Dossier pédagogique, exposition Sans Limite Photographie de montagne

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Sans limite Photographies de montagne 25.01 - 30.04.2017

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Chers enseignants et éducateurs, Le Musée de l’Elysée vous invite à découvrir l’exposition Sans limite. Photographies de montagne présentée jusqu’au 30 avril 2017 à Lausanne. Cette exposition part du constat que la photographie a inventé le paysage de montagne en le révélant aux yeux du monde. La photographie est héritière d’une certaine idée de la montagne et du sublime, intimement liée au romantisme. Dans le cadre de l’exposition Sans limite, Photographies de Montagne, nous vous proposons un dossier pédagogique qui présente les thèmes de l'exposition, un parcours de visite et les œuvres emblématiques de celle-ci. Afin de préparer vos élèves, nous vous encourageons à faire une pré-visite de notre exposition. En vous annonçant à l’avance au département de la médiation culturelle, celle-ci sera gratuite. Nous proposons également une visite gratuite de l'exposition avec les médiateurs du musée le mercredi 15 février à 17h. Pour y participer, nous vous prions de bien vouloir contacter la responsable du département au 021 316 99 13. Pour l’organisation d’une visite guidée ou visite libre, veuillez remplir le formulaire de réservation pour les groupes dans la rubrique « Autour de la visite » sur elysee.ch. Nous serions très heureux de collaborer avec vous et ravis d’accueillir vos élèves. Bonne visite !

Contact médiation culturelle Afshan Heuer Responsable de la médiation culturelle et des publics Tél. : +41 21 316 99 13 afshan.heuer@vd.ch www.elysee.ch Contributeurs du dossier pédagogique Rédaction et recherches : Afshan Heuer, Daphné Loi Zedda Réalisation : Afshan Heuer, Daphné Loi Zedda Commissaire de l'exposition : Daniel Girardin, conservateur en chef assisté de Emilie Delcambre Hirsch et Maéva Besse

L’exposition bénéficie du précieux soutien de PKB Privatbank, partenaire privilégié du Musée de l'Elysée.

Couverture : Maurice Schobinger, Face à Face - Lenzspitze, 2015 © Maurice Schobinger, Collection du Musée de l'Elysée Ci-dessus : John Jullien, Traversée de la Mer de Glace, vers 1880 © Musée de l'Elysée, Lausanne, Collection du Musée de l'Elysée


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Sans limite Photographies de Montagne Table des matières 1) Présentation de l’exposition

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A. Rez-de-chaussée 4 Frontalité 4 Horizontalité 5 Vue aérienne/plongée 5 Verticalité 5 Pionniers 6 B. Etage inférieur Distance 6 Matière 7 Stéréoscopie 7 C. Etage supérieur Panorama 8 Icône 9 Cône 9 Diffusion 10 Bibliothèque numérique 10 2) Fiche pour élève : abrégé de l'histoire de la photographie de montagne 11 3) Glossaire 13 Points de vue 13 Formes 13 Diffusion 13 4) Autour de la visite 14 Le Studio, espace découverte 14 Brochure Visite découverte 14 Ateliers gratuits « Crée ta carte postale ! » 14 Visites scolaires 14 5) Agenda

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6) Informations pratiques

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Yann Gross, Avalanche 4, 2006 © Yann Gross

