tours (Lament on the death of the late Ockeghem, treasurer of St Martin de Tours). He dreams that he sees all the great composers of the past assembling to praise the dead man’s works: Du Fay, Busnoys, Fede, Binchois, Barbingant, Dunstable, Pasquin, Lannoy, Barbizon, Copin, Regis, Joye, and Constant. 2 Such an accumulation of celebrities in itself testifies to an impressive reputation. Later on, Crétin summons the finest living musicians to ‘weep for that illustrious lord / As you study his sweet angelic songs’. He summons Agricola, Verbonnet, Prioris, Josquin Desprez, Gaspar, Brumel, Compère, Prevost,
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Verjust, Prospère, and Fresneau. Only the illustrious Obrecht appears to have been forgotten. Crétin also calls on the most famous poets of his time, Chastellain, Chartier and Molinet, insisting they should write the great man’s praises. After such a thorough haranguing, several of the artists named took up the challenge, and not the least among them. Josquin Desprez, setting a text by Molinet, wrote the celebrated Nymphes des bois/Requiem in the form of a motet-chanson – certainly an allusion to an earlier déploration by Ockeghem himself commemorating the death of Binchois in 1460 (Mort tu as navré/Miserere). Pierre de La Rue composed the more modest Plorer, gemir, crier/Requiem, again in the motet-chanson form: the genre probably represented a sort of private homage that offered considerable scope for personal emotions, more so than the Requiem, the public and official expression of mourning. A certain Lupus, a composer who enjoyed a degree of success in the early sixteenth century but of whom we know very little, probably wrote the more conventional motet Ergone canticuit more than twenty years after Ockeghem’s death; its text is a eulogy by Erasmus. The great Jacob Obrecht, that extraordinary Flemish composer, wrote a whole mass which appears to be a majestic tribute to his elder. But although Barton Hudson initially put forward the hypothesis that the Missa ‘Sicut spina rosam’, based on the second section of the great Marian responsory Ad nutum domini, was written as a posthumous homage in 1497-8, it would seem more rational to follow the view of Rob Wegman, who, in a
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brilliant stylistic analysis, dates the composition much earlier, to the 1480s, at a time when the young Obrecht had not yet detached himself from the influence of his two important predecessors Busnoys and Ockeghem. 3 Whatever the truth may be, Obrecht clearly had the magnificent Missa ‘Mimi’, an emblematic work that may be seen as a signature of Ockeghem, in his mind when he wrote his Sicut spina rosam cycle. The bass line of the Kyrie from the Missa ‘Mi-mi’ is wholly incorporated into Obrecht’s Missa ‘Sicut spina rosam’ and even serves as a second cantus firmus in the Agnus Dei. Circulation of repertory, borrowings and partial reuse of melodic material, allusions, parodies and so on are a major characteristic of the late fifteenth century, frequently leading to intellectual games and compositional challenges. Thus Obrecht also ‘amuses himself’ by integrating in his mass the top line of Ockeghem’s celebrated motet Intemerata Dei Mater, a work that had probably created a strong impression and helped to build the latter’s reputation. Finally, some time before 1467 the capricious Busnoys wrote his motet In hydraulis. This spectacular poetic and musical tribute to his elder is entirely typical of the rhythmic and melodic virtuosity of its composer at the time when the two men worked and sang together at St Martin de Tours. To bring these different works together is in a sense to follow the touching counsel of Guillaume Crétin:
Musiciens, pensez de lamenter; Dueil angoisseux debvez en l’ame anter, Et vous monstrer par tristesse remis, Quant vous voyez celluy a terre mys Qui de vostre art a sceu parlamenter. ... Chantres, plorez ce notable seigneur, En visitant ses doulx chantz angelicques . . . (Musicians, be sure to lament: You must pin sorrowful mourning to your souls And show yourselves overwhelmed by grief When you see laid in earth that man Who spoke so well for your art. ... Singers, weep for that illustrious lord As you study his sweet angelic songs . . .)
