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En Septembre 2014, la Fédération des Femmes du Québec a approché le Centre de lutte contre l'oppression des genres pour faire partie de son conseil d'administration. Nous étions alors membre depuis presqu'un an et notre implication au sein de la FFQ fut motivé à l'époque par une demande venant d'un groupe de femmes racisées qui, à la veille des États Généraux sur le féminisme, nous a fait part des violences auxquelles elles avaient dû faire face aux cours des mois et des années précédentes. Lors des États Généraux, de belles avancées ont été réalisées. Les membres de la FFQ semblaient sur la voie de sortie du féminisme blanc et discriminatoire envers les personnes racisées. On nous a demandé de jouer un rôle d'alliées pour faire face à une violence qui semble institutionnelle au sein de la Fédération. Nous l’avons joué avec ferveur et passion. Nous avons mis notre compréhension et notre vécu féministe au service de l'avancement du féminisme au sein de la FFQ. Un autre moment intéressant à notre avis fut le pas fait par les membres en incluant les enjeux d'orientation sexuelle et de lesbophobie aux sujets important pour la FFQ. Ce pas c'est par contre arrêté à un vote en sous-plénière et est resté lettre morte depuis. Malgré cet événement décevant, nous avons accepté l'invitation de la Fédération des femmes du Québec à participer à son effort d'inclusion. Si notre participation aux conversations en cours et notre expérience du passage du Centre des Femmes de Concordia vers le Centre de lutte contre l'oppression des genres pouvaient permettre à la FFQ de faire des avancées importantes d'un mouvement de femme vers un mouvement féministe, nous étions prêtes et prêts à mettre certains efforts dans l’aventure. Nous réalisons par contre que les efforts demandés étaient en fait des sacrifices importants. La FFQ est une Fédération et, comme telle, elle est redevable à ses membres et ce sont elles, individuellement ou en tant que représentantes d'organismes communautaires, de syndicats ou d’autres groupes qui ont le dernier mot sur ses politiques et ses orientations. Lors du congrès d'orientation qui a eu lieu les 27, 28 et 29 mars derniers, lors des votes sur les enjeux qui orienteront la Fédération pour les prochains 10 ans, nous avons pu voir son vrai visage, composé d’un écart entre la pensée inclusive et intersectionnelle de la Fédération et l'approche territoriale et violente des membres. Certaines des motions et des orientations présentées, discutées et devant être votées lors du congrès avaient pour but de continuer une conversation déjà entamée sur les questions d'identité et d'expression de genre. Une motion demandait même d'inclure et donc de visibiliser les discriminations et les oppressions auxquelles la Fédération des femmes du Québec s'attaquerait au cours des prochaines années. Pour le Centre de lutte contre l'oppression des genres, la visibilisation des enjeux et des intersections d'oppression est importantes. Il était important pour nous de nommer les enjeux et les discriminations basées sur l'identité et
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l'expression de genre… Toutes les identités et toutes les expressions de genre. Il était aussi important pour nous de reconnaître et de visibiliser les violences vécues par les personnes intersexuées et intersexes au Québec parce que, pour nous, le silence tue, opprime, minimise, invalide et mutile. Certains des arguments venant de femme s'identifiant comme féministes contre l’inclusion de… avaient malheureusement des airs de déjà-vu. Par exemple, certaines ont voulu tergiverser sur la définition du mot « genre ». En prétextant un besoin d'en arriver à une définition commune, elles ont demandé le report des discussions sur ce sujet. Pour elles, on leur imposait une définition et c'était contre-productif. Ce discours nous est familier : il ressemble à celui du président de l'université Concordia et de son directeur des résidences qui ont utilisé le même argument pour justifier leur refus d'instaurer des formations obligatoires sur le consentement et la culture du viol. Le discours de l'oppression n'est pas nécessairement un discours genré ; l’utilisation d’une tactique de silenciation par les membres mêmes de la Fédération des femmes du Québec en est une preuve. La Fédération des femmes du Québec n'a clairement pas compris la violence de ce silence. Pourtant, on aurait pu croire que les batailles du passé pour la reconnaissance des violences vécues par les femmes et amplifiées, cautionnées, même, par une culture du silence autour de la sphère privée familiale aurait été un outil bien intégré et utilisé par ses membres. On aurait pu croire que nos outils de militantisme acquis au cours de décennies de féminismes auraient permis cette compréhension du besoin de visibilité et d'appui. Nous avons cru que la Fédération des femmes du Québec était un espace, par défaut, féministe. Nous avons cru que ce féminisme entrait, avec quelques décennies de retard, dans l’ère du féminisme intersectionnel. Suite au congrès, nous constatons que nous avions tort. La Fédération des femmes du Québec se targue d'être porteuse de la cause féministe au Québec. À certains égards, elle l'est. Toutefois, le féminisme porté par les membres de la FFQ affiche un historique certain d'exclusion. En ce sens, les femmes qui sont au cœur des organismes qui forment la Fédération des femmes du Québec sont représentatives de la population Québécoise et des institutions auxquelles nous devons faire face. De même, les syndicats qui en font partie représentent les mêmes personnes qui participent activement aux refus de services et aux oppressions auxquelles les personnes intersexuées, intersexes, trans ou ayant une expression de genre non conforme font face. Tout comme les discours des sénateurs et des députés conservateurs du gouvernement fédéral, le discours de ces femmes est centré sur les organes sexuels dits « mâles » et la violence qui y est associée. Tout comme le parti conservateur, la Fédération a utilisé des tactiques procédurales de vote et de report de vote à une date ultérieure pour balayer les réalités non conformes à leur vision de notre société.
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La Fédération des femmes du Québec est la représentante d'un certain nombre de groupes de femmes. Elle n’est toutefois pas la fédération des féministes du Québec. Les membres de cette Fédération des Féministes du Québec imaginaire aurait probablement été au diapason des personnes les représentants. L'écart que nous avons pu voir entre la vision de la Fédération et la vision de ses membres est clair. Il y a un fossé énorme et nous y avons été jetées. Nous avons été invité*es à participer à une conversation qui n'avait clairement pas été autorisée ou désirée par les membres de la Fédération des femmes du Québec. La conversation sur l'inclusion, vous devez l'avoir entre vous, membres de la Fédération des femmes du Québec. Pour le moment, votre espace est violent et dangereux. Vos excuses et vos discours sont rationnellement faibles et fortement exclusifs. Le prix à payer pour être membre de la Fédération des femmes du Québec est actuellement la normalisation des identités et le cautionnement de la stérilisation forcée, des mutilations génitales et des hormonothérapies non consensuelles. Conséquemment, la Fédération des femmes du Québec ne représente pas notre féminisme. Nous avons compris le message. Aux membres qui comprendront le nôtre, nous souhaitons bonne chance au sein de cette Fédération. Nous espérons que vos privilèges vous permettront d'être nos alliées de l’intérieur, d’être celles qui feront avancer le débat. Veuillez, par la présente, accepter la démission du Centre de lutte contre l'oppression des genres du Conseil d'administration de même qu’à titre de membre de la Fédération des femmes du Québec.