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1. Présentation de l’exposition L’exposition Sans limite. Photographies de montagne, la première du genre, met en lumière près de 300 photographies de toutes les époques - des pionniers aux contemporains. L'exposition souligne le travail important d'une centaine de photographes, notamment : Gabriel Lippmann, Francis Frith, Adolphe Braun, Jules Beck, William Donkin ou Emile Gos ainsi que de nombreux artistes contemporains tels que René Burri, Luc Chessex, Iris Hutegger et Thomas Bouvier. Présentée sur trois étages, l'exposition s'articule autour de quatre axes : les stratégies formelles employées par les photographes (les points de vue), les formes imposées par la montagne, les techniques élaborées par les photographes et la diffusion des images de la montagne. Ce dossier pédagogique constitue un outil destiné aux enseignants et éducateurs, qui sert à faciliter la compréhension du discours de l'exposition. Il est pensé selon les sections thématiques, le parcours et selon un choix d'œuvres. A. REZ-DE-CHAUSSÉE FRONTALITÉ Le point de vue frontal, avec une perspective centrale, est le plus classique. Il permet de montrer la masse, le caractère hiératique, puissant et imposant de la montagne. Au XIXe siècle, les premiers alpinistes ont affronté les grandes faces de front, pensant – à tort – que les arêtes étaient plus dangereuses. Ils ont donc fait face à l’une des formes les plus spectaculaires de la montagne, et celleci est restée l’une des plus traditionnelles.1 Un point de vue frontal caractérise une photographie prise face à la montagne, de près. Ces images permettent de transcrire la dimension imposante, grandiose de la montagne et de transmettre un sentiment de sublime (concept philosophique liée au mouvement romantique). L'intérêt pour la montagne est né d'abord au travers de la littérature. Le célèbre poème d'Albrecht von Haller Die Alpen (1729) et le roman La Nouvelle Héloïse (1761) de JeanJacques Rousseau constituent des points d'ancrage de l'imaginaire lié à la représentation de la montagne. Les peintres romantiques ont aussi réalisé des tableaux de ces paysages montagneux, un territoire où ils ne sont pourtant jamais rendus. Les premières images de ces lieux, jusque-là fantasmés, datent des années 1845-1850. Les daguerréotypes du Mont Blanc de Gustave Dardel (1824-1899) et Joseph-Philibert Girault de Prangey (1804-1892) sont des exemples de ces premiers clichés de la montagne. Les artistes contemporains continuent de traiter le thème de la montagne avec le point de vue classique de la frontalité. Cette stratégie formelle est particulièrement visible dans deux œuvres récentes dans cette première section de l'exposition : Guido Baselgia (1953), Piz Languard, de la série LungoGuardo, N°11, 2010 ; et Maurice Schobinger (1960), Face à Face / Lenzspitze, 2015. 1. Daniel Girardin, Sans limite. Photographies de montagne, Lausanne : Les Editions Noir sur Blanc, Collection - Musée de l'Elysée N° 4, 2017, p. 12. Guido Baselgia, Piz Languard, de la série LungoGuardo, N° 11, 2010 © Silvan Faessler Fine Art, Zug Attribué à Gustave Dardel, Alpes, vers 1850@ Collection du Musée suisse de l’appareil photographique, Vevey

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HORIZONTALITÉ Le point de vue qui introduit dans l’image des plans horizontaux est l’héritier, plus ou moins lointain, d’une tradition de la peinture et de la perspective atmosphérique. La composition des images par plans horizontaux successifs, avec une ligne de construction au premier plan, crée une illusion de profondeur et d’immensité, voire d’infini.2 L'horizontalité est un point de vue qui permet de transmettre la profondeur du paysage. Dans l'image, plusieurs plans se succèdent, les uns derrière les autres. Par exemple, une montagne proche peut cacher une montagne plus lointaine. Ce point de vue est facilement reconnaissable dans trois œuvres de cette section : le grand panorama de Thomas Bouvier (1962) Corbassière 22.09.2015, 2016, et les grands formats de Annelies Štrba (1947), Mountains, 2006 et Axel Hütte (1951), FurkaMuttenhorn, 1994-1995. VUE AÉRIENNE / PLONGÉE Le point de vue aérien, rendu possible par les vols en ballon de la fin du XIXe siècle sur les Alpes et très en vogue dans les années 1930, a introduit une nouvelle dimension de la photographie de montagne et en a bouleversé les schémas perspectifs. La photographie aérienne, en plongée oblique ou perpendiculaire, très abstraite, a détruit l’espace euclidien.3 Félix Nadar, photographe français, a réalisé la première photographie aérienne à Paris, depuis un ballon captif (ancêtre de la montgolfière) en 1858. Entre 1890 et 1910, Eduard Spelterini, pionnier suisse du vol aérien et photographe, a pris une série de clichés de montagne et de ville à travers le monde. Cet aventurier est l'auteur des premières photographies aériennes des Alpes. La prise de vue depuis les airs correspond donc à un point de vue dominant de l'homme sur la nature. Deux photographies de cette section mettent l'accent à la fois sur la montagne vue des airs et à la fois sur l'évolution technologique des moyens de transports et techniques employés pour la photographie aérienne : Philipp Giegel (1927–1997), Ballon devant le Wetterhorn, 1964 et René Burri (1933–2014), Alpes suisses vues d’avion, 1981. Une autre œuvre de Philipp Giegel Melchsee, Obwald, 1964 permet de constater un des intérêts des photographes pour ce point de vue qui donne la possibilité de réaliser une photographie abstraite de la montagne.

