Ligeti - Complete String Quartets & Sonata

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Photo : D.R.

Gyรถrgy Ligeti

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Ce qui importe, c’est de faire la lumière sur des phénomènes restés obscurs pour d’autres, de concevoir des structures qui n’existaient pas jusqu’alors. What matters is to shed light on phenomena remained obscure for others, to design structures that did not exist before. György Ligeti


Quatuor BĂŠla

Photo : Jean-Louis Fernandez.


Français

György Ligeti « György Ligeti, enfant, dessine sur un cahier les cartes d’un monde imaginaire. Il se cache dans le grenier pour lire des contes, une vieille horloge égrène son tic-tac, les toiles d’araignées forment des labyrinthes jolis et mortels. Il s’entraîne sur le vieux piano paternel, il découvre les symphonies de Beethoven, sur le chemin du conservatoire il entend les musiques tziganes qui s’échappent des tavernes. Il aime ces deux musiques, l’une savante l’autre populaire, elles ne s’opposent pas et se répondent harmonieusement ou comiquement dans son esprit. Le petit György rêve. Plus tard, il est jeune compositeur, le régime politique de son pays se durcit, la culture est mise sous tutelle et les inventions ou trouvailles musicales sont proscrites, la nouveauté est l’ennemie du peuple. Bartók, le maître tant admiré s’enfuit puis meurt en exil. Ligeti est contraint d’écrire de la musique dans un style officiel, cela se résume le plus souvent à arranger des thèmes traditionnels pour diverses formations. II écrit en secret des œuvres plus ambitieuses et nouvelles. En 1956, après avoir subi le joug du nazisme puis du soviétisme, Ligeti, au péril de sa vie, s’enfuit. De l’autre côté du mur, il écrit enfin comme il l’entend. Il découvre le monde immense, les musiques extra-européennes, électroniques, rock, free-jazz, entendues jusque-là à travers les ondes brouillées des radios clandestines...

English

Progressivement, les influences musicales se réconcilient à nouveau dans son esprit et dans son cœur, et du fin fond de sa mémoire ressurgit son cher monde imaginaire. Il s’y réfugie souvent et il n’est pas rare d’entendre dans ses œuvres un violoniste tzigane qui aurait été initié à la musique des Pygmées Aka, une valse liquide montée sur ressorts, ou une fanfare de klaxons perdue au milieu d’une fable gothique. Ligeti disparaît en 2006, nous laissant une œuvre essentielle et l’image d’un homme libre, attentif aux mouvements du monde. Nous n’avons jamais rencontré György Ligeti. Le projet de le voir est resté un rêve. Nous avons travaillé pendant un an son second quatuor, ce qui fut l’acte fondateur de notre groupe. En mai 2006, alors que nous nous sentions enfin en confiance pour lui montrer notre travail, nous apprenions sa disparition dans un article du Monde. Par cet enregistrement nous souhaitons rendre très humblement hommage à sa musique et à sa curiosité et communiquer à d’autres notre propre enthousiasme. Nous remercions chaleureusement les personnalités, artistes et organisateurs de concerts qui nous ont aidé à réaliser ce disque : Michel Follin, Pierre Michel, Simha Arom, JeanPaul Angot, Thierry Besche, Jean-Marc Grangier, Anne Meillon, Paul Fournier, David Sanson, Agnes Timmers, Laetitia Zaepffel et Mathieu Malgrange. » Quatuor Béla

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Métamorphoses nocturnes Á la fin de l’année 1956, suite à la révolution hongroise, György Ligeti, âgé de trente trois ans, quitte Budapest pour Vienne, puis Cologne et Darmstadt. Dans sa fuite, le jeune compositeur amène avec lui les œuvres à l’avènement de son style personnel. Parmi elles, les pièces pour piano Musica ricercata (1951-53), Viziók (1956, première version des Apparitions, pour orchestre) ou encore le Quatuor à cordes n°1 (1953-54, révisé en 1958). Dans la Hongrie soviétique, où sévissait la censure, les aspirations modernistes de l’un des futurs compositeurs majeurs du XXe siècle n’avaient aucune chance. Son Quatuor à cordes n°1 est créé à Vienne le 8 mai 1958 par le Quatuor Ramor. En 1953, Ligeti n’avait accès aux récents développements de la musique, aux initiatives les plus novatrices de ses contemporains que par bribes. Il n’ignorait pas le travail de Webern, ni même de Boulez ou de Stockhausen, mais les partitions parvenaient très difficilement jusqu’à lui et les ondes radiophoniques étaient brouillées. Pour la modernité, l’on devait s’en remettre à l’œuvre des modèles nationaux : Kodály et surtout Bartók. Même si leurs œuvres les plus modernes étaient elles aussi rejetées par le pouvoir en place, leurs partitions demeuraient accessibles. Les musiques traditionnelles furent sans conteste l’autre soubassement culturel déterminant dans le processus de développement du style ligetien. Il entretiendra avec elles des rapports étroits sa vie durant. La musique hongroise fait partie de