1 Charles VII, Louis XI, and Charles VIII. Had he lived a few months longer, he might also have served Louis XII, who came to the throne in April 1498. 2 Crétin mentions that these prestigious musicians were to sing Ockeghem’s Missa ‘Mi-mi’. 3
Rob Wegman puts forward the attractive hypothesis that this mass may have been composed on the occasion of Obrecht’s taking office as Master of the Choirboys at Cambrai Cathedral in September 1484, at the feast of the Nativity of the Virgin. The Missa ‘Sicut spina rosam’ is based on part of the responsory Ad nutum Domini, which belongs to Matins of that feast.
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Antoine Busnoys (c.1430 – 1492) Prolific and very important composer, regarded as Ockeghem’s equal in the fifteenth century but less favoured by posterity. He worked for some years in Tours under Ockeghem’s direction; he was excommunicated there in 1461 for beating a priest ‘to the point of bloodshed’ and then celebrating Mass while under anathema. Busnoys’s obviously hot-blooded temperament appears in his musical output, which is energetic, flamboyant and demonstrative. Guillaume Cretin (c.1460 – Paris, 1525) Poet and singer, treasurer of the Sainte Chapelle in Vincennes, then canon of the Sainte Chapelle in Paris. The author of admired moral and religious poetry, Crétin is an excellent source of information on the literary milieux of the early sixteenth century of which he was himself an eminent member; he is mentioned by both Marot and Rabelais.
Josquin Desprez (near Saint-Quentin, c.1450 or 1455 – Condé-sur-Escaut, 1521) A major figure in the history of music who was to be a model for the whole of sixteenth-century Europe. In the course of an exemplary career in the leading chapels of France and Italy, he produced an immense œuvre. His masses and motets represent a universally admired peak of the Franco-Flemish style. Desiderius Erasmus (Rotterdam, c.1469 – Basel, 1536) Theologian and philosopher of tolerance and Christian humanism. His whole life was guided by the quest for peace and the common good through the union of ancient wisdom and modern knowledge. 12
Pierre de La Rue (Tournai, c.1452 – Courtrai, 1518) A singer at the courts of Philip the Handsome of Burgundy, then Margaret of Austria, he was one of the rare composers of his time who never worked in Italy. His prolific output has gained him second place after Josquin in the history of the period. He enriched the sonority of early sixteenth-century polyphony with a number of bold innovations, including the first mass for six voices, the first canonic mass, and the first Magnificat cycle. Johannes Lupus (active c.1518-30) We possess very few biographical elements for this composer. However, his works enjoyed a certain success, as is shown by the numerous manuscript or printed sources in France and Italy that include motets by him. Jean Molinet (Desvres, 1435 – Valenciennes, 1507) The most famous chronicler and poet of the late fifteenth century. He first made his name at the court of the Duke of Burgundy Philip the Good. Jacob Obrecht (Ghent, c.1457-8 – Ferrara, 1505) With La Rue and Brumel (and not forgetting Agricola and Isaac, absent from this recording), Obrecht inaugurated the great stylistic changes between the Middle Ages and the Renaissance, notably with an impressive production of masses throughout his life. Though praised to the skies by his fellow musicians, he did not enjoy the career he deserved in the courts and chapels of France and Italy.
Johannes Ockeghem (near Mons, c.1420 (?) – Tours, 1497) A major composer whose rich and powerful body of work effected the transition between the Middle Ages and the Renaissance. He enjoyed a very high reputation in his lifetime and was premier chapelain to three French kings in succession and treasurer of St Martin de Tours for several decades. Ockeghem ended his long life a wealthy man, admired by the younger generations of musicians, whom he profoundly influenced.