2. Daniel Girardin, op.cit., p. 13. 3. Idem. 4. Ibid., pp. 12-13. Annelies Štrba, Mountains, 2006 © Collection du Musée de l’Elysée René Burri, Alpes suisses vues d’avion, 1981 © Collection du Musée de l’Elysée

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VERTICALITÉ Le point de vue vertical, en plongée ou contre-plongée sur les faces, permet de faire comprendre la montagne du point de vue du vertige, avec des lignes ascendantes très fortes. La verticalité change les notions de perspective connues au XIXe siècle. L’image verticale n’a pas de point de fuite.4 Une photographie avec un point de vue vertical est prise soit du haut des sommets soit, au contraire, de tout en bas (en contreplongée). Elle permet de transcrire en image l'altitude (élévation) impressionnante de la montagne. Deux photographies mettent en avant à la fois le côté vertigineux de la montagne et à la fois l'exploit technique et physique remarquable des premiers photographes alpinistes qui ont gravit des sommets : Frédéric Boissonnas (1858-1946), Aiguille de l'M., massif du Mont-Blanc, vers 1900 et Georges II Tairraz (1900–1975), Les Arêtes de Rochefort, vers 1935. Ces pionniers de la photographie de montagne partaient en expédition avec parfois jusqu'à 250 kilos de matériel. PIONNIERS La dernière salle de l'étage présente le défi artistique et technique des premières prises de vue des pionniers de la photographie de montagne. L’alpinisme en Europe naît avec la première ascension du Mont Blanc en 1786. Horace-Bénédict de Saussure (1740-1799), géologue et naturaliste genevois, souhaitait connaître l’altitude exacte du sommet du Mont Blanc. Il promet une récompense à ceux qui arriveront à gravir la montagne. Jacques Balmat (chasseur de chamois) et Michel Paccard (médecin) y parviennent en 1786. L’année suivante, de Saussure atteint lui-même le sommet. Cet événement marque aussi le début du tourisme dans les Alpes. Attirés par les glaciers et poussés par la curiosité, les personnes se pressent pour venir découvrir la montagne. Dès les années 1850, grâce à l'apparition de la photographie, les premiers scientifiques « alpinistes » peuvent documenter leurs recherches. La photographie des sommets et des glaciers exige des capacités physiques exceptionnelles, du matériel spécifique et des connaissances techniques. Depuis 1860, de nombreux photographes sont des alpinistes avertis, Jules Beck (1825-1904), Auguste-Rosalie Bisson (1826-1900), Joseph Tairraz (1827-1902), Charles Soulier (18401876) et William Donkin (1845-1888). La première photographie au sommet du Mont Blanc est attribuée à Charles Soulier. Cependant, certaines voix s'élèvent pour signaler que JosephTairraz et AugusteRosalie Bisson auraient pu être les premiers à réaliser des clichés depuis l'un des plus hauts sommets des Alpes. Trois œuvres soulignent l'exploit physique et technique remarquable que représentaient ces premières ascensions : Joseph-Philibert Girault De Prangey (1804-1892), Mer de Glace, massif du Mont-Blanc, 1845-1850, Jules Beck, Die Spitze der Mönchs, vom Standpunkt 4050 m ü M., Grindelwald BE/ Fieschertal VS, 1872 et Auguste-Rosalie Bisson La Crevasse sur le chemin du grand Plateau, Ascension du Mont Blanc, 1862. 4.Daniel Girardin, op.cit., pp. 12-13. Georges II Tairraz, Les Arêtes de Rochefort, vers 1935 @ Collection Nicolas Crispini, Genève Joseph-Philibert Girault De Prangey, Mer de Glace, massif du Mont-Blanc, 1845-1850, Daguerréotype @ Collection du Musée gruérien, Bulle