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la langue maternelle de Ligeti, et même dans un genre si savant qu’un quatuor à cordes, il subsiste des traits caractéristiques, ici un résidu de mode pentatonique, là une cellule rythmique brèvelongue. Le Quatuor à cordes n°1 est constitué d’une succession de mouvements relativement courts et très contrastés (douze au total), mais qui peuvent être considérés comme un seul et unique dans la mesure où ils s’enchaînent sans réelle interruption. Il se développe entièrement à partir d’un noyau motivique, un pseudo-thème formé de deux secondes majeures ascendantes séparées l’une de l’autre par une seconde mineure. La démarche harmonique, sans être à proprement parler dodécaphonique, s’empare en tout cas des possibilités du total chromatique. Il ne s’agit pas d’un thème suivi de variations, car on ne peut pas réellement parler de thème. D’ailleurs, le motif générateur est tout de suite soumis à des transformations, des métamorphoses. « Métamorphoses nocturnes » : tel est le titre que l’auteur donne à cette œuvre, bien qu’il s’agisse ici d’une suggestion poétique – en français dans le texte – et que certains mouvements affichent un caractère plus diurne. Á partir d’un motif recelant une infinité de possibilités de symétries ou d’excroissances, Ligeti part à la découverte progressive des intervalles, jusqu’au total chromatique. Dans des mouvements tel Tempo di Valse, on reconnaîtra un certain geste stravinskien. D’autres fois, l’influence dissimulée du troisième mouvement, allegro misterioso, de la Suite lyrique de Berg. Toutefois, si l’on devait n’en retenir qu’une, ce serait l’influence de Béla Bartók, très marquée, notamment celle des Quatuors à cordes n°3, n°4


et n°5. Les enchaînements harmoniques, les modes de jeu, ou le constructivisme inscrivent ce Quatuor à cordes n°1 de Ligeti dans la lignée de ceux de son maître à penser. Pourtant ce dernier n’est pas seulement une œuvre de jeunesse, ni celle d’un épigone, mais bien l’œuvre d’un grand compositeur, non seulement par son savoir-faire, sa qualité technique incontestable dans un genre très exigeant, mais aussi parce que l’œuvre contient les germes d’un style qui n’appartient qu’à Ligeti, qu’il ouvre une voie nouvelle, un chemin venant de Bartók et conduisant vers... Dans l’Allegretto, un poco gioviale, on entend par exemple une sorte de mécanisme obstiné, où chacun des instruments semble entonner un ostinato au rythme indépendant. La densité des harmonies, les clusters chromatiques, l’écriture en canons très resserrés et les ruptures abruptes représentent quant à eux l’embryon d’un style qu’il faudrait bientôt nommer micropolyphonie. Le Quatuor à cordes n°2, composé en 1968, est un joyau dans la production de son auteur. Créé à Baden-Baden le 14 décembre 1969 par le Quatuor LaSalle, il se nourrit à la fois de toute une tradition et révèle une technique et un style très aboutis et personnels. Les grandes œuvres du répertoire sont présentes en toile de fond, de Beethoven à Webern. Si les différents mouvements contiennent des résidus de forme sonate, la forme générale en arche suggère quant à elle l’œuvre de Bartók. Le maître est encore présent, mais cette fois son influence est totalement assimilée et Ligeti réaffirme ici un style qui lui est propre depuis le début des années 1960. Ce quatuor confirme les