Diabolus in Musica / Antoine Guerber Since 1992, Diabolus in Musica has devoted itself to the study and interpretation of the full range of medieval music, from plainchant to the great polyphonic composers of the fifteenth century, with a particular predilection for twelfth- and thirteenthcentury France. At the cutting edge of musical and historical research, the ensemble works directly from manuscript sources and focuses on unpublished works and repertories. Its programmes always approach the Middle Ages in an original way, setting the music in its historical, artistic and social context, thanks to in-depth research on medieval mentalities and sensibilities. In recent years, the ensemble has also presented an innovative approach to concert performance, involving actors, jugglers, semi-staging, projection of computer-aided images, and collaborations with other groups specialising in oriental music, storytellers, and children’s and adult choirs. Diabolus in Musica appears as a guest at the
most prestigious festivals and venues in France (Ambronay, Saintes, Royaumont, Fontevraud, Cité de la Musique) and abroad (Netherland, Germany, Belgium, Italy, Spain, Scandinavia, and South America). After a series of recordings with Alpha Productions, it now appears on the Aeon label. Its discography has won many awards and distinctions, including Diapason d’Or of the year in 1999 and 2004. The press has singled out for mention the powerful personality of its innovative interpretations. Antoine Guerber has directed Diabolus in Musica since 1992. He discovered medieval music more than thirty years ago through recordings and the radio. This new interest gave birth to his passion for this repertoire and for the Middle Ages. He studied at the Centre de Musique Médiévale de Paris and in the Early Music Department of the Conservatoire National Supérieur de Musique de Lyon. After a few years spent working with such French groups as the Ensemble Gilles Binchois, Ensemble Organum, and Ensemble Jacques Moderne, he settled in the Loire Valley to dedicate himself to his own group. Today he divides his time between training professional singers (Fondation Royaumont and Maîtrise de Notre-Dame de Paris) and rediscovering unpublished repertories, combining research in the fields of medieval musicology, art history, and sociology. Antoine Guerber Translation: Charles Johnston
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Plorer, gemir, crier... Pierre de La Rue 1
Plorer, Gemir, crier et braire / Requiem
Pierre de La Rue 1
Plorer, Gemir, crier et braire / Requiem
Pierre de La Rue 1
Plorer, Gemir, crier et braire / Requiem
Plorer, gemir, crier et braire Me commant en grant desplaisir Quant la mort (le père exemplaire Ockeghem huy fait trespasser Requiescat in pace)*.
Il me faut pleurer, gémir, crier et hurler En grand déplaisir Quand la mort (aujourd’hui vient faucher Ockeghem, le père exemplaire ; Qu’il repose en paix)*.
To lament, to moan, to shout and wail Great grief commands me, When Death (comes today to cut down Ockeghem, that exemplary father: May he rest in peace)*.
Requiem eternam, dona eis Domine
Donne-leur le repos éternel, Seigneur
Grant them eternal rest, O Lord.
* texte manquant, reconstitué par Antoine Guerber.
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Jacob Obrecht
Jacob Obrecht
Missa Sicut Rosa Spinam
Missa Sicut Rosa Spinam
Kyrie
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Kyrie eleison, Kyrie eleison, Kyrie eleison; Christe eleison, Christe eleison, Christe eleison; Kyrie eleison, Kyrie eleison, Kyrie eleison. 3
Gloria Gloria in excelsis Deo Et in terra pax hominibus Bone voluntatis. Laudamus te, benedicimus te, Adoramus te, glorificamus te, Gratias agimus tibi Propter magnam gloriam tuam, Domine Deus, rex celestis Deus Pater omnipotens. Domine Fili unigenite Jesu Christe,
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Kyrie
* missing text reconstructed by Antoine Guerber
Jacob Obrecht Missa Sicut Rosa Spinam 2
Seigneur, prends pitié O Christ prends pitié, Seigneur, prends pitié ! 3
Gloria Gloire à Dieu, dans les cieux ! Et paix sur la terre Aux hommes de bonne volonté ! Nous te louons, nous te bénissons, Nous t’adorons, nous te glorifions, Nous te rendons grâce Pour ta grande gloire. Seigneur Dieu, Roi du ciel, Dieu Père tout-puissant, Seigneur Fils unique, Jésus Christ,
Kyrie Lord, have mercy; Christ, have mercy; Lord, have mercy.