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B. ÉTAGE INFÉRIEUR DISTANCE La distance est un point de vue très usuel dans la photographie de montagne, et elle rejoint là aussi une tradition picturale. La photographie à distance permet de saisir l’immensité, elle transcrit l’atmosphère générale d’un lieu dans un processus d’indifférenciation.5 Inspiré des peintres, ce point de vue permet de transmettre l'aspect pictural de la montagne, mais la distance peut aussi être comprise dans le sens d'une distance critique en plaçant le réchauffement climatique ou l’intrusion d'infrastructures dans le paysage au centre du propos artistique. Luc Chessex, Massif du Süsten, 1986 et Leo Fabrizio, Gütsch_UR, 2002 sont deux exemples parmi les photographies de cette section, qui illustrent la dimension critique que peut prendre la photographie de montagne. MATIÈRE. Un défi pour les photographes de montagne est de rendre compte de la matière de ce paysage - la roche, l'eau, la glace, la neige, la terre et le sédiment. Les montagnes - des structures dynamiques - évoluent au fil du temps. La comparaison de photographies de différentes époques permet de rendre compte de ces changements. [Avec ce point de vue] se rejoignent clairement l’art et la science, dans une mise en valeur de la structure même de la montagne, qui en révèle sa nature, son origine, son histoire. La matière, si diverse dans le cas de la montagne, devient très vite un sujet pour les photographes, qui en exploitent le caractère graphique, très spectaculaire dans le cas des séracs.6 La matière signifie plus précisément la « forme matérielle » de la montagne représentée par les photographes. Cette dimension a particulièrement intéressé les premiers géologues, alpinistes et photographes. L'intérêt est toujours d'actualité, l'artiste bâloise Iris Hutegger (1964) - dans son œuvre LS-Nr. 1511-579, 2015 - réunit photographie et couture afin de rendre la « vraie » matière à la montagne. En manipulant l'image, elle crée une illusion et simule la réalité. L' œuvre de Jacques Pugin, #001 Glaciers, Rhonegltescher, 46°34’48" N 8°23’12’’ E, 2015, traite également le thème de la matière. L'artiste photographie les bâches qui recouvrent le Glacier du Rhône dans le but d'en ralentir la fonte. Cette photographie soulève la question du réchauffement climatique et de son impact sur la montagne.

5. Daniel Girardin, op.cit., p. 13. 6. Ibid., p.12 Luc Chessex, Massif du Susten, 1986 @ Collection du Musée de l’Elysée Iris Hutegger, LS-Nr. 1511-579, 2015 © Collection du Musée de l’Elysée

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STÉRÉOSCOPIE Quand la photographie fait son apparition en 1839, l'Anglais Charles Wheatstone demande à Wiliam Henry Fox Talbot de prendre des photographies en relief (selon le principe de la stéréoscopie) qu'il visionne ensuite avec son stéréoscope. En 1849, David Brewster (avec l’aide de Jules Duboscq) construisent un nouveau stéréoscope (à lentilles). Présentée lors de l’Exposition Universelle à Londres en 1851, la stéréoscopie rencontre un grand succès et devient à la mode. L'image stéréoscopique est la prise de vue de la montagne la plus populaire entre 1860 et 1920. Véritable industrie et support du tourisme, la stéréoscopie a l’avantage de permettre par illusion d’optique une vision en trois dimensions. Une forme de sculpture photographique qui donne à comprendre les divers plans du paysage, les reliefs ou les diverses matières, notamment les séracs des glaciers.7 La section dédiée à la stéréoscopie présente une projection d’anciennes photographies stéréoscopiques issues des collections du Musée de l'Elysée. Les images ont été numérisées, rectifiées et enregistrées dans un format compatible 3D qui permet de les visionner en diaporama à l’aide de lunettes 3D. Seize facsimilés de ces mêmes images stéréoscopiques ainsi qu'une visionneuse du début du XXe siècle se trouvent au Studio, à l'étage supérieur. Grâce à cet appareil, vous aurez la possibilité de vivre l'expérience du 3D comme à l'époque. Le principe de la stéréoscopie La stéréoscopie permet de voir du relief grâce à une illusion d’optique. Le principe est basé sur le fait que nous avons deux yeux et que chaque œil perçoit une image différente lorsqu’on observe un objet. L’image reçue par l’œil gauche est légèrement décalée par rapport à celle perçue par l’œil droite. Notre cerveau assemble ces deux images pour n’en faire qu’une et crée ainsi l’effet de relief que nous apercevons. Ce même principe est utilisé pour produire des photographies stéréoscopiques. Deux photographies d’un objet ou d’une scène sont prises simultanément avec deux objectifs. L’objectif à gauche est légèrement décalé de celui de droite…. Comme nos yeux.