caractéristiques stylistiques des grandes œuvres qui lui ont apporté la consécration, d’Atmosphères (1961) aux Aventures et Nouvelles Aventures (1962-1966). Mais alors que ces dernières nécessitent un effectif important, pour répondre à une esthétique de masses sonores, de textures, le défi relevé par le Quatuor à cordes n°2 est d’y parvenir avec des moyens beaucoup plus réduits. Les cinq mouvements qu’il comprend sont d’abord d’une grande virtuosité. Ils sont aussi beaucoup plus découpés que dans le Quatuor à cordes n°1 ; chacun d’eux est clairement délimité dans le temps, et se dessine à partir d’une empreinte caractérisée. Contrairement à son pendant de la période hongroise, ce quatuor ne se développe pas à partir d’un thème, ni même d’un motif, mais plutôt à partir de textures, de surfaces. Les instruments sont employés dans la limite de leurs possibilités, explorant des registres et des contrastes dynamiques extrêmes. Le premier mouvement, Allegro nervoso, présente un fourmillement de petits intervalles dont se dégagent ça et là des bribes de mélodies, des élans frénétiques, un peu à la façon d’un tissu irisé dont certaines fibres se déchireraient sous la pression. Á des harmonies très denses s’enchaînent des plages plus éthérées. C’est d’ailleurs un statisme apparent qui régit le second mouvement, où des harmonies claires, des unissons, des octaves, se brouillent imperceptiblement par d’infimes déviations. Comme souvent chez Ligeti, le matériau sonore atteint progressivement un point de rupture. Le troisième mouvement, come un meccanismo de precisione, représente un autre trait marquant du style de Ligeti. Des mécanismes rythmiques se

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règlent et se détraquent, des tic-tacs d’horlogeries défectueuses s’enchevêtrent. Á l’instar de son Poème symphonique pour cent métronomes (1961), Ligeti affectionne les polyrythmies, les polymétries complexes. Le quatrième mouvement est furieux, brutal, tumultueux. C’est un geste aux sonorités âpres, acides, et aux registres extrêmes. Il semble désarticulé et barbare. Á l’inverse, le mouvement final est tout en délicatesse, dans des nuances plus douces. Il y a là encore quelques embardées, des débordements qui rappellent les mouvements antérieurs, mais sa structure globale s’apparente à celle d’un nuage, qui peu à peu se dissipe, se désagrège. La Sonate pour violoncelle comprend deux parties, composées à l’origine séparément. Le Dialogo date de 1948-49. Dans le Budapest d’après-guerre, Ligeti termine ses études à l’Académie Franz Liszt. C’est une époque politiquement troublée, où le compositeur, à la recherche de son style, doit faire le choix entre une musique radicalement nouvelle ou une écriture plus accessible, plus traditionnelle : « Je voulais écrire une musique très simple, diatonique, parce que je croyais que la musique se devait d’être plus populaire » 1. Ce premier mouvement n’adopte pas une esthétique révolutionnaire mais demeure néanmoins une composition très touchante. Il fut composé pour une jeune violoncelliste dont Ligeti était amoureux. On y perçoit clairement un dialogue entre un homme et une femme, chacun se répondant dans sa tessiture ; un mouvement lent et langoureux où le charme d’une mélodie aiguë répond aux invitations d’une mélodie dans le grave de l’instrument. Le langage du Capriccio

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est beaucoup plus moderne. Composé en 1953, il répond à une commande d’une autre violoncelliste, Vera Dénes, qui proposa à Ligeti de compléter son Dialogo par un second mouvement. Ce Capriccio, de forme sonate, est un mouvement rapide et virtuose dont l’écriture peut rappeler la fascination de l’auteur pour l’œuvre de Paganini. Le mode mélodique initial évoque également une parenté avec la musique traditionnelle. On pense à la musique balinaise par exemple, dont Ligeti a pu s’inspirer à travers Bartók (l’île de Bali dans Mikrokosmos IV), ou encore aux vestiges d’une culture primitive, aux origines asiatiques des Magyars. On rencontre pareil mode, caractérisé par un pentatonisme transdanubien, notamment dans la région de Tolna. La Sonate fut elle aussi censurée par l’Union des Compositeurs (contrôlée par le KGB). Elle ne fut crée par Manfred Stilz que le 24 octobre 1983 à Paris. Simon Gallot