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Gloria Glory be to God on high, And on earth peace To men of good will. We praise thee, we bless thee, We worship thee, we glorify thee, We give thanks to thee For thy great glory, O Lord God, heavenly King, God the Father Almighty. O Lord, the only-begotten Son, Jesus Christ;
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Domine Deus Agnus Dei Filius Patris, Qui tollis peccata mundi, Miserere nobis, Qui tollis peccata mundi, Suscipe deprecationem nostram, Qui sedes ad dexteram Patris, Miserere nobis. Quoniam tu solus sanctus, Tu solus Dominus, Tu solus altissimus Jesu Christe Cum Sancto Spiritu In gloria Dei Patris. Amen. 4
Credo Credo in unum Deum Patrem omnipotentem Factorem caeli et terrae, Visibilium omnium Et invisibilium, Et in unum Dominum Jesum Christum Filium Dei unigenitum, Et ex Patre natum Ante omnia saecula. Deum de Deo, lumen de lumine Deum verum de Deo vero. Genitum non factum, Consubstantialem Patri, Per quem omnia facta sunt. Qui propter nos homines, Et propter nostram salutem Descendit de caelis. Et incarnatus est de Spiritu Sancto Ex Maria Virgine,
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Seigneur Dieu, Agneau de Dieu, Fils du Père, Toi qui enlèves les péchés du monde, Prends pitié de nous. Toi qui enlèves les péchés du monde, Accueille notre prière, Toi qui es assis à la droite du Père, Prends pitié de nous. Car toi seul es saint, Toi seul Seigneur, Toi seul Très-Haut, Jésus Christ, Avec l’Esprit saint Dans la gloire de Dieu le Père, Amen. 4
Credo Je crois en un seul Dieu Père tout-puissant, Qui a fait le ciel et la terre, Tout ce qui est visible Et invisible, Et en un seul Seigneur, Jésus Christ Fils unique de Dieu, Et qui est né du Père, Avant le commencement de tous les siècles, Dieu issu de Dieu, lumière née de la lumière, Vrai Dieu issu du vrai Dieu, Engendré et non pas créé, De même nature que le Père, Par qui tout a été fait. Pour nous les hommes, Et pour notre salut, Il est descendu des cieux, Et il s’incarna, par l’Esprit saint, En la Vierge Marie,
O Lord God, Lamb of God, Son of the Father, That takest away the sins of the world, Have mercy upon us. Thou that takest away the sins of the world, Have mercy upon us. Thou that takest away the sins of the world, Receive our prayer. For thou only art holy; Thou only art the Lord; Thou only art most high, Jesus Christ, With the Holy Spirit, In the glory of God the Father. Amen. 4
Credo I believe in one God, The Father Almighty, Maker of heaven and earth, And of all things visible And invisible: And in one Lord Jesus Christ, The only-begotten Son of God, Begotten of his Father Before all worlds, God of God, Light of Light, Very God of very God, Begotten, not made, Being of one substance with the Father, By whom all things were made; Who for us men, And for our salvation Came down from heaven, And was incarnate by the Holy Spirit Of the Virgin Mary,
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Et homo factus est. Crucifixus etiam pro nobis Sub Pontio Pilato Passus et sepultus est. Et resurrexit tertia die Secundum scripturas. Et ascendit in caelum, Sedet ad dexteram Patris. Et iterum venturus est cum gloria Judicare vivos et mortuos, Cujus regni non erit finis. Et in Spiritum Sanctum, Dominum et vivificantem, Qui ex Patre Filioque procedit. Qui cum Patre et Filio Simul adoratur et conglorificatur, Qui locutus est per prophetas. Et in unam sanctam catholicam Et apostolicam ecclesiam Confiteor unum baptisma In remissionem peccatorum. Et exspecto resurrectionem mortuorum. Et vitam venturi saeculi. Amen. 5
Sanctus Sanctus, sanctus, sanctus, Dominus Deus sabaoth, Pleni sunt celi et terra gloria tua. Hosanna in excelsis. Benedictus qui venit in nomine Domini. Hosanna in excelsis.