7. Daniel Girardin, op.cit., p.10. 8. Idem. Underwood & Underwood, Mer de glace vue du chapeau, Chamonix 1884 @ Collection du Musée de l’Elysée Anonyme, Glacier et Aiguille du Géant, 1900-1910 @ Collection du Musée de l’Elysée

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C. ÉTAGE SUPÉRIEUR PANORAMA Le panorama fait partie des techniques photographiques développées pour transcrire le côté grandiose du paysage montagneux en image, tout comme le grand format et la stéréoscopie. [L'objectif de cette] stratégie formelle des photographes a été de dépasser les dimensions usuelles du tirage unique en réalisant des panoramas, par assemblage ou collage d’images qui se succèdent.8 En juxtaposant plusieurs clichés, les photographes réussissent à proposer une vue de la montagne si large qu'elle dépasse le champ visuel humain. Les panoramas sont habituellement horizontaux, mais peuvent également être verticaux. Dans l'œuvre de René Henry (1905-2000) Panorama du Dahmann Spitze, Autriche, 1953, nous constatons facilement que ce panorama monumental est constitué de douze prises de vue. Aujourd'hui, il est rare que les photographes assemblent manuellement les images d'un panorama. Les appareils photographiques ou les logiciels le font désormais de manière automatique. L'artiste contemporain Peter Knapp avec Rothorn bei Lauenen, 1970, détourne cette technique afin de montrer que notre champ de vision est limité, mais notre champ de perception est très large. Dans ses expériences de « décomposé / recomposé », le photographe explore librement le chemin visuel, qu'il décompose en plusieurs images afin de les recomposer. ICÔNE Dès le milieu des années 1860, l’image est au centre de l’essor touristique. Pour un pays comme la Suisse ou une région comme celle du Mont Blanc, elle est au centre d’enjeux considérables. Des photographes de talent créent une véritable industrie de la photographie de montagne. [...] Le document touristique impose rapidement des normes et des formes réductrices : les lieux à visiter (Chamonix, Zermatt…), les icônes (le Mont Blanc, la Jungfrau, le Cervin…), les points de vue incontournables (la Flégère, le Montenvers…).9 Avec une altitude de 4478m et son aspect pyramidal, le Cervin est devenu la montagne la plus connue de Suisse. Son ascension, il y a plus de 150 ans, est considérée comme l'un des grands exploits de l'alpinisme en Europe. Grâce aux nombreuses marques qui reprennent l'image du Cervin, la conquête de cette montagne mythique est gravée dans la conscience collective. Ce sommet fascine également les photographes, qui ont tendance à photographier la face Nord-Est du Cervin, qui est la plus caractéristique de l'iconographie des Alpes.

9. Daniel Girardin, op.cit., p.11. 10. Ibid., p. 12. Peter Knapp, Rothorn bei Lauenen, 1970 © Collection du Musée de l’Elysée Corinne Vionnet, Matterhorn, de la série Photo Opportunities, 2006 © Corinne Vionnet, Collection du Musée de l'Elysée

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Le Matterhorn de la série Photo Opportunities de Corinne Vionnet (2006) rassemble par couches successives une centaine de photos souvenirs réalisées par des anonymes. Par ce travail, l'artiste souhaite mettre en lumière le symbole voire l’identité d’un pays. Avec la photographie de Charles, Auguste, Georges et Marie Charnaux, Le Cervin, 1910-1920, on retrouve cette même face de la montagne, entourée de nuages, qu'elle semble percer et dominer tout comme le reste de la vallée. CÔNE La première forme, celle qui impose son esthétique au photographe par son aspect hiératique et massif, est le cône, une forme pyramidale facilement identifiable, celle que l’on retrouve dans la peinture, notamment celle de Ferdinand Hodler (1853– 1918). Elle est généralement réalisée frontalement, et elle devient dès les années 1860 une manière de photographier les faces et les sommets.10 La géographie de la montagne suscite l'intérêt depuis l'antiquité. Les montagnes sont des lieux de prédilection des scientifiques pour étudier l'évolution de la Terre et de sa géomorphologie. La géologie du Cervin est, par exemple, étudiée depuis le début du XIXe siècle, notamment par Emile Argand (1879-1940). L'avènement de la photographie de montagne se fait au milieu du XIXe siècle. Le trait ajouté sur l'image de Nicolas Crispini, Série Tracés, 18.07.2010, 2010 représente le parcours du photographe sur les pierriers, agglomérats de rocher se trouvant sur les glaciers. Suite à un sentiment de perte de repère sur ce sol de pierre, glace et terre, Crispini souhaite transcrire le tracé du dénivelé de son trajet effectué en montagne, créant ainsi la silhouette d'autres sommets. Avec Cône d’avalanche, Saas Almagell, Suisse, 2009, Pierre Vallet propose une comparaison entre une forme conique faite de débris laissés par une avalanche et le sommet d'une montagne, souvent représenté en photographie lorsque l'artiste se trouve à quelques centaines de mètres de la cime.