1. Ligeti, in Paul Griffiths, György Ligeti, Robson Books, London, 1997, p. 10.


Quatuor Béla Les interprétations engagées et exigeantes du Quatuor Béla ont été, à plusieurs reprises saluées par la presse. « L’excellent quatuor Béla». Le monde - Juillet 2013. Fondé en 2006 par quatre musiciens issus des CNSM de Lyon et Paris, le Quatuor Béla s’est réuni autour du désir de défendre le fabuleux répertoire du XXe siècle et la création. L’ensemble se produit en France et à l’étranger sur des scènes éclectiques : Cité de la Musique à Paris, Festival d’Aix en Provence, Flâneries de Reims, Biennale Musique en Scène de Lyon, Why Note, Les Musiques à Marseille, Villa Médicis, Les Suds à Arles, Jazz Nomades, Africolor, Musique Action, Les Journées Electriques, ainsi que sur les Scènes Nationales. Le Quatuor Béla se distingue par sa volonté d’être à l’initiative de nouvelles compositions et de nourrir le dialogue entre interprètes et compositeurs. Il a créé ou s’apprête à créer les œuvres de Philippe Leroux, Daniel D’Adamo, Thierry Blondeau, JeanPierre Drouet, François Sarhan, Garth Knox, Karl Naegelen, Alvaro Leon Martinez, Sylvain Lemêtre, Frédéric Aurier ... Curieux et enthousiasmé par la diversité des courants qui font la création contemporaine, les membres du Quatuor Béla s’associent souvent à des figures artistiques emblématiques : l’improvisateur et performer Jean-François Vrod, le rockeur inclassable Albert Marcœur, le griot Moriba Koïta, le génie du oud Ahmad Al Khatib, le trio de jazz radical Jean Louis. www.quatuorbela.com

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Français

György Ligeti ‘As a child, György Ligeti drew maps of an imaginary world in a notebook. He hid in the attic to read fairytales, the tick-tock of an old clock marking the time, spider webs forming pretty, mortal labyrinths. He practiced on the old paternal piano, discovered Beethoven’s symphonies, and on the road to the conservatory, heard gypsy music wafting from taverns. He liked these two types of music, one highbrow, the other popular, which did not conflict, answering each other harmoniously or comically in his mind. Little György dreamt. Later on, he was a young composer. The political regime of his country tightened; culture was placed under supervision, and musical inventions or brainwaves were proscribed; novelty was the enemy of the people. Bartók, the master so admired, fled and later died in exile. Ligeti was forced to write music in an official style, which most often came down to arranging folk tunes for diverse ensembles. In secret, he wrote new, more ambitious works. In 1956, after having been subjected to the yokes of Nazism and then Communism, Ligeti fled at the risk of his life. From the other side of the Wall, he was finally able to write as he saw fit. He discovered a vast world of music – extra-European, electronic, rock, free-jazz – heretofore heard only on the scrambled waves of clandestine radios...

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English

Progressively, the musical influences were again reconciled in his heart and soul, and from the depths of his memory suddenly appeared his dear imaginary world. He often sought refuge in it, and it is not rare to hear in his works a gypsy violinist who apparently initiated him in the music of the Aka Pygmies, a spring-mounted liquid waltz, or a fanfare of klaxons lost in a Gothic fable. Ligeti died in 2006, leaving us an essential oeuvre and the image of a free man, attentive to the movements of the world. We never met György Ligeti. Our plan to see him remained a dream. For a year, we worked on his second quartet, which was the founding act of our group. In May 2006, when we finally felt confident enough to show him our work, we learnt of his death in an article in Le Monde. With this recording we wish very humbly to pay tribute to his music and curiosity and to convey our own enthusiasm to others. Our warm thanks to the personalities, artists and concert promoters who helped us achieve this disc: Michel Follin, Pierre Michel, Simha Arom, JeanPaul Angot, Thierry Besche, Jean-Marc Grangier, Anne Meillon, Paul Fournier, David Sanson, Agnes Timmers, Laetitia Zaepffel and Mathieu Malgrange.’ Béla Quartet Translated by John Tyler Tuttle


Night metamorphoses At the end of 1956, following the Hungarian revolution, György Ligeti, aged 33, left Budapest for Vienna, then Cologne and Darmstadt. In his flight, the young composer took with him the works prefiguring his personal style, including the piano pieces Musica ricercata (1951-53), Viziók (1956, first version of Apparitions for orchestra) and the String Quartet No.1 (1953-54, revised in 1958). In Communist Hungary, where censorship held sway, the modernist aspirations of one of the future major composers of the 20th century had no chance, and his String Quartet No.1 was not performed until 8 May 1958, by the Ramor Quartet in Vienna. In 1953, Ligeti had had only limited access to recent developments in music and to the most innovative initiatives of his contemporaries. He was not unfamiliar with the work of Webern, or even of Boulez and Stockhausen, but it was quite difficult to procure scores, and radio waves were jammed. For modernity, one had to settle for the work of the national models: Kodály and especially Bartók. Even though their most modern works were also rejected by the powers that be, their scores remained accessible. Folk music was indisputably the other determining cultural foundation in the development process of Ligeti’s style, and he would maintain close relations with it throughout his life. Hungarian music was part of Ligeti’s maternal tongue, and even in a genre as learned as a string quartet, there remain characteristic traits: here a