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Et il s’est fait homme. Il fut crucifié également pour nous Sous Ponce Pilate, Souffrit et fut enseveli, Et il ressuscita le troisième jour, Comme l’avaient prédits les Ecritures. Et il monta au ciel, Il est assis à la droite du Père. Et il doit revenir dans la gloire Pour juger les vivants et les morts, Et son règne n’aura pas de fin. Je crois en l’Esprit saint, Seigneur et qui donne la vie, Qui vient du Père et du Fils, Qui avec le Père et le Fils Est également adoré et glorifié, Qui a parlé par les prophètes. Je crois en une sainte Eglise catholique Et apostolique, Je reconnais un seul baptême Pour le pardon des péchés, Et j’attends la résurrection des morts Et la vie du monde à venir, Amen. 5
Sanctus Saint, saint, saint est le Seigneur, Seigneur Dieu des armées, Les cieux et la terre sont pleins de ta gloire, Hosanna au plus haut des cieux, Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Hosanna au plus haut des cieux !
And was made man. And was crucified also for us Under Pontius Pilate. He suffered and was buried, And the third day he rose again According to the Scriptures. And ascended into heaven, And sitteth on the right hand of the Father. And he shall come again with glory To judge both the quick and the dead: Whose kingdom shall have no end. And I believe in the Holy Spirit, The Lord and giver of life, Who proceedeth from the Father and the Son, Who with the Father and the Son together Is worshipped and glorified, Who spake by the prophets. And I believe in one catholic And apostolic Church. I acknowledge one baptism For the remission of sins. And I look for the resurrection of the dead, And the life of the world to come. Amen. 5
Sanctus Holy, holy, holy, Lord God of Hosts, Heaven and earth are full of thy glory. Hosanna in the highest. Blessed is he that cometh in the name of the Lord. Hosanna in the highest.
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6
Agnus Dei
6
Agnus Dei qui tollis peccata mundi, miserere nobis. Agnus Dei qui tollis peccata mundi, miserere nobis. Agnus Dei qui tollis peccata mundi, dona nobis pacem.
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Josquin Desprez Nymphes des bois / Requiem
Agnus Dei
6
Agneau de Dieu, qui enlèves les péchés du monde, prends pitié de nous. Agneau de Dieu, qui enlèves les péchés du monde, prends pitié de nous. Agneau de Dieu, qui enlèves les péchés du monde, donne-nous la paix.
7
Josquin Desprez Nymphes des bois / Requiem
Agnus Dei Lamb of God that takest away the sins of the world, have mercy upon us. Lamb of God that takest away the sins of the world, have mercy upon us. Lamb of God that takest away the sins of the world, grant us peace.
7
Josquin Desprez Nymphes des bois / Requiem
Nymphes des boys, déesses des fontaines, Chantres expers de toutes nations, Changés voz vois fort clères et haultaines En cris trenchans et lamentations.
Nymphes des bois, déesses des fontaines, Chantres experts de toutes les nations, Changez vos voix fort claires et aigües En cris tranchants et lamentations.
Nymphs of the woods, goddesses of the fountains, Skilled singers of all nations, Turn your clear, loud voices To piercing cries and lamentations.
Car Atropos, très terrible satrappe, A vostre Ockeghem attrapé en sa trappe, Vray trésorier de musique et chief d’oeuvre, Dot, élégant de corps et non point trappe, Grant dommaige est que la terre le coeuvre.
Car Atropos, très terrible satrape A attrapé votre Ockeghem en sa trappe, Le vrai trésorier de musique et chef d’œuvre Docte, élégant de corps et non pas trapu, C’est un grand dommage que la terre le recouvre.
For Atropos, that dread tyrant, Has caught your Ockeghem in her trap; True treasurer of music and masterpiece, Learned, elegantly proportioned, and not at all thick-set. It is a great loss that the earth now covers him.
Acoustrés vous d’habis de doeul Josquin, Perchon, Brumel, Compère, Et plourés grosses larmes d’oeil, Perdu avés vostre bon père. Resquiescat in pace, Amen.