11. Daniel Girardin, texte de l'exposition. Pierre Vallet, Cône d’avalanche, Saas Almagell, Suisse, 2009 © Collection du Musée de l’Elysée

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DIFFUSION Dès le XIXe siècle, la photographie de montagne est diffusée massivement suite à un fort développement touristique, notamment grâce à l'alpinisme et l’industrialisation de la production et du commerce de la photographie. La photographie à vocation touristique crée des stéréotypes, mais elle n'en est pas moins intéressante par la recherche d'un style de représentation et par sa vision théâtrale de la montagne de moyenne altitude. La diffusion de ces images est également un modèle du genre.11 Afin de répondre à la demande croissante des images de montagne, plusieurs photographes ont créé de véritables entreprises, notamment : Adolphe Braun (1812-1877) ainsi que Charles (1852-1937), Auguste (1662-1930), Georges (1864-1930) et Marie Charnaux (1854-1932). Une très belle pièce de l'exposition est le portfolio de l'alpiniste anglais Oscar Eckenstein (1858-1921), The Alpine Portfolio Pennine Alps, 1889 qui présente une centaine de photographies de montagne emblématiques de l'époque, notamment celles du photographe alpiniste anglais William Frederick Donkin, The Matterhorn, from near Breuil, 1885. Photoglob Zurich (P.Z.), Engadin. Berninagruppe. Vom Piz Languard, 1890-1910 montre un autre pendant de la diffusion à travers le support de la carte postale. Photoglob utilisait un procédé technique appelé photochrome. Celui-ci permettait de coloriser les images à l'encre d'impression à partir de négatifs photographiques noir et blanc, en utilisant des plaques lithographiques. BIBLIOTHÉQUE NUMÉRIQUE Dans la dernière section de l'exposition, vous découvrez un vaste projet de numérisation, sur lequel le Musée de l'Elysée travaille depuis plus de deux ans. Le patrimoine exceptionel de la bibliothèque - plus de 20'000 ouvrages - retrace l'histoire de la photographie. Ce projet vise, d'une part, à rendre accessible cette collection importante et, d'autre part, de remplir les missions de transmission, de recherches et de conservation inhérentes au musée. En collaboration avec le Laboratoire des Humanités digitales de l'EPFL, une première version de cette plateforme qui contient près de 1600 ouvrages à l'heure actuelle est disponible sur photobookselysee.ch.

William Frederick Donkin, The Matterhorn, from near Breuil, 1885 © Collection du Musée de l’Elysée Mathilda Olmi © Musée de l’Elysée

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2. Fiche pour élève: abrégé de l'histoire de la photographie de montagne • La montagne : entre terre inconnue et conquête Au début des années 1700, la haute montagne est encore un territoire inexploré en Europe. Considérée comme un lieu à la fois magique et dangereux, les voyageurs préfèrent souvent la contourner. Pourtant, cent cinquante ans plus tard le massif des Alpes va attirer beaucoup de monde grâce au développement de l’alpinisme. Quand la photographie fait son apparition, elle permet aux premiers scientifiques « alpinistes » de documenter leurs recherches, dès les années 1850. Certains réalisent eux-mêmes les premiers clichés et d’autres se font accompagner de photographes professionnels.

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Le panorama permet la présentation d’une vue encore plus large que celle du champ visuel humain. En juxtaposant plusieurs images côte à côte, l’étendue du paysage montagneux est ainsi retranscrit. La stéréoscopie, ancêtre de la photographie 3D, crée une illusion d’image en relief. En plus de la hauteur et de la largeur, le spectateur perçoit la profondeur du paysage. Enfin, depuis l’invention de la photographie numérique, il est possible de concevoir des panoramas plus précis, plus réalistes et de très grands formats en couleur. L’assemblage des images est fait par ordinateur et non plus manuellement. L’intérêt des artistes pour la haute montagne continue. De nombreux artistes traitent toujours ce sujet fascinant.