residue of pentatonic mode, there a short-long rhythmic cell. The String Quartet No.1 consists of a succession of relatively short, highly contrasted movements (12 in all), which can be considered a single one insofar as they are linked with no real interruption. It develops entirely starting from a motivic core, a pseudo-theme made up of two ascending major seconds separated by a minor second. The harmonic approach, without being dodecaphonic, strictly speaking, in any case grasps the possibilities of the chromatic total. This is not a matter of a theme followed by variations, for we cannot really speak of a theme. Moreover, the generating motif is immediately submitted to transformations, metamorphoses. ‘Métamorphoses nocturnes’ is the title – in French in the text – that the composer gave this work, and even though it is a poetic suggestion, certain movements display a more diurnal character. Starting from a motif containing infinite possibilities of symmetries or outgrowths, Ligeti progressively goes in search of intervals, up to the chromatic total. In movements such as Tempo di Valse, one will recognize a certain Stravinskian gesture, or in the third movement, Allegro misterioso, the hidden influence of Berg’s Lyric Suite. However, if we had to retain only one, it would be the pronounced influence de Béla Bartók, especially that of the Quartets Nos. 3, 4 and 5. The harmonic progressions, playing styles, and constructivism inscribe Ligeti’s Quartet No.1 in the tradition of those by his intellectual guide. Yet this is not merely a youthful work nor that of an epigone, but indeed the work of a great composer, not simply owing to its savoir-faire and incontestable technical

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quality in a highly demanding genre, but also because the work contains the seeds of a style that is Ligeti’s alone, opening a new way, a path coming from Bartók and leading towards... In the Allegretto, un poco gioviale, we hear, for example, a sort of ostinato mechanism, in which each instrument seems to state an ostinato with an independent rhythm. The density of harmonies, the chromatic clusters, the writing in very tight canons and the abrupt breaks represent the embryo of a style that will soon have to be called ‘micropolyphony’. The String Quartet No.2, composed in 1968, is one of the gems of the composer’s catalogue. Premiered in Baden-Baden on 14 December 1969 by the LaSalle Quartet, it is nurtured by a whole tradition and reveals technique and a style that are highly accomplished and personal, with great works of the repertoire, from Beethoven to Webern, present in the background. Although various movements contain remnants of sonata form, the overall arch-form suggests the work of Bartók. The master is still present, but this time his influence is totally assimilated, and here Ligeti reaffirms a style unique to him since the early 1960s. This quartet confirms the stylistic characteristics of the great works that established his reputation, such as Atmosphères (1961) and Aventures et Nouvelles Aventures (1962-66). But whereas the latter calls for large forces to respond to an aesthetic of sound masses and texture, the challenge taken up by the String Quartet No.2 is to achieve that with much more limited means. The five movements that it comports are highly virtuosic and much more jagged than in the String Quartet

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No.1, each of them clearly delimited in time and standing beginning with a clear imprint. Unlike its counterpart from the Hungarian period, this quartet does not develop from a theme or even a motif but rather from textures and surfaces. The instruments are used in the limit of their possibilities, exploring extreme registers and dynamic contrasts. The first movement, Allegro nervoso, presents a welter of small intervals from which emanate snatches of melodies and frenzied élans here and there, a bit like an iridescent fabric of which certain fibres might rip under pressure. Very dense harmonies are followed by more ethereal passages. Moreover, a seeming stasis rules the second movement in which clear harmonies, unisons and octaves are imperceptibly muddled by tiny deviations. As often with Ligeti, the sound material progressively attains a breaking point. The third movement, come un meccanismo de precisione, represents another significant feature of Ligeti’s style. Rhythmic mechanisms adjust and break down, the tick-tock of defective clocks overlapping. Like his Symphonic Poem for 100 Metronomes (1961), Ligeti reveals his fondness for polyrhythms and complex polymeters. The fourth movement, furieux, brutal, tumultueux, is a gesture of harsh, acid sonorities and extreme registers that seems dislocated and barbarous. Inversely, the last movement is highly delicate, in the most piano dynamics. Here again, we find a few swerves, outbursts that recall the earlier movements, but the overall structure is akin to that of a cloud, which gradually breaks up and disperses.