Revêtez des habits de deuil, Josquin, Pierre de La Rue, Brumel, Compère, Et pleurez de grosses larmes de vos yeux : Vous avez perdu votre bon père. Qu’il repose en paix, amen.
Don mourning attire, Josquin, Pierre de La Rue, Brumel, Compère, And weep great tears from your eyes: You have lost your good father. May he rest in peace. Amen.
Teneur
Teneur
Tenor
Requiem eternam dona eis domine et lux perpetua luceat eis.
Donne-leur le repos éternel, Seigneur, et fais resplendir pour eux une lumière éternelle.
Eternal rest grant unto them, O Lord, and let perpetual light shine upon them.
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Antoine Busnoys 8
In hydraulis
Antoine Busnoys 8
In hydraulis
Autrefois, Pythagore, admirant les mélodies des orgues hydrauliques et les sons des marteaux frappant le métal, grâce aux inégalités de leur poids, découvrit les natures des Muses.
Once, as Pythagoras marvelled at The melodies of water organs and the tonalities Of hammers, having contemplated the surfaces According to their unequal weights, He discovered the inherent properties of music.
Epitritum ac hemioliam Epogdoi et duplam perducunt Nam tessaron pente concordiam Nec non phtongum et pason adducunt Monocordi dum genus conducunt.
Epitrite et hémiole, épode et double produisent les consonances de quarte et de quinte, le ton et l’octave, comme les propriétés du monocorde le démontrent.
These produce epitrite and hemiola, Epogdous and duple, for they lead To the harmony of the fourth and fifth, And also to the tone and the octave, While bringing together the species of the monochord.
Hec Okeghem qui cunctis precinis Galliarum in regis aula Practiculum tue propaginis Arma cernens quondam per atria Burgundie ducis in patria.
Toi, Ockeghem, qui chantes ces harmonies devant tous à la cour du roi des Français, renforce la pratique de tes suivants que tu entends parfois à la cour du duc de Bourgogne, dans ta patrie.
You, Ockeghem, who sing before all In the service of the King of the French, Strengthen the practice of your posterity By examining their implements on occasion in the halls Of the Duke of Burgundy, in your fatherland.
Per me Busnoys illustris comitis De Charolois indignum musicum, Saluteris tuis pro meritis Tamquam summum Chephas tropidium, Vale! verum instar Orpheicum!
A travers moi, Busnoys, indigne musicien de l’illustre Comte du Charolais, puisses-tu être récompensé selon tes mérites, en tant que maître incontesté de la mélodie. Salut, véritable Orphée !
By me, Busnoys, unworthy musician Of the illustrious Count of Charolais, May you be greeted for your merits, As the supreme master of melody. Farewell, true image of Orpheus!
Ergone conticuit Ergone conticuit Vox illa quondam nobilis, Aurea vox Okegi? Sic musicae extinctum decus? Dic, age, dic fidibus Tristes Appollo naenias. Tu quoque, Calliope
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Antoine Busnoys 8
In hydraulis quondam Pythagora Admirante melos phtongitates Malleorum percussa equora Per ponderum inequalitates Adinvenit muse quiditates.
Johannes Lupus 9
In hydraulis
Johannes Lupus 9
Ergone conticuit Ainsi cette voix, Autrefois noble, La voix d’or d’Ockeghem s’est tue ? La gloire de la musique est-elle ainsi disparue ? Alors parle, Apollon, Chante aux fidèles tes tristes complaintes. Toi aussi, Calliope,
Johannes Lupus 9
Ergone conticuit So has it now fallen silent, That voice once so noble, The golden voice of Ockeghem? Is the glory of music thus extinguished? Speak then, Apollo, sing To the faithful your sad dirges. And you too, Calliope
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Pullata cum sororibus, Funde pia lachrymas; Lugete, quotquot musicae Dulce rapit studium Virumque ferte laudibus. Artis Appollineae Sacer ille foenix occidit.