Les pionniers de la photographie de montagne ont bravé les éléments avec un matériel extrêmement lourd – jusqu’à 250 kilos – porté par les guides. Grâce à leur courage, le public découvre enfin de véritables images de la haute montagne et des sommets d’Europe. • La montagne, un paysage à inventer L’intérêt des artistes pour la montagne naît d’abord par la littérature, notamment depuis le succès du poème d’Albrecht von Haller Die Alpen (1729) et du roman de Jean-Jacques Rousseau La Nouvelle Héloïse (1761). Les écrivains de l'époque, tout comme les peintres, n'ont pourtant jamais atteints les sommets. L’exploration artistique est donc restée de l’ordre de l’imaginaire. Avec la conquête de la haute montagne, le rapport de l’homme à la nature change. Les premières photographies dévoilent le « vrai » visage de la montagne. La photographie apporte un nouveau regard sur le paysage de la haute montagne. La montagne ne fait plus peur mais fascine et émerveille. En se focalisant sur son caractère grandiose, la photographie apporte un nouveau point de vue. Les images servent à transmettre le sentiment du sublime que l’homme ressent face à ce paysage, qui est à la fois d’une beauté et d’une violence extrêmes. •

Les stratégies techniques de la photographie de montagne Au fil du temps, les photographes élaborent différentes stratégies techniques pour transmettre l’image de la montagne au public. Chaque technique se concentre sur un aspect spécifique. La photographie de grand format sert à exprimer le côté spectaculaire, gigantesque et imposant de la montagne.

Textes de l'exposition La Photographie de montagne du Studio, espace découverte dédié au jeune public situé à l'étage supérieur


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3. Glossaire Pour chaque concept de l'exposition, son commissaire, Daniel Girardin, a élaboré une définition. Vous trouvez ces éclairages cidessous. A) POINTS DE VUE : FRONTALITE. Nom féminin. – fin XIXe. Beaux-arts : Caractère d'une œuvre faite pour n'être vue que de face, selon un axe perpendiculaire. Principe majeur de la représentation de la montagne en photographie, qui permet la restitution d'un sentiment de grandiose et de sublime. HORIZONTALITÉ. Nom féminin. – 1786. Beaux-arts : Caractère d’une œuvre représentée selon une orientation parallèle à l'horizon, généralement perpendiculaire à la verticale. Elle se regarde de gauche à droite et vice-versa. Principe de construction d’une image par plans successifs, qui restituent le sentiment d’infini et d’immensité. VUE AÉRIENNE / PLONGÉE. Nom féminin. – 1493. Beaux-arts : Caractère d’une représentation dont le point de vue est situé au-dessus du sujet. L’axe de perspective peut être oblique ou vertical. En photographie, l’usage topographique a rapidement été abandonné au profit de la création d’images abstraites dont l’esthétique restitue le caractère puissant de la montagne, dans une idée de domination métaphysique. VERTICALITÉ. Nom féminin. – 1752. Beaux-arts : Caractère, état, nature d’une représentation verticale. La verticalité signifie aussi l’élévation. Elle se regarde de haut en bas, et vice-versa. Principe de création d’une image qui restitue ce qui, en montagne, touche au vertigineux. DISTANCE. Nom féminin. – 1223. Beaux-arts : Caractère d’une représentation marquée par un écart spatial. La distance permet de revenir aux sources picturales de l’iconographie de la montagne. Elle peut être interprétée dans un sens figuré, dans le cas d’une distance critique. Ce dernier aspect est très présent dans la photographie contemporaine, avec une dimension politique très marquée en raison des problèmes climatiques et environnementaux. B) FORMES : CÔNE. Nom masculin. – 1552. Beaux-arts : Forme adoptant le principe géométrique d’une surface dont les génératrices passent par un point fixe qui est le sommet. Elle est cousine de la forme pyramidale, qui est plus nette et dessinée. C’est la forme primitive et originelle de la représentation de la montagne, le fil conducteur qui relie la peinture à la photographie.

Définitions présentées dans l'exposition Sans Limite. Photographies de montagne

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MATIÈRE. Nom féminin. – 1775. Beaux-arts : Forme matérielle des choses représentées par les artistes. Ce dont une œuvre d’art est faite. Elle est à la fois sujet et objet. La matière est la forme qui lie le plus directement la science et l’art dans la photographie, par le caractère esthétique et la beauté structurelle des sujets. ICÔNE. Nom féminin. - 1838. Beaux-arts : Forme générée par une représentation fidèle qui devient symbolique par répétition. Elle est celle qui représente toutes les autres, par son caractère sériel ou universel. Elle est reconnue immédiatement, repère incontournable d’une culture donnée. Dans la photographie, le Cervin est l’icône ultime, la montagne par excellence. C) DIFFUSION : DIFFUSION. Nom féminin. – 1587. Beaux-arts : Système de propagation des images au plus grand nombre, par procédés artisanaux ou industriels. Le caractère reproductif et sériel de la photographie a permis sa diffusion massive et industrielle depuis les années 1860. Par tirages multiples, par procédés mécaniques à l’encre, puis édition en livres imprimés. La diffusion des photographies de montagne est indissociable de l’essor du tourisme.