The Sonata for cello is made up of two parts, originally composed separately, with the Dialogo dating from 1948-49. In post-war Budapest, Ligeti was completing his studies at the Franz Liszt Academy. It was a politically troubled period when the composer, searching for his style, had to make the choice between music that was radically new or writing that was more traditional, more accessible: ‘I wanted to write very simple, diatonic music, because I believed that music had to be more popular’ 1. This first movement does not adopt a revolutionary aesthetic but nonetheless remains a very touching composition, written for a young cellist with whom Ligeti was in love. Here, one clearly perceives a dialogue between a man and a woman, each replying in his or her own tessitura. In a slow, languid tempo, the charm of a high-pitched melody responds to the invitations of a melody in the instrument’s low register. The language of the Capriccio is much more modern. It was composed in 1953 to a commission from another cellist, Vera Dénes, who in fact suggested to Ligeti that he complement his Dialogo with a second movement. In sonata form, this Capriccio is a fast, virtuosic movement whose writing may recall the composer’s fascination for Paganini’s music. The opening melodic mode also evokes a kinship with folk music: Balinese music, for example, comes to mind. Ligeti was able to take inspiration through Bartók (‘The Island of Bali’ in Mikrokosmos IV), or else the vestiges of a primitive culture, the Asian origins of the Magyars. We encounter a similar mode, characterized by a transdanubian pentatonism, particularly in the region of Tolna. The Sonata was also censored by

the Composers Union (controlled by the KGB) and not performed until 24 October 1983, by Manfred Stilz in Paris. Simon Gallot

1. Ligeti, in Paul Griffiths, György Ligeti, Robson Books, London, 1997, p.10

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Béla Quartet The committed and demanding interpretations of Béla Quartet were repeatedly praised by the press. « The excellent Béla Quartet ». Le Monde - July, 2013. Founded in 2006 by four musicians from the Conservatories of Lyon and Paris, the Béla Quartet met around the desire to defend the fabulous repertoire of the 20th century as well as the creation. The group performs in France and abroad on eclectic stages: Cité de la Musique in Paris, Flâneries de Reims, Biennale Musiques en Scène de Lyon, Why Note, Les Musiques à Marseille, Villa Médicis, Les Suds à Arles, Jazz Nomades, Africolor, Musique Action, Les Journées Electriques, as well as the French “Scènes nationales”. The Béla Quartet stands by its commitment to be at the initiative of new compositions and dialogue between players and composers. The group has created or is about to create works by Philippe Leroux, Daniel D’Adamo, Thierry Blondeau, JeanPierre Drouet, François Sarhan, Garth Knox, Karl Naegelen Alvaro Leon Martinez, Sylvain Lemêtre Frederick Aurier. . . Curious and enthused by the diversity of the contemporary creation, the Béla Quartet is often associated with iconic artistic figures: the improviser and performer Jean-François Vrod, the unclassifiable rocker Albert Marcoeur, the griot Moriba Koïta, the genius oud Ahmad Al Khatib, the radical jazz trio Jean Louis. www.quatuorbela.com

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György Ligeti (1923 - 2006) Métamorphoses nocturnes 1

String Quartet No. 1 (1953-1954) « Métamorphoses nocturnes »

2-6 String Quartet No. 2 (1968)

21’03

- Allegro nervoso ii - Sostenuto molto calmo iii - Come un meccanismo di precisione iv - Presto furioso, brutale, tumultuoso v - Allegro con delicatezza — “Wie aus der Ferne” i

7-8 Sonata (1948-1953) for cello

21’00 5’22 4’50 3’14 2’11 5’26 8’18

- Dialogo 4’25 ii - Capriccio 3’53

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Quatuor Béla

Julien Dieudegard, violin 1 (1), violin 2 (2-6) Frédéric Aurier, violin 2 (1), violin 1 (2-6) Julian Boutin, viola . Luc Dedreuil, cello

L’enregistrement est une production de l’Oreille Droite, en partenariat avec le GMEA d’Albi , Cncm d’Albi-Tarn. Direction artistique/artistic supervision : Olivier Légeret, Quatuor Béla. Prise de son/sound recording : Benjamin Maumus (GMEA). Mastering : Pascal Perrot, Stéphane Massé. Enregistrement/recording : 1-4/05/2012, Grange des Villarons, Studio Alys (www.studioalys.com). Direction artistique æon/æon artistic supervision : Kaisa & Damien Pousset. Photo : Dolorès Marat. éditeur/publishers : Schott. æon (Outhere-France) 16, rue du Faubourg Montmartre, 75009 Paris. C 2013. Imprimé en Autriche.

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AECD 1332


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