En habits de deuil, avec tes sœurs, Verse de pieuses larmes. Lamentez-vous, pour autant que vous ayez été formés Au doux apprentissage de la musique, Et portez vos louanges vers les hommes. Le grand maître de l’art d’Apollon, Ce phénix, est mort.
Clad in mourning with your sisters, Shed pious tears; Mourn, as many of you as have been seized By the sweet study of music, And speak of that man with praises. The sacred phoenix of the art of Apollo Is fallen.
Quid facis, invida mors? Obmutuit vox aurea, Aurea vox Okegi, Per sacra tecta sonans. Demulsit aures caelitum Terrigenumque simul Penitusque movit pectora. Quid facis, invida mors? Sat erat tibi promiscue Tollere res hominum; Divina res est musica; Numina cur violas?
Qu’as-tu fait, mort haineuse ? La voix d’or d’Ockeghem, Résonnant sous les voûtes sacrées, Est devenue muette. Elle a enchanté les oreilles Sur la terre comme aux cieux, Elle a ému jusqu’aux tréfonds de nos cœurs. Qu’as-tu fait, mort haineuse ? Il était suffisant d’emporter indistinctement les choses mortelles ; La musique est une chose divine ; Pourquoi outrages-tu les volontés divines ?
What have you done, envious Death? The golden voice of Ockeghem That resounded through the sacred precincts Has become mute. It charmed the ear In both heaven and earth, And moved the heart most deeply. What have you done, envious Death? It was enough for you indiscriminately To carry off human things; Music is a divine thing: Why do you outrage the gods?
Translation: Charles Johnston (except Mass)
24
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Plorer, gemir, crier Hommage à la « voix d’or » de Johannes Ockeghem († 1497)
Pierre de La Rue
1
PLORER, GEMIR, CRIER – Motet-chanson – F . B . H . E
Jacob Obrecht
MISSA SICUT ROSA SPINAM
2 Kyrie – A, F . R, H . B, O . E, P 3 Gloria – A, F . R, H . B, O . E, P 4 Credo – M, Ax . A, F . B, H . E, P 5 Sanctus – A, F . R, H . B, O . E, P 6 Agnus Dei – A, F . R, H . B, O . E, P
Josquin Desprez
7
NYMPHES DES BOIS / REQUIEM – Motet-chanson – M . H . B . E . P IN HYDRAULIS – Motet – F . R . O . P
Johannes Lupus
9
ERGONE CANTICUIT – Motet – A . O . R . E
Antoine Guerber,
direction
Mezzo-sopranos : Axelle Bernage (Ax), Marie Pouchelon (M). Altos : Frédéric Bétous (F), Andrés Rojas-Urrego (A). Ténors : Raphaël Boulay (R), Olivier Germond (O), Hugues Primard (H), Branislav Rakic (B). Basses : Philippe Roche (P), Emmanuel Vistorky (E).
3’36
34’34
Cet enregistrement est dédié à la mémoire de Marie-Françoise Marchal (1961-2011).
2’53 6’53 13’01 8’51 2’56
4’17
Antoine Busnoys 8
Diabolus in Musica
Nous remercions très chaleureusement Fabrice Fitch pour sa lumineuse transcription du motet-chanson Plorer, gemir, crier / Requiem et pour ses précieux conseils en matière de musica ficta pour la Missa Sicut Spina Rosam. We would like to express our warm thanks to Fabrice Fitch for his luminous transcription of the motet-chanson Plorer, gemir, crier/Requiem and his precious advice on questions of musica ficta in the Missa ‘Sicut spina rosam’.
7’47
7’08
Enregistrement réalisé grâce au soutien de / With the precious support of: La Région Centre.
Direction artistique / Artistic supervision, prise de son / sound recording: Jean-Marc Laisné. Recording / Enregistrement : 31/10/2011 - 3/11/2011, collégiale de Bueil-en-Touraine (France). Direction artistique æon / æon artistic supervision: Damien Pousset. Production æon /Producer : Kaisa Pousset. æon (Outhere France) 16, rue du Faubourg Montmartre, 75009 Paris. C 2012 Imprimé en Autriche.
AECD 1226