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4. Autour de la visite • Le Studio Dédié aux jeunes visiteurs et à leurs familles, « Le Studio » situé au dernier étage du musée, vise à rendre accessible le contenu de l'exposition en cours avec une approche ludique. Les visiteurs ont ainsi la possibilité de toucher et jouer avec les images présentées. En accès libre toute l'année durant les heures d'ouverture du musée. • Brochure Visite découverte (6-12 ans) Le Musée de l’Elysée pense à ses jeunes visiteurs en leur proposant des activités ludiques et pédagogiques adaptées à leur âge et à leurs besoins. La Brochure découverte est gratuite et disponible à l’entrée du musée ou en téléchargement. Ce livret permet aux familles et aux écoles de visiter le musée avec les enfants dès 6 ans, grâce à un parcours qu’ils suivent à leur rythme. Prix de la visite : Accès libre pour les classes et les accompagnants. Inscriptions et réservations des brochures : au minimum 10 jours à l’avance sur inscription@elysee.ch • Ateliers gratuits « Crée ta carte postale ! » Tous les mercredis après-midi (de 14h à 18h), le Musée de l’Elysée vous invite à concevoir votre propre carte postale de la montagne. L'atelier comprend collage, découpage, peinture, photographie et typographie. Pensez à prendre une adresse avec vous, le musée se chargera de l'envoyer pour vous. Informations et inscriptions: inscription@elysee.ch Les groupes sont priés de s'annoncer à l'avance au +41 21 316 99 11 • Visite guidée scolaire Les écoles peuvent bénéficier d’un parcours ludique et pédagogique avec un guide du musée. Prix de la visite : CHF 60.Inscriptions et réservations : au minimum 10 jours à l’avance sur inscription@elysee.ch Durée : 1 heure Participants : 25 personnes maximum

Atelier enfants, le Studio © Cecilia Suarez © Helmut V. Gilberstein / Musée de l'Elysée

Dossier pédagogique

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Derrière Sans limite. le rideau Photographies de montagne

Elysée Lausanne

Dossier pédagogique

5. Agenda Tous les mercredis (excepté le 1er mars) De 14h à 18h Ateliers gratuits « Crée ta carte postale ! » Ouvert à tous (dès 6 ans). Sans inscription. Les groupes sont priés de s'annoncer à l'avance au +41 21 316 99 11 Plus d’informations sur elysee.ch Tous les jours Les P’tits explorateurs et espace découverte dans le Studio Brochure découverte à l’accueil. Gratuit. 6-12 ans. Sans inscription Je 26.01, 23.02, 30.03, 29.04 Nocturnes Chaque dernier jeudi du mois, le musée est ouvert jusqu’à 20h Sa 4.02, 4.03, 1.04, 16h Visites guidées et entrées gratuites premier samedi du mois Sans inscription. Di 5.02, 5.03, 2.04, 14h Visites du dimanche en famille Gratuites pour les enfants de 6 à 12 ans. Adultes, incluse dans le billet. Sans inscription. Me 15.02, 15.03 et 19.04, 12h30 Visites guidées au menu Incluse dans le billet. Sans inscription. Me 15.02, 17h Visite enseignants Gratuite. Inscription sur elysee.ch Je. 23.02, 30.03 et 27.04 à 18h30 Sa 29.04 à 16h Suivez le(s) guide(s) - Spécial montagne Suivez une visite guidée originale à deux voix avec un guide du musée et un guide de montagne. Information sur demande à inscriptionelysee.ch

6. Informations pratiques Horaires Ma - Di, 11h - 18h Fermé le lundi, sauf les jours fériés Nocturnes chaque dernier jeudi du mois, le musée est ouvert de 18h à 20h.

Adresse 18, avenue de l’Elysée CH - 1014 Lausanne T + 41 21 316 99 11 F + 41 21 316 99 12 www.elysee.ch

Twitter @ElyseeMusee Facebook facebook.com/elysee.lausanne Hashtags #nolimit

Me 31.03, 9h Lecture de portfolios Ouverte à tous les photographes. Inscription sur elysee.ch

Le Musée de l’Elysée est une institution du Canton de Vaud

Jean Troillet, alpiniste et Daniel Giradin, commissaire de l'exposition © Musée de l'Elysée

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